Stratégie des explorations des douleurs abdominales Cours de
réanimation - urgences
Introduction
:
Les douleurs abdominales sont l’une des causes les plus fréquentes
de consultation médicale représentant 4 à 8 % des visites médicales
de l’adulte.
Elles sont également parmi les motifs les plus
fréquents de consultation des services d’urgences hospitaliers.
L’hospitalisation est jugée nécessaire chez 18 à 42 % des adultes et
peut atteindre 75 % chez les patients âgés.
Seulement une
minorité de patients (environ 15 %) présentant des douleurs
abdominales nécessite un traitement chirurgical.
Pour une majorité
de patients, l’examen clinique et les examens simples de laboratoires
suffisent à établir ou à évoquer un diagnostic.
Cependant, compte
tenu de l’importante variété des causes de douleurs abdominales et
du tableau clinique similaire que peuvent prendre nombre de
maladies, le diagnostic reste indéterminé chez environ 40 % des
patients.
Dans ces situations, des examens complémentaires, le
plus souvent d’imagerie, sont nécessaires pour confirmer le
diagnostic suspecté cliniquement.
Les erreurs diagnostiques les plus fréquentes en pathologie
abdominale aiguë concernent les gastroentérites, les infections
urinaires, les infections pelviennes chez la femme, et la constipation.
Parmi les pathologies mettant en jeu le pronostic vital, les erreurs
les plus fréquentes concernent les diagnostics de rupture
d’anévrisme de l’aorte abdominale, d’appendicite, de grossesse
extra-utérine, de sigmoïdite diverticulaire, de perforation digestive,
d’infarctus mésentérique et d’occlusion du grêle.
Dans tous les cas,
le problème essentiel en urgence consiste à identifier les patients qui
doivent être opérés rapidement ou ceux qui réclament une
hospitalisation pour bilan et surveillance, et non pas tant de faire le
diagnostic exact.
À côté des examens radiologiques courants, le
développement de l’échographie et surtout de la tomodensitométrie
(TDM) a largement amélioré l’efficacité du bilan diagnostique.
Cette
évolution de l’efficacité diagnostique va de pair avec les
modifications des attitudes thérapeutiques qui s’orientent vers des
techniques mini-invasives (coelioscopie, radiologie interventionnelle,
endoscopie).
La recherche constante d’une meilleure efficacité et la
nécessité de diminuer les délais, associées aux besoins d’une maîtrise
des ressources hospitalières, ont entraîné une évolution de nos
attitudes vis-à-vis des patients vus pour une pathologie abdominale
aiguë.
Stratégie clinique
:
L’examen clinique, notamment l’interrogatoire, reste en pathologie
abdominale aiguë un des éléments clés de la démarche diagnostique.
Cependant, la performance de l’examen clinique pour le diagnostic
précis de la cause ne dépasse pas 50 %.
L’interrogatoire et
l’examen physique doivent être effectués sur un patient détendu.
La
crainte de l’utilisation des morphiniques, sous le prétexte qu’ils
peuvent masquer une urgence chirurgicale, est injustifiée.
Néanmoins, la disparition de la douleur sous antalgiques ne doit
pas être un argument pour ne pas hospitaliser le patient.
Le diagnostic de douleurs abdominales non spécifiques
ou indéterminées est le plus fréquemment porté, et parmi celles-ci
le syndrome de l’intestin irritable représente 37 % des diagnostics
chez la femme et 19 % chez l’homme.
L’orientation diagnostique doit tenir compte de l’âge, de
la localisation de la douleur et des éventuels signes
d’accompagnement.
Ces éléments ne sont pas formels et
notamment il est fondamental de ne pas limiter ses hypothèses
diagnostiques en ne tenant compte que de la localisation de la
douleur.
Certaines caractéristiques sont plus fréquemment
notées dans les pathologies graves ou chirurgicales.
La probabilité
qu’une douleur soit liée à une pathologie chirurgicale est d’autant
plus grande que la douleur est violente, récente (moins de 48 h) ou
constante, qu’elle se localise en un point précis, qu’elle est le premier
signe et notamment qu’elle survient avant les vomissements, que
l’âge est avancé, qu’il existe des antécédents d’intervention ou des
signes péritonéaux à l’examen physique.
La température, la numération leucocytaire et les radiographies
d’abdomen sans préparation (ASP) ne sont pas discriminantes.
Si
une fièvre est fréquemment associée aux infections intraabdominales,
sa signification chez un patient ayant une douleur
abdominale n’est pas claire et sa présence ne permet pas de
distinguer les pathologies chirurgicales des non chirurgicales.
Cependant, l’association d’une fièvre à une douleur abdominale
nécessite un avis chirurgical.
Le signe de Murphy, qui est une douleur de l’hypocondre droit avec
inhibition douloureuse de l’inspiration est très fréquemment noté
en cas de pathologie biliaire lithiasique.
Un signe de Murphy a une
sensibilité de 97,2 % et une valeur prédictive positive de 93,3 % pour
le diagnostic de cholécystite aiguë.
Chez les patients âgés, la
présence d’un signe de Murphy reste assez spécifique d’une
cholécystite aiguë, mais sa présence n’est notée que chez la moitié
des patients.
Les signes péritonéaux incluent la présence d’une défense ou d’une
contracture, d’une douleur à la décompression brusque de la paroi
abdominale ou d’une exacerbation de la douleur lors de la toux et
des mouvements.
Le caractère pathognomonique classique de ces
signes pour le diagnostic d’une pathologie chirurgicale en particulier
appendiculaire ou péritonéale doit être remis en question par les
données de la littérature.
La douleur à la décompression a une
sensibilité de 81 % et une spécificité de 50 % pour le diagnostic de
péritonite, une sensibilité de 63 % à 76 % et une spécificité de 56 %
à 69 % pour le diagnostic d’appendicite.
L’exacerbation de la
douleur à la toux a une sensibilité de 77 % et une spécificité de 80 %
pour le diagnostic de péritonite.
