Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est un
rétrovirus à ARN monocaténaire.
L’infection par ce
virus est responsable d’une immunodépression liée à la
destruction progressive des lymphocytes CD4 , évoluant
inéluctablement vers le sida en l’absence de polychimiothérapie.
Nous ne rappellerons pas ici l’ensemble de
ces conséquences.
La grossesse peut être l’occasion de la découverte d’une
séropositivité ou d’un sida avéré chez des patientes qui
l’ignoraient ; ainsi, un dépistage systématique est institué
dès la première visite de grossesse , la proposition
d’un test pour le VIH est obligatoire, mais sa réalisation
ne l’est pas si la patiente s’y oppose ; il appartient au
médecin d’expliquer alors l’utilité de ce dépistage
devant l’existence de moyen de prévention de la transmission
maternofoetale.
Ce dépistage doit être proposé à
toutes les patientes et en particulier aux femmes présentant
un risque majoré (partenaire de toxicomane…) .
Actuellement, le mode d’acquisition est le plus souvent
hétérosexuel (75 %) (partenaire séropositif).
En région parisienne la prévalence pour VIH 1 est de
0,5 % et de 0,02 % pour VIH 2.
La prévalence est plus
importante dans les zones urbaines.
La séropositivité sera confirmée sur 2 prélèvements sanguins
différents et par un western blot.
La grossesse ne semble pas aggraver l’état maternel en
l’absence de symptôme et lorsque l’état immunitaire est
conservé.
Tout type d’infection opportuniste peut survenir
en fonction de l’état de dépression immunitaire
maternelle (tuberculose pulmonaire, pneumopathie bactérienne
et à Pneumocystis carinii, toxoplasmose cérébrale,
infection par le CMV et même septicémie listérienne).
2- Prise en charge :
Que la patiente soit déjà connue pour être séropositive
ou que la séropositivité ait été détectée en cours de gestation,
une prise en charge spécifique doit être entreprise
par un obstétricien et un infectiologue.
Elle doit permettre
: un bilan complet clinique et biologique : numération-
formule sanguine-plaquettes, nombre et pourcentage
des CD4 et des CD8 ; dosage Ac et Ag p24, b2-microglobuline,
sérologie hépatite B et C, dosage transaminase
sériques…, intradermo-réaction ; état morbide actuel ;
recherche d’infection à papillomavirus ; frottis cervico-vaginaux
; recherche d’autres maladies sexuellement transmissibles
(syphilis, Chlamydiæ, mycoplasmes…).
• Sérologie et état de santé du conjoint, évaluation de son
espérance de vie, protection de celui-ci si séronégatif (préservatifs).
• Evaluation des conditions socio-économiques (possibilité
d’élevage de l’enfant à venir...).
• Une information loyale et éclairée de la patiente sur les
risques néonatals et les moyens de les diminuer
En pratique, 50 % des femmes poursuivent leur grossesse.
En cours de grossesse, outre la surveillance habituelle, des
bilans biologiques et cliniques réguliers seront réalisés avec
une prise en charge multidisciplinaire.
Les principales infections
qui peuvent survenir sont : la tuberculose pulmonaire,
la pneumopathie à Pneumocystis carinii, et la toxoplasmose
cérébrale.
3- Transmission maternofoetale :
Le mode de transmission verticale se fait soit par passage
transplacentaire in utero [2e trimestre (20 % des cas) et 3e trimestre
(80 % des cas)], soit à l’accouchement.
Actuellement,
le rôle de la transmission tardive en cours de grossesse est le
plus retenu, on soupçonne les contractions utérines de s’accompagner
de microemboles d’origine maternelle dans la
circulation foetale.
Dans le post-partum, l’infection par l’allaitement maternel
n’est pas négligeable ce qui n’est pas sans problème dans les
pays en voie de développement où l’alimentation artificielle
est peu ou pas disponible.
Le VIH n’induit pas d’embryofoetopathie.
De façon spontanée,
20 % des nouveau-nés seront contaminés, dont 20 %
feront une infection (sida) précoce et sévère et 80 % un sida
dans un délai moyen de 6 à 8 ans.
