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Chirurgie
Ostéotomies maxillomandibulaires techniques
Cours de Chirurgie
 

 

 

Introduction :

La correction d’une dysharmonie maxillomandibulaire ne peut se résumer dans la réalisation d’un geste chirurgical, aussi performant soit-il.

La restitution simultanée de la forme et de l’équilibre occlusal impose à l’opérateur l’acquisition préalable d’une compétence en stomatologie et une indispensable formation à la chirurgie maxillofaciale.

Cet impératif occlusal rend compte également de la place primordiale de l’orthodontiste qui doit réaliser, en concertation avec le chirurgien, l’indispensable préparation des arcades à l’aide d’un appareillage multiattaches.

Préparation orthodontique :

La tentation est forte de se passer d’orthodontie lors d’un décalage squelettique sans grand désordre dentaire, mais ce serait une erreur, l’orthodontie préopératoire est incontournable.

D’une part, il faut rendre congruentes les deux arcades afin d’obtenir une bonne occlusion dentaire après ostéotomie, ce qui assure la stabilité du résultat.

D’autre part, la nature ayant une tendance spontanée à occulter un défaut en créant des compensations alvéolaires (exemple : proversion des incisives supérieures et rétroversion des incisives inférieures dans une classe III), il va falloir supprimer ces compensations et extérioriser le défaut.

Le décalage dentaire doit donc être mis en concordance avec le décalage squelettique.

A - OCCLUSION :

L’occlusion, c’est-à-dire lorsque les dents mandibulaires établissent un contact d’engrènement avec les dents du maxillaire, doit être analysée sous ses deux aspects : statique et dynamique.

1- Statique :

L’arcade dentaire supérieure doit circonscrire l’inférieure et avec un petit recouvrement des incisives supérieures sur les inférieures.

En vue latérale, une occlusion dentaire est considérée comme normale si la première molaire et la canine supérieures sont en arrière d’une demi-cuspide de leur antagoniste.

C’est la classe I d’Angle.

Toutefois, à la suite d’extractions thérapeutiques, les molaires supérieures peuvent s’engrener en avant d’une demicuspide avec les molaires inférieures.

Les contacts des dents avec leurs antagonistes doivent être établis de manière tripodique.

2- Dynamique :

Lors des mouvements de propulsion-rétropulsion, d’abaissementélévation et de latéralité, certaines dents ou certains groupes de dents protègent les autres dents (de l’abrasion notamment) et l’articulation temporomandibulaire (ATM) (d’un déséquilibre musculaire).

Lors des mouvements de propulsion, les incisives inférieures glissent sur les faces palatines des incisives supérieures et doivent provoquer une disclusion totale des secteurs latéraux et postérieurs.

Dans les mouvements de latéralité, lorsque la mandibule glisse sur le côté, tout en gardant un contact dentaire, la canine inférieure doit glisser sur la face palatine de la canine supérieure et provoquer une disclusion de toutes les autres dents.

C’est ce que l’on appelle la protection canine.

Dans ces mouvements de latéralité, il est possible d’avoir un contact des canines, prémolaires et molaires du côté du mouvement qui doit provoquer une disclusion des incisives et du secteur latéral et postérieur opposé.

C’est ce que l’on appelle une protection de groupe. On trouve souvent chez un patient deux types d’occlusions.

– La position d’intercuspidation maximale (PIM) est celle que l’on retrouve naturellement, celle qui donne un maximum de contact entre les dents antagonistes.

– L’occlusion de relation centrée (ORC) est la relation dentaire obtenue lorsque les condyles mandibulaires sont situés en position centrale, haute et non contrainte dans leur loge articulaire.

Elle est trouvée en appuyant légèrement vers l’arrière sur le menton du sujet, en position allongée, tout en appuyant vers le haut sur le bord inférieur de la partie horizontale de la mandibule.

Faire correspondre ces deux occlusions est un objectif thérapeutique de fin de traitement.

Après ostéotomie, ces relations statiques et dynamiques doivent être établies pour obtenir une stabilité du résultat.

Cependant, lors de décalages importants, si l’on veut tenir compte du risque de récidive lié à des problèmes fonctionnels ou à des facteurs résiduels de croissance, le chirurgien peut prévoir une hypercorrection, ne faisant pas d’emblée coïncider PIM et ORC ; la correspondance de ces deux occlusions ne se réalisant qu’à la fin de l’orthodontie postchirurgicale.

B - OBJECTIFS ORTHODONTIQUES :

En préalable à tout traitement orthodonticochirurgical, l’état buccal doit être parfait ; reprise des soins endodontiques défectueux, soins du parodonte, conseils d’hygiène.

L’objectif de l’orthodontiste est d’anticiper la future occlusion en fonction du type d’intervention, et cette préparation doit être la plus complète avant l’intervention.

Avec l’analyse céphalométrique des téléradiographies, et le set-up céphalométrique (le traitement orthodontique et les ostéotomies sont simulés par la céphalométrie), on visualise les objectifs du traitement orthodontique.

1- Supprimer les compensations :

En présence d’une malocclusion squelettique importante, les axes dentaires sont orientés de manière à diminuer le défaut.

C’est ce que l’on appelle les compensations ; il faut les supprimer, aggraver le décalage dentaire.

L’écart entre les incisives doit être au moins aussi important que la correction chirurgicale souhaitée au niveau osseux. Mais les axes incisifs doivent rester en équilibre sur leur base squelettique ; trois points sont à contrôler :

– l’axe des incisives dans le profil.

Quelques mesures angulaires simples sur la téléradiographie de profil sont à surveiller :

– premières références : l’incisive supérieure forme avec le plan palatin un angle d’environ 115°.

L’incisive inférieure, elle, forme avec le plan mandibulaire un angle d’environ 90°.

Ces angles varient avec la typologie du patient ; les incisives peuvent être plus verticales chez les sujets à face longue et plus obliques chez les sujets à face courte ;

– deuxièmes références : les axes incisifs supérieur et inférieur doivent former ensemble, après chirurgie, un angle d’environ 130°.

L’incisive supérieure forme donc avec le plan occlusal de l’arcade maxillaire un angle d’environ 60° et l’incisive inférieure forme avec le plan occlusal de l’arcade mandibulaire un angle d’environ 70°.

Ces deux plans occlusaux sont confondus, à la suite de l’ostéotomie ;

– l’existence d’espaces interdentaires. S’ils sont larges, leur fermeture risque de provoquer une rétroversion importante des incisives.

Il peut être préférable de conserver des espaces et de leur trouver une solution prothétique ultérieurement ;

– une bascule du plan d’occlusion peut être prévue lors de l’intervention chirurgicale.

Il faut l’anticiper en versant plus ou moins les incisives supérieures.

