Réaction inflammatoire

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Les tissus vivants se caractérisent par leur aptitude à réagir à une agression. Dans la réaction inflammatoire, l’agression touche avant tout le tissu conjonctif entraîne une libération de médiateurs chimiques qui vont déclencher et régler le déroulement de la réaction inflammatoire.

Définition :

L’inflammation ou réaction inflammatoire est un phénomène réactionnel mis en oeuvre par l’organisme chaque fois que l’intégrité de ses constantes morphologiques et biologiques est menacée.

L’inflammation comprend l’ensemble des réactions locales et générales de l’organisme à toute agression tissulaire, qu’elle soit d’origine infectieuse ou non infectieuse.

L’inflammation n’est donc pas synonyme d’infection.

Les causes de l’inflammation sont extrêmement variées.

L’inflammation est le plus souvent bénéfique.

Son but est de rétablir l’homéostasie des tissus dont elle prépare la réparation.

Parfois, la réaction inflammatoire dépasse ce but et devient néfaste comme dans les maladies inflammatoires chroniques.

La réaction inflammatoire est éventuellement associée à la réaction immunitaire mais le plus souvent il s’agit d’une réponse stéréotypée non spécifique particulière et doit permettre aux défenses immunitaires d’accéder à la région endommagée.

Territoire de l’inflammation :

A – Description :

A côté du contingent tissulaire très spécialisé, l’organisme comporte un ensemble tissulaire ubiquitaire que l’on retrouve dans tous les territoires et qui est qualifié de tissu conjonctif non spécialisé.

Toute réaction inflammatoire nécessite pour se produire la présence de tissu conjonctif avec :

• sa substance fondamentale plus ou moins imbibée d’eau

• ses fibres conjonctives en particulier de collagène.

• ses éléments cellulaires, fibroblastes, histiocytes, mastocytes

• et surtout le réseau vasculaire terminal dit de la micro-circulation qui comporte des artérioles terminales ou pré-capillaires, un réseau capillaire contrôlé par des sphincters, un canal préférentiel seul utilisé à l’état normal, une veinule de drainage, continuant ce canal préférentiel et collectant les anses capillaires, .enfin des anastomoses artériolo-veinulaires, permettant de détourner le sang du lit capillaire.

Le tout est complété par un réseau lymphatique contribuant au drainage des liquides accumulés dans la substance fondamentale.

B – Fonction :

A la suite d’une lésion tissulaire, se déroule dans le tissu conjonctif vascularisé une série de phénomènes locaux modulés par des facteurs humoraux.

Les conséquences de la réaction inflammatoire sont conditionnées par plusieurs facteurs :

• Tout d’abord l’agressivité et la nocivité de la cause qui a déclenché l’inflammation.

• Le siège de la réaction inflammatoire : plus il se situera à distance des tissus nobles et meilleure sera l’évolution de l’inflammation.

• La richesse du réseau vasculaire car c’est par les vaisseaux que sont acheminées les cellules (polynucléaires, monocytes et lymphocytes) et les substances contenues dans le plasma indispensables au bon déroulement de la réaction inflammatoire.

• Les phénomènes généraux nerveux, hormonaux et immunitaires qui jouent également un rôle essentiel.

Causes de l’inflammation aiguë :

Elles sont très variées mais déclenchent pratiquement toujours la réaction inflammatoire par le biais de la mort cellulaire.

A – Causes exogènes :

• Traumatismes mécaniques accompagnés ou non d’une plaie tissulaire

• Agents chimiques et surtout les toxiques acides et bases : réaction inflammatoire dans le tissu sous cutané après perfusion d’antimitotiques en principe administrés par intraveineuse

• Agents physiques: ultraviolets; radiations ionisantes, brûlures ; froid

• Micro-organismes: bactéries, virus, parasites, agents fungiques.

B – Causes endogènes :

• Ischémies aiguës secondaires à une thrombose vasculaire

• Réactions antigène-anticorps: réaction inflammatoire d’origine immunitaire

– ex : inflammation de la muqueuse bronchique au cours d’une crise d’asthme ou de la muqueuse nasale dans les rhinites allergiques.

• Cristaux d’urate dans la crise aiguë de la goutte.

