Assistance cardiorespiratoire sur le terrain chez l’adulte. Chaîne de survie et défibrillation précoce Cours de
réanimation - urgences
relié à une source d’oxygène.
Cependant, il s’agit d’une technique difficile,
nécessitant de l’entraînement.
Elle ne se
conçoit que transitoirement en attendant
l’intubation.
Le masque doit être souple,
capable de s’adapter à la face de façon
étanche, de taille standard (n° 5), si possible
transparent, adaptable aux valves de
ventilation et stérilisable.
Deux
inconvénients importants expliquent que
l’intubation doit lui être préférée :
– le risque d’inhalation est favorisé par la
ventilation au masque ; en effet, l’insufflation
des voies digestives est d’autant plus
fréquente que les voies aériennes
supérieures sont mal dégagées, ce qui oblige
à ventiler avec de fortes pressions
d’insufflation, sources de distension
gastrique et de régurgitation massive ; c’est
pourquoi cette technique nécessite de
l’expérience ;
– une ventilation efficace est difficile à
obtenir car l’étanchéité du masque n’est
assurée qu’en associant la triple manoeuvre
de libération des voies aériennes à la
pression du masque sur la face et ceci de la
même main ; sans une certaine
habitude, le geste est fatigant ; l’efficacité de
la ventilation se contrôle en vérifiant que le
thorax se soulève à chaque insufflation ; en
cas d’inexpérience, le plus simple est de
ventiler à deux personnes, l’une assure à
deux mains la triple manoeuvre et
l’étanchéité du masque sur la face, l’autre
ventile manuellement avec le ballon autogonflable.
* Système d’aspiration efficace
:
L’aspiration des sécrétions oropharyngées
est indispensable.
Elle se fait grâce à des
sondes d’aspirations semi-rigides, à usage
unique, connectées à une source de vide.
La technique d’aspiration consiste à
introduire ce type de sonde dans la bouche,
jusqu’au pharynx, aspiration non branchée.
Ce n’est qu’au retrait de la sonde que la
source de vide est utilisée, pour éviter un
effet de ventouse de l’extrémité de la sonde,
traumatisant les muqueuses.
Plusieurs tailles
de sonde doivent être disponibles. Lors de
la réalisation d’une intubation trachéale, la
visualisation de la glotte ne peut se faire
qu’après aspiration des sécrétions
pharyngées.
Une prise de vide est donc indispensable
lors de la réanimation de tout arrêt
cardiaque : elle peut être fournie par une
pompe à vide autonome portable.
Le
système doit être assez puissant pour
assurer à l’extrémité de la sonde d’aspiration
un débit de plus de 30 L/min.
Le système
doit pouvoir générer une dépression d’au
moins 300 mmHg, sonde clampée, afin de
limiter les risques d’inhalation en cas de
régurgitation.
* Canule oropharyngée de Guédel
:
Elle peut aider à maintenir la filière
pharyngée ouverte en empêchant la chute
postérieure de la langue chez les patients
dans le coma et notamment durant la
ventilation au masque.
On l’introduit dans
la bouche, concavité vers le palais, puis on
effectue une rotation pour repousser la
langue en avant.
Ce type de canule peut
entraîner des vomissements avec risque
d’inhalation.
Mal utilisée, elle peut aussi
repousser en arrière la langue et obstruer le
larynx, effet opposé à celui recherché.
* Intubation trachéale
:
Elle est la meilleure solution pour contrôler
la liberté des voies aériennes.
Elle permet
d’assurer la ventilation efficace des poumons
avec une concentration élevée en oxygène,
tout en protégeant les voies aériennes du
risque d’inhalation grâce à son ballonnet
gonflable.
De plus, la sonde d’intubation
permet l’aspiration des sécrétions intratrachéales et représente une voie
d’urgence pour l’administration de
médicaments dans l’attente de la pose d’une
voie veineuse.
Il s’agit donc d’un geste
essentiel devant être pratiqué dès que
possible lors de la réanimation de tout arrêt
cardiaque (et également chez tout patient
comateux sans réflexe laryngé).
Elle
s’effectue après une oxygénation efficace au
masque d’au moins 3 minutes.
La réalisation
de l’intubation orotrachéale dans ce contexte
d’urgence peut être difficile et doit être
effectuée par un médecin entraîné.
Durant
l’intubation, la ventilation artificielle et le MCE ne doivent pas être interrompus plus
de 30 secondes au maximum.
Il faut donc,
en cas d’échec, reprendre une oxygénation
efficace au masque après le premier essai,
puis entre chaque tentative d’intubation.
Dans tous les cas, et surtout en cas
d’intubation difficile, mieux vaut une
réanimation élémentaire bien conduite (qui
devrait être connue de tous) plutôt que de
perdre du temps en de vaines tentatives.
L’intubation orotrachéale, en cas d’arrêt
cardiaque, est à préférer à la voie
nasotrachéale : en effet, plus facile et moins
traumatisante, elle permet d’aller plus vite.
+ Matériel nécessaire
:
Il doit faire partie de la trousse d’urgence et
comprend :
– des sondes d’intubation : toutes les tailles
doivent être disponibles, de diamètres
internes échelonnés de 6 à 9mm (n° 6 à 9).
Classiquement, on choisit approximativement
un diamètre équivalent à celui du
cinquième doigt de la main, ce qui
correspond le plus souvent à une sonde de
calibre 8 ou 8,5 chez l’homme et 7,5 ou 8
chez la femme.
Les sondes doivent être
repérables sur un cliché pulmonaire grâce à
un index radio-opaque.
Les plus utilisées
actuellement sont les sondes avec ballonnet
de type « basse pression », moins
traumatisantes en cas de ventilation
ultérieure prolongée ;
– un laryngoscope : plusieurs modèles sont
disponibles ; les plus utilisés sont à lames
interchangeables (plusieurs lames courbes
de longueurs différentes doivent être
disponibles).
Les laryngoscopes à lames fixes
nécessitent que chaque taille soit disponible
en plusieurs exemplaires.
Au minimum,
deux laryngoscopes complets doivent être
prêts à l’emploi, c’est-à-dire stérilisés,
vérifiés tous les jours, avec un jeu de piles et
de lampes neuves en réserve ;
– une pince de Magill, servant à glisser
l’extrémité de la sonde d’intubation dans la
trachée, sans percer le ballonnet (cette pince
s’utilise surtout lors des intubations par voie
nasotrachéale) ;
– du sparadrap pour fixation de la sonde
après sa mise en place ;
– un système d’aspiration avec des sondes
d’aspiration à usage unique (la vidange
préalable de l’estomac avec une sonde
gastrique est rigoureusement contreindiquée)
; le geste en lui-même est simple.
+ Technique de l’intubation trachéale
:
Schématiquement, après introduction de la
lame du laryngoscope dans la bouche du
patient, il faut d’abord visualiser l’épiglotte.
Ensuite, deux possibilités existent pour
visualiser la glotte afin de glisser la sonde
d’intubation dans la trachée entre les deux
cordes vocales :
– placer l’extrémité de la lame du
laryngoscope dans le sillon glossoépiglottique
puis exercer un mouvement de traction
vers le haut avec le manche ;
– charger l’épiglotte : un aide peut, en
exerçant une pression cricoïdienne
(dépression perceptible sous la pomme
d’Adam), faciliter la visualisation de la glotte
en la repoussant vers le bas.
Une fois la sonde introduite dans la trachée
sous contrôle de la vue, le ballonnet (vérifié
auparavant) est gonflé avec environ 10 mL
d’air. Il faut, dès lors, contrôler la bonne
position de la sonde dans la trachée.
Après
connexion de la sonde d’intubation à un
ballon de ventilation muni d’une valve
(ballon autogonflable type Ambuy), la
ventilation pulmonaire est commencée.
La vérification de la bonne position de la
sonde trachéale est impérative car les deux
risques majeurs sont l’intubation
oesophagienne et l’intubation sélective de la
bronche souche (droite le plus souvent) si la
sonde est poussée trop loin.
Il faut donc,
d’une part contrôler que le thorax se soulève
à chaque insufflation, d’autre part ausculter
systématiquement, d’abord, le creux
épigastrique, puis les deux aisselles.
