Apport de la biopsie pulmonaire transthoracique dans le diagnostic de pneumonie organisée

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Introduction :

La pneumopathie organisée (PO), auparavant dénommée bronchiolite oblitérante avec pneumopathie organisée ou BOOP, est une atteinte inflammatoire et fibroproliférative du poumon dont le diagnostic reste difficile. Le diagnostic de présomption repose sur des critères cliniques et radiologiques.

Apport de la biopsie pulmonaire transthoracique dans le diagnostic de pneumonie organisée

Cependant, ni le tableau clinique peu spécifique (toux, dyspnée, fièvre mimant un processus infectieux) ni la présentation radiologique variée (opacités alvéolaires bilatérales migratrices, formes infiltrantes diffuses mimant une pneumopathie interstitielle ou nodule isolé évoquant un cancer) ne permettent un diagnostic de certitude. Celui-ci requiert des prélèvements histologiques permettant la mise en évidence des bourgeons conjonctifs endoalvéolaires constituant la lésion élémentaire de la PO. Ce diagnostic nécessite un geste invasif qui permet le recueil d’un fragment de tissu pulmonaire. Il peut être obtenu classiquement soit par une biopsie pulmonaire transbronchique (BTB), soit par une biopsie pulmonaire chirurgicale (BC).

Néanmoins la BTB fournit des prélèvements de qualité variable et l’anesthésie générale nécessaire à la BC n’est pas toujours possible. Il n’est donc pas rare, notamment chez des patients fragiles, que l’on renonce à une preuve histologique pour porter le diagnostic de PO et que l’on instaure une corticothérapie d’épreuve en se basant sur des critères radiocliniques, aidés d’un lavage broncho-alvéolaire. Une telle attitude devrait être évitée autant que possible car la probabilité d’erreur diagnostique est non négligeable en raison des nombreux diagnostics différentiels de la PO. Cela peut avoir de lourdes conséquences, que ce soit par la méconnaissance d’une pathologie maligne, par les effets néfastes d’une corticothérapie sur une pathologie négligée telle qu’une mycobactériose, ou encore par les risques d’une corticothérapie prolongée chez des sujets âgés. Afin de limiter les diagnostics de présomption, il nous semble intéressant de discuter l’intérêt de la biopsie pulmonaire transthoracique (BTT) guidée par scanner dans le diagnostic histologique de PO. Pour cela, six observations personnelles sont rapportées puis discutées en fonction des données de la littérature sur le sujet et d’une comparaison entre les avantages et les inconvénients de chaque technique diagnostique.

Méthodes :

Six observations de patients, suivis dans deux services de pneumologie de Franche Comté entre septembre 2005 et avril 2007, ayant présenté un tableau radioclinique compatible avec une PO et chez qui a été réalisée une BTT scanoguidée à visée diagnostique, sont rapportées.

Résultats :

Observation n° 1 :

Un homme a été hospitalisé pour dyspnée de repos,fièvre à 38,5 °C et hémoptysies. Il avait une PaO2 à 65 mmHg sous 4 L/min d’oxygène (1 mmHg = 7,5 kPa) et une CRP à 273 mg/L.

Tomodensitométrie thoracique non injectée en fenêtre parenchymateuse visualisant la biopsie transthoracique
A
B
B

Fig. 1.
A) Tomodensitométrie thoracique non injectée en fenêtre parenchymateuse visualisant la biopsie transthoracique à l’aiguille coaxiale dans
une condensation alvéolaire lobaire moyenne.
B) Microscopie optique, grossissement × 100, coloration Hématoxilline-Eosine-Safran. Bourgeons conjonctifs endoalvéolaires riches en collagène
avec aspect caractéristique en aile de papillon d’un bourgeon conjonctif communiquant entre deux alvéoles par un pore de Köhn.

Le scanner thoracique révélait un syndrome interstitiel bilatéral sous la forme de lésions réticulaires prédominant dans le champ pulmonaire droit et aux lobes inférieurs, associé à une condensation alvéolaire lobaire moyenne. Une antibiothérapie par amoxicilline acide clavulanique et ofloxacine a été débutée. Sous ce traitement, l’hypoxémie s’est aggravée et les lésions radiologiques se sont étendues. L’anesthésie générale nécessaire à une BC était contre-indiquée par l’état respiratoire précaire du patient mais une BTT sous scanner de la condensation lobaire moyenne a pu être réalisée. Il n’y a pas eu de complication du geste. L’examen histologique a conclu à une PO.

