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Hématologie
Cytogénétique des hémopathies malignes
Cours d'hématologie
 


 

Introduction :

La cytogénétique des hémopathies a pour but de rechercher d’éventuelles anomalies chromosomiques présentes au sein des cellules hématopoïétiques malignes.

Contrairement à la cytogénétique constitutionnelle pré- et postnatale, les anomalies observées sont ici des anomalies acquises, restreintes aux cellules du clone tumoral.

Depuis la découverte du chromosome Philadelphie dans la leucémie myéloïde chronique (LMC) en 1960, de très nombreuses anomalies récurrentes ont été décrites dans la quasi-totalité des hémopathies.

Devant une telle diversité d’anomalies chromosomiques, comment essayer d’appréhender l’impact et le rôle de la cytogénétique hématologique ?

Schématiquement, l’étude du caryotype des hémopathies peut apporter quatre types d’informations. Tout d’abord, la mise en évidence de certaines anomalies répertoriées peut avoir une implication diagnostique.

Ainsi, la découverte d’une translocation t(9;22)(q34;q11) chez un patient présentant un syndrome myéloprolifératif signe la LMC.

D’autres translocations, dans les lymphomes malins en particulier, peuvent être une aide précieuse au diagnostic précis de type tumoral.

Ensuite, et peut-être surtout, l’étude du caryotype a un but pronostique.

En effet, l’analyse de grandes cohortes de patients a permis de définir des groupes pronostiques au sein de chaque hémopathie en fonction des anomalies chromosomiques détectées, permettant ainsi une adaptation de l’intensité thérapeutique pour chaque patient.

L’exemple le plus démonstratif est celui des leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) de l’enfant.

En troisième lieu, la cytogénétique peut avoir une place dans l’évaluation de la réponse au traitement.

L’exemple le plus évident est, là encore, celui de la LMC où la disparition progressive des métaphases Philadelphie positives signe la bonne réponse au traitement.

Enfin, la cytogénétique a eu et garde un rôle majeur dans l’identification de très nombreux gènes impliqués dans les remaniements chromosomiques, et a donc de ce fait un rôle scientifique.

De très nombreux exemples sont fournis lors de l’analyse de chaque hémopathie.

Aspects techniques. Nomenclature :

Par définition, l’analyse du caryotype nécessite l’obtention de métaphases au sein du clone tumoral.

Le premier corollaire de cette évidence est la nécessité absolue de travailler sur un prélèvement tumoral viable, rapidement mis en culture.

Comme tout dogme, celui-ci a été infirmé, et des caryotypes obtenus à partir de cellules congelées ont été rapportés.

Néanmoins, la mise en culture rapide du prélèvement est l’une des clefs de l’obtention de métaphases. Différents types de prélèvements peuvent être analysés : moelle osseuse, sang, liquides d’épanchement, ganglions, voire masses tumorales extraganglionnaires.

La nature des prélèvements varie selon le type de pathologie.

La moelle osseuse est le prélèvement de choix dans les leucémies aiguës, les syndromes myéloprolifératifs et les localisations médullaires exclusives de certaines pathologies lymphoprolifératives.

Le sang périphérique est principalement utilisé dans les syndromes myéloprolifératifs de type leucémie lymphoïde chronique (LLC), mais peut également être utilisé dans les leucémies aiguës avec blastose sanguine. Enfin, les prélèvements ganglionnaires représentent le tissu de choix dans les lymphomes malins.

L’analyse comporte, dans tous les cas, une étape initiale de culture in vitro, variant de quelques heures à 3-4 jours.

Dans le cas des hémopathies « liquides » (prélèvement sanguin, médullaire ou de liquide d’épanchement), le prélèvement est directement mis en culture dans un milieu supplémenté en sérum.

Dans le cas des ganglions ou des masses tumorales, une dissociation préalable est nécessaire afin d’obtenir une suspension cellulaire.

Cette dissociation est généralement mécanique, mais peut également être enzymatique (collagénase, par exemple).

La culture peut être stimulée par adjonction de diverses cytokines, variables selon les pathologies et les habitudes de chacun.

Après des temps de culture là aussi variables selon les pathologies, on ajoute de la colchicine dans le milieu de culture.

Celle-ci étant un poison du fuseau mitotique, elle a pour effet de bloquer les cellules au stade métaphasique de la mitose.

Les temps d’incubation en présence de colchicine sont également variables, allant de 30 minutes à plusieurs heures.

Après centrifugation et élimination du surnageant, les cellules sont remises en suspension dans un milieu hypotonique (sérum dilué ou chlorure de potassium dilué, le plus souvent).

Celui-ci a pour effet de faire « gonfler » la cellule par flux hydrique.

Cette étape est nécessaire à l’obtention d’une dispersion des chromosomes lors de l’étalement. Enfin, les cellules sont fixées, généralement dans un fixateur à base de méthanol et d’acide acétique, puis étalées sur lames.

Les cellules sont ensuite dénaturées et colorées afin de faire apparaître une succession de bandes, caractéristiques de chacun des chromosomes.

Il existe deux grands types de dénaturation : une dénaturation enzymatique par la trypsine et une dénaturation thermique.

La première fait apparaître les bandes G en noir et est appelée « G-banding ».

La seconde, à l’inverse, ne colore pas les bandes G mais les bandes R, et est donc appelée « R-banding ».

