L’apparition d’une réaction immunitaire dirigée contre des
constituants du soi caractérise les maladies auto-immunes.
La
plupart des maladies auto-immunes du foie sont dues à une réaction
immunitaire à médiation cellulaire.
La présence associée de
différents autoanticorps a une relation directe incertaine avec le
développement des lésions, mais représente un outil diagnostique
très précieux, au moins comme témoin de la réaction immunitaire.
La recherche de ces autoanticorps par immunofluorescence a très
vite contribué à classer les affections auto-immunes hépatiques dans
différents cadres nosologiques.
Cependant, dans la plupart des cas,
les anticorps révélés par immunofluorescence ne sont pas
spécifiques d’une affection donnée et leur positivité doit être
interprétée en fonction d’un contexte clinique et biologique.
Sur le
plan théorique, l’absence de spécificité rend difficile l’interprétation
physiopathologique de la présence de ces autoanticorps.
Les progrès
réalisés dans l’étude des épitopes contre lesquels sont dirigés les
anticorps vont probablement modifier cette situation.
Sur le plan diagnostique, il apparaît de plus en plus souvent qu’une
même catégorie d’anticorps définie d’après les résultats de
l’immunofluorescence reconnaît en fait des épitopes différents en
fonction de la nature de la maladie hépatique sous-jacente.
D’autres
anticorps très spécifiques de certaines affections ont été décrits.
Cependant, la recherche de la spécificité antigénique est difficile à
préciser en pratique courante et, par ailleurs, la présence des anticorps n’est pas constante, sauf quand elle fait partie de la
définition de la maladie.
Sur le plan pathogénique, la mise en évidence des différents épitopes
reconnus par les anticorps paraît également très importante.
Le rôle
cytotoxique direct des anticorps est très improbable et l’hypothèse
d’une cytotoxicité à médiation cellulaire est généralement admise.
Dans quelques cas, on a pu montrer que les épitopes reconnus par
les autoanticorps pouvaient entraîner la formation et/ou l’activation
de lymphocytes T.
L’analyse fine de la spécificité des anticorps
pourrait être un moyen de reconnaître les épitopes initiateurs de
l’ensemble de la réponse immunitaire, même si le rôle des anticorps
est accessoire dans le développement des lésions.
Différents autoanticorps
:
A -
ANTICORPS ANTIMITOCHONDRIES (AAM)
:
Ces anticorps mis en évidence par une méthode de fixation du
complément, puis par immunofluorescence indirecte sur foie, rein et
estomac de rat, sont présents essentiellement dans la cirrhose biliaire
primitive (CBP), mais aussi dans certaines hépatites chroniques
actives, dans des hépatites médicamenteuses (iproniazide), des
maladies inflammatoires comme le lupus érythémateux disséminé
(LED), la sclérodermie, la sarcoïdose et enfin dans les hépatites
virales C.
Plusieurs types d’AAM ont été identifiés (M2, M4, M8,
M9).
Le type M2 est pratiquement spécifique de la CBP où il est
retrouvé dans 90 à 95 % des cas.
Cet anticorps réagit avec des
déterminants antigéniques de trois protéines mitochondriales : la sous-unité E2 de la pyruvate déshydrogénase, la sous-unité E2 de
l’oxoacide déshydrogénase et une protéine du complexe oxoglutarate déshydrogénase.
La recherche d’une réactivité
des anticorps contre des épitopes mitochondriaux clonés peut encore
augmenter la sensibilité du test et révéler un certain nombre de faux
négatifs.
La recherche précise des spécificités antigéniques montre
que les cas de positivité des anti-M2 ainsi définis sont exceptionnels,
s’ils existent, en dehors de la CBP.
Les anti-M4 (antisulfite oxydase) et anti-M9 (antiglycogène
phosphorylase) ne paraissent pas avoir d’intérêt diagnostique.
B - ANTICORPS ANTIMICROSOMES DE FOIE ET DE REIN
(ANTI-LKM)
:
Ces anticorps sont dirigés contre des antigènes de la fraction
microsomale de cellules hépatiques et rénales.
Les anticorps anti-liver/kidney microsome antibodies (LKM1) ont pour
cible principale le cytochrome P-4502D6 (CYP2D6) qui intervient
dans le métabolisme de nombreux médicaments.
Les anticorps
anti-LKM1 n’ont jamais été retrouvés chez les sujets déficients en
CYP2D6 (10 % des Caucasiens).
Au cours des hépatites autoimmunes
(HAI), ils définissent l’HAI de type II.
Ils peuvent être
présents dans les hépatites chroniques C, mais dans ce cas
reconnaîtraient des épitopes différents du CYP2D6.
Quatre épitopes reconnus par les anti-LKM1 ont été identifiés.
Le
principal présente une séquence de six acides aminés qui est
également retrouvée dans l’herpès simplex virus qui pourrait donc
jouer un rôle déclenchant dans la pathogénie des HAI de type II.
Les anticorps anti-LKM2 ont été mis en évidence dans les hépatites
à l’acide tiénilique qui n’est plus commercialisé.
Les anticorps anti-LKM3 ont été initialement décrits dans l’hépatite
delta.
Ils peuvent être retrouvés dans 10 % des HAI de type II.
Ils
reconnaissent des épitopes des uridine diphosphate (UDP)-
glucuronyltransférases (UGT) de type I.
C - ANTICORPS ANTINUCLÉAIRES (ANA)
:
Ces anticorps sont présents dans les HAI de type I.