Une corticothérapie à 0,75 mg/kg/j a été poursuivie puis progressivement diminuée sur une durée totale de six mois. Les traitements par atorvastatine et amiodarone ont été arrêtés dans l’hypothèse d’une PO d’origine médicamenteuse. Une guérison clinique et radiologique a été obtenue après deux mois de corticothérapie. Un an après l’arrêt de la corticothérapie, aucune rechute n’a été observée.

Observation n° 2 :

Tomodensitométrie thoracique injectée en fenêtre parenchymateuse
Fig. 2. Tomodensitométrie thoracique injectée en fenêtre parenchymateuse montrant la disparition du syndrome alvéolo-interstitiel après corticothérapie ; persistance des lésions d’emphysème connues.

Un homme a été hospitalisé pour dyspnée de repos malgré une antibiothérapie par ceftriaxone et ofloxacine depuis cinq jours. Il était apyrétique mais présentait des crépitants du champ pulmonaire droit à l’auscultation. La PaO2 était à 45 mmHg sous air et la CRP à 43 mg/L.

Une nouvelle antibiothérapie par ceftriaxone et spiramycine a été menée pendant 12 jours, sans amélioration. La fibroscopie bronchique était normale. Une BTT sous scanner a été réalisée dans une condensation parenchymateuse lobaire moyenne. Les suites du geste ont été simples. L’examen histologique a conclu à une PO.

Après consultation de la littérature, la simvastatine a été incriminée et arrêtée. Une corticothérapie a été débutée à 0,75 mg/kg/j puis progressivement diminuée sur six mois. Le patient a récupéré son état respiratoire de base et la radiographie thoracique s’est normalisée, sans rechute neuf mois après l’arrêt de la corticothérapie.

Observation n° 3 :

Un menuisier a consulté pour toux fébrile et perte de 8 kg en un mois. La PaO 2 était à 63 mmHg sous air et la CRP à 275 mg/L. Le scanner thoracique montrait des condensations parenchymateuses en mottes bilatérales. Les symptômes et l’aspect radiologiques ne se sont pas modifiés après 10 jours d’antibiothérapie par ceftriaxone et ciprofloxacine.

A
A
B
B

Fig. 3.
A) Tomodensitométrie thoracique injectée en fenêtre parenchymateuse ; opacités alvéolaires en mottes confluentes de tout le poumon droit,
associées à un aspect de verre dépoli et à un épanchement pleural droit de moyenne abondance.
B) Microscopie optique, grossissement × 200, coloration Hématoxilline-Eosine-Safran. Bourgeons conjonctifs endoalvéolaires lâches, infiltrats
inflammatoires de l’interstitium et présence de polynucléaires éosinophiles évoquant une origine médicamenteuse.

La fibroscopie avec biopsies d’éperons était normale, le lavage broncho-alvéolaire montrait une alvéolite à neutrophiles et l’aspiration bronchique trouvait un Haemophilus influenzae sensible à l’antibiothérapie débutée. Une BTT scano-guidée a été réalisée dans une condensation parenchymateuse lobaire inférieure gauche. Le geste s’est compliqué d’un pneumothorax gauche minime immédiat, non majoré au contrôle à cinq minutes, de résolution spontanée. L’analyse histologique des biopsies a conclu au diagnostic de PO. Le sildénafil, dont la responsabilité n’était pas exclue, a été arrêté. Une corticothérapie a été débutée à 0,75 mg/kg/j puis progressivement diminuée, ce qui a permis une disparition complète des lésions pulmonaires. Après six mois de suivi, aucune rechute n’était constatée.

Observation n° 4 :

Une femme traitée par amiodarone pour fibrillation auriculaire a été hospitalisée pour bronchite aiguë, évoluant rapidement vers une détresse respiratoire fébrile. En l’absence d’amélioration après 10 jours d’antibiothérapie, une BTT sous scanner à visée diagnostique a été réalisée au niveau du lobe supérieur gauche, sans complication. Le diagnostic histologique retenu était celui de PO extensive. La corticothérapie a été poursuivie à la dose de 1 mg/kg/j et progressivement diminuée sur quatre mois, permettant un retour à l’état clinique habituel.

