Suites de couches normales et pathologiques (non compris les syndromes neuroendocriniens) Cours de
Gynécologie
Obstétrique
Physiologie des suites de couches
:
A - ASPECT ANATOMIQUE :
Le corps utérin, immédiatement après la délivrance, a le volume d’un
utérus gravide de 4 mois et demi, pèse entre 1 500 et 1 700 g et
mesure 20 à 30 cm.
Il involue très rapidement pendant les 2
premières semaines, puis plus lentement pour ne retrouver un état
prégravide (70 g, 7 à 8 cm) qu’au bout de 2 mois (délai minimal
pour envisager une contraception par dispositif intra-utérin).
Le mode d’accouchement, la parité, le poids de l’enfant n’ont pas
d’influence sur cette involution.
Sur le plan histologique, l’oedème interstitiel disparaît, les fibres
musculaires néoformées se hyalinisent et les fibres musculaires
hypertrophiées reprennent leur longueur initiale ; ainsi, à la
septième semaine du post-partum, la moitié interne du myomètre
s’est atrophiée et la moitié externe a retrouvé son aspect normal.
Le segment inférieur disparaît en 2 jours et s’incorpore dans la zone
de jonction corps-col.
Le col se reconstitue en 1 semaine : il retrouve sa longueur de 1,5 à
2 cm, sa consistance ferme ; il est fermé à l’orifice interne, perméable
à l’orifice externe (jusqu’au 20e jour).
Il n’est plus punctiforme
comme chez la nullipare, mais allongé transversalement en rapport
avec les déchirures commissurales de l’accouchement.
Un ectropion
(éversion de la muqueuse endocervicale) est fréquemment visible et
persiste pendant une durée de 6 mois à 1 an ; il ne faut en aucun cas
l’électrocoaguler.
Au niveau de la muqueuse utérine, on différencie classiquement
deux zones : la zone placentaire dont le diamètre initial est de 9 cm,
de coloration rouge, surélevée de 4 à 5 mm, parsemée de
nombreuses saillies noirâtres dues aux thromboses vasculaires
(coagulation intravasculaire localisée), qui va subir une
dégénérescence fibreuse, et la zone membraneuse, plane, gris
rougeâtre, qui va se régénérer à partir des culs-de-sac glandulaires
restants.
Au niveau de l’aire membraneuse, l’endomètre évolue classiquement
en quatre phases :
– une phase de régression pendant les 5 jours suivant
l’accouchement : la paroi est recouverte d’un enduit fibrineux
contenant des cellules déciduales en histolyse, laissant place par
endroits à des plages épithéliales correspondant à la prolifération
des culs-de-sac glandulaires restés en place dans la couche profonde
de l’endomètre ;
– une phase de cicatrisation, du 6e au 25e jour, non dépendante de
la stimulation hormonale : l’épithélium de surface est complètement
reconstitué sous l’effet d’une prolifération anarchique cicatricielle
banale.
Cela explique l’absence d’hémorragie à l’arrêt des
oestrogènes lorsqu’ils sont donnés en cure courte pour enrayer la
montée laiteuse ;
– une phase de prolifération, du 25e au 45e jour, sous l’effet de la
stimulation oestrogénique : l’endomètre présente un aspect normal
de phase folliculaire.
Ce n’est qu’à partir de cette période qu’il faut
prescrire, si besoin est, une contraception hormonale ;
– une phase de reprise éventuelle du cycle menstruel avec, chez la
femme n’allaitant pas, une hémorragie de privation après le 45e jour.
L’ovulation est possible après le 40e jour, l’endomètre prenant
ensuite un aspect sécrétoire de deuxième partie de cycle.
Les deux
premiers cycles sont fréquemment anovulatoires, mais une ovulation
précède quasi constamment la troisième menstruation.
En cas d’allaitement prolongé, l’aménorrhée se prolonge fréquemment
4 mois, puis les menstruations peuvent réapparaître, même si
l’allaitement est poursuivi.
Au niveau de l’aire placentaire, les couches superficielles se nécrosent
du deuxième au septième jour ; les vaisseaux spiralés utéroplacentaires involuent complètement (dépôts fibrinoïdes) en
15 jours et, au 30e jour après l’accouchement, les artérioles spiralées
ont repris leurs calibres et leurs structures habituelles ; il se produit
alors une restauration épithéliale qui ne sera complète que
6 semaines après l’accouchement, date à laquelle la zone placentaire
ne mesure plus que 2 cm.
