Au cours de l’examen, la vessie n’est pas visualisée, avec un liquide
amniotique d’abondance normale et des reins le plus souvent en
bonne position et d’échostructure normale.
1- Exstrophies vésicale et cloacale :
Elles partagent une origine embryologique commune : anomalie de
fusion antérieure du mésoderme latéral et défaut de rétraction de la
membrane cloacale qui reste en position ventrale dans l’exstrophie
vésicale, associée à un échec de développement normal du septum
urorectal dans l’exstrophie cloacale.
Il en résulte un défaut de fermeture pariétale abdominale antérieure
sous-ombilicale avec exposition directe de la paroi vésicale
postérieure, après résorption de la membrane cloacale qui constituait
le mur antérieur de la vessie dans l’exstrophie vésicale, et exposition
de deux hémivessies séparées par la muqueuse intestinale dans
l’exstrophie cloacale.
Chaque uretère s’abouche latéralement dans
une hémivessie.
Il existe de plus un diastasis pelvien important, une duplication
génitale externe par absence de fusion des tubercules génitaux et un
épispadias.
Ces deux types d’anomalies sont rares :
– 1/30 000 naissances vivantes pour l’exstrophie vésicale à
prédominance masculine (3/1) ;
– 1/200 000 naissances vivantes pour l’exstrophie cloacale
rencontrée à fréquence égale dans les deux sexes.
Les signes échographiques sont :
– l’absence de visualisation de la vessie en position pelvienne
antérieure avec deux reins en position normale ;
– la visualisation de la muqueuse vésicale exstrophiée sous la forme
d’une masse molle extériorisée à partir du pelvis et flottant dans le
liquide amniotique ;
– une insertion du cordon ombilical sur l’abdomen plus basse que
normalement ;
– un écartement anormal des branches pubiennes sur une coupe
tangentielle à l’arc pubien, une duplication génitale externe ;
– la visualisation d’une image pelvienne kystique anéchogène
correspondant au cloaque dans l’exstrophie cloacale.
En l’absence d’association à des lésions rénales, le volume du liquide
amniotique est normal.
L’exstrophie cloacale peut être associée à d’autres anomalies : omphalocèle, spina bifida lombosacré, qui avec l’atrésie anale
constituent le complexe OEIS.
Des anomalies cardiovasculaires
et rénales (rein pelvien ou en fer à cheval, hypoplasie ou agénésie
rénale,...) peuvent être présentes.
La découverte d’une trisomie 21
n’est pas exceptionnelle.
2- Epispadias
:
La vessie n’assure pas son rôle de réservoir et n’est pas visualisée.
Il
existe un écartement anormal entre les deux os pubiens, et l’insertion
du cordon ombilical sur l’abdomen est anormalement basse.
Chez le
garçon, le pénis est large et court, et chez la fille le clitoris est
dupliqué.
D - PATHOLOGIE DE L’OURAQUE
:
L’ouraque est un canal épithélial provenant de l’allantoïde et
connecté au dôme vésical.
Il s’oblitère en même temps que la partie extraembryonnaire de l’allantoïde disparaît.
La pathologie de l’ouraque est liée à la persistance partielle ou totale
de l’allantoïde.
Elle comprend les kystes de l’ouraque et la
perméabilité de ce dernier.
1- Kyste de l’ouraque
:
Il est médian et situé au-dessus du bord supérieur de la vessie, ce
qui peut permettre de le distinguer des autres kystes abdominaux :
kyste ovarien chez un foetus de sexe féminin, duplication digestive,
kyste du cholédoque (qui peut être associé à une atrésie biliaire), ou
plus rarement kyste mésentérique de siège médian, pseudokyste
méconial, kyste du diverticule de Meckel…
2- Perméabilité totale de l’ouraque
:
Son incidence est de 0,25/10 000 avec une prédilection masculine
(2M/1F).
