Urgences chirurgicales : douleurs abdominales aiguës

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Les douleurs abdominales aiguës recouvrent chez l’enfant des pathologies organiques ou fonctionnelles très diverses.

Deux écueils sont à éviter.

D’une part banaliser l’existence de douleurs abdominales en méconnaissant une urgence chirurgicale avec parfois des conséquences graves : lésions irréversibles d’un organe et/ou mise en jeu du pronostic vital.

À l’inverse il est dangereux de poser une indication chirurgicale inutile chez un enfant ayant une pathologie médicale qui peut être décompensée par l’anesthésie et /ou l’intervention.

Introduction :

Urgences chirurgicales : douleurs abdominales aiguësIl s’agit de douleurs abdominales évoluant depuis quelques heures ou quelques jours (moins de trois) et qui sont en rapport avec une pathologie chirurgicale nécessitant un traitement en urgence (dans les 24 heures d’après la définition de l’Organisation mondiale de la santé).

Il est nécessaire de procéder par étapes et de reconnaître :

– la douleur abdominale aiguë évocatrice d’une urgence chirurgicale : ceci nécessite de connaître la sémiologie propre à chaque âge ;

– la pathologie chirurgicale la plus vraisemblablement responsable de ces douleurs abdominales aiguës ;

– le degré d’urgence du traitement.

La sémiologie des douleurs abdominales aiguës varie en fonction de l’âge.

Pour tous il faut retracer l’anamnèse (intervention, traumatisme), l’histoire de l’épisode récent, les signes d’accompagnement (généraux, digestifs, urinaires).

L’examen doit être minutieux, et complet avec : la prise de la tension artérielle, un examen ORL et pulmonaire, l’examen de l’abdomen, des bourses, des orifices herniaires, et éventuellement en fonction du contexte un toucher rectal.

L’ensemble de ces renseignements suffit le plus souvent pour avoir une orientation diagnostique.

Des examens complémentaires simples peuvent être utiles : la numération formule sanguine et la CRP (protéine C réactive), la radiographie d’abdomen sans préparation et l’échographie abdominale ou abdominopelvienne.

Sémiologie des douleurs abdominales en fonction de l’âge :

A – Chez le nourrisson :

* Affirmer qu’il existe des douleurs abdominales, et surtout les localiser peut être difficile.

Un comportement inhabituel, que ce soient des pleurs inexpliqués ou à l’opposé une atonie ou une hypotonie, doit conduire systématiquement à la recherche d’une anomalie abdominale.

L’existence de troubles digestifs associés est un excellent argument d’orientation.

Le refus du biberon est l’équivalent de vomissements. Si les rejets sont fréquents à cet âge, des vomissements, surtout s’ils sont verts, signent quasiment l’existence d’une pathologie chirurgicale.

La diarrhée et la constipation sont recherchées comme à tout âge.

* Le premier temps de l’examen consiste à observer le comportement spontané de l’enfant (par exemple dans les bras de sa mère) : sa mimique, ses gesticulations, ses réponses aux gestes de réconfort.

Un nourrisson inconsolable, avec des sourcils froncés, un visage crispé, des jambes repliées en permanence sur le ventre a probablement une lésion chirurgicale aiguë. Il faut ensuite observer l’abdomen lui même.

Le ballonnement abdominal est de bonne valeur mais parfois difficile à apprécier.

La peau luisante, les anses visibles sont deux signes rares mais très significatifs.

Il n’y a pas de défense ni de contracture chez le nourrisson.

En revanche, on peut reconnaître une zone électivement douloureuse, et surtout une asymétrie dans les réactions déclenchées par la palpation.

Les orifices herniaires et les bourses sont examinés systématiquement.

Devant une hernie ombilicale douloureuse : se rappeler que celle-ci ne s’étrangle qu’exceptionnellement, il faut donc de principe rechercher une autre cause à la douleur.

* Le toucher rectal n’est pas systématique : principalement à la recherche de sang dans les selles lorsque l’on évoque une invagination.

Il est fait avec le 5e doigt et peut entraîner un malaise vagal.