Lors de l’exploration d’un syndrome douloureux abdominal, le
toucher rectal est surtout utile pour les diagnostics de prostatite ou
de pathologie rectale notamment tumorale, pour la recherche d’un
fécalome, d’un corps étranger intrarectal ou de sang dans les selles.
Pour le diagnostic positif d’appendicite aiguë, le toucher rectal
n’apporte aucun renseignement supplémentaire par rapport à ceux
déjà fournis par l’examen abdominal.
Enfin, en fonction du contexte, le caractère répété des douleurs
abdominales doit faire évoquer les crises douloureuses abdominales
de la drépanocytose, de la maladie périodique ou de la porphyrie.
Biologie
:
La numération sanguine leucocytaire est probablement l’examen
biologique le plus demandé en cas de syndrome abdominal aigu.
Cependant, cet examen ne permet pas de différencier les pathologies
chirurgicales des autres causes de douleurs abdominales.
La C-reactive protein a peu d’intérêt dans la stratégie d’exploration des
douleurs abdominales aiguës en pratique courante.
Elle a surtout
été étudiée comme aide au diagnostic d’appendicite.
Son principal
intérêt semble être sa valeur prédictive négative si son taux reste
normal, surtout sur des dosages répétés au cours de la
surveillance.
La bandelette urinaire, l’examen
cytobactériologique des urines, le dosage des bêta-human chorionic
gonadotrophin (HCG) et celui de l’amylasémie et de la lipasémie
permettent une orientation diagnostique.
Cependant, des anomalies
sur les examens d’urine peuvent être présentes en l’absence de
pathologie urinaire. Vingt à 30 % des patients ayant une
appendicite ont une hématurie ou une leucocyturie et 17 % peuvent
avoir des germes dans les urines.
Ces anomalies sont d’autant plus
fréquentes que la durée d’évolution de l’appendicite est longue, que
l’appendice est pathologique, qu’il est proche du tractus urinaire et
qu’il s’agit d’une femme.
De la même façon, 20 % des anévrismes
rompus peuvent faire évoquer à tort une colique néphrétique en
raison de la présence d’une hématurie.
Une hyperamylasémie est
notée dans 80 % des cas de pancréatite aiguë.
La spécificité de
l’amylasémie est inférieure à 70 % pour toute élévation au-dessus
de sa valeur normale.
Sa sensibilité et sa spécificité atteignent 80 %
lorsque l’amylasémie est supérieure à trois fois la normale.
L’amylasémie n’a aucune valeur pronostique.
Une hyperlipasémie à
plus de trois fois la normale est le test le plus spécifique pour le
diagnostic de pancréatite aiguë avec une spécificité proche de 100.
Stratégie d’imagerie
:
Lors de l’exploration d’un syndrome douloureux de l’abdomen, le
diagnostic reste incertain chez de nombreux patients, malgré
l’efficacité combinée de l’examen clinique et de l’examen
radiologique initial.
Dans ces situations, un examen
échographique ou une TDM doivent être demandés.
Ces examens
sont plus efficaces que la classique période d’observation et
permettent d’éviter des retards parfois fatals aux patients.
Le choix
de l’une ou l’autre de ces techniques est basé sur leur performance,
fonction de la pathologie suspectée, de la morphologie du patient et
bien entendu dépend de la disponibilité des équipes et des appareils.
A - RADIOGRAPHIES D’ABDOMEN SANS PRÉPARATION
:
En raison de leur facilité d’exécution et de leur faible coût, les ASP
sont demandés quasi systématiquement dans les services d’urgences
hospitaliers pour syndrome douloureux de l’abdomen.
Leur but est
théoriquement de permettre une présélection rapide des patients en
identifiant, notamment, ceux qui ont un pneumopéritoine ou des
signes d’occlusion digestive.
Cependant, leur absence de spécificité,
alors que d’autres explorations plus performantes sont disponibles,
donne l’impression que ces examens sont souvent inutiles.
Il semble,
néanmoins, que la plupart du temps, ces examens sont prescrits
pour de mauvaises indications.
Si l’on étudie la répartition des causes des douleurs abdominales
dans un service d’urgence d’un hôpital urbain, la nature même des
pathologies rencontrées indique que les ASP ne seraient d’aucune
utilité dans plus de la moitié des cas.
Des anomalies sont
détectées sur 20 à 38 % des ASP. Seulement un tiers de ces
anomalies sont spécifiques, et les informations obtenues semblent
peu modifier le diagnostic établi cliniquement.
Les deux seules
pathologies pour lesquelles la sensibilité et la spécificité des ASP
sont élevées sont les péritonites avec pneumopéritoine et à un
moindre degré les occlusions intestinales.
Dans une étude
évaluant l’intérêt des ASP dans les douleurs abdominales, ceux-ci
étaient non spécifiques dans 68 % des cas, normaux dans 23 % et
anormaux dans seulement 10 % des cas.
La plus grande sensibilité
était notée pour la recherche de corps étrangers (90 %) et pour le
diagnostic d’occlusion du grêle (49 %). Ils n’avaient aucun intérêt
pour le diagnostic d’appendicite, de pyélonéphrite, de pancréatite
et de diverticulite.
En pratique clinique, une demande d’ASP est
justifiée si les douleurs abdominales sont importantes
ou si le tableau clinique évoque une péritonite ou une occlusion
digestive.
Ces examens semblent inutiles en cas de douleurs de
faible intensité, ou pour rassurer le médecin, ou encore pour
suggérer un diagnostic non suspecté cliniquement.
Classiquement, deux clichés d’ASP sont nécessaires : un cliché de
face debout et un en décubitus dorsal ; ces deux radiographies
devant couvrir la totalité de la cavité abdominopelvienne, du
sommet du diaphragme en haut jusqu’aux trous obturés en bas.
Enfin, une radiographie de thorax de face est importante, car d’une
part il existe des anomalies sur 10 à 15 % des radiographies de
thorax faites pour abdomen aigu, et d’autre part des pathologies
purement thoraciques telles qu’une pneumopathie, un épanchement
pleural liquidien ou gazeux, un infarctus ou une embolie
pulmonaire, une péricardite, peuvent se révéler par des douleurs
abdominales sus-ombilicales. Un électrocardiogramme est indiqué
dans ces situations.
