A - RAPPELS PHYSIQUES ET TECHNOLOGIE
DES MAMMOGRAPHES CONVENTIONNELS :
Le tissu mammaire n’est pas un milieu idéal pour la radiographie.
Il est constitué de structures de densités pondérales très voisines.
L’absorption différentielle entre ces structures est d’autant plus
marquée que l’on utilise des photons X d’énergie basse.
1- Tubes mammographiques actuels
:
Ils utilisent le monochromatisme approché des raies caractéristiques
émises en basse tension par une anode tournante en molybdène,
tungstène ou rhodium.
Grâce à un générateur de haute fréquence, le tube à rayons X doit
être suffisamment puissant (tension délivrée entre 20 et 40 kV) pour
produire un rayonnement de faible énergie par un foyer de faible
dimension (diminution du flou géométrique) et dans un temps le
plus court possible (diminution du flou cinétique et de la dose).
L’utilisation d’un filtre en molybdène, tungstène ou rhodium permet
de réduire le rayonnement trop énergétique et surtout le
rayonnement trop mou, immédiatement absorbé par la peau, donc
nocif, et par ailleurs inutile dans la genèse de l’information
radiologique.
Le faisceau de rayons X doit avoir une énergie suffisante pour
pénétrer les seins denses et/ou épais.
Le spectre d’énergie dépend du kilovoltage utilisé et du matériau
constituant l’anode.
Les mammographes actuels ont le plus souvent une anode double
piste (molybdène, rhodium), voire triple piste (molybdène,
tungstène, rhodium).
Les combinaisons habituelles possibles sont alors :
– molybdène/molybdène ;
– molybdène/rhodium ;
– rhodium/rhodium ;
– tungstène/rhodium.
Le tungstène n’équipe plus certains des mammographes les plus
récents.
Les tubes sont équipés de deux foyers : l’un standard, inférieur ou
égal à 0,4 mm (de préférence 0,3 mm) (tolérance de la norme IEC/NEMA) ; l’autre fin, inférieur ou égal à 0,1 mm, pour les clichés
en agrandissement.
2- Grilles antidiffusantes
:
Le rayonnement diffusé est l’élément le plus pernicieux de la
dégradation de l’image mammographique.
L’utilisation de grilles mobiles placées entre le sein et le récepteur
diminue le rayonnement diffusé.
La grille est constituée de lames de plomb parallèles entre elles,
absorbant les émissions obliques.
Le rapport entre la hauteur des lames et leur espacement définit le
rapport de la grille.
Plus ce rapport est élevé, plus la grille est efficace sur le diffusé,
mais plus la dose augmente.
Idéalement, il faut disposer d’une grille mobile de rapport 5 avec
27 paires de lignes par centimètre.
Certains constructeurs proposent des grilles alvéolaires.
3- Système de compression mammaire
:
La compression est un autre élément de diminution du rayonnement
diffusé, facteur d’amélioration du contraste.
Le mammographe doit comporter une compression motorisée avec
commande au pied (laissant les deux mains de la manipulatrice
libres pour un meilleur positionnement de la patiente et du sein),
automatique, lente, mesurable, avec une sécurité limitant la pression
maximale.
La décompression doit être automatique, immédiate après la prise
du cliché.
Par la diminution d’épaisseur, la compression réduit la dose, le
diffusé et le flou géométrique.
Par l’immobilisation du sein, elle réduit le flou cinétique.
4- Diaphragme
:
Il n’est réellement utile que pour la réalisation de clichés localisés.
5- Récepteur de l’image
:
Le mammographe conventionnel est équipé d’un Potter standard
de 18 X 24 cm et d’un Potter 24 X 30 cm pour les hypertrophies
mammaires.
La distance foyer-film doit être supérieure ou égale à 600 mm
(diminution du flou géométrique).
En mammographie conventionnelle, le récepteur de l’image est
constitué par un écran renforçateur postérieur associé à un film
monocouche de haute résolution, permettant d’obtenir une
résolution spatiale théorique de 12 à 18 paires de lignes par
millimètre.
L’efficacité quantique de détection est estimée à 20 %.
Le contraste du récepteur est conditionné par le film et le
développement.
Chaque film a une courbe caractéristique.
Les films de très haut
contraste ont pour désavantage de réduire la latitude
d’exposition.
Les films doivent être stockés en position verticale,
à température et humidité adéquates, à l’abri des rayons X et de la
lumière.