La sémiologie échographique associe :
– un kyste du cordon à son insertion ombilicale qui communique
avec la vessie ;
– un changement de volume simultané du kyste, et de la vessie lors
de la miction foetale ;
– une éventuelle dilatation du cordon en aval du kyste liée à une
extravasation de l’urine dans la gelée de Wharton.
Le cordon ombilical a par ailleurs une insertion et une structure
normales avec deux artères et une veine perméables en imagerie
couleur.
Il faut s’assurer de l’absence de malformations associées :
pathologie urétrale obstructive (qu’une vidange vésicale normale
élimine), malformation de l’appareil urinaire et/ou génital, défaut
de fermeture de la paroi abdominale, myéloméningocèle.
Le
diagnostic différentiel est celui des lésions vasculaires du cordon
(hémangiome) documentées par l’imagerie doppler couleur, et de
défaut de fermeture pariétale antérieure.
Pathologie tumorale rénale
:
Elle est rare et concerne le néphrome mésoblastique, à composante
mésenchymateuse prédominante (hamartome), et la tumeur de
Wilms, ou néphroblastome, comportant des éléments blastémateux,
stromaux et épithéliaux.
Le plus souvent, ces tumeurs congénitales ont une révélation
néonatale ou infantile.
Néanmoins, le néphrome mésoblastique peut
se voir chez le foetus.
A - NÉPHROME MÉSOBLASTIQUE
:
Cette masse tumorale solide non encapsulée, souvent de bon volume
(jusqu’à 5 à 10 cm de diamètre), se traduit par une image échogène
rétropéritonéale, qui déforme le contour rénal et se continue avec le
parenchyme rénal normal avoisinant.
Elle contient parfois des zones anéchogènes kystiques en rapport avec une nécrose tumorale.
L’imagerie doppler couleur peut objectiver une hypervascularisation
tumorale (à l’origine d’une défaillance cardiaque foetale et d’une
anasarque de mauvais pronostic).
Devant une masse rénale foetale solide, l’existence d’un hydramnios
est un argument en faveur du diagnostic.
Il peut être responsable
d’une rupture prématurée des membranes ou d’un accouchement
prématuré.
Le diagnostic différentiel concerne :
– les tumeurs solides des organes de voisinage, le foie à droite
(hépatoblastome, localisation métastatique d’un neuroblastome), les
surrénales (neuroblastome, hématome), le rétropéritoine
(neuroblastome, tératome d’aspect kystique) ;
– la séquestration bronchopulmonaire extrathoracique ;
– la pathologie rénale : la dysplasie rénale multikystique, la
dysplasie rénale focalisée et surtout la tumeur de Wilms qui est en
principe encapsulée et dont la survenue in utero est exceptionnelle.
Le traitement du néphrome mésoblastique est la néphrectomie
postnatale.
Quant au pronostic de la tumeur de Wilms isolée non
héréditaire à début anténatal, il serait bon, mais grevé par le risque
de prématurité et d’anasarque foetale.
B - NÉPHROBLASTOMATOSE
:
Elle correspond à un blastème métanéphrogène anormal, c’est un
facteur de susceptibilité au développement postnatal d’une tumeur
de Wilms.
Elle peut se rencontrer dans certains syndromes génétiques :
– le syndrome de Beckwith-Wiedemann (dont l’incidence de tumeur
de Wilms est d’environ 5 %) ;
– le syndrome de Perlman, qui ont en commun une
macrosomie foetale avec néphromégalie, reins échogènes et un excès
de liquide amniotique.
Une tumeur de Wilms peut se rencontrer dans d’autres syndromes
génétiques qui contribuent chacun pour moins de 1 % à l’ensemble
des tumeurs de Wilms de l’enfant (dont l’incidence est de 1/10 000) :
– le syndrome de Denys-Drash (DDS), qui associe une sclérose
mésangiale, un pseudohermaphrodisme masculin (génotype XY et
phénotype féminin) avec dysgénésie gonadique et/ou tumeur de
Wilms (dont l’incidence est de plus de 90 %) ;
– le syndrome WAGR, qui associe tumeur de Wilms (dont
l’incidence est de plus de 30 %), aniridie, ambiguïté génitale ou
gonadoblastome ou anomalies génito-urinaires, et retard mental.