Enfin, la radiographie de thorax ou mieux le
cliché centré sur les coupoles, par un temps d’exposition très court
et des rayons plus tangentiels au diaphragme, permet de
diagnostiquer de petits pneumopéritoines.
En pratique, les deux
clichés les plus utiles en urgence sont le cliché de thorax debout ou
assis et celui d’abdomen couché.
Le cliché d’abdomen debout est plus discuté.
Il apporte peu de renseignements supplémentaires et
ne contribue pas à modifier l’attitude thérapeutique.
B - OPACIFICATIONS DIGESTIVES
:
Les opacifications digestives courantes sont moins utilisées
actuellement en raison du développement de la TDM avec
opacification digestive concomitante.
Elles peuvent être utilisées en
seconde intention pour la détection des perforations gastroduodénales, dans la pathologie occlusive du grêle ou du côlon
et les colites ischémiques.
En urgence, la baryte est peu employée
en raison du risque de nécrose péritonéale s’il existe une perforation
ou un risque de perforation digestive.
Ce sont surtout les produits
hydrosolubles comme la Gastrografinet qui sont utilisés, bien que
les images soient de moins bonne qualité.
C - EXAMEN DE L’ABDOMEN EN ÉCHOGRAPHIE
ET EN TOMODENSITOMÉTRIE
:
L’échographie est le premier examen à réaliser lorsqu’une pathologie
hépatobiliaire ou gynécologique est suspectée.
Chez la femme, un
examen du pelvis vessie pleine est réalisé en raison de la fréquence
des pathologies obstétricales ou gynécologiques.
Si besoin, l’étude
du pelvis est complétée par voie endovaginale.
La TDM permet une analyse complète de l’ensemble de l’abdomen
et du pelvis sans que la lecture soit gênée par la présence de gaz,
d’os ou de graisse, qui limitent l’efficacité de l’échographie.
La TDM
est réputée moins sensible que l’échographie pour la pathologie
biliaire lithiasique.
Elle est supérieure pour analyser les espaces périrénaux, le pancréas, le tube digestif et l’appendice.
Elle est moins
sensible pour détecter une petite lame liquidienne intrapéritonéale,
mais permet de mettre en évidence un minime pneumopéritoine.
Enfin, elle permet de détecter de façon remarquable les infiltrations
locales de la graisse, signant la présence de phénomènes
inflammatoires ou vasculaires.
Cet indice a fréquemment une
importance capitale lors de l’exploration d’un syndrome abdominal.
L’injection, sauf contre-indication, permet de mieux analyser les
parois digestives rehaussées, d’opacifier les vaisseaux, de
différencier les phlegmons des collections liquidiennes et de mettre
en évidence les réactions inflammatoires.
Éventuellement, le côlon
est distendu par un lavement opaque, de l’eau ou une insufflation
d’air afin de mieux analyser la paroi colique.
Dans un travail, la TDM abdominale avait une sensibilité
diagnostique de 90 % contre 76 % pour l’évaluation clinique, dans
un groupe de patients ayant un syndrome douloureux abdominal
aigu.
Les données de la TDM entraînaient une modification de
l’attitude thérapeutique décidée initialement chez 27 % des patients.
Cependant, dans le sous-groupe des patients ayant des antécédents
de pathologie abdominale, l’examen clinique restait aussi
performant que la TDM.
Dans un autre travail plus récent
incluant des patients ayant une douleur abdominale aiguë de cause
indéterminée, une TDM précoce entraînait une réduction de la
mortalité et de la durée d’hospitalisation.
Pathologie
:
A - PATHOLOGIE HÉPATOBILIAIRE
:
L’échographie est l’examen de première intention à réaliser en cas
de douleur biliaire.
Une douleur biliaire (colique hépatique) est une
douleur de l’hypocondre droit ou de l’épigastre inhibant
l’inspiration profonde et irradiant en hémiceinture vers la droite
et/ou vers l’épaule droite.
La douleur biliaire est le plus souvent
due à une lithiase biliaire compliquée, qu’il s’agisse d’une douleur
biliaire simple, d’une cholécystite ou d’une angiocholite.
La
sensibilité et la spécificité de l’échographie pour le diagnostic de
lithiase vésiculaire sont de plus de 90 % dans la littérature mais
probablement plus faibles en pratique courante ; les calculs de petite
taille pouvant ne pas être vus.
Les signes échographiques de
cholécystite sont la présence d’un signe de Murphy au passage de la
sonde sur le fond vésiculaire, l’épaississement de la paroi supérieur
à 3 mm, une distension vésiculaire et la mise en évidence de calculs
ou d’un sludge.
La TDM n’est pas indiquée dans les cas habituels,
mais est utile si les données de l’échographie sont insuffisantes ou
pour rechercher un abcès hépatique ou périvésiculaire.
L’imagerie
est normale dans les périhépatites à Chlamydia chez la femme, où il
faut rechercher une salpingite par l’examen gynécologique
systématique.
La détection de calculs de la voie biliaire principale en échographie
est plus difficile et reste opérateur-dépendante.
Le diagnostic est
suspecté sur les perturbations du bilan hépatique alors que celui-ci
est normal lors d’une douleur biliaire simple ou lors d’une
cholécystite.
La caractéristique la plus importante du bilan hépatique
au cours de la lithiase de la voie biliaire principale est l’extrême
variabilité des perturbations, d’un jour à l’autre ou même entre deux
bilans séparés de quelques heures.
Cet élément est utile pour
différencier les modifications du bilan hépatique dues à une
pathologie néoplasique hépatobiliaire ou pancréatique, ou à une hépatopathie aiguë (hépatite virale par exemple) ou chronique.
La TDM a une sensibilité de 80 % avec une spécificité proche de 100 %
pour le diagnostic de calcul de la voie biliaire principale.
Bien que
sortant du cadre de l’urgence, l’échoendoscopie biliaire et la cholangiopancréatographie par imagerie par résonance magnétique
(bili-IRM) sont les examens les plus sensibles pour la détection des
calculs de la voie biliaire principale.
