La pathologie urinaire foetale représente une part importante dans
le dépistage anténatal des malformations, à hauteur de 30 % dans les séries importantes.
Elle touche plus souvent les garçons
67 %.
La fréquence globale des malformations urogénitales est estimée à
5/1 000 naissances.
De découverte le plus souvent systématique lors des échographies
des deuxième et troisième trimestres, on peut les classer en séparant
les atteintes du parenchyme rénal de celles des voies excrétrices.
Leur détection s’est récemment améliorée, est faite plus
précocement, mais certaines pathologies échappent au diagnostic
anténatal, comme le reflux vésico-urétéral.
On observe ces dernières années une augmentation de la fréquence
de dépistage des pathologies mineures.
L’échographie anténatale tente une évaluation pronostique de la
malformation : l’anomalie est-elle uni- ou bilatérale ?
Est-elle isolée
ou associée à d’autres malformations (20 %) ?.
On différencie les
pathologies graves (syndrome malformatif souvent chromosomique,
pathologie bilatérale du parenchyme rénal, mégavessie de révélation
précoce), des pathologies curables (dysplasie multikystique
unilatérale, uropathie obstructive).
Les pathologies graves létales
sont de diagnostic plus précoce que les uropathies obstructives
curables.
Le pronostic des uropathies obstructives bilatérales est
fonction de leur retentissement sur la fonction rénale : celle-ci est
mal évaluée en anténatal, sauf dans les cas de gravité extrême.
Tractus urinaire normal
:
L’évaluation anatomique du tractus urinaire foetal est indissociable
de l’appréciation du volume de liquide amniotique.
Celle-ci est
subjective et la présence d’un oligoamnios oriente vers une
pathologie de l’arbre urinaire s’il n’existe pas de rupture prématurée
des membranes.
Ce signe donne un argument pronostique péjoratif à une uropathie
malformative.
A - REINS
:
Dès le premier trimestre, les reins sont visibles et leur parenchyme
est hyperéchogène.
Aux deuxième et troisième trimestres, ils sont
explorés en coupes axiale transverse, sagittale et frontale.
La mesure
du diamètre antéropostérieur du pyélon s’effectue sur un plan de
coupe axial transverse.
Les courbes de biométrie rénale ont été
établies dans ses trois dimensions.
En pratique, la biométrie
rénale n’est réalisée que s’il existe un signe d’appel inhabituel sur
l’anatomie de l’arbre urinaire.
La différenciation corticomédullaire est bien analysable sur un plan
de coupe longitudinal et frontal : les pyramides de Malpighi sont
hypoéchogènes par rapport aux colonnes de Bertin et au cortex
rénal.
L’absence de différenciation corticomédullaire à 24 semaines
est suspecte.
L’épaisseur du parenchyme rénal varie de 5 mm au deuxième
trimestre à 10 mm au troisième trimestre.
En doppler couleur,
le pédicule vasculaire de chaque rein est repérable, de même que la
vascularisation intraparenchymateuse.
B - VESSIE
:
Elle est visualisable dès la 13e semaine d’aménorrhée (SA).
Elle est
médiane, piriforme au deuxième trimestre.
Au troisième trimestre,
sa paroi est fine et son volume variable suivant le cycle mictionnel.
Des courbes de diurèse horaire foetale ont été établies.
C - URETÈRES
:
Ils ne sont pas visibles à l’état normal, sauf au niveau de la portion
juxtarénale.
Circonstance de découverte
:
Elle est fortuite, dans la très grande majorité des cas,
exceptionnellement au premier trimestre, essentiellement au cours
des examens systématiques du deuxième et du troisième trimestres
de la grossesse.
Rarement, il existe un risque génétique connu,
comme par exemple certains syndromes autosomiques récessifs : polykystose hépatorénale, syndrome de Meckel, syndrome
d’Ivemark II.
Enfin, les signes d’appel échographiques peuvent
orienter vers la recherche d’une anomalie du tractus urinaire :
l’oligoamnios à partir de 18 SA est évocateur d’une anomalie rénale
s’il n’existe pas de rupture prématurée des membranes.
Certaines anomalies peuvent faire rechercher une pathologie rénale :
artère ombilicale unique, anomalie rachidienne lombosacrée,
anomalie des organes génitaux externes.