B – Enfant à l’âge de la maternelle (de 2 à 5 ans) :

Les difficultés de l’examen du nourrisson viennent du fait qu’il ne s’exprime pas.

Après 2 ans il existe plus de possibilités de communication avec l’adulte qui examine. Deux types de communications méritent d’être soulignés.

C’est l’âge de l’enfant dit « inexaminable » : il faut s’en méfier.

Une attitude d’opposition peut correspondre à une attitude normale pour un enfant de cet âge mais il peut également s’agir d’un enfant qui souffre et qui ne veut pas laisser examiner son ventre.

Il est alors souvent utile d’observer l’enfant, en renouvelant l’examen en particulier lors des jeux, du sommeil.

La persistance de réactions d’opposition déclenchées spécifiquement par l’examen de l’abdomen, surtout d’une région précise, permet d’en affirmer l’origine organique.

À l’opposé l’enfant communique facilement mais les réponses sont très variables d’un instant à l’autre et sans rapport avec l’examen physique.

Il n’a pas une organisation spatiale et temporelle adaptée pour répondre aux questions de l’examinateur.

Il a mal depuis « hier » (c’est-à-dire quelques heures, une journée ou une semaine)… et il a mal à l’ombilic, zone sur laquelle il projette toutes les douleurs abdominales.

Au moins dans cette situation l’examen physique se déroule sans difficulté et permet de juger facilement de signes locaux : une zone douloureuse ou une défense sont reconnues.

C – Enfant de plus de 6 ans :

L’examen est strictement superposable à celui de l’adulte.

Très facilement à cet âge le diagnostic de constipation banale ou de douleur abdominale d’origine « psychologique » est évoqué.

Il faut être vigilant, systématique dans l’examen clinique, et s’en tenir aux constatations objectives.

D – Chez l’adolescent :

Il n’y a pas de particularité sémiologique propre à cet âge.

Il faut penser à examiner systématiquement les bourses chez l’adolescent qui vient pour une douleur abdominale aiguë et qui n’osera pas toujours dire qu’il existe une douleur testiculaire.

Chez la jeune fille penser également à la pathologie annexielle et situer les douleurs abdominales par rapport au cycle menstruel.

Faire un examen gynécologique : examen de la vulve et toucher rectal.

Il est bien sûr essentiel de ne pas méconnaître une grossesse et penser à demander un dosage de âhCG (human chorionic gonadotropin).

Si à chaque âge l’examen doit être adapté, il faut également connaître les pathologies à évoquer en fonction de l’âge.

Bien sûr la hernie étranglée et la torsion de testicule peuvent survenir à tout âge, cependant il existe des pics de fréquence corrélés à l’âge qui vont guider le diagnostic.

Causes chirurgicales des douleurs abdominales en fonction de l’âge :

Nous ne traiterons pas des douleurs abdominales d’origine chirurgicale véritablement néonatales (occlusion néonatales et entérocolites du nouveau-né).

A – Étranglement herniaire :

La hernie inguinale se voit à tout âge.

Mais l’étranglement est d’autant plus fréquent que l’enfant est petit et que la hernie elle-même est à petit collet.

Près de 30 % des étranglements herniaires surviennent avant 3 mois, le plus souvent c’est un accident inaugural.

B – Invagination intestinale aiguë :

Elle est exceptionnelle en période néonatale, et plus fréquemment en rapport avec une anomalie anatomique, par exemple une duplication.

Entre 2 mois et 2 ans c’est l’urgence chirurgicale véritablement abdominale la plus fréquente.

La cause n’est pas clairement identifiée, elle est dite idiopathique en incriminant des facteurs viraux et une immaturité de la motricité digestive.

Chez l’enfant plus grand on observe encore des invaginations intestinales aiguës idiopathiques.

Après 6 ans elles sont plus volontiers en rapport avec une cause organique : diverticule de Meckel souvent, lymphome parfois.

Volvulus par anomalie de rotation

Les formes suraiguës de volvulus sont néonatales.

Les formes aiguës et chroniques peuvent survenir à n’importe quel moment (même à l’âge adulte), mais avec prédilection dans la première année de vie.