La bili-IRM a une sensibilité de
90 % pour les calculs cholédociens de plus de 3 mm.
L’échoendoscopie est l’examen le plus performant mais nécessite
une anesthésie générale.
B - PANCRÉATITES AIGUËS
:
Les pancréatites aiguës sont alcooliques ou biliaires dans 80 % des
cas.
Lorsqu’elle est biliaire, la pancréatite est la conséquence de la
migration d’un calcul au travers du sphincter d’Oddi.
Dans
l’exploration d’une pancréatite aiguë, l’échographie a
essentiellement un intérêt étiologique pour rechercher une lithiase
biliaire.
La TDM est l’examen de choix pour le diagnostic et le bilan
d’une pancréatite aiguë quelle que soit son étiologie.
La TDM peut
être normale dans environ 20 % des pancréatites aiguës.
Elle permet
de classer la pancréatite selon les critères de Balthazar mais
également selon la présence et l’importance d’une éventuelle nécrose
glandulaire.
Un examen TDM trop précoce peut sous-estimer
les lésions et doit être au mieux réalisé 2 à 3 jours après le début des
signes cliniques.
C - PÉRITONITE PAR PERFORATION DIGESTIVE
:
Le cliché standard le plus sensible pour détecter un
pneumopéritoine est celui du thorax, ou mieux, celui centré sur les
coupoles en position debout ou assise, après avoir laissé le patient
5 à 10 minutes dans cette position pour laisser le temps à l’air de
s’accumuler sous le diaphragme.
Si la position debout ou assise
ne peut être obtenue, un cliché en décubitus latéral gauche permet
de détecter de l’air entre le foie et le diaphragme avec une sensibilité
estimée à 38 %.
Là encore, ce cliché n’est utile que si le patient est
laissé dans cette position 10 minutes avant l’examen.
Si l’on ne
dispose que du cliché couché, un pneumopéritoine doit être
recherché dans l’hypocondre droit, autour du foie (sensibilité de
41 %), ou sous la forme d’un surlignement des parois du tube
digestif (sensibilité de 32 %).
En pratique, dans les ulcères perforés, un pneumopéritoine n’est
visible que dans 75 % des cas environ.
Lorsque les données de
l’examen clinique sont insuffisantes ou que le pneumopéritoine est
absent, la TDM est l’examen à demander en première intention.
Elle
permet de détecter les pneumopéritoines non vus sur les ASP.
En
cas d’ulcère perforé bouché dans le pancréas, une petite collection intrapancréatique peut être visualisée et orienter à tort vers un
diagnostic de pancréatite aiguë, surtout si une hyperamylasémie est
associée.
L’opacification, concomitante à la TDM, de l’estomac par
voie haute permet parfois de visualiser directement la fuite
extradigestive.
Une perforation colique doit être suspectée (mis à
part les arguments cliniques) si le pneumopéritoine coexiste avec
des signes d’obstruction colique ou de mégacôlon toxique.
Un
pneumopéritoine par perforation d’un diverticule en péritoine libre
est plus inhabituel ; il est exceptionnel dans les perforations
appendiculaires.
Les perforations de diverticules coliques ou
d’appendice produisent en général une inflammation avec
infiltration de la graisse locale avec parfois présence d’un abcès.
Dans les situations de diagnostic difficile et si un examen TDM est
impossible, une échographie peut être réalisée.
Celle-ci est peu
performante pour détecter un pneumopéritoine, mais reste l’examen
de choix pour mettre en évidence un épanchement liquidien intrapéritonéal dont la présence est habituelle dans les péritonites.
Les épanchements sont recherchés dans les sites classiques (régions sous-phréniques, espace de Morrisson, gouttières pariétocoliques,
cul-de-sac de Douglas).
Dans ces mêmes situations, il est possible
de réaliser des clichés après absorption de produit de contraste
hydrosoluble.
Cette technique aurait une sensibilité proche de 100 %
pour la détection d’une perforation gastroduodénale.
D - OCCLUSIONS INTESTINALES
:
Les occlusions intestinales font partie des urgences chirurgicales les
plus fréquentes et peuvent représenter jusqu’à 20 % des admissions
d’urgence dans un service de chirurgie.
Les causes sont variées, mais
les occlusions du grêle sur bride sont de loin majoritaires.
La
définition d’une occlusion est clinique, c’est un arrêt du transit, et
classiquement le diagnostic repose sur l’interrogatoire, l’examen
clinique et les radiographies d’ASP.
1- Occlusions du grêle
:
Dans les occlusions du grêle sur bride, trois mécanismes sont
possibles : la plicature, la striction ou le volvulus.
Dans une
occlusion par plicature, l’occlusion peut être complète ou non, il n’y
a pas de souffrance intestinale, le risque de gangrène pariétale est
faible et la possibilité de guérison sous aspiration digestive est
élevée.
Les occlusions du grêle par strangulation représentent 30 %
des occlusions du grêle sur bride et comportent deux mécanismes
différents.
Il peut s’agir d’une striction serrée, ou d’un volvulus si la
torsion de l’axe mésentérique de l’anse est supérieure à 180°.
Dans
ces deux cas de strangulation, l’occlusion est souvent complète, a
peu de chances de céder sous aspiration et le risque de gangrène
pariétale est élevé, surtout dans les volvulus.
C’est cette éventualité
qui a conduit au dogme de l’intervention en urgence pour toutes les
occlusions aiguës du grêle sur bride diagnostiquées.
Dans une
occlusion complète, la probabilité d’une strangulation est de 20 à
40 % et la mortalité des strangulations est de 14,6 %.
Dans tous
les cas, la palpation des orifices herniaires et d’une ou des
éventuelles cicatrices abdominales est fondamentale devant tout
syndrome occlusif pour éliminer tout simplement une hernie ou une
éventration étranglée.
Cette attitude systématique est d’autant plus
importante que le patient est obèse car la tuméfaction pariétale n’est
pas forcément visible à la simple inspection.
Sur les clichés d’ASP, le diagnostic d’occlusion du grêle repose sur
la présence d’anses grêles dilatées (supérieures à 3 cm pour le
jéjunum et 2,5 cm pour l’iléon) et de niveaux liquides.
