Bookmark and Share                    Rechercher dans le site  |   Devenir membre
      Accueil       |      Forum     |    Livre D'or      |     Newsletter      |      Contactez-nous    |                                                                                                          Envoyer par mail  |   Imprimer
loading...

 
Radiologie
Cardiopathies cyanogènes
Cours de Radiologie
 

Que pensez-vous de cet article ?

 

 

A - Généralités sur la cyanose :

1- Définition :

La cyanose apparaît cliniquement lorsque le sang qui circule dans les capillaires cutanés contient au moins 50 g d’hémoglobine réduite par litre de sang.

Ce pigment possède en effet une couleur sombre, différente de l’hémoglobine oxygénée qui est rouge vermeil.

La cyanose dépend donc de manière très étroite du taux d’hémoglobine circulant : elle est peu visible, voire absente, en cas d’anémie, plus nette en cas de polyglobulie.

2- Mécanismes :

La cyanose des cardiopathies est d’origine centrale.

Elle provient de la contamination du sang saturé du coeur gauche par le sang désaturé du coeur droit, au niveau d’une communication normale entre les deux circulations.

Il s’y associe fréquemment une insuffisance d’hématose par obstacle sur la voie artérielle pulmonaire, générateur d’hypoperfusion pulmonaire.

3- Diagnostic :

La cyanose est de degré variable, souvent discrète, demandant à être soigneusement recherchée à la lumière naturelle.

Elle prédomine souvent aux extrémités, aux doigts, au nez, au lobule de l’oreille.

L’examen du lit de l’ongle, de la conjonctive, de la face inférieure de la langue en facilite l’identification.

Elle doit être différenciée des colorations et pigmentations cutanées anormales, des cyanoses par pigments sanguins anormaux (méthémoglobinémie), et surtout des cyanoses périphériques par stases vasculaires.

Dans le doute, on peut effectuer à présent des mesures percutanées non invasives de la saturation en oxygène du sang artériel cutané. Normalement, en air ambiant, elle est de 95 à 96 %.

On parle de désaturation artérielle entre 90 et 75 %, de désaturation sévère entre 74 et 50 %, de désaturation très sévère au-dessous de 50 %.

On peut ainsi, de façon simple, évaluer l’effet de l’oxygénothérapie sur la désaturation.

4- Retentissements et complications :

* Retentissement fonctionnel :

La dyspnée (en dehors de toute insuffisance respiratoire ou cardiaque) est d’un type particulier : il s’agit d’une tachypnée superficielle, variable, apparaissant à l’effort mais aussi aux émotions.

La croissance staturale est fréquemment plus affectée que la croissance pondérale.

Chez le jeune enfant, le développement psychomoteur est souvent perturbé, avec retard à l’apprentissage de la marche.

L’accroupissement, qui survient après l’effort ou parfois au repos, est un curieux symptôme qui ne se voit pratiquement que dans la tétralogie de Fallot.

* Retentissement osseux :

Certains secteurs tissulaires sont le siège d’hypertrophies réactionnelles à l’anoxie chronique : gingivite hypertrophique, et surtout hippocratisme digital.

Il s’agit d’une hypertrophie des houppes phalangiennes, responsable d’une déformation des ongles qui sont bombés en « verre de montre », des doigts et des orteils qui sont renflés en « baguette de tambour ».

L’hippocratisme digital s’observe en cas de cyanose sévère évoluant depuis plusieurs années.

Il est exceptionnel chez le nourrisson.

Il n’est pas spécifique d’une cardiopathie cyanogène et se voit également dans l’insuffisance respiratoire chronique, l’endocardite infectieuse, les cancers bronchopulmonaires, les affections hépatiques ou intestinales chroniques.

* Retentissement hématologique :

La polyglobulie est l’élément essentiel.

Elle est responsable d’altérations physicochimiques secondaires du sang, et comporte ses propres complications.

Elle reflète la gravité et l’ancienneté de l’anoxie chronique.

Très souvent, elle est aggravée par une microcytose liée à une utilisation importante de fer par la moelle osseuse.

Elle est fréquente chez le nourrisson, et s’accompagne d’une carence martiale avec abaissement du fer sérique.

Cette polyglobulie augmente la viscosité sanguine, ce qui majore le travail cardiaque et aggrave la cyanose par stase périphérique.

D’autres anomalies hématologiques sont observées : trouble de la crase sanguine en rapport avec une synthèse hépatique déficiente du fait de l’anoxie ; trouble de la fonction plaquettaire, voire même thrombopénie, surtout en cas d’hématocrite très élevé.

* Retentissement neurologique :

+ Malaises anoxiques :

Ce terme désigne des accidents critiques passagers qui ont pour caractère commun de survenir brutalement.

Ils peuvent évoluer vers la syncope, voire la mort subite. Leur aspect clinique est varié : obnubilation passagère, hypotonie brutale, perte de connaissance complète, voire crises convulsives.

On peut observer une recrudescence de la cyanose, ou au contraire une pâleur extrême.

Ils s’accompagnent d’une tachycardie et d’une tachypnée importantes. Ils sont souvent observés dans la tétralogie de Fallot.

+ Accidents vasculaires cérébraux :

Il s’agit d’infarctus hémorragiques ou d’hémorragies cérébroméningées favorisés par l’importance et l’ancienneté de l’anoxie, la polyglobulie et l’hyperviscosité sanguine.

Les facteurs déclenchants sont la déshydratation, la fièvre, un cathétérisme cardiaque.

