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Médecine Dentaire
Antiseptiques en parodontie
Cours de Médecine Dentaire
 
 
 

Introduction :

Il a été longtemps considéré que la quantité de plaque et le temps de contact de celle-ci avec les tissus étaient les principaux déterminants de la maladie parodontale.

Les techniques chirurgicales étaient basées sur la résection des poches par gingivectomiegingivoplastie et ostéoectomie-ostéoplastie.

Actuellement, les mécanismes pathogéniques précis des maladies parodontales ne sont pas entièrement élucidés.

Il semblerait que la présence de certaines bactéries virulentes, telles que Actinobacillus actinomycetemcomitans (Aa), Porphyromonas gingivalis (Pg), Prevotella intermedia (Pi), Fusobacterium nucleatum (Fn), ... pourrait favoriser le développement d’une maladie parodontale plus ou moins générale et plus ou moins agressive.

Cependant, l’unique présence de ces bactéries ne peut à elle seule tout expliquer.

En effet, il faut prendre en compte la réponse de l’hôte face à l’agression bactérienne.

Cette réponse (notamment les défenses immunitaires) est génétiquement déterminée mais peut être modifiée sous l’effet de paramètres multiples (tabac, stress, apparition de maladies générales ...).

Le but de cet article est d’étudier les différents antiseptiques permettant de lutter contre la formation de plaque appelée aujourd’hui le « biofilm ».

Biofilm :

Ce concept a émergé il y a une dizaine d’années après la constatation de phénomènes contradictoires comme :

• la persistance au niveau de la cavité buccale de bactéries anaérobies dans un milieu où les conditions aérobies prédominaient ;

• la présence de bactéries anaérobies parodontopathogènes ne provoquerait pas systématiquement la maladie ;

• la sensibilité de certaines bactéries à des molécules antibiotiques serait différente in vivo, qu’in vitro.

Ces différents phénomènes trouveraient un début d’explication si l’on considère la plaque bactérienne non pas comme une accumulation de 400-450 espèces de bactéries, mais plutôt comme une communauté spécifique de bactéries adhérentes sur une surface, les unes aux autres, en interaction et dans une structure complexe appelée « biofilm.

A - Définition :

Un biofilm est une communauté bactérienne adhérant à une surface, enchâssée au sein d’une matrice d’exopolymères.

B - Mode de formation d’un biofilm :

La formation d’un biofilm se fait selon trois étapes majeures :

• attachement ;

• colonisation ;

• croissance.

Certaines bactéries comme Fusobacterium nucleatum jouent un rôle très important car elles adhèrent à la pellicule exogène acquise très rapidement ; on parle de bactéries colonisatrices primaires ou pionnières.

Cette agrégation permet à d’autres bactéries également d’adhérer et de se fixer entre elles.

Peu à peu, la communauté s’organise, s’accroît et l’on peut voir l’apparition comme la disparition de certaines bactéries au fur et à mesure que la communauté se développe.

Par exemple, les Neisseria sont capables d’éliminer tout l’oxygène présent dans le milieu.

Cela entraîne donc la mort ou le détachement des bactéries aérobies, et cela favorise le développement des bactéries anaérobies.

De la même façon, les streptocoques et les Prevotella jouent le rôle d’alimenteurs primaires.

En effet, elles dégradent des molécules complexes en produits plus simples qui vont être plus facilement utilisés par d’autres bactéries.

Des canaux aqueux au sein du biofilm permettent en outre les échanges de nutriments et les communications intercellulaires.

Cette collaboration interbactérienne, ces échanges nutritionnels, cette protection, sont tels que beaucoup de concepts thérapeutiques chimiques sont remis en question de nos jours.

D’après Wilson et Pratten, plus le biofilm est mature moins les antibiotiques et antiseptiques sont efficaces.

De même, Gilbert indique qu’il existe un autre facteur pouvant expliquer ces phénomènes de résistance du biofilm : l’efflux pomp system.

Ce sont des pompes capables d’éliminer rapidement l’antibiotique ou l’antiseptique, qui n’a alors plus le temps d’agir.