2- Congruence des arcades :

La préparation orthodontique doit être la plus précise possible avant l’intervention.

– La courbe de Spee est aplanie, les diastèmes fermés, les rotations corrigées, l’éventuelle dysharmonie dentomaxillaire (DDM) prise en compte.

L’obtention d’axes incisifs comme vu précédemment peut nécessiter des extractions.

Ce sont alors le plus fréquemment des prémolaires, très exceptionnellement une incisive inférieure.

– Des prises d’empreintes régulières permettent une manipulation des moulages pour mettre en évidence les interférences occlusales, et matérialiser les futurs rapports occlusaux dans les trois sens de l’espace, afin d’obtenir un engrènement qui satisfait aux critères statiques et dynamiques de l’occlusion.

– Pour le sens transversal, l’expansion est réalisable, mais au-delà de 4 à 5mm, le risque de fenestration des racines (des secteurs latéraux) au niveau de la corticale externe ou d’une version vestibulaire des couronnes est important ; cette version, particulièrement récidivante, serait un facteur d’instabilité du résultat.

– Dans les cas d’ostéotomies segmentaires, pour l’expansion (bi- ou tripartite) ou l’impaction, dans les cas de Wassmund, une ouverture d’espace de 1 à 1,5 mm est réalisée entre les dents, là où passera le trait d’ostéotomie ; on s’applique à ce que les racines ne convergent pas lors de la création de cet espace ; on tente même d’augmenter la distance inter-radiculaire.

C - MOYENS :

L’orthodontie est un déplacement dentaire par remodelage de l’os alvéolaire sous l’effet d’une contrainte mécanique, transmise à la dent par l’intermédiaire d’attachements fixés sur elle.

Le positionnement de l’attachement sur la dent va déterminer la position de la dent sur l’arcade dentaire. Cette technique sophistiquée (techniques multiattaches) va permettre la préparation des arcades dentaires en vue de l’intervention chirurgicale avec une grande précision.

La phase préchirurgicale dure environ 1 an ½ (moins dans les cas simples).

Lorsque les objectifs sont réalisés (congruence et décompensation), des arcs chirurgicaux épais (à champ rectangulaire) avec des potences soudées ou clipsées entre chaque dent sont placés.

Ils permettent un réglage rapide en peropératoire, une contention postchirurgicale atraumatique pour le parodonte, avec un maintien par élastiques intermaxillaires.

Lorsque la préparation orthodontique préchirurgicale est insuffisante, qu’il reste des contacts prématurés lors de la manipulation des moulages, ou lorsqu’il est impossible de la parfaire, dans les cas de certaines béances, d’asymétries, de restaurations prothétiques (couronne, bridges, implants), d’absence de matériel dentaire, des gouttières interocclusales sont réalisées.

Elles le sont sur set-up dentaire et sur articulateur (les moulages sont mis en articulateur, et les ostéotomies sont simulées afin d’obtenir le futur rapport d’engrènement des arcades dentaires).

Elles doivent être les plus fines possible, permettant à certains endroits des contacts dent à dent.

Ces gouttières sont à différencier des gouttières de transfert qui servent à repositionner le maxillaire supérieur à partir de l’inférieur dans les ostéotomies bimaxillaires, et aux gouttières de contention placées lors de la dépose du multibagues.

Lors des ostéotomies segmentaires, on utilise le plus souvent des arcs segmentés avec potences, une gouttière est alors nécessaire, mais une boucle d’ouverture au niveau des futurs traits d’ostéotomie peut être réalisée sur un arc continu.

L’orthodontie postchirurgicale plus courte (environ 6 mois) corrige les dernières imperfections dans les cas simples.

Des élastiques intermaxillaires maintiennent le résultat.

Ils sont verticaux pour asseoir le calage occlusal, et obliques pour lutter contre la récidive (orientés en classe II ou classe III selon le cas).

L’orthodontie postchirurgicale est plus longue dans les cas d’asymétrie où la gouttière est meulée progressivement pour permettre les égressions au moyen d’élastiques intermaxillaires.

Ces élastiques sont portés 23 h/24 h pendant quelques mois (environ 3 dans les cas simples) puis diminués progressivement, jusqu’à ce que les fonctions soient normalisées.

Lors de la dépose du multibagues, une contention par plaque ou gouttière amovible est nécessaire à l’arcade supérieure.

Les incisives, plus fréquemment les inférieures, peuvent être solidarisées par un fil collé sur leur face linguale afin d’éviter une récidive de rotation.

D - CONCLUSION :

Dans les ostéotomies unimaxillaires, la partie mobilisée est repositionnée suivant l’engrènement obtenu par la préparation orthodontique.

Dans les ostéotomies bimaxillaires, c’est le bloc maxillomandibulaire qui est repositionné chirurgicalement.

L’orthodontie va déterminer la relation du maxillaire avec la mandibule, par le biais de l’engrènement, c’est dire son importance dans ces ostéotomies.

Dossier et simulation préchirurgicale :

La planification d’une ostéotomie impose une triple approche, clinique, orthodontique et céphalométrique de la dysharmonie.

Le bilan clinique va s’attacher à étudier les rapports des différents étages de la face dans l’espace, leur symétrie et leur orientation.

Il détaille l’articulé dentaire et les rapports dents/lèvre supérieure.

Ces observations s’intègrent dans un examen clinique général permettant de peser l’indication opératoire.

La deuxième étape est occlusale ; elle consiste, à l’aide de moulages en plâtre montés sur articulateur, à simuler les déplacements osseux et apprécier la bonne congruence des arcades dentaires en fin de préparation orthodontique.

Une analyse sur arc facial est préalablement réalisée, elle va permettre de positionner l’arcade maxillaire par rapport à un certain nombre de repères anthropométriques (la racine du nez, les conduits auditifs externes, les rebords orbitaires inférieurs…) et de reproduire aussi exactement que possible les rapports maxillaire/mandibule.

À partir de ce montage sur articulateur et en tenant compte de critères cliniques et radiologiques, les moulages en plâtre vont être découpés et déplacés pour corriger l’occlusion dentaire.

Cette correction est effectuée (dans les ostéotomies bimaxillaires) en deux étapes : une première maxillaire et une seconde mandibulaire.

Chaque étape est conclue par la réalisation d’une plaque d’intercuspidation : l’une dite intermédiaire établissant les relations dentaires après la seule mobilisation du moulage maxillaire, l’autre dite finale correspondant à la correction occlusale finale après mobilisation mandibulaire associée.

Au terme de ce set-up dentaire, le praticien dispose de deux plaques d’intercuspidation, et d’une feuille récapitulative recensant la direction et l’amplitude des mouvements qu’il devra faire effectuer au maxillaire et à la mandibule au cours du geste opératoire.

