Examen neurologique facial à l’usage de l’odontologiste et du chirurgien maxillofacial
(Suite)
Cours de Médecine Dentaire
*
Troubles de la phonation
et de la déglutition
:
Il ne nous appartient pas ici de décrire les mécanismes
complexes impliqués dans la phonation et la
déglutition mais plutôt de fournir, en cas d’atteinte
de ces deux fonctions, des arguments cliniques en
faveur d’une origine neurologique (et d’en déduire
le niveau lésionnel).
Outre le voile du palais, le
pharynx et le larynx interviennent dans ces mécanismes.
+ Pharynx :
Le pharynx peut être assimilé à un conduit vertical
tapissant en arrière la colonne vertébrale cervicale
et ouvert en avant et en haut vers les fosses nasales
(nasopharynx ou choane), en avant et en son tiers
moyen vers la cavité buccale (oropharynx), en
avant et en bas vers le larynx, partie supérieure de
la trachée et de l’arbre bronchorespiratoire (hypopharynx).
Il se prolonge, à sa partie inférieure, par
l’oesophage (bouche de l’oesophage).
Il est innervé
par le X et accessoirement par le IX.
Les muscles du pharynx sont divisés en deux groupes : les muscles
constricteurs (supérieur, moyen et inférieur) commandés
par le nerf pneumogastrique et le muscle stylopharyngien, élévateur, essentiellement innervé
par le nerf glossopharyngien.
Le déficit de la
motricité du pharynx se traduit par un trouble de la
phase finale de la déglutition (temps pharyngien :
fermeture de l’épiglotte) et donc par un risque
important de fausse-route.
Ce trouble apparaît
d’autant plus volontiers que le bol alimentaire est
suffisamment fissible pour passer l’étroite filière épiglottique, situation privilégiée lors de la déglutition
des liquides et de la salive.
En pratique, il
n’est pas possible, lors de l’examen boucheouverte
du pharynx, de différencier une atteinte du
groupe constricteur d’un déficit de l’élévateur.
À
l’examen, la paroi postérieure du pharynx dévie du
côté sain lors de l’émission du son [a] (signe du
rideau).
Les fibres motrices du IX et du X ont une
origine et un trajet contigus si bien que leur atteinte
est en règle concomitante.
Leurs noyaux
moteurs sont regroupés au sein du noyau ambigu,
situé en position paramédiane postérieure bulbaire.
Les fibres efférentes sortent du bulbe en
avant et en dehors de la lame dorsale de l’olive et
traversent le crâne au niveau du trou déchiré postérieur
(en compagnie de la racine bulbaire du nerf
spinal).
Le nerf vague forme, avec le nerf spinal
bulbaire, le ganglion plexiforme.
Les fibres motrices
du X à destinée du pharynx (et du voile) sortent
du ganglion plexiforme et rejoignent celle du IX
dans le plexus pharyngien avant de faire synapse
avec les muscles effecteurs.
Le premier motoneurone
cortical à destination du noyau moteur du IX
croise au niveau bulbaire tandis que le faisceau
corticonucléaire faisant synapse avec le noyau moteur
du X envoie non seulement des fibres qui
décussent à l’étage bulbaire mais aussi des fibres
homolatérales au premier motoneurone.
Ainsi, en
termes de motricité pharyngée, on comprend que
l’atteinte unilatérale du noyau ambigu entraîne un
trouble de la déglutition tandis que l’atteinte d’un
faisceau corticonucléaire ne compromet que la
commande du muscle stylopharyngien, muscle accessoire,
insuffisant à provoquer un trouble de la
déglutition.
Il faut donc une atteinte des deux voies corticonucléaires à destination des noyaux ambigus
pour provoquer une symptomatologie similaire à
une lésion bulbaire : c’est le syndrome pseudobulbaire.
Celui-ci associe des troubles de déglutition
de type bulbaire et des troubles de la phonation
uniquement en cas d’atteinte des voies corticonucléaires droite et gauche à destination
des noyaux ambigus et en particulier de leur zone
médiane (noyau moteur du X).
Ce syndrome peut se
compléter lorsque les voies corticonucléaires bilatérales
sont atteintes de manière extensive.
Si les
lésions touchent les voies de commande de la motricité
faciale, le patient a au maximum une diplégie
faciale, au minimum une amimie.