Observation n° 5 :

A
A
B
B

Fig. 4.
A) Tomodensitométrie thoracique injectée en fenêtre parenchymateuse ; condensations parenchymateuses bilatérales étendues avec bronchogramme
aérien ; verre dépoli au sein d’épaississements interstitiels réalisant un aspect de micromailles.

B) Microscopie optique, grossissement
× 100, coloration Hématoxilline-Eosine-Safran. Nombreux bourgeons conjonctifs endoalvéolaires avec début de destruction de l’architecture
pulmonaire par le processus fibrosant. Zones d’hémorragie alvéolaire.

 

lésions de fibrose bi-basale
Fig. 5. Tomodensitométrie thoracique injectée en fenêtre parenchymateuse ; quelques lésions de fibrose bi-basale avec distorsions bronchiques et aspect de micromailles.

Une femme traitée par simvastatine pour hypercholestérolémie a consulté pour toux sèche et dyspnée d’effort depuis trois mois, peu améliorées par plusieurs antibiothérapies successives. La saturation en oxygène sous air était à 94 %, il n’y avait pas de fièvre mais des râles crépitants du champ pulmonaire droit à l’auscultation. La CRP était à 118 mg/L. Le scanner thoracique montrait une condensation alvéolaire lobaire inférieure droite avec bronchogramme aérien, extensive malgré l’antibiothérapie. La fibroscopie bronchique avec lavage broncho-alvéolaire n’évoquait ni une étiologie infectieuse ni néoplasique. Une BTT a été réalisée dans la condensation pulmonaire droite, sans complication.

L’analyse histologique a conclu au diagnostic de PO. La simvastatine a été incriminée et arrêtée. Une corticothérapie 0,3 mg/kg/j a été débutée et progressivement diminuée sur trois mois, permettant la disparition de la toux et la normalisation de la radiographie thoracique. Trois semaines après l’arrêt de la corticothérapie, la patiente a présenté une majoration de dyspnée avec fièvre à 38° et CRP à 188 mg/L. Un syndrome alvéolaire lobaire supérieur droit était apparu. Ces symptômes n’ont pas été améliorés par une antibiothérapie de 10 jours et le diagnostic de rechute de PO a été retenu. Une corticothérapie a été reprise à 0,5 mg/kg/j, ce qui a entraîné une disparition des lésions radiologiques un mois plus tard. La corticothérapie a été diminuée à 0,3 mg/kg/j depuis un mois sans rechute clinique ni radiologique.

patiente en décubitus ventralFig. 6.
Tomodensitométrie thoracique non injectée en fenêtre parenchymateuse
(patiente en décubitus ventral) ; biopsie transthoracique
dans la condensation alvéolaire lobaire inférieure droite.

 

 

Observation n° 6 :

hémorragie alvéolaire minime
Fig. 7. Tomodensitométrie thoracique non injectée en fenêtre parenchymateuse (patient en décubitus ventral) : biopsie transthoracique dans une condensation alvéolaire avec bronchogramme aérien lobaire inférieur gauche ; hémorragie alvéolaire minime autour du point de ponction ; verre dépoli du lobe inférieur droit.

Un homme a présenté au cours d’un voyage en Asie une toux avec expectorations purulentes et amaigrissement de 3 kg en 10 jours. Le scanner thoracique montrait des condensations parenchymateuses bilatérales avec lésions en verre dépoli. Après plusieurs antibiothérapies, l’état clinique s’était amélioré mais les lésions radiologiques persistaient. La fibroscopie avec lavage broncho-alvéolaire et biopsies d’éperons était normale sur le plan histologique et microbiologique. Une BTT sous scanner a été réalisée dans une condensation alvéolaire lobaire inférieure gauche.

