Les uvéites intermédiaires correspondent, selon les
recommandations de l’International Uveitis Study, à une
inflammation du tractus uvéal affectant de façon préférentielle une
zone schématiquement comprise entre le corps ciliaire et
l’émergence des vortiqueuses.
Comme le souligne Nussenblatt, le
diagnostic d’uvéite intermédiaire repose sur un critère purement
anatomique, l’uvéite intermédiaire ne constituant pas en elle-même
une entité clinicopathologique distincte.
Une inflammation
prédominant sur la base du vitré, sur la rétine antérieure et sur la
pars plana représente l’élément principal de son diagnostic.
Décrites pour la première fois par Fuchs en 1908 sous le terme de cyclites chroniques, les uvéites intermédiaires ont par la suite reçu
le nom d’uvéites périphériques dans les descriptions cliniques qu’en
ont fait Schepens puis Brockhurst.
C’est Welch qui, en 1960,
introduit le terme de pars planite.
Les uvéites intermédiaires ont par
ailleurs été appelées rétinites exsudatives périphériques, cyclochoriorétinites, cyclites chroniques postérieures et
uvéorétinites basales.
Nous utilisons dans cet article le terme
d’uvéite intermédiaire pour caractériser ce type d’inflammation.
Épidémiologie
:
A - PRÉVALENCE. ÂGE. SEXE :
Les uvéites intermédiaires représentent 4 à 20% de l’ensemble des
uvéites et 16 à 33 % des uvéites
pédiatriques.
Il ne semble pas exister de prédominance de sexe
ou de race, même si certains auteurs retrouvent une discrète surreprésentation
des patients blancs.
Les uvéites intermédiaires surviennent de 5 à 65 ans, avec une plus grande fréquence entre
20 et 30 ans.
Certains auteurs décrivent deux pics de survenue, un
premier entre 5 et 15 ans, un second entre 25 et 35 ans.
Les
formes de survenue précoce seraient plus sévères.
Au-delà de
40 ans, les uvéites intermédiaires sont plus rares.
B - FACTEURS FAMILIAUX ET TYPAGE « HUMAN
LEUCOCYTE ANTIGEN » (HLA)
:
Plusieurs cas familiaux ont été décrits, suggérant que des facteurs
héréditaires ou environnementaux pouvaient entrer dans la genèse
des uvéites intermédiaires.
De nombreuses études ont cherché à mettre en évidence une
association entre uvéites intermédiaires et antigènes tissulaires du
complexe HLA.
Dans une étude portant sur 52 patients consécutifs,
une plus grande fréquence des sous-types A31, B5, B17, C7, B22 et
DR1 a été retrouvée, sans être cependant significative. Dans une
autre étude portant sur 43 cas d’uvéites intermédiaires, une
association avec les antigènes tissulaires DR2 et DQ1 est retrouvée
chez la moitié environ des patients. D’autres études ont par la
suite confirmé une association significative avec les antigènes de
classe II.
Malinowski et al ont ainsi démontré une forte
association entre uvéites intermédiaires et HLA-DR2.
Raja
confirme ces données et trouve une association significative entre
uvéites intermédiaires et HLA-DR15.
Tang et al retrouvent de la
même façon cette association et insistent sur le fait que HLA-DR15
est fréquemment associé à la survenue de sclérose en plaques, de
neuropathie optique et de narcolepsie.
Ces différentes constatations
viennent corroborer l’existence d’une parenté entre sclérose en
plaques et certaines formes d’uvéites intermédiaires.
Récemment a
été mise en évidence une association entre uvéite intermédiaire et
HLA-A28, caractérisée par l’association uvéites intermédiaires,
arthralgies et hypocomplémentémie, sans qu’aucune autre affection
systémique associée soit retrouvée.
Caractéristiques cliniques
:
A - SIGNES FONCTIONNELS :
Myodésopsies et vision trouble d’installation progressive sont les
symptômes les plus fréquents en cas d’uvéite intermédiaire.
Cependant, il existe un grand nombre de formes asymptomatiques,
découvertes à l’occasion d’un examen systématique.
De façon plus
rare, l’uvéite intermédiaire est découverte à l’occasion d’une baisse
brutale d’acuité visuelle contemporaine d’un épisode d’hémorragie intravitréenne ou de décollement rétinien.