Enfin s’y
associe souvent alors un rire et un pleurer spasmodique
par dérégulation de la traduction par la mimique
du ressenti émotionnel.
+ Larynx :
Le larynx constitue la partie initiale et supérieure
du tractus respiratoire.
Il est composé de l’os
hyoïde, d’éléments cartilagineux (cartilage cricoïde,
thyroïde la pomme d’Adam, aryténoïdes, corniculés et de l’épiglotte), de ligaments et de
membranes qui maintiennent ces cartilages entre
eux et de muscles.
Ceux-ci se divisent en deux
groupes : les muscles extrinsèques qui amarrent le
larynx (et le pharynx) à la langue et à la colonne
vertébrale, et les muscles intrinsèques qui assurent
les mouvements de fermeture-ouverture du larynx
et donc la phonation.
Ces derniers sont innervés par
deux branches du X auquel s’adjoint le nerf spinal
bulbaire (naissant à la partie inférieure du noyau
ambigu, il suit le trajet du X du trou déchiré postérieur
aux muscles laryngés intrinsèques) : le nerf
laryngé inférieur ou nerf récurrent et, plus accessoirement,
la branche inférieure (nerf laryngé externe)
du nerf laryngé supérieur.
Les deux nerfs récurrents ont des trajets très
différents.
Le nerf récurrent droit se détache du nerf
vague alors que celui-ci chemine verticalement en
arrière du principal paquet artérioveineux cervical :
carotide primitive en dedans et veine jugulaire interne
en dehors.
Deux centimètres au-dessus de la
division du tronc artériel brachiocéphalique, le nerf
récurrent se détache donc et effectue une boucle de
l’avant vers l’arrière autour de la portion initiale de
l’artère sous-clavière droite (en regard du dôme pleuropulmonaire droit), puis rejoint, en un trajet
oblique en haut et en dedans, l’angle trachéooesophagien
droit et la loge thyroïdienne droite.
À
cet étage, il est donc au contact en dehors avec la
face postéro-interne du lobe thyroïdien droit (où il
croise sur son trajet la glande parathyroïde inférieure),
en dedans avec l’artère thyroïdienne inférieure,
en avant avec la trachée et en arrière avec
l’oesophage.
Il se termine au niveau du larynx où il
émet des terminaisons vers tous les muscles intrinsèques
hormis le muscle cricothyroïdien.
Le nerf récurrent
gauche a un trajet encore plus long.
Il suit,
comme son homologue, la face postérieure du paquet
vasculaire artère carotide primitive-veine jugulaire
interne, contourne d’avant en arrière la portion
horizontale de la crosse de l’aorte, avant de remonter
en un trajet globalement vertical dans l’angle
trachéo-oesophagien gauche.
Son trajet, jusqu’à sa terminaison, est alors symétrique au nerf récurrent
droit.
Les nerfs laryngés supérieurs ont des trajets
identiques à droite et à gauche.
Le nerf laryngé
supérieur naît du ganglion plexiforme et se dirige
en bas et en dedans vers la paroi latérale du pharynx.
Il croise sur sa trajectoire la carotide interne,
le ganglion cervical supérieur du sympathique et
nerf hypoglosse.
Il émet ensuite une branche supérieure,
sensitive et une branche inférieure, motrice,
le nerf laryngé externe qui va innerver essentiellement
le muscle cricothyroïdien du larynx.
Le déficit unilatéral de la motricité du larynx est à
l’origine d’une voix bitonale caractéristique dont le
grand pourvoyeur est la paralysie récurrentielle, en
particulier après chirurgie thyroïdienne.
Mais, on
l’a compris, bien d’autres étiologies peuvent être
en cause : atteinte des nerfs laryngés supérieur ou
externe, atteinte du nerf vague en amont de la
division récurrentielle.
L’atteinte récurrentielle
peut se voir lors de pathologies aussi variées qu’une
dissection aortique (paralysie gauche), qu’une tumeur
du dôme pleuropulmonaire droit (paralysie
droite), qu’une tumeur oesophagienne ou trachéolaryngée.
En laryngoscopie, la corde vocale est en
adduction mais parfois, elle est tout de même
ouverte par persistance de la commande du muscle cricothyroïdien.