La perception de bruits hydroaériques
épigastriques à l’insufflation signe
l’intubation oesophagienne et impose le
retrait de la sonde, puis la reprise de la
ventilation au masque avant une nouvelle
tentative d’intubation.
À l’auscultation des aisselles, la diminution
du murmure vésiculaire à gauche
correspond à une intubation sélective de la
bronche souche droite et nécessite un retrait progressif de la sonde, ballonnet dégonflé,
jusqu’à l’obtention d’une auscultation
symétrique.
Une fois la bonne position de la
sonde vérifiée, ballonnet gonflé, on trace un
repère sur la sonde à l’aplomb des dents
(feutre) et le tube doit être impérativement
fixé avec du sparadrap à la mâchoire
supérieure ; en effet, les mouvements de MCE et de ventilation au ballon exposent au
déplacement de la sonde avec risque
d’extubation accidentelle.
Une canule de Guedel doit être positionnée pour empêcher
la morsure de la sonde.
En urgence, la voie
nasotrachéale est à éviter car elle est un
facteur de perte de temps et de difficultés
(passage malaisé de la filière nasale,
possibilité de trajet sous-muqueux, nécessité
de s’aider d’une pince de Magill une fois la
glotte exposée).
Si l’intubation trachéale est impossible, ce
qui est exceptionnel (traumatisme maxillofacial, oedème pharyngolaryngé), un
sauveteur expérimenté peut recourir, pour
gagner du temps de survie dans l’attente
d’une trachéotomie, à une technique de
ventilation par cathéter transtrachéal ou
par utilisation d’un kit de minitrachéotomie,
laquelle n’est pas sans risque de
complications.
Il convient également de souligner l’intérêt
suscité récemment par le dispositif du
masque laryngé dans les arrêts cardiaques
extra- ou intrahospitaliers.
Il a l’avantage
de pouvoir être aisément mis en place
devant la glotte sans l’aide d’un
laryngoscope et peut être utilisé par un
personnel paramédical non-anesthésiste, non
familiarisé avec l’intubation trachéale.
Il
s’avère adapté aux victimes incarcérées, se
présentant de face et suspectes de
traumatismes cervicaux.
Il permet une
ventilation efficace avec une bonne
protection contre le risque d’inhalations,
notamment celles d’origine haute.
2- Ventilation après intubation
:
Une fois la libération des voies aériennes
assurée, la ventilation doit être aussitôt
commencée au masque par un ballon autogonflable muni d’une valve (type
Ambuy).
Avant l’intubation et dès que la
sonde est dans la trachée, il est recommandé
de poursuivre pendant quelques minutes la
ventilation manuelle au ballon sur le tube endotrachéal.
* Ventilation au ballon
:
Elle se fait en utilisant un ballon autogonflable associé à une valve
unidirectionnelle, empêchant l’air expiré
d’être réutilisé.
Ce système, ballon et valve,
est couplé, soit à un masque facial, soit à
une sonde d’intubation.
Avec un masque, la
meilleure efficacité est obtenue à deux
sauveteurs expérimentés, l’un à la tête de la
victime maintient le masque sur sa face et
assure l’étanchéité, l’autre comprime le
ballon.
Selon les recommandations récentes,
on ne doit plus considérer comme
indispensable de délivrer des volumes
courants importants, compte tenu d’une
faible production de CO2 pendant l’arrêt
cardiaque. En revanche, une oxygénothérapie
à FiO2 de 1,0 est importante à
respecter.
Les impératifs suivants sont à bien
observer :
– la connexion située à l’arrière du ballon,
dépourvue de valve pour l’admission
d’oxygène, est à raccorder au dispositif
assurant l’apport d’oxygène ; ce dispositif
qui comporte détendeur, débitmètre,
barboteur, raccord type Argyll, doit être en
permanence monté sur une bouteille
d’oxygène prête à l’emploi pour les équipes
mobiles ;
– la FiO2 délivrée au patient doit être élevée,
de l’ordre de 1,0, pour assurer une bonne
oxygénation en tenant compte d’une
altération de la physiologie pulmonaire en
rapport avec une augmentation de l’espace
mort et de la compliance pulmonaire liée à
un oedème pulmonaire.
Sans précaution particulière, l’utilisation du
ballon autogonflable n’assure qu’une
concentration insuffisante d’oxygène
(seulement 0,5 de FiO2 avec de l’oxygène
pourtant à fort débit) ; en effet, après chaque
insufflation, le ballon se remplit à nouveau
en 1 seconde environ, donc à un débit de
l’ordre de 50 L/min, et essentiellement par
de l’air arrivant par un orifice de grand
diamètre, de faible résistance et non limitatif
en débit.
Pour obtenir une bonne FiO2, il faut, soit
obstruer manuellement l’arrivée d’air lors de
la ventilation du patient, soit adapter à
l’orifice d’arrivée d’air un réservoir rempli
d’oxygène (deuxième ballon, réservoir
souple type Ambuy) d’un volume au moins
égal au premier ballon et permettant
d’alimenter le ballon lors de sa phase de
remplissage par de l’oxygène pur.
* Ventilation mécanique
:
Elle n’est possible qu’après intubation du
patient.
Il faut utiliser un respirateur
automatique de transport permettant de
ventiler en 100 % d’oxygène, avec un débit
d’alimentation d’au moins 40 L/min.
La spirométrie expiratoire permet de contrôler
la ventilation-minute.
L’avantage d’une ventilation mécanique est
surtout de libérer un réanimateur (pour
assurer la mise en place d’une voie veineuse
par exemple) et de permettre une ventilation
en 100 % d’O2 si l’on ne dispose pas du
système avec réservoir, type Ambuy.
En pratique, on préfère ventiler initialement
au ballon ce qui permet, avec de
l’expérience, une adaptation permanente à
la fréquence de massages cardiaques et aux
résistances des voies aériennes.
B - CIRCULATION ARTIFICIELLE
:
Le MCE doit être entrepris ou poursuivi sur
place.
Le thorax du patient doit reposer sur
plan dur. S’il repose sur un lit, il est
nécessaire de placer sous le thorax une
planche en bois ou en matériau synthétique.
La technique du MCE est identique à celle
décrite dans la première partie.
Après deux insufflations successives,
15 compressions sternales sont exécutées
puis la séquence est recommencée.
Le MCE
est effectué à une cadence de 100/min.
Après quatre cycles de ventilationcompression,
on recherche pendant
5 secondes l’éventuel retour d’un pouls
carotidien avant de reprendre le MCE, puis
celui d’une respiration spontanée efficace
(3 à 5 secondes) avant de poursuivre.
Ainsi,
la RCP n’est jamais interrompue plus de
7 secondes.
Parmi diverses techniques proposées pour
améliorer l’efficacité hémodynamique du MCE, on peut citer la « cardiopompe »
actuellement commercialisée, qui réalise une
compression-décompression active à l’aide
d’une ventouse surmontée d’un piston
appliquée sur la région sternale.
Cette
technique améliore le remplissage cardiaque
et, par conséquent, le volume d’éjection par
application du principe de la pompe
thoracique.
Les résultats sur le taux de
survie sont cependant discutés.
C
- ANALYSE ÉLECTROCARDIOGRAPHIQUE
ET ALGORITHME UNIVERSEL
:
Tout patient en état de mort apparente doit
être mis sans délai sous surveillance électrocardioscopique lors des manoeuvres
de réanimation médicalisée pour dépister et
surveiller en permanence la situation
rythmique et adapter au mieux le traitement
à l’étiologie selon l’algorithme universel.
Deux circonstances bien distinctes sont à
envisager selon que le scope du moniteur
objective ou non une FV/TV.
1- Fibrillation ou tachycardie
ventriculaire
:
Après élimination des principaux artefacts
(mauvais branchement d’une électrode), la FV, mécanisme cardiaque le plus fréquent
de la mort subite, se reconnaît à l’aspect
chaotique de l’activité électrique
ventriculaire à grandes ou petites
mailles.
Elle résulte habituellement
de la transformation et de l’accélération
d’une TV pouvant prendre
transitoirement l’aspect d’un flutter
ventriculaire à complexes larges d’aspect
sinusoïdal.