La présence de douleurs
ou d’une photophobie est inhabituelle.
B - SIGNES CLINIQUES :
Les manifestations cliniques au cours des uvéites intermédiaires sont
bilatérales dans près de 75 % des cas.
Il n’y a pas de
prédilection pour un oeil.
L’histoire de la maladie est souvent
asymétrique, l’atteinte d’un oeil précédant parfois de plusieurs
années l’atteinte de l’autre.
1- Atteintes du segment antérieur :
En général, il n’existe pas ou peu de rougeur oculaire chez l’adulte.
Chez l’enfant, en revanche, une inflammation du segment antérieur
est plus habituelle, avec dans certaines formes sévères douleurs
marquées, rougeur intense et photophobie.
* Cornée
:
Des précipités rétrodescemétiques sont parfois observés.
Le plus
souvent de petite taille, ils confluent dans certains cas
(fréquemment en cas de sclérose en plaques) sous la forme de
précipités en « graisse de mouton ». Mais le plus souvent, la
cornée est transparente.
Une kératopathie en bandelette est observée
dans 3 à 9 % des cas ; elle est le témoin d’une inflammation
chronique du segment antérieur.
Une endothéliopathie autoimmune
identique à celle observée au cours des phénomènes de
rejet de greffe a été exceptionnellement rapportée.
Elle se caractérise
par la présence de précipités cornéens siégeant à la jonction cornée oedématiée et cornée saine.
* Cristallin
:
L’atteinte du cristallin, secondaire à l’inflammation ou iatrogène, est
habituelle au cours des uvéites intermédiaires.
La présence
d’opacités cristalliniennes sous-capsulaires constitue ainsi la
complication la plus fréquente du segment antérieur en cas d’uvéite
intermédiaire, et est observée dans 5 à 60% des cas.
Des opacités sous-capsulaires antérieures en regard de synéchies
postérieures s’observent dans certains cas.
Enfin, des modifications
de la région équatoriale, conséquence directe de l’inflammation,
peuvent également survenir.
Une opacification du cristallin
réduisant l’acuité visuelle à moins de 5/10 est notée dans environ
20 % des cas.
* Chambre antérieure
:
En chambre antérieure, le flare est de faible intensité, ne dépassant
pas généralement 2 +.
La réaction cellulaire est également modérée,
inférieure à 2 +. Dans un certain nombre de cas, il n’existe pas
d’inflammation en chambre antérieure, et dans tous les cas, la
réaction cellulaire siégeant en chambre antérieure est inférieure à
celle observée dans le vitré antérieur.
Brockhurst et al notent la
présence de goniosynéchies périphériques antérieures dans 24 % des
cas, et de synéchies iridocristalliniennes dans 18 % des cas.
Cependant, la plupart des séries retrouvent une fréquence peu
importante de synéchies postérieures.
* Glaucome
:
Un glaucome est rarement observé en cas d’uvéite intermédiaire.
Il
est parfois responsable de baisse sévère de vision.
Dans une étude
portant sur 182 cas d’uvéites intermédiaires, 15 cas de glaucome
(8 %) ont été diagnostiqués.
Cependant, il s’agissait dans 11 cas de
formes cortico-induites ; seuls quatre cas semblaient être la
conséquence directe de l’uvéite intermédiaire. Les mécanismes
qui préludent au développement d’un glaucome sont variés.
Il peut
être une complication de synéchies antérieures ou postérieures, d’un
déplacement antérieur du bloc iris-cristallin (dans le cadre d’un
décollement choroïdien notamment), ou d’un cristallin intumescent.
Dans d’autres cas, il s’agit d’un glaucome cortico-induit ou
secondaire à une inflammation de la chambre antérieure.
2- Atteintes du segment postérieur :
L’examen du segment postérieur se fait après dilatation maximale.
Il peut être utile de s’aider d’une indentation.
Les manifestations vitréennes et de la périphérie rétinienne sont les
signes les plus caractéristiques des uvéites intermédiaires.
* Vitré
:
Une inflammation vitréenne est obligatoirement présente en cas
d’uvéite intermédiaire active.
Certains patients n’exhibent qu’une
réaction cellulaire cotée 1 +, mais l’absence de cellule dans le vitré
élimine le diagnostic d’uvéite intermédiaire active.