Celle-ci s’est compliquée d’une hémorragie alvéolaire minime autour de la zone de ponction et d’un pneumothorax gauche minime, asymptomatique, de résolution spontanée. L’analyse histologique a conclu à une PO. Dans le même temps, sous une nouvelle antibiothérapie par imipénème et ciprofloxacine, et en l’absence de toute corticothérapie, le patient a présenté une amélioration clinique et radiologique, avec à trois mois une disparition complète des lésions alvéolaires au scanner, où ne persistaient que quelques plages de verre dépoli. Le diagnostic de PO satellite d’une pneumopathie infectieuse a été finalement retenu et aucun traitement supplémentaire n’a été réalisé. Le patient n’a présenté aucune récidive après 11 mois de surveillance.

Il faut souligner que pour ces six observations, la BTT a toujours été réalisée par le même radiologue ou sous son contrôle, avec une aiguille coaxiale de taille 20 G et prélèvement de quatre biopsies et d’un produit d’aspiration. Ces prélèvements ont toujours été analysés par la même anatomopathologiste, spécialisée en pathologie pulmonaire.

Discussion :

Sur la base de ces observations personnelles, la BTT semble être une alternative possible à la BTB pour le diagnostic histologique de PO. Afin d’étayer cette hypothèse, les deux méthodes diagnostiques actuelles de PO seront décrites et leurs avantages et inconvénients évoqués. En comparant les données de la littérature aux observations rapportées, l’intérêt de la BTT dans le diagnostic de PO sera discuté.

Méthodes actuelles de diagnostic de PO :

Jusqu’à présent le diagnostic de certitude de PO repose sur la BTB ou la BC, qui mettent en évidence les bourgeons conjonctifs alvéolaires, lésion élémentaire de la PO. La BTB est souvent la méthode diagnostique de première intention ; le choix de recourir secondairement, ou parfois d’emblée, à la BC dépend du degré de suspicion radioclinique de PO et du risque d’erreur diagnostique. Il existe en effet de nombreux diagnostics différentiels cliniques ou radiologiques de PO et certaines pathologies peuvent s’accompagner de lésions histologiques identiques.

C’est le cas par exemple de la granulomatose de Wegener, où l’on peut trouver des bourgeons conjonctifs endoalvéolaires en périphérie des lésions granulomateuses ou même comme anomalie histologique principale. Ces bourgeons conjonctifs peuvent aussi constituer une lésion histologique accessoire autour d’un cancer bronchique, d’une pneumonie, dans la pneumopathie d’hypersensibilité, la pneumopathie interstitielle non spécifique ou encore la pneumopathie chronique à éosinophiles. Pour tenir compte de ces multiples diagnostics différentiels, la BC et la BTB ont chacune des avantages mais aussi des inconvénients.

La BC a l’avantage d’être orientée (les zones pulmonaires pathologiques étant macroscopiquement bien visibles pour le chirurgien) et donc associée à une excellente rentabilité, soit un pourcentage de prélèvements exploitables de 98 à 100 % dans la littérature. Elle fournit des prélèvements de grande taille (de l’ordre de quelques centimètres cube), contenant des structures bronchiolo-vasculaires centro-acinaires permettant d’apprécier au mieux la topographie des lésions et de s’assurer de l’absence d’autre lésion histologique que les bourgeons endoalvéolaires. La BC est la technique de référence pour le diagnostic de PO ; elle est indispensable lorsque le tableau clinico-radiologique est atypique ou que la BTB est non contributive.

Cependant, il s’agit d’un geste invasif, aux suites opératoires lourdes, bien qu’allégées par le développement de la
thoracoscopie vidéo-assistée. Elle requiert la disponibilité d’un personnel médical et paramédical conséquent ainsi que d’un bloc opératoire et surtout elle nécessite une anesthésie générale, ce qui peut la contre-indiquer chez des patients fragiles ou sévèrement atteints sur le plan respiratoire.