L’atteinte du nerf laryngé supérieur
ou du nerf laryngé externe, à l’origine d’une
paralysie du muscle cricothyroïdien, se traduit par
une absence de bascule du cartilage thyroïde sur le
cartilage cricoïde.
Il s’ensuit une diminution de la
tension des cordes vocales que l’on observe au
mieux en laryngoscopie.
Lorsque l’atteinte a son
origine en amont de la naissance de la branche récurrentielle du nerf vague mais au-dessous du
ganglion plexiforme, la symptomatologie s’enrichit
de signes neurovégétatifs transmis par le X (tachycardie
ou instabilité du rythme cardiaque, modification
du rythme respiratoire, toux coqueluchoïde,
troubles respiratoires en rapport avec l’atteinte de
la motricité diaphragmatique homolatérale, transmise
par le nerf phrénique).
Le tableau se complète
encore lorsque l’atteinte concerne la portion allant
du noyau ambigu au ganglion plexiforme : voix
bitonale et nasonnée, fausses-routes aux liquides
avec régurgitation nasale, signes végétatifs, paralysie
de l’hémivoile et de l’hémipharynx (signes du
voile et du rideau), signes sensitifs.
L’atteinte motrice bilatérale du larynx (syndromes
bulbaires, pseudobulbaires ou lésions bilatérales
sur le trajet des nerfs à destinée laryngée)
s’accompagnent d’une aphonie.
L’épiglotte
n’étant plus mobilisée, une dyspnée ne tarde pas à
apparaître.
Les autres signes d’accompagnement
dépendent du niveau lésionnel.
Sensibilité
:
A - Sensibilité du visage :
Elle dépend essentiellement des branches sensitives
du nerf trijumeau (V), au nombre de trois : le nerf ophtalmique de Willis (V1), le nerf maxillaire
(V2) et le nerf mandibulaire (V3).
Ils se partagent la
sensibilité du visage hormis une petite zone en
regard de l’angle mandibulaire (encoche massétérienne
dépendante des racines C2 et C3), le scalp
occipito-pariéto-temporal (innervé par les racines
C2-C3), et les deux tiers postérieurs de l’oreille
(l’antitragus et la conque sont innervés par le nerf
intermédiaire de Wrisberg et le nerf vague, la partie
médiane et postérieure du pavillon dépendent
des racines C2-C3 ; seuls le tragus et la partie
antérieure de l’hélix dépendent du nerf auriculotemporal,
branche du V3).
Le territoire du V1 comprend l’oeil, la paupière
supérieure, le front, le scalp frontal et la racine du
nez.
Le V1 est formé en dedans du nerf nasal ou nasociliaire qui innerve le dos du nez, la partie
interne de la paupière supérieure et l’oeil.
Il représente
la voie afférente du réflexe cornéen : la
stimulation tactile de l’oeil par gaze stérile (nerf
nasal) provoque la fermeture des paupières (nerf
facial).
En situation médiane, on trouve le nerf
frontal (interne et externe) qui innerve la portion
médiane de la paupière supérieure, la partie interne
et externe du front.
En dehors, le nerf lacrymal
est responsable de la sensibilité de la région
externe de l’orbite et de la paupière supérieure.
Les trois branches du nerf ophtalmique de Willis se
rejoignent pour traverser la fente sphénoïdale en
compagnie des nerfs oculomoteurs (III : nerf oculomoteur
; IV : nerf trochléaire ; VI : nerf abducens)
puis chemine dans la paroi du sinus caverneux, au
contact de l’artère carotide interne, avant d’atteindre
la partie supérieure du ganglion de Gasser.
Ainsi, l’atteinte de l’apex orbitaire, de la fente
sphénoïdale ou du sinus carverneux se traduisent,
entre autres, par un déficit de la sensibilité dans le
territoire du V1.
Le territoire du V2 comprend la partie juxtaorbitaire
externe, l’ensemble de la joue, de la paupière
inférieure à la lèvre supérieure et englobe l’aile du
nez.
Il traverse l’os malaire par le canal sousorbitaire
puis se regroupe avec les nerfs alvéolaires
supérieurs et le ganglion sphénopalatin.
Le V2 traverse
ensuite le crâne au niveau du trou grand rond
et rejoint la partie médiane du ganglion de Gasser.