Ils n’en sont pas
spécifiques. Leurs cibles nucléaires sont variables et peuvent être
l’acide désoxyribonucléique (ADN), des acides ribonucléiques
(ARN), des histones ou des protéines nucléaires comme la cycline
A.
Les anticorps dirigés contre l’acide désoxyribonucléique
(ADN) double brin auraient un intérêt particulier dans l’HAI de
type I.
D - ANTICORPS ANTIMEMBRANE NUCLÉAIRE
:
Des autoanticorps dirigés contre la membrane nucléaire ont été
décrits dans la CBP :
– anticorps anti-gp210 : il a pour cible une glycoprotéine
membranaire impliquée dans la fixation de protéines des pores
nucléaires.
Cet anticorps est pratiquement spécifique de la CBP ;
sa mise en évidence affirme donc le diagnostic, même en l’absence
d’AAM, mais il n’est présent que dans 20 à 50 % des CBP ;
initialement détecté par immunofluorescence indirecte, il peut être
désormais recherché par enzyme-linked immunosorbent assay (Elisa)
;
– anticorps antiprotéine p62 : également spécifique de la CBP, cet
anticorps est dirigé lui aussi contre une protéine des pores
nucléaires ; il est présent dans 25 % des CBP et, semble-t-il,
uniquement quand les anti-gp210 sont absents ;
– anticorps antirécepteur de la laminine B de la membrane nucléaire
interne : spécifique de la CBP, il n’est retrouvé qu’exceptionnellement
;
– enfin, les anticorps antinucléaires SP100 sont évocateurs de CBP,
mais probablement non spécifiques.
E - ANTICORPS ANTIMUSCLES LISSES (SMA)
:
Ils sont dirigés contre l’actine F ou la vimentine. Leur présence est
un des critères de diagnostic des HAI de type I mais ils n’en sont
pas spécifiques, pouvant en particulier se retrouver au cours des
hépatites C chroniques.
Ils sont détectés par immunofluorescence
indirecte sur coupe de foie, rein et estomac de rat.
Le typage se fait
également par immunofluorescence.
F - AUTOANTICORPS ANTIMEMBRANE HÉPATIQUE
(ANTI-LSP)
:
Ces anticorps liver specific protein (LSP) ont été décrits dans des
hépatopathies chroniques virales et non virales.
Le récepteur des asialoglycoprotéines fait partie des constituants antigéniques fixant
ce type d’anticorps.
Sa spécificité hépatique fait évoquer un rôle
de cet antigène dans l’apparition des HAI.
G - ANTICORPS ANTIANTIGÈNE SOLUBLE DU FOIE
(ANTI-SLA)
:
Ces anticorps sont spécifiques des HAI et leur présence affirme donc
le diagnostic.
Cependant, ils ne sont présents que dans 30 % des cas
en association ou non avec d’autres autoanticorps et leur recherche
ne peut encore être faite par des tests de routine. Ils ne semblent pas
pouvoir coexister avec les anti-LKM1.
L’antigène reconnu par ces
anticorps, dont on a d’abord pensé qu’il était représenté par les cytokératines 8 et 18 ou par la glutathion S transférase, semble avoir
été maintenant identifié.
Il s’agit d’une protéine de 422 acides aminés
présente dans la fraction soluble des hépatocytes dont la fonction
n’est pas encore connue.
Il a été suggéré que la présence des anti-SLA définissait une HAI
particulière (de type III), mais cette hypothèse n’est généralement
pas admise.
Ces anticorps anti-SLA sont identiques aux
anticorps antifraction soluble du foie et du pancréas.
H - ANTICORPS ANTICYTOSOL DE FOIE (ANTI-LC1)
:
Ces anticorps antifraction cytosolique du foie (liver cytosol [LC]) sont
dirigés contre la formiminotransférase cyclodéaminase. Ils sont
très évocateurs d’HAI de type II mais peuvent, quoique rarement,
être présents dans d’autres affections auto-immunes du foie ou
en cas d’hépatite C.
Leur caractérisation se fait par
immunofluorescence indirecte sur foie, rein et estomac de rat,
éventuellement confirmée par immunodiffusion ou western blot.
I - ANTICORPS ANTIPOLYNUCLÉAIRES NEUTROPHILES
:
Ces anticorps anti-neutrophil cytoplasmic antibodies (ANCA) sont
dirigés contre des composants cytoplasmiques (c) des polynucléaires
(p). Il en existe deux formes.
Les cANCA qui marquent l’ensemble
du cytoplasme et les pANCA qui se fixent dans la région
périnucléaire.
Cette dernière forme est fréquemment retrouvée dans
les maladies auto-immunes du foie quelles qu’elles soient, sauf peutêtre
les HAI de type II.
Les antigènes cibles de ces pANCA
dans les HAI seraient la cathepsine G et des protéines
chromosomiques, différentes des histones, appelées protéines HMG
(pour high mobility group) de type I ou II.
Ceci est également vrai
pour d’autres maladies inflammatoires non hépatiques.
J - ANTICORPS ANTIMICROSOMES DE FOIE (ANTI-LM)
:
Les anticorps anti-LM sont dirigés contre CYP1A2 mais ne
reconnaissent que le tissu hépatique et non rénal.
On les observe
dans les hépatites médicamenteuses (dihydralazine) et les HAI dans
le cadre du syndrome polyglandulaire auto-immun de type I.