La BTB consiste à placer l’extrémité du fibroscope le plus loin possible dans une bronche sous-segmentaire du territoire pulmonaire dont on veut obtenir une analyse histologique. Une pince à biopsie est introduite dans le fibroscope puis poussée jusqu’à ce qu’elle soit en butée, hors de vue de l’opérateur ; elle est alors retirée de 1 ou 2 centimètres, ouverte, puis repoussée jusqu’en butée, refermée et retirée du fibroscope. Le fragment ainsi prélevé correspond en théorie à du parenchyme pulmonaire. La BTB a l’avantage d’être faite au cours d’une endoscopie bronchique « classique », sous anesthésie locale, sans mise en jeu de moyens humains ou techniques importants. Pour cette raison, elle constitue souvent l’examen de première intention lors d’une suspicion de PO. Cependant, les prélèvements sont inconstamment exploitables. En effet, réalisées à l’aveugle avec pour seul critère de jugement la butée de la pince, seules 77 à 86 % des BTB contiennent du parenchyme pulmonaire et pour celles qui en contiennent, il n’y a pas de certitude que la biopsie ait été réalisée dans une zone de poumon pathologique. La valeur diagnostique de la BTB (soit le nombre de diagnostics établis par BTB et finalement retenus) varie selon le type de lésions : de 26 à 55 % pour une lésion localisée et de 66 à 75 % pour des lésions diffuses.

Elle baisse pour les lésions périphériques, elle augmente avec le nombre de biopsies et avec leur taille, qui peut être significativement augmentée si les BTB sont pratiquées sous anesthésie générale par bronchoscopie rigide. Poletti et coll. évaluent la sensibilité de la BTB pour le diagnostic de PO à 64 %. La taille des BTB est inférieure aux prélèvements obtenus par BC, de l’ordre de quelques millimètres cube, ne comportant au mieux que 50 à 100 cloisons alvéolaires mais souvent moins. Les principales complications de la BTB sont l’hémorragie pulmonaire sévère et le pneumothorax.

Bibliographie :

Une recherche bibliographique a été réalisée sur le moteur de recherche PubMed avec les mots-clés « BOOP, COP et organizing pneumonia » successivement associés à « CT-guided biopsy », « percutaneous biopsy », « needle biopsy », « transthoracic biopsy » et « Tru-cut lung biopsy » afin d’étudier.

Il faut y ajouter un article étudiant les caractéristiques cliniques et radiologiques de la PO, dans lequel les auteurs affirment avoir obtenu le diagnostic histologique de PO par BTT et/ou BTB chez 18 de leurs 26 patients. Il faut noter que pour les références, il n’est pas précisé si la BTT a été réalisée sous guidage scanographique, d’autres méthodes de guidage étant décrits, comme l’échographie.

Les éléments cliniques ayant motivé la BTT sont les mêmes dans nos observations et pour les cas de la littérature, c’est-à-dire un tableau de dyspnée, fièvre et toux, résistant à une antibiothérapie, ce qui correspond à la présentation clinique la plus fréquente de la PO.

Les caractéristiques radiologiques sont également les mêmes : condensations alvéolaires bilatérales dans 2/6 cas de la littérature et 4/6 cas personnels, condensation alvéolaire unilatérale dans 2/6 cas de la littérature et 2/6 cas personnels, un syndrome interstitiel étant associé à la condensation dans un des cas. Ces éléments font partie des modes de présentation les plus fréquents de la PO. Le seul cas de la littérature où le diagnostic de PO initialement retenu par la BTT est mis en défaut est celui où la présentation radiologique est inhabituelle, sous forme de lésions cavitaires.

Une biopsie chirurgicale, réalisée en raison d’une évolution défavorable sous corticothérapie, corrige dans ce cas le diagnostic. Dans les cas de la littérature, une BTB a été réalisée en première intention dans un seul cas et n’a pas été contributive. Dans nos observations, la BTT a été le seul examen à visée histologique réalisé et le diagnostic a été jugé rétrospectivement confirmé devant une évolution favorable sous corticothérapie et/ou arrêt du médicament incriminé, ce qui justifie qu’aucune autre investigation invasive n’ait été pratiquée. Dans nos observations, on note une majorité de PO d’origine médicamenteuse probable (83 %) alors que les cas de la littérature sont tous présentés comme cryptogéniques sauf un, où la bucillamine est incriminée.