Il faut penser à la rare
association malformative VATER quand existent une anomalie
rénale, une anomalie du rayon radial, une anomalie rachidienne et
une artère ombilicale unique.
Atteinte parenchymateuse
:
Si l’atteinte parenchymateuse est bilatérale, le signe d’appel
échographique est un oligoamnios, voire un anamnios dès la
22e SA.
A - ANOMALIES DE NOMBRE
:
1- Agénésie rénale bilatérale
:
Sa fréquence est de 1/3 000 à 1/4 000 naissances, dont 70 % des
garçons.
L’échographie morphologique du deuxième trimestre est
gênée par un oligoamnios sévère.
La vessie n’est pas visualisée lors
d’un examen prolongé.
Il peut être difficile d’affirmer l’absence de
structure parenchymateuse rénale dans les fosses lombaires.
Les surrénales, volumineuses à ce terme, peuvent être considérées à
tort comme des structures rénales.
Le doppler couleur objective
l’absence de pédicule rénal et le trajet parallèle des deux artères
ombilicales en région pelvienne.
Le diagnostic différentiel
n’est souvent pas fait entre hypoplasie rénale majeure bilatérale,
syndrome de régression caudale et sirénomélie.
On peut proposer
une amnio-infusion pour compléter l’étude morphologique foetale
(instillation intra-amniotique de sérum physiologique, en milieu
spécialisé).
La séquence oligoamnios qui le caractérise n’est en
général pas décelable à l’échographie : faciès de Potter (nez écrasé,
oreilles bas implantées, rétrognathie, cou court), déformation des
membres et dimension thoracique réduite (hypoplasie pulmonaire).
L’interruption médicale de grossesse (IMG) est proposée dès que le
diagnostic d’agénésie rénale bilatérale est porté.
2- Agénésie rénale unilatérale
:
Elle est dépistable au deuxième trimestre, à condition d’effectuer une
exploration rigoureuse des deux loges rénales.
En fin de grossesse, l’aire rénale la plus profonde est souvent difficile à imager.
Les
images coliques occupent la fosse lombaire vide et le rein
controlatéral est souvent le siège d’une hypertrophie compensatrice.
Une ectopie rénale, difficile à déceler, est à rechercher.
B - ANOMALIES DE VOLUME ET DE STRUCTURE
:
1- Hypoplasie rénale
:
Elle correspond à un rein de petite taille en rapport avec une
anomalie de son développement.
En cas d’hypoplasie simple, uni- ou bilatérale, la différenciation corticomédullaire est respectée et la fonction rénale normale.
Les
formes unilatérales mineures ne sont en général pas dépistées en
anténatal.
En revanche, les hypoplasies importantes et bilatérales
peuvent être associées à un oligoamnios et à un risque d’insuffisance
rénale en période néonatale.
L’hypoplasie rénale segmentaire n’est pas décrite en anténatal.
2- Dysplasie rénale
:
Elle est définie par un arrêt du développement embryonnaire
normal du rein avec différenciation anormale du tissu métanéphrogène, et doit être distinguée de l’hypoplasie simple.
– Hypodysplasie.
Le rein est petit et le parenchyme rénal est plus échogène que le
foie.
Il existe une dédifférenciation corticomédullaire et des
microkystes répartis de façon non systématisée au sein du
parenchyme rénal.
– Dysplasie multikystique.
Il semblerait actuellement qu’elle soit une forme extrême de
dysplasie obstructive.
Dans sa forme typique, le plus souvent
unilatérale (75 %), dépistée au deuxième trimestre car volumineuse,
cette masse est constituée de kystes transsonores de taille inégale,
juxtaposés, séparés par des travées hyperéchogènes fibreuses.
Le
bassinet n’est pas repérable et il n’existe pas de structure
parenchymateuse rénale normale.
En cas de duplication, la dysplasie peut n’intéresser qu’un pôle
rénal, souvent le supérieur.
Des formes atypiques sont décrites : la forme en couronne ou pseudohydronéphrotique où les kystes semblent répartis de façon
systématisée en zone sous-capsulaire ; les formes atrophiques ou
hypoplasiques, où le rein se résume à quelques petites structures
kystiques contiguës.
La fonction rénale dépend du rein controlatéral
qui présente souvent une hypertrophie compensatrice.