C – Appendicite aiguë :

Elle est exceptionnelle avant 2 ans, rare avant 5 ans, et l’âge moyen de survenue est entre 6 et 12 ans.

Avant 5 ans le diagnostic est le plus souvent fait au stade d’abcès ou de péritonite.

Il y a deux explications à cela.

D’une part le grand épiploon est peu développé : la perforation se fait en péritoine libre.

D’autre part, l’examen clinique est plus difficile, l’appendicite simule une gastroentérite ou une autre affection virale très fréquente à ce âge : il existe donc un retard au diagnostic.

D – Diverticule de Meckel :

Le risque pour un sujet ayant un diverticule de Meckel de se compliquer est d’environ 4 % et diminue avec l’âge.

Il peut se révéler par une occlusion intestinale, soit dans un tableau d’invagination chez le nourrisson, soit comme une occlusion sur bride à n’importe quel âge.

La diverticulite est un mode de présentation rare : l’âge de survenue et la symptomatologie étant tout à fait comparables à ceux de l’appendicite, il s’agit en règle d’une découverte peropératoire.

Le mode de révélation le plus fréquent chez l’enfant est l’hémorragie digestive basse, habituellement sans douleurs abdominales.

E – Occlusion sur bride :

Elle peut s’observer après toute laparotomie.

Le pic de fréquence d’appendicectomie se situant à 6-12 ans, avec un risque majeur d’occlusion sur bride survenant dans l’année suivante.

F – Torsion du cordon spermatique :

Il existe deux pics de fréquence de cette pathologie.

La forme néonatale n’entre pas dans le cadre du diagnostic des douleurs abdominales.

La torsion est généralement prénatale, et le diagnostic fait au stade de nécrose : il n’y a plus de douleurs.

La torsion de l’enfant pubère ou prépubère : le motif de consultation est soit d’emblée la douleur testiculaire, soit des douleurs abdominales.

Entre ces deux âges la torsion de testicule peut être observée, mais le diagnostic différentiel le plus fréquent est la torsion d’hydatide.

Dans ce cas, la douleur est localisée à la bourse, plus précisément à la tête de l’épididyme, sans irradiation abdominale.

G – Torsion et tumeurs de l’ovaire :

Comme pour la pathologie testiculaire, deux pics de fréquence avec les mêmes constatations.

En période néonatale la pathologie la plus fréquente est le kyste de l’ovaire, tordu ou non tordu.

Le diagnostic est fait sur des échographies systématiques.

Le traitement n’est pas codifié et certains de ces kystes sont simplement surveillés.

La survenue de douleurs abdominales dans ce contexte conduit à suspecter une complication pouvant nécessiter un traitement chirurgical urgent.

Chez la grande fille et l’adolescente la douleur aiguë abdominopelvienne très brutale doit faire évoquer en premier lieu une torsion d’annexe.

H – Pathologies de l’adulte :

– Les perforations d’ulcère.

– Les cholécystites.

– Les pancréatites.

– Les lithiases urinaires.

Toutes ces pathologies peuvent être rencontrées chez l’enfant, mais elles sont beaucoup plus rares.

Leur fréquence augmente à l’adolescence.

Une fois le diagnostic établi ou suspecté : le traitement doit être organisé en urgence, mais il existe des degrés d’urgence différents selon qu’il s’agit d’un mécanisme vasculaire ou infectieux.

Urgences chirurgicales : quel degré d’urgence ?

A – Urgences immédiates : pathologies à composante vasculaire

L’ischémie fait classiquement courir un risque de nécrose tissulaire irréversible au-delà de 6 heures sur des tissus tels que le testicule, l’ovaire, le rein, l’intestin.

L’hémorragie est longtemps bien tolérée chez l’enfant, et la décompensation survient souvent de façon brutale et grave.

Dans ce type d’urgences, on ne saurait trop insister sur l’intérêt d’un contact direct entre le médecin qui voit l’enfant le premier et le chirurgien à qui il va l’adresser, afin d’éviter tout retard au traitement.