6- Cellule d’exposition automatique
:
La cellule d’exposition automatique permet de sélectionner le kilovoltage optimal en fonction de la combinaison foyer-filtre, de
l’épaisseur et de la densité du sein.
Il est possible de choisir entre un programme privilégiant la
diminution de la dose (dépistage), un programme privilégiant le
contraste (diagnostic) et un programme intermédiaire « standard ».
La cellule doit permettre d’obtenir une densité optique moyenne
satisfaisante, reproductible, quelle que soit la morphologie du sein.
Le mammographe doit être équipé d’une correction de
noircissement par réglage des points de la cellule.
Le positionnement de la cellule est essentiel, le plus souvent dans le
tiers antérieur du sein.
La cellule doit être débrayable pour permettre un réglage manuel
des constantes dans les cas où elle peut être prise en défaut,
notamment les petits seins, les prothèses mammaires (silicone) et
certains seins opérés et irradiés.
7- Développement
:
Il s’agit d’une étape fondamentale conditionnant la qualité du cliché mammographique.
Le contrôle de qualité est primordial et nécessite une sensitométrie
quotidienne.
La chambre noire doit être parfaitement protégée des rayons X et de
la lumière du jour, et éclairée par une lumière inactinique.
Le marquage des films doit préciser au minimum le nom, le prénom
de la patiente, le centre où est réalisé l’examen, la date de l’examen
et l’incidence.
La densité optique doit être comprise entre 1,3 et 1,8 (base et voile
inclus), selon le type de film.
8- Négatoscopes
:
Les négatoscopes utilisés en dépistage et diagnostic doivent être
dédiés à la mammographie (alimentation haute fréquence) et
conformes à la norme IN 6856 du 1er avril 1994, première partie.
La lecture doit se faire dans une pièce peu éclairée (luminosité
ambiante inférieure à 50 lux), sur des négatoscopes dédiés
comportant des volets opaques pour occulter toute la surface
lumineuse non recouverte par les films et permettant, au minimum,
de comparer deux films 24 X 30.
Des systèmes électroniques de négatoscopes « intelligents » pilotés
par informatique ont été proposés par certains constructeurs.
Ils
optimisent la lecture des radiographies en général et des
mammographies en particulier.
Cependant, leur encombrement et
leur prix actuels limitent leur diffusion.
La luminance moyenne doit être de 2 000 à 6 000 cd/m2 à
4 500-6 500 °K (3 000 cd/m2 souhaitables) et ses variations doivent
être inférieures à 15 % à 10 cm du bord éclairé.
Un spot lumineux est nécessaire pour l’exploration des zones les
plus sombres.
La lecture à l’aide d’une loupe est indispensable, notamment pour
la recherche et l’analyse des microcalcifications.
B - MAMMOGRAPHIE NUMÉRIQUE
:
1- Écrans radioluminescents à mémoire (ERLM)
:
Cette première technique numérique est apparue au milieu des
années 1980 pour l’exploration de différents organes (os, poumons etc).
Son utilisation en mammographie a débuté en France vers 1991 mais
n’a pas été retenue pour la pratique clinique dans les autres pays
occidentaux.
Le récepteur est constitué d’un fluorohalogénure de baryum dopé à
l’europium.
Elle conserve l’énergie photonique reçue lors de l’irradiation X.
Il s’agit d’une technique de numérisation directe mais de lecture
différée.
En effet, le support numérique de l’image latente est lu par laser,
restituant une émission lumineuse dont l’intensité est
proportionnelle à celle du faisceau X d’origine.
Cette énergie lumineuse est transmise à un photomultiplicateur et à
un convertisseur numérique-analogique.
Comme toute image numérique, les ERLM ont pour avantage, par
rapport au couple écran-film, d’offrir une meilleure dynamique.
Mais ses faibles performances en mammographie, après un
engouement passager, l’ont fait rapidement abandonner dans cette
indication.
Sa résolution spatiale et surtout sa faible efficacité quantique de
détection (de l’ordre de 15-20 %) ne permettaient pas une bonne
détectabilité et une analyse satisfaisante des microcalcifications.
Elle a d’ailleurs été supprimée de la nomenclature générale des actes
professionnels dans toutes ses indications mammaires, sauf la
surveillance des prothèses.
2- Mammographie numérique plein champ
:
À l’inverse des ERLM, il s’agit de la véritable déclinaison spécifique
de la technologie numérique, dédiée exclusivement à la
mammographie.