Le grêle est
identifié sur le cliché couché par la visualisation des valvules
conniventes qui sont complètes allant d’un bord à l’autre de
l’intestin, et sur le cliché debout par les caractéristiques des niveaux hydroaériques, nombreux, centraux et plus larges que hauts.
Le
cliché couché est plus utile que le cliché debout pour juger de
l’importance de la distension ainsi que de la nature (grêle ou côlon)
de l’intestin distendu.
Les ASP ont une sensibilité de 69 % et une
spécificité de 57 % pour le diagnostic d’occlusion du grêle, et sont
équivoques dans 20 à 50 % des cas.
Les renseignements fournis par l’examen clinique et les ASP peuvent
être insuffisants pour prendre une décision thérapeutique.
Le
diagnostic d’occlusion du grêle est d’autant plus difficile que le
patient est vu tôt, que l’occlusion est haut située et qu’elle est
incomplète.
Par exemple, une occlusion haute du grêle vue tôt peut
masquer son caractère complet par la présence d’air dans le segment
digestif d’aval.
La distension hydroaérique de l’intestin peut être
absente, au début d’une occlusion haute du grêle, si les
vomissements sont importants.
Lors d’une occlusion du grêle par
strangulation, l’anse strangulée peut être complètement opaque
radiologiquement par accumulation dans l’anse de sang et de
liquide digestif.
Il a été aussi montré que le diagnostic d’occlusion
mécanique du grêle par strangulation, par un chirurgien
expérimenté, était correct dans seulement 48 % des cas.
De la
même façon, les signes habituellement utilisés (fièvre,
hyperleucocytose, tachycardie, défense localisée), pour prédire une
souffrance pariétale, sont souvent trop tardifs, car ils témoignent
déjà d’une réponse inflammatoire à une ischémie qui peut être
irréversible.
Dans une occlusion du grêle, le but des autres examens d’imagerie
(transit du grêle, TDM) est d’aider à :
– authentifier une occlusion du grêle dont la présentation clinique
ou radiologique (ASP) est atypique ;
– différencier les occlusions complètes des incomplètes ;
– juger du mécanisme ;
– juger du degré de souffrance intestinale.
Environ 46 % des occlusions du grêle vont s’améliorer sous
traitement médical seul dans les 24 premières heures.
Dans la
mesure où une occlusion incomplète est rarement une strangulation
et qu’une occlusion incomplète a une probabilité d’amélioration sans
intervention dans les 72 heures de 88 %, le caractère complet ou non
de l’occlusion est un paramètre essentiel à déterminer.
Ce caractère
est identifié par la présence ou surtout la persistance d’air dans les
segments digestifs d’aval sur des ASP répétés, en l’absence
d’indication opératoire urgente.
Certaines équipes proposent
d’effectuer un transit du grêle, en général aux hydrosolubles et après clampage de la sonde gastrique, suivi sur des ASP successifs,
permettant d’affirmer le caractère incomplet de l’occlusion si le
produit atteint le côlon.
La Gastrografinet, par son action
péristaltique, peut aggraver les douleurs abdominales mais
également faire céder une occlusion incomplète.
Par son caractère hyperosmolaire, elle peut engendrer des lésions pulmonaires en cas
d’inhalation et aggraver la déshydratation par l’accentuation du
troisième secteur.
Enfin, sa dilution dans le liquide de stase intestinal
rend compte de la mauvaise qualité des clichés lorsque l’occlusion
est loin de l’angle duodénojéjunal.
Un examen TDM est actuellement de plus en plus demandé chez les
patients ayant une forme atypique d’occlusion digestive.
Il tend
à remplacer le transit du grêle de première intention et ne gêne pas
sa réalisation ultérieure si besoin, alors que l’inverse n’est pas vrai.
Le diagnostic d’occlusion du grêle, sur une TDM, repose sur la
présence d’anses grêles dilatées de plus de 3 cm pour le jéjunum et
de 2,5 cm pour l’iléon.
Le diagnostic, de par son caractère
mécanique, repose sur le signe cardinal représenté par l’association
d’anses plates et d’anses dilatées.
La TDM a une sensibilité de 90 %
à 94 % et une spécificité de 96 % pour le diagnostic d’occlusion
mécanique du grêle.
Une occlusion fonctionnelle est évoquée devant
une dilatation diffuse du grêle.
Cependant, le diagnostic différentiel
avec une occlusion mécanique du grêle bas située, par exemple au
niveau de la jonction iléocæcale, doit être évoqué.
La TDM permet
également d’identifier la cause de l’occlusion dans 73 % des cas ;
celle-ci devant être recherchée au niveau de la zone de transition.
S’il existe une zone transitionnelle, mais aucune masse ou cause
d’obstruction, le diagnostic le plus probable est alors celui
d’occlusion du grêle sur bride.
Dans ce cas, le second objectif de la TDM est de rechercher des arguments évoquant une strangulation
et d’identifier une ischémie ou une nécrose pariétale.
Une pneumatose pariétale ou une aéroportie sont considérées comme des
signes tardifs d’occlusion du grêle, avec déjà un stade de gangrène.
Cependant, malgré les renseignements supplémentaires obtenus par
la TDM, les ASP restent, à l’heure actuelle, les examens de première
intention à réaliser devant une suspicion d’occlusion digestive.
Dans une étude récente, la TDM ne s’est pas révélée
significativement supérieure aux ASP pour le diagnostic d’occlusion
du grêle.
Sa capacité à identifier la cause de l’occlusion la rend
surtout utile lorsqu’un traitement spécifique est nécessaire, ou en
cas de doute diagnostique.
2- Occlusions coliques
:
Les occlusions coliques sont cinq fois moins fréquentes que celles
du grêle.
La détermination précise du siège et de la cause de
l’occlusion est indispensable au traitement adéquat.
Le diagnostic
repose sur l’analyse des ASP, qui montrent une distension colique
reconnaissable aux haustrations incomplètes visibles surtout sur le
cliché couché.
Les niveaux hydroaériques plus hauts que larges et
périphériques sont visibles sur le cliché debout.