L’agression : cellules et médiateurs chimiques

Les médiateurs qui interviennent dans les réactions inflammatoires sont :

• d’une part des lignées cellulaires spécialisées,

• d’autre part des substances chimiques ou médiateurs humoraux, dont l’ensemble représente les moyens de défense de l’organisme.

A – Cellules de la réaction inflammatoire :

La fonction principale de la réaction inflammatoire est d’amener des phagocytes sur le lieu de l’agression.

La fonction de ces cellules est d’éliminer les débris particulaires par phagocytose.

Pendant l’inflammation les phagocytes circulants polynucléaires neutrophiles, monocytes, macrophages – sont mobilisés par chimiotactisme et migrent électivement dans le tissu inflammatoire.

A la phase précoce de la réaction inflammatoire, les cellules prédominantes sont les polynucléaires (PN) neutrophiles ; au stade plus tardif ce sont les macrophages.

Dans les réactions allergiques les éosinophiles sont présents en grande quantité, alors que dans les réactions d’hypersensibilité retardée les lymphocytes sont les plus nombreux.

Les cellules normalement résidentes dans les tissus comme les mastocytes, les fibroblastes et les macrophages tissulaires interviennent dans le passage à la chronicité.

1- Polynucléaire neutrophile :

Les PN sont produits par la moelle (10 11/jour) en 14 jours environ. Le PN neutrophile circulant mature est une cellule terminale à demi-vie courte (environ 8h.)

Environ 50% de ces PN neutrophiles sont adhérents à l’endothélium vasculaire et représentent le pool marginé susceptible d’être relâché rapidement dans la circulation ou de migrer dans les tissus.

La présence de ces cellules dans les tissus est caractéristique de l’inflammation aiguë.

Le PN neutrophile mature se caractérise par un noyau multilobé et un cytoplasme riche en granules de 2 types : les granules primaires denses azurophiles de grande taille et les granules secondaires spécifiques plus petits.

Les constituants des granules primaires ont la propriété à la fois de tuer et de digérer les micro-organismes. Ils contiennent des lysosymes et de nombreux enzymes :

• les hydrolases acides qui agissent sur la digestion complète de la particule d’endocytose.

• les myéloperoxydases impliqués dans la production des radicaux libres toxiques de l’oxygène.

Les PN neutrophiles métabolisent l’acide arachidonique dont le produit principal est le leucotriène B4 (LTB4) qui, avec le facteur activant les plaquettes (PAF), amplifie les fonctions des PN neutrophiles.

Les PN neutrophiles expriment les récepteurs membranaires des sous classes IgG des immunoglobulines, des fragments du complément, des peptides et lipides chimiotactiques.

Les PN neutrophiles meurent dans les tissus et sont phagocytés par les macrophages.

La mort des PN neutrophiles pourrait agir comme le déclenchement de la résolution de la réponse inflammatoire.

2- Monocyte – Macrophage :

Ces cellules jouent un rôle essentiel dans les réactions de défense, non seulement à cause de leur capacité de phagocytose mais aussi comme support de la prolifération lymphocytaire et de la présentation antigénique.

Produits par la moelle, les monocytes matures sont relâchés dans le circulation avec une demi-vie d’environ 1 jour.

Il n’existe ni stockage médullaire de monocytes, ni de pool marginé.

Les monocytes circulants constituent une population hétérogène, un peu plus grande que les lymphocytes.

La destination ultime de ces cellules sont les tissus où elles se transforment en macrophages résidents.

Monocytes et macrophages présentent des caractéristiques communes : un système de Golgi très développé, de nombreuses granules cytoplasmiques, des récepteurs de surface pour les complexes anticorps ou monomètres IgG, des récepteurs pour IgE, des récepteurs CR1 et CR3 pour les fractions du complément, les récepteurs pour cytokines et les facteurs de croissance et les récepteurs de chimiotactisme.

Ces cellules ont une activité de phagocytose, produisent des radicaux libres de l’oxygène et contiennent de nombreux enzymes lysozomiales comme les PN neutrophiles mais différents par le type de leur peroxydase. Ils métabolisent l’acide arachidonique par les voies de la cyclo-oxygénase et de la lipoxygénase, en produisant respectivement le thromboxane A2 (TXA2) et le LTB4.

Action de l’aspirine.