Plusieurs constructeurs développent des systèmes dédiés de
mammographie numérique plein champ.
Certains utilisent un détecteur unique, d’autres la juxtaposition de
plusieurs détecteurs numériques.
En France, un seul système est commercialisé, depuis 1999, par General Electric Medical Systems, deux sites ayant commencé à
fonctionner début 2000 (Paris et Clermont-Ferrand).
La Food and Drug Administration (FDA) a agréé son utilisation
clinique et sa commercialisation aux États-Unis.
Ce système possède un détecteur plein champ unique mesurant
19 X 23 cm.
La taille du pixel de 87 µm interpolés à 100 µm.
Chaque pixel du détecteur est constitué d’une photodiode en
silicone amorphe, couplée à un transistor.
La conversion des rayons X en photons lumineux est réalisée grâce
à un scintillateur structuré, fait de cristaux d’iodide de césium.
Ce scintillateur permet une absorption élevée des rayons X, une
conversion élevée des rayons X en lumière et une haute résolution
spatiale.
La lumière émise est convertie en charge par le détecteur.
La conversion en données numériques se fait sur 14 bits, soit
16 000 niveaux de gris.
Les avantages de ces détecteurs sont une plus grande dynamique,
une efficacité quantique de détection nettement plus élevée, une
meilleure fonction de transfert de modulation.
L’efficacité quantique de détection est proche de 55 %, largement
supérieure à celle de la mammographie conventionnelle et des ERLM.
L’EQD (efficacité quantique de détection) constitue le meilleur
paramètre objectif pour exprimer la qualité de l’image d’un
récepteur car il compare le rapport signal sur bruit à l’entrée et à la
sortie du détecteur.
La dynamique d’image est environ quatre fois supérieure à celle du
couple film-écran.
L’augmentation de la résolution en contraste permet une meilleure
visualisation des différences parfois subtiles entre les tissus, surtout
dans les seins denses et épais.
L’amélioration du rapport signal sur bruit permet, à qualité égale,
une diminution de la dose.
Les images prévisualisées sur la console d’acquisition en moins de
10 secondes sont transférées simultanément sur la station de
visualisation et vers les reprographes.
Les images peuvent être traitées par différents utilitaires et
programmes sur la console de visualisation (agrandissement,
mesure, inversion etc).
La station de revue se compose de deux moniteurs très haute
résolution 2 000 X 2 500 pixels avec un pixel de 100 µm permettant
l’affichage d’un sein par moniteur en pleine résolution.
Une image mammographique numérique occupe 9 mégaoctets (Mo).
En pratique, les avantages de la mammographie numérique plein
champ sont :
– l’acquisition, quasiment en temps réel, des images réduisant le
temps d’attente lié habituellement au développement, donc le temps
total de l’examen ;
– la suppression des contraintes liées à l’entretien des cassettes et
des machines à développer conventionnelles, et leurs conséquences
possibles sur la qualité de l’image ;
– l’analyse automatique de la densité du sein dans sa totalité,
éliminant la nécessité de positionnement de la cellule ;
– le traitement numérique, qui permet un ajustement automatique
ou manuel du niveau et de la largeur de fenêtre de visualisation,
évitant d’avoir à refaire des clichés dans la quasi-totalité des cas ;
– l’algorithme spécifique de traitement de l’image qui permet la
visualisation sur le cliché de tous les constituants du sein, de la peau
jusqu’au gril costal, chacun avec une pénétration adéquate et
optimale, de sorte que l’utilisation d’une lampe forte pour analyser
les zones superficielles ou sombres est en règle inutile.
Il s’agit du premier appareillage indiquant la dosimétrie sur chaque
cliché (dose d’entrée et dose moyenne glandulaire), ce qui va dans
le sens de la transparence et des recommandations de la circulaire
Euratom 97/43 du Conseil de l’union européenne du 30 juin 1997,
relative à la radioprotection en médecine (mise en application en
France en 2000).
L’imagerie numérique offre l’accès aux applications de diagnostic
assisté par ordinateur, dont les modalités sont en cours d’élaboration
pour certaines et d’évaluation pour d’autres :
– détection automatique des microcalcifications et des opacités
anormales ;
– analyse de forme des microcalcifications et stéréotaxie 3D ;
– tomosynthèse ;
– angiomammographie.