En ce qui concerne le traitement, les modalités exactes de la corticothérapie ne sont pas précisées dans les cas de la littérature. Dans nos observations, la corticothérapie a été menée selon les recommandations du GERM »O »P basées sur plusieurs études pour les cas n° 1, 2 et 3. Dans le cas n° 4 la durée de corticothérapie a été diminuée à quatre mois mais la dose initiale était majorée. Dans le cas n° 5, une rechute de PO a été observée en raison d’un probable sous-dosage initial de la corticothérapie et d’une durée de traitement trop courte par rapport aux recommandations.

Technique, avantages et inconvénients de la BTT scano-guidée :

La BTT scano-guidée consiste à réaliser une biopsie pulmonaire à travers la paroi thoracique sous anesthésie locale et contrôle tomodensitométrique. Des coupes fines de scanner (2 à 5 mm) sont réalisées pour repérer la lésion à biopsier et optimiser le positionnement du patient. La procédure actuellement la plus utilisée fait appel à des aiguilles coaxiales : une aiguille porteuse est d’abord placée par voie percutanée au contact de la lésion et est laissée en place durant tout le geste, son positionnement étant régulièrement contrôlé par les clichés de scanner.

À travers ce guide, l’aiguille semi-automatique de type « Trucut » est introduite à plusieurs reprises et les biopsies sont effectuées immédiatement en aval de l’aiguille porteuse, sur deux centimètres. Grâce à une seule effraction pleurale, plusieurs biopsies et une aspiration de la lésion sont réalisées, fournissant des prélèvements pour une analyse à la fois histologique et cytologique. Le taux de prélèvements jugés adéquats par les anatomopathologistes est dans la littérature de l’ordre de 92 à 100 %, même pour des nodules de diamètre inférieur à 20 mm, avec des tailles d’aiguilles variant entre 18 G et 25 G. Laurent et coll. rapportent un taux de prélèvements exploitables de 98,9 % au cours d’une étude portant sur 202 biopsies de nodules pulmonaires réalisées avec une aiguille coaxiale de 20 G identique à celle de notre pratique.

La valeur diagnostique de la BTT est comprise entre 88 et 97 %, meilleure pour les lésions malignes que bénignes. Ces données sont valables pour des biopsies de nodules pulmonaires, les études concernant le recours à la BTT dans les pneumopathies interstitielles étant peu nombreuses. Un article datant de 1981 trouvait une valeur diagnostique de seulement 42 % pour la BTT mais les techniques de prélèvement ont depuis évolué.

Plusieurs articles récents rapportent un diagnostic étiologique de pneumopathie interstitielle obtenu par BTT dans 79 à 100 % des cas. Dans l’une des études portant sur 23 patients et dans laquelle un diagnostic a été obtenu par BTT dans tous les cas, les auteurs précisent qu’une BTB avait été préalablement réalisée dans 20 cas, sans résultat contributif.

Les complications sont surtout représentées par le pneumothorax (8 à 61 % selon les études mais le plus souvent de l’ordre de 20 à 30 %, nécessitant un drainage thoracique dans 3 à 15 % des cas). Le risque dépend du type d’aiguille employée, du nombre d’effractions pleurales et de la distance entre la plèvre et la lésion. Le pneumothorax est le plus souvent détecté précocement sur les coupes de scanner de fin de procédure. Une hémorragie alvéolaire minime autour de la zone prélevée est fréquente et peut occasionner quelques expectorations hémoptoïques sans gravité.

Les autres complications sont rares : hémothorax, hémorragie alvéolaire sévère, embolie gazeuse, propagation tumorale sur le trajet de ponction en cas de malignité de la lésion et arrêt cardio-respiratoire.

Les contre-indications absolues sont les troubles de l’hémostase ou, concernant la lésion, une nature vasculaire ou évoquant un kyste hydatique. Les contre-indications relatives sont les antécédents de pneumonectomie (risque de pneumothorax sur poumon unique), l’hypertension artérielle pulmonaire (risque accru de plaie vasculaire), l’insuffisance respiratoire chronique sévère (VEMS inférieur à 1 L) et les terrains augmentant le risque de pneumothorax, c’est-à-dire l’obstruction bronchique sévère avec hyperinflation pulmonaire ou la présence de bulles emphysémateuses juxta-lésionnelles ou sur le trajet de ponction. L’état clinique du patient doit lui permettre de rester dans la même position pendant 30 minutes.