Le risque de transmission est aggravé par :
- l’état clinique maternel ( plus celui-ci est altéré, plus la
transmission est élevée ) (infections opportunistes, maladies
sexuellement transmissibles associées…) ;
- l’altération du bilan biologique maternel avec, en particulier
: taux de CD4 maternel < 400 ; antigénémie P24 élevée
; charge virale élevée ;
Les indications de l’azidothymidine (AZT) sont les
mêmes que chez la femme non enceinte avec les mêmes
contraintes de surveillance, de même pour la didanosine
(Videx), zidovudine (Retrovir), dont on sait qu’elles passent
la barrière placentaire ainsi que les inhibiteurs des
protéases [ritonavir (Norvir), indinavir (Crixivan), saquinavir
(Invirase)].
Il est donc possible de rencontrer des
femmes enceintes sous bi- ou trithérapie sans que l’on
puisse actuellement en mesurer les conséquences.
La prévention d’un certain nombre d’affections opportunistes
sera assurée par :
– la prévention de la pneumopathie à Pneumocystis carinii
(Bactrim per os, pentamidine en aérosol au cours du dernier
trimestre) ;
– la prévention de la toxoplasmose cérébrale (Bactrim,
Malocide, Adiazine, plus une supplémentation en acide
folinique).
5- Diagnostic prénatal :
Le diagnostic prénatal est théoriquement possible sur Prélèvement de sang foetal (PSF) (Ag p24, culture, PCR).
Mais il existe un risque de contamination maternelle des
prélèvements probablement important et un risque non
moins négligeable de contamination foetale lors de la
ponction.
Ainsi, tout geste invasif anténatal doit-il être
évité dans la mesure du possible.
6- Accouchement :
À l’approche du terme, l’indication de césarienne ne sera
portée que sur des arguments obstétricaux.
Cette attitude
reste à redéfinir car des études récentes semblent démontrer
l’intérêt de la césarienne prophylactique avant tout
début de travail dans la prévention de la transmission maternofoetale.
7- Prévention de la transmission maternofoetale :
L’AZT (Retrovir) en prophylactique a fait la preuve de son
efficacité dans la transmission maternofoetale en cours de
grossesse (traitement per os) et au moment de l’accouchement
(traitement intraveineux pendant le travail) faisant
passer le taux de transmission de 20 à 8 %, voire 5 % dans
certains centres.
Pour être efficace, cette mesure doit être
entreprise avec rigueur (en particulier respect des horaires
de perfusion).
Par ailleurs, au moment de l’accouchement, il faudra éviter
toute excoriation cutanée (pH au scalp…).
Pour certains,
désinfection locale au chlorure de benzalkonium ou
une solution de Dakin.
Il semble (donnée récente) que la césarienne prophylactique
avant tout début de travail puisse diminuer encore le
risque de transmission maternofoetale (rôle des contractions
utérines ?).
8- Autres mesures :
• Éviter les contaminations professionnelles : d’autant
plus que la patiente a un sida avéré, un déficit immunitaire
sévère, une antigénémie élevée.
• À l’accouchement, port de gants, blouse, bavette,
lunettes.
• En cas de geste chirurgical porter une double paire de
gants.
• En cas de délivrance artificielle ou de révision utérine,
porter des gants remontant jusqu’aux coudes.
• En cas de blessure : nettoyer, faire saigner, désinfecter
(alcool 70°, Dakin) ; déclaration d’accident de travail ;
test de dépistage dans les 24 heures ; prévention éventuellement
par de l’AZT en fonction du pouvoir contaminant
de la blessure ; test à 6 semaines, 3, 6, 12 mois.
Plus les autres profils sérologiques (HBs, HBc...).
• Prise en charge spécifique du nouveau-né : bilan clinique
; bilan sérologique et infectieux répétés selon un
calendrier précis ; chimiothérapie antivirale prophylactique
; prophylaxie de la pneumocystose à Pneumocystis
carinii par du Bactrim, qui sera maintenue ou non en
fonction des données de la sérologie.
• En post-partum, prévoir une contraception efficace qui
sera toujours associée au préservatif.
• Mesures médico-sociales comprenant : la demande de
prise en charge de 100 % pour la patiente ainsi que pour son
enfant ; une éventuelle aide des services sociaux.