La distinction entre TV et
tachycardie paroxystique supraventriculaire
avec aberrations ventriculaires (complexes
élargis) reste théorique dans un contexte de
gravité et ne modifie pas la conduite
pratique. En effet, dans tous les cas,
l’urgence est à la défibrillation.
Après une
brève tentative de réduction par coup de
poing précord i a l , les palettes du
défibrillateur sont mises en position pour
délivrer sans délai un choc électrique monoou
biphasique de 200 J, à répéter à 200 ou
300 J en cas d’insuccès.
Après deux échecs,
un troisième choc doit être délivré à 360 J.
Entre deux chocs, le temps de vérifier la
présence d’un pouls ne se justifie que si le
scope montre un rythme compatible avec
une efficacité circulatoire.
L’insuccès de cette
séquence de trois chocs conduit à rechercher
une cause d’échec et à reprendre la RCP
avant de recourir à une autre séquence de
trois chocs à 360 J.
Après délivrance du choc,
il faut tenir compte d’un délai de quelques
secondes pendant lesquelles la trace ECG est
de mauvaise qualité et le pouls non perçu,
en dépit d’un rythme compatible avec un
débit cardiaque.
La persistance d’une FV engage à
poursuivre plusieurs séquences de chocs
électriques externes séparées par des
intervalles de 1 minute de RCP pendant
lesquels il faut rechercher divers facteurs
toxiques ou métaboliques d’échec, mettre en
place une voie veineuse et recourir à l’usage
de médicaments (adrénaline, lidocaïne).
* Technique dite du « coup de poing sternal »
:
La réduction d’une TV ou d’une FV par un
coup de poing sternal paraît possible dans
un nombre très restreint de cas.
Techniquement, le poing est placé 30 cm audessus
du sternum, puis un coup vigoureux
est donné sur la partie inférieure du
sternum.
Ce geste simple et rapide qui
délivre une énergie faible, de l’ordre de 4 J,
peut suffire à réduire une fibrillation, mais
peut aussi dégrader une TV en FV, voire en
asystole.
C’est pourquoi cette technique ne
peut se justifier que chez une victime sans
pouls perceptible et étant avec certitude en FV.
De plus, son usage doit être réservé à un
réanimateur spécialisé disposant d’un
défibrillateur à proximité.
* Technique du choc électrique
:
Le défibrillateur permet de délivrer à travers
le myocarde une décharge électrique capable d’interrompre une fibrillation et/ou une TV
en provoquant une dépolarisation du
myocarde.
Les modèles utilisés sont
autonomes et fonctionnent sur secteur et sur
batteries rechargeables.
Le choc électrique est délivré grâce à deux palettes-électrodes enduites de pâte
conductrice.
Après mise en charge à 200 J,
l’opérateur met en place les deux palettes
sur le thorax du patient, l’une sous la
clavicule droite, l’autre à gauche du
mamelon, sur la ligne axillaire moyenne
gauche à l’apex du coeur.
Tout en tenant
fermement les poignées des palettes, il
exerce une forte pression sur la peau.
Après
avoir vérifié que personne n’a de contact
avec le patient ou le lit, le choc est délivré
en appuyant simultanément sur les deux
déclencheurs.
Il est en principe inutile de
débrancher le scope ou l’appareil à ECG, qui
sont protégés.
– Énergie requise : il existe un seuil minimal
en dessous duquel un choc électrique est
inefficace.
Inversement, le recours d’emblée
à un choc de forte intensité peut provoquer
des dégâts myocardiques sans gain
d’efficacité.
Actuellement, l’énergie
recommandée pour les deux premiers chocs
électriques est de 200 J.
– Impédance transthoracique : la quantité de
courant électrique nécessaire à la
dépolarisation du myocarde dépend de
l’intensité du choc délivré, exprimée en
joules, mais aussi de l’impédance
transthoracique, variable d’un malade à
l’autre.
Cette impédance, qui doit être la plus
basse possible pour une meilleure efficacité,
dépend de divers facteurs, la plupart en
rapport avec les conditions techniques de la
défibrillation.
– Position des électrodes : le placement
habituel des électrodes doit être correct.
Leur
éloignement augmente l’impédance.
En cas
de ventilation artificielle, le choc doit être
déclenché en fin d’exsufflation, période du
cycle respiratoire où l’impédance transthoracique est la plus basse.
– Taille des électrodes : il est recommandé
d’utiliser des palettes ayant un diamètre de
13 cm chez l’adulte.
Elles doivent être
munies de poignées permettant de bien les
tenir en main.
– Qualité de l’interface peau-électrodes : il
est très important d’utiliser une pâte
conductrice entre la peau et les électrodes,
sinon, d’une part, le choc électrique peut
provoquer des brûlures cutanées et, d’autre
part, l’impédance transthoracique augmente.
Le débordement de pâte conductrice entre
les deux palettes doit être évité en raison du
risque d’arc électrique toujours très
impressionnant, ou de réduction d’efficacité
par perte d’énergie.
Les dispositifs
transdermiques doivent être retirés.
Il est
recommandé d’exercer une forte pression
sur les palettes pour diminuer sensiblement
l’impédance, laquelle à tendance elle-même
à se réduire en cas de chocs itératifs.
– Modalités de l’influx électrique : les
défibrillateurs en usage délivrent un
stimulus électrique rectangulaire et monophasique.
L’utilisation de défibrillateur
délivrant une onde biphasique est
intéressante pour réduire l’énergie
utilisée.
Pour tenir compte des
importantes variations d’impédance transthoracique observables chez l’homme
(allant de 15 à 143 ohms, en moyenne
70-80 ohms), des défibrillateurs capables de
délivrer un choc adapté à une mesure
préalable de l’impédance sont actuellement
disponibles.
– Cas particulier des patients porteurs d’un
stimulateur : la position des palettes de
déchoquage doit se situer au moins à 10 cm
du stimulateur.
La position antéropostérieure
(une précordiale, l’autre dorsale rétrocardiaque) est recommandée.
Si l’arrêt
cardiaque est récupéré, il faut vérifier à
plusieurs reprises l’absence d’altération des
circuits lors du choc électrique et d’élévation
du seuil de stimulation du stimulateur.
* Autres dysrythmies ventriculaires
:
Les torsades de pointes ont l’aspect ECG
d’une TV polymorphe organisée réalisant
une torsion des pointes des ventriculogrammes
sur l’axe isoélectrique, pouvant
simuler, dans les formes les moins typiques,
une TV ou une FV.
L’évolution se fait par accès récidivants,
laissant apparaître entre deux épisodes un
allongement de l’espace QT, ou un
bigéminisme à couplage long ou une
bradycardie.
La dégradation en FV est
toujours possible.
Il peut s’agir de torsades
de pointes liées à un syndrome de QT long
congénital ou acquis. Dans ce dernier cas, il
faut systématiquement penser à l’association
de divers facteurs favorisants,
notamment cardiopathie, bradycardie,
déplétion potassique (diurétique),
traitements par antiarythmique de la classe
Ia (quinidinique) ou III (amiodarone,
sotalol…), antidépresseurs tricycliques,
certains vasodilatateurs ou antibiotiques.
Il
est important de savoir que les torsades de
pointes ne relèvent pas d’une cardioversion
électrique, mais, au mieux, d’une stimulation
cardiaque rapide, associée à la recharge en
potassium.
L’isoprénaline à la seringue
électrique peut avoir son intérêt pour
resynchroniser la repolarisation
myocardique.
Enfin, il faut souligner
l’efficacité souvent rapide du sulfate de
magnésium intraveineux qui mérite toujours
d’être utilisé en première intention en raison
de son innocuité.
2- En l’absence de toute dysrythmie
ventriculaire
:
Deux situations bien différentes sont à
considérer selon l’algorithme universel : l’asystole et la dissociation
électromécanique.
* Asystole :
L’asystole qui s’observe dans
environ 20 % des cas, correspond à une
absence de toute activité électrique
spontanée sous réserve d’avoir éliminé une
cause grossière d’erreur (électrodes
décollées, connexions défectueuses, défaut
d’alimentation…).
C’est, en règle,
l’aboutissement d’une dysrythmie, le plus
souvent ventriculaire, passée inaperçue ou
tardivement découverte.