La troisième étape est céphalométrique.

Il est nécessaire de disposer pour celle-ci des trois incidences téléradiographiques (face, profil et Hirtz), les clichés de face et axial permettant l’analyse d’une éventuelle asymétrie faciale.

L’analyse en incidence de profil permet de préciser le diagnostic de la dysmorphose en utilisant comme référence, en ce qui nous concerne, l’analyse architecturale de J Delaire.

Le chirurgien va ensuite simuler les mobilisations osseuses, à l’aide d’un calque.

Dans un premier temps, il reproduit sur le calque les contours de la mandibule.

Il déplace ensuite sa feuille de façon à articuler au mieux son dessin mandibulaire avec l’arcade maxillaire.

Il trace alors les contours maxillaires.

Ce nouveau bloc maxillomandibulaire va ensuite être déplacé et positionné en respectant les standards céphalométriques : point NP (nasopalatin) sur la ligne CF1, plan d’occlusion aligné sur CF7, rapport du point stomion (contact bilabial) et du bord incisif supérieur …

Il mesure alors l’amplitude et la direction du déplacement maxillaire dans les plans sagittal et vertical. Enfin, il discute l’opportunité de réaliser une génioplastie pour superposer le point Me avec son correspondant théorique.

Le produit de cette simulation céphalométrique est donc un calque spécifiant les données relatives à la mobilisation du maxillaire et éventuellement du menton.

Les données téléradiographiques et dentaires sont alors confrontées.

Les conflits (pas exceptionnels) sont gérés subjectivement par l’opérateur en fonction du contexte clinique (documents photographiques) et de son expérience.

Si cela est nécessaire, les plaques d’intercuspidation sont refaites.

L’ensemble de ces données corrigées par cette triple confrontation, clinique, occlusale et céphalométrique, est définitivement consigné sur un document, véritable feuille de route de l’opérateur.

Ces informations peuvent être, aujourd’hui, transférées au bloc opératoire sous un mode informatique dans le cadre des gestes médicochirurgicaux assistés par ordinateur (GMCAO).

Anesthésie :

La chirurgie orthognatique concerne le plus souvent des sujets jeunes de classe American Society of Anesthesiologists (ASA) 1 et 2 mais également des patients présentant des syndromes d’apnées du sommeil ou des malformations multiples.

La consultation préanesthésique doit s’efforcer de dépister le risque fréquent d’intubation difficile, rechercher d’éventuels troubles de la crase sanguine et faire le bilan des malformations associées.

L’anesthésiste doit fournir une information claire sur les risques encourus au cours de cette chirurgie majoritairement fonctionnelle, voire morphologique qui ne doit en aucun cas engager le pronostic vital et sur la situation postopératoire (prise en charge de la douleur, oedème, blocage intermaxillaire, transfusion éventuelle).

Le protocole anesthésique a pour objectif de permettre le retour rapide à une ventilation spontanée en cas de problème d’intubation et de limiter au maximum le saignement peropératoire.

De plus, pour ces patients porteurs d’un blocage intermaxillaire (par des élastiques, gage d’une plus grande sécurité ou par des fils d’acier, plus stable), il est primordial d’éviter le risque de réveil retardé, l’hypotonie des voies aériennes supérieures et les nausées ou vomissements postopératoires.

La prémédication est administrée par voie orale : hydroxyzine (1 à 2 mg/kg) en évitant toute benzodiazépine pour les patients porteurs d’un syndrome d’apnées du sommeil ou présentant des critères d’intubation difficile.

Le propofol (2,5 à 5 mg/kg) est l’élément de base de l’induction en association avec le sufentanil (0,3 à 0,6 µg/kg) une fois la possibilité de ventilation et d’intubation vérifiée.

L’anesthésie locale de la glotte peut permettre d’éviter la curarisation qui n’est pas toujours indispensable pour la chirurgie.

L’intubation est nasotrachéale avec une sonde armée. Une attention toute particulière est apportée au positionnement de la sonde, cousue à la cloison nasale, pour éviter toute ulcération des ailes du nez.

Des sondes préformées de divers types sont utilisées par certaines équipes.

Les raccords aux tuyaux du respirateur sont placés en position céphalique par rapport au patient mais le monitorage anesthésique et le respirateur sont installés à ses pieds afin de libérer le champ opératoire.

En cas d’intubation difficile prévisible, l’intubation guidée par fibroscopie sous anesthésie en ventilation spontanée s’impose comme la méthode offrant le plus de garanties de réussite et de sécurité (Expertise 1996).

Si un packing est mis en place par le chirurgien pour limiter les risques d’inhalation peropératoire de sang, son retrait doit alors être scrupuleusement vérifié avant la réalisation du blocage intermaxillaire.

Une sonde gastrique peut être mise en place pour assurer la vacuité gastrique avant l’extubation.

Le monitorage anesthésique utilisé n’est pas spécifique mais, le champ opératoire englobant les voies aériennes supérieures, la surveillance des paramètres ventilatoires doit être très attentive pour dépister précocement toute ouverture ou obstruction du circuit respiratoire.

L’entretien de l’anesthésie est réalisé par des agents halogénés (desflurane ou sévoflurane) en circuit fermé ou par du propofol en perfusion continue (6 mg/kg/h) permettant de diminuer les nausées et vomissements.

L’intensité des stimulations nociceptives au cours de l’intervention étant très variable, l’analgésie est assurée par une perfusion continue de sufentanil (0,3 à 0,6 µg/kg/h) ou de rémifentanil (0,25 à 0,5 µg/kg/min) dont la vitesse est adaptée aux différents temps chirurgicaux.

La réduction du saignement peropératoire, gênant sur le plan chirurgical, est obtenue, outre la profondeur de l’anesthésie, par une position proclive à 15°, par une ventilation visant à diminuer les pressions d’insufflation pour améliorer le retour veineux et par une hypotension contrôlée.

L’isoflurane, la nicardipine, les dérivés nitrés ou le sulfate de magnésium sont utilisés par divers auteurs pour maintenir une pression artérielle moyenne inférieure à 65 mmHg (ou 70 % de la valeur basale du patient) mais restant supérieure à 50 mmHg.

L’anesthésie locorégionale (blocs des branches du trijumeau : nerfs infraorbitaires et mandibulaires) peut aussi être associée pour atteindre plus facilement ces objectifs tensionnels.

La lutte contre l’hypothermie, assurée par un réchauffement externe (dispositifs à air chaud pulsé) et par le réchauffement des solutés perfusés, participe également à la réduction du saignement peropératoire.

L’antibioprophylaxie est nécessaire, assurée par l’amoxicilline associée à un inhibiteur de bêtalactamases.