Le vagin s’atrophie rapidement, perdant la moitié de ses couches
cellulaires, et ne reprend sa trophicité qu’à partir de la stimulation
hormonale du 25e jour (en l’absence d’allaitement).
Sur le plan paraclinique, tant qu’il existe une atrophie, le pH reste haut (> 6)
et les frottis montrent une majorité de cellules parabasales (50 %),
intermédiaires (46 %) et de très rares cellules superficielles (4 %).
L’hymen est toujours dilacéré par le passage du nouveau-né et il
n’en reste que les vestiges : les caroncules myrtiformes.
La vulve reste béante le premier jour, puis reprend sa tonicité et perd
son aspect congestif.
Le périnée, en ce qui concerne les muscles superficiels et les releveurs
de l’anus, retrouve sa tonicité progressivement en fonction de la
qualité de l’accouchement, de la réalisation ou non d’une
épisiotomie ou de la réparation correcte des déchirures.
Les glandes mammaires ont subi tout au long de la grossesse une
hypertrophie avec développement des canaux galactophores
(oestrogènes) et des acini (progestérone) ; la montée laiteuse se
produit 48 heures après l’accouchement sous l’effet de la prolactine
(PRL) et grâce à l’effondrement des sécrétions des stéroïdes sexuels.
Pour l’ensemble de l’organisme, le retour à l’état antérieur est
progressif et il ne faudra prévoir aucun bilan morphologique avant
3 mois.
B - ASPECTS ÉCHOGRAPHIQUE ET RADIOLOGIQUE
:
Plus récemment, l’involution utérine a été étudiée par les techniques
modernes d’imagerie médicale : échographie et analyse doppler de
la vascularisation, tomodensitométrie, résonance magnétique
nucléaire.
Il est utile de connaître les images normales afin
d’interpréter ces examens lorsque surviennent certaines pathologies
des suites de couches (particulièrement infections et thromboses).
Sur le plan radiologique, l’utérus est augmenté dans tous ses
diamètres, il existe une disjonction symphysaire supérieure à 0,6 cm
(40 %) ou des sacro-iliaques (7 %), du sang est souvent présent
(60 %) dans la cavité, voire du gaz (20 %) (surtout pendant les
3 premiers jours) ; la fréquence élevée de cette dernière image chez
les femmes asymptomatiques ne permet pas de confirmer
l’hypothèse d’une endométrite comme l’avaient supposé les
premières études, y compris lorsque ces images sont tardives,
3 semaines après l’accouchement.
Les images échographiques sont superposables aux images
tomodensitométriques.
Les dimensions de l’utérus rejoignent
au 28e jour les limites supérieures de l’utérus non gravide.
La ligne
de vacuité utérine correspondant à une ligne hyperéchogène n’est
constamment visible qu’au 28e jour ; auparavant, la cavité est dite
« réelle », probablement par hématométrie (80 % des cas à la
deuxième semaine du post-partum), et se traduit en échographie
par une zone anéchogène d’épaisseur variable, cernée de deux traits
hyperéchogènes, image parfois hétérogène et limitée au tiers
inférieur de la cavité utérine (20 % pendant la première semaine du
post-partum).
L’étude de la vascularisation utérine par doppler couleur montre,
au cours de la grossesse, la disparition de l’incisure (notch)
prédiastolique au plus tard à la 26e semaine d’aménorrhée, le
développement d’une vascularisation à basse pulsatilité et d’un flux
diastolique continu, tous ces changements étant témoins d’un
système de basses résistances périphériques.
Au cours du postpartum,
les résistances vasculaires évoluent en trois phases : dans les
2 jours suivant l’accouchement, le système à hautes résistances
vasculaires réapparaît rapidement et l’index de pulsatilité au niveau
des artères utérines augmente significativement (passant d’une
valeur moyenne de 0,7 à 1,2), le notch prédiastolique réapparaît (non
pas tant en raison de la disparition du trophoblaste que de la
diminution brutale de taille de l’utérus et des fréquentes
contractions) ; dans un deuxième temps, pendant la période
d’involution utérine, l’index de pulsatilité utérine reste stable jusqu’à
la sixième semaine du post-partum ; dans une troisième phase, il
augmente au moins jusqu’à la 14e semaine du post-partum (1,75).
Le flux diastolique permanent persiste encore à cette même date.
Pour certains auteurs, la pathologie des suites de couches,
hémorragique ou infectieuse, s’accompagnerait d’une persistance du
système de résistances vasculaires basses.
L’hypotonie des voies urinaires et biliaires persiste pendant 3 mois
et contre-indique, sauf urgence, les bilans radiologiques avant cette
date.