Il peut également
s’agir de la phase ultime de troubles conductifs intracardiaques
caractérisés par un élargissement progressif
des ventriculogrammes d’origine
métabolique par hyperkaliémie et
acidose, ou toxique (antidépresseurs
tricycliques).
Il faut y penser devant un
aspect d’élargissement global et progressif
des ventriculogrammes associé à un
effacement progressif des auriculogrammes
(atrial standstill) et ralentissement
progressif du rythme évoluant vers une
asystole.
Le pronostic de l’asystole
est péjoratif avec une survie inférieure à 15 %.
Les
possibilités de restaurer une activité cardiaque ne peuvent être
jugées qu’après avoir corrigé les causes métaboliques, assuré
une RCP efficace après intubation, administré les drogues
appropriées (adrénaline, atropine…) grâce à une voie veineuse
bien perméable, et eu recours si besoin à l’alcalinisation
molaire dans des cas précis.
La
défibrillation est à éviter car potentiellement
délétère par effet vagomimétique inhibant
l’activité cardiaque.
La stimulation
transcutanée n’a pas d’efficacité, à
l’exception des cas de bloc trifasciculaire où
l’activité auriculaire (ondes P) reste présente.
* Dissociation électromécanique
:
Elle se reconnaît à la coexistence d’une
activité électrique variable ne générant
aucune contraction mécanique, et par
conséquent sans pouls décelable.
Il peut
s’agir typiquement d’un rythme sinusal
(tamponnade, embolie pulmonaire massive,
ou nécrose myocardique massive) dont le
pronostic est étroitement dépendant de la
réversibilité de la cause.
On en
rapproche les grandes bradycardies à
complexes élargis en rapport avec un bloc auriculoventriculaire (BAV) infrahissien de
haut degré où l’activité auriculaire dissociée
reste bien visible. D’origine aiguë
(ischémique ou toxique), ou bien chronique
(bloc chronique paroxystique), elles relèvent
d’un entraînement électrosystolique.
Une
place à part est à réserver aux troubles conductifs intracardiaques d’origine
métabolique, décrits plus hauts, qui
s’accompagnent en règle d’une atteinte de la
contractilité réversible avec les troubles
électriques par alcalinisation réglée par
soluté molaire de bicarbonate de sodium.
D - VOIES D’ADMINISTRATION
DES MÉDICAMENTS :
La mise en place d’une voie d’abord est une
question pratique importante à résoudre
pour que les drogues administrées
atteignent leur site d’action dans les délais
les plus brefs avec une efficacité optimale.
Néanmoins, en cas de FV, le choc électrique
externe reste prioritaire et ne saurait être
retardé par la recherche d’un abord veineux.
Par ailleurs, la circulation artificielle générée
par les manoeuvres de réanimation modifie
la pharmacocinétique et ralentit la
progression des drogues à partir de leur lieu
d’administration.
Ce problème a été bien
étudié par une évaluation systématique des
différentes voies d’administration utilisables
dans l’arrêt cardiaque.
En pratique, deux
voies ont fait preuve de leur efficacité sur la
survie chez l’adulte : la voie veineuse et la
voie endobronchique.
1- Voie veineuse
:
La mise en place d’une perfusion veineuse
s’impose dès que possible en sachant les
difficultés que peut poser ce geste chez une
victime en arrêt circulatoire, dont les veines
périphériques sont souvent collabées.
De
plus, le cathétérisme d’un tronc veineux
central sur un patient soumis à un MCE
requiert une certaine dextérité.
* Abord périphérique
:
Chez un adulte en arrêt cardiaque, la voie
veineuse périphérique est à considérer
comme une voie de choix car d’accès facile
et n’entravant pas la RCP pendant sa mise
en place. La préférence doit être donnée à
une veine de l’avant-bras, en premier lieu la
veine basilique.
En cas d’échec, la mise en
place d’une voie jugulaire externe, bien que
de technique plus difficile et nécessitant
l’interruption du massage cardiaque, peut
être une bonne solution, car les veines
jugulaires sont souvent turgescentes.
Les
études de pharmacocinétique ont montré
qu’après une injection dans une veine
périphérique, un délai de 2 à 3 minutes était
nécessaire pour que l’adrénaline atteigne les
cavités cardiaques.
Il faut donc, si possible,
disposer d’une voie de bon calibre (14 ou
16 gauges [G]) et éviter les veines distales.
De plus, pour accélérer la mise en circulation
d’un agent médicamenteux, i l est
recommandé d’augmenter momentanément
la vitesse de la perfusion.
Une fois ce
premier abord veineux établi, une seconde
voie, périphérique ou mieux centrale, peut
s’imposer par sécurité si les manoeuvres de
réanimation se prolongent.
* Abord central
:
Il a l’avantage de permettre une rapide
distribution des médicaments et d’être un
recours toujours possible en cas
d’inaccessibilité d’une voie périphérique
efficace.
Trois voies sont possibles (jugulaire interne,
sous-clavière ou fémorale).
Chacune ayant
ses avantages et ses inconvénients, la
meilleure est certainement celle dont on a le
plus l ’ expérience .
Les études de
pharmacocinétique plaident pour un abord
cave supérieur.
Cependant, la montée d’un
cathéter veineux (50 ou 75 cm) par voie
fémorale est réputée plus facile et moins
dangereuse avec l’avantage de ne pas
nécessiter l’interruption des manoeuvres de
réanimation.
De plus, à la phase initiale d’un
infarctus du myocarde, la voie fémorale a
l’avantage de ne pas être une contreindication
à un traitement fibrinolytique
ultérieur (car accessible à une compression
externe en cas d’hémorragie), contrairement
à la jugulaire interne et à la veine sousclavière.
Chez un patient sous intubation
trachéale, la voie jugulaire interne est plus
accessible.
La voie sous-clavière doit être
réservée aux réanimateurs confirmés, la
provocation d’un pneumothorax étant
catastrophique dans le contexte d’un arrêt
cardiaque.
2- Voie intratrachéale
ou intrapulmonaire profonde
:
La trachée représente une alternative
intéressante à la classique voie intraveineuse.
Cependant, n’étant disponible que sur un
patient intubé, son utilisation n’est justifiée
qu’en l’absence de voie veineuse.
Sur le plan
théorique, les poumons représentent une
surface d’absorption sanguine très étendue.
Or, toute la circulation artificielle générée
lors du MCE passe par les vaisseaux
pulmonaires, et les premiers organes irrigués
ensuite sont le coeur et le système artériel
résistif.
Par conséquent, la voie
intratrachéale représente un site
d’administration efficace de l’adrénaline,
médicament essentiel de l’arrêt cardiaque.
Comme, en pratique, il est de règle que la
victime se trouve intubée avant la mise en
place d’une voie veineuse, la voie intratrachéale s’avère souvent la première
disponible pour administrer les
thérapeutiques d’urgence, notamment
adrénaline et, éventuellement, atropine ou lidocaïne.
Par voie intratrachéale, la dose
d’adrénaline recommandée est de 3 mg (soit
trois fois la dose recommandée par voie
veineuse) diluée dans 10 mL de sérum salé
isotonique.
Cette dose à destinée endobronchique, et non directement
trachéale , doit être instillé e par
l’intermédiaire , s o i t d’une sonde
d’aspiration, soit d’un cathéter, introduit le
plus loin possible dans l’arbre bronchique.
L’administration doit être suivie de cinq
insufflations pour assurer une bonne
diffusion.
Une baisse transitoire de la PAO2
peut s’ensuivre par trouble du rapport
ventilation/perfusion (effet shunt).
L’effet
thérapeutique est retardé, mais plus
prolongé que par voie veineuse.
Cependant,
la pharmacocinétique et le taux d’absorption
des produits administrés par cette voie sont
imprévisibles.
3- Voie intracardiaque
:
L’utilisation de la voie intracardiaque n’est
plus justifiée.
En effet, elle est un facteur de
perte de temps, en imposant l’arrêt du
massage cardiaque.
De plus, contrairement
à une idée reçue, les cavités cardiaques sont
souvent difficiles à trouver par voie sousxiphoïdienne.
Surtout, elle expose aux
risques de pneumothorax, de lésions
myocardiques, de plaie d’une artère
coronaire, d’un hémopéricarde.
Enfin,
l’injection accidentelle dans l’épaisseur du
myocarde peut provoquer des troubles du
rythme irréversibles.