L’évolution
des reins dysplasiques est variable, souvent vers l’involution
spontanée.
L’atteinte bilatérale est possible, révélée par un oligoamnios au
deuxième trimestre.
Elle rentre le plus souvent dans le cadre de
syndromes malformatifs.
Le syndrome de Meckel est le plus
fréquent : à l’anomalie rénale, s’ajoutent une encéphalocèle et une
hexadactylie dans 50 % des cas.
Dans les formes bilatérales, un caryotype foetal et une IMG sont
proposés.
Dans les formes unilatérales, la pratique d’un caryotype
est discutée en cas de rein multikystique isolé chez la fille (risque multiplié
par quatre).
Il faut
explorer ces enfants à la naissance pour ne pas négliger une
pathologie obstructive ou de reflux du rein controlatéral (un
tiers des cas).
3- Néphromégalies
:
– Néphromégalies à parenchyme rénal normal :
– hypertrophie simple unilatérale : elle correspond à
l’augmentation de taille d’un rein du côté opposé à une anomalie
fonctionnelle controlatérale (agénésie, hypoplasie, dysplasie).
Cette hypertrophie est dite compensatrice ;
– hypertrophie rénale dans le cadre d’une viscéromégalie :
macrosplanchnie du syndrome de Wiedemann et Beckwith, qui
associe une dysmorphie craniofaciale avec macroglossie, une
omphalocèle ou hernie ombilicale, une hémihypertrophie
corporelle au niveau des membres.
Le rapport circonférence
rénale/circonférence abdominale n’est pas modifié.
– Néphromégalie à parenchyme échogène :
– polykystose autosomique récessive : elle se définit par
l’association entre deux reins augmentés de volume qui
présentent des dilatations kystiques des tubes collecteurs et une
atteinte hépatique avec fibrose périportale et ectasie des canaux
biliaires intrahépatiques. Seule l’atteinte rénale est visible en échographie anténatale.
Dans la forme typique, le diagnostic est
évoqué au deuxième trimestre devant un oligoamnios, une vessie
de petite taille et deux reins très augmentés de volume,
hyperéchogènes, sans différenciation corticomédullaire. Les
formes avec oligoamnios sévère sont de mauvais pronostic : le
décès néonatal par hypoplasie pulmonaire ne s’observe plus,
l’interruption de grossesse étant réalisée le plus souvent au
deuxième trimestre.
Mais cette pathologie est à pénétrance
variable et il existe des formes mineures où le volume de liquide
amniotique est normal et les reins échogènes, peu augmentés de
volume, avec ou sans différenciation corticomédullaire.
Dans ces
cas, la poursuite de la grossesse est justifiée, la famille étant
informée du risque d’insuffisance rénale précoce avec éventualité
secondaire de greffe rénale ;
– polykystose de type adulte, autosomique dominante : elle est
rarement de révélation anténatale.
Elle a alors le même aspect
échographique qu’une forme mineure de polykystose récessive.
Parfois, de petites zones kystiques à la limite de visibilité sont
présentes au sein du parenchyme rénal hyperéchogène.
Il est
important de réaliser une échographie rénale des ascendants
(parents et grands-parents) qui peut découvrir une atteinte
parentale méconnue.
– Syndromes malformatifs.
Plus rares, ils comportent des reins échogènes plus ou moins
augmentés de taille :
– trisomie 13 : les reins sont souvent augmentés de volume, échogènes, avec défaut de différenciation corticomédullaire.
Des anomalies associées sont fréquentes ;
– syndrome d’Ivemark II autosomique récessif : le diagnostic
différentiel avec la polykystose rénale récessive est le plus souvent
foetopathologique, sauf en cas de récurrence ;
– chondrodysplasie de Jeune : elle associe une micromélie
modérée, un thorax étroit et des reins échogènes dédifférenciés ;
– syndrome de Laurence Moon-Bardet-Biedl : il associe aux reins
hyperéchogènes une hexadactylie postaxiale ;
– syndrome néphrotique de type finlandais, autosomique
récessif : il associe des reins échogènes modérément augmentés
de volume et une hypotrophie fréquente.
4- Reins échogènes idiopathiques
:
Cette entité a été décrite récemment.
Les reins sont de taille
modérément augmentée ou normale, le parenchyme rénal est échogène sans microkyste et la différenciation corticomédullaire
normale.