C - ASPECT HORMONAL :
Les oestrogènes s’effondrent le lendemain de l’accouchement. Leur
taux va progressivement augmenter sous l’influence de la follicle
stimulating hormone (FSH), à partir du 25e jour si la femme n’allaite
pas, vers le 35-45e jour en cas de lactation.
La progestérone baisse pendant les 10 jours après l’accouchement et
ne réapparaît au plus tôt qu’après le 40e jour.
Les gonadotrophines hypophysaires sont basses, le test à la luteinizing hormone-releasing hormone (LH-RH) négatif pendant
25 jours après l’accouchement, puis il apparaît une remontée
progressive de la FSH, précédant le pic ovulatoire de LH (qui ne se
produit jamais avant le 40e jour après l’accouchement).
La PRL augmente aussitôt après l’accouchement (100 à 150 ng/mL),
de façon plus importante si la femme allaite (la succion provoque
des pics prolactiniques dont l’amplitude décroît avec le temps), mais
commence à diminuer dans tous les cas après le 15e jour, aboutissant
alors à des taux de 20 à 30 ng/mL qui se normalisent en 4 à 6
semaines.
En ce qui concerne la taille de la glande pituitaire, celle-ci
augmente régulièrement au cours de la grossesse (+ 120 %, sans
dépasser 10 mm en imagerie par résonance magnétique [IRM]) et
est à son maximum au troisième jour du post-partum (seul moment
où la taille peut dépasser ces 10 mm) ; ensuite, ses dimensions
diminuent pour revenir à la normale en 6 mois.
D - ASPECT BIOLOGIQUE :
On assiste à une normalisation progressive et lente (3 mois) des
principaux paramètres biologiques modifiés au cours de la
grossesse : glycémie et tolérance aux hydrates de carbone, constantes
lipidiques (triglycérides, cholestérol, lipoprotéines).
Au niveau de la coagulation, il persiste pendant 2 semaines une
tendance à l’hypercoagulabilité.
Le fibrinogène est augmenté
(multiplié par deux) et ne retrouve des valeurs normales qu’en 3 à
4 semaines.
Il en est de même des autres facteurs, en particulier du
complexe prothrombinique.
L’activité fibrinolytique est également
augmentée et se normalise en 15 jours.
L’activine A, à son maximum
à 36 semaines, diminue progressivement mais reste le témoin d’un
état d’hypercoagulabilité dans ces premiers 15 jours.
L’équilibre
entre ces deux systèmes est précaire et peut donner lieu soit à une
coagulation intravasculaire disséminée, soit à des phénomènes de
thromboses, ce qui justifie, chez les femmes à risques, la mise en
route d’une anticoagulation préventive, poursuivie au moins 6
semaines après l’accouchement.
La protéine C-réactive ne permet
pas une surveillance de la pathologie infectieuse des suites de
couches puisque l’on assiste à une élévation physiologique pouvant
aller jusqu’à un facteur dix.
Surveillance des suites de couches :
La surveillance des 6 premiers jours se fait encore habituellement en
hospitalisation ; on peut cependant imaginer dans l’avenir un
système de surveillance à domicile, après les 3 premiers jours, permettant, en réduisant les coûts, le retour au foyer lorsque les
problèmes hémorragiques sont résolus et la lactation établie.
A - SURVEILLANCE DU PREMIER JOUR
:
Pendant les 2 premières heures, la surveillance est assurée en salle
d’accouchement : la parturiente doit être bien consciente, elle ressent
parfois des frissons ou présente un choc vagal lorsque
l’accouchement a été difficile (il faut alors s’assurer de l’absence
d’hémorragie, de l’arrêt de l’éventuelle anesthésie péridurale,
effectuer une oxygénothérapie et vérifier le fonctionnement de la
voie veineuse) ; la température peut s’élever jusqu’à 38°C (ou plus)
dans les premières 24 heures, sans que cela soit pathologique.
Toutes
les demi-heures, il faut s’assurer de la normalité du pouls et de la
tension artérielle.
Surtout, l’utérus doit comporter un « globe utérin »
de sécurité, ferme, du volume d’une grossesse de 17 semaines,
n’augmentant pas.
Le saignement extériorisé doit rester faible mais
il faut se méfier, en cas de malaise, d’un thrombus vaginal, même
sans saignement à la vulve.
L’allaitement maternel est débuté
précocement, dans l’heure suivant la naissance.
La réalimentation
maternelle peut être débutée à la fin de cette période initiale de
surveillance.