Cette dernière méthode est très largement répandue en France, alors que d’autres équipes utilisent volontiers la technique de bandes G.

Si chacune de ces techniques a ses avantages et inconvénients, l’utilisation préférentielle de l’une ou l’autre est essentiellement liée aux habitudes de chacun.

Dans tous les cas, la coloration par le Giemsa fait apparaître une succession de bandes claires et sombres permettant l’identification et le classement des chromosomes.

L’établissement du caryotype a longtemps reposé sur le découpage de chromosomes préalablement photographiés.

Maintenant, la plupart des laboratoires disposent de matériel informatique permettant l’acquisition d’images numériques via une caméra, et surtout l’analyse et le classement directement sur l’écran de l’ordinateur.

L’analyse d’un certain nombre de métaphases (idéalement au moins 20 par patient) permet d’établir la formule chromosomique du patient.

Celle-ci est établie selon une nomenclature internationale régulièrement actualisée.

Il est important d’avoir en mémoire que l’on travaille généralement sur une population cellulaire mixte, normale et tumorale.

Il est donc fréquent d’obtenir une mosaïque correspondant à ces deux populations cellulaires.

À l’extrême, il est donc possible d’obtenir un seul clone, soit normal, soit anormal.

Dans le premier cas, deux types d’interprétation peuvent être proposés : soit les cellules tumorales ont un caryotype ne mettant pas en évidence d’anomalie clonale visible, soit seules les cellules normales se sont divisées lors de la culture et le caryotype n’est alors pas représentatif du clone tumoral.

Il faut donc rester prudent dans l’analyse des caryotypes normaux.

Dans le second cas, toutes les métaphases sont anormales.

Il est alors probable que les cellules tumorales ont eu un net avantage prolifératif.

Il faut toutefois garder en mémoire l’hypothèse d’une possible anomalie constitutionnelle méconnue, surtout en cas de caryotype simple, de type translocation réciproque isolée.

Avantages. Limites :

L’explosion récente des techniques de biologie moléculaire peut rendre caduque, dans l’esprit de certains, la réalisation du caryotype, technique longue, coûteuse et relativement peu sensible.

Il paraît important à ce stade de définir les avantages mais aussi les limites de la cytogénétique conventionnelle par rapport aux techniques moléculaires. L’avantage le plus évident de la cytogénétique est la vision globale qu’elle donne des anomalies génétiques présentes au sein du clone tumoral.

En effet, alors que les techniques de biologie moléculaire ciblent une anomalie, et une seule (celle correspondant à la sonde utilisée), le caryotype permet la détection de toute anomalie, sans préjuger de sa nature, pour peu qu’elle ait une taille suffisante pour être détectée par la microscopie optique et que des métaphases aient pu être générées au sein du clone tumoral.

Ainsi, en un seul examen, il est possible de mettre en évidence des anomalies de nombre de chromosomes (par exemple trisomie 8 ou monosomie 7) ou de structure chromosomique (translocations, délétions, inversions, duplications), ainsi que de préciser le caractère complexe ou non du caryotype.

Enfin, il est possible de mettre en évidence des sous-clones, signes de l’évolutivité tumorale.

Il faut toutefois être conscient des limites de la technique.

La première limite déjà abordée est l’absence de métaphases correspondant au clone tumoral, c’est-à-dire la présence exclusive de métaphases normales correspondant aux cellules normales résiduelles.

La seconde limite est la nécessaire génération de métaphases, et donc la nécessité quasi absolue de travailler sur un échantillon fraîchement prélevé.

Enfin, une troisième limitation majeure concerne la résolution de la technique.

En effet, l’analyse repose sur la microscopie optique et sur le décodage de la succession de bandes claires et sombres obtenues par le marquage.

Cette résolution varie de plus selon la qualité des chromosomes obtenus (longueur, étalement…), et l’on admet que la résolution est de l’ordre de 10 millions de paires de bases (Mb).

Ainsi, toute anomalie chromosomique portant sur un fragment dont la taille est inférieure à ce seuil est méconnue par la cytogénétique conventionnelle.

Ce fossé existant entre la résolution de la cytogénétique et celle de la biologie moléculaire (de l’ordre de la base dans les meilleurs cas) est peu à peu comblé par une technique hybride : la cytogénétique moléculaire ou hybridation in situ fluorescente (fluorescence in situ hybridization [FISH]).

La FISH repose sur l’hybridation de sondes fluorescentes directement sur chromosomes ou noyaux interphasiques.

Celle-ci utilise des sondes fluorescentes permettant la mise en évidence d’anomalies de l’ordre de quelques milliers de paires de bases (kb).

Il existe différents types de sonde.

Les plus anciennement utilisées sont les sondes dites « centromériques » ou « alphoïdes », formées de séquences répétées de 171 paires de bases, spécifiques de la plupart des régions centromériques des chromosomes humains.

Ces sondes permettent l’identification rapide d’aneusomies (comme la trisomie 8 ou la monosomie 7 dans les pathologies myéloïdes), directement sur noyaux interphasiques.

Le second type de sonde est formé par les sondes dites de « peinture chromosomique ».

La sonde est alors un chromosome humain entier (ou un bras chromosomique), marqué par un fluorochrome.

La principale indication de ce type de sonde est l’analyse d’anomalies de structure des chromosomes (essentiellement translocations).