Antiseptiques :

Les antiseptiques sont des agents antibactériens d’utilisation locale utilisés en complément du débridement mécanique.

Ils font partie de notre arsenal thérapeutique avec leurs avantages et leurs inconvénients.

Par définition, ils préviennent et arrêtent la croissance bactérienne soit en inhibant l’action des micro-organismes, soit en les détruisant.

Un large choix de molécules antiseptiques est disponible (chlorhexidine, héxétidine, sanguinarine, dérivé iodé, ...), sous différentes formes d’utilisation (bains de bouche, sprays, gels, dentifrices, ...).

La difficulté pour le praticien est de savoir dans quel cas il est préférable d’utiliser telle ou telle molécule, sous quelle forme, à quelle concentration et pendant combien de temps.

A - Chlorhexidine :

La chlorexidine est un biguanide chloré.

C’est un désinfectant largement employé dans de nombreux domaines de la médecine, en raison de sa faible toxicité et de son large spectre antibactérien.

À concentration habituelle, son effet serait bactériostatique en altérant la structure de surface de la paroi bactérienne.

Selon Sixou et Hamel, elle serait bactériostatique à faible dose et bactéricide à forte dose.

En effet, à faible concentration, la membrane cellulaire serait lésée, ce qui entraînerait la fuite des éléments cytoplasmiques, tandis qu’à forte concentration les protéines et les acides nucléiques précipiteraient.

La forme chimique la plus utilisée est le digluconate de chlorhexidine.

Il semblerait que son efficacité optimale se situerait dans des concentrations situées entre 0,1 % et 0,2 %.

Il est clair que son efficacité est liée à sa concentration mais aussi et surtout à son pouvoir d’adhésion et de rétention sur les surfaces dentaires.

Trente pour cent de la quantité de produit introduit persiste après 1 minute de rinçage.

Donc, l’efficacité de la chlorhexidine resterait stable pendant 8 à 12 heures.

Elle est inactivée par le pus, le sang et certaines bactéries.

Pg possède des vésicules qui inhiberaient l’action de la chlorhexidine.

Son efficacité est différente suivant les microorganismes, et est sous l’influence de différents facteurs comme le Ph, la formulation, la concentration.

Présentée le plus souvent sous la forme de bains de bouche, on peut la retrouver dans des gels ou des dentifrices.

On peut également l’utiliser dans un système à libération lente, elle semblerait alors avoir une action plus efficace que sous la forme de bain de bouche.

Ce produit se présente sous la forme d’une plaquette (appelée Periochip®) qui est introduite directement à l’intérieur de la poche gingivale ou parodontale et laissée en place jusqu’à dissolution complète (7 à 10 jours).

Ces différents supports ont été développés pour diminuer voire supprimer les effets secondaires de ce produit sous la forme de bain de bouche.

Il est vrai que l’emploi à long terme entraîne l’apparition de résistances, mais les effets secondaires les plus évidents sont :

• les colorations noirâtres des dents ;

• la desquamation de la muqueuse ;

• la perturbation du goût.

B - Hexétidine :

C’est un antiseptique de synthèse dérivé de la pyrimidine. Son action serait antibactérienne en bloquant la synthèse d’adénosine triphosphate (ATP), et antifongique.

Elle présenterait une action in vitro supérieure ou égale à la chlorhexidine sans les effets secondaires.

Malheureusement les résultats in vivo sont différents, il semble notamment que cet agent possède une capacité de rétention aux surfaces dentaires bien moins importante que la chlorhexidine.

C - Sanguinarine :

C’est un alcaloïde de synthèse extrait de Sanguinaria canadensis qui a des propriétés antibactériennes et anti-inflammatoires.

Il inhiberait les mécanismes d’adhésion des bactéries à la pellicule exogène acquise.

Malgré tout, cet agent tend à disparaître de la plupart des spécialités, car son activité in vivo reste faible.

En effet, certains ont démontré une activité tant sur les bactéries que sur l’inflammation gingivale, d’autres semblent mettre en doute l’efficacité du produit.