Les injections intracardiaques ne possèdent
donc aucun avantage par rapport aux voies
classiques, tout en exposant à des
complications redoutables.
De ce fait, elles
doivent être abandonnées.
E - MÉDICAMENTS DE L’ARRÊT
CARDIAQUE :
1- Médicaments adrénergiques
:
* Adrénaline
:
L’adrénaline est connue de longue date
comme médicament de l’arrêt cardiocirculatoire
(et du choc anaphylactique).
Elle est
particulièrement intéressante devant une asystole.
Dans ce cas, le sang ne circule plus
et la pression régnant à l’intérieur de tous
les vaisseaux s’équilibre à la pression
systémique moyenne (environ 7 mmHg)
qui dépend du volume sanguin total
contenu à l’intérieur des vaisseaux et de la
compliance totale du réseau vasculaire.
Les
résistances périphériques artérielles et
veineuses sont alors effondrées.
De
nombreuses études expérimentales et
cliniques ont établi l’intérêt des drogues
vasoconstrictrices, avant tout l’adrénaline,
dans la restauration d’une circulation
efficace après arrêt cardiorespiratoire
consécutif à une anoxie ou une FV.
Cet
agent adrénergique possède des propriétés à
la fois alpha-agonistes (effet vasoconstricteur
périphérique) et bêta-agonistes (effets
inotrope et chronotrope).
Il tire l’essentiel de
son efficacité de son action sur les récepteurs alpha-adrénergiques et non pas des effets
cardiaques directs, bêta-adrénergiques.
C’est ainsi que l’administration d’un
bêtabloquant n’altère pas l’efficacité de
l’adrénaline, à l’opposé du blocage alphaisolé
ou associé au blocage bêtaadrénergique.
L’élévation des résistances vasculaires
périphériques contribue à l’augmentation de
la pression artérielle systémique,
particulièrement en cas de débit cardiaque
bas (situation réalisée lors du MCE).
L’élévation de la pression aortique
diastolique a un effet bénéfique sur les
débits régionaux, tout particulièrement dans
les circulations coronarienne et carotidienne.
– La circulation coronarienne est déterminée
par le gradient de pression régnant entre
l’aorte et l’oreillette droite où aboutit le sinus
coronaire.
Durant les manoeuvres de
réanimation, la perfusion coronarienne est
assurée essentiellement pendant la diastole.
En augmentant la pression aortique
diastolique sans modifier celle de l’oreillette
droite, l’adrénaline augmente le gradient de
perfusion.
En revanche, elle ne peut à elle
seule faire repartir un coeur arrêté, et
n’abaisse pas le seuil de défibrillation, d’où
l’importance de l’administrer secondairement
après le début de la ventilation et de
la circulation artificielles.
– Par ailleurs, l’adrénaline prévient le
collapsus carotidien provoqué par les hautes
pressions intrathoraciques et ne majore
pas la pression intracrânienne ; elle
améliore donc le gradient de perfusion
cérébrale.
L’adrénaline représente donc
actuellement le médicament essentiel de l’arrêt cardiaque, et son efficacité
n’est pas contestée.
Cependant, les doses à utiliser
restent l’objet de controverses.
Chez l’animal, les effets bénéfiques de
l’adrénaline sur la survie augmentent avec
la dose administrée.
En revanche, chez
l’homme, les doses élevées ne donnent pas
de meilleurs résultats à long terme sur la
survie globale et/ou les séquelles
neurologiques que la dose dite « standard »
de 1 mg.
Cependant, la répétition de
doses élevées rétablirait plus rapidement
une circulation spontanée, sans avoir d’effet
sur la survie globale.
Elle permettrait à un
plus grand nombre de victimes d’être admis
en unité de soins intensifs.
Dans d’autres
études, les fortes doses administrées
dans les suites de la réanimation d’un arrêt
cardiaque s’avèrent avoir un effet délétère
sur la fonction myocardique.
Cette
discordance dans les résultats entre les
conditions expérimentales et cliniques
pourrait tenir à la nature de la cardiopathie
responsable de l’arrêt chez l’homme (le plus
souvent ischémique) et au temps écoulé
avant l’intervention des soins médicalisés.
Un rôle délétère pourrait être attribué à
l’augmentation de la consommation d’O2 et
à l’altération des protéines contractiles.
La plus grande prudence est recommandée
dans les arrêts cardiaques survenant chez
les intoxiqués à la cocaïne ou les abus de
solvants volatiles, chez qui l’adrénaline peut
être responsable de complications
rythmiques graves et de vasoconstriction
coronaire sévère.
En pratique, selon l’algorithme universel, en cas de FV/TV, la dose
recommandée est de 1 mg intraveineux
toutes les 3 à 5 minutes, administrée
quelques secondes après une série de trois
défibrillations infructueuses, c’est-à-dire non
suivie du retour du pouls et d’une activité
électrique coordonnée après un balayage
d’écran de l’électroscope.
La RCP doit être
reprise pendant environ 1 minute avant
nouveau contrôle du rythme.
En l’absence
de FV/TV et de pouls, l’adrénaline est
donnée toutes les 3 minutes et la RCP est
reprise avant nouveau contrôle et
reconsidération de l’algorithme.
* Autres sympathomimétiques
et/ou vasopresseurs :
Ils ne se sont pas révélés supérieurs à
l’adrénaline pour favoriser le rétablissement
d’une activité cardiaque spontanée, qu’ils
soient alpha-agonistes purs (phényléphrine)
ou mixtes, alpha- et/ou bêta-agonistes
(noradrénaline, dopamine).
La dobutamine
n’a pas d’indication dans le traitement de
l’arrêt cardiaque car son action alphaagoniste
est très faible, même à fortes doses,
et son effet vasodilatateur bêta
prédominant.
Une mention spéciale est à réserver à
l’arginine-vasopressine susceptible de
concurrencer l’adrénaline par ses effets
expérimentaux favorables sur les circulations
coronaires et cérébrales. Les applications
cliniques restent en attente.
2- Agents antiarythmiques
:
*
Atropine
:
Les recommandations de 1993 font valoir
l’intérêt de cet anticholinergique dans les
asystoles sur la base du rôle éventuel d’une
augmentation du tonus vagal dans
l’inefficacité des manoeuvres de réanimation
pour restaurer une activité électrique ou
l’entretien de dysrythmies.
Bien que cette
hypothèse n’ait pas reçu de confirmation
formelle, il paraît sans risque d’administrer
une dose unique de 3 mg intraveineux
d’atropine capable normalement d’inhiber le
tonus vagal chez l’adulte.
* Lidocaïne
:
Antiarythmique de classe Ia, la lidocaïne a
une efficacité bien établie expérimentalement
dans la prévention des dysrythmies en
élevant le seuil de FV.
Elle est
généralement préférée aux autres antiarythmiques qui ont tous des effets
délétères sur la conduction intracardiaque,
l’inotropisme, et ont même pour certains
(classe Ic) des effets proarythmogènes.
Cependant, aux doses relativement basses
utilisées chez l’homme en raison de ses effets
centraux et gastro-intestinaux, les effets de
la lidocaïne sur le seuil de fibrillation et le
niveau de l’énergie nécessaire pour
défibriller sont incertains.
De ce fait, il est
conseillé , dans l ’ état actuel des
connaissances d’en rester aux recommandations
de 1993, à savoir de ne pas recourir à
l’administration systématique de lidocaïne et
de réserver celle-ci aux FV/TV après échec
de la défibrillation électrique et de
l’adrénaline, ou dans les états d’hyperexcitabilité
ventriculaire exposant à récidive.
L’administration en bolus intraveineux est
recommandée à la dose d’environ 1 à
1,5 mg/kg toutes les 5 minutes sans
dépasser une dose totale de 3 mg/kg.
En cas
d’échec de la première injection, il faut
poursuivre le MCE pendant quelques
minutes pour laisser le temps à la circulation
artificielle de véhiculer la lidocaïne jusqu’à
son site d’action, et non pas réinjecter
immédiatement un second bolus.
* Tosylate de brétylium
:
Le brétylium est un ammonium quaternaire
de mécanisme d’action complexe.