Le corollaire est qu’elles ne peuvent être utilisées que sur chromosomes métaphasiques.

Ce type de sonde a été récemment « mis en lumière » par la mise au point de la technique de FISH multicouleur.

Chaque chromosome est marqué par une combinaison de fluorochromes spécifiques permettant l’obtention d’une couleur spécifique de chacun des 24 chromosomes humains.

Enfin, le dernier type de sonde est formé des sondes dites « séquences uniques ».

Chaque sonde est alors spécifique d’une région chromosomique présente en un seul exemplaire par génome haploïde.

Le nombre de sondes de ce type est virtuellement infini.

Ces sondes peuvent avoir de multiples indications : recherche de délétions ou d’amplifications et, de plus en plus, recherche de translocations spécifiques.

Elles peuvent s’utiliser sur chromosomes métaphasiques comme sur noyaux interphasiques, à condition d’avoir une taille suffisante (de l’ordre de 30 kb).

Outre son niveau de résolution, la FISH présente de nombreux avantages par rapport à la cytogénétique classique.

Elle peut être utilisée sur cellules congelées, voire fixées et incluses en paraffine.

En cas d’échec du caryotype (absence de métaphases clonales), le culot de cellules fixées peut être utilisé pour analyse par FISH interphasique.

Toutefois, comme pour la biologie moléculaire, la FISH n’est informative que pour la sonde utilisée.

Ainsi, ces différentes techniques sont toutes complémentaires les unes des autres, et il faut être parfaitement conscient des avantages, mais également des limites de chacune, lors de la prescription de tel ou tel examen.

Principales indications au diagnostic :

À ce jour, l’analyse des chromosomes reste un examen incontournable lors du diagnostic de la majorité des hémopathies malignes.

En effet, si son rôle diagnostique reste modeste (tout au plus permet-elle d’asseoir le diagnostic de LMC ou de préciser le type de certains lymphomes), la cytogénétique a une place déterminante dans l’évaluation pronostique de la pathologie.

Ainsi, comme nous allons le voir, la mise en évidence d’un profil caryotypique particulier va permettre d’entrevoir le devenir de la maladie et donc, dans l’idéal, d’adapter le traitement au patient.

Nous allons envisager successivement les principales pathologies et définir pour chacune d’entre elles la place de la cytogénétique dans le bilan diagnostique.

A - SYNDROMES MYÉLOPROLIFÉRATIFS :

Au sein de ce groupe, la LMC détient indiscutablement une place à part, à plus d’un titre.

Tout d’abord, par l’histoire, le classique « chromosome Philadelphie » étant la première anomalie cytogénétique acquise observée en pathologie humaine en 1960 par Nowell et Hungerford.

Ensuite, par l’association virtuellement pathognomonique entre l’anomalie chromosomique la translocation t(9;22)(q34;q11) et le diagnostic de LMC.

Enfin, par sa disparition progressive en cas de réponse au traitement, élément qui est détaillé dans un autre chapitre.

C’est en 1960, soit avant la découverte des méthodes de banding, que Nowell et Hungerford décrivent, dans la revue Science, « a minute chromosome in a human chronic granulocytic leukemia ».

Ce n’est que 13 ans plus tard que Rowley et al démontrent que ce « minuscule chromosome » est en fait un chromosome 22 remanié, produit de la translocation t(9;22)(q34;q11).

Pour la première fois, une anomalie chromosomique acquise était reliée à une pathologie et, de plus, de manière virtuellement constante.

Le clonage des points de cassure a ensuite permis d’identifier les gènes impliqués, ABL et BCR, et de montrer que le remaniement conduisait à la formation d’un gène chimérique fonctionnel.

L’importance de ce remaniement génétique est d’ores et déjà majeure pour les indications thérapeutiques.

Elle sera sans doute encore plus grande dans l’avenir avec le développement de molécules spécifiquement inhibitrices de l’activité tyrosine kinase de la protéine abl.

Il faut toutefois garder en mémoire que ce réarrangement chromosomique n’est pas visible dans environ 5 % des cas de LMC typique, parce que le réarrangement est cryptique (présent d’un point de vue moléculaire, mais non visible en cytogénétique conventionnelle).

Dans ces cas, il faut savoir avoir recours à d’autres techniques, de type FISH ou reverse transcriptionpolymerase chain reaction (RT-PCR).

L’étude cytogénétique reste également essentielle pour la recherche d’anomalies chromosomiques associées.

En effet, celles-ci surviennent fréquemment lors de l’accélération et/ou de la transformation de la maladie, mais peuvent être présentes d’emblée, témoins alors d’une phase plus avancée de la maladie.

Ces anomalies sont volontiers récurrentes : duplication du chromosome Philadelphie, isochromosome 17q, trisomie 8 ou trisomie 19.

Leur apparition étant possible en dehors de toute modification clinique, il est important de savoir les rechercher au cours de l’évolution de la maladie.

Enfin, la cytogénétique permet d’apprécier la réponse aux différentes thérapeutiques entreprises.

En effet, la chimiosensibilité s’associe à une diminution progressive du pourcentage de métaphases présentant la translocation t(9;22).

Les réponses cytogénétiques complètes (toutes les métaphases sont alors normales) sont associées à une survie prolongée. Les autres syndromes myéloprolifératifs sont moins volontiers associés à des anomalies chromosomiques récurrentes.