S’il y a eu anesthésie péridurale, le cathéter sera enlevé,
de façon aseptique, avant le transfert de la parturiente dans sa
chambre.
Durant ces premières 24 heures, il faudra examiner la
patiente au moins quatre fois, le principal risque étant l’hémorragie ;
faire lever la patiente précocement, 8 heures après l’accouchement,
vérifier si elle a pu uriner et en cas de rétention, fréquente après un
accouchement difficile, effectuer un sondage évacuateur.
Une crise
urinaire (2,5 L en 24 heures) est fréquente.
Si l’allaitement est
artificiel, on débute la bromocriptine à la dose de deux comprimés
par jour.
Lorsque la patiente est de groupe rhésus négatif et que son
enfant est rhésus positif, on effectue une injection intraveineuse de
gammaglobulines anti-D avec recherche d’anticorps passifs le
lendemain.
B - SURVEILLANCE DES 5 JOURS SUIVANTS :
Pendant le séjour hospitalier, la surveillance est biquotidienne.
L’examen comprend la prise de la température, du pouls, de la
tension artérielle qui sont notés sur la feuille de surveillance et qui
sont utiles pour dépister les complications infectieuses, les plus
fréquentes pendant ces premiers jours. Le pouls doit rester
concordant avec la température, inférieure ou égale à 37 °C (ou
plus).
Les principales anomalies que l’on peut rencontrer sont
l’engorgement mammaire, l’endométrite, la lymphangite et les
complications thromboemboliques.
On effectue également un examen complet des seins à la recherche
de crevasses, d’une rougeur, d’une tuméfaction ou d’une
induration ; il est fréquent de constater un léger engorgement, au
moment de la montée laiteuse, au deuxième ou troisième jour du
post-partum, se manifestant par une induration mammaire associée
à un fébricule à 37,8-38 °C et à un pouls en rapport.
L’examen de l’utérus est très important, à la recherche d’un retard
d’involution, d’une douleur, d’une mollesse faisant craindre une
endométrite.
À l’état normal, son volume doit diminuer
progressivement : le premier jour, son fond est à un travers de doigt
au-dessus de l’ombilic ; le sixième jour, il est à mi-distance entre
l’ombilic et la symphyse.
S’il reste gros et sensible, on évoque, outre
une endométrite, une rétention de lochies, plus fréquente lorsqu’une
césarienne a été faite avec un col fermé et à traiter par utérotoniques,
voire antibiotiques, la dilatation à la bougie ou l’aspiration utérine
restant exceptionnelles.
On surveille également le périnée : existence d’un oedème, d’un
hématome, aspect de l’épisiotomie (qui doit être propre et maintenue
le plus au sec possible), aspect des lochies : d’abord sanglantes les 2
premiers jours (formées de sang non coagulé), puis sérosanglantes
jusqu’au huitième jour, d’odeur fade, non nauséabondes.
L’examen des mollets sera attentif, à la recherche de signes précoces
de thrombose : oedème, rougeur, augmentation unilatérale de
volume, douleur à la pression du mollet ou à la dorsiflexion du pied
(signe de Homans).
Les soins et les petites anomalies du post-partum regroupent :
– les toilettes du périnée, réalisées deux fois par jour et après la selle :
nettoyage doux du périnée avec un savon dilué, rinçage à l’eau
bouillie, séchage avec un linge ou un sèche-cheveux, application
d’éosine aqueuse à 2 %, application d’une garniture propre changée
aussi souvent que nécessaire.
Lorsque le périnée est douloureux, on
prescrit, même si la femme allaite, un anti-inflammatoire pendant
24 à 48 heures (par exemple, kétoprofène en suppositoires une à
deux fois par jour).
Les fils de suture de l’épisiotomie, s’ils ne sont
pas résorbables, sont enlevés au cinquième jour ;
– les soins du mamelon : ils sont réguliers si la femme allaite (après
chaque tétée, nettoyage soigneux du mamelon et application d’alcool
glycériné) ;
– un lever précoce permettant la prévention des complications
thromboemboliques.
Un traitement anticoagulant (en règle générale
par héparine de bas poids moléculaire en une seule injection souscutanée)
n’est débuté que chez les patientes à haut risque
thromboembolique (antécédents thromboemboliques, varices
importantes, cardiopathies emboligènes ou prothèse, alitement
prolongé en cours de grossesse, césarienne et excès pondéral,
infection, hémorragie importante ?, âge supérieur à 40 ans ?).