La région innervée par le V3 correspond au menton
(jusqu’à la lèvre inférieure) et se projette
globalement sur la mandibule à l’exception de l’encoche massétérienne d’innervation cervicale.
Le
nerf mentonnier pénètre dans l’os maxillaire inférieur
par le trou mentonnier puis est rejoint progressivement
par les rameaux incisifs et dentaires
inférieurs dans le canal dentaire (creusé dans la
mandibule) où il prend le nom de nerf alvéolaire
dentaire inférieur.
À son entrée dans le crâne par le
trou ovale, il atteint, juste avant d’arriver à la
partie inférieure du ganglion de Gasser, le nerf
mandibulaire (V3).
Le V3 reçoit également les afférences
du nerf lingual, nerf gustatif et sensitif des
deux tiers antérieurs de la langue et nerf végétatif
(le nerf auriculotemporal, qui assure la sensibilité cutanée en regard de la branche montante de la
mandibule mais aussi une fonction végétative parotidienne
et motrice sur les muscles temporaux ; des
fibres végétatives provenant du ganglion otique).
Enfin, on rappelle que le nerf mandibulaire est le
relais de la branche motrice du nerf trijumeau.
Le ganglion de Gasser est situé dans le cavum de
Meckel puis rejoint la face antérolatérale du tiers
médian de la protubérance ou pont.
Une partie des
fibres sensitives atteignent le noyau sensitif principal
du V homolatéral sur les berges du quatrième
ventricule.
Contrairement aux autres noyaux des
nerfs crâniens, le noyau du trijumeau est un noyau
triple.
En effet les fibres afférentes, sensitives,
rejoignent non seulement le noyau principal à
l’étage pontique mais aussi le noyau mésencéphalique
(en situation périaqueducale en dedans du
pédoncule cérébelleux supérieur) et le noyau de la
racine descendante (ou noyau spinal) qui s’étend
sur toute la hauteur du bulbe et des trois premiers
étages cervicaux.
Le noyau principal est le relais de
la sensibilité tactile discriminative du visage.
Le
noyau mésencéphalique concentre les informations
sensitives proprioceptives médiées par les grosses
fibres myélinisées en provenance des fuseaux neuromusculaires
des muscles masticateurs.
Le noyau
de la racine descendante, centre de la sensibilité thermoalgique, possède, au niveau cervical, une
somatotopie précise : au niveau C1, terminaison
des fibres du V3 ; à l’étage C2, terminaison des
fibres du V2 ; à l’étage C3, terminaison des fibres
du V1.
Pour Kunc (1970) la somatotopie du noyau
spinal serait différente.
Le visage se diviserait en
cercles centrés sur la bouche et discrètement excentrés
vers le haut.
Au centre (région péribuccale)
la sensibilité thermoalgique dépendrait de la partie
supérieure du noyau spinal.
Le cercle le plus externe
(partie inférieure du menton et de la branche
horizontale de la mandibule, partie postérieure de
la branche montante de la mandibule, tempe et
partie supéroexterne du front) relaierait dans la
portion la plus caudale du noyau spinal.
Enfin à un niveau supérieur, après leurs relais
situés au niveau du tronc cérébral, les fibres sensitives
du nerf trijumeau font synapse au niveau des
différents noyaux avec un second neurone qui décusse
immédiatement avant de remonter verticalement
vers le noyau ventro-postéro-latéral du thalamus
(où il existe aussi une somatotopie).
Le
neurone thalamique (3e neurone sensitif) se projette
au niveau de l’aire sensitive primaire (aire
pariétale ascendante controlatérale à l’hémiface
testée).
L’examen de la sensibilité du visage ne peut donc
pas faire abstraction de ces données anatomophysiologiques
complexes : territoires tronculaires (C2-
C3, VII de Wrisberg, V), territoires des branches du
nerf trijumeau, somatotopie des noyaux sensitifs
du V, somatotopie thalamique et corticale.
Les
troubles de la sensibilité sont divers : douleurs de
type névralgique, paroxystiques allant de l’hyperesthésie
à l’hyperpathie (retentissement affectif
disproportionné à l’intensité de la stimulation),
paresthésies, hypoesthésie. Ils sont testés par la
piqûre, les tubes d’eau chaude (40-45 °C) et d’eau
froide (5-15 °C), le contact avec le coton, la pulpe
des doigts de l’examinateur, la sensation vibratoire
d’un diapason maintenu sur une crête osseuse (pallesthésie),
la discrimination de chiffres tracés sur la
peau (graphesthésie), la localisation précise d’une
stimulation (topoesthésie) ou d’une double stimulation
(compas de Weber permettant de mesurer la
distance à partir de laquelle deux stimulations cutanées
concomitantes sont perçues séparément).