Elle est débutée avant l’incision, renouvelée toutes les deux demi-vies pendant l’intervention et ne devrait pas dépasser 48 heures selon les recommandations françaises.

Certaines équipes la poursuivent cependant pendant 5 jours.

Une corticothérapie à visée antioedémateuse est instaurée dès l’induction de l’anesthésie (2 mg/kg de méthylprednisolone), répétée en fin d’intervention et poursuivie les 48 premières heures postopératoires (1 mg/kg/j).

Trente minutes avant la fin de l’intervention, les nausées et vomissements sont systématiquement prévenus par injection intraveineuse d’ondansétron (4 mg) et l’analgésie postopératoire est débutée par propacétamol (2 g) ou néfopam (20 mg).

Après une aspiration soigneuse du pharynx chez un patient bien éveillé, l’extubation est réalisée et, en cas d’ostéotomies du maxillaire supérieur, deux sondes nasopharyngées sont mises en place pour prévenir toute obstruction des voies aériennes.

Une pince coupante doit être positionnée près du patient dès le réveil en cas de blocage aux fils d’acier.

La surveillance postinterventionnelle, en position demi-assise, doit être prolongée, permettant d’assurer une analgésie efficace.

Une titration par morphine intraveineuse est réalisée pour obtenir une échelle visuelle analogique (EVA) < 4 et l’analgésie est entretenue par du propacétamol associé pendant 48 heures à la morphine en injections fractionnées systématiques ou par pompe autocontrôlée (PCA).

Selon certains auteurs, l’analgésie locorégionale pourrait jouer un rôle en fonction du terrain des patients.

En cas de syndrome d’apnées du sommeil, l’analgésie évite les morphiniques qui majorent le risque apnéique et utilise le néfopam en perfusion continue (120 mg/24 h).

La surveillance oxymétrique doit alors être poursuivie au moins 24 heures au mieux en soins intensifs postopératoires.

La ventilation en pression positive est impérative en préopératoire mais ne peut être poursuivie en postopératoire immédiat sur ce type de chirurgie en raison du risque d’emphysème sous-cutané facial.

Les complications anesthésiques spécifiques à la chirurgie des ostéotomies sont rares, dominées par le maintien de la perméabilité des voies aériennes supérieures et notamment le risque d’intubation trachéale difficile ou impossible et l’inhalation.

Les hémorragies graves sont exceptionnelles, le saignement est relativement prédictible et ne nécessite qu’exceptionnellement le recours à la transfusion sanguine.

Un protocole de transfusion autologue programmé ne paraît donc pas nécessaire.

Le risque d’obstruction des voies aériennes supérieures durant la phase de réveil est réel. Un monitorage adapté (oxymétrie) et une surveillance attentive sont indispensables surtout en cas de syndrome d’apnées du sommeil associé.

Le risque d’infection du site opératoire est inférieur à 5 % et les complications chirurgicales les plus fréquentes sont représentées par les lésions nerveuses des branches trijéminales, généralement temporaires.

Au total, quel que soit le protocole anesthésique choisi, il doit être facilement réversible en cas de difficultés d’intubation, permettre un bon contrôle tensionnel et un réveil rapide sans hypotonie des voies aériennes supérieures.

Cette chirurgie fonctionnelle de la face impose, plus qu’ailleurs, une parfaite collaboration entre les équipes anesthésique et chirurgicale pour éviter la survenue de complications rares mais potentiellement graves.

Installation, asepsie et matériel :

Le patient est installé en décubitus dorsal.

La ventilation est assurée par une intubation nasotrachéale suturée au septum membraneux.

Le système de ventilation est disposé sagittalement vers le haut, solidaire et aussi près que possible du front du patient (filtres à distance).

Le chirurgien (droitier) se place à la droite du patient, son premier aide est en face de lui, le second aide, s’il y a lieu, est à la tête du patient.

L’instrumentiste est à la droite de l’opérateur, l’anesthésiste au pied du patient à sa gauche.

L’asepsie concerne le tégument facial et cervical, la cavité buccale et les fosses nasales.

La disposition des champs opératoires libère l’ensemble de la face et de la partie antérieure du cou. La sonde d’intubation est enveloppée d’une bande stérile tout le long de sa traversée du champ opératoire.

L’instrumentation comporte, outre les instruments habituels destinés à la chirurgie endobuccale :

– un moteur électrique sur lequel s’adapte une pièce à main standard et une scie va-et-vient ;

– des rugines courbes ;

– une grosse pince sans griffe de type « Rochester » pour prendre appui sur le coroné ;

– des écarteurs spécifiques ;

– une pince de Rowe et Killey (ou un équivalent) pour mobiliser le maxillaire ;

– des ciseaux à frapper droits et courbes de tailles différentes et un maillet ;

– un nécessaire à blocage bimaxillaire ;

– des pinces gouges et/ou de Kérisson.

Ostéotomies :

Le traitement des dysharmonies maxillomandibulaires poursuit deux objectifs :

– changer la situation spatiale des bases osseuses pour restituer la forme ;

– rétablir une relation maxillomandibulaire dans le respect absolu de l’équilibre occlusal, critère de référence et de stabilité des résultats.

Cet impératif rend compte de la place actuelle de l’orthodontiste qui va réaliser l’indispensable préparation des arcades à l’aide d’un appareillage multiattaches.

Les performances actuelles de l’orthodontie, à même de lever les compensations alvéolodentaires et de niveler les arcades, limitent considérablement les indications des ostéotomies segmentaires.

Le geste chirurgical le plus fréquemment indiqué consiste dans la mobilisation globale des arcades à la rencontre d’une intercuspidation correctement préparée lors du temps orthodontique.

A - SITE MAXILLAIRE :

1- Ostéotomies totales :

Inspirées des connaissances acquises de la traumatologie, leurs tracés sont classiquement calqués sur les lignes de séparation craniofaciale selon Le Fort.

Elles ont en commun la mobilisation monobloc de l’arcade dentaire supérieure, par le biais d’une disjonction ptérygomaxillaire, mais varient, par la hauteur et l’orientation du tracé supérieur choisi, à la demande de la déformation.

* Ostéotomies de type Le Fort I :

La première description faite par Wasmund en 1927 comportait la section des apophyses ptérygoïdes. Schuchardt en 1942 réalise une disjonction ptérygomaxillaire.

+ Voies d’abord :

L’incision bivestibulaire est réalisée à travers la muqueuse libre, audessus de la ligne de réflexion, d’un secteur prémolaire à l’autre.

Elle s’infléchit vers le haut sur la ligne médiane, esquivant ainsi l’insertion du frein labial.

La rugination sous-périostée doit être large ; elle conditionne la bonne exposition du squelette sans traction excessive sur les commissures, facilite la mobilisation osseuse, permet enfin une redistribution harmonieuse des parties molles sur les nouveaux reliefs osseux.

