Physiopathologie moléculaire de la cholestase Cours d'Hépatologie
Introduction
:
La cholestase résulte d’un arrêt ou d’une diminution de la sécrétion
de bile dans l’intestin.
La sécrétion biliaire se fait par l’intermédiaire
de transporteurs très perfectionnés situés sur les hépatocytes et les cholangiocytes.
Un syndrome de cholestase peut survenir du fait
d’un obstacle mécanique sur la voie biliaire principale ou être
secondaire à des maladies de l’arbre biliaire ou de l’hépatocyte
(maladies génétiques, infectieuses, auto-immunes, métaboliques,
néoplasiques ou secondaires à une toxicité médicamenteuse).
Les
conséquences du syndrome de cholestase sont essentiellement liées
à la toxicité des acides biliaires qui s’accumulent dans le foie et dans
l’organisme, ou à leur absence du tube digestif du fait de
l’interruption du cycle entérohépatique.
Le dysfonctionnement ou l’absence des différents transporteurs sont
observés dans un certain nombre de cholestases congénitales ou
expérimentales.
L’implication de la mutation de certains gènes des
systèmes de transports (SPGP, mdr3, FIC1) dans les cholestases
familiales a permis un pont entre les sciences fondamentales et la
clinique.
Sécrétion biliaire
:
La bile produite par l’hépatocyte dans le canalicule biliaire, s’écoule
ensuite par les ductules biliaires, puis les voies biliaires jusqu’au
second duodénum.
Le canalicule biliaire est la plus petite
unité de l’arbre biliaire. Sa paroi est constituée de la membrane canaliculaire
de l’hépatocyte.
Sur la membrane canaliculaire
de l’hépatocyte se trouvent des protéines de transport qui
permettent le transport des substances osmotiquement actives contre
un gradient de concentration de l’hépatocyte vers le canalicule
biliaire.
La formation de la bile par les hépatocytes est déclenchée
par la différence de pression osmotique, engendrée par la
concentration dans le canalicule biliaire des acides biliaires et
d’autres molécules osmotiquement actives, comme le glutathion.
Les
mouvements de l’eau et des électrolytes se font essentiellement par
voie paracellulaire, à travers les jonctions serrées intercellulaires.
Les
acides biliaires, les phospholipides et le cholestérol s’associent dans
la bile sous forme de micelles mixtes dont l’effet détergent sur les
membranes cellulaires est moindre que celui des micelles simples
(composées uniquement d’acides biliaires).
Le maintien de la polarité de l’hépatocyte (membrane canaliculaire
et membrane basolatérale) est indispensable à la sécrétion biliaire.
A - TRANSPORT DU SANG PORTAL DANS L’HÉPATOCYTE
:
Les acides biliaires parviennent au pôle sinusoïdal de l’hépatocyte
par le sang portal.
Ils sont transportés dans l’hépatocyte contre un
gradient de concentration (leur concentration hépatocytaire étant dix
fois supérieure à leur concentration portale).
Les acides biliaires rendent compte de la sécrétion biliaire dite dépendante des acides
biliaires, les autres substances (glutathion, phospholipides...) rendent
compte de la sécrétion biliaire indépendante des acides biliaires.
Sur la membrane basolatérale
de l’hépatocyte se trouve une Na-K+ ATPase dont le rôle est le maintien du gradient
transmembranaire de sodium dans la cellule (plus de potassium en
intracellulaire, plus de sodium en extracellulaire).
La Na-K+ ATPase
et les canaux potassiques permettent le maintien d’un potentiel
électrique transmembranaire de –35 mV.
Il procure l’énergie
nécessaire à la sécrétion du sodium et au transport des acides
biliaires Na+-dépendants.
Le transporteur des acides biliaires du
sang vers l’hépatocyte est le Na+-taurocholate co-transporting
polypeptide (NTCP), transporteur des acides biliaires conjugués
dépendants du sodium.