Si la valve iléocæcale
est compétente, le cæcum se distend et il existe un risque de perforation.
Si la valve est incompétente, le côlon peut se
décomprimer dans le grêle rendant alors le diagnostic d’occlusion
colique plus difficile.
Un obstacle situé sur la partie toute proximale
du côlon (cæcum ou valve iléocæcale) est responsable d’une
distension du grêle et donne donc un tableau d’occlusion du grêle.
Les ASP, outre le diagnostic positif, permettent parfois de situer
l’endroit de l’occlusion ainsi que le mécanisme.
Cependant, un
lavement opaque ou une TDM abdominale avec opacification
concomitante du côlon est nécessaire pour différencier formellement
le caractère mécanique ou non de l’occlusion et pour préciser le
mécanisme et le siège.
La localisation précise de l’obstacle et la
morphologie générale du côlon sont d’autant plus indispensables à
obtenir qu’une colostomie d’amont, par voie élective, est envisagée
comme traitement initial.
Le lavement opaque est actuellement
considéré par de nombreuses équipes de radiologie comme un
examen de deuxième intention dans cette pathologie, car il est
pénible pour le patient et difficile à réaliser, notamment pour les
radiologues récemment formés et peu entraînés à l’exécuter.
De plus,
il empêche la réalisation d’une TDM dans un deuxième temps, alors
que la TDM peut être suivie immédiatement par un lavement en cas
de doute.
Néanmoins, le lavement opaque reste l’examen
recommandé si l’équipe de radiologie a peu d’expérience de la TDM
dans cette pathologie.
* Pseudo-obstruction colique
:
La première étape devant une occlusion colique est de différencier
une occlusion mécanique d’une pseudo-obstruction.
Dans une pseudo-obstruction, le côlon est globalement distendu sur les ASP,
mais fréquemment, l’angle gauche, l’angle droit et le rectosigmoïde
sont moins intéressés par la dilatation, pouvant orienter le diagnostic
vers une cause mécanique.
Dans la mesure où les occlusions
mécaniques et les pseudo-obstructions du côlon peuvent avoir le
même tableau radiologique, d’autres explorations sont
nécessaires. Un lavement opaque ou une TDM, avec opacification
concomitante du côlon, confirment alors la perméabilité du cadre
colique.
* Occlusions mécaniques du côlon
:
Les occlusions mécaniques du côlon nécessitent en général un
traitement chirurgical.
Les ASP ont une sensibilité de 84 % et une
spécificité de 72 % pour le diagnostic d’occlusion mécanique du
côlon, alors que le lavement opaque a une sensibilité et une
spécificité respectivement de 96 % et 98 % et la TDM de 96 % et
93 %.
Le lavement opaque permet de déterminer le niveau de
l’obstacle dans 100 % des cas et le diagnostic définitif dans 68 %.
La TDM permettrait de déterminer le site exact de l’occlusion dans
96 % des cas et la maladie causale dans 89 %.
La TDM est peu
performante pour le diagnostic d’occlusion incomplète, lorsqu’il n’y
a pas de contraste net de distension entre l’amont et l’aval de
l’obstruction, d’où la règle de toujours distendre le côlon lors de la
réalisation d’une TDM pour syndrome occlusif.
Mis à part les fécalomes, les causes principales d’occlusion
mécanique du côlon sont les sténoses tumorales et les volvulus.
La
sémiologie des sténoses coliques malignes ou bénignes sur une TDM
est identique à celle du lavement.
Sur une TDM, un épaississement
asymétrique de la paroi colique supérieur à 15 mm, étendu sur
moins de 15 cm, une zone de transition brutale, une infiltration de
la graisse très localisée et des ganglions, sont évocateurs d’une
sténose maligne.
Le volvulus du côlon est une cause fréquente
d’occlusion surtout chez les patients âgés.
Un volvulus colique est
une torsion du côlon sur son axe mésocolique de plus de 180°.
Le
côlon sigmoïde est intéressé dans 76,2 % des cas, le cæcum dans
21,7 %, le côlon transverse dans 1,9 % et l’angle gauche dans 0,2 %.
E - APPENDICITE AIGUË
:
L’appendicectomie représente en France 40 % des interventions de
l’abdomen. Pour la majorité des patients, le diagnostic ne pose
pas de difficulté.
Néanmoins, 20 à 30 % des patients ont une
présentation clinique atypique, et environ 15 à 45 % des
patients opérés pour appendicite ne présentent pas
histologiquement d’inflammation appendiculaire.
Un nombre
important d’appendicites est diagnostiqué au stade de complications
(perforation dans 20 % des cas, plastron ou abcès appendiculaire
dans 5 % des cas), entraînant de ce fait une surmorbidité
postopératoire.
L’ASP ne permet pas le diagnostic d’appendicite,
sauf lorsqu’un stercolithe calcifié est visible.
L’échographie s’est
imposée ces dernières années pour le diagnostic d’appendicite aiguë.
Cependant, si la sensibilité et la spécificité annoncées de cet examen
sont respectivement de 84,7 % et 92,1 %, son utilité en pratique
courante, dans la prise en charge des adultes suspects d’appendicite,
reste controversée.
L’échographie ne paraît pas avoir été à l’origine
d’une diminution franche du nombre des appendicectomies inutiles
et du délai d’observation préopératoire.
Néanmoins, du fait de
l’absence d’irradiation, l’échographie reste recommandée comme
modalité initiale d’imagerie chez les enfants et chez les femmes
jeunes en période d’activité génitale, surtout pendant le premier
trimestre de la grossesse.
L’échographie nécessite une importante expérience.
L’appendice
normal peut être visualisé dans 80 % des cas, par des échographistes
très entraînés.
L’appendice inflammatoire ne se comprime pas,
alors que le tube digestif normal se laisse déprimer, sa paroi est
épaissie de façon circonférentielle et son diamètre mesure plus de
6 mm.
L’échographie est plus sensible que l’ASP pour détecter un
stercolithe appendiculaire, qui est toujours le témoin d’une
appendicite aiguë, quelle que soit la taille de l’appendice.
L’échographie est moins performante lorsque l’appendicite est
compliquée.