Deux situations pathologiques retiennent l’attention
dans l’atteinte de la sensibilité du visage.
La névralgie du nerf trijumeau (névralgie
faciale) dont on distingue classiquement deux types
: la névralgie essentielle qui n’est pas accompagnée
d’un déficit sensitif à l’examen et la névralgie
symptomatique qui, par définition, est
secondaire à une atteinte de tout ou partie des
branches trigéminales et donc révèle un déficit à
l’examen sensitif soigneux du visage (et de la cavité
buccale).
La physiopathogénie de la névralgie essentielle
est désormais mieux comprise.
Elle résulte
d’une agression mécanique sur les grosses
fibres sensitives myéliniques (intervenant dans le
gate-contrôle exercé par ces fibres et jouant un
rôle d’atténuation de la perception douloureuse
transmise par les fibres sensitives amyéliniques).
Les lésions peuvent se situer sur une des branches
du trijumeau ou au niveau du ganglion de Gasser.
Elles n’abolissent donc en rien la sensibilité mais
libèrent seulement la traduction hyperesthésique
du signal sensitif.
Des calcifications durales au niveau
de l’orifice du cavum de Meckel, une simple
surélévation du rocher due au vieillissement, un
contact avec des artères athéromateuses ou sinueuses
(boucle vasculaire) suffisent à déclencher
une névralgie faciale essentielle.
Cela explique
l’efficacité des techniques d’interposition de matériel
(intervention utilisant la technique décrite par Janetta) qui abolissent les zones de contraintes
mécaniques au contact des fibres myélinisées sensitives.
Des techniques plus radicales sont parfois
utilisées au prix de séquelles anesthésiques définitives
: destruction partielle du ganglion de Gasser
ou du ganglion sphénopalatin en cas de névralgie du
V2.
La deuxième pathologie fréquemment en cause
est le zona ophtalmique qui touche l’ensemble du territoire du nerf ophtalmique où l’on peut observer
une efflorescence bulleuse caractéristique,
mettant parfois en jeu le pronostic fonctionnel de
l’oeil atteint.
B - Sensibilité des fosses nasales, de la cavité
buccale et goût :
1- Sensibilité des fosses nasales
:
Le tiers antérieur des fosses nasales dépend du V1
(ainsi que la dure-mère, le sinus frontal et sphénoïdal),
les deux tiers postérieurs des fosses nasales
sont innervés par le V2 (ainsi que les cellules ethmoïdales
postérieures et une partie du sinus sphénoïdal).
L’examen neurologique sensitif des fosses
nasales n’est pas courant, mais ne comporte pas de
difficultés insurmontables : il se fait à l’aide d’un
coton-tige permettant d’explorer la zone antérieure
et la partie avant de la zone postérieure.
Il
n’apporte cependant que rarement des éléments
supplémentaires contributifs aux conclusions de
l’examen du voile et de la cavité buccale.
2- Sensibilité de la langue, des gencives et du
palais :
La langue peut être divisée en deux parties distinctes
séparées entre elles par une frontière matérialisée
par le V lingual, à pointe médiane et postérieure,
constituée de l’alignement en V de grosses
papilles caliciformes.
En avant s’étendent les deux tiers antérieurs de
la langue ou langue mobile, recouverts de fines
papilles et innervés par le nerf maxillaire inférieur.
En arrière, la base de la langue, verticale, d’aspect goudronné est innervée par le nerf glossopharyngien.
La gencive inférieure, la partie interne de la
lèvre inférieure et le pilier antérieur du palais sont
innervés par le V3.
La muqueuse jugale, le palais, la
gencive supérieure et la partie interne de la lèvre
supérieure sont innervés par le V2.
La pointe de
luette, le pilier postérieur et les amygdales sont
sous la dépendance du IX.
La sensibilité du pharynx
est sous la dépendance du nerf glossopharyngien,
tandis que le nerf vague est responsable de l’innervation
sensitive de l’épiglotte, du larynx et de la
trachée.