Le volume de liquide amniotique reste normal tout au long
de la grossesse.
Le pronostic est le plus souvent bon lorsqu’il
n’existe pas de malformation associée, que le caryotype foetal est
normal, que l’enquête familiale est négative. Une surveillance et
une prise en charge postnatales par un néphrologue-pédiatre sont
conseillées.
L’échographie postnatale identifie, soit la régression de
l’hyperéchogénicité parenchymateuse et l’évolution vers la
normalité, soit au contraire l’apparition de pathologies une fois sur
deux pour Estroff (série de 19 foetus : 14 survies, sept pathologies
ultérieures) : dysplasie, hydronéphrose, microkystes faisant évoquer un risque évolutif vers une polykystose dominante.
Seul le
suivi postnatal à long terme de ces enfants permet de mieux
comprendre ces pathologies rénales pédiatriques.
C - ANOMALIES DE POSITION
:
La dystopie ou anomalie de rotation du rein n’est pas décrite en
anténatal.
Les ectopies : le rein peut être en ectopie haute, ectopie basse ou
ectopie croisée.
L’absence de visualisation d’un rein dans la fosse
lombaire doit faire rechercher un rein ectopique, le plus souvent au
niveau pelvien, le long de l’axe de migration embryologique.
Ce rein
ectopique peut être dysplasique et il s’associe à une hypertrophie
compensatrice du rein controlatéral normal.
Une artère
ombilicale unique est souvent associée.
Le diagnostic d’ectopie
croisée est rarement porté en anténatal ; il peut être confondu avec
une duplication rénale.
D - ANOMALIES DE FORME
:
Elles sont rarement évoquées en anténatal.
Le rein en « fer à cheval »
peut être visualisé sur des coupes axiales transverses pour tenter
d’identifier le pont parenchymateux prérachidien réunissant le plus
souvent les pôles inférieurs.
Les anomalies de position et de forme peuvent être le signe d’appel
d’un syndrome polymalformatif.
Il est conseillé de réaliser un
caryotype foetal.
E - TUMEURS RÉNALES
:
Les tumeurs rénales de révélation anténatale sont très rares.
La néphroblastomatose, localisée ou diffuse, se caractérise par un
aspect anormal hypoéchogène homogène du parenchyme rénal.
Le néphrome mésoblastique ou tumeur de Bolande représente 20 à
50 % des tumeurs rénales du nouveau-né.
Elle peut se révéler au
troisième trimestre par une masse d’échostructure solide arrondie qui déforme les contours du rein.
Cette tumeur est toujours
unilatérale et son pronostic est excellent lorsque l’exérèse a pu être
complète.
Il est impossible de la différencier d’un néphroblastome,
encore plus rare, qui peut être bilatéral.
En diagnostic différentiel, on discute essentiellement les tumeurs extrarénales : tératome, neuroblastome, hématome de la surrénale.
Une structure kystique sus-rénale fait discuter, soit un hématome de
la surrénale dont l’évolution est en général régressive, soit un
neuroblastome qui augmente de taille lors du suivi.
Uropathies
obstructives :
A -
HAUT APPAREIL :
Les
dilatations liquidiennes facilement repérables en échographie
sont les manifestations sus-jacentes à un obstacle dont le
niveau n’est pas repéré par l’échographie s’il est intrinsèque.
1- Pyélon physiologique
:
Il faut distinguer la visibilité physiologique du bassinet, toujours extrasinusale, des pyélectasies ; valeur seuil de 4 mm au deuxième
trimestre et de 7 mm au troisième trimestre pour Anderson, de
5 mm pour Jawson.
2- Pyélectasies
:
Définies par un diamètre pyélique antéropostérieur de 5 à 10mm
mesuré dans un plan axial, elles sont fréquentes : 24 % de 1 987
dossiers recueillis de 1980 à 1992.
Elles ont été considérées comme
un signe d’appel de trisomie 21 au deuxième trimestre.
Il semble
que lorsque la pyélectasie est vraiment isolée, sans aucun signe
mineur associé, il n’y ait pas d’indication à la pratique d’un
caryotype (risque inférieur à 1/340 d’après Seeds).
Leur
signification n’est pas univoque : soit variante morphologique qui
régresse en période postnatale, soit expression modérée ou
débutante d’une authentique uropathie : reflux, mégauretère,
hydronéphrose.