1- Hernie inguinale étranglée :

Chez le nourrisson, l’étranglement herniaire conduit à une compression du pédicule spermatique dans le canal inguinal, avec ischémie testiculaire.

L’ischémie intestinale survient à un stade plus tardif.

Il est possible de tenter immédiatement la réduction, sans forcer, en calmant l’enfant.

Il faut éviter un excès de manipulations responsables d’oedème et d’hématome du cordon spermatique.

L’enfant doit être orienté en milieu chirurgical dans les plus brefs délais : si l’état local et général le permettent, une réduction par taxis sera tentée après sédation par diazépam (Valium, 0,5 mg/kg intrarectal) ou midazolam (Hypnovel, 0,3 mg/kg intrarectal) avec monitorage de la fréquence cardiaque et de la saturation périphérique en oxygène, en raison du risque d’apnée.

La sédation s’accompagne d’une myorelaxation entraînant un relâchement de l’orifice inguinal profond, qui peut permettre la réduction de la hernie.

En cas de succès, la hernie sera opérée habituellement 48 heures plus tard, après diminution de l’oedème local.

En cas d’échec de la réduction sous sédation, l’enfant est opéré en urgence.

Dans tous les cas, même si la hernie a pu être réduite sous sédation, il existe un risque d’atrophie testiculaire secondaire dont doivent être prévenus les parents.

2- Autres hernies étranglées :

Elles sont rares, mais doivent néanmoins être recherchées en raison du risque d’ischémie intestinale.

La hernie ombilicale s’étrangle rarement, et dans ce cas, contient habituellement de l’épiploon.

La hernie crurale, une éventration, peuvent aussi s’étrangler.

3- Invagination intestinale aiguë :

Dans l’invagination, le méso de l’anse invaginée est comprimé dans le boudin.

Il en résulte une stase veineuse (à l’origine des rectorragies) puis une ischémie complète de l’anse invaginée.

À l’inverse de la hernie c’est plus l’anamnèse que l’examen clinique qui fait le diagnostic. Un nourrisson avec un comportement anormal, des épisodes de pleurs intermittents ou d’hypotonie, un refus du biberon est suspect d’invagination même s’il n’a pas vomi, n’a pas de sang dans les selles et n’a pas de boudin palpable.

Un retard au diagnostic va en compliquer le traitement, méconnaître le diagnostic peut conduire au décès de l’enfant.

Dans la plupart des équipes, le diagnostic est fait par échographie, mais le lavement opaque garde ses indications si la fiabilité de l’échographie est incertaine et dans les cas de diagnostic douteux.

Le bilan, réalisé en milieu chirurgical, doit apprécier le retentissement général et le risque de nécrose intestinale constituée, dont dépendent les possibilités de réduction par lavement hydrostatique ou pneumatique.

Il faut également rechercher des éléments en faveur d’une invagination à deux niveaux, qui comporte le plus souvent une composante iléo-iléale, avec syndrome occlusif du grêle, et dont le traitement est chirurgical.

4- Volvulus du grêle sur bride :

Le diagnostic d’occlusion sur bride est le premier à évoquer devant un enfant (ou un adulte…) qui présente des douleurs abdominales et une cicatrice de laparotomie, avant même la constitution d’un tableau plus complet d’occlusion du grêle.

Toute intervention intrapéritonéale, même par un abord limité (coelioscopie) peut créer des adhérences ou des brides à l’origine d’accidents occlusifs.

Les éléments qui orientent vers un mécanisme de strangulation, avec ischémie intestinale, plutôt que vers une simple obstruction, sont un début brutal, une douleur très intense (ischémie intestinale aiguë), un silence auscultatoire, une défense pariétale, un état de choc, une convergence des anses occluses vers la bride (aspect « en fleur ») sur les radiographies d’abdomen sans préparation, et enfin l’absence d’amélioration sous aspiration gastrique aux examens cliniques et radiologiques répétés à quelques heures d’intervalle.

Il faut se méfier de la fausse amélioration liée à la constitution de la nécrose intestinale complète, qui s’accompagne d’une diminution des douleurs.

L’intervention réalisée à temps permet d’éviter une mutilation digestive qui peut aller jusqu’à la perte de tout le grêle.