La libération atteint ainsi le rebord orbitaire en haut, le zygoma en dehors, l’apophyse montante et l’orifice piriforme en dedans, en libérant largement la muqueuse nasale et le bord caudal du septum.

Toute rugination de la berge inférieure est proscrite, pour garantir la vascularisation du parodonte.

+ Découpe osseuse :

Menée à la scie depuis la tubérosité maxillaire, elle traverse délibérément le sinus maxillaire pour se terminer sur le rebord de l’orifice piriforme 4 mm au-dessus de l’apex canin et au-dessous du cornet inférieur.

La hauteur du tracé conditionne l’effet du déplacement sur la base du nez.

La libération de la maxillectomie nécessite :

– l’ostéotomie du vomer sur la ligne médiane au ciseau boutonné ;

– l’ostéotomie sagittale paramédiane de la paroi interne de chaque maxillaire au ciseau droit en préservant en arrière l’intégrité des vaisseaux palatins descendants, lesquels assurent la vitalité avéolodentaire à travers la fibromuqueuse palatine ;

– la disjonction interptérygomaxillaire est réalisée à la rugine ou au ciseau courbe par la voie vestibulaire ;

– des manoeuvres de mobilisation à l’aide d’un davier de Rowe- Killey peuvent être complétées par une traction antéropostérieure sur un appui tubérositaire ;

– le contrôle du pédicule palatin descendant et la libération de son conduit osseux évitent sa striction lors des mobilisations verticales.

+ Contention :

Contrôlée par blocage intermaxillaire, de part et d’autre d’une plaque d’intercuspidation, elle est temporairement assurée par une suspension sous-orbitaire.

La contention définitive après contrôle des différents mouvements maxillomandibulaires fait appel à des microplaques vissées dont la tolérance et la fiabilité sont unanimement reconnues.

Les greffes osseuses d’interposition ou d’apposition ne sont indiquées que dans les grands déplacements verticaux et antéropostérieurs.

Un certain nombre de variantes ont été décrites, adoptant un tracé quadrangulaire vers le haut (Bell), ou oblique vers l’apophyse orbitaire externe (Souyris).

Ces ostéotomies dites intermédiaires sont à nos yeux rarement indiquées.

2- Ostéotomies segmentaires :

La mobilisation d’un ou plusieurs groupes alvéolodentaires du maxillaire, décrite il y a de nombreuses années, se résume en fait à deux descriptions : celle de Wasmund (1935) pour le recul du secteur incisivocanin dans les proalvéolies, celle de Schuchardt (1959) pour l’impaction du secteur prémolomolaire dans les béances avec supraclusion molaire.

Plus récemment Bell, Epker et Schendel, après avoir démontré la sécurité vasculaire procurée par l’intégrité de la fibromuqueuse palatine, décrivent la segmentation d’un Le Fort I en trois ou quatre fragments.

En pratique, il apparaît qu’une bonne préparation orthodontique dispense aujourd’hui le chirurgien de ce découpage de l’arcade en bloc ostéodentaire.

Seule la disjonction médiane ou paramédiane d’expansion transversale peut encore trouver sa place dans les endognathies sévères du maxillaire, parfois instables après expansion orthodontique.

Le tracé de Le Fort I est de loin le plus employé en chirurgie orthognathique courante.

Cependant il y a lieu de ne pas méconnaître dans certaines situations de dysmorphoses à composantes nasale ou orbitaire, les possibilités de mobilisation plus globale du massif facial selon des tracés de Le Fort II et Le Fort III.

* Ostéotomies de type Le Fort II :

Elles ont pour objectif la mobilisation du tiers médian nasomaxillaire selon un tracé plus ou moins proche de la fracture pyramidale.

+ Voies d’abord :

L’accès vestibulaire supérieur précédemment décrit est complété par un abord de la jonction nasofrontale, par voie coronale.

La libération du maxillaire se poursuit par celle des orbites, contournant par en arrière les voies lacrymales, repérant l’artère ethmoïdale antérieure dont on réalise l’hémostase.

La dissection extramuqueuse des fosses nasales est particulièrement minutieuse pour se mettre à l’abri d’une porte d’entrée septique.

+ Découpe osseuse :

Elle débute en haut, à la jonction frontonasale, rejoint la paroi interne des orbites en arrière de l’appareil lacrymal, puis le plancher en dedans du pédicule sous-orbitaire.

La hauteur de la coupe sur la paroi interne doit se trouver à distance du crible ethmoïdal, préalablement repéré par une imagerie préopératoire.

Le tracé s’infléchit ensuite vers le bas à travers le maxillaire pour atteindre la jonction ptérygomaxillaire.

La libération de la pyramide osseuse ainsi délimitée est complétée par la section de la lame perpendiculaire et du vomer, réalisée à travers le foyer d’ostéotomie nasofrontal élargi, suivie d’une disjonction ptérygomaxillaire par voie endobuccale et la mobilisation prudente au davier.

* Ostéotomies selon Le Fort III :

Elles réalisent une séparation totale du massif facial.

+ Voies d’abord :

– L’incision coronale représente l’accès principal.

Elle procure une excellente exposition de l’auvent nasal, de l’orbite interne, du plafond orbitaire jusqu’à la fente sphénoïdale, des parois externes jusqu’à la fente sphénomaxillaire, de la coulisse temporozygomatique après libération du muscle temporal.

– Une contre-incision sous-orbitaire ou transconjonctivale peut aider à l’exposition du rebord infraorbitaire, du plancher de l’orbite ; la rugination rejoint ainsi les secteurs précédemment exposés.

– La dissection extramuqueuse endonasale est identique à celle de l’ostéotomie de type Le Fort II.

– Une courte incision vestibulaire aborde la jonction ptérygomaxillaire, à laquelle on peut également accéder par voie haute temporale surtout chez l’enfant.

+ Découpe osseuse :

– L’ostéotomie nasofrontale et sa retombée orbitaire interne sont identiques à celles du tracé de Le Fort II.

– En dehors, la découpe de l’orbite externe se prolonge sur le frontal, soit par un éperon vertical de transposition autobloquant, soit un croissant frontal tranversal d’avancée du rebord orbitaire supérieur, sous couvert d’un trou de trépan foré en dehors de la crête temporale (méthode « à crâne semi-ouvert » de P Tessier).

Un ergot sphénofrontal peut également participer à la stabilité du montage.

La disjonction temporozygomatique puis ptérygomaxillaire permet enfin la mobilisation et la projection du massif facial au davier et aux distracteurs.

+ Contention :

Par ostéosynthèses aux fils d’acier ou microplaques, elle est utilement renforcée par les greffes osseuses interfrontonasale et ptérygomaxillaire.