Tout au plus peut-on signaler les délétions du bras long du chromosome 20 dans les polyglobulies primitives et la trisomie 9 dans les thrombocytémies essentielles.

Mais ces anomalies n’ont que peu de valeur en pratique courante, tant diagnostique que pronostique.

B - LEUCÉMIES AIGUËS LYMPHOBLASTIQUES :

Les LAL de l’enfant représentent le prototype d’hémopathie maligne pour laquelle la valeur pronostique de la cytogénétique est clairement démontrée.

En effet, probablement en raison des progrès réalisés dans le traitement de ce type de leucémies chez l’enfant, il a été possible de démontrer la valeur prédictive de survie à long terme de plusieurs types d’anomalies chromosomiques.

Il a ainsi été montré depuis de nombreuses années que l’hyperdiploïdie à plus de 50 chromosomes était corrélée à un excellent pronostic, alors que d’autres anomalies, comme la translocation t(9;22)(q34;q11) ou les anomalies de la région 11q23, étaient associées à un très haut risque de rechute précoce.

Plus récemment, Romana et al ont mis en évidence une nouvelle translocation équilibrée, invisible par cytogénétique classique (les fragments échangés ayant une taille et une morphologie semblables) : la t(12;21)(p13;q22), retrouvée dans près d’un quart des LAL pré-B de l’enfant en utilisant les techniques de FISH ou de RT-PCR.

Plusieurs groupes ont depuis montré l’impact favorable de cette anomalie sur la survie des patients.

À l’inverse, chez l’adulte, les anomalies conférant un pronostic favorable sont rares, alors que l’on constate une très nette augmentation de l’incidence des cas avec t(9;22), ces deux raisons expliquant probablement (au moins en partie) le sombre pronostic des LAL de l’adulte.

La mise en évidence de ces différentes anomalies a ainsi un intérêt direct pour le thérapeute, l’intensité (et donc la toxicité) du traitement pouvant être adaptée en fonction du risque prévisible d’échec du traitement.

L’identification de ces anomalies a également permis le clonage des points de cassure et donc des gènes impliqués.

Si la t(9;22) conduit bien à un réarrangement des gènes ABL et BCR comme dans la LMC, il a été montré que la protéine chimérique formée était en général de plus petite taille que dans le cas de la LMC, avec une plus forte activité tyrosine kinase.

Le clonage de plusieurs translocations impliquant la région 11q23 a permis d’identifier un seul et même gène désigné MLL (mixed lineage leukemia), les leucémies étant volontiers immatures, voire réellement biphénotypiques.

Ce gène est très fréquemment remanié (sous forme de gène chimérique produisant un transcrit de fusion) dans les LAL du petit nourrisson (mais également dans certains types de LAM), et ces remaniements confèrent d’une manière générale un assombrissement du pronostic.

Enfin, le gène remanié en 12p13 dans la t(12;21), ETV6 (ETS variant gène 6), a depuis été impliqué dans de très nombreuses autres translocations retrouvées dans un large éventail d’hémopathies.

Le gène sur le chromosome 21 était un gène déjà connu des hématologues, CBFA2 (core binding factor subunit A2 ou AML1), impliqué dans la classique t(8;21) des LAM2.

Enfin, de très nombreuses autres translocations récurrentes ont été décrites dans les LAL, mais avec une fréquence moindre.

Certaines sont spécifiques d’un sous-type tumoral particulier, comme les translocations impliquant les gènes des récepteurs T dans les LAL de type T.

Il faut tout de même mettre à part la translocation t(8;14)(q24;q32) et ses variantes, t(2;8)(p12;q24) et t(8;22)(q24;q11).

En effet, ces translocations sont fortement évocatrices d’un type tumoral particulier : les lymphomes et LAL de Burkitt, ou B-matures.

Ces trois translocations juxtaposent le proto-oncogène MYC avec l’un des gènes codant les chaînes d’immunoglobulines, conduisant à l’hyperexpression de MYC.

Ces translocations ont un rôle diagnostique et pronostique important puisque, en signant le diagnostic de LAL de Burkitt, elles permettent un traitement intensif adapté, conférant un pronostic favorable.

C - LEUCÉMIES AIGUËS MYÉLOÏDES :

À l’instar des LAL, la cytogénétique revêt une importance de plus en plus importante dans les LAM, essentiellement d’un point de vue pronostique.

Ainsi, la plupart des essais thérapeutiques actuels intègrent cette donnée dans la stratégie proposée, les patients avec anomalie péjorative étant inclus dans des bras de traitements lourds, incluant si possible une allogreffe médullaire, alors que les patients présentant des anomalies cytogénétiques de meilleur pronostic sont traités de manière moins agressive.

De plus, certaines anomalies sont fortement corrélées à un type cytologique particulier.

Nous allons voir les principales anomalies dont la mise en évidence interfère directement sur le traitement proposé.

La plus anciennement associée à un type cytologique particulier, et probablement la plus importante à reconnaître en urgence pour une prise en charge thérapeutique adaptée, est la t(15;17)(q25;q22).

Cette translocation est pathognomonique de la LAM3 de la classification FAB, et conduit à la formation d’un gène chimérique impliquant des gènes PML (promyelocytic leukemia) et RARA (retinoic acid receptor alpha).