Ils peuvent laisser des séquelles neurologiques extrêmement sévères.

+ Abcès du cerveau :

Ils sont secondaires aux bactériémies et à la contamination du sang artériel par du sang veineux qui a échappé au filtre pulmonaire.

Cette inoculation hématogène va trouver un terrain de choix dans un cerveau altéré dont l’anoxie réduit encore les possibilités de défense.

Les germes sont surtout le streptocoque et le staphylocoque.

Ils sont très rares chez le nourrisson, plus fréquents chez l’enfant et l’adolescent.

Ils peuvent compliquer une endocardite bactérienne.

Ils doivent être cherchés systématiquement en cas d’état fébrile persistant, d’altération de l’état général.

C’est essentiellement la tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique nucléaire qui fournissent un diagnostic précis.

B - Traitement :

La correction complète des cardiopathies cyanogènes doit toujours être préférée au traitement palliatif, toutes les fois qu’elle est possible.

En effet, elle seule met à l’abri des thromboses et des abcès cérébraux.

Si la diminution de la gravité de ces accidents est due à un dépistage plus précoce, la diminution de leur fréquence est due essentiellement à la précocité de la correction chirurgicale.

Les traitements médicaux s’adressent à la cyanose des cardiopathies inopérables, ou permettent d’attendre le moment optimal de l’intervention, ou encore d’y préparer le malade.

Leur but est d’améliorer la tolérance, et surtout de prévenir les accidents neurologiques.

L’oxygénothérapie reste un des éléments du traitement des cardiopathies cyanogènes.

Elle n’améliore pas notablement la saturation en oxygène, mais elle peut être utile en cas d’hypoxie grave, en augmentant la proportion d’oxygène dissous dans le plasma.

Lorsque la polyglobulie atteint un certain seuil, généralement plus de 70 % d’hématocrite, des saignées répétées à la demande peuvent être utiles.

On procède à une soustraction de 15 mLde sang par kilogramme de poids, à remplacer par un volume égal d’une solution macromoléculaire.

Outre l’amélioration circulatoire due à la réduction de la viscosité sanguine, la technique des saignées répétées a l’avantage de normaliser les troubles de la fonction plaquettaire.

Chez le nourrisson, en cas d’hypochromie, l’administration de fer est justifiée.

L’aspirine, comme antiagrégant plaquettaire, semble jouer un rôle intéressant dans la prévention des accidents thromboemboliques.

Tétralogie de Fallot :

C’est la plus fréquente des cardiopathies cyanogènes.

Elle représente, selon les statistiques, de 5 à 8 % des cardiopathies congénitales.

C’est une malformation grave dont le pronostic a été considérablement amélioré grâce aux progrès de la chirurgie cardiaque, permettant une réparation complète de plus en plus précoce et fiable, même si elle ne restitue pas un coeur complètement normal.

L’intervention doit impérativement être précédée d’un bilan anatomique très précis des différentes lésions anatomiques.

A - Anatomie pathologique :

Bien que cette malformation ait déjà été décrite auparavant, c’est le Marseillais Antoine Fallot qui, en 1888, lui donne le nom de « tétralogie », soulignant l’association de quatre anomalies : la communication interventriculaire, la sténose pulmonaire, la dextroposition de l’aorte et l’hypertrophie du ventricule droit.

En fait, il s’agit fondamentalement d’une seule anomalie anatomique, à savoir le déplacement en avant et à droite du septum infundibulaire, ce qui entraîne une partition inégale des voies de chasse droite et gauche.

Il en résulte un rétrécissement de la voie pulmonaire, une communication interventriculaire par « malalignement », et le chevauchement de l’orifice aortique.

À cette définition anatomique, il convient d’en ajouter une autre, physiologique, à savoir l’égalisation des pressions dans les deux ventricules, et l’existence d’un shunt droite-gauche exclusif ou prédominant.

La tétralogie comporte toujours, en raison du déplacement du septum infundibulaire, une sténose infundibulaire et une large communication interventriculaire, le septum conal ne fusionnant pas avec le septum interventriculaire.

Le chevauchement de l’aorte est d’un degré très variable. Quant au quatrième élément décrit par Fallot, l’hypertrophie du ventricule droit, il résulte évidemment de la surcharge de pression.

1- Sténose pulmonaire :

– La sténose infundibulaire est un élément constant.

Elle est essentiellement musculaire, mais peut être complétée par un anneau fibreux.

Trois types anatomiques sont décrits : une sténose infundibulaire basse avec une chambre infundibulaire large en aval et une valve pulmonaire souvent normale ; une sténose infundibulaire distale avec valve sténosée ; un infundibulum long et hypoplasique se terminant par un anneau valvulaire pulmonaire hypoplasique.

– La sténose valvulaire pulmonaire s’observe dans deux tiers des cas.

La valve est souvent bicuspide.

Il n’y a pas de dilatation poststénotique de l’artère pulmonaire.

Au contraire, celle-ci est souvent hypoplasique, à un degré variable, ou présente un rétrécissement sus-valvulaire.

Il s’agit alors d’une véritable « triple sténose » sous-valvulaire, valvulaire et sus-valvulaire.

– La bifurcation pulmonaire peut être le siège d’une sténose, les sténoses plus distales des artères pulmonaires étant moins communes.

Rarement, on peut observer une atrésie de l’origine de l’artère pulmonaire gauche, qui est alors vascularisée à contre-courant par des vaisseaux systémiques.

2- Communication interventriculaire :

Elle est large, unique, haut située.