Des greffons orbitaires, zygomatiques et glabellaires assurent la continuité entre les pièces osseuses et modèlent les contours.

Le contrôle de l’occlusion, chez l’adolescent et l’adulte, est obtenu par blocage intermaxillaire qui peut être levé avant l’extubation, grâce à l’autocontention du montage.

Chez le jeune enfant, une hypercorrection sagittale du trouble occlusal est recommandée.

3- Ostéotomies combinées :

Les discordances qui peuvent exister entre la malocclusion et le degré de rétrusion du massif facial ne permettent pas toujours la correction du désordre par une ostéotomie monobloc, mais nécessitent la combinaison de deux tracés (Le Fort III plus Le Fort I par exemple) autorisant des déplacements différentiels (P Tessier).

De même, une hypoplasie orbitaire externe peut faire l’objet d’une ostéotomie orbitomalaire en C indépendamment du tracé maxillaire sous-jacent.

B - SITE MANDIBULAIRE :

La mandibule se présente à l’ostéotomie sous un jour totalement différent en raison de :

– sa structure osseuse à corticale épaisse, traversée par le pédicule dentaire inférieur ;

– sa mobilité et la puissance des muscles masticateurs qui l’animent, soumettant les foyers d’ostéotomie à d’importantes forces de flexion et de torsion.

Du point de vue chirurgical, la mandibule peut être sectorisée en trois territoires :

– l’antérieur, en avant du trou mentonnier ;

– le moyen qui chevauche avec le précédent pour se terminer à l’angle mandibulaire ;

– le postérieur correspond au ramus ou branche montante.

1- Territoire antérieur :

Il peut être le siège d’ostéotomies segmentaires portant sur la projection du relief mentonnier ou la position du secteur incisivocanin.

* Génioplasties :

Fréquemment associées aux ostéotomies maxillomandibulaires, elles permettent la reposition spatiale exacte du point menton.

+ Voie d’abord univoque :

Elle est menée par voie vestibulaire inférieure, en portant l’incision sur le versant labial, pour conserver un appui à la suture et prévenir une récession gingivale par rétraction de la fibromuqueuse attachée.

La rugination antérieure conduit à l’émergence des nerfs mentonniers que l’on contourne pour atteindre le rebord basilaire, libéré sur sa partie antérieure, repectant les insertions musculaires sus-hyoïdienne, digastrique et génioglosse, lesquelles assurent la vascularisation de la pièce ostéotomisée et participent à la morphologie de l’angle cervicomentonnier.

+ Découpe osseuse :

Elle est horizontale, ménage 4 mm sous les apex dentaires, en tenant compte de la résection éventuelle d’une tranche osseuse intermédiaire, pour réduire une hauteur verticale excessive.

Le tracé oblique en bas et en arrière passe sous les trous mentonniers pour rejoindre le rebord basilaire.

Le bloc ostéotomisé peut être déplacé : en avant, en arrière, en haut, à la faveur de la résection d’une tranche osseuse, en bas en comblant le diastème vertical par un substitut osseux.

Des tracés spécifiques à l’avancée des géniotubercules ont été décrits par Powell et Rilley dans le cadre de la prise en charge chirurgicale du syndrome d’apnée obstructive du sommeil ; ils sortent du cadre de cet exposé.

+ Ostéosynthèse :

Double, paramédiane, elle fait appel indifféremment aux sutures métalliques, au vissage de pleine épaisseur ou aux plaques vissées chantournées.

* Ostéotomies segmentaires du secteur incisivocanin inférieur :

Elles représentent les tracés les plus anciennement connus (Hullihen 1848) mais ne conservent aujourd’hui que des indications exceptionnelles :

– ostéotomie interruptrice (Converse, 1952) selon un tracé en « marche d’escalier », esquivant le trou mentonnier et assurant la stabilité du montage ;

– ostéotomie non interruptrice (Köle, 1959) le plus souvent susjacente à une génioplastie.

2- Territoire moyen :

La branche horizontale n’est pas un site d’ostéotomie très favorable en raison de la présence :

– du pédicule alvéolaire inférieur qu’il faut esquiver ou dérouter à travers une tranchée osseuse ;

– des germes dentaires et de leurs parodontes qu’il faut préserver ;

– de la fibromuqueuse gingivale inextensible lors des mouvements d’avancée, et dont l’étanchéité est difficile à assurer en fin de course.

Mehnert (1967) et Delaire (1970) décrivent le clivage sagittal de la branche horizontale qui peut trouver indication dans de rares inframandibulies antérieures, sans modification de l’occlusion molaire.

3- Territoire postérieur :

Le ramus mandibulaire représente le site chirurgical par excellence.

La multitude des tracés d’ostéotomies qui ont pu lui être appliqués au fil du temps peuvent se résumer en fait à trois modalités.

* Clivage sagittal :

Il réalise une séparation de la branche montante en deux valves : l’une externe solidaire de l’ATM et portant le coroné, l’autre interne solidaire du pédicule vasculonerveux et de l’arcade dentaire.

Imaginé par Schuchardt en 1954, le tracé est modifié par Dalpond et Obwegeser de 1955 à 1959.

+ Voie d’abord :

L’incision vestibulaire postérieure tracée sur le versant jugal ménage un lambeau commissural utile pour faciliter la suture.

La traversée du buccinateur permet d’atteindre aisément le plan osseux libéré sur son bord antérieur jusqu’au coroné mais respectant en dehors les insertions massétérines pour préserver la vascularisation de la valve externe.

En dedans, la libération sous-périostée susspigienne, après avoir repéré l’échancrure sigmoïde, expose sous le feuillet périosté le pédicule avéolaire inférieur.

+ Tracé :

Conduit à la fraise et à la scie, il débute horizontalement au-dessus de l’épine de Spix (lingula mandibulaire), se poursuit sur le bord antérieur puis sur la face externe.

En dehors, la direction du trait peut varier : il rejoint la région préangulaire si l’on doit effectuer un recul mandibulaire, ou se prolonge en avant pour allonger la valve externe et favoriser le contact osseux lors d’une avancée.

Le clivage est effectué à l’ostéotome fin, dirigé en dehors, en évitant les mouvements de torsion à l’origine de traits de refend difficilement contrôlables.

L’entrebâillement des valves permet la visualisation du pédicule que l’on peut libérer, si utile, de la valve externe à l’aide d’un décolleur.

L’ostéotomie se poursuit en arrière du pédicule franchissant le bord postérieur, libérant les deux tables osseuses.

Ce clivage mené sur toute la largeur du ramus peut se terminer plus précocement sur la valve interne pour éviter un trop grand débord de celle-ci dans un recul mandibulaire.

La réduction et l’immobilisation du clivage sagittal sont délicates en raison de l’instabilité du fragment externe portant le condyle, dont la situation est d’appréciation difficile.