K - ANTICORPS ANTIRÉCEPTEURS DES GLYCOPROTÉINES
DÉSIALYLÉES (ASGP-R)
:
Ces anticorps sont observés dans différentes hépatopathies
chroniques : 75 % des cas d’HAI, mais aussi, quoique souvent, à des
taux faibles dans 11 % des hépatites virales, 19 % des cirrhoses
biliaires primitives et moins de 10 % des autres hépatopathies. Une
réponse cellulaire dirigée contre les ASGP-R a été observée dans
37 % des cas d’HAI.
L - AUTRES ANTICORPS
:
Des anticorps anti-HSP70 (heat shock protein) ont été trouvés chez
environ 50 % des patients atteints de CBP ou d’HAI, à peu près
comme dans le LED, contre 10 % environ en cas d’hépatite virale B
ou C chronique ou en cas de polyarthrite rhumatoïde.
La présence
de ces anticorps peut avoir un intérêt pour la compréhension des
maladies auto-immunes, mais l’absence de spécificité actuellement
reconnue enlève tout intérêt diagnostique à cette recherche.
Des anticorps antilipide A et des anticorps dirigés contre la protéine
promyelocytic leukemia (PML) ont été décrits dans la CBP.
Ils ne sont
pas recherchés en pratique courante et leur intérêt reste à
démontrer.
Enfin, des anticorps antinucléaires tels anticentromère,
anti-SSA et anti-SSB peuvent être retrouvés dans le cadre des
connectivites fréquemment associées à la CBP.
Cirrhose biliaire primitive
et anticorps :
A - VALEUR DIAGNOSTIQUE
:
Dans la CBP, des AAM de type II dirigés contre les épitopes des
enzymes de la chaîne respiratoire sont présents dans 95 % des cas et
affirment le diagnostic déjà évoqué sur l’existence d’une cholestase,
l’élévation des immunoglobulines (Ig)M, l’absence d’anomalie des
voies biliaires à l’imagerie, mais avec des lésions des petits canaux
biliaires à l’histologie.
Pour être significatif, le taux des AAM doit
être supérieur à 1/40e.
Des difficultés diagnostiques se posent dans trois circonstances
relativement rares.
1- Présence d’AAM en l’absence de signe clinique
ou biologique de CBP :
Le suivi de 29 sujets correspondant à cette définition a montré que
24 d’entre eux avaient déjà des lésions histologiques hépatiques
compatibles avec le diagnostic de CBP.
Sur un suivi moyen de
17,8 ans, 76 % présentèrent des signes cliniques et 83 % des signes
biologiques de CBP.
Cependant, dans cette série, les signes cliniques
sont restés peu importants et aucun cas de cirrhose n’est survenu.
Plusieurs autres études sont plus ou moins en accord avec ces
résultats : 40 % des patients initialement asymptomatiques
développeraient des signes de la maladie après un délai de 5 à 6 ans
avec un pronostic voisin de celui des autres CBP.
Environ 60 %
seraient des formes lentes avec la même survie que dans la
population générale.
2- Association à d’autres anticorps non spécifiques
:
Au cours de la CBP, on trouve des ANA dans 20 à 50 % des cas, des
SMA dans 22 % des cas et des anticorps anticytoplasme des
polynucléaires dans 15 à 30 % des cas.
Généralement, ces anticorps
non spécifiques sont à des taux peu élevés et n’ont pas de
signification particulière.
Des taux importants de SMA doivent faire penser à une association
CBP/HAI qui existerait dans moins de 10 % des cas de CBP.
Les
éléments en faveur de cette association sont un taux de
transaminases supérieur à cinq fois la normale, un taux d’IgG élevé
(supérieur à deux fois la normale), l’existence de signes évocateurs
d’HAI à la biopsie hépatique.
3- Absence d’AAM
:
Un tableau clinique et biologique de CBP sans AAM a fait proposer
le concept de cholangite auto-immune.
En fait, dans la moitié de ces
cas, il est possible de mettre en évidence des AAM en utilisant des
antigènes mitochondriaux clonés et/ou d’autres anticorps
spécifiques de la CBP.
Par exemple, des anticorps dirigés contre la
protéine nucléaire gp210 sont trouvés dans 40 à 50 % des cas de CBP négative pour les AAM.
Les anticorps anti-p62 pourraient
être également utiles. Ces tests ne sont pas disponibles en routine.
Cependant, l’évolution des cholangites auto-immunes, leur réponse
au traitement sont tout à fait superposables à celles de la CBP et il
ne semble pas justifié d’isoler les cholangites auto-immunes comme
une entité autonome.
B - AAM ET ÉVOLUTION CLINIQUE DE LA MALADIE
:
Le taux des AAM n’est pas un indicateur de la sévérité de la
maladie.
Ainsi, chez les patients asymptomatiques, le taux des AAM
ne permet pas de distinguer ceux qui développeront des signes de
la maladie de ceux qui resteront asymptomatiques.
Au cours du traitement par acide ursodésoxycholique, le taux des
AAM peut diminuer jusqu’à disparition complète.
Celle-ci n’est
généralement observée que chez les malades présentant au départ
un taux inférieur à 1/100e.
Elle accompagne la réduction d’autres
anomalies immunologiques liées à la CBP.
Cependant, cette diminution ne paraît pas en rapport avec la
réponse au traitement.
Enfin, après transplantation hépatique, le
taux des AAM chute à la phase initiale pour retrouver ensuite les
taux prétransplantation.
Environ 20 % des patients présentent une
récidive de la maladie, mais le taux des AAM n’est pas prédictif de
la récidive.