Ce
syndrome est lié à l’intervention de gènes séparés mais contigus, et
est associé à une microdélétion monoallélique 11p13, responsable
des anomalies génito-urinaires.
Le gène WT1, localisé en 11p13, est exprimé au cours de
l’embryogenèse de l’appareil génito-urinaire et dans les tissus
adultes.
Les mutations constitutionnelles hétérozygotes seraient
impliquées dans les anomalies génito-urinaires du DDS, tandis que
les mutations WT1 hétérozygotes acquises du deuxième allèle
seraient retrouvées dans le néphroblastome (notamment dans les
tumeurs à prédominance stromale).
C - SCLÉROSE TUBÉREUSE DE BOURNEVILLE
:
C’est une phacomatose transmise selon un mode autosomique
dominant qui comporte des tumeurs rénales angiomyolipomateuses
et des kystes corticaux émanant des tubes proximaux, dont le
développement est volontiers postnatal.
Les manifestations anténatales de cette affection se focalisent sur le coeur : présence de tumeurs cardiaques échogènes à type de
rhabdomyomes de volume variable.
Il existe aussi des hamartomes olfactifs, associés à des hamartomes
de la couche germinative sous-épendymaire visualisés par l’imagerie
par résonance magnétique (IRM).
Les macules cutanées dépigmentées souvent présentes dès la
naissance, mais visibles seulement en lumière de Wood, contribuent
au diagnostic précoce.
Cette affection est génétiquement très hétérogène.
Les arguments généalogiques prennent toute leur importance dans
le diagnostic de ces syndromes génétiques.
Thrombose des vaisseaux rénaux
:
Cette pathologie volontiers néonatale est dominée en fréquence par
la thrombose de la veine rénale.
La thrombose de la veine rénale a été décrite en période anténatale
dans les situations cliniques de diabète maternel, prééclampsie,
pathologie lupique, prise de diurétiques, de corticoïdes...
Elle est à l’origine d’une augmentation de volume du rein avec hyperéchogénicité du parenchyme, présence de stries échogènes sur le trajet des veines interlobulaires se dirigeant vers le hile rénal, et
perte de différenciation corticomédullaire.
L’imagerie doppler
couleur visualise l’absence de flux dans la veine rénale.
La thrombose peut être étendue à la veine cave inférieure.
Syndrome néphrotique congénital type
finlandais :
Cette affection autosomique récessive a une incidence de 1/8 000 en
Finlande.
Elle est caractérisée par une protéinurie massive in utero,
et est liée à une mutation du gène de la néphrine, protéine
glomérulaire.
La sémiologie échographique comporte un
volumineux placenta et des gros reins chez le foetus.
Il peut
exister une anasarque foetale ou un simple oedème cutané et une
hypotrophie foetale.
L’affection se traduit par une élévation considérable de la
concentration sérique maternelle et amniotique
d’alphafoetoprotéine (au-dessus de 10 déviations-standards), qui
constitue un argument diagnostique.
Le dépistage génétique des
porteurs des deux mutations les plus fréquemment impliquées a
considérablement amélioré le diagnostic anténatal de cette affection
en Finlande.
L’accouchement a souvent lieu prématurément.
Syndrome néphrotique lié à une
sclérose mésangiale diffuse (SMD)
:
Son début est généralement postnatal.
La SMD peut être isolée ou
s’intégrer dans le DDS.
Comme le DDS, elle est secondaire à des mutations hétérozygotes
de séquences de la protéine WT1.
Le syndrome de Frasier, lié aussi
à une mutation du gène WT1, associe également un
pseudohermaphrodisme masculin (phénotype féminin avec
caryotype XY, dysgénésie gonadique comportant un risque de
gonadoblastome) à une glomérulopathie progressive débutant dans
l’enfance et comportant des lésions non spécifiques (sclérose
glomérulaire focale et segmentaire).