Le macrophage résident est plus grand que le monocyte circulant, a une activité métabolique plus importante et exprime un nombre plus important de récepteurs membranaires.

Une des fonctions importantes du macrophage est sa transformation d’un état de repos à un macrophage inflammatoire activé.

Les cellules activées sont plus grandes que les cellules résidentes au repos, contiennent plus de granules lysozomiales et de mitochondries.

Elles ont une capacité plus grande de phagocytose des particules opsonisées, d’attachement à des surfaces, de former plus de pseudopodes, et contiennent un nombre plus important de vésicules de pinocytose, une quantité supérieure d’enzymes fibrinolytiques et une quantité supérieure de générer des anions superoxydes.

La cellule activée peut dériver de la cellule résidente mais il est actuellement admis qu’elle se développe à partir de monocytes nouvellement recrutés.

Le macrophage activé est, par ailleurs, capable de sécréter de très nombreux médiateurs de l’inflammation, dont les plus importants sont l’interleukine 1 (IL1), l’interleukine 6 (IL6), le facteur de nécrose tumorale (TNF a), le PAF, certains facteurs du complément, les interférons a et b, et différents facteurs de croissance.

Le spectre d’activités du macrophage activé sur le lieu de l’inflammation est si vaste qu’il suggère la possibilité d’une auto-activation.

3- Polynucléaire éosinophile :

Le recrutement de PN éosinophiles est associé à des conditions allergiques comme l’asthme ou à des infections parasitaires.

Ce sont des cellules ayant une plus grande capacité de produire des superoxides d’anions que le PN neutrophile, une capacité plus faible de phagocytose, et dont la dégranulation procède par fusion lysozomiale avec la membrane plasmatique.

La production de PN éosinophiles est impliquée dans la destruction d’organismes trop larges pour la phagocytose.

Les PN éosinophiles sont la source principale de leucotriène C4 (LTC4) et de PAF.

4- Mastocyte :

Les mastocytes sont très nombreux dans le tissu conjonctif et la membrane muqueuse.

C’est une population hétérogène définie par leurs enzymes et leur contenu en glycosaminoglycanes et, comme leur correspondant dans le sang circulant le polynucléaire basophile, est la source principale d’histamine.

Les mastocytes ont des récepteurs pour les IgE.

Ils produisent de l’histamine, la prostaglandine D2 (PGD2), des leucotriènes, des hydrolases acides et des facteurs chimiotactiques.

Leur réactivité aux traumatismes et aux facteurs immunologiques implique ces cellules dans l’initiation de la réaction inflammatoire.

B – Les médiateurs de l’inflammation :

La réponse globale à l’inflammation est déterminée par l’interaction de nombreux médiateurs, dont quelques uns sont responsables de toutes les fonctions.

Ils agissent soit en synergie pour amplifier la réaction, soit en opposition pour freiner la réaction.

1- Classement par origine :

a- Médiateurs d’origine cellulaire locale

• Amines biogènes : histamine et sérotonine. Inflammation médiée par les IgE .

Histamine : produite par décarboxylation à partir de l’histidine.

Stockée dans les mastocytes et les basophiles plaquettes

Diverses actions : contraction des muscles augmentation de la perméabilité vasculaire, attraction des polynucléaires éosinophiles blocage de certaines fonctions lymphocytaires.

Action par l’intermédiaire de récepteurs spécifiques H1 ou H2.

Sérotonine : produit par décarboxylation du 5 hydroxytryptophane.

Stockée dans les granules des plaquettes ; tractus gastro-intestinal et cerveau, elle augmente la réponse des phagocytes au chimiotactisme.

• Médiateurs d’origine lipidique : dérivés de l’acide arachidonique.

L’acide arachidonique est un acide gras à 20 atomes de carbone formé par dénaturation des phospholipides membranaires sous l’action des phospholipases des leucocytes et des plaquettes phospholipase A2 ou phospholipase C.

L’acide arachidonique est dégradé par deux voies différentes : voie de la cyclo-oxygénase qui donne naissance : prostaglandines PGG2, thromboxane prostacycline (PGE2) ou autres prostaglandines : effet proche de celui de l’histamine, moins rapide et plus prolongée, de vasodilatation et d’augmentation de la perméabilité capillaire, thromboxane A2 – vasoconstriction. voie de la lipo-oxygénase qui donne naissance aux leucotriènes.