Outre sa spécificité cytologique, cette translocation est importante à reconnaître puisqu’elle confère une sensibilité à un agent différenciant, l’acide tout-transrétinoïque (ATRA).

Il existe plusieurs translocations variantes, impliquant systématiquement RARA fusionné à un partenaire variable (PLZF, NPM, NuMA, STAT5b).

Or, la t(11;17)(q13;q22), formant un gène chimérique RARA-PLZF, confère une résistance intrinsèque à l’ATRA.

Il est important de diagnostiquer ce type (certes rare) de translocation, afin de ne pas retarder le traitement par chimiothérapie et de ne pas traiter inutilement ces patients par ATRA.

Le recours à la FISH interphasique reconnaissant la fusion PML-RARA peut s’avérer très utile dans ce cas. La translocation t(8;21)(q22;q22) est essentiellement associée aux LAM2 et est observée dans 10 à 15 % des LAM.

Cette translocation confère également un pronostic favorable (avec notamment un taux de rémission complète élevé), et beaucoup d’essais thérapeutiques excluent les patients présentant cette anomalie des programmes d’allogreffe médullaire en première rémission complète.

Cette translocation conduit également à la formation d’un gène chimérique impliquant les gènes MTG8 (myeloid translocation gene on chromosome 8 ou ETO) et CBFA2.

La troisième anomalie caractéristique est l’inversion du chromosome 16 : inv(16)(p13;q22) ou la t(16;16)(p13;q22), retrouvée dans la grande majorité des LAM4Eo, et 10 à 15 % des LAM en général.

Cette anomalie est difficile à identifier en cytogénétique et la FISH peut être une aide précieuse.

Comme la t(8;21), l’inv(16) est associée à un pronostic favorable et n’est plus retenue comme une indication à l’allogreffe médullaire en première rémission complète.

Les gènes impliqués ont été identifiés : MYH11 (myosin heavy chain 11) en 16p13 et CBFB (core binding factor b subunit) en 16q22.

Ces trois anomalies, spécifiques des LAM, confèrent toutes trois un pronostic favorable.

D’autres anomalies spécifiques des LAM, mais beaucoup plus rares, sont répertoriées, comme la t(6;9)(p21;q34) ou la t(8;16)(p11;p13), souvent associée à une érythrophagocytose.

Toutes ces translocations conduisent à la formation de gènes chimériques fonctionnels (c’est-à-dire transcrits), le cadre de lecture étant respecté.

À l’inverse, d’autres anomalies entraînent la perte de matériel chromosomique.

Il s’agit soit de monosomies 5 ou/et 7, soit de délétions interstitielles affectant les bras longs de ces chromosomes. Les gènes cibles de ces pertes de matériel ne sont pas identifiés à ce jour.

Ces anomalies sont volontiers retrouvées chez des patients présentant un passé de myélodysplasie ou chez des patients âgés, ou chez des patients présentant une LAM secondaire à des traitements alkylants.

De plus, le caryotype est volontiers complexe.

Le point commun de ces anomalies est leur impact sur le pronostic.

Les patients sont alors fréquemment résistants au traitement et la survie est généralement courte.

Enfin, il existe des anomalies qui ne sont pas associées à un soustype cytologique particulier et dont l’impact pronostique est neutre ou encore mal défini.

On retrouve dans ce groupe la trisomie 8 et les réarrangements de la région 11q23.

Ces derniers impliquent le gène MLL et sont observés sous la forme de translocations dont les plus fréquentes sont les t(9;11)(p22;q23), t(11;19)(q23;p13), t(6;11)(q27;q23) et t(10;11)(p11;q23).

Ces anomalies de MLL étant pour certaines associées à un pronostic péjoratif, il est important de noter que des réarrangements moléculaires, non visibles par cytogénétique ou FISH (duplication des exons 2 à 6), ont été décrits chez des patients présentant une trisomie 11 ou un caryotype normal.

Des techniques moléculaires pourraient être ainsi indiquées si la valeur péjorative de ces anomalies était confirmée.

Enfin, ce gène est fréquemment réarrangé dans les cas de LAM secondaires à des traitements comportant des inhibiteurs de topo-isomérases II, comme les épipodophyllotoxines.

Ainsi, après les LAL, la cytogénétique est devenue un élément déterminant de l’évaluation pronostique des LAM.

Il est donc essentiel de se donner les moyens d’obtenir un prélèvement médullaire (ou sanguin en cas de blastose périphérique) de qualité avant d’entreprendre la mise en route du traitement.

D - SYNDROMES MYÉLODYSPLASIQUES :

Cet ensemble syndromique regroupe les anémies réfractaires simples, avec excès de blastes (AREB) ou en transformation (AREB-t), les leucémies myélomonocytaires chroniques (LMMC) et les anémies sidéroblastiques.

Aucune anomalie cytogénétique n’est spécifique de l’un de ces syndromes et toutes peuvent se voir dans chacun d’entre eux.

Les anomalies rencontrées sont le plus souvent des anomalies de nombre et des pertes de matériel chromosomique.

Les plus fréquentes touchent les chromosomes 5 et 7, soit sous forme de monosomie, soit sous forme de délétions interstitielles affectant le bras long comme dans les LAM.