C - ANTICORPS ET PATHOGÉNIE DE LA MALADIE
:
Comme dans beaucoup de maladies auto-immunes, la pathogénie
de la CBP semble faire intervenir essentiellement une immunité
cellulaire. L’infiltration mononucléée des espaces portes est
constituée de lymphocytes T-CD4+ et -CD8+.
Les lymphocytes T des
malades atteints de CBP sont activés par des complexes purifiés de
pyruvate déshydrogénase. Le rôle des AAM est loin d’être
démontré :
– il est possible d’induire chez l’animal l’apparition d’AAM par
immunisation avec E2 sans provoquer de lésion des canaux
biliaires ; cependant, dans une souche de souris fréquemment
atteintes de maladies auto-immunes, l’immunisation par
PDCE2/E3BP induit à la fois la formation d’AAM et de lésions de
cholangite ; l’interprétation de ces résultats est néanmoins
discutée ;
– l’apparition précoce des AAM au cours de la maladie est
compatible avec un rôle possible dans la pathogénie des lésions ; il
faut alors expliquer pourquoi seuls les canaux biliaires sont la cible
de ces anticorps ; il a été suggéré que le transport intracellulaire des
IgA avant leur sécrétion biliaire pourrait permettre aux AAM
d’accéder aux organites intracellulaires et d’exercer une action
pathogène ; cependant, le transport intracellulaire des IgA sécrétoires
existe dans d’autres organes sans y provoquer d’anomalie décelable
au cours de la CBP ;
– enfin, dans 80 % des cas, la réapparition des AAM après
transplantation hépatique n’est pas associée à une récidive de la
maladie, ce qui n’est pas en faveur de leur rôle pathogène.
L’intérêt des progrès réalisés est sans doute, et surtout, de révéler
les cibles de la réaction immunitaire.
Le fait que l’antigène de la pyruvate déshydrogénase ait certains épitopes également présents
dans certains antigènes d’Escherichia coli a fait évoquer la possibilité
d’une origine infectieuse de la maladie.
Hépatites auto-immunes
et autoanticorps :
L’HAI est une maladie rare (1/100 000 habitants) qui ne peut être
diagnostiquée que sur un faisceau d’arguments cliniques et
biologiques. Parmi les arguments biologiques, la mise en évidence
d’autoanticorps a une grande valeur diagnostique.
De plus, le type
d’anticorps rencontrés a permis de reconnaître au moins deux types
d’HAI qui ont une présentation clinique différente, l’HAI-I et l’HAIII.
L’existence d’une troisième forme est discutée.
A - HÉPATITE AUTO-IMMUNE DE TYPE I (HAI-I)
:
1- Valeur diagnostique
:
L’HAI-I est caractérisée par sa survenue chez l’adulte avec une nette
prédominance féminine.
L’évolution est assez bien maîtrisée par le
traitement immunosuppresseur qui prévient généralement
l’apparition d’une cirrhose.
Dans 20 % des cas, une autre maladie
auto-immune coexiste avec l’HAI-I.
L’HAI-I est associée à human
leukocyte antigen (HLA)-DR3 et DR4.
Sur le plan des anticorps, plus de 80 % des patients atteints d’HAI-I
ont des auto-SMA et/ou -ANA.
Dans une étude, ces anticorps
étaient présents tous les deux dans 50 % des cas, les SMA seuls
présents dans 30 % et les ANA seuls présents dans 15 % des cas.
Les SMA et ANA n’ont semble-t-il pas de cible spécifique des HAI-I
et le marquage obtenu en immunofluorescence est variable.
Il en est
de même pour la plupart des autres anticorps éventuellement
présents dans les HAI-I, en particulier les anticorps
antipolynucléaires neutrophiles qui peuvent être les cANCA et les
pANCA, ces derniers étant les plus fréquemment retrouvés (65 à
96 % des cas).
Dans les HAI-I, les cANCA seraient
particulièrement des anticorps antiactine, alors que les pANCA
auraient pour cible préférentielle la cathepsine G et des facteurs de
transcription HMG1 et HMG2.
Les anticorps dirigés contre l’ASGP-R sont très souvent retrouvés
dans l’HAI-I.
Ils sont également retrouvés dans d’autres maladies
hépatiques.
Finalement, seuls les anticorps anti-SLA réagissant avec la protéine
soluble du foie récemment identifiée seraient spécifiques de l’HAI-I
bien qu’ils aient été observés dans des cas mal classés de
superposition HAI, CBP ou CSP. Ils devraient avoir un grand intérêt
diagnostique quand des tests de routine seront disponibles.
Comme
les anticorps SLA ne sont présents que dans 30 % des cas d’HAI de
l’adulte, il a été suggéré qu’ils définissaient une HAI particulière,
l’HAI-III.
Cependant, sur le plan clinique et évolutif, les hépatites
avec anti-SLA ne se distinguent en rien des HAI-I et, pour l’instant,
cette classification est abandonnée.
Au total, la présence de différents anticorps est un argument en
faveur d’une HAI-I mais ils ne permettent pas à eux seuls un
diagnostic, à l’exception des anti-SLA qui semblent spécifiques de la
maladie.
2- Anticorps et évolution de la maladie
:
Comme dans la CBP, il n’existe aucune corrélation entre le profil
initial des anticorps ANA et/ou SMA, leur taux et la sévérité de la
maladie.