L’imagerie numérique donne accès à toutes les modalités d’imagerie
en réseau, d’archivage et de télétransmission.
La reprographie est assurée par des reprographes laser à
développement chimique et surtout secs, offrant une haute
résolution (508 à 656 dpi), un pixel de 39 µm, une matrice
5 025 X 6 200 et 1 024 niveaux de gris sur des films 20 X 25 cm.
Les images brutes ou traitées peuvent être données sur tout autre
support informatique (CD-ROM).
C - TECHNIQUE
:
Quelle que soit l’incidence, le positionnement du sein doit être
parfait, grâce à une traction et une compression optimales du sein.
La compression, tout en restant supportable par la patiente, est
fondamentale car elle permet de diminuer :
– l’épaisseur du sein, permettant une meilleure détection des petites
anomalies ;
– le flou géométrique ;
– le flou cinétique (immobilisation du sein) ;
– le rayonnement diffusé (amélioration du contraste) ;
– la dose.
Les incidences doivent être parfaitement symétriques.
Il ne doit pas exister de plis cutanés ou d’artefacts.
1- Incidences standards
:
En diagnostic, trois incidences sont en règle pratiquées : incidence
de face ou craniocaudale, incidence de profil externe et incidence
oblique externe.
* Incidence de face ou craniocaudale
:
La réalisation du cliché et la réduction de la douleur liée à la
compression du sein sont facilitées par l’élévation du porte-cassette.
Il faut plutôt privilégier légèrement la partie externe du sein, car il
est de toute façon impossible d’avoir à la fois la totalité des
quadrants internes et externes sur cette incidence.
Les critères de qualité sont : le sein au centre du film, la visibilité du
pectoral en arrière, le mamelon bien orienté vers l’avant ou
légèrement en dedans.
* Incidence de profil externe
:
Les critères de qualité sont : le mamelon sur une ligne horizontale,
la visibilité du pectoral, la visibilité du sillon sous-mammaire.
L’incidence de profil est toujours nécessaire pour l’analyse d’un
foyer de microcalcifications car elle seule peut montrer le caractère
éventuellement déclive, cupuliforme, des calcifications, preuve de
leur bénignité.
Elle est utile pour localiser précisément une
image infraclinique.
* Incidence médiolatérale oblique
:
Elle est parfois utilisée seule en dépistage (ou couplée à une
incidence de face).
Le muscle pectoral doit faire un angle de 40° à 50° avec le bord du
film et être visible jusqu’au niveau d’une ligne horizontale passant
par le mamelon.
Ce dernier doit se projeter en avant.
Le sillon sousmammaire,
le prolongement axillaire et la lame graisseuse
rétroglandulaire doivent être visibles.
C’est l’incidence qui explore le plus de tissu mammaire, à l’exception
d’une partie interne de la glande.
2- Autres incidences
:
* Incidence caudocrâniale
:
Elle est parfois utile pour les lésions des quadrants inférieurs (sillon
sous-mammaire) et chez les patientes présentant une importante
cyphose dorsale.
* Face externe, face interne
:
Ces deux incidences permettent de privilégier l’analyse des
quadrants externes ou des quadrants internes (lésion profondément
située et/ou très périphérique).
* Profil interne
:
Il est utile pour mieux explorer les lésions des quadrants internes.
* Incidences tangentielles
:
Elles permettent de confirmer le siège superficiel d’une lésion.
* Clichés localisés et agrandis
:
+ Étude des microcalcifications
:
Il faut utiliser un foyer fin de 0,1 mm et des clichés localisés agrandis
pour l’analyse des microcalcifications dépistées par les clichés
standards.
Le risque de flou géométrique lié à la suppression de la grille est
compensé par le phénomène de l’air-gap.
L’augmentation théorique de la dose est compensée par la
suppression de la grille.
L’agrandissement permet une meilleure analyse des caractères
quantitatifs, morphologiques et topographiques des microcalcifications,
et une meilleure comparaison d’un examen à l’autre.
Les microcalcifications sont classées selon la classification modifiée
de Le Gal.
– Type 1 : annulaires ou arciformes, horizontales ou semi-lunaires,
sédimentées sur le profil, losangiques.
– Type 2 : rondes et régulières.
– Type 3 : poussiéreuses.
– Type 4 : punctiformes, irrégulières, granulaires, de contours
anguleux.
– Type 5 : vermiculaires, ramifiées.