Il faut toutefois isoler le classique « syndrome 5q- », qui associe une délétion de taille variable du bras long du chromosome 5 isolée, à une anémie souvent isolée, un taux de plaquettes augmenté, des mégacaryocytes souvent unilobulés, touchant le plus souvent la femme âgée, avec un risque de transformation très faible.

Parmi les autres anomalies rencontrées dans les syndromes myélodysplasiques (SMD), et par ordre décroissant de fréquence, on retrouve la trisomie 8, les délétions du bras long du chromosome 20, les pertes du chromosome Y chez l’homme, puis, plus rarement, des pertes affectant le 11q, le 13q et le 12p.

Une récente étude internationale retient des anomalies associées à un pronostic favorable : del(5q) isolée, del(20q) isolée ou perte du chromosome Y isolée.

À l’inverse, les pertes affectant le chromosome 7 et les caryotypes complexes confèrent un pronostic péjoratif, tant en termes de risque de transformation en LAM secondaire qu’en termes de survie. Ainsi, comme dans les leucémies aiguës, la cytogénétique a un rôle important dans la détermination du pronostic.

E - LYMPHOMES MALINS NON HODGKINIENS :

Les lymphomes malins non hodgkiniens (LMNH) sont classés en différents sous-groupes immunomorphologiques, classification périodiquement réactualisée.

La dernière en date (classification REAL en 1994) prend également en compte les anomalies cytogénétiques.

Comme nous allons le voir, la majorité des anomalies spécifiques de sous-types immunomorphologiques impliquent les gènes codant les chaînes d’immunoglobulines.

Plus récemment, l’étude du profil de mutations somatiques affectant le gène des chaînes lourdes d’immunoglobulines a permis de mieux préciser l’ontogénie des lymphomes B qui représentent la majorité des LMNH.

Les lymphomes T sont beaucoup plus rares, et de nombreuses translocations impliquant l’un des gènes codant les récepteurs T ont été décrites.

Compte tenu de leur rareté, ces anomalies ne seront pas abordées ici.

L’association t(8;14)(q24;q32) et lymphome de Burkitt est connue depuis 1976, date d’identification de la translocation.

Comme nous l’avons vu dans le chapitre consacré aux LAL, tous les cas de lymphomes de Burkitt sont associés à une translocation affectant le gène MYC et l’un des gènes codant les chaînes d’immunoglobulines (l’inverse n’étant pas forcément vrai, ces translocations ayant été décrites dans le myélome multiple [MM]).

Cette association est telle que la mise en évidence de la translocation chez un patient présentant un lymphome est synonyme de lymphome de Burkitt.

Dans tous les cas, et dans tous les types de translocation, le gène MYC est hyperexprimé.

Des différences semblent toutefois exister au niveau moléculaire entre les lymphomes dits « endémiques » (touchant essentiellement l’enfant africain et reliés au virus Epstein-Barr [EBV]) et les lymphomes dits « sporadiques » rencontrés en Europe et en Amérique du Nord.

Les premiers semblent impliquer des anomalies survenues lors des recombinaisons VDJ, alors que les seconds seraient plutôt la conséquence d’anomalies survenues lors des phénomènes de mutations somatiques ou de commutation isotypique.

Cependant, la translocation signe dans tous les cas le lymphome de Burkitt qui, moyennant une thérapeutique intensive adaptée, permet d’espérer un fort taux de guérison.

Sa mise en évidence est donc essentielle pour la stratégie thérapeutique à proposer.

De manière tout aussi spécifique, l’association t(14;18)(q32;q21) et lymphome folliculaire a été identifiée dès 1979.

Le clonage des points de cassure a permis d’identifier un gène particulier, premier représentant d’une nouvelle famille : les gènes régulant l’apoptose.

Ce gène a été dénommé BCL2 (B cell leukemia/ lymphoma 2).

Au niveau du chromosome 14, la translocation implique également le gène IGH (immunoglobulin heavy chain), et semble être la conséquence d’anomalies survenues lors des réarrangements VDJ.

La conséquence moléculaire de la translocation est une hyperexpression du gène BCL2, dont la protéine a pour fonction d’inhiber l’apoptose. Certains cas de lymphomes folliculaires (10 à 15 %) ne montrent pas de t(14;18) au caryotype.

Il est toutefois possible que ces patients présentent un réarrangement moléculaire invisible par cytogénétique, comme récemment rapporté.

D’autres anomalies chromosomiques sont fréquemment associées, reflétant probablement le caractère « multiétapes » de la lymphomagenèse, la t(14;18) n’étant pas oncogénique à elle seule.

La troisième translocation spécifique de type tumoral est la t(11;14)(q13;q32).

Si elle n’est retrouvée par cytogénétique que chez 75 à 80 % des patients, le recours à la FISH interphasique permet une détection dans 100 % des cas de lymphomes du manteau.

Là encore, l’inverse n’est pas vrai, puisque la translocation a été décrite dans des cas de MM et de LLC.

À moins que cette constatation ne remette en cause les classifications nosologiques, ces LLC n’étant en fait que des formes particulières de lymphome du manteau.

Quoi qu’il en soit, cette translocation conduit systématiquement à une hyperexpression du gène codant la cycline D1 (CCND1).

Là encore, la mise en évidence de la translocation est importante dans les cas de diagnostic difficile, le pronostic péjoratif du lymphome du manteau nécessitant une thérapeutique appropriée.