Les voies de la sensibilité trigéminale sont développées
dans le chapitre « Sensibilité du visage ».
Parmi les branches du V3 impliquées dans la
sensibilité de la bouche, nous étudierons principalement
le nerf lingual et le nerf dentaire (ou alvéolaire)
inférieur.
Le nerf lingual qui rejoint le nerf
dentaire inférieur juste avant de gagner le ganglion
de
Gasser est le nerf sensitif (et gustatif) des deux
tiers antérieurs de la langue. Au sortir de la face inférolatérale de la langue mobile, il entre en
contact avec la glande sublinguale, le canal de
Wharton, et avec la glande sous-maxillaire.
Puis, en
regard de la racine de la dernière molaire, il décrit
une boucle à convexité postéro-inférieure avant
d’adopter un trajet ascendant vers le ganglion de
Gasser.
L’extraction des « dents de sagesse » inférieures
constitue donc un risque de léser le nerf
lingual.
Le nerf dentaire inférieur a un trajet relativement
parallèle au nerf lingual.
À son extrémité
initiale, il reçoit le nerf mentonnier mais aussi le
nerf incisif (innervation de la canine, des deux
incisives et de la gencive adjacente).
Dans le canal
dentaire intramandibulaire confluent vers lui trois
ou quatre rameaux dentaires innervant les prémolaires,
les molaires et la gencive adjacente.
La
partie interne de la lèvre inférieure est innervée
dans sa portion cutanée par le nerf mentonnier et
dans sa portion muqueuse par le nerf incisif.
La partie supéroantérieure de la cavité buccale
jusqu’au pilier antérieur et la base de la luette ont
une innervation sensitive trigéminale dépendant du
V2.
L’arcade dentaire supérieure et la muqueuse
gingivale adjacente sont innervées par les trois
nerfs dentaires antérieur, moyen et postérieur.
Ceux-ci décrivent un véritable plexus dentaire envoyant,
pour chaque racine dentaire, des filets
osseux et muqueux.
Ils rejoignent, en un trajet
ascendant et discrètement oblique vers l’arrière, le
nerf sous-orbitaire.
La muqueuse jugale et la face
interne de la lèvre supérieure sont innervées par les
branches jugolabiales qui gagnent le nerf sous–orbitaire
juste après sa traversée de l’os malaire.
Les
nerfs palatins antérieur, moyen et inférieur, en
charge de la sensibilité du palais et des piliers
antérieurs, gagnent le ganglion sphénopalatin, appendu
à la partie inférieure du tronc du nerf maxillaire,
2 cm en avant du ganglion de Gasser.
Enfin, l’anatomie du nerf glossopharyngien doit
être brièvement rappelée.
La 9e paire crânienne
est un nerf mixte neurovégétatif et sensitif (et
gustatif).
Un contingent moteur, limité, provenant
de la partie supérieure du noyau ambigu, projette
ses fibres à destination du muscle stylopharyngien,
élévateur du pharynx, et du styloglosse,
muscle accessoire et rétracteur de la langue.
Les
fibres sensitives proviennent de la partie postérieure
du voile du palais, du tiers postérieur de la
langue et du pharynx.
Les différents filets nerveux
pharyngiens et linguaux se regroupent, dans l’espace sous-parotidien postérieur, en un tronc ascendant
et oblique vers l’arrière, qui longe le muscle
styloglosse.
Puis le tronc du IX contourne la carotide
interne, passe en arrière et rejoint le ganglion
d’Andersch, paracarotidien, pour ensuite pénétrer
dans le crâne par le trou déchiré postérieur.
Il se
trouve donc dans sa portion exocrânienne initiale
en contact étroit avec le X, le XI bulbaire, la
carotide interne mais aussi la veine jugulaire interne.
Il traverse ensuite la citerne pontocérébelleuse
avant de rejoindre le bulbe au niveau de la
partie supérieure du sillon collatéral supérieur.
Les
fibres sensitives tactiles du nerf glossopharyngien
terminent leur trajet dans le noyau principal du
nerf trijumeau, tandis que les fibres conduisant la
sensibilité thermoalgique atteignent le noyau spinal
du trijumeau.
Le contingent sensitif du nerf glossopharyngien représente la voie afférente du
réflexe nauséeux qui est donc aboli en cas d’atteinte
du IX.