De même, au cours du traitement immunosuppresseur, les
taux des anticorps sériques diminuent, mais de façon indépendante
de la réponse clinique et histologique.
La situation pourrait être
différente pour les anti-ASGP-R dont les taux seraient moins élevés
dans les formes peu sévères de la maladie.
3- Anticorps et pathogénie de la maladie
:
Les anticorps non spécifiques sont le signe du désordre auto-immun
en cause dans l’HAI, mais leur absence de spécificité, l’absence de
relation avec l’évolution suggèrent que leur rôle pathogène est peu
important ou nul.
La situation est peut-être différente pour les anti-SLA.
Il existe des
homologies entre la protéine SLA et l’ASGP-R.
Les anticorps
pourraient ainsi avoir un effet spécifiquement hépatique ou être la
conséquence et le témoin de l’activation du système des
lymphocytes T contre ce récepteur.
B - HÉPATITES AUTO-IMMUNES DE TYPE II (HAI-II)
:
Cette HAI diffère de l’HAI-I par ses caractères cliniques.
En effet,
elle survient chez des sujets beaucoup plus jeunes, s’accompagne
d’une activité inflammatoire plus grande avec des transaminases très
élevées et un plus mauvais pronostic.
De plus, l’HAI-II serait
significativement associée au groupe HLADQ2.
Enfin, les anticorps
retrouvés dans l’HAI-II sont sensiblement différents de ceux que l’on
retrouve dans l’HAI-I.
En effet, on ne trouve pas de SMA, d’ANA,
d’anti-SLA ou de pANCA dans l’HAI-II ; en revanche, deux autres
autoanticorps, plus spécifiques, sont présents : les anti-LKM1 et les
anti-LC1.
1- Valeur diagnostique des anticorps
:
La présence d’anti-LKM1 est l’élément diagnostique principal de
l’HAI-II, bien que ces anticorps ne soient pas spécifiques puisque
présents dans 3 % des hépatites C chroniques.
Il y aurait cependant
une différence de spécificité entre les anti-LKM1 des HAI-II et les
anti-LKM1 observés dans l’hépatite C, mais ceci ne peut être étudié
par les tests de routine.
Les anticorps anti-LC1 sont également très en faveur de l’HAI-II.
Ils
sont très rarement trouvés dans d’autres affections auto-immunes
du foie et dans moins de 1 % des cas d’hépatite C.
Des autoanticorps anti-LKM3 dirigés contre une UGT sont trouvés dans
10 % des cas d’HAI-II. Ils sont présents également dans les hépatites
D.
2- Anticorps et évolution de la maladie
:
Le taux des anti-LKM1 est considéré comme assez stable au cours
de la maladie.
Cependant, une étude récente trouve que les
anticorps sont absents au début de la maladie et que leur taux
augmente à la phase chronique, et plus encore au stade de cirrhose.
Le taux des anti-LC1 augmenterait également avec la sévérité de
l’atteinte hépatique.
3- Anticorps et pathogénie de la maladie
:
On a montré que CYP2D6, cible des anti-LKM1, peut être exprimé à
la surface des cellules hépatiques.
Il n’y a cependant aucune
preuve que les anticorps jouent un rôle direct dans la genèse des
lésions hépatiques.
Il a été possible de montrer, dans un cas d’HAIII,
que les anti-LKM1 présentaient une interaction croisée avec des
protéines de l’herpèsvirus, faisant évoquer un rôle potentiel des
virus de cette famille dans le déclenchement de l’HAI-II.
Anticorps et cholangite sclérosante primitive :
La CSP est caractérisée par des lésions destructrices progressives des
rameaux biliaires intra- et extrahépatiques.
Elle est associée à une
maladie inflammatoire intestinale dans 80 à 90 % des cas.
L’origine
auto-immune de la maladie est suggérée par un profil HLA
particulier, l’existence de formes familiales et l’association fréquente
à d’autres maladies auto-immunes.
A - VALEUR DIAGNOSTIQUE DES ANTICORPS SÉRIQUES
:
Les sujets atteints de CSP ont, plus souvent que les témoins, des
ANA, anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles,
anticardiolipines, antithyroperoxydases.
Les antimuscles lisses (8 %
des cas) ne sont pas plus fréquents que dans la population témoin.
Environ 97 % des patients sont porteurs d’au moins un de ces
anticorps qui représentent donc un élément intéressant pour le
diagnostic.
Aucun de ces anticorps n’est cependant spécifique de la
maladie.
Les ANCA, présents chez environ 80 % des patients, se
retrouvent dans plus de 50 % des cas de maladie inflammatoire
intestinale en l’absence de cholangite.
Dans la CSP comme dans les
autres affections où ils sont présents, ils peuvent reconnaître un ou
plusieurs des autoantigènes cibles habituels des ANCA.
Il faut noter
cependant que les ANCA antimyéloperoxydase sont rarement
retrouvés et que les ANCA antiprotéine de perméation retrouvés
dans la CSP, la CBP et les maladies inflammatoires intestinales sont
absents dans les HAI.
B - ÉVOLUTION DE LA MALADIE ET AUTOANTICORPS
:
Seuls les anticorps anticardiolipines seraient corrélés avec la sévérité
de la maladie, surtout chez les sujets porteurs d’une maladie
inflammatoire intestinale.
C - AUTOANTICORPS ET PATHOGÉNIE DES LÉSIONS
:
L’absence de spécificité des autoanticorps retrouvés dans la CSP
n’est pas en faveur d’un rôle étiologique important. La présence
d’anticorps souvent retrouvés dans des lésions de vascularite est
compatible avec le rôle d’altérations vasculaires dans l’aggravation
de la maladie.