Pour certains
auteurs, il faut que l’inflammation du vitré antérieur soit plus
importante que celle du vitré postérieur et de la chambre antérieure
pour affirmer le diagnostic d’uvéite intermédiaire.
Les uvéites intermédiaires affectent base et corps du vitré.
La
présence d’une fine réaction cellulaire siégeant au sein du vitré
antérieur constitue la manifestation initiale des uvéites
intermédiaires au niveau du corps vitréen.
La réaction inflammatoire
cellulaire du vitré postérieur est, quant à elle, mieux vue en
ophtalmoscopie indirecte.
La hyalite est dans certains cas si intense qu’elle gêne l’examen rétinien.
Le décollement postérieur du
vitré est habituel au cours des uvéites intermédiaires.
Parfois,
l’inflammation vitréenne peut s’organiser sous forme de véritables
membranes qu’il est difficile de distinguer de décollements de rétine.
Plus rarement (dans 3 à 9% des cas) surviennent, dans un contexte
de néovascularisation siégeant au niveau de la base du vitré, des
hémorragies intravitréennes responsables de baisse brutale d’acuité
visuelle.
Des opacités vitréennes en « boules de neige », ou snowballs, ou
encore « oeufs de fourmi », constituent les lésions vitréennes
les plus caractéristiques des uvéites intermédiaires.
Elles affectent
essentiellement la partie inférieure de la base du vitré.
Elles
proviennent de la coalescence de cellules inflammatoires et prennent
une couleur blanchâtre ou discrètement jaune.
Bien que non indispensable au diagnostic d’uvéite intermédiaire, la
présence de lésions ayant l’aspect d’exsudats blanchâtres, localisés
au niveau de la pars plana, constitue un élément majeur du
diagnostic d’uvéite intermédiaire.
Ces lésions sont communément
appelées snowbanks par les auteurs anglo-saxons.
On réserve le
terme de pars planite aux uvéites intermédiaires comportant ces
exsudats en « banquise ».
Ces exsudats sont le plus souvent
segmentaires, prédominent en inférieur, mais peuvent s’étendre de
façon circulaire sur 360°.
Une progression des exsudats vers la rétine
et à l’intérieur du vitré peut s’observer.
Parfois l’exsudation
provenant de la pars plana peut s’étendre de telle manière qu’elle
devient visible dans l’espace rétrocristallinien.
Les atteintes maculaires, papillaires et de la périphérie rétinienne
sont habituelles au cours des uvéites intermédiaires.
* Macula
:
L’atteinte maculaire est dominée par l’oedème maculaire cystoïde.
Il
s’observe dans 28 à 64 % des cas.
Il constitue la première
cause de baisse prolongée d’acuité visuelle, et peut progresser vers
une dégénérescence maculaire cystoïde.
Membrane épimaculaire et
soulèvement séreux du neuroépithélium sont également observés.
Une publication récente met en avant l’intérêt de l’optical
coherence tomography (OCT) dans la prise en charge des
complications maculaires des uvéites intermédiaires.
* Périphérie rétinienne
:
La périphérie rétinienne est très fréquemment affectée par l’uvéite
intermédiaire.
Les vascularites rétiniennes sont ainsi habituelles.
Il
s’agit essentiellement de périphlébites ; leur fréquence de survenue
est comprise entre 20 et 60 %.
Les périartérites sont plus
rarement observées.
Des déchirures rétiniennes sont parfois
observées et un rétinoschisis est diagnostiqué dans 2 à 10,7 % des
cas.
La fréquence des décollements de rétine est approximativement
de 5 %. Ils peuvent être rhegmatogènes, exsudatifs,
tractionnels.
* Nerf optique
:
On observe au fond d’oeil des atteintes du nerf optique, avec aspect
d’oedème papillaire, d’atrophie optique et parfois de néovascularisation.
La néovascularisation prépapillaire est le plus souvent
la conséquence d’ischémie étendue.
Elle régresse en général après photocoagulation panrétinienne.
Une phtise du globe peut constituer le terme ultime des uvéites
intermédiaires, par le biais de décollements de rétine anciens, ou de
membranes développées aux dépens de la pars plana, conduisant à
des tractions sur le corps ciliaire et à une hypotonie.
Évolution
:
De multiples classifications des uvéites intermédiaires ont été
proposées, reposant sur différents critères : anatomiques, sévérité de
l’inflammation, profil évolutif.