Les acides biliaires et les autres substrats
lipophiles (bromesulfonephtaléine [BSP], bilirubine,...) peuvent aussi
être transportés dans l’hépatocyte par un système de transport
indépendant du sodium : organic anion transporting polypeptide
(OATP).
B - TRANSPORT INTRAHÉPATOCYTAIRE
:
Une fois dans l’hépatocyte, les différentes substances osmotiques
vont rejoindre le pôle canaliculaire.
Contrairement aux progrès
réalisés dans la connaissance des mécanismes de transport canaliculaires et basolatéraux, le transport intra-cellulaire est encore
mal connu.
Il semble que, contrairement à ce qui a longtemps été
suspecté, le transport ne se fasse pas par un mécanisme vésiculaire
mais plutôt par des protéines de transport intracellulaires, du moins
dans les conditions physiologiques.
Différentes protéines ont été
identifiées dont le rôle et la fonction sont encore à l’étude.
C - TRANSPORT CANALICULAIRE
:
Dans les conditions physiologiques, l’étape limitante de la sécrétion
biliaire est le transport canaliculaire des acides biliaires. Le
transporteur canaliculaire des acides biliaires a été identifié.
Ce
transport est stimulé par l’ATP. Cette protéine porte différents noms :
bile salt export pump (BSEP), sister P-glycoprotein (SPGP), ou encore
ATP binding cassette sous-famille B11 (ABCB11).
Au niveau de la
membrane canaliculaire, d’autres transporteurs impliqués dans la
sécrétion biliaire ont été identifiés. Il s’agit aussi de transporteurs
ATP-dépendants appartenant à la famille des ATPases de type P.
Le
premier mis en évidence est le mdr1 qui joue un rôle important dans
l’élimination canaliculaire des volumineuses molécules lipophiles
(médicaments anticancéreux, ciclosporine, inhibiteurs calciques...).
Cependant, le rôle de ce transporteur au cours de la sécrétion biliaire
est mal défini. Il est, en effet, peu représenté dans les conditions
physiologiques.
Au contraire, la protéine mdr3 joue un rôle dans la sécrétion biliaire
des phospholipides.
Elle effectue la translocation ATPdépendante de
la phosphatidylcholine du feuillet interne vers le feuillet externe de
la membrane plasmique canaliculaire d’où elle est extraite vers la
lumière grâce à l’action détergente des acides biliaires.
Une autre protéine, codée par le gène ATP8B1 (ouFIC1) a été
identifiée, c’est aussi une ATPase de type P mais sa fonction dans la
sécrétion biliaire est mal définie.
Elle pourrait permettre la
translocation des aminophospholipides du feuillet externe vers le
feuillet interne de la membrane plasmique canaliculaire.
Le transporteur canaliculaire MPR2 permet la sécrétion de la
bilirubine conjuguée.
D - FORMATION DE LA BILE VÉSICULAIRE
:
La bile canaliculaire n’a pas la même composition que la bile
vésiculaire.
En particulier, les cellules épithéliales ductulaires ou
cholangiocytes possèdent des transporteurs (CFTR et AE2) qui vont
faciliter la sécrétion de chlore et de bicarbonate. Les voies biliaires
sécrètent une solution riche en bicarbonate sous l’effet de la
sécrétine.
La vésicule biliaire réabsorbe de l’eau et des électrolytes et
concentre la bile hépatique par un facteur de dix environ.
Des transports actifs des différentes molécules dans le canalicule
biliaire permettent la sécrétion biliaire, mais celle-ci n’est efficace que
lorsque la structure de l’hépatocyte est intacte.
En particulier, la
polarité cellulaire (séparation entre la membrane sinusoïdale et la
membrane canaliculaire de l’hépatocyte), l’intégrité du cytosquelette
indispensable aux contractions des canalicules biliaires et à
l’imperméabilité des jonctions serrées intercellulaires et
l’homéostasie du pool calcique intrahépatocytaire doivent être
conservées.