Il est
prolongé pendant 6 semaines et doit comprendre une fois par
semaine une numération plaquettaire ;
– les tranchées, contractions utérines intermittentes et douloureuses
du post-partum s’accompagnant d’écoulement sanguin ou de
caillots, sont fréquentes dans les 2 ou 3 premiers jours, surtout chez
les multipares ; elles sont exacerbées par les tétées ; elles sont
calmées par des antispasmodiques, des antalgiques, voire des
bêtamimétiques ;
– une poussée hémorroïdaire aiguë, très douloureuse, est souvent
présente après l’accouchement. Il faut la traiter par antiinflammatoires,
toniques veineux à forte dose.
Parfois, il faut inciser,
après anesthésie locale à la Xylocaïnet à 1 %, une thrombose
hémorroïdaire externe (zone bleutée, dure et très douloureuse au
niveau d’un bourrelet hémorroïdaire) ;
– la première selle est en général émise au troisième jour. S’il persiste
une constipation, elle est combattue par le lever précoce, une
alimentation riche en fibres, des laxatifs doux type lactulose.
L’incontinence anale est rare et résulte d’une déchirure complète du
périnée, méconnue ou mal suturée.
En cas de persistance, il faut
envisager un traitement (chirurgical et/ou de rééducation) après un
bilan complet comprenant une manométrie anorectale, une
électromyographie anale, une échographie transanale et une étude
des potentiels de latence du nerf honteux dont les branches
terminales sont fréquemment atteintes lors des déchirures
musculaires périnéales (latences > 2 ms) ;
– l’incontinence urinaire d’effort (à ne pas confondre avec les mictions
par regorgement d’une vessie en rétention) est également fréquente.
Son évolution se fait en règle générale vers la guérison en quelques
semaines ;
– lorsque l’on a la notion d’une infection urinaire en cours de
grossesse ou si la patiente a été sondée à l’accouchement, il faut
effectuer un examen cytobactériologique systématique.
Les antibiotiques
(type amoxicilline) ne sont utilisés pendant une durée de 7 à 10 jours
qu’en cas d’infection patente, en présence de prélèvements
bactériologiques positifs ou s’il existe une situation à haut risque
infectieux (cardiopathie valvulaire, infection urinaire pendant la
grossesse, rupture prématurée des membranes de plus de 24 heures,
travail long [plus de 6 heures après la rupture des membranes] et
fébrile, manoeuvres pour l’accouchement ou la délivrance) ;
– l’existence de céphalées, parfois en rapport avec l’analgésie
péridurale, doit entraîner un repos allongé associé à des médications
symptomatiques, voire, si le syndrome est très violent, à la
réalisation d’un blood patch 48 heures après l’accouchement.
Ces
céphalées sont plus fréquentes chez les patientes ayant déjà eu de
tels symptômes pendant la grossesse (odds ratio [OR] = 43,85 [9,97-
192,9]) et peuvent persister plus de 14 jours après l’accouchement
dans 28 % des cas ;
– sur le plan psychologique, il est fréquent de constater un syndrome
dépressif mineur fait d’irritabilité, de pleurs, d’anxiété, appelé « baby
blues », dont l’importance est fonction de la fatigue physique,
nerveuse et affective précédant l’accouchement.
Son évolution est
favorable à condition que la femme soit aidée par son entourage,
mais non surprotégée.
La prescription d’anxiolytiques est possible,
mais rarement nécessaire.
C - PÉRIODE DU SIXIÈME JOUR AU RETOUR DE COUCHES :
Deux types de pathologies peuvent se produire au cours de cette
période : la lymphangite mammaire et les complications
thromboemboliques.
L’examen de la femme est identique à celui des jours précédents.
Sur le plan utérin, l’involution utérine continue : l’utérus, ferme,
indolore, n’est plus palpable avec la main abdominale au 12e jour.
Les lochies persistent pendant 15 jours à 3 semaines, puis deviennent
séreuses.
Une hémorragie durant 48 heures peut parfois survenir
vers le 10-12e jour et est appelée « petit retour de couches ».
Sur le plan des conseils hygiénodiététiques et des prescriptions :
– les douches sont autorisées précocement, alors que les bains
restent proscrits tant qu’il y a un écoulement sanglant vulvaire ;
– les rapports (en fait peu fréquents) sont autorisés après la
disparition des lochies, fermeture du col et cicatrisation du périnée,
ce qui représente en général une période de 4 semaines ;
– la rééducation périnéale est entreprise par la patiente
précocement, si possible après les conseils d’un kinésithérapeute
attaché au service ou d’une sage-femme spécialisée ;
– lorsque l’allaitement est artificiel, la bromocriptine est en règle
poursuivie jusqu’au 15e jour ;
– lorsque l’accouchement a été hémorragique, si l’hémoglobine
précédant l’accouchement est basse (< 10,5 g/100 mL) ou si la
patiente présente des signes évocateurs d’anémie, une supplémentation martiale est envisagée pendant une période de
1 mois.