Smith et al décrivent des
inflammations minimes (19 à 43 %), modérées (42 à 46 %), ou sévères
(11 à 39 %), lors du diagnostic initial de l’affection et individualisent
par la suite trois formes : des formes bénignes avec amélioration
progressive sans récidive (10 %) ; des formes chroniques, sans
épisode d’exacerbation (59 %) ; des formes chroniques comportant
des périodes d’exacerbation (31 %).
Brockhurst et al
individualisent quatre profils évolutifs : la majorité (49 %) présente
une forme chronique avec des épisodes inflammatoires aigus
minimes résolutifs spontanément ou sous traitement ; le deuxième
grand groupe (31 %) correspond à une forme bénigne avec
résolution complète de l’inflammation et peu de séquelles.
Quinze
pour cent des yeux ont une inflammation chronique sévère avec néovascularisation périphérique et aggravation de l’inflammation
progressive ; le dernier groupe (10 %) est constitué des formes
d’installation progressive comportant décollements de rétine
exsudatifs, hyalite dense, progression de l’inflammation dans
l’espace rétrocristallinien, néovascularisation périphérique.
Ces
formes s’observent préférentiellement chez l’enfant en dessous de
15 ans.
Boke décrit des formes inflammatoires diffuses
caractérisées par la présence d’une réaction cellulaire fine associée à
des condensations vitréennes en « oeufs de fourmi » mais sans
exsudation importante au niveau de la pars plana, des formes
exsudatives caractérisées par la présence d’une exsudation
s’étendant sur l’ora serrata et la pars plana, et une forme
vasoproliférative caractérisée par des engainements vasculaires, des
territoires d’occlusion et la survenue d’une néovascularisation.
Les uvéites intermédiaires se caractérisent par leur tendance à
évoluer sur plusieurs années.
Une évolution sur 15 à 20 ans n’est
pas inhabituelle.
Comme le souligne Davis et Bloch-Michel,
comparées aux autres types d’uvéites, les uvéites intermédiaires sont
celles qui ont la durée d’évolution la plus longue.
Sur un suivi au
long cours, les patients avec uvéite intermédiaire présentent
exceptionnellement une rémission spontanée et durable de leur
affection. Smith et al ne retrouvent que 5 % de taux de rémission
chez des patients suivis de 4 à 26 ans.
De la même façon, Hogan et
al ne rapportent qu’un cas de rémission chez 56 patients suivis
de 1 à 9 ans.
En ce qui concerne le pronostic fonctionnel, plusieurs remarques
peuvent être faites.
Tout d’abord l’acuité visuelle au moment du
diagnostic initial n’est que modérément altérée, plus de la moitié
des patients ayant alors une acuité supérieure ou égale à 20/30.
Deuxièmement, le pronostic visuel à long terme est plus fonction de
la sévérité de l’inflammation que de sa durée, même si les deux
jouent un rôle (environ un tiers des patients présenteront des baisses
d’acuité visuelle sévères au cours de l’évolution de leur affection).
Troisièmement, c’est l’atteinte maculaire, par le biais de l’oedème
maculaire cystoïde, qui conditionne le pronostic visuel, avec des
résultats fonctionnels globalement bons chez les patients sans
atteinte maculaire.
Dans une série de patients présentant une pars planite, Smith et al constatent que 74 % des yeux avec une acuité
visuelle inférieure à 5/10 présentaient une atteinte maculaire.
Quatrièmement, la présence d’une pars planite est associée à une
hyalite plus sévère et une plus grande fréquence de l’oedème
maculaire cystoïde.
Cinquièmement, la corticothérapie
permet un bon contrôle de l’affection.
Deux tiers des patients traités
par corticoïdes maintiennent une acuité visuelle supérieure ou égale à 5/10.
Enfin, tous patients confondus, traités ou sans traitement,
la moitié à deux tiers des sujets conservent, à terme, une acuité
visuelle supérieure à 20/40.
Examens complémentaires
:
A - BILAN GÉNÉRAL :
Le bilan général, à visée étiologique, doit être orienté par les données
de l’examen clinique.
Il convient notamment de rechercher des
éléments en faveur d’une sarcoïdose ou d’une sclérose en plaques.
Il n’existe aucun test biologique qui confirme le diagnostic d’uvéite
intermédiaire idiopathique.