La localisation de la lésion peut aussi représenter un facteur limitant : une lésion située en arrière d’une côte peut être techniquement difficile à atteindre. Les lésions situées à la partie postérieure d’une grosse bronche sont peu accessibles en raison de la présence à ce niveau de l’artère bronchique satellite, d’où le risque important de plaie vasculaire.

Une ponction nécessitant le franchissement de plusieurs scissures comporte un risque accru de pneumothorax.

En revanche la nature de la lésion pulmonaire n’est pas un élément limitant puisque des études décrivent pour la BTT sous scanner une rentabilité (nombre de prélèvements exploitables) et une valeur diagnostique identiques qu’il s’agisse de lésions alvéolaires, de nodules localisés ou s’intégrant dans une pathologie interstitielle diffuse.

Place de la BTT scano-guidée dans le diagnostic de PO :

C’est dans le cadre de ces réflexions qu’il nous semble intéressant de considérer l’intérêt de la BTT sous scanner pour le diagnostic de PO. Ce geste a l’avantage d’être effectué sous anesthésie locale et d’être réalisable même chez des patients à l’état respiratoire précaire. Grâce à la précision du contrôle tomodensitométrique, il possède une meilleure rentabilité que la BTB et fournit des prélèvements pulmonaires à visée histologique et cytologique orientés, de plus grande taille que ceux obtenus par BTB, ce qui diminue le risque d’erreur diagnostique par méconnaissance d’une pathologie satellite à un foyer de PO. La BTT a une valeur diagnostique supérieure à celle de la BTB, et ceci quelle que soit la présentation des lésions (alvéolaire, nodulaire focale ou diffuse), dont on sait qu’elle est variable au cours de la PO. Les complications sont rares et le plus souvent bénignes.

Le taux de pneumothorax de la BTT est supérieur à celui de la BTB mais il s’agit le plus souvent de pneumothorax de faible abondance, ne nécessitant pas de drainage, détectés précocement sur les clichés scanographiques de fin de procédure. En cas d’évolutivité, ils sont alors immédiatement drainés sous contrôle tomodensitométrique.

L’article de Safadi et coll. illustre bien cependant que l’erreur diagnostique reste possible avec une BTT car les prélèvements sont de taille inférieure à ceux obtenus par BC, qui reste de ce fait la méthode de référence pour le diagnostic de PO. D’autre part les résultats de la BTT doivent toujours être interprétés en fonction du contexte clinique, comme le montre notre sixième observation, où le diagnostic est discutable. Si l’on s’en tient au résultat de la BTT, c’est le diagnostic de PO qui est retenu et le traitement à instaurer est une corticothérapie.

Cependant il peut exister des lésions de PO en périphérie d’un foyer infectieux pulmonaire et l’évolution favorable sous antibiotiques dans le cas de ce patient fait retenir plutôt cette hypothèse et seule l’antibiothérapie se justifie, la corticothérapie pouvant au contraire être délétère du fait du contexte infectieux. La BTT scano-guidéedevrait donc être évaluée en remplacement de la BTB dans la démarche diagnostique de PO dans les centres hospitaliers disposant d’un radiologue expérimenté à cette technique et d’un histologiste spécialisé en pathologie pulmonaire.

Il est important de connaître les limites de réalisation et d’interprétation de cette technique. En cas de doute diagnostique, que ce soit d’emblée sur la présentation radioclinique initiale, ou surtout en cas d’évolution défavorable sous corticothérapie, il faut avoir recours, si l’état du patient le permet, à une BC. Celle-ci permettra de conforter un diagnostic de PO hésitant, ou à l’inverse de corriger le diagnostic retenu à la BTT.

Conclusion :

La BTT sous scanner nous semble trouver une place justifiée dans la démarche diagnostique de PO. Loin de prétendre usurper la place et les qualités de la BC, qui reste sans conteste la méthode diagnostique de référence face à une suspicion de PO, la BTT sous scanner devrait faire l’objet d’une évaluation en remplacement de la BTB dans cette indication car elle fournit, avec une meilleure rentabilité, des prélèvements pulmonaires de plus grande taille que la BTB, ce qui limite le risque d’erreur diagnostique dans une pathologie aux nombreux diagnostics différentiels.

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