Le plus souvent, elle est de type périmembraneux à extension infundibulaire.

Occasionnellement, la communication peut être partiellement obstruée par du tissu fibreux provenant de la valve tricuspide, et peut ainsi devenir restrictive.

3- Chevauchement de l’aorte :

Il résulte du malalignement entre le septum infundibulaire et le septum trabéculé.

Il s’accompagne d’une rotation de la racine de l’aorte qui amène le sinus de Valsalva non coronarien plus en avant, et le sinus de Valsalva coronarien droit vers la gauche.

Le chevauchement est de degré variable ; il peut être minime ou atteindre 50 %, voire plus.

Il s’agit alors de formes de passage vers le ventricule droit à double issue.

La continuité mitroaortique est cependant conservée dans la tétralogie de Fallot.

4- Anomalies associées :

– L’arc aortique est à droite dans 25 % des cas. Les vaisseaux de la gerbe aortique ont le plus souvent une distribution en « miroir », et il n’y a pas d’anneau vasculaire.

Dans 5 % des cas cependant, il existe une artère sous-clavière gauche aberrante.

– La persistance du canal artériel est rare.

Elle améliore la tolérance fonctionnelle.

En cas d’arc aortique droit, il naît le plus souvent de l’artère sous-clavière gauche.

– Les communications interventriculaires multiples sont rares et touchent généralement le septum musculaire trabéculé.

Difficiles d’accès, elles compliquent la cure complète.

– Les anomalies des artères coronaires sont fréquentes (un tiers des cas) et importantes pour le chirurgien.

– L’artère interventriculaire antérieure naît de l’artère coronaire droite dans 5 % des cas ; elle croise l’infundibulum, voie d’abord de la réparation. Le développement excessif de l’artère conale est très fréquent.

Un ostium coronarien unique se rencontre dans environ 5 % des cas.

Enfin, on peut observer des anastomoses entre les artères coronaires et les artères pulmonaires.

– La communication interauriculaire peut être présente, et certains parlent alors de « pentalogie » de Fallot.

La simple perméabilité du foramen ovale est bien plus fréquente.

– Les collatérales aortopulmonaires sont moins fréquentes que dans l’atrésie pulmonaire.

Il peut s’agir d’artères bronchiques fortement développées, ou alors de collatérales aortopulmonaires naissant de l’aorte descendante à des niveaux variables. De façon schématique, on distingue :

– les formes « régulières » quand il n’existe pas de lésions contreindiquant la réalisation d’une réparation chirurgicale complète précoce : communication interventriculaire unique, arbre artériel pulmonaire complet sans sténose des branches, aucune disposition coronaire anormale empêchant une infundibulotomie ;

– les formes « irrégulières » comprenant une ou plusieurs lésions associées : communications interventriculaires multiples, anomalies coronaires, sténose ou hypoplasie grave des branches pulmonaires, malformation des valves auriculoventriculaires...

Ces formes seront orientées vers une chirurgie palliative.

B - Physiopathologie :

Il existe une surcharge de pression modérée du ventricule droit, responsable de son hypertrophie.

La communication interventriculaire étant non restrictive, les pressions systoliques sont identiques dans le ventricule gauche, le ventricule droit et l’aorte.

La surcharge ventriculaire droite reste donc modérée et il n’y a pas d’insuffisance cardiaque.

Le shunt droite-gauche est la caractéristique physiopathologique principale de la tétralogie de Fallot. Son degré est tributaire, avant tout, du degré de la sténose pulmonaire et dans une moindre mesure, des résistances systémiques.

La sténose pulmonaire a toujours une composante musculaire et peut donc varier en fonction de plusieurs paramètres.

Elle a tendance à s’aggraver avec l’âge ; ainsi, la cyanose s’installe en général progressivement au cours de la première année de vie.

Elle peut varier sous l’effet de la fréquence cardiaque et de la force de contraction myocardique, toutes deux sous l’influence du système nerveux autonome.

Le shunt droite-gauche augmente donc à l’effort et lors des émotions.

La crise hypoxique, complication classique de la tétralogie de Fallot, a pour cause principale un spasme de l’infundibulum fermant l’accès à la circulation pulmonaire.

La baisse des résistances systémiques peut également être un facteur déclenchant.

En effet, l’aorte chevauchant le ventricule droit, une hypotension artérielle, ou une baisse de la résistance périphérique favorisent le shunt droite-gauche.

C’est là l’explication d’une autre manifestation typique de la tétralogie, à savoir l’accroupissement (squatting).

Le fait de replier les jambes sur l’abdomen augmente en effet quelque peu les résistances systémiques, et diminue ainsi le shunt droite-gauche.

C - Clinique :

La cyanose est le signe principal. Elle n’est pas présente à la naissance, sauf dans des cas sévères.

Elle apparaît au cours des 6 premiers mois de vie, de façon progressive.

Elle est plus importante à l’effort, aux pleurs et au froid.

Les crises (ou malaises) hypoxiques sont caractéristiques de la tétralogie de Fallot.

Elles peuvent apparaître dans la première année de vie, mais sont plus fréquentes après l’âge de 1 an.

On observe une accentuation rapide de la cyanose, accompagnée de tachypnée ; dans les formes graves, il y a perte de connaissance.

La crise hypoxique peut apparaître à n’importe quel moment de la journée, mais s’observe plus particulièrement au lever, le matin.

Le cathétérisme cardiaque, l’induction d’une anesthésie peuvent la déclencher, de même qu’une émotion ou une angoisse.