+ Étude des opacités
:
L’agrandissement n’est pas toujours indispensable, mais le plus
souvent utile.
La compression localisée sur la zone d’intérêt peut désarticuler une
image de sommation fibreuse et montrer l’absence d’organicité.
À l’inverse, elle peut faciliter l’analyse des contours d’une opacité
dans un sein dense, en écartant la fibrose ambiante.
Elle peut ainsi confirmer le caractère régulier des contours ou, à
l’inverse, révéler des lobulations ou des spicules, voire des
microcalcifications intrinsèques ou adjacentes.
Il en est de même des images de distorsion qui sont soit
désarticulées, soit confirmées.
+ Étude des prothèses
:
Les constantes d’exposition sont déterminées manuellement, la
cellule étant débrayée.
La manoeuvre d’Eklund est utile pour refouler en arrière la prothèse
derrière le compresseur et permettre une exploration maximale de
la glande en avant de l’implant.
Elle est plus facile à réaliser en cas
de prothèse rectropectorale.
En cas de prothèse prépectorale, elle n’est possible que si la prothèse
et le sein sont souples, dépressibles facilement, et s’il n’existe pas
une coque importante.
D - INDICATIONS ET RÉSULTATS
:
1- Indications
:
* Dépistage
:
Le dépistage de masse organisé (DMO) a pour but de réduire la
mortalité par cancer du sein. Selon les données classiques de la
littérature, il permet une réduction d’au moins 30 % de la mortalité
par cancer du sein dans la population-cible.
En France, jusqu’à présent, les campagnes de dépistage concernaient
les femmes de 50 à 69 ans et consistaient en un examen radiologique
réduit à une seule incidence oblique axillaire, sans entretien ni
examen clinique.
Il est utile de l’appeler « mammotest » pour ne pas
le confondre avec la mammographie diagnostique.
La fréquence de réalisation était de 3 ans.
Ce dépistage répond à un cahier des charges afin de respecter les
critères d’assurance-qualité définis par les recommandations
européennes et, en France, du Groupe interdisciplinaire de
mammographie (GIM).
Le principe de l’extension à l’ensemble de la France du DMO a été
voté sur le plan législatif en 1998.
Les recommandations de l’Agence nationale d’accréditation et
d’évaluation en santé (ANAES) publiées en 1998 préconisent de
réaliser désormais un dépistage tous les 2 ans par deux incidences
(face et oblique externe) afin d’en améliorer les performances.
L’ANAES recommande également d’élargir la tranche d’âge de 50 à
74 ans, au lieu de 69 ans actuellement.
Le débat est ouvert quant à l’intérêt du dépistage à partir de 40 ans
et fait l’objet de nombreuses polémiques.
Il semble en effet que les données les plus récentes, obtenues à partir des campagnes de
dépistage modernes, prouvent la diminution de la mortalité dans
cette tranche d’âge.
Mais des problèmes de modalité et de coût
semblent être le frein essentiel à l’extension dans cette tranche d’âge.
Le dépistage a pour avantages sa reproductibilité satisfaisante, sa
bonne sensibilité, une spécificité acceptable.
Le temps d’examen et le temps d’interprétation sont courts.
Le cahier des charges retenu par la Direction générale de la santé
recommande une dose d’entrée (fantôme MTM 100) inférieure à
12 mGy.
Sa sensibilité est supérieure à 90 % et s’évalue par le taux de cancers
de l’intervalle et par le taux de tumeurs de plus de 2 cm dépistées à
partir du deuxième tour.
La spécificité est moins bonne, surtout dans les seins denses.
Le taux
de reconvocation doit être inférieur à 5-7 % et la valeur prédictive
positive des biopsies chirurgicales de plus de 50 %.
Ses limites doivent être connues et communiquées aux patientes :
– un examen négatif n’exclut pas formellement la présence d’un
cancer (cancer non palpable dans un sein dense, cancer très
périphérique, etc) ;
– il n’y a pas, en règle, jusqu’à présent, d’interrogatoire et d’examen
clinique, avec le risque de méconnaître les 10 % de cancers détectés
uniquement par palpation ;
– le délai peut être long entre la phase de dépistage et la phase
diagnostique, source d’anxiété de la patiente ;
– le DMO dépend fondamentalement de la mise en place et du suivi
du programme d’assurance-qualité et de la compétence des lecteurs ;
– sur le plan technique, il constitue, initialement au moins, une
régression pour les patientes qui, auparavant, bénéficiaient d’une
mammographie complète avec examen clinique dans le cadre d’un
diagnostic préimplantatoire ; cela souligne l’importance de la
définition préalable du cahier des charges et de son respect, ainsi
que de la formation des médecins-lecteurs.