Forme anténatale du syndrome
de Bartter :
Le syndrome de Bartter est caractérisé par une alcalose métabolique,
avec hypokaliémie et hypochlorémie, une hypertrophie de l’appareil
juxtaglomérulaire associée à une hypersécrétion de rénine et
d’aldostérone sans élévation de la pression artérielle.
Ce syndrome
(dont au moins trois variantes phénotypiques allant du foetus à
l’adulte ont été décrites) est secondaire à un défaut génétique de
réabsorption du chlorure de sodium dans la branche ascendante de
l’anse de Henle.
Si la plupart des cas sont sporadiques, les cas
familiaux ont une transmission autosomique récessive.
La forme anténatale, appelée variant hypercalciurique et aussi
syndrome d’hyperactivité des prostaglandines E (PGE), est marquée
par un hydramnios commençant entre 24 et 30 semaines
d’aménorrhée, en rapport avec une polyurie foetale et conduisant à
un accouchement prématuré.
Il n’y a pas de retard de croissance
intra-utérin.
La concentration en chlore du liquide amniotique est
augmentée.
Éléments pronostiques dans les
affections réno-urinaires bilatérales
:
Les anomalies chromosomiques et les malformations associées
concernent plus de 20 % des uropathies obstructives diagnostiquées
en période anténatale et doivent donc être recherchées.
Ces anomalies graves ayant été dépistées, le pronostic est lié à
l’hypoplasie pulmonaire et à l’insuffisance rénale postnatale.
A - HYPOPLASIE PULMONAIRE
:
Elle est liée à l’anamnios dont la présence en est un signe indirect.
L’hypoplasie pulmonaire est d’autant plus sévère que l’anamnios
s’est installé plus tôt et a duré plus longtemps.
L’étude en doppler à
codage couleur de la vascularisation artérielle pulmonaire
périphérique pourrait constituer un signe direct additionnel.
B - INSUFFISANCE RÉNALE POSTNATALE
:
Elle est conditionnée par l’étendue et la sévérité des lésions de
dysplasie rénale (primitive et secondaire à l’obstruction urinaire).
Plus de la moitié des enfants porteurs en période anténatale d’une
obstruction urinaire basse ou bilatérale avec distension marquée des
voies urinaires auront une fonction rénale altérée, que l’échographie
et la biochimie urinaire et sérique cherchent à appréhender en
période foetale.
1- Échographie
:
Elle recherche des signes de dysplasie rénale :
– microkystes corticaux, dont la spécificité est de 100 %, la sensibilité
de 44 %, la valeur prédictive positive (VPP) de 100 %, la valeur
prédictive négative (VPN) de 56 % dans l’identification d’une
dysplasie ;
– hyperéchogénicité rénale, qui a une spécificité de 80 %, une
sensibilité de 74 %, une VPP de 89 %, une VPN de 57 %.
Lorsque ces signes sont présents, il existe un oligoamnios ou un
anamnios, témoins d’une altération de la fonction rénale et de la
diurèse foetale.
À l’inverse, l’absence d’oligoamnios n’est pas le garant d’une
fonction rénale postnatale normale.
2- Biochimie urinaire foetale
:
Elle étudie la fonction rénale foetale.
L’urine foetale normale reste
hypotonique (osmolalité de 100 à 250 mosm/kg H2O) par rapport
au sérum foetal tout au long de la grossesse.
À partir de 20 semaines
d’aménorrhée, la maturation tubulaire jointe à l’augmentation du
nombre de néphrons s’accompagne d’une diminution de la
concentration urinaire de sodium (50 ± 9 mmol/L à 32 semaines
d’aménorrhée), de b2-microglobuline (b-2-MG) (0,96 ± 1,2 mg/L à
32 semaines d’aménorrhée), d’une augmentation de la concentration
urinaire de calcium et des composés azotés (urée, créatinine et
ammoniaque).