Les transfusions sanguines postaccouchement doivent être
très limitées et ne concerner que les femmes ayant une
symptomatologie importante.
La numération systématique est
inutile ;
– la perte de poids est progressive et le gain moyen pondéral à 1 an
est de 1,0 à plus ou moins 3,6 kg (moindre en cas d’excès pondéral
préexistant à la grossesse ou de prise de poids excessive au cours de
la gestation) ;
– la contraception débute au 25e jour et est soit microprogestative si
la patiente envisage ultérieurement un stérilet ou allaite, soit
oestroprogestative minidosée dans les autres cas.
D - RETOUR AU DOMICILE :
Il existe une alternative entre le séjour classique (> 72 heures) et un
retour précoce au domicile (< 72 heures).
Ce retour précoce est
souvent prôné dans le but de diminuer les coûts financiers liés à
cette période et ne semble pas forcément souhaité à l’heure actuelle
par une majorité des patientes.
Vendittelli, dans une méta-analyse récente, montre l’absence
d’influence du départ précoce sur les paramètres de morbidité
maternelle, foetale, sur le taux de réadmission, sur le taux
d’allaitement, mais le taux de satisfaction maternelle est
significativement plus mauvais pour les patientes ayant eu un séjour
court (OR = 0,56 [0,44-0,72]).
L’absence d’adhésion de la population
(qu’elle soit primi- ou multipare) se retrouve dans l’étude de De La Fuente où seulement 12,5 % des patientes souhaitent sortir
précocement.
E - CONTRACEPTION DU POST-PARTUM :
La question de la contraception est bien sûr une question à évoquer
dans le post-partum car l’éventualité d’une grossesse rapprochée est
difficilement envisageable.
Pourtant, l’accouchée n’est pas souvent
demandeuse lors de son séjour à la maternité ; ce n’est pas sa
préoccupation majeure.
Elle n’envisage pas souvent avec
enthousiasme les premiers rapports.
Évoquer cette question peut
être quelquefois mal interprété, le médecin se présentant comme un
militant de la régulation des naissances ou comme un moralisateur.
Pourtant, l’accouchée doit être informée que l’ovaire est fonctionnel
dès le 25e jour du post-partum.
Théoriquement, une certaine sécurité
devrait être assurée par l’allaitement, pourtant la PRL, après une
ascension rapide les premiers jours, subit un tassement et on voit
son action inhibitrice de la FSH s’émousser au bout de quelques
semaines.
Cette sécrétion pulsatile de PRL lors de chaque tétée cesse
vers le troisième mois.
Le retour des règles et l’ovulation sont
variables dans le temps, en fonction du nombre des tétées, de leur
durée, de l’absence de toute autre alimentation et du statut
nutritionnel de la mère.
L’endomètre voit sa muqueuse régénérer
entre le 15e et le 45e jour en l’absence d’allaitement.
On a montré
que même en cas d’allaitement exclusif et sans retour des règles, on
pouvait estimer entre 1 et 5 % le risque d’une ovulation avant 6
mois.
Mais, sous nos latitudes où l’allaitement atteint
exceptionnellement cette durée et la même fréquence, le problème
d’une contraception par l’allaitement ne se pose pas.
Il faut donc
avoir recours à une méthode contraceptive.
F - PILULES :
La question doit être évoquée de façon différente selon que
l’accouchée allaite ou non.
1- La femme allaite
:
La prescription d’une minipilule oestroprogestative demeure
théoriquement contre-indiquée pour plusieurs raisons :
– effet potentiel à long terme de l’éthinyloestradiol sur l’enfant.
Le
cas du diéthylstilboestrol demeure encore présent dans tous les
esprits ;
– les oestrogènes peuvent abaisser la production du lait ;
– on peut craindre des complications thromboemboliques.
On peut toutefois opposer des arguments point par point à ces
assertions :
– absence d’effets indésirables chez le nourrisson notée en dehors
d’un cas de gynécomastie régressif publié ;
– s’il est vrai que la quantité de lait s’abaisse en 3 à 10 semaines,
cela se fait dans des proportions modestes et peu de femmes
allaitent plus de 2 mois.
