Les exérèses pancréatiques sont indiquées dans des circonstances
variées ; le plus souvent, elles s’adressent à des tumeurs malignes,
rarement à des tumeurs bénignes, et il s’agit alors surtout de tumeurs
endocrines, sécrétantes ou non.
Les pancréatectomies sont également
envisagées dans le traitement des pancréatites aiguës ou chroniques.
Enfin, dans certains cas, des lésions traumatiques pancréatiques graves
peuvent conduire à un geste d’exérèse.
Maximale en cas de tumeur maligne, dans le souci de passer au large de la tumeur, l’exérèse peut
devenir minimale en cas de lésion bénigne et préserver la rate en cas de
pancréatectomie caudale ou consister en une simple énucléation, en cas
d’insulinome céphalique par exemple.
La grande variété des lésions pancréatiques explique que le geste
d’exérèse soit loin d’être univoque.
Pour la clarté de l’exposé nous
envisagerons successivement :
– les pancréatectomies droites avec pour type le plus fréquemment
utilisé la duodénopancréatectomie céphalique ;
– les ampullectomies ou exérèses de l’ampoule de Vater ;
– les pancréatectomies gauches avec ou sans conservation splénique ;
– les pancréatectomies totales, qu’il s’agisse des duodénopancréatectomies
totales ou des pancréatectomies plus ou moins
étendues avec conservation duodénale.
Il faut souligner d’emblée que cette chirurgie d’exérèse pancréatique, si
elle reste délicate et mérite un apprentissage qui relève non seulement
de la chirurgie digestive mais aussi vasculaire, a vu ses résultats
s’améliorer.
En effet, la morbidité opératoire et surtout la mortalité ont
considérablement diminué au cours de la dernière décennie, notamment
après exérèses céphaliques.
C’est ainsi que dans sa série de 458 duodénopancréatectomies céphaliques, Trede relève une mortalité
postopératoire globale de 2,7 % et l’absence de mortalité pour les 118
dernières résections.
Cameron rapporte des résultats analogues.
Si
l’objectif « zéro mortalité » reste idéal, il doit tout au moins être
approché au prix d’une technique opératoire rigoureuse et sûre, et
d’indications bien posées.
C’est précisément dans l’analyse des
indications que Trede évoque en premier lieu les « nihilistes » qui
préconisent des gestes palliatifs même en présence de lésions résécables,
invoquant une lourde mortalité des exérèses pour une survie à 5 ans très
faible.
Cette dernière varie en effet de 2 à 25% selon les séries.
En
réalité, ce taux dépend largement de la localisation de la tumeur et
notamment de sa situation juxta-ampullaire ou non, de la variété
histologique et de la précocité diagnostique.
Dans l’enquête
multicentrique nationale sur le cancer du pancréas exocrine réalisée pour
l’Association française de chirurgie (AFC), les exérèses
pancréatiques (près de 800 cas) ont conduit à un taux actuariel de survie
à 5 ans de 11 %.
Celui-ci atteignait 19 % en l’absence d’atteinte
ganglionnaire pour descendre à 3 % dans le cas contraire.
À l’opposé
des « nihilistes » se situent les « activistes » qui proposent des exérèses
élargies, associées à des cellulolymphadénectomies étendues. Fortner
a, le premier, prôné de telles exérèses qu’il a qualifiées de
pancréatectomies « régionales ».
Les résections vasculaires en cas
d’envahissement par la tumeur ont été préconisées, notamment pour la
veine porte : d’abord sans reconstruction, puis suivies de
reconstruction soit par rapprochement avec la veine mésentérique
supérieure, soit par interposition de greffons veineux.
Les pancréatectomies régionales ont été classées en trois stades par Fortner.
Cependant, les résultats de ces exérèses élargies
n’ont pas été à la hauteur des espérances et la plupart des auteurs ont
renoncé aux pancréatectomies régionales de principe pour les réserver à
certains cas pour lesquels ce type d’exérèse constitue la rare mais seule
chance de guérison.
Dès lors se dessine la troisième attitude, qualifiée
de « réaliste » par Trede et qui réserve les exérèses, partielles ou totales,
aux tumeurs de petite taille, résécables en totalité, avec l’espoir d’être
curatif.
Les taux de survie à 5 ans restent certes médiocres mais il importe de
souligner que la résection, chaque fois qu’elle est réalisable, offre la
meilleure palliation, à défaut d’être curative.
C’est dire la place que
méritent d’occuper les traitements adjuvants postopératoires et
notamment radiothérapie et chimiothérapie dont l’efficacité, quoique
modeste, a été suggérée par quelques études.