L’urine foetale est prélevée à l’aiguille, sous contrôle échographique
et anesthésie locale, dans la vessie, ou mieux, dans les deux bassinets
en évitant toute contamination sanguine.
La ponction d’un seul
bassinet doit intéresser le moins dilaté.
Si des urines hypertoniques, une concentration de sodium
supérieure à 75 mmol/L, une concentration de b-2-MG au-dessus
de 12 mg/L sélectionnent les formes létales, il existe une « zone
intermédiaire » (sodium < 75 mmol/L et b-2-MG entre 2 et
12 mg/L), où le pronostic fonctionnel rénal postnatal est incertain.
La concentration amniotique supérieure à celle du sérum maternel
de protéines de bas poids moléculaire (< 40 000), telles les microglobulines, témoigne de leur origine foetale.
Les concentrations amniotiques de a1-microglobuline (a-1-MG) et
de b-2-MG restent stables entre 17 et 22 semaines d’aménorrhée puis
diminuent progressivement au cours du dernier trimestre de la
grossesse, témoignant de la maturation de la fonction tubulaire
foetale.
Si la concentration urinaire foetale de b-2-MG constitue
un index de fonction tubulaire, sa concentration sérique (N <=
3,2 mg/L) est un reflet de la filtration glomérulaire et contribue à
appréhender la fonction rénale foetale.
La pertinence de la biochimie urinaire ou sérique foetale dans
l’appréciation du pronostic fonctionnel rénal postnatal a été
critiquée.
L’évaluation de ce pronostic devant une uropathie
bilatérale à caryotype normal reste une préoccupation en période
anténatale.
L’étude histologique de fragments biopsiques rénaux
prélevés in utero a été proposée dans l’évaluation des lésions
rénales, mais l’interprétation doit prendre en compte la qualité du
prélèvement, l’âge gestationnel et le caractère éventuellement
focalisé des lésions.
Enfin, des thérapeutiques foetales visant à lever l’obstacle
(dérivations uroamniotiques, chirurgie foetale ex utero, chirurgie
foetale endoscopique) et à limiter ainsi la détérioration
de la fonction rénale ont pu être proposées dans des cas sélectionnés.
Le bénéfice de ces gestes, comparé au risque de morbidité foetale
qu’ils induisent et à l’évolution spontanée de ces uropathies, reste à
démontrer.
Malformations réno-urinaires
et génétique
:
Des malformations réno-urinaires sont impliquées dans de
nombreuses aberrations chromosomiques et syndromes
polymalformatifs.
A - MALFORMATIONS RÉNO-URINAIRES
ET ABERRATIONS CHROMOSOMIQUES
:
Les malformations réno-urinaires représentent 25 % des indications
de caryotype foetal pour malformation foetale isolée, et la fréquence
des anomalies chromosomiques serait de 3,5 %.
Cette fréquence
passe à 22,5 % lorsque la malformation de l’appareil urinaire est
associée à d’autres malformations.
Les aberrations chromosomiques les plus fréquemment rencontrées
sont les trisomies 21, 13, 18 et le syndrome de Turner.
B - MALFORMATIONS RÉNO-URINAIRES
ET SYNDROMES MALFORMATIFS
:
Des anomalies rénales et/ou des voies excrétrices se rencontrent
dans des syndromes ou associations malformatives intéressant
sélectivement la face, le tube neural, le squelette, le coeur, les
extrémités et l’appareil génital.
La découverte à l’échographie d’une anomalie réno-urinaire doit
faire rechercher attentivement d’autres anomalies pouvant faire
suggérer un syndrome génétique.
Mais la reconnaissance de ces syndromes par l’imagerie
échographique n’est pas toujours aisée, car pour un syndrome
donné la malformation réno-urinaire n’est ni univoque, ni
spécifique, ni constante, et les malformations associées définissant le
syndrome ne sont pas constamment accessibles à l’imagerie
échographique.
L’étude des antécédents familiaux est ici importante,
pouvant orienter le diagnostic.