Il
implique une libération de catécholamines,
puis un blocage adrénergique postsynaptique,
s’accompagnant fréquemment d’une
hypotension artérielle.
De ce fait, il n’est
jamais indiqué en première intention.
Il peut
être utile dans le traitement des tachycardies
et FV récidivantes, uniquement en cas
d’échec de la lidocaïne.
La dose recommandée est un bolus
intraveineux initial de 5 mg/kg pouvant être
répété après 15 minutes.
L’effet bénéfique
du brétylium dans ces indications semble résider dans son efficacité pour
améliorer les résultats de la défibrillation par choc électrique
externe.
Son
utilisation pratique reste cependant exceptionnelle.
* Amiodarone
:
Une étude récente souligne l’intérêt de
l’amiodarone, antiarythmique de classe III
dans les arrêts cardiaques extrahospitaliers
en rapport avec une FV ayant résisté à une
série de trois chocs électriques.
Il est en effet
montré que comparée à un placebo,
l’administration d’une dose de 300 mg
d’amiodarone en intraveineuse directe
permet à une victime supplémentaire sur dix
traitées de restaurer une activité électrique
et d’arriver en vie à l’hôpital.
Comparé au brétylium, l’amiodarone s’est révélé avoir un
effet antiarythmique plus marqué avec une
dose dépendance.
Une question importante, non encore
résolue, est de savoir dans quel ordre les
drogues antiarythmiques doivent être
administrées en cas de dysrythmie
ventriculaire récidivante.
Il faut cependant
savoir que dans ces situations de résistance
aux antiarythmiques, la mortalité élevée est
davantage liée à la déchéance de la fonction
myocardique qu’au trouble du rythme
lui-même.
* Sulfate de magnésium
:
L’hypomagnésémie est très fréquente chez
les patients atteints de maladies
cardiovasculaires.
Elle pourrait altérer la
fonction myocardique et favoriser les
troubles du rythme, essentiellement
ventriculaires, par des mécanismes encore
incomplètement élucidés, notamment dans
l’ischémie myocardique et l’intoxication digitalique.
Le sulfate de magnésium est très efficace sur
les torsades de pointes.
L’administration se f a i t en bolus
intraveineux de 2 g suivi d’une perfusion de
3 à 20 mg/min pendant 24 heures.
La même posologie est préconisée dans les
récidives de FV après échec de la lidocaïne.
Cette thérapeutique mérite d’être essayée en
deuxième intention, en raison de son
innocuité théorique et de son effet neuroprotecteur, sans cependant avoir
d’effet sur la survie à 24 heures.
3- Isoprénaline
:
En l’absence de possibilité immédiate
d’entraînement électrosystolique externe,
l’isoprénaline garde ses indications
classiques dans les bradycardies sévères, en
règle par BAV complet.
Rappelons que cet
agoniste bêta-adrénergique pur possède des
propriétés inotropes et chronotropes
positives.
Si l’effet accélérateur est nul ou
insuffisant, le MCE doit être poursuivi
pendant le transfert en réanimation où une
montée de sonde d’entraînement
électrosystolique sera immédiatement
pratiquée.
Une autre indication est
représentée par les torsades de pointes où
l’isoprénaline agit en resynchronisant la
repolarisation.
La correction des troubles
métaboliques souvent associés, notamment
l’hypokaliémie, est impérative.
En dehors du BAV, l’isoprénaline n’a pas d’indication dans
l’arrêt cardiocirculatoire en raison de ses
effets vasodilatateurs néfastes.
Les doses recommandées sont de 2 à
10 c/min (en pratique, 5 ampoules de 0,2 mg
dans 125 mL de sérum salé isotonique) et la
perfusion est débutée à 20 gouttes/min, soit
2 c/min
4- Calcium
:
L’administration systématique de chlorure
de calcium a longtemps été de pratique
courante dans l’arrêt circulatoire, notamment
pour améliorer l’inotropisme en cas de
dissociation électromécanique.
Cependant,
cette pratique n’a pu être validée.
Actuellement, les indications reconnues du
CaCl2 se limitent aux hypocalcémies,
notamment après polytransfusion chez les
polytraumatisés.
F - SOLUTÉS DE PERFUSION
:
1- Choix du soluté
:
L’utilisation du sérum glucosé à 5 % comme
véhicule des médicaments dans l’arrêt
cardiaque a été remise en cause.
En effet,
elle entraîne une diminution significative de
la survie par comparaison au sérum
physiologique, et majore l’hyperglycémie et
les lésions neurologiques.
Celles-ci
seraient favorisées par une augmentation de
la glycolyse anaérobie et une accumulation intraneuronale d’acide lactique, d’autant
plus importante que la glycémie est élevée.
Le sérum salé isotonique est donc à préférer
dès qu’un abord veineux est établi.
La seule
indication de sérum glucosé est
l’hypoglycémie, cause possible d’arrêt
cardiorespiratoire à rechercher systématiquement
à la bandelette lors de la mise en
place d’une voie veineuse.
Pour assurer une expansion volémique dans
les hypovolémies, les solutés recommandés
sont les gélatines fluides en solution sodée
et éventuellement l’albumine à 4 %,
notamment en attendant la disponibilité en
sang isogroupe isorhésus en cas de
syndrome hémorragique.
2- Volume de perfusion
:
Le volume de liquide à perfuser dépend, à
l’évidence, de l’étiologie de l’arrêt
cardiorespiratoire.
Si celui-ci est secondaire
à une hypovolémie majeure, avec perte de
plus de 20 % de la masse sanguine, tel un
choc hémorragique chez un polytraumatisé,
le volume doit correspondre à celui des
pertes sanguines estimées, en attendant la
disponibilité en culots globulaires qui, seuls,
permettent de retrouver un hématocrite
entre 25 et 35 %.
Certaines défaillances ventriculaires droites
aiguës répondent également à un
remplissage modéré (0,5 à 1 L) : embolie
pulmonaire massive, état de mal
asthmatique, infarctus du ventricule droit...
D’une façon générale, pour être optimal, le
remplissage liquidien doit être guidé par la
surveillance permanente, au besoin invasive,
de la précharge.
Dans les suites immédiates
de l’arrêt cardiaque, il ne semble pas licite
d’effectuer un remplissage systématique.
Le
volume perfusé doit correspondre à celui
nécessaire pour véhiculer les drogues (soit
100 à 200 mL de sérum salé isotonique en
tout, jusqu’à l’admission en unité de soins
intensifs).
G - PROBLÈME DE L’ALCALINISATION
ET DE L’ÉQUILIBRE ACIDOBASIQUE :
1- Alcalinisation et acidose postanoxique
:
L’arrêt cardiorespiratoire est responsable
d’une acidose mixte associant une acidose
respiratoire par rétention de CO2 et une
acidose lactique secondaire à l’anoxie
tissulaire.
Cependant, il faut savoir qu’aucun
désordre acidobasique majeur ne s’installe
rapidement si les gestes élémentaires de
survie sont mis en oeuvre sans retard.
La
ventilation et le MCE sont les meilleurs
moyens de lutte contre l’acidose respiratoire
en assurant l’élimination du CO2.
Il est en pratique difficile d’apprécier
précisément l’équilibre acidobasique
postanoxique, si l’on se réfère à la mesure
des gaz du sang artériel ou veineux qui ne
donne pas un reflet fidèle de la situation
réelle intracellulaire, notamment au niveau
myocardique.
L’emploi systématique du bicarbonate de
sodium dans l’arrêt cardiaque, bien
qu’encore répandu, a un intérêt très contesté.
En effet, il provoque une augmentation de
la pCO2 dans le sang artériel et le sang
veineux mêlé sans abaisser le taux de lactate
circulant, d’où une baisse paradoxale du pH
sanguin.
L’administration de larges
quantités de bicarbonate de sodium, de
l’ordre de 5 mmol/kg, entraîne une
importante hypernatrémie , avec
hyperosmolarité et une acidose paradoxale
liée à une élévation du CO2 tissulaire.
En effet, le tamponnement de l’acide lactique
par le bicarbonate de sodium aboutit à la
formation de CO2, gaz extrêmement
diffusible. Le pH sanguin ne se corrige que
si le système est ouvert, permettant au CO2
produit par le tamponnement de l’acide de
s’échapper.