Comme pour le lymphome folliculaire, la translocation n’est pas suffisante pour induire le lymphome, d’autres événements oncogéniques étant probablement nécessaires à la tumorogenèse.

D’autres anomalies chromosomiques plus ou moins spécifiques ont été décrites.

Ainsi, les lymphomes lymphoplasmocytaires semblent être associés à la t(9;14)(p13;q32) impliquant le gène PAX5, alors que les lymphomes B à grandes cellules sont fréquemment associés à des anomalies du gène BCL6, situé en 3q27, sous la forme de translocations variées, ou de mutations activatrices du gène.

Les lymphomes de la zone marginale sont fréquemment associés à une trisomie 3, sans que cette anomalie soit en aucune manière spécifique.

Enfin, plus récemment, ont été décrites deux nouvelles translocations spécifiques de sous-types tumoraux.

La première est la translocation t(2;5)(p23;q35), associée de manière spécifique aux lymphomes anaplasiques. Cette translocation implique les gènes ALK (anaplastic lymphoma kinase) en 2p23 et NPM (nucleophosmin) en 5q35.

D’autres translocations variantes ont depuis été décrites, toutes impliquant ALK, définissant pour certains une entité définie sous le nom d’« alkomes ».

La seconde est la translocation t(11;18)(q21;q21), associée de manière spécifique aux lymphomes dits du MALT (mucosal-associated lymphoid tissue), c’est-à-dire essentiellement des lymphomes extranodaux, surtout digestifs, mais aussi parotidiens, pulmonaires…

Les gènes impliqués dans cette translocation ont été récemment identifiés : le gène API2 (apoptosis inhibitor 2) en 11q21 et le gène MLT (MALT lymphoma associated translocation) en 18q21.

La translocation aurait pour effet de potentialiser l’effet inhibiteur de l’apoptose, et ainsi de conférer un avantage de survie aux cellules porteuses de la translocation.

La valeur pronostique de ces différentes anomalies reste à ce jour inconnue.

En effet, seules des études cytogénétiques systématiques à partir de prélèvements ganglionnaires permettraient de corréler les anomalies récurrentes au devenir des patients.

Deux raisons expliquent ce « retard » par rapport aux leucémies aiguës : d’une part, la moins bonne accessibilité au contingent tumoral (prélèvement ganglionnaire chirurgical nécessaire) et d’autre part, la probable plus grande complexité du caryotype (rendant difficile l’extraction d’anomalies particulières).

L’amélioration de la prise en charge thérapeutique des patients devrait toutefois à l’avenir inciter les thérapeutes à un bilan pronostique plus précis, incluant la cytogénétique.

F - LEUCÉMIE LYMPHOÏDE CHRONIQUE. MYÉLOME MULTIPLE :

Ces deux affections se caractérisent par un faible index prolifératif, ce qui rend l’examen cytogénétique extrêmement difficile.

On ne dispose ainsi d’aucune donnée fiable sur les anomalies cytogénétiques de la maladie de Waldenström.

Dans les LLC de type B, la lymphocytose sanguine est par définition augmentée, et le caryotype est généralement obtenu à partir d’un prélèvement de sang circulant.

L’adjonction de mitogènes B, voire T, permet d’accroître l’index mitotique et d’obtenir des métaphases clonales dans environ un cas sur deux.

L’anomalie la plus fréquemment retrouvée est la délétion du bras long du chromosome 13, et principalement de la bande 13q14.

L’incidence de cette délétion dépasse un cas sur deux si on la recherche par technique moléculaire.

Le gène cible de la délétion est en cours de clonage. De manière moins fréquente, on retrouve ensuite la trisomie 12, les délétions de la région 11q23 et, plus rarement, de la région 17p13.

Il convient de souligner que le gène cible des délétions 11q23 a été récemment identifié.

Il s’agit du gène ATM (ataxia-telangiectasia mutated gene), gène muté dans l’ataxie-télangiectasie.

Ces deux dernières anomalies (délétions 11q23 et 17p13) semblent corrélées à une survie significativement plus courte.

La découverte récente de deux types de LLC, en fonction du statut muté ou non muté des régions variables du gène IGH, devrait conduire à une réévaluation de ces différentes anomalies en fonction de ces deux sous-types. Les LLC de type T sont essentiellement des leucémies à prolymphocytes.

Une étude récente a montré de fréquentes anomalies cytogénétiques, les plus fréquentes étant les inversions du chromosome 14, impliquant le gène pour le récepteur T a/d en 14q11 et le gène TCL1 (T-cell leukemia 1) en 14q32, suivies des pertes du bras court du chromosome 8.

À noter enfin des translocations spécifiques entre le gène TCRA/D et la région Xq28 touchant le gène MTCP1 (mature T-cell proliferation).

Compte tenu de la rareté de cette affection, peu d’études systématiques ont étudié l’impact pronostique de ces anomalies.

Dans le cas du MM, des anomalies clonales ne sont retrouvées que dans 30 à 50 % des cas, reflet du faible index prolifératif des plasmocytes tumoraux.

Toutefois, deux anomalies chromosomiques semblent plus particulièrement observées : des anomalies de structure de la région 14q32, sous la forme de translocations variables impliquant toutes le gène IGH, et les délétions plus ou moins étendues du bras long du chromosome 13, centrées sur la région 13q14.