Le souffle systolique disparaît à l’auscultation, ce qui témoigne d’une fermeture de l’infundibulum.

Bien que les crises hypoxiques puissent être contrôlées par les bêtabloquants, leur apparition doit être considérée comme une indication à un acte chirurgical.

Le retard staturopondéral est fréquent, mais généralement modéré.

Il touche la croissance staturale, aussi bien que la prise pondérale.

À l’auscultation du coeur, il existe un souffle éjectionnel, losangique, dont le timbre est de haute fréquence. Il provient de la sténose infundibulaire.

La longueur du souffle dépend du degré de sténose : un souffle long, presque pansystolique, traduit une sténose modérément sévère ; un souffle court, en revanche, indique que la sténose est très sévère, et que l’infundibulum se ferme en systole, arrêtant tout flux.

En cas de crise hypoxique, le souffle disparaît.

D - Explorations complémentaires :

1- Radiographie thoracique :

Les deux caractéristiques radiologiques de la tétralogie sont l’hypoperfusion pulmonaire et le coeur en « sabot ».

Cette silhouette typique, qui n’est cependant pas constante, se caractérise par une pointe surélevée (hypertrophie ventriculaire droite) et un arc moyen concave (hypoplasie du tronc pulmonaire).

Le bouton aortique est proéminent (dilatation de l’aorte).

L’arc aortique droit est observé dans un quart des cas. La cardiomégalie est absente ou peu importante.

Chez le nouveau-né, ces caractéristiques sont peu apparentes.

Seuls l’hypoperfusion pulmonaire et l’arc aortique droit peuvent orienter vers le diagnostic.

2- Échocardiographie :

L’échocardiogramme identifie facilement, en « grand axe », deux éléments importants de la tétralogie de Fallot : la communication interventriculaire et le chevauchement de l’aorte.

La continuité mitroaortique est démontrée sur la même coupe.

On note également une dilatation et une hypertrophie du ventricule droit.

La visualisation de la voie de chasse droite est plus délicate, mais peut être obtenue en « petit axe » (parasternal), ou en position sousxiphoïdienne du capteur.

On peut alors évaluer la dimension de l’anneau valvulaire, du tronc et des branches proximales.

Une évaluation du diamètre des branches de l’artère pulmonaire est obtenue également en position suprasternale.

Grâce au doppler, on peut estimer le gradient de pression sur la voie de chasse droite.

3- Imagerie par résonance magnétique :

Cette technique permet, dans des mains expertes, d’obtenir de très bonnes images de la tétralogie de Fallot.

En particulier, la voie de chasse du ventricule droit, parfois difficile à mettre en évidence par l’échocardiographie, est bien visualisée, ainsi que les artères pulmonaires, jusqu’en périphérie.

4- Cathétérisme et angiographie :

Malgré l’imagerie non invasive, la plupart des auteurs continuent à recommander le cathétérisme cardiaque avant la chirurgie correctrice.

Cependant, on peut aujourd’hui, dans les cas où cette procédure paraît risquée (crises anoxiques graves), y renoncer.

Le cathétérisme permet de préciser l’hémodynamique, et l’angiographie montre mieux que toute autre méthode la voie de chasse droite et les artères pulmonaires jusqu’en périphérie.

Par ailleurs, une aortographie (voire une coronarographie) précise l’existence d’éventuelles anomalies de l’origine et de la distribution des artères coronaires, informations de première importance pour le chirurgien.

L’examen hémodynamique révèle une égalisation des pressions systoliques dans les deux ventricules.

Si l’on pénètre dans l’artère pulmonaire, on y trouve une pression basse, inférieure à la normale, et au retrait, un gradient souvent étagé (valvulaire, puis infundibulaire).

Le shunt droite-gauche se manifeste déjà à l’étage auriculaire, s’il existe une communication interauriculaire ou un foramen largement perméable. Sinon, c’est à l’étage ventriculaire, puis dans l’aorte, que se manifeste la désaturation.

Le calcul des débits confirme la diminution du débit pulmonaire, qui souvent se situe à la moitié, voire au tiers seulement du débit systémique.

L’angiocardiographie permet d’apporter au chirurgien un bilan anatomique précis.

La ventriculographie droite sélective montre, mieux que toute autre technique d’imagerie, la voie de chasse droite, avec la sténose infundibulaire, la sténose valvulaire et la dimension du tronc de l’artère pulmonaire et de ses branches.

Une vue de face, avec angulation craniocaudale de 20 à 25°, donne les meilleures images.

L’aorte se remplit simultanément à travers la communication interventriculaire ; on apprécie bien, sur la vue de profil, le degré de chevauchement.

L’artère pulmonaire est toujours de dimension inférieure à celle de l’aorte, non seulement en raison de son hypoplasie (de degré très variable), mais par le fait que l’aorte ascendante est dilatée.

On terminera toujours l’examen par une aortographie, ou une coronarographie sélective, pour dépister une anomalie des artères coronaires, et une ventriculographie gauche en oblique antérieure gauche à la recherche de communications interventriculaires multiples.

E - Traitement :

Le traitement définitif est la réparation chirurgicale à coeur ouvert, qui est indiquée dans tous les cas.

L’âge auquel elle est effectuée a diminué au fil des ans : il se situe actuellement entre 1 an et 2 ans. Certains l’effectuent chez le nourrisson, voire chez le nouveau-né.

Le traitement médical et le traitement palliatif chirurgical, qui permettent de remettre à plus tard la réparation définitive, ont donc une importance marginale aujourd’hui.