Les occlusions du grêle sur bride congénitale, par hernie interne, peuvent être rapprochées de ce cadre.

5- Volvulus du grêle sur malrotation :

Cette pathologie est le plus souvent révélée en période néonatale, par un syndrome occlusif (nouveau-né vomissant jaune ou vert) à ventre plat.

Elle peut toutefois survenir chez le nourrisson ou l’enfant, avec douleurs abdominales, vomissements bilieux.

Dans la forme aiguë, la plus fréquente, l’air contenu dans l’intestin volvulé s’est résorbé, et l’abdomen est plat.

Dans la forme suraiguë, l’ischémie intestinale est totale d’emblée et l’intestin volvulé est distendu.

Le diagnostic est fait par échodoppler des vaisseaux mésentériques, qui identifie l’anomalie de position relative de l’artère et de la veine mésentériques supérieures, et peut suivre la spire de torsion.

Le transit baryté oesogastroduodénal (TOGD) confirme le diagnostic en montrant la malposition de l’angle de Treitz, et la spire de torsion intestinale.

L’intervention urgente permet d’éviter, dans les cas où la torsion est serrée, la perte de tout le grêle par ischémie mésentérique.

6- Torsion du pédicule spermatique (« torsion du testicule ») :

Des douleurs de la fosse iliaque chez le grand enfant prépubère ou l’adolescent peuvent révéler une torsion du pédicule spermatique.

Elles peuvent correspondre à une projection de la douleur, ou à une gêne du jeune homme à évoquer ses organes génitaux.

C’est pourquoi la palpation des bourses doit rester systématique dans l’examen d’un enfant qui se plaint de douleurs abdominales.

Une fois la bourse douloureuse identifiée, il faut s’efforcer d’éviter toute perte de temps (notamment par des examens complémentaires) et montrer l’enfant au plus vite au chirurgien.

L’association douleur abdominale (en général de la fosse iliaque) et bourse vide homolatérale doit faire évoquer la torsion d’un testicule ectopique.

7- Urgences gynécologiques :

Le diagnostic de torsion d’annexe  doit être évoqué chez la grande fille ou l’adolescente qui présente des douleurs abdominopelviennes brutales.

La torsion survient habituellement sur une annexe pathologique : kyste ovarien, voire tumeur ovarienne.

La masse peut être palpée au toucher rectal lorsqu’il est réalisable.

L’échographie montre l’image de kyste ovarien échogène (= compliqué) et le diagnostic peut être précisé par coelioscopie, qui permet de différencier une simple hémorragie intrakystique de la torsion d’annexe.

Ce diagnostic est cependant rarement fait au stade où l’annexe peut être sauvée.

La grossesse extra-utérine (GEU) rompue est classiquement révélée par un tableau de douleurs abdominopelviennes avec collapsus chez une adolescente.

L’échographie montre l’hémopéritoine, la vacuité utérine et souvent la grossesse ectopique.

D’une manière plus générale, les diagnostics gynécologiques « de femme adulte » doivent être systématiquement évoqués chez l’adolescente, avec en premier lieu celui de GEU en raison du risque vital.

8- Urgences vasculaires abdominales post-traumatiques :

Devant un traumatisme abdominal sévère, l’urgence immédiate est l’hémorragie.

Les soins immédiats visent à maintenir une hémodynamique correcte, et après un bilan clinique rapide des lésions, le premier examen à l’arrivée à l’hôpital est l’échographie à la recherche d’un hémopéritoine ou d’un hématome rétropéritonéal, et d’une lésion des organes pleins (rate, foie, reins).

La deuxième étape est la recherche d’une lésion ischémique, qui affecte essentiellement les reins : même en l’absence de lésion du parenchyme, une lésion du pédicule (rupture sous-intimale de l’artère) peut entraîner une ischémie complète du rein.

La traduction clinique peut être pauvre, et l’échographie simple ne montre pas les lésions.

C’est pourquoi devant tout traumatisme abdominal sévère, a fortiori s’il existe une hématurie, il convient de vérifier la vascularisation du rein, soit par échodoppler, soit par deux clichés d’urographie.