Lorsqu’il existe un phénomène irritatif
de ce nerf, on assiste à une névralgie du glossopharyngien
dont les caractéristiques cliniques ressemblent
à celles de la névralgie essentielle du V mais
pour un territoire sensitif différent lingual postérieur
et pharyngolaryngé.
La névralgie du IX est
donc électivement déclenchée par la stimulation
de ces régions (trigger-zone), par exemple lors de
la phonation et de la déglutition.
En cas de syringomyélie
atteignant les premiers étages médullaires
cervicaux, on comprend dès lors la fréquente intrication
de névralgies du V et du IX par lésion directe
du noyau spinal du trijumeau.
3- Fonctions gustatives
:
Le goût est étroitement dépendant de l’olfaction.
Sans olfaction (sans retour rétronasal d’air), pas de
goût.
Il n’existe que quatre critères gustatifs « primaires
» à partir desquels se décline à l’infini la
palette des goûts des aliments : sucré, salé, amer,
acide.
À l’aide de substances sapides plus ou moins
concentrées, on peut déterminer un seuil de détection, un seuil de reconnaissance mais aussi une
localisation linguale des sensibilités gustatives.
En terme neuroanatomique, les fonctions gustatives
sont prises en charge, nous l’avons dit, par le
V3 pour les deux tiers antérieurs de la langue et par
le IX pour le tiers postérieur de la langue.
Les
papilles gustatives linguales sont de différentes
sortes : papilles caliciformes de gros calibre, constituant
le V lingual, papilles fungiformes sur les
bords latéraux et la pointe de la langue, papilles
foliées en avant du V lingual et sur les bords de la
langue.
Chaque papille est tapissée, en profondeur,
par des bourgeons gustatifs, pièces centrales du
dispositif sensoriel gustatif.
Il existe des bourgeons
du goût non seulement sur la langue mais sur les
piliers, l’épiglotte et la paroi postérieure du pharynx.
Les zones les plus sensibles n’en demeurent
pas moins les bords latéraux et la pointe de langue.
Les filets nerveux gustatifs de la langue mobile
empruntent le nerf lingual. Juste avant d’atteindre
le ganglion de Gasser, les fibres gustatives quittent
le tronc du nerf lingual et gagnent par un filet
nerveux d’anastomose (la corde du tympan), le VII
bis.
Celui-ci rejoint le bulbe et se termine dans la
partie rostrale du noyau du faisceau solitaire.
Les fibres gustatives de la langue verticale empruntent
le même trajet que les neurones sensitifs
du nerf glossopharyngien.
Dans leur trajet terminal,
elles rejoignent la partie médiane du noyau du
faisceau solitaire.
La partie caudale de ce noyau est également le
relais de quelques fibres gustatives provenant de la
partie postérieure de l’épiglotte dont le trajet suit
celui du nerf pneumogastrique.
Le deuxième neurone, dont le corps est situé
dans le noyau du faisceau solitaire, envoie un axone
qui croise au même étage et rejoint le ruban de Reil
médian qui fait relais dans le noyau ventro-postérolatéral
du thalamus.
Le troisième neurone thalamocortical
parvient à la partie inférieure de l’aire
pariétale ascendante.
Fonctions neurovégétatives
:
Elles comprennent la régulation des sécrétions des
glandes lacrymales, de la muqueuse nasale et des
glandes salivaires. Les nerfs efférents ont
pour point commun de prendre leur origine dans
des formations végétatives bulboprotubérantielles
paramédianes indépendantes, de suivre le trajet du
VII (ou VII bis) ou du IX, puis de s’anastomoser et de
rejoindre les fibres des branches du trijumeau
avant d’atteindre leur cible.
À la
lumière de ce schéma, on comprend la fréquente
association, comme dans l’algie vasculaire de la
face par exemple, d’un larmoiement d’un oeil et
d’une rhinorrhée de la narine homolatérale.
Les
fibres régulant ces deux fonctions se rejoignent en
effet sur une grande partie de leur trajet (noyau muco-lacrymo-nasal puis nerf grand pétreux).
De
même, les fibres médiant la sensibilité, la gustation
et la salivation (pour les glandes sous-maxillaires et
sublinguales) passent toutes par le nerf lingual,
expliquant la synergie de ces fonctions.