1- Traitement médical :

Il se limite à la prise en charge des crises hypoxiques et au traitement martial en cas d’hypochromie.

Lors de crises hypoxiques, le premier geste consiste à administrer de l’oxygène et à placer l’enfant en position genu-pectorale ; on peut aussi replier simplement les genoux sur l’abdomen (équivalent de l’accroupissement).

Le traitement médicamenteux de choix est le propranolol par voie intraveineuse lente, à la dose de 0,05 à 0,1 mg/kg.

La morphine par voie sous-cutanée s’est également avérée utile.

Si la crise hypoxique survient dans le contexte d’une hypotension ou d’une hémorragie, l’administration de plasma ou de sang est une mesure essentielle.

L’acidose doit être corrigée.

Le propranolol est particulièrement utile dans la prévention des crises hypoxiques ; il est administré per os, trois à quatre fois par jour, à la dose de 2 à 5 mg/kg/j.

Cependant, il ne doit pas s’agir d’un traitement de longue durée.

En effet, les crises hypoxiques doivent être considérées comme une indication à intervenir chirurgicalement sans tarder.

2- Chirurgie palliative :

Ses indications se sont singulièrement rétrécies, la plupart des chirurgiens expérimentés préférant pratiquer une réparation d’emblée.

Si certains pensent pouvoir offrir une chirurgie définitive, même chez le nouveau-né, nombre d’équipes voient encore une indication à la palliation, si un geste s’avère indispensable dans les 3 à 6 premiers mois de vie.

En cas d’atrésie pulmonaire ou d’hypoplasie des artères pulmonaires, l’intervention palliative aura pour but non seulement de soulager une hypoxie grave, mais encore de développer et de faire croître les artères pulmonaires.

L’anastomose de Blalock-Taussig, classique ou modifiée, reste la principale opération palliative.

Elle réalise une anastomose terminolatérale entre une artère sous-clavière et l’artère pulmonaire homolatérale.

C’est la plus ancienne des interventions pour la tétralogie de Fallot, et elle continue à être utilisée par bien des chirurgiens.

Elle ne grandit pas avec l’enfant, et la durée de son efficacité se trouve ainsi limitée.

Surtout, elle fait courir un risque non négligeable de sténose iatrogène de l’artère pulmonaire, très préjudiciable au pronostic à long terme.

Bien des centres préfèrent, surtout chez le nouveau-né, une anastomose de Blalock modifiée par l’interposition d’un tube de Gore-Tex.

Ces anastomoses ont l’avantage de pouvoir être calibrées selon l’âge du patient et de laisser intact l’apport artériel au bras.

3- Cathétérisme cardiaque interventionnel :

La dilatation au ballon de la voie de chasse droite, en lieu et place d’un acte chirurgical palliatif, a été tentée dans plusieurs centres, avec un certain succès.

Le risque de crise hypoxémique lors de ce geste n’est pas négligeable, mais une amélioration des saturations artérielles est souvent notée par la suite.

Certains pensent qu’un développement de la taille des artères pulmonaires peut être obtenu par cette intervention.

4- Réparation complète :

Elle s’effectue sous circulation extracorporelle.

Elle doit être entreprise précocement, électivement à l’âge de 1 à 2 ans, même dans les formes bien tolérées.

Si l’hypoxie est grave ou s’il y a des crises hypoxiques, l’intervention peut avoir lieu chez le nourrisson.

Il faudra cependant peser le risque d’une réparation d’emblée contre celui d’une palliation : en effet, si les artères pulmonaires sont petites, s’il existe des sténoses pulmonaires périphériques, une opération palliative sera préférée.

De même, certaines anomalies des artères coronaires doivent faire choisir la palliation plutôt qu’une réparation chez le nourrisson, dans la mesure où cette dernière nécessitera peut-être la mise en place d’un tube ou d’une homogreffe entre le ventricule droit et l’artère pulmonaire.

Le geste chirurgical lui-même comprend la fermeture de la communication interventriculaire et la levée de la sténose pulmonaire.

La sténose infundibulaire est réséquée et la valve pulmonaire inspectée : une commissurotomie est effectuée en cas de sténose valvulaire.

Il faut alors jauger le calibre de l’anneau valvulaire et du tronc de l’artère pulmonaire.

Les valeurs de calibre minimal, par rapport à la surface corporelle du patient, ont été établies.

Si le diamètre mesuré est inférieur à cette valeur limite, il faut alors fendre l’anneau valvulaire pulmonaire, de même que le tronc pulmonaire pour l’élargir (patch transannulaire).

Ce geste laisse un orifice pulmonaire partiellement valvulé, et l’insuffisance valvulaire pulmonaire sera inévitable.

5- Résultats lointains :

La chirurgie à coeur ouvert a radicalement changé le pronostic de la tétralogie de Fallot ; bien des patients opérés mènent une vie normale 20 ou 30 ans après l’intervention.

De nombreux travaux concernant le suivi lointain l’attestent.

Cependant, la réparation chirurgicale n’est pas synonyme de guérison : la mortalité et la morbidité tardives touchent un pourcentage significatif d’opérés.

Les principales causes de décès tardifs sont la mort subite, la réopération pour lésion résiduelle (sténose et insuffisance pulmonaires, communication interventriculaire résiduelle), les troubles du rythme et de la conduction, et l’insuffisance cardiaque.

Environ 80 % des opérés sont asymptomatiques.

La réparation de la tétralogie de Fallot ne peut jamais restituer un coeur anatomiquement normal.