Complications de la cholestase
:
A -
COMPLICATIONS CLINIQUES :
Les manifestations cliniques de la cholestase sont la conséquence de
l’accumulation des constituants normalement éliminés dans la bile.
Elles sont souvent retardées par rapport aux manifestations
biologiques.
L’ictère est la manifestation clinique la plus courante. Il
résulte de l’accumulation sanguine de la bilirubine. Le prurit, très
fréquemment observé, n’est pas clairement expliqué.
Il pourrait être
secondaire à l’augmentation sanguine des concentrations d’acides
biliaires ou d’autres substances pruritogènes et, en particulier, les
endorphines.
Lors de cholestases prolongées, l’accumulation de
lipides (cholestérol supérieur à 11,6 mmol/L pendant 3 mois)
entraîne des xanthomes, xanthélasma.
Les autres manifestations
cliniques sont en rapport avec la diminution de la concentration
intestinale des acides biliaires par interruption du cycle entérohépatique,
entraînant une malabsorption de graisses alimentaires et
de vitamines liposolubles (A, D, E, K).
L’évolution des maladies cholestatiques chroniques (cirrhose biliaire primitive, cholangite
sclérosante, peut être est marquée par l’apparition de signes
d’insuffisance hépatocellulaire et d’hypertension portale, faisant
poser l’indication d’une transplantation hépatique.
B - COMPLICATIONS BIOLOGIQUES
:
La manifestation la plus précoce est l’augmentation des
concentrations sanguines d’acides biliaires.
On cite aussi :
– l’augmentation des concentrations sanguines de la bilirubine
conjuguée et du cholestérol ;
– l’augmentation de l’activité de la phosphatase alcaline, du
5’nucléotidase, de la gamma-glutamyl transpeptidase.
L’activité de
la gamma-glutamyl transpeptidase peut être normale au cours de la
cholestase gravidique, de la cholestase secondaire à la prise
d’oestrogène et de la cholestase récurrente bénigne ;
– l’allongement du temps de prothrombine est initialement
secondaire à une diminution de la synthèse des facteurs de la
coagulation dépendant de la vitamine K (facteurs II, VII, IX, X), puis,
associé à un déficit en facteur V, il traduit l’insuffisance
hépatocellulaire.
C - COMPLICATIONS HISTOLOGIQUES
:
D’un point de vue histologique, la cholestase désigne un dépôt
microscopiquement visible de bilirubine dans le parenchyme
hépatique.
Cette bilirubinostase peut être intrahépatocytaire,
intrakupfférienne, canaliculaire.
Elle débute dans la région centrolobulaire.
Des lésions des hépatocytes de la région périportale
apparaissent au cours des cholestases prolongées.
Les rosettes hépatocytaires signent une cholestase prolongée.
Au sein du
parenchyme hépatique, les hépatocytes se disposent autour de
lumières de taille variable optiquement vides ou contenant un
matériel éosinophile ou pigmentaire biliaire, formant un aspect de
tubule.
Il existe parfois une prolifération néoductulaire responsable
en partie, de l’augmentation de l’activité gamma-glutamyl
transpeptidase.
L’évolution des cholestases chroniques est marquée
par le développement d’une fibrose puis d’une cirrhose.
Mécanismes moléculaires
de la cholestase :
Les mécanismes de la cholestase sont nombreux.
Le clonage récent
des différents transporteurs a permis de mieux comprendre les
mécanismes moléculaires de plusieurs maladies héréditaires cholestatiques et, en même temps, de progresser dans la
compréhension des mécanismes de la cholestase.
A - CHOLESTASES INTRAHÉPATIQUES FAMILIALES
ET CHOLESTASE RÉCURRENTE BÉNIGNE
:
Les cholestases intrahépatiques familiales progressives sont un
groupe hétérogène de maladies cholestasiantes survenant chez les
enfants et aboutissant en quelques années à une maladie du foie
sévère nécessitant encore le plus souvent le recours à la
transplantation hépatique.