La présence d’une masse hypoéchogène
périappendiculaire suggère une perforation avec constitution d’un
abcès ou d’un phlegmon périappendiculaire.
Les limites de l’échographie laissent une large place pour la TDM
dans les cas cliniquement douteux, en particulier chez les patients
âgés ou obèses.
Le diagnostic TDM est basé sur la visualisation
d’un appendice dilaté (> 6 mm), se rehaussant de façon très intense
après injection de produit de contraste ou sur la présence d’un
stercolithe appendiculaire, ainsi que sur une infiltration de la graisse
périappendiculaire.
Bien qu’ayant une sensibilité et une spécificité
respectivement de 87 % à 100 % et de 89 % à 97 %, ainsi qu’une
valeur prédictive positive et négative, respectivement de 94 % à 97 %
et de 93 % à 100 %, la place de la TDM dans la prise en charge
des patients suspects d’appendicite reste à définir.
Une étude
montrait que la réalisation systématique d’une TDM, pour tout
syndrome appendiculaire, permettrait d’importantes économies de
santé (45 000 $ par patient aux États-Unis), en évitant une
appendicectomie dans 13 % des cas et une observation de 1 jour
dans 39 % des cas, ainsi que le traitement immédiat d’une autre
pathologie dans 11 % des cas.
Lorsque l’appendicite a été négligée, une perforation peut apparaître
avec présence d’une masse inflammatoire palpable dans la fosse
iliaque droite témoin d’un phlegmon ou d’un abcès périappendiculaire.
La TDM est alors supérieure à l’échographie
pour mettre en évidence ces complications périappendiculaires.
Chez environ un tiers des patients suspects d’appendicite, un autre
diagnostic sera finalement posé.
La présence de ganglions
inflammatoires périappendiculaires et l’absence de signes
d’appendicite peuvent faire évoquer le diagnostic d’adénolymphite
mésentérique.
Un épaississement de l’iléon terminal doit faire
suspecter une iléite de Crohn ou une iléite infectieuse, surtout si des
ganglions sont retrouvés.
D’autres pathologies de la région
iléocæcale doivent être évoquées en fonction du contexte clinique :
colite infectieuse, tuberculose iléocæcale, carcinome cæcal perforé,
greffe endométriosique.
F - ISCHÉMIES INTESTINALES
:
Les ischémies intestinales recouvrent plusieurs cadres cliniques.
On
distingue les ischémies mésentériques aiguës, évoluant le plus
souvent vers un infarctus mésentérique, les ischémies mésentériques
chroniques, responsables du tableau d’angor intestinal et les
ischémies coliques, réalisant le plus souvent le tableau de la colite ischémique aiguë.
Les deux grands mécanismes responsables
d’ischémie digestive sont les occlusions vasculaires et les bas débits
mésentériques.
L’ischémie entraîne une perte de la contractilité
digestive, une extravasation liquidienne dans la muqueuse et la sous-muqueuse responsable d’un épaississement de la paroi
digestive et des ulcérations disséquantes de la muqueuse avec
apparition de bulles dans la sous-muqueuse.
Les explorations
radiologiques utilisées traditionnellement dans les ischémies
intestinales sont les ASP, le lavement opaque et plus rarement
l’artériographie mésentérique.
Échographie et TDM sont maintenant
largement utilisées dans cette pathologie.
1- Ischémie de l’intestin grêle
:
Les ischémies de l’intestin grêle sont difficiles à diagnostiquer
cliniquement et la mortalité par infarctus augmente rapidement avec
le délai diagnostique.
La TDM est la méthode d’imagerie de choix
chez les patients suspects d’ischémie de l’intestin grêle.
La
sémiologie est variable et dépend de l’étiologie, de la sévérité et du
caractère aigu ou chronique.
Les signes TDM, devant faire évoquer
une ischémie aiguë du grêle, sont une dilatation diffuse des anses
associée à un épaississement plurifocal de leur paroi.
Les signes plus
spécifiques sont la visualisation directe d’un vaisseau thrombosé, ou
la présence d’air dans le réseau veineux portal.
Néanmoins, ces
signes ne sont pas spécifiques. Les causes d’épaississement focal du
grêle sont multiples : hémorragie intramurale, tumeurs, pathologies
inflammatoires digestives.
Un épaississement diffus de la paroi de
l’intestin grêle peut se rencontrer en cas d’hyponatrémie sévère ou
de toute autre cause d’oedème diffus.
Des sténoses, ou des
thromboses subaiguës ou chroniques, des artères ou des veines
mésentériques, peuvent ne pas entraîner d’infarctus du grêle si un
réseau collatéral a pu se développer.
2- Colite ischémique
:
Contrairement à l’ischémie du grêle, l’ischémie colique n’est
généralement pas due à une pathologie vaso-occlusive et entraîne
rarement un infarctus transmural.
Les atteintes sont généralement
segmentaires (5 à 40 cm) et peuvent intéresser toutes les parties du
côlon ; le site le plus fréquemment atteint étant la portion distale du
côlon gauche dans le territoire de l’artère mésentérique inférieure.
Chez les patients dialysés, l’atteinte est préférentiellement colique
droite.
Si la coloscopie reste la meilleure technique pour
diagnostiquer une ischémie colique, la TDM est souvent demandée
en urgence pour des patients chez lesquels le diagnostic n’a pas été
évoqué.
Dans la majorité des institutions, la TDM a remplacé le
lavement à la Gastrografinet en urgence.
Les ASP des patients atteints de colite ischémique sont en général
non spécifiques, montrant simplement une distension aérique du
côlon.
Le signe le plus spécifique de colite ischémique est la
présence d’image en « empreintes de pouce » sur les bords du côlon.
Ces images sont dues à l’oedème et l’hémorragie sous-muqueuse,
réalisant des empreintes arrondies de densité tissulaire, qui
s’opposent à la lumière du côlon, qui elle est remplie d’air.
Ce signe
n’est présent que chez 21 % des patients atteints de colite ischémique
et souvent seulement pendant les trois premiers jours de la
maladie.