Des contrôles médicaux restent nécessaires pendant toute la vie des patients opérés.

Atrésie pulmonaire avec communication interventriculaire :

Elle constitue une forme extrême de tétralogie de Fallot, définie par une obstruction complète de la voie de sortie du ventricule droit, qui se vide en totalité dans la grande circulation par une communication interventriculaire.

Cette malformation n’est viable que grâce à une circulation de suppléance pulmonaire, dont l’anatomie est extrêmement polymorphe.

Il s’y associe presque toujours des anomalies complexes de la taille et de la distribution de l’arbre artériel pulmonaire.

L’étude précise de la vascularisation pulmonaire dans ces atrésies pulmonaires est devenue un temps capital de leur bilan.

Ce sont les données anatomiques et physiologiques de cette étude qui conditionnent l’opérabilité de ces malformations et le choix des techniques à mettre en oeuvre.

Depuis quelques années, de nouvelles techniques chirurgicales sont apparues, qui rendent possible une correction chirurgicale chez un grand nombre de patients au prix, il est vrai, d’interventions successives.

L’atrésie pulmonaire avec communication interventriculaire n’est pas rare : elle constitue 2 % de l’ensemble des cardiopathies congénitales.

Comme la tétralogie de Fallot, elle semble légèrement plus fréquente chez les garçons que chez les filles.

Les malformations extracardiaques sont rares, mais l’atrésie pulmonaire est parfois associée aux formes partielles du syndrome de Di George.

A - Anatomie pathologique :

L’anatomie intracardiaque est celle d’une tétralogie de Fallot.

La communication interventriculaire peut être membraneuse ou infundibulaire.

Elle est généralement large, du fait du malalignement du septum infundibulaire avec le reste du septum musculaire.

L’aorte chevauche le septum interventriculaire souvent de plus de 50 %.

Sa portion ascendante est dilatée.

L’atrésie de l’orifice pulmonaire est très variable. Lors des interventions et des études anatomiques, le segment artériel atrésique apparaît sous forme d’un cordon élastique solide, dans environ trois quarts des cas.

Le plus souvent, la valve et la portion proximale du tronc de l’artère pulmonaire sont atteintes.

Plus rarement, la valve seule est imperforée.

Tantôt, les artères pulmonaires droite et gauche sont en libre communication l’une avec l’autre (forme confluente).

En revanche, quand l’atrésie s’étend au-delà de la bifurcation, la confluence n’existe plus.

La circulation pulmonaire est exclusivement assurée par des vaisseaux systémiques : le canal artériel, les artères collatérales systémicopulmonaires et, à un moindre degré, le plexus des artères bronchiques et pleurales.

Le canal et les artères collatérales peuvent subsister chez le même malade, mais rarement dans le même poumon.

Quand un canal vascularise deux artères pulmonaires confluentes, la circulation pulmonaire est souvent normale, et les artères pulmonaires sont de taille normale à la naissance.

Après la naissance, le canal se rétrécit à son extrémité pulmonaire, et peut même se fermer, ce qui aboutit à une hypoplasie progressive des artères pulmonaires si le patient survit.

Quand le canal est absent, c’est-à-dire d’emblée fermé, il y a des artères collatérales : elles proviennent le plus souvent de l’aorte thoracique descendante, plus rarement des artères sous-clavières, et encore moins souvent de l’aorte abdominale ou de l’artère coronaire gauche.

Leur nombre varie de un à six, et leur calibre de 1 à 20 mm.

Il y a souvent des sténoses sur leur trajet.

Ces sténoses peuvent être localisées ou étendues, congénitales ou acquises.

Elles ont un effet favorable sur la circulation pulmonaire, en diminuant son débit, et donc évitent le risque d’hypertension artérielle pulmonaire, cinétique, puis obstructive, mais elles ont aussi un effet défavorable car la diminution du débit favorise l’hypoplasie des artères pulmonaires centrales.

L’anastomose entre les collatérales et les artères pulmonaires peut se faire à différents niveaux : dans le hile, sur les branches lobaires, ou encore avec des artères intraparenchymateuses.

Certains segments pulmonaires peuvent être irrigués par les seules collatérales, sans anastomose avec les artères pulmonaires centrales.

Les artères intrapulmonaires ont une distribution normale.

Leur aspect histologique, initialement normal, dépend ensuite du débit et du régime des pressions auxquelles elles sont soumises.

La moitié d’entre elles sont réunies aux artères collatérales ; les autres sont réunies aux rameaux périphériques de l’artère pulmonaire.

L’origine des artères pulmonaires périphériques est donc très variable, il en est de même des anomalies histopathologiques qu’on observe au niveau des artérioles pulmonaires et qui peuvent varier de l’hypertension pulmonaire obstructive à la thrombose par stase.

Entre la forme où les deux artères pulmonaires droite et gauche sont confluentes, vascularisées par un gros canal, et assurant la presque totalité de l’irrigation pulmonaire, et les formes où les artères pulmonaires droite et gauche ne sont pas confluentes, sont de petite taille, et n’assurent qu’une faible partie de l’irrigation des vaisseaux pulmonaires périphériques, tous les intermédiaires sont possibles.

La circulation coronaire et les voies de conduction sont analogues à ce que l’on rencontre dans la tétralogie de Fallot ; il en est de même pour les anomalies cardiaques associées (veine cave supérieure gauche persistante se drainant dans le sinus coronaire, arc aortique droit dans au moins un quart des cas).

B - Physiopathologie :

La principale conséquence de la malformation est un shunt droite gauche ventriculaire intégral.