Une dilatation pyélocalicielle variable dans
le temps de l’examen échographique ou d’un examen à l’autre, qui
se majore lors d’une miction foetale, est en faveur d’un reflux
vésico-urétéral.
Droullé décrit des petits signes d’organicité : visibilité des tiges
calicielles, dilatation pyélique en bissac (portion intrarénale dilatée),
image fugace des uretères sous-jacents.
Une exploration néonatale
est alors nécessaire : échographie postnatale à partir du sixième jour
de vie, éventuellement complétée par une urétrocystographie.
Sur 104 pyélons supérieurs ou égaux à 5 mm, Jawson observe
22 % de reflux vésico-urétéral.
Parmi les 116 foetus à dilatation pyélique modérée de la série de Lepercq, 43 % sont régressives et
comportent un quart de reflux vésico-urétéraux dont la moitié sont
opérés.
3- Hydronéphrose
:
Elle se caractérise par une dilatation pyélique associée à une
dilatation calicielle qui, lorsqu’elle est marquée, s’accompagne d’une
diminution de l’épaisseur corticale rénale.
L’étiologie la plus
fréquente est le syndrome de jonction pyélo-urétérale, deux fois plus
fréquente chez le garçon, à gauche dans deux tiers des cas, et
bilatérale dans 10 à 40 % des cas.
La dilatation se majore au troisième
trimestre (augmentation du volume de la diurèse) : le pyélon est
globuleux avec aspect convexe du bord inférieur et les calices sont
dilatés en « boule ».
Il n’existe pas de visibilité urétérale.
Le diagnostic différentiel avec une dysplasie multikystique est en
général aisé : calices dilatés de taille équivalente, bordés en dehors
par du parenchyme rénal plus ou moins laminé selon le degré de
l’obstruction, communiquant en dedans avec le pyélon central dilaté.
L’hydronéphrose sur duplication rénale se manifeste par une
dilatation pyélocalicielle du pyélon supérieur, mais un syndrome de
jonction pyélo-urétérale est possible sur le pyélon inférieur.
Compte tenu de l’augmentation physiologique de la sécrétion rénale
au troisième trimestre, une diminution de volume de la dilatation
en fin de grossesse pourrait être un élément pronostique péjoratif.
Selon le degré de dilatation pyélique, certains auteurs ont voulu
déterminer un groupe à risque nécessitant une prise en charge
chirurgicale : pour Blachar, un diamètre antéropostérieur du
bassinet supérieur ou égal à 9 mm au deuxième trimestre et un
rapport diamètre pyélique/diamètre rénal transverse à 0,45 avant
32 semaines prédit un « risque chirurgical » (69 enfants entre 1987 et
1991).
Pour Gotoh, un diamètre pyélique antéropostérieur
inférieur à 20 mm entre 30 et 40 semaines n’est pas chirurgical (suivi
anté- et postnatal de seulement 36 foetus).
Pour Lepercq et Droullé,
la moitié des dilatations stables sont opérées.
4- Méga-uretères
:
Ils correspondent aux dilatations congénitales de l’uretère, qu’elles
soient obstructives (méga-uretère primitif) ou au contraire
secondaires.
Les dilatations urétérales sont au mieux analysées sur
les coupes frontales rétropéritonéales : image liquidienne sinueuse
située entre les loges rénales et la vessie.
La dilatation
urétérale peut passer inaperçue lorsqu’elle est localisée au pelvis.
L’échographie anténatale fait rarement le diagnostic étiologique d’un méga-uretère : il est, soit primitif obstructif lié à une anomalie
organique ou fonctionnelle de la jonction urétérovésicale, soit
secondaire à un obstacle sous-jacent (valve de l’urètre ou vessie neurogène) ou à un reflux vésico-urétéral qu’il est difficile d’affirmer
en anténatal et qui peut être suspecté sur la variabilité de dilatation
urétéropyélique d’un moment à l’autre de l’examen ou d’un examen
à l’autre.
5- Duplication de la voie excrétrice
:
Ces anomalies sont très fréquentes, souvent asymptomatiques.
La
duplication rénale peut être évoquée dans la deuxième moitié de la
grossesse devant la présence d’un rein de grande taille qui présente
deux sinus séparés par un pont parenchymateux (coupe sagittale) et
souvent une urétérohydronéphrose d’un pôle rénal.