Après stabilisation de la valve interne par blocage intermaxillaire dans l’occlusion choisie, la valve externe est portée en haut et en arrière dans sa cavité glénoïde.

Différents procédés de contrôle peropératoires ont été imaginés ; aujourd’hui les techniques dites des gestes chirurgicaux assistés par ordinateurs (GMCAO) apportent leur aide à ce réel problème de chirurgie orthognathique.

Après aménagement de la valve externe, la contention est habituellement assurée par un vissage bicortical réalisé par voie transjugale.

Une triangulation, de part et d’autre du pédicule, offre une très bonne résistance.

Dans les avancées de longue portée, une plaque vissée corticale externe peut s’avérer utile pour renforcer le montage.

La vérification de l’occlusion en peropératoire, après libération du blocage intermaxillaire, est une obligation.

* Ostéotomie en potence ou en « L inversé » :

Décrite par Trauner en 1955, modifiée par Schuchardt en 1958, elle autorise de plus grandes avancées mandibulaires et nécessite l’apport d’une greffe osseuse.

+ Voie d’abord :

Cutanée sous- et rétroangulaire de Sébileau, elle procure un jour excellent sur toute la face externe du ramus.

Après la traversée du peaucier et la protection du rameau cervical du nerf facial, on atteint l’angle mandibulaire dont on incise le périoste en arrière des vaisseaux faciaux.

La face externe est exposée jusqu’à l’échancrure, en ruginant largement le masséter, puis la face interne en arrière de l’épine de Spix.

+ Ostéotomie :

Bicorticale, réalisée à la fraise ou à la scie, elle comporte une branche verticale rétrospigienne, parallèle au bord postérieur ; elle s’interrompt 1 cm avant l’échancrure pour se prolonger par une branche sus-spigienne selon un trajet légèrement ascendant vers la base de l’apophyse coronoïde qui reste solidaire du fragment postérieur.

P Tessier décrit un tracé à branche antérieure descendante dessinant un tracé en V inversé.

Après séparation des fragments et blocage intermaxillaire, une greffe osseuse habituellement iliaque est interposée dans le foyer d’ostéotomie et immobilisée par ostéosynthèse.

* Reconstruction du ramus par greffe costale ostéochondrale (Rowe 1972, Poswillo 1974) :

Elle est justifiée dans les grandes dysplasies latérales avec hypoplasie ou absence du ramus dans certaines séquelles d’ankylose temporomandibulaire.

+ Voie d’abord :

Double, prétragienne et cervicale, elle expose les rudiments temporomandibulaires à la recherche d’un appui glénoïdien, puis l’angle mandibulaire.

+ Greffon ostéochondral :

Il provient du sixième ou septième arc costal controlatéral en préservant périoste et périchondre au niveau de la synchondrose, pour ne pas la fragiliser.

Il est solidement encastré est synthésé sur la mandibule restante, après avoir contrôlé son orientation et sa position au niveau d’une glène rudimentaire qu’il faut parfois reconstruire.

Déroulement de l’intervention :

Nous prenons comme description type la réalisation d’une ostéotomie bimaxillaire associée à une génioplastie.

L’intervention débute par une infiltration muqueuse, à la Xylocaïnet adrénalinée, de l’ensemble des abords, de la muqueuse nasale et des pédicules trijéminaux (V2 et V3).

La génioplastie est le premier temps opératoire. Les modalités pratiques sont celles décrites précédemment.

On procède ensuite à l’abord de la branche montante de la mandibule, après mise en place d’une cale molaire du côté opposé à l’abord.

La muqueuse est incisée au bistouri électrique en regard du bord antérieur du coroné, selon le tracé décrit plus haut.

L’exposition est assurée par un écarteur coudé à 90°.

On réalise dès lors la dissection sous-périostée de la branche montante et du coroné selon les limites précisées antérieurement.

L’exposition est assurée par une pince type « Rochester » clampée sur le coroné, et par une rugine ou un écarteur courbe, posé en appui à la face interne du bord postérieur du ramus.

Les deux côtés sont abordés de façon identique.

L’abord maxillaire se fait au travers de l’incision vestibulaire labiale supérieure déjà décrite.

La muqueuse et les muscles sont incisés au bistouri électrique jusqu’à l’os afin de réaliser la libération des structures osseuses par un décollement sous-périosté (selon les limites déjà décrites) jusqu’aux sutures ptérygomaxillaires qui sont disjointes.

Sur la ligne médiane, le septum nasal est libéré de même que le plancher des fosses nasales. Une suspension sous-orbitaire est mise en place immédiatement en dehors du pédicule de chaque côté.

Le développement des ostéotomies se déroule en trois temps : l’amorce de l’ostéotomie mandibulaire, l’ostéotomie maxillaire, la totalisation de l’ostéotomie mandibulaire.

– L’amorce de l’ostéotomie mandibulaire selon le tracé précédemment décrit débute par la réalisation d’une tranchée horizontale, à la fraise boule, quelques millimètres au-dessus de l’épine de Spix.

Elle se poursuit ensuite par la section de la corticale antérieure (au-dessus du nerf), pour se terminer par une section de la corticale externe de la branche horizontale jusqu’au bord basilaire à la scie va-et-vient.

Le clivage est ensuite poursuivi au ciseau à frapper, jusqu’à pouvoir dissocier les deux valves osseuses pour contrôler le nerf sans pour autant les séparer complètement de sorte à conserver une référence mandibulaire stable lors du positionnement du maxillaire au temps suivant.

Le même geste est réalisé des deux côtés.

– L’ostéotomie maxillaire suit le tracé de Le Fort I décrit dans le chapitre précédent.

Elle est bilatérale et symétrique et elle est effectuée à la scie va-et-vient.

Elle est complétée au ciseau à frapper au niveau des piliers molaires et canins, et au ciseau boutonné au niveau du septum nasal.

La disjonction maxillaire s’effectue ensuite au davier de Charles Freidel ou de Rowe et Killey.

Les tranches osseuses sont régularisées, voire retaillées en fonction du déplacement à effectuer.

L’intégrité des pédicules palatins descendants est contrôlée.

Le maxillaire est enfin mobilisé dans la direction souhaitée en faisant référence à la plaque d’intercuspidation intermédiaire.

L’ensemble maxillomandibulaire est ensuite solidarisé au reste du crâne à l’aide des fils de suspension sous-orbitaires, ce qui permet de stabiliser le maxillaire en bonne position pendant que l’opérateur réalise les synthèses à l’aide de quatre plaques en titane (vis monocorticales de 5 mm).

Après déblocage, la plaque d’intercuspidation intermédiaire et les suspensions sont déposées.