Le degré d’hypoxémie et de cyanose va dépendre du débit pulmonaire vicariant provenant des collatérales ; il est donc très variable.

S’il n’y a pas de collatérales, la perfusion pulmonaire dépend alors totalement du canal artériel.

La malformation est alors ductodépendante. Bien tolérée en cas de canal artériel perméable, elle est très mal supportée au cas où sa fermeture survient.

S’il y a de grosses collatérales dès la naissance, non seulement la perfusion pulmonaire est assurée, mais elle peut être excessive, avec hypervascularisation pulmonaire provoquant une insuffisance cardiaque.

Entre ces deux extrêmes, on rencontre bien des cas où quelques collatérales permettent un débit pulmonaire à peine suffisant.

C - Clinique et diagnostic :

Dans la forme commune, le nourrisson n’est pas sévèrement hypoxémique et cyanosé pendant la période néonatale, soit qu’il y ait un canal artériel relativement large, soit que des vaisseaux collatéraux systémiques soient assez bien développés pour permettre un flot sanguin pulmonaire adéquat.

De tels enfants peuvent avoir au départ une oxygénation artérielle correcte pendant quelques mois.

Ensuite, le degré d’hypoxémie et la cyanose s’accentuent, car leurs besoins augmentent alors que le flux sanguin pulmonaire reste relativement fixe.

À l’auscultation, il n’y a pas de souffle systolique de sténose pulmonaire ; en revanche, il y a un second bruit unique, et des souffles continus dus à la circulation de suppléance.

À la radiographie, la silhouette cardiaque est la caricature de celle de la tétralogie de Fallot.

De face, la concavité de l’arc moyen est accentuée, ainsi que le relèvement de la pointe et la dilatation de l’aorte ascendante ; l’aspect est celui de coeur en « sabot ».

La vascularisation pulmonaire est variable selon l’importance des collatérales aortopulmonaires ; si celles-ci sont nombreuses, l’image de branches de division de l’artère pulmonaire est remplacée par des images parahilaires en « pain à cacheter ».

En l’absence de collatérales, la vascularisation pourra être très diminuée, surtout si le canal artériel est petit.

Après opacification barytée de l’oesophage, on observe parfois des indentations produites sur la face postérieure de l’oesophage par les artères anormales d’origine aortique.

L’échocardiogramme est analogue à celui de la tétralogie de Fallot, mais il est impossible de démontrer une valve pulmonaire, alors qu’on la retrouve presque toujours dans la tétralogie.

Au doppler pulsé ou continu, aucun flux antérograde ne peut être démontré, de l’infundibulum vers l’artère pulmonaire.

L’échocardiographie et le doppler doivent être réalisés avec soin, car ils peuvent apporter des renseignements sur la morphologie intracardiaque et, par les incidences suprasternales, sur l’anatomie de la crosse aortique, la présence et la taille des artères pulmonaires centrales.

Cet examen permet donc de réduire l’importance et la durée du bilan angiographique.

Le cathétérisme et l’angiographie sont nécessaires pour faire l’inventaire détaillé des artères pulmonaires, ainsi que des vaisseaux d’origine systémique qui les nourrissent.

Au cathétérisme, on trouve, comme dans la tétralogie de Fallot, un shunt droite-gauche interventriculaire et un shunt droite-gauche entre le ventricule droit et l’aorte.

La pression ventriculaire droite est de niveau systémique.

L’angiographie ventriculaire droite prouve le diagnostic d’atrésie pulmonaire en montrant un infundibulum borgne.

Elle montre également le degré de chevauchement de l’aorte, seul vaisseau à s’opacifier à partir des ventricules.

Pour réaliser une étude détaillée de la vascularisation des deux poumons, l’injection dans l’aorte ascendante est insuffisante.

Certes, elle montre les anomalies coronaires, mais l’aorte très dilatée masque, en général, les collatérales.

Une injection dans l’aorte descendante, à hauteur de l’isthme, ou plus bas, en amont d’un ballon gonflé bloquant le flux aortique pendant quelques secondes, oriente le produit de contraste vers les collatérales et le canal.

Afin de déterminer l’origine de l’irrigation de chaque lobe, et pour bien opacifier les artères pulmonaires centrales, il est nécessaire d’injecter sélectivement chaque collatérale.

Grâce aux anastomoses, les artères pulmonaires centrales s’opacifient alors en rétrograde.

Le petit tronc pulmonaire et les artères pulmonaires droite et gauche donnent l’aspect d’une mouette qui vole ailes déployées ; on peut alors juger du degré d’hypoplasie des artères pulmonaires centrales qui est souvent sévère.

Les injections sélectives des collatérales permettent presque toujours de voir les artères pulmonaires centrales.

En cas d’échec, une autre technique a été proposée : l’injection rétrograde par un cathéter à orifice distal bloqué dans une veine pulmonaire en position dite « veine pulmonaire bloquée ».

L’injection se fait à la main ; le produit de contraste traverse le lit capillaire à contrecourant, et vient opacifier les artères pulmonaires centrales.

Ces différentes techniques doivent permettre d’établir une véritable cartographie des vaisseaux irriguant les poumons, ce qui est essentiel pour évaluer les possibilités chirurgicales.

Il est également utile de pénétrer dans les artères pulmonaires à travers un canal artériel, un shunt préalablement établi, ou une collatérale, afin d’y mesurer la pression.

D - Traitement :

Le nouveau-né atteint d’atrésie pulmonaire sans collatérales constitue l’indication idéale pour les prostaglandines E1.