Trois entités ont été identifiées.
La cholestase récurrente bénigne est une maladie autosomique
récessive, caractérisée par des épisodes d’ictère cholestatique avec
prurit spontanément régressif, n’entraînant jamais de maladie
chronique du foie.
1- Cholestases en rapport avec une modification
de la symétrie de la membrane canaliculaire :
Chez les malades atteints de la maladie de Byler, des mutations du
gène FIC1 ont été identifiées.
La fonction de la protéine codée par le
gène FIC1 est encore hypothétique.
Il pourrait s’agir d’un
transporteur des aminophospholipides ayant un rôle dans le
maintien de l’asymétrie de la composition de membrane canaliculaire.
La disparition de cette asymétrie pourrait
compromettre le fonctionnement ou l’insertion des transporteurs de
cette membrane et donc entraîner une cholestase.
Il pourrait aussi
s’agir d’un transporteur.
Chez les malades atteints de cholestase récurrente bénigne, le gène
muté est aussi le gène FIC1.
Dans le cas de la cholestase récurrente
bénigne, la mutation n’entraînerait qu’une inactivation partielle de
la protéine alors que sa fonction serait sévèrement compromise par
la ou les mutations observées au cours de la maladie de Byler.
2- Cholestase en rapport avec une diminution
de la sécrétion canaliculaire des acides biliaires
:
Au cours de la cholestase intrahépatique familiale de type 2, la
protéine SPGP est absente de la membrane canaliculaire.
La
sécrétion d’acides biliaires dans la bile chez ces malades est
inférieure à 1 % de la normale. Plusieurs mutations du gène FIC2
(SPGP ou BSEP) ont été identifiées.
Les acides
biliaires s’accumulant dans l’hépatocyte sont responsables des
lésions cellulaires.
3- Cholestase en rapport avec une diminution
de la sécrétion canaliculaire des phospholipides
:
La cholestase intrahépatique de type 3 est liée à une
mutation du gène mdr3.
La sécrétion biliaire des phospholipides est
supprimée alors que la sécrétion d’acides biliaires est normale.
Les
micelles formées dans le canalicule biliaire sont des micelles simples
dépourvues de phospholipides et possédant un fort pouvoir
détergent contrairement aux micelles mixtes.
Ce pouvoir détergent
s’exerce sur les cholangiocytes et sur les hépatocytes.
Du fait des
lésions membranaires, il existe une prolifération ductulaire,
expliquant en partie l’augmentation sérique de l’activité de la
gamma-glutamyl-transeptidase (GGT).
B - LA DYSPLASIE ARTÉRIO-HÉPATIQUE OU PAUCITÉ
DES VOIES BILIAIRES INTERLOBULAIRES
SYNDROMIQUES (SYNDROME D’ALAGILLE)
:
Le syndrome d’Alagille est un maladie génétique à transmission
autosomique dominante, associant une cholestase néonatale
chronique en rapport avec une paucité des voies biliaires, un faciès
caractéristique, une hypoplasie ou sténose de l’artère pulmonaire,
des défauts de l’arc vertébral postérieur et un embryotoxon
postérieur.
La paucité des voies biliaires ainsi que les autres
anomalies semblent secondaires à la mutation de gène Jagged1 qui
code pour une protéine jouant un rôle dans la transmission des informations intercellulaires, après fixation sur un récepteur
NOTCH de la membrane cellulaire.
Après fixation de jagged sur
le récepteur Notch, une partie de ce récepteur est transloqué dans le
noyau où il interagit avec une acide désoxyribunucléique (ADN)
binding proteine, permettant ainsi la transmission directe du signal
de la surface cellulaire au noyau.
Notch contrôle ainsi plusieurs
gènes intervenant dans la prolifération cellulaire, la différenciation
cellulaire et l’apoptose.