Par FISH interphasique, les premières sont retrouvées dans 60 % des cas, alors que la région 13q14 est perdue dans 40 % des cas.

Cette dernière anomalie semble conférer un pronostic particulièrement défavorable.

Suivi de la maladie et de la réponse au traitement :

L’exemple le plus démonstratif reste celui de la LMC.

Depuis l’utilisation de l’interféron comme traitement de base de la LMC, des rémissions cytogénétiques partielles, voire complètes, ont été décrites.

L’étude de plusieurs cohortes de patients a ainsi montré que les patients obtenant une disparition complète du chromosome Philadelphie avaient une survie très significativement prolongée par rapport aux patients gardant des métaphases Philadelphie positives.

Depuis ces études pionnières, d’autres essais thérapeutiques ont montré que l’adjonction de cytarabine permettait d’augmenter sensiblement le pourcentage de patients obtenant une rémission complète cytogénétique.

Dans tous les cas, la cytogénétique reste un examen de choix pour le suivi de la réponse au traitement, ainsi que pour le diagnostic de survenue d’éventuelles anomalies secondaires, signe d’accélération de la maladie.

L’examen reste toutefois long et fastidieux, l’amélioration de l’efficacité des traitements étant corrélée à une diminution de l’index mitotique.

Récemment, l’utilisation de la FISH a permis d’évaluer la réponse directement sur cellules interphasiques du sang circulant jusqu’à un seuil de 1 %, évitant ainsi le recours répété aux aspirations médullaires et à la nécessité d’obtention de métaphases.

La cytogénétique peut également être utilisée dans le suivi de la maladie, surtout en cas de doute sur une éventuelle rechute.

Les anomalies constatées au diagnostic sont généralement également présentes lors de la rechute, souvent accompagnées d’autres anomalies, témoins de l’évolutivité du clone tumoral.

La technique est toutefois relativement peu sensible (de l’ordre de 5 %), et les techniques moléculaires basées sur la PCR quantitative doivent être privilégiées (permettant de détecter et de quantifier la maladie résiduelle jusqu’à un seuil de 10–4-10–5).

Enfin, la cytogénétique peut également être utile pour le suivi des allogreffes médullaires en cas de différence de sexe entre donneur et receveur, mais là encore, il faut préférer la FISH interphasique avec des sondes spécifiques des chromosomes X et Y, permettant une appréciation fine d’un éventuel chimérisme incomplet, avec une sensibilité nettement supérieure à celle de la cytogénétique (< 0,1 %).

Conclusion. Perspectives :

Même si nous n’avons fait que survoler les principales anomalies cytogénétiques rencontrées au cours des hémopathies malignes, nous pouvons dégager trois conclusions générales.

La première est le rôle essentiel de la cytogénétique dans l’établissement du pronostic du patient.

Si cette notion était parfaitement connue des pédiatres en ce qui concerne les LAL de l’enfant, l’amélioration des résultats des traitements a permis de montrer qu’elle se vérifiait également dans les LAM de l’adulte.

Tout porte à croire que cette valeur pronostique devrait peu à peu s’étendre aux autres hémopathies, pour peu que les études cytogénétiques systématiques soient étendues à l’ensemble des hémopathies, et même de manière provocante aujourd’hui, à l’ensemble des tumeurs malignes.

La définition de groupes pronostiques permet ainsi la définition de traitements adaptés en fonction du risque prévisible d’échec ou de rechute, évitant ainsi de surtraiter certains patients au risque de voir apparaître des effets toxiques potentiellement létaux.

De plus, l’identification précoce (dès le diagnostic) des patients les plus graves devrait permettre l’élaboration de programmes thérapeutiques (éventuellement expérimentaux) adaptés, voire éventuellement purement palliatifs pour les patients les plus âgés.

La seconde conclusion est le rôle diagnostique de la cytogénétique.

Celui-ci reste actuellement limité, mais il devrait peut-être permettre de mieux définir les limites nosologiques de certaines entités proches, principalement au sein des lymphomes B.

Ainsi, on pourrait imaginer de démembrer le groupe des lymphomes dits « Burkitt-like » ou « Burkitt atypiques » en fonction d’anomalies de la région 8q24, les cas présentant un réarrangement de MYC étant alors regroupés avec les lymphomes de Burkitt « vrais ». Un autre exemple est celui des rares LLC avec t(11;14).

Leur identification systématique permettrait la détermination de leur pronostic propre, et éventuellement de les rapprocher des lymphomes du manteau.

Enfin, la cytogénétique a eu, a et devrait avoir dans l’avenir un rôle déterminant sur le plan fondamental.

En effet, le clonage systématique des points de cassure des différentes translocations ou inversions a permis l’identification de très nombreux gènes, permettant des avancées capitales pour la compréhension de l’homéostasie cellulaire ou la régulation de l’hématopoïèse.

La poursuite d’études systématiques, principalement dans les pathologies encore peu explorées, devrait permettre de perpétrer cette quête de nouveaux gènes.

L’avenir de la cytogénétique est probablement dans une interrelation la plus étroite possible avec les techniques moléculaires, et plus particulièrement la FISH.

Celle-ci, tout en restant une technique dérivée de la cytogénétique, permet de faire un lien avec la biologie moléculaire, en comblant peu à peu le fossé (de l’ordre de la dizaine de mégabases) existant entre les deux techniques.

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