À signaler d’autre part que les pilules triphasiques n’auraient pas de retentissement sur la quantité du lait ;
– le risque de thrombose concernant les 14 premiers jours du postpartum
; on conseille de débuter la pilule à partir du 25e jour.
Ces objections font que la prescription d’une minipilule dès le
25e jour n’est pas rare en France.
L’avènement des pilules dosées à
0,02 mg d’EE ne fera que renforcer cette tendance.
La tendance majoritaire est toutefois à la prescription d’une
micropilule progestative pendant toute la durée de l’allaitement.
Cette prescription peut être débutée dès la sortie de la maternité,
soit à partir du 25e jour ; la prise est ininterrompue, à horaires fixes.
Il n’existe pas de conséquences métaboliques sur la mère ni sur
l’enfant, la composition du lait n’est pas modifiée.
On a montré que
70 % des femmes traitées étaient aménorrhéiques après 8 mois, alors
que seulement 30 % l’étaient en cas d’allaitement sans micropilule.
Le véritable problème des micropilules repose dans l’existence
fréquente de micrométrorragies qui peuvent faire évoquer une
endométrite et inquiètent souvent les patientes.
2- La femme n’allaite pas
:
Rien ne s’oppose vraiment à débuter une minipilule à partir du
25e jour si la patiente désire continuer ce type de contraception.
G - AUTRES MÉTHODES DE CONTRACEPTION
:
Les méthodes dites « naturelles » ne sont pas applicables dans cette
période (méthode des températures, méthode Billings, Home-test)
pour des raisons évidentes.
On ne peut non plus recommander le diaphragme avant 6 semaines car le vagin n’a pas repris ses
dimensions normales avant cette date (en l’absence d’allaitement).
Il faut écarter également les progestatifs à dose antigonadotrope à
cause de leur passage en quantités élevées dans le lait et les effets
métaboliques potentiels (norstéroïdes).
En revanche, il n’existe bien sûr pas de contre-indication à
l’utilisation du préservatif.
Pour ce qui concerne les spermicides, il n’existe pas de contreindication
pour ceux contenant du chlorure de benzalkonium ; en
revanche, le nonoxynol est retrouvé en petites quantités dans le lait
et est donc contre-indiqué.
Les spermicides peuvent être une
solution, surtout en cas d’un allaitement en raison de l’hypofertilité
qui l’accompagne.
L’efficacité de ces deux méthodes peut être
renforcée en les associant.
Le véritable problème de ces
contraceptions locales réside dans leur faible acceptation.
Pour le stérilet, des essais de mise en place au décours immédiat de
l’accouchement se sont soldés par un taux d’expulsion trop
important, environ 20 %.
En revanche, sa pose peut être envisagée
après 6 à 8 semaines car les déplacements, les risques d’infection et
les perforations sont rares.
Les progestatifs injectables (type acétate de médroxyprogestérone)
sont surtout indiqués en cas de troubles psychiatriques. Ils
présentent deux problèmes :
– passage important dans le lait dans les premières semaines qui
suivent l’injection ;
– problèmes de saignements ou d’aménorrhées.
Cependant, des études ont montré l’absence d’effets indésirables
chez des enfants suivis pendant 10 ans.
D’autre part, les problèmes
de troubles du cycle sont peu marqués en cas de prescription
unique, ce qui est le cas lorsqu’on les indique pour les 3 premiers
mois qui suivent l’accouchement, en attendant une autre
contraception ou une stérilisation tubaire.
H - STÉRILISATION TUBAIRE :
Elle peut être réalisée au deuxième jour par minilaparotomie, mais
les demandes de déligature sont plus fréquentes.
Il vaut donc mieux atttendre 2 à 3 mois et la réaliser par coelioscopie.
Un cas particulier
est celui des césariennes multiples pour lesquelles une demande de
ligature a été formulée par la patiente.
Dans cette éventualité,
remettre à plus tard la ligature serait absurde.
On préférera la pose
de clips ou d’anneaux à la classique ligature-section de Pomeroy,
car la réversibilité potentielle est meilleure.
Il est probable que l’avenir nous réserve des surprises car il existe
de nombreuses recherches en contraception : vaccins, contraception
masculine, implants sous-cutanés, anneaux vaginaux.
Des essais ont
été réalisés en post-partum avec un analogue de la LH-RH, la
buséréline, en spray nasal, sans effet nocif noté chez le nourrisson.
Retour de couches et examen postnatal :
A - RETOUR DE COUCHES :
Il marque la fin des suites de couches.
Il s’agit du retour des
premières règles après l’accouchement qui sont en tout point
semblables à des règles normales.
Il peut avoir été précédé du « petit
retour de couches ».