B – Urgences obstructives :

L’obstruction d’un conduit naturel peut être menaçante par plusieurs mécanismes : d’abord par une éventuelle ischémie associée ; ensuite par les conséquences hémodynamiques et métaboliques de l’obstruction ; enfin par une éventuelle surinfection, avec rétention septique.

1- Occlusions intestinales :

La constitution d’un troisième secteur entraîne hypovolémie, oligurie, perturbations ioniques et de l’équilibre acide-base.

L’urgence est donc à la rééquilibration hydroélectrolytique de l’enfant, parallèlement à la vidange digestive par sonde gastrique.

La possibilité d’une pullulation microbienne dans l’intestin en stase doit être prise en compte, pouvant conduire jusqu’à la dérivation en urgence (entérocolite de la maladie de Hirschsprung).

Enfin, dans de rares cas, la dilatation peut être telle en amont de l’obstacle qu’elle peut aboutir à la perforation (perforation caecale diastatique de la maladie de Hirschsprung).

2- Anurie obstructive :

Lorsqu’il s’agit d’une obstruction urétrale, le diagnostic est souvent évident, avec douleurs violentes liées au globe vésical.

Le drainage urinaire peut être réalisé par sonde urétrale ou par cathéter sus-pubien, qui a l’avantage de minimiser le risque de surinfection et de ne pas entraver le bilan étiologique (urétrocystographie).

L’anurie par obstruction urétérale bilatérale est rare, mais doit être évoquée chez des enfants porteurs de maladie lithogène (oxalose, alitement chronique).

Il faut corriger rapidement les désordres métaboliques liés à l’anurie (hyperkaliémie), et lever l’obstacle (pose endoscopique de sondes urétérales).

3- Rétention urinaire ou biliaire infectée :

Les rétentions urinaires ou biliaires infectées sont rares chez l’enfant, mais doivent être évoquées devant un sepsis sévère et une dilatation des cavités urinaires ou des voies biliaires en amont d’un obstacle.

Le traitement médical est insuffisant pour contrôler le sepsis.

La levée de l’obstacle, et/ou un drainage d’amont doivent être réalisés suivant les cas par voie percutanée, endoscopique ou chirurgicale.

C – Urgences infectieuses :

Dans les sepsis intra-abdominaux, l’urgence immédiate est rarement à l’intervention chirurgicale : en effet, il s’agit d’abord de stabiliser l’état de l’enfant, de restaurer une bonne hémodynamique, de relancer la diurèse.

L’intervention, même si elle reste urgente, intervient en deuxième ligne comme traitement étiologique du sepsis.

1- Péritonites :

Le tableau classique, avec douleur abdominale violente, fièvre et ventre de bois, se rencontre chez le grand enfant.

Chez le jeune enfant (avant 5 ans) et le nourrisson, la péritonite est habituellement révélée par une occlusion fébrile : gros ventre douloureux, fièvre et arrêt du transit.

Il n’existe pas de contracture abdominale à cet âge, la paroi abdominale reste dépressible.

Parfois, l’irritation péritonéale peut être à l’origine d’une « fausse diarrhée » trompeuse, et conduire à tort au diagnostic de gastroentérite.

La principale cause de péritonite chez l’enfant est l’appendicite.

Le diagnostic est aidé par l’abdomen sans préparation (ASP) (stercolithe, grisaille diffuse) et l’échographie (épanchement ou collection intra-abdominaux, appendice tuméfié, stercolithe intraluminal), mais il existe des faux négatifs : ainsi un appendice perforé peut avoir un aspect normal en échographie, et un épanchement péritonéal purulent peut ne pas être vu.

Le diagnostic de péritonite chez le jeune enfant reste difficile, et justifie le transfert de l’enfant en unité de chirurgie pédiatrique au moindre doute.

2- Appendicite :

Devant une douleur de la fosse iliaque droite, il convient de rechercher en premier lieu une origine extra-appendiculaire : urinaire, génitale, hépatobiliaire, ORL, pulmonaire, méningée.