Il a été récemment montré que le récepteur Notch était absent sur
les cellules biliaires lors de la prolifération néoductulaire secondaire
à une cholestase.
Ce récepteur pourrait donc jouer un rôle important
dans la formation des voies biliaires normales.
C - CHOLESTASE EN RAPPORT AVEC LA SÉCRÉTION
DE CYTOKINES :
Un syndrome de cholestase clinique ou biologique est fréquent au
cours des infections (cholestase para-infectieuse), au cours de
certains cancers (cholestase paranéoplasique), des granulomatoses,
du syndrome d’activation des macrophages.
Histologiquement,
l’architecture hépatique est conservée, il existe une cholestase
intrahépatocytaire et un infiltrat inflammatoire polymorphe parfois
organisé en granulome.
Dans ces différentes situations cliniques, il
existe une synthèse de cytokines (interleukine [IL] 1, IL6, tumour
necrosis factor [TNF]-alpha) par les cellules de Kupffer (macrophage
intrahépatique) en réponse en particulier au cours des sepsis à la
libération d’endotoxines.
Il existe des arguments in vivo et in vitro en faveur du rôle des
cytokines au cours de ces syndromes de cholestase :
– le TNF-alpha provoque une cholestase chez l’homme (administration
pour des études de phase 1) ;
– l’IL1 diminue la sécrétion biliaire dans le modèle du foie isolé
perfusé de rat ;
– l’administration d’anticorps anti-TNF-alpha prévient la diminution de
la sécrétion biliaire induite par les endotoxines.
L’administration
d’anticorps anti-IL6 chez des malades atteints de cancer du rein
associé à une cholestase paranéoplasique permet l’amélioration du
syndrome de cholestase ;
– IL6, IL1,
TNF-alpha altèrent la captation des acides biliaires et l’activité
de la Na+ –K + –ATPase sur des hépatocytes isolés ou en culture.
Il a été récemment montré que les cytokines pro-inflammatoires et
les endotoxines entraînaient un syndrome de cholestase en
modulant l’activité des transporteurs hépatocytaires des acides
biliaires et autres anions organiques.
Après fixation sur leurs
récepteurs de la membrane basolatérale de l’hépatocyte, elles
modifient les signaux des voies de la transduction, aboutissant à
des altérations de la transcription de certains gènes et en particulier
ceux des transporteurs des acides biliaires.
La diminution de
l’activité des transporteurs des acides biliaires, qu’elle soit
secondaire à une redistribution de la protéine de transport du
secteur membranaire vers le secteur intracellulaire ou à une
diminution de la synthèse des ARNm puis de la protéine de
transport entraîne une diminution de la sécrétion biliaire et donc
une cholestase.
Cet effet a été démontré pour le transporteur sodium-dépendant de la membrane basolatérale de l’hépatocyte,
pour le transporteur des anions (MPR2, responsable de la sécrétion
du glutathion et du flux biliaire indépendant des acides biliaires) et
pour le transporteur des acides biliaires de la membrane canaliculaire de l’hépatocyte.
L’expression moléculaire de la
Na–K+ ATPase est augmentée au cours des cholestases liées aux
cytokines, ce qui pourrait favoriser la survie des hépatocytes au
cours de la cholestase.
L’expression des gènes MDR1 et MDR3 est
aussi augmentée sur la membrane basolatérale.
L’augmentation de
l’activité de ces transporteurs pourrait favoriser l’élimination de la
bilirubine, des acides biliaires sulfatés des hépatocytes vers la
sinusoïde hépatique, diminuant ainsi leur toxicité intrahépatocytaire.
De même, la diminution de l’activité MRP2
pourrait, en particulier, permettre l’augmentation de la concentration hépatocytaire en glutathion et que celui-ci puisse jouer son rôle
d’antioxydant dans l’hépatocyte (en situation d’agression) plutôt que
d’être éliminé dans la bile.