Autoanticorps et hépatites
médicamenteuses
:
La majorité des hépatites médicamenteuses est probablement liée à
l’action des deux systèmes xénophobes des animaux, le système des
cytochromes P-450 et le système immunitaire.
La fixation covalente
d’un métabolite réactif formé par le cytochrome P-450 sur les
protéines hépatiques va modifier le soi de l’individu.
Chez quelques
sujets, cette modification du soi va entraîner une réaction
immunitaire qui peut être dirigée ou contre le soi modifié (hépatite immunoallergique) ou contre le soi non modifié (HAI), ou bien
encore contre les deux à la fois.
À partir de 12 841 références
bibliographiques, Biour et al ont répertorié 1 105 médicaments
hépatotoxiques. Parmi ceux-ci, 60 s’accompagnent d’anticorps antitissus.
A - HÉPATITES MÉDICAMENTEUSES DE TYPE
IMMUNOALLERGIQUE :
Le meilleur exemple de ces hépatites immunoallergiques est
représenté par l’hépatite à l’halothane.
L’halothane est oxydé par le
cytochrome P-450 CYP2E1 en un chlorure d’acyl réactif (CF3COCL)
qui réagit avec les e-NH2 des résidus lysines pour former des
protéines trifluoroacétylées (CF3C0-lysine-protéine).
Dans le sérum
de ces patients atteints d’hépatite sévère à l’halothane, il existe des
anticorps antitrifluoroacétyle (TFA) dirigés contre la partie des
protéines hépatiques qui a été modifiée par la fixation covalente du
groupe trifluoroacétyle.
Ces autoanticorps reconnaissent toute
une série de protéines membranaires hépatiques modifiées.
L’autoantigène le plus reconnu par ces autoanticorps est l’isoenzyme
du cytochrome P-450 CYP2E1 qui est exprimé sur la membrane
plasmique des hépatocytes.
L’enflurane, l’isoflurane et le
desflurane, qui sont aussi métabolisés par le cytochrome P-450
CYP2E1, peuvent présenter des hépatites identiques.
Le mécanisme
d’apparition de cette réaction immune reste largement inconnu.
Le
mécanisme proposé est le suivant.
– Lors du renouvellement cellulaire des hépatocytes de sujets ayant
pris ce médicament, les peptides hépatiques normaux et surtout alkylés vont être phagocytés par les cellules présentatrices
d’antigènes comme les macrophages, les cellules endothéliales
sinusoïdales ou les lymphocytes B.
Ces peptides vont être présentés
sur les molécules du complexe majeur d’histocompatibilité (MHC)
de classe II.
Les peptides alkylés étant différents du soi vont être
reconnus par les récepteurs de lymphocytes T auxiliaires.
Ces
lymphocytes T auxiliaires vont stimuler, d’une part des lymphocytes
T-CD8 cytotoxiques qui vont reconnaître les peptides alkylés
exprimés sur les hépatocytes par les molécules MHC de groupe I et,
d’autre part, des lymphocytes B qui vont soit exprimer sur leur
surface une Ig de membrane capable de reconnaître les protéines
alkylées de la membrane plasmique, soit se transformer en
plasmocyte sécrétant des anticorps dirigés contre les protéines
alkylées de la membrane plasmique.
Un phénomène identique
d’expression par les lymphocytes B d’une Ig de membrane
reconnaissant les protéines alkylées de la membrane plasmique a
été décrit avec l’isaxonine.
De même, un phénomène de cytotoxicité dépendante des anticorps à médiation cellulaire a été
rapporté chez des patients atteints d’hépatite au méthyldopa, à
l’acide tiénilique ou à la clométacine.
Par ailleurs, certaines
plantes médicinales comme la germandrée petit-chêne peuvent
entraîner des hépatites immunoallergiques s’accompagnant
d’anticorps antinoyaux et de SMA dirigés contre l’isoenzyme du
cytochrome P-450 3A.
B - HÉPATITE MÉDICAMENTEUSE DE TYPE AUTO-IMMUN
:
Pour certains médicaments, il semble que certaines des cibles
antigéniques soient des épitopes normaux non alkylés des protéines.
Beaucoup de ces antigènes peuvent être des isoenzymes du
cytochrome P-450.
L’acide tiénilique (Diflurext), un diurétique thiazidique actuellement
retiré du marché, est le meilleur exemple d’HAI.
L’hépatite à l’acide tiénilique est associée à la production d’anticorps anti-LKM2,
caractérisés en immunofluorescence indirecte par une réaction qui
prédomine sur la région centrolobulaire du foie et sur les régions P1
et P2 du cortex rénal de souris mâles.
La cible autoantigénique de
ces anticorps est l’isoenzyme du cytochrome P-450 2C9 qui est
responsable du métabolisme de l’acide tiénilique qu’il transforme
en métabolite réactif.
Celui-ci se fixe de façon covalente sur la
protéine du cytochrome P-450 2C9.
Le mécanisme d’apparition de
ces autoanticorps reste cependant mal connu.
L’hypothèse la plus
probable réside dans l’activation de lymphocytes B autoréactifs.
Ce
lymphocyte B autoréactif immature reconnaît un épitope normal du
cytochrome P-450 2C9 qui, par ailleurs, est alkylé par le métabolite
réactif de l’acide tiénilique.