En revanche, devant un antécédent familial de syndrome
malformatif avec malformation réno-urinaire inconstante, la
présence chez le foetus de cette dernière constitue un argument en
faveur du diagnostic.
Devant une association malformative non clairement « étiquetée »,
il convient de réaliser un caryotype foetal, de demander un conseil
génétique clinique, de conserver de l’ADN foetal et/ou d’établir une
lignée cellulaire, et de demander un examen périnatal
foetoplacentaire spécialisé en cas d’interruption de la grossesse.
Glandes surrénales foetales
:
Les glandes surrénales foetales coiffent les pôles supérieurs des reins.
Leur forme (triangulaire en coupe sagittale, discoïde en coupe
transversale, en V en coupe longitudinale), leur taille et leur échostructure (corticale hypoéchogène, médullaire étroite et
échogène) les distinguent aisément des reins.
Elles sont bien
visualisées à partir de 28-30 semaines d’aménorrhée.
Chez le foetus,
la glande surrénale droite est mieux visualisée que la gauche, son
pôle supérieur vient derrière la veine cave inférieure et sa face
antérieure est en contact avec le foie.
La surrénale gauche contracte
des rapports intimes avec l’aorte, la rate et l’estomac.
Les vaisseaux
surrénaux sont visualisés en doppler à codage couleur ou en
doppler énergie dans plus de 80 % des cas.
La résistance artérielle
diminue avec l’âge gestationnel.
La pathologie de la surrénale regroupe : le neuroblastome, le kyste,
l’hématome, l’hyperplasie et l’hypoplasie congénitales.
A - NEUROBLASTOME
:
C’est une tumeur maligne embryonnaire du tissu sympathique
observée chez l’enfant en bas âge.
Sa fréquence est rare, d’environ
un cas par an pour 100 000 enfants.
Chez le foetus, la localisation
surrénale (à partir du tissu médullaire) est la plus fréquente (environ
70 % des cas).
Mais elle peut prendre naissance n’importe où dans
le tissu ganglionnaire sympathique, dans l’abdomen au niveau des
ganglions rétropéritonéaux.
Le diagnostic est évoqué tardivement au cours du 3e trimestre de la
grossesse.
La sémiologie échographique est celle d’une tumeur rétropéritonéale
suprarénale bien limitée, localisée le plus souvent à droite, d’aspect :
– échogène ;
– hétérogène ;
– ou kystique dont la périphérie peut être soulignée par un
liseré de calcifications.
Ces aspects peuvent se succéder dans le temps.
Le doppler à codage couleur peut objectiver un flux artériel à basse
résistance en faveur d’un syndrome tumoral, mais il existe des
formes avasculaires.
D’autres pathologies de la surrénale peuvent avoir un aspect
identique : le kyste et surtout l’hématome de la surrénale, qui
survient plus volontiers en période néonatale.
Le diagnostic différentiel est dans la forme tumorale kystique
celui :
– d’une dilatation du pyélon supérieur d’une duplication rénale ;
– de la forme kystique de la tumeur de Wilms ;
– d’un kyste neuroentérique (qui comporte une anomalie
vertébrale).
Dans les formes hétérogènes et solides, il concerne :
– la séquestration pulmonaire sous-diaphragmatique, qui siège plus
fréquemment à gauche, visualisée dès le 2e trimestre, et dont le
pédicule artériel provient de l’aorte thoracique ;
– le tératome rétropéritonéal ;
– l’exceptionnel « foetus in foetus » dont le diagnostic peut être fait
si un axe rachidien est présent dans la tumeur.
La surveillance échographique porte sur la taille de la tumeur et le
dépistage des complications.
Un hydramnios et surtout une anasarque foetoplacentaire peuvent
se voir lorsqu’il existe des métastases hépatiques avec
hépatomégalie.
Le neuroblastome peut également métastaser au
placenta et aux vaisseaux ombilicaux.
Un hémopéritoine foetal peut
survenir lors de l’accouchement.