Le retour de couches, en l’absence d’allaitement, survient entre 6 à
8 semaines après l’accouchement.
On peut attendre jusqu’à 3 mois
sans que cela soit pathologique.
Chez la femme qui allaite, le retour de couches est souvent retardé.
Il peut se faire avant ou après l’arrêt de l’allaitement.
Il est rare
cependant, même en cas d’allaitement prolongé, qu’on l’attende audelà
du cinquième mois.
La femme doit être prévenue que si elle ne
prend pas de mesures contraceptives, elle peut à nouveau être
enceinte malgré la poursuite de l’allaitement.
Parfois, le retour de couches est prolongé et hémorragique avec des
caillots, ceci est lié plus souvent à une atrophie de la muqueuse qu’à
une exceptionnelle rétention placentaire.
B - EXAMEN POSTNATAL
:
Il est réglementaire et doit se dérouler dans les 2 mois qui suivent
l’accouchement.
1- Objectifs
:
Il s’agit de :
– s’informer sur l’état de la mère et du nouveau-né, de vérifier s’il
n’y a pas eu de trouble psychologique dans le post-partum ;
– vérifier que les suites de couches ont été physiologiques et qu’il y
a eu retour « ad integrum » de l’organisme maternel ;
– permettre le bilan d’une anomalie détectée en cours de grossesse
ou lors de l’accouchement, d’en rechercher la cause éventuelle et de
la traiter ;
– faire un frottis du col utérin, rechercher une incontinence
sphinctérienne ;
– adapter la contraception et planifier une nouvelle grossesse.
2- Interrogatoire :
Il va préciser :
– les complications survenues en cours de gestation tels un diabète
gestationnel, une hypertension, une prise de poids excessive, une
pyélonéphrite, et l’on envisage si nécessaire un avis spécialisé, des
investigations complémentaires ;
– le déroulement de l’accouchement : normal, forceps ou
césarienne ;
– le poids du nouveau-né ;
– le déroulement des suites de couches avec ou sans allaitement,
normal ou avec complications ;
– l’utilisation d’une contraception, la reprise d’une sexualité.
3- Examen général
:
– Poids, prise de la tension artérielle.
– Examen cardiaque, pulmonaire, neurologique.
– Examen des seins, de la paroi abdominale, existence de vergetures.
– Examen des membres inférieurs à la recherche de varices, de
troubles circulatoires.
– Recherche d’hémorroïdes.
4- Examen gynécologique
:
* Aspect de la vulve, du périnée
:
On recherche, en demandant un effort de poussée, un prolapsus ou
une béance vulvaire.
On contrôle les sphincters urinaire et anal.
L’incontinence urinaire est fréquente en post-partum immédiat, mais
elle est le plus souvent passagère et cède sans traitement.
Plus
rarement, elle persiste au deuxième mois et l’on propose à la
patiente un bilan urodynamique.
On retarde alors la rééducation de
la sangle abdominale qui aggrave les troubles urinaires et l’on
commence par une rééducation périnéale.
Celle-ci est d’abord
passive grâce à une stimulation électrique qui entraîne une
contraction du plancher pelvien et du sphincter, puis active dès que
la patiente le peut.
Une vingtaine de séances sont nécessaires.
À la
disparition de l’incontinence, on envisage alors la rééducation
abdominale.
Les troubles anaux sont détectés par des explorations
fonctionnelles spécifiques comme la manométrie anorectale,
l’électrophysiologie périnéale postérieure, l’échographie endoanale.
La pose d’un spéculum permet de juger de l’état du col utérin,
vérifie l’absence de pertes, permet le frottis de dépistage.
* Aspect du vagin
:
On juge également de l’état du vagin, de celui d’une cicatrice
vaginale ou d’une bride vulvaire, et de son retentissement sur la vie
sexuelle.
Le toucher vaginal apprécie la perméabilité du vagin (deux doigts
doivent être introduits sans douleur), le volume utérin, la sangle
abdominale.
Le col est redevenu postérieur et l’utérus a retrouvé un
volume normal.
On apprécie aussi l’état des culs-de-sac, la tonicité des releveurs,
l’état de la cicatrice d’épisiotomie.
S’il y a eu une anomalie de la grossesse ou de l’accouchement, on
demande, en fonction de la pathologie, une radiopelvimétrie, un
bilan d’une mort in utero, d’une hypertension artérielle (HTA), d’un
diabète.
Enfin, on discute de la méthode de régulation des naissances
envisagée par la patiente et l’on prescrit le bilan biologique
nécessaire.