Après internalisation et fragmentation
de la molécule de cytochrome P-450 2C9, le lymphocyte B va
exprimer à sa surface, sur les molécules MHC de classe II, à la fois
des peptides normaux et alkylés du cytochrome P-450 2C9.
L’activation de ces lymphocytes B résulte de l’action de lymphocytes
T auxiliaires qui reconnaissent le peptide alkylé.
Il en résulte une
expansion clonale de lymphocytes B, responsable de la production
d’anticorps de la même spécificité que l’Ig de membrane initiale des
lymphocytes B immatures.
Ces anticorps sont donc dirigés contre la
partie native non alkylée du cytochrome P-450 2C9.
De la même
façon, les hépatites à la dihydralazine s’accompagnent d’un
autoanticorps anti-LM (liver membrane) spécifiquement dirigé contre
le cytochrome P-450 IA2 et les hépatites à la carbamazépine ou à la
phénytoïne s’accompagnent d’anticorps anti-LM dirigés contre le
cytochrome P-450 2C11.
Ainsi, un grand nombre de médicaments peuvent être responsables
de tableaux d’HAI ayant parfois les mêmes caractéristiques cliniques
histologiques ou immunologiques que les HAI classiques, avec
parfois une évolution vers l’hépatite chronique active et la cirrhose
comme l’oxyphénisatine retirée du commerce depuis la fin des
années 1970.
La différence importante est la régression des autoanticorps, parfois plusieurs mois après l’arrêt du médicament.
Autoanticorps et hépatites virales
:
Les virus sont des candidats potentiels pour l’induction de maladies
auto-immunes et notamment d’HAI.
De plus, les autoanticorps sont
présents dans les hépatites chroniques, notamment delta et C.
L’induction de phénomènes auto-immuns par les virus pose deux
questions : quels sont les virus responsables de l’induction de l’autoimmunité
?
Dans quelles mesures les réactions immunitaires
humorales ou cellulaires participent-elles à l’immunopathogénie des
hépatites virales ?
A - AUTOANTICORPS ET HÉPATITE A
:
Au cours de l’hépatite aiguë A, on note des phénomènes autoimmunitaires
attestés par la présence, au tout début de la maladie,
de SMA (de type IgM) et d’anticorps anti-LSP et, moins
fréquemment, des anticorps anti-ASGP-R. Cependant, le rôle de
l’auto-immunité dans l’hépatite A reste spéculatif.
De véritables HAI de type I se sont développées dans les suites d’hépatites A
volontiers prolongées.
B - AUTOANTICORPS ET HÉPATITE B
:
Le virus de l’hépatite B n’est pas cytopathogène et l’atteinte
hépatique au cours de l’infection par le virus B est secondaire à la
réponse immunitaire contre le virus et peut-être à des phénomènes
auto-immunitaires.
Au cours de l’hépatite aiguë B, on peut observer
des anticorps anti-LSP, anti-ASGP-R et d’autres autoanticorps de
membrane hépatique.
Au cours de l’hépatite chronique B, les SMA
et les ANA sont fréquemment observés à des titres faibles.
D’autres anticorps anti-LSP et anti-ASGP-R sont parfois observés.
Cependant, le type de réponse immunitaire au cours de l’hépatite
chronique B est différent de celui observé au cours des HAI.
Il existe
un mimétisme entre certaines séquences de l’ADN polymérase et la
cible antigénique des SMA et des ANA.
Ces phénomènes
d’immunité croisée peuvent en partie expliquer la présence de ces autoanticorps au cours de l’hépatite chronique B.
Certaines
observations suggèrent un rôle déclenchant du virus B dans la
survenue de véritables HAI corticosensibles.
Cependant, dans la
plupart des cas, l’intensité des lésions histologiques observées
suggère plus une association fortuite qu’une relation de causalité.
C - AUTOANTICORPS ET HÉPATITE DELTA
:
L’hépatite delta induit des réactions auto-immunitaires.
On a décrit
au cours de l’hépatite chronique delta la présence d’anticorps antilamine C, antimembrane basale et anti-LKM3. Les anticorps
anti-LKM3 sont présents chez 13 % des malades atteints d’hépatite
chronique B et surinfectés par le virus delta.
Ils sont caractérisés
par une fluorescence observée exclusivement sur les coupes
tissulaires d’organes humains.
Ces anticorps reconnaissent une
protéine de 46 kDa localisée au niveau des cellules thymiques et des
cellules gastriques, et une protéine de 55 kDa au niveau hépatique.
Par immunociblage d’une banque d’ADNc, il a été montré que les
anticorps anti-LKM3 reconnaissent des protéines appartenant à la
famille des UGT.
De plus, il a été montré que l’autoépitope
principal était exprimé par les exons 2-5 de la famille 1-UGT.
Les
anticorps anti-LKM3 reconnaissent aussi un épitope mineur de la
famille 2-UGT.
Tous les patients ayant une hépatite delta avec
anticorps anti-LKM3 ont des anticorps anti-UGT.
La spécificité de
ces anticorps est attestée par le fait qu’ils ne sont jamais retrouvés
dans l’hépatite C ou dans les autres affections auto-immunes.
La
caractérisation des sous-classes d’IgG montre que les anticorps anti-
LKM3 des HAI sont de type IgG1 et IgG4, alors que ceux des
hépatites delta sont seulement IgG1.