Comme le CO2 diffuse plus
facilement à travers les membranes
cellulaires que l’anion bicarbonate (HCO3
-),
l’élévation de la pCO2 sanguine provoque
une augmentation de la pCO2 intracellulaire
et une acidose intracellulaire paradoxale.
La
ventilation est souvent insuffisante pour
assurer l’élimination de tout le CO2 produit,
le système veineux périphérique étant
assimilable à un système clos.
Ainsi, l’arrêt
cardiaque aboutit à une production
supplémentaire de CO2, qui ne peut
qu’aggraver l’acidose intra- et extracellulaire.
Cette aggravation de l’acidose intracellulaire
par le bicarbonate de sodium est accusée,
tout au moins expérimentalement, de
répercussions négatives sur les fonctions
cérébrales et myocardiques par divers
mécanismes : effet dépresseur direct,
majoration de la glycolyse, stimulation ou
accélération de la production d’acide
lactique, diminution de l’oxygène délivré
aux cellules par augmentation de l’affinité
de l’oxygène pour l’hémoglobine, inhibition
de la réponse aux thérapeutiques
adrénergiques.
En pratique, l’administration systématique
de bicarbonate de sodium lors de la
réanimation d’un arrêt cardiaque n’est pas
justifiée car ses effets sont potentiellement
délétères au niveau intracellulaire, et son
efficacité clinique sur la survie n’a jamais été
démontrée.
Elle peut se révéler utile
(1 mmol/kg) si une acidose métabolique
sévère (pH < 7,1 ; base excess < -10) persiste
après rétablissement d’une activité cardiaque
spontanée.
En effet, la circulation est alors
assez efficace pour assurer l’évacuation au
niveau pulmonaire du CO2 produit en excès
(« système ouvert »).
Ces réserves vis-à-vis de l’alcalinisation ont,
cependant, une exception d’importance dans
les hyperkaliémies menaçantes.
2- Alcalinisation molaire et troubles
de conduction cardiaque d’origine hyperkaliémique ou toxique
:
Le risque de mort subite par hyperkaliémie,
souvent potentialisée par une hyponatrémie
et une acidose, est bien établi.
Le rôle
insidieux d’une insuffisance rénale
organique ou fonctionnelle aggravée par un
bas débit cardiaque et la prescription sans
contrôle de diurétique d’épargne potassique
ou d’inhibiteur de l’enzyme de conversion
est à souligner.
Le risque létal de ces troubles
est largement sous-estimé en l’absence de
preuve objective possible post mortem.
De
plus, dans les formes secourues, l’origine hyperkaliémique est loin d’être systématiquement évoquée devant des
troubles de la conduction intracardiaque
d’aggravation progressive, associés à un
défaut de réponse aux stimuli adrénergiques
ou électriques (défaut de stimulation du
stimulateur) et un état de dissociation
électromécanique avec choc cardiogénique
sévère.
Ces troubles conductifs sont pourtant
réversibles jusqu’au stade précédant
l’asystole par alcalinisation molaire.
Encore faut-il savoir les reconnaître.
L’aspect
typique est celui d’un élargissement
progressif et global des ventriculogrammes
(qui peuvent devenir monstrueux) associé à
un effacement progressif des auriculogrammes
(atrial standstill) qui reculent dans
l’onde T du cycle précédent.
Cet
aspect évolutif, à distinguer d’une TV,
impose sans délai un prélèvement sanguin,
destiné aux dosages ultérieurs de kaliémie,
natrémie, pH, et l’administration de soluté
molaire de bicarbonate de sodium (à
84 g/1 000), par cathéter veineux central de
préférence, à raison de 10 mL/min sans
dépasser la quantité totale de 250 mL.
Généralement, 100 à 200 mL (ou mmol) en
10 à 20 minutes sont suffisants pour
améliorer spectaculairement l’activité
électrique et l’état hémodynamique,
essentiellement par effet inotrope des ions
sodium, antagonisme Na+/K+, transfert de
K+.
Ce traitement salvateur, c a r
immédiatement actif, peut être secondairement
complété, si nécessaire, par une
épuration extrarénale après transfert en
service de réanimation.
Dans un contexte d’intoxication volontaire,
la constatation de troubles conductifs
similaires doit faire penser à l’ingestion
massive d’antidépresseurs tricycliques ou de
quinidiniques.
Le traitement, en dehors du
lavage gastrique évacuateur, repose là aussi
sur l’administration de bicarbonate de
sodium en solution molaire (100 à 200 mL
en 10 à 20 minutes).
H - STIMULATION EXTERNE TRANSCUTANÉE
:
Il s’agit d’une méthode de stimulation
temporaire qui a les avantages d’être simple
et facile à mettre en oeuvre sur le terrain par
les unités mobiles d’urgence dans l’attente
d’une stimulation endocavitaire provisoire
ou définitive (pacemaker).
Cette méthode,
tombée en désuétude à la suite du
développement de l’entraînement endocavitaire, présente un regain d’intérêt
depuis la mise au point de nouveaux types
d’appareils réduisant les inconvénients
cutanés et musculaires des premiers
stimulateurs grâce à l’utilisation de deux
larges électrodes (200 à 300 cm2) à
impédance élevée en position antéropostérieure.
L’appareil comporte un générateur
d’impulsions couplé à un moniteur de
surveillance et intègre, généralement dans le
même appareil, une unité de défibrillation
pouvant si besoin délivrer un choc électrique
externe par les électrodes de stimulation
elles-mêmes en cas de TV/FV.
Les paramètres de stimulation sont à régler
en durée (généralement 40 ms) et en
amplitude, en augmentant par paliers de 5 à
10 mA à partir de 20 mA.
L’indication type en est le BAV complet
infrahissien bas situé, responsable de
bradycardie extrême, inférieure à
40/min, insensible à l’atropine et associée à
une détresse cardiocirculatoire avec,
souvent, état de mort apparente.
Il peut
s’agir de BAV aigus, essentiellement dans le
cadre de la phase aiguë d’un infarctus du
myocarde de topographie antérieure ou
septale, ou de BAV chroniques paroxystiques
dans le cadre de la maladie d’Adams-
Stokes.
En revanche, cette technique est à
éviter dans les asystoles, où elle n’a pas fait
preuve de supériorité sur la poursuite des
gestes élémentaires de survie selon les
techniques exposées plus haut.
Dans les cas où la stimulation électrique
transcutanée s’avère inefficace du fait d’une
absence de réponse ventriculaire ou d’une
dissociation électromécanique, force est de
poursuivre les gestes élémentaires de survie
et de recourir à la perfusion bêtastimulante
d’isoprénaline dans l’attente d’une montée
de sonde de stimulation endocavitaire en
unité de soins intensifs, spécialisés ou non.
I - PROTECTION CÉRÉBRALE AU
DÉCOURS DE L’ARRÊT CARDIAQUE
:
1- Physiopathologie
:
Le cerveau est un organe extrêmement
sensible à l’anoxie. Cependant, il semblerait
que certains neurones puissent tolérer une
ischémie de 30 à 60 minutes.
Cliniquement,
l’arrêt cardiaque est suivi d’une perte de
conscience après moins de 15 secondes, puis
d’une apnée avec pupilles fixes après
60 secondes, parallèlement à l’effondrement
de l’oxygène cérébral (15 s) et des stocks
cérébraux en adénosine triphosphate (ATP)
en 4 à 5 minutes.
En normothermie, un arrêt cardiaque de
plus de 5 minutes s’accompagne, à la reprise
de la circulation, d’un certain nombre
d’anomalies regroupées dans le syndrome
postarrêt cardiaque ou encéphalopathie
postanoxique, associant :
– des troubles de la circulation cérébrale
consécutifs à l’arrêt complet du flux sanguin
avec successivement quatre phases : au tout
début, une absence multifocale de reperfusion, suivie d’une hyperhémie
d’environ 30 minutes puis d’une
hypoperfusion globale, retardée, durant
environ 6 heures, enfin, soit récupération
d’une circulation normale, soit aggravation
de l’hypoperfusion pouvant aboutir à l’arrêt
du flux sanguin avec mort cérébrale ;
– des lésions de réoxygénation au niveau
cellulaire déclenchées par une cascade de
réactions biochimiques aboutissant
principalement à la libération de radicaux
libres qui provoquent une peroxydation
lipidique des membranes cellulaires (acide
arachidonique, leucotriènes).