L’échographie anténatale peut suspecter une duplication complète
compliquée :
– pathologie du pôle supérieur : l’abouchement de l’uretère du pyélon supérieur est ectopique et la sténose fréquente du méat est
responsable d’une urétérocèle parfois bilatérale (image liquidienne
finement cerclée intravésicale).
Si l’urétérocèle est basse, elle peut
être obstructive et entraîner une urétérohydronéphrose sus-jacente
dont la conséquence peut être une dysplasie rénale du pôle
supérieur ;
– pathologie du pôle inférieur : l’orifice vésical est souvent en
ectopie intravésicale haute et à l’origine d’un reflux vésico-urétéral
à risque de néphropathie de reflux de gravité variable.
Un syndrome
de la jonction pyélo-urétérale est la seconde complication.
6- Urétérocèles
:
L’échographie anténatale n’est pas très fiable pour différencier
l’urétérocèle intravésicale des urétérocèles ectopiques.
L’urétérocèle intravésicale simple sur uretère unique est la plus fréquente.
L’association d’une duplication rénale et d’une urétérocèle fait
penser à une urétérocèle ectopique développée le plus souvent sur
l’uretère supérieur d’une duplication totale.
B - BAS APPAREIL : MÉGAVESSIES
Il faut les différencier d’une vessie normale remplie : au troisième
trimestre, elle peut atteindre 5 à 6 cm de hauteur.
La paroi est fine,
les reins sus-jacents sont d’aspect normal, de même que le liquide
amniotique.
La constatation d’une miction confirme le diagnostic de
normalité.
1- Valves de l’urètre postérieur (VUP)
:
L’obstacle (coalescence des freins inférieurs du veru montanum,
diaphragme urétral), plus ou moins obstructif, se situe sur l’urètre
postérieur, et bien sûr chez le garçon.
Sa fréquence est de 1/5 000 à
1/10 000.
La vessie, de grande taille, est visible dès le deuxième
trimestre, augmente progressivement : elle prend les caractéristiques
d’une vessie de lutte, avec paroi épaisse.
Un récessus vésical
inférieur est visible sur le plan frontal : il correspond à la dilatation
de l’urètre postérieur.
Le retentissement d’amont est d’importance
variable : urétérohydronéphrose bilatérale, parfois asymétrique.
Le pronostic est péjoratif si l’obstacle, survenu précocement, se
manifeste par un retentissement en amont important, entraînant un oligoamnios progressif avec risque de dysplasie rénale secondaire.
Il est difficile d’analyser l’échostructure d’un parenchyme laminé,
mais on évoque une dysplasie s’il est hyperéchogène et présente
des microkystes.
Celle-ci est confirmée par une exploration
biochimique des urines foetales prélevées aseptiquement sous
contrôle échoguidé : les dosages des principaux paramètres étudiés
sont au-delà des seuils déterminés : Na+ supérieur à 75 mEq/L, bêta-
2-microglobuline supérieure à 10 mg/L, ou supérieure à 6 mg/L
après 20 SA.
En dehors de ces situations où tous les signes de gravité sont réunis,
il n’est pas possible actuellement d’évaluer en anténatal le pronostic
rénal d’une uropathie obstructive patente et bilatérale : les ponctions
d’urine foetale sont discutées dans les situations intermédiaires car
les derniers résultats ont montré des discordances qui risquent de
rassurer par excès ou d’inquiéter inutilement les couples sur l’avenir
rénal de leur enfant.
L’évaluation de la bêta-2-microglobuline
plasmatique foetale après cordocentèse paraît donner le meilleur
critère de filtration glomérulaire.
Elle reste en cours de validation
quant à sa valeur pronostique sur la fonction rénale postnatale.
L’absence de signe de gravité anténatal est corrélée à l’absence
d’altération de la fonction rénale dans la petite enfance (30 VUP avec
suivi anté- et postnatal 1989-1996).
2- Mégavessie par reflux
:
La vessie a des contours hypotoniques et une paroi le plus souvent
fine, avec des méga-uretères bilatéraux et une hydronéphrose de
degré variable.
Le reflux se vidange dans la vessie qui ne se vide
jamais complètement.