Le LTB4 produit par les polynucléaires neutrophiles, basophiles et les macrophages est un puissant agent chimiotactique.

Les leucotriènes C et D sont de puissants vasoconstricteurs.

Le facteur d’activation des plaquettes (PAF) produit par différentes cellules : plaquettes, leucocytes, macrophages et cellules endothéliales est responsable de l’agrégation des plaquettes et de l’attraction et de l’activation des polynucléaires neutrophiles, éosinophiles et des macrophages.

b- Médiateurs d’origine plasmatique

• les produits du complément C3a C5a amplifient de façon considérable la réaction inflammatoire en augmentant la perméabilité capillaire, le contraction des muscles lisses, la dégranulation des mastocytes et des basophiles, la sécrétion des enzymes lysozomiales par les polynucléaires neutrophiles et les phagocytes mononucléés.

C5a a une action chimiotactique puissante sur les PN neutrophiles et les éosinophiles.

• les facteurs de la coagulation facteur XII ou facteur Hageman augmente la perméabilité capillaire, le système des kinines comprend la bradykinine contraction des muscles lisses, augmentation de la perméabilité vasculaire, douleurs locales, la kallicréine.

c- Médiateurs d’origine cellulaire : les cytokines

Ces agents règlent les interactions entre les cellules de la réaction inflammatoire et agissent comme progéniteurs dans la moelle.

• Interleukines : Famille de glycoprotéines8.

IL-1 (IL-alpha et bêta) : produit par les monocytes activés/macrophages et par beaucoup d’autres cellules (endothéliales, épithéliales, PN neutrophiles).

Activation des lymphocytes T et B mais aussi des macrophages.

Production de médiateurs secondaires des cellules endothéliales. expression de ICAM-1 molécule d’adhésion cellulaire ; des fibroblastes

Libération des PN neutrophiles dans la moelle.

IL2 : produit par les lymphocytes T helper.

Facteur de croissance des lymphocytes T. Augmentation de la prolifération lympho B et de la production des AC IL3-IL6 .

IL6 : produit par les macrophages, Stimulation de la différenciation et de la prolifération cellulaire B.

• Interféron IFN Inhibition de la réplication virale.

IFN γ produit par les lymphocytes T.

Stimulation de l’expression du récepteur des cellules présentant l’antigène. Augmentation de l’activité des lymphokines et de la prolifération lymphocytaire B en synergie avec IL2.

• Facteur de nécrose tumorale TNF Médiateur majeur de l’inflammation,

Produit par les lymphocytes activés et par les monocytes/macrophages, Induction de l’expression des leucocytes et des molécules d’adhésion endothéliale en synergie avec IL1 et IFN.

Les cytokines sont des facteurs puissants produits essentiellement par les lymphocytes et les monocytes/macrophages après une stimulation immunologique ou de façon non spécifique après la phagocytose ou une lésion cellulaire.

Les effets de IL1 et TNF sur la prolifération et l’activation cellulaire indiquent qu’ils servent à amplifier et à prolonger les réaction inflammatoires.

2- Interaction des différents médiateurs :

Ils provoquent des réactions en cascade mettant en jeu la coagulation, la fibrinolyse, les kinines, le système du complément qui est situé au carrefour de tous ces systèmes humoraux.

L’activation des médiateurs peut se répéter au cours du processus inflammatoire : ex : la dégranulation des mastocytes qui se produit tout au début sous l’influence du traumatisme initial pourra se reproduire à nouveau sous l’influence des enzymes des PN.

ex : les PN d’abord attirés par le chimiotactisme des germes pourront plus tard être à nouveau attirés par les lymphokines sécrétées par les cellules arrivées secondairement sur place.

ex : les radicaux peroxydes élaborés par les PN peuvent augmenter la synthèse des prostaglandines en stimulation l’activité phospholipasique.

Conclusion :

Dans la vie quotidienne, agressions permanentes mais minimes aisément contrôlées par tous ces mécanismes = inflammation physiologique.

Quand les agressions sont très importantes ou à la suite d’une déficience des moyens de défense = «inflammation maladie» avec phénomènes locaux ou généraux.

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