La deuxième lecture est indispensable car elle permet de détecter 10
à 25 % de cancers supplémentaires ayant échappé à la première
lecture, souvent d’ailleurs des petits cancers.
* Diagnostic
:
Le risque qu’une image mammographique se révèle être un cancer
augmente avec l’âge de la femme, ses antécédents familiaux ou
personnels de cancer du sein.
La mammographie diagnostique peut être réalisée :
– dans le cadre d’un dépistage sur prescription individuelle,
notamment dans le cadre des exclusions au dépistage de masse
(antécédents familiaux faisant suspecter une prédisposition
génétique) ;
– pour le diagnostic d’une anomalie palpable ou d’un symptôme
(mastodynie, inflammation, écoulement mamelonnaire, modification
cutanée, etc) ;
– chez les femmes porteuses de prothèses mammaires ;
– pour le diagnostic étiologique d’une anomalie infraclinique
révélée par un dépistage de masse.
Elle est précédée d’un interrogatoire et d’un examen clinique.
Elle comporte la réalisation de deux ou trois incidences par sein et,
en complément, de toute incidence qui pourrait se révéler utile au
diagnostic (clichés localisés agrandis notamment).
L’examen clinique peut être refait et orienté sur la zone où siège
l’anomalie pour vérifier si elle est réellement non palpable.
La mammographie diagnostique a pour objectif de poser le
diagnostic final en un seul temps et de déterminer la conduite à
tenir grâce à une lecture immédiate des clichés (nécessité ou non
d’autres explorations, de prélèvements ou d’une intervention).
2- Résultats
:
* Sensibilité
:
Elle est proche de 90
%.
Dans un sein lipomateux, l’absence d’anomalie exclut en pratique
une lésion maligne.
On estime que 10 à 15 % des cancers ne sont pas détectés par la
mammographie, soit du fait de leur topographie, soit du fait de leur indétectabilité dans un secteur dense ou un sein dense.
En effet, la sensibilité diminue quand la densité du sein augmente
(surtout pour la détection des opacités).
Une lésion palpable
indéterminée dans un sein dense doit conduire à des investigations
complémentaires (échographie, prélèvements).
La sensibilité reste élevée pour la détection des microcalcifications,
même dans un sein dense, ce qui est essentiel car près de la moitié
des cancers contiennent des microcalcifications et c’est le signe
révélateur de 90 % des cancers in situ.
La mammographie représente donc la méthode la plus fiable, la plus
reproductible en matière de dépistage des petits cancers non
palpables, avec un taux acceptable de faux négatifs, de faux positifs
et un coût correct.
* Spécificité
:
L’aspect mammographique est spécifique dans un nombre de cas
précis :
– sein totalement radiotransparent sans anomalie ;
– fibroadénome calcifié typique ;
– ganglion intramammaire typique ;
– lipome ;
– hamartome typique ;
– image stellaire maligne typique à centre dense (à différencier
d’une cicatrice radiaire, parfois d’une cyto-stéato-nécrose complexe).
Toute autre anomalie, palpable ou non, non spécifique, doit être
explorée plus avant.
Il est utile de classer les images selon le degré de suspicion de
malignité dans la classification adaptée de l’American College of
Radiology (ACR) : le système BI-RADS (breast imaging reporting and
data system).
– ACR 1 : mammographie normale.
– ACR 2 : aspect bénin ne nécessitant ni surveillance ni examen
complémentaire :
– opacités rondes avec macrocalcifications (adénofibrome ou
kyste) ;
– opacités ovalaires à centre clair (ganglion intramammaire) ;
– opacité ronde correspondant à un kyste typique en
échographie ;
– image de densité graisseuse ou mixte (lipome, hamartome) ;
– ACR 3 : aspect probablement bénin (surveillance à court terme
recommandée) :
– microcalcifications de type 2 selon Le Gal, en foyers unique ou
multiples ou nombreuses calcifications dispersées groupées au
hasard ;
– opacités rondes ou ovales, discrètement polycycliques, non
calcifiées, bien circonscrites, non typiquement liquidiennes en
échographie ou non contrôlées par échographie ;
– asymétries focales de densité à limites concaves et/ou
mélangées à de la graisse.