D - Dérivés iodés :

La PVP-I, plus connu sous le nom de Bétadine®, est formée par l’association de l’iode et d’un agent surfactant, la polyvinylpyrrolide (PVP), qui solubilise l’iode.

L’iode est un oxydant capable de pénétrer la paroi bactérienne des micro-organismes très rapidement.

Les mécanismes d’action demeurent inconnus.

À l’intérieur de la cellule, l’iode provoque une réaction avec des enzymes de la chaîne respiratoire et un blocage des protéines cytoplasmiques.

Son activité antibactérienne est bonne aussi bien sur les bactéries à Gram positif que sur les bactéries à Gram négatif.

Des phénomènes d’allergies ont souvent étaient décrits, mais pas de résistance.

Greenstein décrit les effets secondaire de la PVP-I lors de son utilisation régulière en odontologie.

Il explique que ce produit pourrait provoquer la coloration des dents et de la langue (mais cela de manière réversible) ; il serait contre-indiqué chez les femmes enceintes, chez les femmes qui allaitent, chez les personnes allergiques à l’iode.

Il pourrait aussi induire des dysfonctionnements de la thyroïde si son utilisation est excessive.

Son utilisation est indiquée sous la forme de gargarismes et de bains de bouche à une concentration de 10 %.

Elle présenterait un spectre d’action large avec une action bactéricide par simple contact.

L’efficacité de la PVP-I comme antiseptique oral a été mise en avant dans la prévention du risque d’endocardite à porte d’entrée parodontale ou postextractionnelle.

E - Phénols :

Ils agissent en dénaturant les protéines et la membrane cytoplasmique en fonction de leur concentration. Les principaux dérivés phénoliques retrouvés dans des bains de bouche sont :

• la listérine.

C’est une huile essentielle, qui présenterait un spectre d’action large en inhibant les enzymes bactériennes.

Elle présenterait une activité antiplaque et anti-inflammatoire, mais très peu d’effets secondaires (certaines sensations de brûlures ou altérations du goût ont pu être décrites) ;

• le triclosan.

C’est un antibactérien de synthèse.

Utilisé dans les dentifrices et les bains de bouches, son action semble positive vis-àvis de la formation de la plaque.

Cette molécule possèderait un large spectre d’action et une action sélective vis-à-vis de certaines espèces bactériennes, notamment sur Streptocossus mutans, Actinomycetes viscosus.

Associé au citrate de zinc ou au sulfate de zinc, le triclosan verrait son action potentialisée envers Fusobacterium nucleatum, Porphyromonas gingivalis.

Il a une action sur les bactéries à Gram positif et à Gram négatifs, ainsi que sur les anaérobies.

F - Ammoniums quaternaires :

Ce sont des antiseptiques cationiques utilisés principalement sous la forme de bains de bouche.

Le plus connu est le chlorhydrate de cétylpyridinium (Alodont®), on retrouve également le benzalconium chloride.

Les ammoniums quaternaires se sont révélés fort décevants.

En effet, Luc et al. montraient en 1991 une activité bactéricide quasi nulle envers les principaux germes impliqués dans les parodontites, constatation confirmée par les travaux de Gelle et al. en 2001.

G - Agents oxydants :

Les agents oxydants (peroxyde d’hydrogène ou « eau oxygénée ») ont des propriétés antiseptiques par libération d’oxygène.

Le spectre d’activité est large, il concerne principalement les bactéries anaérobies (par libération d’oxygène) ainsi que les virus.

Longtemps utilisés pour diminuer l’inflammation gingivale (pâte de Keyes [eau

+ eau oxygénée

+ bicarbonate de potassium]) leur efficacité n’est pas remise en doute, mais leur utilisation à long terme est fortement déconseillée.

En effet, Cummins et al. ont démontré qu’à long terme cela provoquerait des ulcérations gingivales, des retards de cicatrisation ainsi que la coloration de la langue (noire villeuse).

Différents supports :

Le support le plus connu est le bain de bouche, mais il y a aussi les gels, les sprays, les dentifrices, ...