Finalement,
l’altération des mécanismes de régulation de
l’homéostasie cellulaire (avec en particulier
une accumulation de Ca++ intracytosolique)
est suffisamment importante pour entraîner
des nécroses cellulaires.
Par conséquent, les lésions cérébrales se
constituent, non seulement pendant l’arrêt
cardiaque proprement dit, mais également
dans les heures qui suivent la reprise d’une
activité cardiaque spontanée.
2- Mesures de protection cérébrale
:
Différentes voies seraient à suivre pour
limiter les effets dévastateurs de l’ischémie
sur le cerveau.
Elles doivent viser à :
– améliorer la reperfusion ;
– diminuer le métabolisme cérébral ;
– empêcher la formation des substances
cytotoxiques générées pendant l’arrêt
cardiaque et juste après la reprise de la
circulation.
À ce jour, aucun traitement n’a fait la preuve
de son efficacité.
Quoi qu’il en soit, certaines mesures
s’avèrent essentielles pour améliorer ou
maintenir la perfusion cérébrale et
l’oxygénation cérébrale, en visant avant tout
à normaliser la pression sanguine, les gaz
du sang et l’équilibre hydroélectrolytique.
L’utilité d’une hyperventilation en normothermie n’est pas démontrée, car elle
diminue le flux sanguin cérébral.
L’objectif
d’une PaO2 d’environ 100 mmHg reste
suffisant.
La ventilation en O2 pur doit en
principe être évitée car possiblement délétère
pour le cerveau.
Elle est cependant utile
transitoirement, juste avant une aspiration
trachéale.
La toux, notamment lors des
aspirations trachéales, doit être limitée. En eff e t , elle augmente la pression
intracrânienne et contribue à une réduction
du flux sanguin cérébral.
Enfin, une
surélévation légère de la tête de 30° est
recommandée pour favoriser le drainage
veineux cérébral.
Pendant longtemps, le thiopental a été utilisé
pour réduire l’hypermétabolisme cérébral.
En effet, les barbituriques sont connus pour
réduire le métabolisme cérébral, les
convulsions, la formation d’un oedème
cérébral, la pression intracrânienne et les
lésions neuronales postischémiques.
Cependant, une large étude multicentrique
a montré que le thiopental n’améliorait ni le
pronostic cérébral, ni la survie.
Son
utilisation systématique n’est donc plus
justifiée dans cette indication.
En revanche,
les barbituriques gardent leur utilité en cas
d’état de mal convulsif (de mauvais
pronostic) résistant aux benzodiazépines.
Quand arrêter
les manoeuvres
de réanimation ?
La décision d’arrêter les manoeuvres de
réanimation est souvent difficile à prendre
dans le contexte dramatique que représente un arrêt cardiaque.
Les pourcentages de
survie sans séquelles neurologiques, sont, en
règle, inversement proportionnels à la durée
des manoeuvres de réanimation.
Il est inutile
de prolonger les gestes de réanimation s’ils
doivent aboutir à un « échec secondaire »,
décès ou séquelles neurologiques majeures,
après des jours, voire des semaines de
réanimation.
Certains facteurs sont à
considérer avant toute décision.
A - ÂGE
:
Contrairement aux idées reçues, l’âge, même
avancé, ne préjuge pas du résultat final.
Il n’est donc pas éthiquement admissible de
s’abstenir de réanimer un patient en arrêt
cardiaque uniquement sur la notion d’âge.
B - DÉLAI D’INTERVENTION
:
Le délai d’intervention pour entamer les
premiers gestes élémentaires de survie
devant un arrêt cardiaque est classiquement
estimé à une durée maximale de 4 minutes
pour espérer une récupération sans séquelles
neurologiques.
Ce délai est cependant
contesté.
On peut admettre qu’en situation
de normothermie, il ne semble pas
raisonnable d’entreprendre les manoeuvres
de réanimation après plus de 15 minutes
d’arrêt cardiorespiratoire.
En revanche, dans
les états d’hypothermie ou dans les
intoxications par les barbituriques ou
apparentés, ce délai doit être largement
dépassé.
Le délai d’intervention sur le
terrain représente un déterminant majeur du
pronostic et, par conséquent, de la décision
de mettre en oeuvre ou non, et d’arrêter ou
non, les manoeuvres de réanimation déjà
entreprises.
Dans le cadre des efforts
développés actuellement pour raccourcir à
moins de 12 minutes (si possible 8 minutes)
les délais de défibrillation après une perte
de connaissance, le délai d’intervention du
premier témoin reste le point faible du
concept de chaîne de survie.
En effet, tout
retard d’intervention sur le terrain risque de
ruiner d’emblée les chances d’une
d éfibrillation précoce .
Le retard
d’intervention dépend, certes, des aléas de
la présence ou non d’un sauveteur dans
l’environnement immédiat de la victime,
mais aussi et surtout de la compétence du
grand public à entreprendre les gestes
élémentaires de secourisme.
Il s’agit là d’un
problème particulièrement crucial, quand on
sait que les victimes ayant bénéficié d’une
assistance immédiate par témoin sur le
terrain ont un meilleur pronostic que celles
ayant uniquement bénéficié d’une
réanimation spécialisée.
L’apprentissage
des gestes élémentaires de secourisme est
du ressort des responsables des organismes
de santé publique.
Il reste jusqu’à
maintenant incompréhensiblement négligé,
notamment en France.
C - DURÉE DES MANOEUVRES
DE RÉANIMATION
:
Définie par l’intervalle de temps séparant la
mise en route des gestes de réanimation du
retour effectif d’une circulation spontanée,
la durée des manoeuvres de réanimation est
un facteur important à considérer.
Au-delà
de 15 à 20 minutes de RCP spécialisée sans
aucune activité électrique, même transitoire,
le taux de survie chute de façon très
significative, pour être proche de zéro après
30 minutes dans des conditions normothermiques.
En cas d’activité sans
pouls (dissociation électromécanique), Levine et al ont montré qu’après
20 minutes de réanimation médicalisée, une
valeur égale ou inférieure à 10 mmHg de
l’ETCO2 mesuré dans les gaz expirés chez
un patient intubé était le reflet d’un
effondrement du débit cardiaque et avait
valeur prédictive du décès avec une
sensibilité et une spécificité de 100 %.
Cependant, certaines situations incitent à
prolonger les manoeuvres pendant plus de
1 heure sans se décourager : l’hypothermie
(28 à 32 °C), les intoxications aux
barbituriques et apparentés, les overdoses, les
perturbations métaboliques majeures, en
particulier les troubles ioniques.
En effet,
dans ces cas particuliers, notamment dans
l’hypothermie, des récupérations sans
séquelles neurologiques sont possibles,
même après un délai de 30 minutes.
D - ASPECT INITIAL
DE L’ÉLECTROCARDIOGRAMME :
On ne saurait trop insister sur cette donnée
essentielle selon laquelle les victimes
trouvées initialement en FV ou TV ont
significativement de meilleurs taux de survie
que celles trouvées en asystole ou
dissociation électromécanique.
À l’inverse,
un ECG plat signe le plus souvent un arrêt
cardiaque remontant à plusieurs minutes,
ayant le plus souvent été induit par une FV.
L’état d’asystole serait ainsi l’expression du
stade terminal d’une souffrance
myocardique sévère, expliquant les grandes
difficultés à rétablir une activité cardiaque
spontanée.
Conclusion
:
Des concepts de chaîne de survie et de
défibrillation précoce découle l’ensemble des
recommandations d’assistance cardiorespiratoire
émanant de l’AHA et de l’ERC.
Celles-ci visent avant tout à obtenir une plus
grande rapidité et une plus grande efficacité
d’intervention des premiers témoins et des
premiers secours sur le terrain.
L’objectif reste
plus que jamais de gagner les quelques
précieuses minutes, essentielles pour
interrompre une FV/TV par une défibrillation
précoce à un stade encore réversible.
On peut,
ainsi, espérer réduire du même coup les taux
dramatiquement élevés de la mortalité et des
séquelles neurologiques des morts subites
survenant en dehors de l’hôpital.