Les questions qui restent en
suspens sur l’auto-immunité des anticorps anti-UGT sont : leur
caractère inhibiteur, leur expression sur la membrane plasmique,
leur caractère antigénique, leur signification clinique et leur caractère
prédictif de la réponse au traitement ?
D - AUTOANTICORPS ET HÉPATITE C
:
Un grand nombre d’autoanticorps sont présents au cours de
l’hépatite chronique C.
L’hépatite C est par ailleurs associée à un
certain nombre de manifestations extrahépatiques
(cryoglobulinémies mixtes, néphropathies glomérulaires
membranoprolifératives, porphyrie cutanée tardive, syndrome sec,
périartérite noueuse [PAN]), thrombopénies auto-immunes...) pour
lesquelles le caractère causal du virus C dans leur déclenchement
est démontré pour certaines et qui ont parfois une pathogénie autoimmune.
Les patients infectés par le virus de l’hépatite C (VHC)
produisent de façon excessive des ANA (20 à 40 %), des SMA (20 à
22 %), des anticorps antithyroglobuline (8 à 10 %) et anticardiolipine
(20 à 22%).
Cette production exagérée d’autoanticorps ne semble pas liée à une
activation polyclonale lymphocytaire B non spécifique par le VHC
car, d’une part, seuls certains autoanticorps ont une prévalence
élevée (ANA, SMA, anticardiolipine et antithyroglobuline) et
seulement 13 % des patients ont trois autoanticorps ou plus ; d’autre
part, chez les patients co-infectés virus de l’immunodéficience
humaine (VIH)-VHC qui ont fréquemment une hypergammaglobulinémie
polyclonale, la prévalence des ANA n’est pas corrélée
au statut VIH.
Des anticorps antinoyau de granulocytes (GSANA)
ont été trouvés chez 41 % des hépatites non A non B contre
0 % chez les hépatites B.
Ces anticorps sont trouvés fréquemment
au cours des syndromes de Felty et des polyarthrites rhumatoïdes
et ont un aspect très voisin et confondant de celui des ANCA qui
sont décrits dans les granulomatoses de Wegener et les PAN.
Ces
observations peuvent renforcer l’hypothèse de l’implication du VHC
dans des affections auto-immunes de type PAN, d’autant que, dans
cette étude, les anticorps anti-GS-ANA disparaissaient, dans la
majorité des cas, sous interféron (IFN).
Les anticorps anti-LKM1 ne sont trouvés que chez les patients
atteints d’hépatite chronique C (5 à 6 %).
En revanche, les patients atteints d’HAI de type II avaient une forte prévalence d’anticorps
anti-VHC avec les tests de première génération.
La majorité
des tests positifs correspondaient à des faux positifs, mais certains
patients présentaient manifestement une infection par le VHC
documentée par la recherche de l’acide ribonucléique (ARN) du
VHC en polymerase chain reaction (PCR).
Ces observations ont
conduit à proposer une classification des HAI de type II en deux
sous-types IIa et IIb.
Les patients atteints par le type IIa ne sont pas
infectés par le VHC et leurs caractéristiques sont celles des HAI
(femmes jeunes, transaminases très augmentées, titre élevé en
anticorps anti-LKM1 et réponse favorable à la corticothérapie).
Les patients atteints par le type IIb sont infectés par le VHC et les
caractéristiques sont celles d’une hépatite chronique virale. Les
anticorps anti-LC1 permettent d’aider à différencier les deux types
car ils sont absents chez les malades atteints d’hépatite C et présents
dans la moitié des cas d’HAI de type II.
Il est possible de traiter
par IFN ou IFN-ribavirine les patients qui ont une hépatite
chronique C avec des anticorps anti-LKM1 sans signe clinique
d’auto-immunité, mais ce traitement doit être conduit sous une
surveillance étroite car on a décrit quelques cas d’aggravation sous
IFN qui ont conduit à une corticothérapie.
La présence conjointe
d’anticorps anti-VHC et d’anticorps anti-LKM1 peut être expliquée
en partie par des réactions croisées ou par des phénomènes de
mimétisme moléculaire.
En effet, des homologies de séquence ont
été décrites entre le cytochrome P-450 2D6 et des protéines de
surface du VHC.
Il semble que les épitopes reconnus par les
anticorps anti-LKM1 des HAI de type II soient différents de ceux
reconnus par les anticorps anti-LKM1 des hépatites C.
Ainsi, il
est établi que le cytochrome P-450 2D6 est l’autoantigène majeur des
anticorps anti-LKM1 associés à l’hépatite C.
Le VHC déclenche la
réponse LKM.
Aucun génotype particulier n’est associé à la présence
d’anticorps anti-LKM.
La virémie C semble être plus faible chez
les patients porteurs d’hépatite C avec anticorps anti-LKM1.
Une
prédisposition génétique a été rapportée par plusieurs groupes avec
une association entre la présence d’anticorps anti-LKM1 et les
phénotypes HLA-DR7 et DR3.
Des autoanticorps dirigés contre une protéine appelée GOR 47-1 ont
été décrits dans plus de 80 % des hépatites chroniques C.
Les
anticorps anti-GOR ont une réaction croisée avec la région core du
VHC et avec un autoantigène encore inconnu.
Les anticorps anti- GOR sont associés à une réplication virale forte et ne sont pas
observés au cours des HAI.
Le titre d’anticorps anti-GOR est corrélé avec l’activité nécroticoinflammatoire
sur les biopsies hépatiques. Ainsi, un rôle immunopathogénique de la réponse anti-GOR dans l’hépatite
chronique C est possible.