A - Sprays :

Les sprays présenteraient plusieurs avantages :

• la quantité d’antiseptique utilisée sous cette forme est beaucoup moins importante que sous la forme de bain de bouche ;

• d’autre part, ce support présenterait un avantage pour les personnes handicapées.

B - Gels :

Les gels sont intéressants car ils permettent de déposer la quantité nécessaire d’antiseptique et ceci dent par dent. Les résultats dépendent donc fortement de l’habileté du patient.

Ce type de support est déconseillé pour les personnes handicapées ou présentant une mobilité réduite.

C - Irrigations :

C’est Miller en 1890 qui a décrit le premier le principe de l’irrigation. Différentes molécules et différents moyens d’irrigation furent testés avec plus ou moins de succès.

La chlorhexidine fut la molécule la plus utilisée lors des différentes expérimentations.

On peut distinguer deux types d’irrigation : l’irrigation personnelle ou à domicile et l’irrigation professionnelle.

1- Irrigation personnelle ou à domicile :

Réservée pour les patients motivés car longue et fastidieuse, cette méthode est aussi préconisée au niveau des secteurs faciles d’accès, c’est-à-dire les secteurs antérieurs.

2- Irrigation professionnelle :

En dehors de l’effet directement positif sur la flore bactérienne par l’utilisation d’antiseptiques, cette technique présente un réel intérêt car elle vient compléter le traitement parodontal classique.

De plus, cela permet de vérifier la cicatrisation, la maintenance ainsi que la motivation de notre patient.

Les voies de recherche sont à l’heure actuelle vers des produits comme le peroxyde d’oxygène, capable de modifier le potentiel redox jusqu’à un niveau suffisant pour interdire toute croissance bactérienne.

La PVP-I (Bétadine®) possèderait une action bactéricide par simple contact.

Rosling et al. ont obtenu une diminution de poche et une réduction de la perte d’attache en utilisant la PVP-I en irrigation.

Charon préconise, après avoir éliminé le maximum de tartre, l’irrigation de l’entrée de toutes les lésions avec une solution d’eau oxygénée à 10 volumes suivie d’une irrigation à l’aide d’une solution de chlorhexidine à 0,12 % ou 0,2 % (Parodex®).

Conclusion :

Le large choix d’antiseptiques, l’efficacité variable de ces molécules, les différents supports, ... ne facilitent pas le choix du praticien. Selon Sixou et Hamel, le choix de la prescription repose sur :

• l’évaluation in vitro puis in vivo de la molécule ;

• les publications scientifiques et professionnelles à grande diffusion ;

• l’activité des excipients et des adjuvants.

En effet, les excipients peuvent augmenter comme diminuer l’activité bactéricide du principe actif.

Ainsi, une solution de chlorhexidine à 0,1 % peut être plus active qu’une solution à 0,2 % si l’excipient de la première permet une pleine expression des propriétés antibactériennes de la molécule active ;

• les résistances bactériennes au principe actif ;

• le choix d’une action antiseptique, antiinflammatoire ou antalgique ;

• le respect de l’écosystème buccal ;

• la pathologie rencontrée.

Dans une situation de parodontite agressive, avec une symptomatologie clinique intense, dans le cadre de la première phase de traitement (phase d’attaque), Sixou et Hamel préconisent l’utilisation de chlorhexidine à 0,2 % plutôt qu’à 0,12 %.

Dans une situation de parodontite de l’adulte, avec une symptomatologie modérée, l’utilisation de chlorhexidine à 0,12 % serait préférable.

Une molécule de remplacement dans ce cas serait l’héxétidine à 0,1 %.

Enfin il nous arrive fréquemment, suite à l’insistance du patient, de prescrire des antiseptiques malgré l’absence de pathologie.

Dans ce cas, il serait souhaitable de prescrire les molécules présentant l’activité la plus faible.

On privilégie les ammoniums quaternaires, la sanguinarine et les huiles essentielles, afin de préserver l’écosystème buccal.

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