Le diagnostic différentiel avec les VUP est
difficile.
3- Autres étiologies des mégavessies
:
Elles sont plus rares.
Deux diagnostics sont évoqués en fin de
premier trimestre devant une mégavessie importante et
permanente :
– l’atrésie urétrale : la mégavessie est visible dès la 13e SA,
l’hydronéphrose apparaît en début de deuxième trimestre et
l’oligoamnios seulement à partir de 18 SA.
Elle peut être associée à
une trisomie 18 ;
– le syndrome de Prune-Belly, dans sa forme majeure : rare (1 sur
40 000), il touche le garçon.
À la mégavessie s’associe une hypoplasie
des muscles de la paroi abdominale, une urétérohydronéphrose
bilatérale précoce et une cryptorchidie.
Dans ces formes graves, l’IMG est proposée après la pratique d’un
caryotype lorsqu’il existe des signes de gravité : anamnios, signes
échographiques de dysplasie rénale.
Le syndrome mégavessie-microcôlon est rare, autosomique récessif,
et intéresse les filles.
Il faut penser à évaluer la morphologie et la
taille coliques.
La mégavessie d’origine neurologique est exceptionnelle et
secondaire à une dysraphie spinale ouverte lombaire.
En pratique
:
On peut proposer la classification pronostique suivante, telle que
peut l’évaluer l’échographie anténatale.
Les pourcentages donnés
correspondent à l’expérience française la plus importante, publiée
en 1995 sur 737 diagnostics anténataux d’uronéphropathies entre
1980 et 1992.
– Pathologies graves létales.
Elles représentent 13 % de l’ensemble des uronéphropathies
dépistées in utero.
Le diagnostic est précoce, dès le deuxième
trimestre, et l’évolution rapidement péjorative vers l’oligoamnios ou
l’anamnios sévère.
Une IMG est proposée (centre multidisciplinaire
de médecine foetale) :
– agénésie rénale bilatérale ;
– différents types de reins kystiques : polykystose autosomique
récessive, reins microkystiques des syndromes polymalformatifs
et des aberrations chromosomiques ;
– dysplasie multikystique bilatérale ;
– uropathies obstructives très sévères de révélation précoce
(atrésie urétrale, forme majeure de Prune-Belly...).
– Uropathies certaines, a priori curables.
Leur fréquence est élevée (71 %) et leur signe d’appel échographique
une dilatation liquidienne aisément repérable :
– uropathies obstructives, les plus fréquentes (42 %) :
hydronéphrose, urétérohydronéphrose, obstacles sous-vésicaux ;
– dysplasie multikystique dans sa forme unilatérale à gros kystes,
11 % ;
– duplications, dans leurs différentes variétés (9 %) : elles
occasionnent des diagnostics anténataux parfois incomplets ;
– reflux (9 %) : le diagnostic lésionnel précis est rarement porté
avant la naissance.
– Pathologies incertaines sans conséquence thérapeutique (13 %).
Une analyse morphologique attentive ainsi que la
pratique d’un caryotype foetal sont souvent proposées en cas
d’association malformative ;
– pyélectasies définies par un diamètre pyélique antéropostérieur
supérieur ou égal à 5 mm, très fréquemment observées (24 %), qui
nécessitent une exploration postnatale.
– Aspects évolutifs.
Le devenir de la série importante et homogène de 737 observations
de Droullé montre 15 % de décès anténatal (IMG ou mort foetale
in utero).
Parmi les enfants nés vivants, soit 84 %, plus de la moitié
a été opérée, et avant 6 mois dans deux tiers des cas.
Le diagnostic
anténatal des uropathies obstructives a donc influencé leur prise en
charge.
Le dépistage anténatal implique une exploration postnatale en fin
de première semaine de vie, en dehors des cas de détresses
urologiques sévères.
Elle fait appel au minimum à une échographie,
complétée par une cystographie pour rechercher un reflux vésico-urétéral.
La décision thérapeutique entre l’abstention chirurgicale et une
chirurgie reconstructive ou d’exérèse est prise en fonction des
résultats de ce premier bilan.
On peut penser que ce diagnostic
précoce apporte un bénéfice à l’enfant par la correction de l’anomalie
et/ou par la prévention des complications, mais ceci n’est pas
prouvé et le recul est encore insuffisant.