Les complications maternelles à type d’hypertension artérielle,
d’épisodes de sueurs, palpitations, vasodilatation et diarrhée liées
au passage dans la circulation maternelle de catécholamines foetales
sont rares, car le neuroblastome est rarement sécrétant.
Les malformations associées sont peu fréquentes.
Le pronostic des neuroblastomes survenant avant l’âge de 1 an est
bon.
Le traitement postnatal repose, après stadification, sur l’exérèse de
la tumeur.
La possible régression tumorale spontanée a pu faire
envisager une attitude première d’expectative sous surveillance.
Une
telle attitude pourrait être concevable devant l’absence de
paramètres biologiques péjoratifs étudiés sur un fragment tumoral biopsié à l’aiguille.
Les éléments biologiques de bon pronostic sont :
– l’absence d’amplification et d’hyperexpression de l’oncogène
Nmyc ;
– l’absence de délétion allélique 1p36 (locus d’un gène suppresseur
de tumeur) ;
– un contenu tumoral en ADN supérieur à 2n.
Enfin, des formes occultes de neuroblastomes surrénaux
spontanément régressifs ont été décrites. Bien que rares dans ces
formes, des métastases hépatiques révélatrices ont été rapportées.
Leur présence doit faire examiner avec soin les régions où existent
des dérivés des crêtes neurales.
B - HÉMATOME
:
Il a une sémiologie échographique comparable à celle du neuroblastome et évolue en général vers une image kystique.
C - HYPERPLASIE CONGÉNITALE DES SURRÉNALES
:
Elle est liée à un déficit héréditaire autosomique récessif de la
biosynthèse du cortisol.
Cette pathologie est évoquée chez le foetus
devant une ambiguïté sexuelle.
En période anténatale, il n’a pas été
mis en évidence d’anomalie de l’échostructure ou de la biométrie
des surrénales.
D - HYPOPLASIE CONGÉNITALE DES SURRÉNALES
:
Elle est due à une anomalie rare du développement du cortex
surrénal de transmission autosomique récessive, ou lié au
chromosome X.
Ces deux formes diffèrent sur le plan histologique :
pauvreté cellulaire du cortex dans la forme autosomique récessive,
anomalies de la différenciation cellulaire et de l’architecture du
cortex dans la forme liée à l’X.
Le diagnostic d’hypoplasie surrénale par imagerie échographique
n’a pas été rapporté chez le foetus.
La forme liée au chromosome X, due à des délétions ou des
mutations du gène DAX-1, est responsable d’un syndrome de
perte de sel avec pigmentation marquée chez un garçon en période
néonatale, symptomes identiques à ceux de l’hyperplasie congénitale
des surrénales par déficit en 21-hydroxylase.
La présence dans ce contexte d’une cryptorchidie, qui est la
traduction précoce de l’hypogonadisme hypogonadotrope
fréquemment associé, constitue un signe en faveur du diagnostic
d’hypoplasie congénitale des surrénales.
Conclusion
:
Les anomalies réno-urinaires congénitales sont fréquentes, et
l’incidence des uropathies foetales est de 1 pour 600 à 800 grossesses.
L’apport de l’imagerie prénatale est majeur dans les uropathies graves
où elle permet de proposer l’interruption de la grossesse, et dans la
détection de nombreuses uropathies foetales dont l’histoire naturelle est
mal connue, souvent asymptomatiques en période néonatale et
reconnues tardivement au stade de lésions séquellaires.
Le dépistage foetal de telles uropathies permet une prise en charge postnatale adaptée
et une réduction de la morbidité qui leur est liée.
Quant aux images de signification incertaine, seul un suivi vigilant
permet d’en affirmer le caractère fonctionnel, certes au prix d’une
angoisse chez les parents parfois à l’origine de gestes invasifs en période
prénatale et d’un suivi médical postnatal trop actif.
Néanmoins, le bilan global de l’imagerie échographique réno-urinaire
est positif.