En effet, à la fermeture du canal artériel, une grave hypoxie avec acidose va s’installer, entraînant la mort.

1- Chirurgie palliative :

L’intervention doit établir une perfusion pulmonaire valable, généralement par une anastomose systémicopulmonaire.

Cette opération a deux buts : sauver le nouveau-né ou le nourrisson de la mort par hypoxie et lui permettre de grandir et de prendre du poids jusqu’à un âge jugé optimal pour la correction chirurgicale ; obtenir, par une bonne perfusion, le développement du lit vasculaire pulmonaire et un élargissement des artères pulmonaires centrales si souvent hypoplasiques.

On y parvient, soit par une anastomose systémicopulmonaire, soit mieux (lorsque les artères pulmonaires droite et gauche sont confluentes), par le rétablissement de la continuité entre le ventricule droit et l’artère pulmonaire par un tube prothétique de faible diamètre.

Comme dans la tétralogie de Fallot, les anastomoses systémicopulmonaires communément réalisées sont des anastomoses de Blalock-Taussig, classiques ou modifiées (implantation d’une prothèse tubulaire entre l’artère sous-clavière et l’artère pulmonaire du même côté, ou encore entre l’aorte et l’artère pulmonaire).

2- Chirurgie correctrice :

Elle doit établir une continuité entre le ventricule droit et l’artère pulmonaire, après fermeture de la communication interventriculaire.

La communication est fermée par une pièce, comme dans une tétralogie de Fallot.

La continuité est rétablie généralement à l’aide d’un tube en Dacron, de diamètre approprié.

Dans les cas favorables où la discontinuité entre l’artère pulmonaire et le ventricule droit est brève (atrésie pulmonaire acquise, atrésie pulmonaire associée à un canal large), une grande pièce d’élargissement peut parfois suffire.

Si la pression artérielle pulmonaire est basse, mieux vaut renoncer à l’insertion d’une valve biologique dans le tube, en acceptant évidemment une insuffisance pulmonaire postopératoire.

En effet, les valves biologiques ont tendance à dégénérer et à se calcifier secondairement.

Si la pression dans l’artère pulmonaire est augmentée, il est nécessaire d’intégrer un substitut valvulaire. Beaucoup d’équipes chirurgicales, actuellement, préfèrent l’homogreffe aortique ou pulmonaire (valve prélevée sur un cadavre et stérilisée aux antibiotiques), à la prothèse porcine.

Les conditions favorables pour une réparation complète, soit d’emblée, soit après reconstruction de la voie d’éjection du ventricule droit sont : des artères pulmonaires centrales dont le calibre est supérieur à 50 %de la normale ; un nombre de segments artériels pulmonaires vascularisés par des artères pulmonaires centrales confluentes qui équivalent à un poumon complet ; des lésions sténotiques réparables sur la voie d’éjection du ventricule droit.

Dans le cas de non-confluence des artères pulmonaires droite et gauche, on peut être amené à créer une bifurcation pulmonaire en Dacron.

Si un lobe pulmonaire est irrigué par une collatérale seulement, sans connexion avec les artères pulmonaires, on pourra tenter de raccorder ce lobe à l’artère pulmonaire par une intervention dite d’unifocalisation.

Les collatérales aortopulmonaires majeures doivent être absolument ligaturées dans le même temps opératoire, ou si elles échappent à la ligature chirurgicale, oblitérées par voie endoluminale (cathétérisme interventionnel).

Méconnues, elles peuvent être la cause d’insuffisance cardiaque postopératoire précoce, sévère, parfois fatale.

3- Chirurgie correctrice en plusieurs temps :

Dans bien des cas, l’hypoplasie des artères pulmonaires ne permet pas la correction définitive d’emblée.

En présence d’artères pulmonaires confluentes, il faudra, dans un premier temps, augmenter le débit pulmonaire, soit par un shunt, soit par l’implantation d’un tube de faible diamètre entre le ventricule droit et l’artère pulmonaire, tout en laissant ouverte la communication interventriculaire.

Cette seconde technique est actuellement préférée par de nombreux chirurgiens ; elle permet en effet d’agrandir harmonieusement les artères pulmonaires droite et gauche, alors qu’une anastomose systémicopulmonaire développe surtout l’artère pulmonaire du même côté.

Dans un second temps, après avoir vérifié l’augmentation de diamètre des artères pulmonaires, on procède à l’implantation d’un tube plus large, et on ferme la communication interventriculaire.

Lorsque les artères pulmonaires droite et gauche ne sont pas confluentes, une ou plusieurs interventions pourront être nécessaires pour réaliser une « unifocalisation » de la circulation artérielle pulmonaire.

4- Résultats à long terme :

Les complications tardives que l’on observe après réparation d’une tétralogie de Fallot se rencontrent également après correction d’une atrésie pulmonaire.

Il s’y ajoute le problème spécifique du tube de Dacron, valvulé ou non.

Ces tubes ont tendance à s’oblitérer lentement, par apposition pariétale de fibrine qui s’organise pour former une couenne : 20 à 30 % des tubes devront être remplacés dans les 5 ans, surtout lorsqu’ils contiennent une xénogreffe.

L’homogreffe pourrait être plus durable, mais ceci n’est pas encore entièrement démontré.

Il est donc nécessaire de suivre régulièrement les patients porteurs de ces tubes, afin de diagnostiquer à temps une obstruction significative.

Suite

  Envoyer par mail Envoyer cette page à un ami  Imprimer Imprimer cette page