D - CHOLESTASE PAR OBSTRUCTION
:
Après une ligature du cholédoque chez le rat, la concentration
d’acides biliaires sériques augmente pendant 3 jours puis diminue
progressivement.
Cela suggère une adaptation des différents
transporteurs des acides biliaires au cours de la cholestase.
Il a été
montré une diminution de la transcription du transporteur
sinusoïdal hépatocytaire des acides biliaires et de son expression
membranaire. En revanche, l’expression du transporteur
canaliculaire des acides biliaires est en partie conservée.
De plus,
l’expression du transporteur iléal des acides biliaires est diminuée
et celle du transporteur rénal augmente.
Ces différentes
adaptations permettent de diminuer l’accumulation hépatique et
sérique des acides biliaires et donc leur toxicité.
E -
AMÉLIORATION DE CERTAINES CHOLESTASES
PAR DES ACIDES BILIAIRES HYDROPHILES :
L’accumulation des acides biliaires joue un rôle primordial dans les
complications de la cholestase.
De façon qui pourrait sembler
paradoxale, l’acide ursodésoxycholique (acide biliaire hydrophile) a un effet bénéfique au cours de certaines cholestases.
Chez l’homme,
un bénéfice clinique de l’ursodeoxycholic acid (UDCA) a été montré
au cours de la cirrhose biliaire primitive et de la cholestase
gravidique.
Les mécanismes de cet effet bénéfique sont multiples
(modification qualitative du pool des acides biliaires de l’organisme,
effet cytoprotecteur, modulation de l’expression des molécules
human leucocyte antigen (HLA)...).
Chez les souris transgéniques mdr2-/mdr2-, qui ont, comme dans
la cholestase familiale progressive de type 3, une inhibition de la
sécrétion canaliculaire des phospholipides, l’UDCA a un effet
thérapeutique.
Lorsque ces souris ont une nourriture enrichie en UDCA, la composition de leur bile est modifiée (contient de
l’UDCA, acide biliaire plus hydrophile et donc moins détergent), les
anomalies biologiques et histologiques (inflammation portale,
prolifération ductulaire et fibrose) s’améliorent.
Cette étude
démontre l’importance de la composition de la bile (contenu en
phospholipides et proportions des différents acides biliaires) dans
les lésions de cholestase.
Conclusion
:
La découverte des mutations des gènes des différents transporteurs canaliculaires au cours des cholestases progressives familiales a permis,
au cours des dernières années, de mieux comprendre le rôle de ces
transporteurs dans la formation de la bile et dans la physiopathologie de
la cholestase.
L’activité et l’expression des protéines de la membrane canaliculaire ainsi que de celles de la membrane basolatérale sont à
l’étude au cours des cholestases d’autres origines.
Pour simplifier, il
semble que l’expression des transporteurs de la membrane basolatérale
de l’hépatocyte soit souvent diminuée, alors que celles des transporteurs
canaliculaires soit inchangée ou augmentée.
Les modifications de
l’expression des différents transporteurs pourraient permettre de
prévenir l’accumulation des substances toxiques (les acides biliaires,...)
En facilitant leur élimination systémique ou, au contraire, de conserver
dans l’hépatocyte des molécules antioxydantes (glutathion).
Des études sont nécessaires afin de connaître le rôle des mutations des
transporteurs à l’état hétérozygote dans l’expression de la cholestase.
En particulier, il a été démontré chez les mères d’enfants atteints de cholestases progressives familiales de type 1 ou 3, et qui sont
obligatoirement hétérozygotes pour les mutations des gènes FIC1 ou
MDR3, une fréquence élevée de cholestase gravidique en
rapport avec l’augmentation des oestrogènes au cours du troisième
trimestre de la grossesse.
Cet exemple suggère que des cholestases plus
sévères pourraient survenir chez des malades ayant des déficits partiels
dans les protéines de transport, lorsqu’ils sont soumis à des situations
pouvant entraîner une cholestase (médicaments, infections...).