– microcalcifications de type 3 d’après Le Gal, groupées en amas
ou de type 4 peu nombreuses ;
– image spiculée sans centre dense ;
– opacité non liquidienne ronde ou ovale, à contours microlobulés
ou masqués ;
– distorsions architecturales ;
– asymétries ou hyperdensités localisées évolutives ou à limites
convexes.
– ACR 5 : aspect malin :
– microcalcifications de type 5 selon Le Gal ou de type 4
nombreuses et groupées ;
– amas de calcifications de topographie galactophorique ;
– calcifications évolutives ou associées à des anomalies
architecturales ou à une opacité ;
– opacité mal circonscrite à contours flous et irréguliers ;
– opacité spiculée à centre dense.
E - CONTRÔLE DE QUALITÉ
:
Un programme d’assurance-qualité en mammographie
conventionnelle concerne tous les maillons de la chaîne diagnostique
(mammographe, couple écran-film, développement, négatoscopes,
etc).
En France, le protocole du GIM prévoit de contrôler :
– tous les jours : la sensitométrie ;
– toutes les semaines : inspection visuelle de la machine, résolution
spatiale, contraste de l’image, visibilité à bas contraste, évaluation
globale, contrôle visuel de la cassette ;
– tous les mois : les mouvements de l’appareil ;
– tous les trimestres : l’exposeur automatique ;
– tous les semestres : la grille, la tension, l’éclairage de la chambre
noire, le stockage des films, la salle de lecture, le contact écran-film ;
– tous les ans : mesure du foyer, faisceau lumineux, couche de demiatténuation,
doses, cassettes.
Qu’il s’agisse de dépistage ou de diagnostic, les critères de qualité
exigés doivent être rigoureux :
– positionnement parfait du sein permettant une exploration de
toute la glande ;
– dosimétrie respectée (principe ALARA : « as low as reasonnably
achievable »), rappelée par la circulaire européenne Euratom 97/43,
mise en application en 2000 ;
– qualité du cliché en termes de résolution spatiale et en contraste.
La direction générale de la Santé a, en 1998 et en 1999, adressé aux
responsables des campagnes de dépistage des directives rappelant :
– la nécessité d’application de critères de qualité des installations mammographiques ;
– que les installations de mammographie qui ne présentent pas les
caractéristiques suivantes sont interdites :
– un foyer de taille inférieure ou égale à 0,4 mm (tolérance de la
norme IEC/NEMA) ;
– une distance entre le foyer et le film supérieure ou égale à
600 mm ;
– un faisceau de basse énergie adapté à l’examen des tissus
mammaires produit par un tube radiogène alimenté par une
tension comprise entre 20 et 40 kV et disposant au minimum
d’une anode en molybdène et d’une filtration molybdène ;
– un système arrêtant le rayonnement diffusé et ne créant pas
d’artefact sur les clichés ;
– les délais de mise en conformité des appareils ont également été
précisés :
– au 1er janvier 2000 :
– présence d’un exposeur automatique permettant de fournir des
clichés de densité optique optimale, quelles que soient la
composition et l’épaisseur du sein, ainsi que l’énergie délivrée ;
– présence d’un système permettant la correction du
noircissement par réglage des points de cellule ;
– présence d’un système de compression motorisé avec
commande au pied et système de sécurité permettant une
limitation de la pression maximale exercée ;
– et dans un délai de 2 ans (2002) :
– ajout d’un Potter de 24 X 30 cm ;
– la liste non exhaustive des appareils ne pouvant être mis en
conformité et devant être exclus immédiatement du dépistage.
La dose d’entrée par incidence, pour un sein d’épaisseur moyenne,
ne doit pas dépasser 10 mGy avec un fantôme PMMA de 40 mm.
Dans ce cas, la dose moyenne à la glande approche 2,5 mGy.
Le contrôle de qualité devrait être réalisé deux fois par an par un
organisme externe habilité.
L’évaluation d’un programme d’assurance-qualité dans le cadre du
dépistage du cancer du sein doit aller de pair avec un contrôle
qualité en anatomopathologie et le suivi des cas pathologiques
(registre des cancers).
Le développement inéluctable de la mammographie numérique
entraînera une révision du cahier des charges en matière de contrôle
de qualité et de ses modalités.