Un autre signe dû à l’oedème pariétal et au spasme est
un aspect rigide du côlon, rétréci et sans haustration.
De l’air dans
la paroi colique ou dans la veine porte indique un infarctus colique.
Une colectasie est possible dans les formes sévères de colite
ischémique aiguë.
Sur un lavement opaque, les images en
« empreintes de pouce » sont visibles chez 75 % des patients dans la
semaine qui suit le début de la maladie.
La TDM évoque le
diagnostic de colite ischémique en montrant un épaississement
pariétal segmentaire circonférenciel et symétrique de la paroi du
côlon, avec un épaississement des plis d’aspect pseudonodulaire,
correspondant aux « empreintes de pouce ».
Il peut s’y associer
un aspect en double-contour, dû à l’oedème sous-muqueux, ou un
rétrécissement de la lumière.
L’épaississement de la paroi du côlon
n’est pas spécifique, il peut se voir dans la sigmoïdite, la maladie de Crohn, les lymphomes ou les cancers.
L’infarcissement transmural
est rare en cas d’ischémie colique.
Lorsqu’il est présent, il est évoqué
sur la TDM en présence d’une pneumatose pariétale ou d’une
aéroportie.
G - MALADIE DIVERTICULAIRE COLIQUE COMPLIQUÉE
:
L’inflammation d’un diverticule, en général sigmoïdien, par
enclavement d’un stercolithe provoque une microperforation,
responsable d’une inflammation péridiverticulaire, produisant un
épaississement de la paroi du côlon et de la graisse péricolique.
Cette perforation peut également être responsable d’un abcès péricolique ou d’une péritonite.
Les ASP ont peu d’intérêt dans la
prise en charge de patients ayant une suspicion de maladie
diverticulaire compliquée, sauf s’ils montrent un pneumopéritoine
ou des signes d’obstruction digestive (iléus du grêle par accolement
sur le côlon inflammatoire, obstruction colique par sténose
diverticulaire).
Ils peuvent montrer une masse tissulaire, des bulles
d’air extracoliques ou en cas d’abcès, un niveau hydroaérique.
Le
lavement opaque, en général aux hydrosolubles, est un examen très
utile pour le diagnostic de diverticulite lorsqu’il est associé à la
clinique.
En authentifiant des diverticules dans un contexte
évocateur de douleur fébrile de la fosse iliaque gauche, il permet le
diagnostic de sigmoïdite.
La TDM est actuellement un examen
clé de la prise en charge de la pathologie diverticulaire compliquée,
car elle permet une reconnaissance plus précise de l’importance de
l’inflammation et des complications péricoliques (abcès).
Le
diagnostic repose sur la mise en évidence de diverticules, d’un
épaississement de la paroi du côlon et d’une infiltration de la graisse péricolique.
La sensibilité de la TDM pour le diagnostic de
diverticulite est de 97 %.
La présence d’une graisse péricolique
anormale est le signe le plus sensible et le plus spécifique. Une
fistule colovésicale est identifiée devant la présence d’air dans la
vessie associée à un accolement du sigmoïde pathologique contre la
paroi vésicale.
L’échographie aurait une sensibilité de 98,1 % et
une spécificité de 97,5 % pour le diagnostic de diverticulite, mais
elle nécessite un opérateur entraîné.
H - PATHOLOGIES URINAIRE ET PELVIENNE
:
Actuellement, l’uroscanner est la technique de choix pour le
diagnostic et la décision thérapeutique en cas de colique néphrétique
et de pyélonéphrite.
Pour le diagnostic de colique néphrétique,
cet examen a une sensibilité, une spécificité et une valeur prédictive
positive respectivement de 97 %, 94 % et 90 %.
L’échographie est
une technique beaucoup moins sensible pour détecter une
obstruction urétérale.
En effet, l’uretère est inaccessible à
l’échographie sur la plus grande partie de son trajet et seuls les
calculs situés à ses extrémités, pyélo-urétérale ou urétérovésicale,
peuvent être identifiés.
Les signes indirects d’obstruction pyélocalicielle ne sont présents qu’après un délai important suivant
le début de l’obstruction.
Il s’agit d’une dilatation pyélo-urétérale,
d’une démodulation des jets urétéraux et d’une asymétrie des index
de résistance vasculaire intrarénaux.
Chez les femmes en période d’activité génitale, l’échographie
pelvienne doit être complétée par une exploration endovaginale.
L’échographie endovaginale est l’examen de choix pour confirmer
le diagnostic de grossesse extra-utérine chez une femme ayant un
test de grossesse positif.
Dans une étude, cet examen avait une
sensibilité de 100 %, une spécificité de 98,2 %, une valeur prédictive
positive de 98 % et négative de 100 %.
Le diagnostic repose sur la
mise en évidence d’une masse paraovarienne kystique à paroi
épaissie.
La présence d’un épanchement libre est moins sensible
(84 %).
L’embryon extra-utérin n’est que rarement identifié.
Si le test
de grossesse est négatif, un kyste ovarien compliqué de rupture ou
de torsion, ou une salpingite doivent être évoqués.
Conclusion
:
L’examen clinique reste, en pathologie abdominale aiguë, un des
éléments clés de la démarche diagnostique.
Cependant, lorsque la symptomatologie est peu claire ou que le diagnostic est incertain, des
examens complémentaires doivent être réalisés et leurs résultats
confrontés avec les données cliniques.
Après l’ASP, qui est peu
informatif s’il est prescrit en dehors d’indications bien précises, le
développement de l’échographie et de la TDM, dans les situations
d’urgence, a entraîné une modification très importante de l’approche
des abdomens aigus.
D’autres examens (coloscopie, fibroscopie, transit
du grêle, lavement aux hydrosolubles, voire artériographie), parfois plus
spécifiques, mais souvent plus invasifs, ne sont alors utilisés qu’en
deuxième intention.
L’emploi facilité de l’imagerie en coupe permet de
redresser de nombreux diagnostics, d’éviter une coelioscopie ou une
laparotomie exploratrice, et de prendre plus rapidement en charge les
patients, réduisant ainsi la morbidité des retards diagnostiques et les
coûts des traitements.