Cette étape nécessite une anamnèse et un examen clinique soigneux, complétés utilement par une échographie abdominale ou abdominopelvienne (grande fille).

Le diagnostic d’appendicite est porté sur un faisceau convergent d’arguments cliniques, biologiques et radiologiques, avec dans les cas initialement incertains une observation de l’enfant en milieu chirurgical, et examens répétés, au minimum biquotidiens.

L’évolution en 48 heures permet de distinguer l’appendicite des causes non chirurgicales de douleurs de la fosse iliaque droite, et d’éviter des interventions inutiles, et le recours à des examens plus invasifs.

Le choix de la technique d’appendicectomie (chirurgicale ou coelioscopique) dépend avant tout de l’expérience de l’opérateur.

Il existe cependant une place privilégiée à la voie coelioscopique en cas de doute diagnostique avec la pathologie annexielle chez l’adolescente comme chez la femme adulte.

Chez l’enfant obèse elle permet également d’éviter une grande voie d’abord.

3- Autres urgences infectieuses abdominales :

Des pathologies plus rares telles que diverticule de Meckel, lymphangiome kystique, duplication digestive, peuvent être révélées par un accident septique.

Le tableau est celui d’une occlusion fébrile, le diagnostic peut être suspecté à l’échographie et sera confirmé à l’intervention.

Traitement symptomatique de la douleur abdominale :

Le traitement « chirurgical » va soulager la douleur : après réduction d’une hernie étranglée l’enfant soulagé s’endort presque immédiatement, dès la désinvagination faite les crises douloureuses cessent.

Mais, entre le moment où l’enfant consulte pour ses douleurs et le moment où le traitement « étiologique » va pouvoir être fait, il existe une période d’attente où la douleur elle-même va pouvoir être traitée.

Il existe deux périodes différentes.

Avant le diagnostic établi il ne faut pas masquer les symptômes.

Une fois le diagnostic fait et l’intervention chirurgicale décidée la douleursymptôme n’a plus d’intérêt mais les antalgiques utilisés ne doivent pas interférer avec l’anesthésie de l’enfant.

Dans la période d’observation, les antispasmodiques ont l’avantage de ne pas masquer les signes chirurgicaux.

Il est préférable de les utiliser par voie rectale ou par voie veineuse : Viscéralginet injectable simple, Spasfont injectable ou Débridatt.

L’usage d’un laxatif (Microlax ou Normacol) permet de lever le spasme colique.

L’enfant est réexaminé une fois les selles émises.

Le paracétamol par voie injectable peut également être utilisé.

Il ne faut pas craindre de masquer l’évolution de la courbe de température, celle-ci doit être reprise à la fin de la période d’action du médicament avant l’administration d’une nouvelle dose.

De même, l’examen clinique est renouvelé à ce moment.

En préopératoire immédiat c’est l’anesthésiste qui aura en charge l’enfant au bloc opératoire qui décidera des antalgiques à administrer avant l’intervention.

Il peut prescrire des morphiniques.

Conclusion :

La douleur abdominale est un symptôme très fréquent chez l’enfant.

L’anamnèse et l’examen clinique permettent en général de distinguer les rares patients ayant potentiellement une lésion dont le traitement chirurgical doit être fait sans délai et justiciables d’une consultation chirurgicale en urgence.

Dans ce cas, l’enfant doit être adressé au plus vite à l’équipe chirurgicale en s’assurant de sa disponibilité par exemple par un contact téléphonique.

L’équipe chirurgicale jugera si l’indication opératoire peut être portée d’emblée sur la clinique seule, ou si des examens paracliniques radiologiques ou biologiques sont nécessaires.

En effet, la prescription de ces examens avant cette consultation risque de représenter un surcoût et une perte de temps.

Pour les autres enfants il n’est pas toujours possible dès le premier examen de faire un diagnostic précis.

Là encore peu d’examens complémentaires sont nécessaires, le plus utile étant de réexaminer l’enfant soit à domicile, soit en hospitalisation après 6 à 12 heures d’évolution en instaurant un traitement symptomatique de la douleur dans l’intervalle.

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