Les ostéotomies mandibulaires sont complétées en totalisant la séparation osseuse au ciseau à frapper.

La sangle musculaire ptérygomassétérine est affaiblie.

Le patient est à nouveau bloqué aux fils d’acier, sur la plaque d’intercuspidation finale.

L’étape suivante consiste à replacer le condyle dans sa position préopératoire.

Cette position est assurée, soit par l’aide, soit grâce à un davier solidarisant les deux valves osseuses.

Trois ou quatre vis bicorticales, mises en place par voie transjugale comme cela a été décrit précédemment, pérennisent la synthèse. Après déblocage, l’occlusion est contrôlée.

Si elle n’est pas conforme au projet, les synthèses doivent être réajustées, après avoir rectifié la position du fragment condylien.

Les sites opératoires sont abondamment lavés au sérum physiologique.

Les abords sont suturés en deux plans au fil résorbable.

L’occlusion est contrôlée par quelques élastiques d’orthodontie correctement orientés.

La perméabilité des fosses nasales est assurée par la mise en place de deux sondes nasopharyngées.

Le tégument du menton est rappliqué par une mentonnière confectionnée avec de l’Élastoplastet.

PROBLÈME DU CONDYLE :

Le replacement du condyle mandibulaire dans la chirurgie orthognathique est un réel problème.

Gateno, avance un pourcentage de malposition condylienne après chirurgie variant de 1 à 75 %.

La moyenne semble se situer aux alentours de 9 %.

Epker avance trois grandes raisons pour contrôler la position du condyle mandibulaire en chirurgie orthognathique :

– assurer la stabilité du résultat chirurgical à long terme, surtout depuis l’avènement des ostéosynthèses rigides ;

– réduire l’incidence des dysfonctionnements de l’articulation ;

– optimiser l’efficacité masticatoire.

Même si certaines données sont contradictoires, il paraît prudent de maintenir le condyle aussi près que possible de sa position préopératoire lors des ostéotomies, surtout si l’ostéosynthèse est rigide.

Les principaux arguments retenus sont les suivants :

– la corrélation entre récidive squelettique et malposition condylienne ;

– les contraintes articulaires imposées par le serrage des vis ;

– les modifications radiologiques à long terme (résorption osseuse condylienne).

Depuis le système de Leonard, les méthodes de positionnement citées dans la littérature se sont multipliées.

On peut schématiquement les regrouper en quatre grandes classes.

La première regroupe toutes les méthodes empiriques qui permettent au chirurgien, grâce à son expérience, de placer le condyle dans la position adaptée.

Le second groupe de méthodes comprend celles qui consistent à effectuer un certain nombre de mesures in vivo à partir de points de repères dentaires ou osseux.

Le troisième groupe représente toutes les méthodes basées sur des données radiologiques et plus récemment sur des éléments échographiques.

Mais l’ingéniosité et l’imagination des auteurs se sont surtout développées dans le quatrième groupe de méthodes où le repositionnement du condyle est effectué à l’aide d’appareillages plus ou moins sophistiqués qui se différencient par leur ancrage, soit dentaire, soit osseux.

La plupart de ces systèmes, en dehors des plus récents, ne permettent pas un repositionnement tridimensionnel et, comme le souligne Ellis, la précision du repérage est souvent très aléatoire.

De plus ces méthodes encombrent le champ opératoire de nouvelles pièces pouvant gêner le temps de l’ostéosynthèse.

Nous avons proposé et validé cliniquement une méthode originale développée dans le cadre des GMCAO...

Elle utilise trois émetteurs infrarouges, deux sont fixés sur les apophyses coronoïdes, le troisième, servant de référence, est fixé sur l’arcade sourcilière gauche.

La position spatiale de ces émetteurs est repérée de façon interactive et par un capteur optique tridimensionnel, et transmise à l’opérateur sur l’écran d’un moniteur (station Orthopilote Société Aesculap).

Cette méthode permet de réaliser le repérage et le positionnement du fragment condylien dans les trois directions de l’espace avec une précision inférieure au degré et au dixième de millimètre.

Le contrôle positionnel est interactif, c’est-à-dire qu’il s’effectue en temps réel et n’impose aucune modification de la technique opératoire.

Suivi :

L’antibioprévention est la règle.

Les corticoïdes sont poursuivis 48 heures à la dose de 1 mg/kg/24 h.

Les sondes nasopharyngées et la mentonnière sont laissées en place 24 à 48 heures.

L’alimentation est reprise le lendemain de l’intervention.

Elle est liquide les 10 premiers jours puis mixée pendant 6 semaines.

Le régime est normalisé progressivement vers le deuxième mois.

Le guidage élastique est habituellement maintenu jour et nuit en dehors des repas les 3 premiers mois puis seulement la nuit les 3 mois suivants.

Les contrôles cliniques sont programmés à 15 jours, 1 mois, 3 mois, 6 mois, 1 an.

Le bilan radiologique comprend l’orthopantomogramme et des téléradiographies dans les trois incidences.

Il est reproduit à 8 jours, 6 mois et 1 an.

Distractions :

L’ostéogenèse par distraction est une alternative à la chirurgie orthognathique surtout dans le cadre des malformations graves.

Elle permet une résolution plus précoce des déformations sans faire appel aux techniques de greffes osseuses.

L’utilisation de cette technique en substitution de la chirurgie orthognathique traditionnelle est plus discutable.

Le principe repose sur la création d’un foyer d’ostéogenèse (par une corticotomie ou une ostéotomie), en préservant au maximum la vascularisation périostée.

Une période de latence est respectée pour permettre à l’hématome de s’organiser et notamment de s’enrichir, via l’angiogenèse locale, en facteur de croissance (entre autres plaquettaires).

Cette période dure de 5 à 7 jours.

Puis le système est activé au rythme moyen de 1 mm/j.

Il faut ensuite prévoir une période de consolidation de 6 à 8 semaines avant de déposer l’appareillage.

L’os néoformé n’acquiert les propriétés mécaniques d’un os normal qu’après environ 2 ans.

Tous les étages de la face peuvent être concernés :

– la distraction mandibulaire est la plus répandue.

Elle relève essentiellement d’appareillages endobuccaux, les indications devant se limiter aux fortes rétromandibulies symétriques et surtout asymétriques de l’enfant avant l’âge requis pour une chirurgie orthognathique ;

– la distraction maxillaire trouve son indication principale dans les séquelles de fente sévères.

Elle est possible en théorie avec des systèmes endobuccaux.

Mais l’importance des entraves cicatricielles fait préférer les systèmes externes à appui péricrânien ;

– la mobilisation de l’étage moyen par des systèmes enfouis ou par des casques est de plus en plus répandue dans les syndromes malformatifs comme les syndromes de Crouzon.

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