Le bilan initial d’une uvéite
intermédiaire comporte radiographie pulmonaire, calcémie, phosphorémie, enzyme de conversion de l’angiotensine à la
recherche d’une sarcoïdose.
La présence de signes neurologiques
associés nécessite la réalisation d’une imagerie par résonance
magnétique (IRM) cérébrale et d’une ponction lombaire.
La pratique
d’une sérologie de la maladie de Lyme est habituelle, ainsi que la
recherche d’une syphilis (Treponema pallidum haemagglutination assay
[TPHA]-venereal desease research laboratory [VDRL]).
Dans les formes
unilatérales, plus spécialement chez le sujet jeune, des sérologies de
la toxoplasmose et toxocarose sont requises.
Chez le sujet âgé, il faut
systématiquement évoquer un lymphome (IRM cérébrale, ponction
lombaire sont nécessaires).
Dans ces cas, des prélèvements vitréens
avec études cytologiques et immunohistochimiques sont parfois
contributifs.
Vitesse de sédimentation, numération-formule sanguine
à la recherche d’une maladie de système sont systématiques.
Un
typage HLA peut être utile, la présence d’HLA-DR15 étant associée
à la survenue de sclérose en plaques.
Les autres tests sont guidés
par l’orientation clinique.
B - ÉCHOGRAPHIE :
La réalisation d’une échographie n’est pas nécessaire en pratique
courante dans l’exploration des uvéites intermédiaires.
Cependant,
la présence d’une cataracte, de synéchies iridocristalliniennes, d’une
hyalite dense ou d’une hémorragie intravitréenne peut rendre
difficile l’examen du fond d’oeil.
Dans ces cas, l’utilisation de
l’échographie peut être d’une précieuse aide.
Il est parfois
malaisé de différencier, aussi bien en mode A qu’en mode B, un
décollement de rétine plan inférieur d’une exsudation de la pars
plana ou d’une hémorragie intravitréenne dense.
Des publications récentes ont mis en avant l’intérêt de l’échographie
à haute fréquence (ultrasound biomicroscopy [UBM]) au cours des
uvéites intermédiaires.
En effet, compte tenu de leur
localisation anatomique, les structures concernées par le processus
inflammatoire au cours des uvéites intermédiaires sont parfois
difficilement accessibles à l’examen ophtalmoscopique. Dans ce cas,
l’utilisation de l’UBM peut être d’une précieuse aide.
En 1998, Haring et al rapportent leur expérience de l’UBM chez 26 yeux
de 13 patients présentant une uvéite intermédiaire. Les images
constatées à l’UBM corroboraient l’impression ophtalmoscopique
dans 14 cas (53,8 %), pour neuf yeux (34,6 %) l’UBM retrouvait des
éléments pathologiques qui n’étaient pas identifiés lors de l’examen
clinique pratiqué avec indentation sclérale.
Dans la plupart des cas,
ces lésions constatées à l’examen échographique consistent en des
condensations vitréennes duveteuses, en des membranes vitréennes
siégeant au niveau de la périphérie rétinienne et de la pars plana,
ou en une exsudation de la pars plana apparaissant sous forme de
zones d’épaississements hyperéchogènes en avant de la pars plana.
Plus intéressant est le fait que dans quatre cas ont été mises en
évidence des tractions exercées par le vitré sur la rétine, passées
inaperçues lors de l’examen ophtalmoscopique.
Les auteurs mettent
en avant l’intérêt potentiel de ce type d’examen dans la prévention
des complications rétiniennes des uvéites intermédiaires, notamment
en cas d’opacification des milieux.
En UBM, Tran et al décrivent
une transformation pseudokystique du vitré périphérique en cas de
toxocarose et considèrent ce signe échographique comme sensible,
spécifique, et d’une aide importante au diagnostic de toxocarose
dans les cas difficiles.
C - ANGIOGRAPHIE :
La réalisation d’une angiographie est contributive à plus d’un
titre.
Elle permet de confirmer l’existence d’un oedème maculaire cystoïde et d’apprécier son importance.
Elle renseigne sur
l’état vasculaire, en mettant en évidence la présence d’une
imprégnation pariétale et d’une diffusion du colorant au voisinage
en cas de vascularite.
Elle précise si l’atteinte vasculaire est
segmentaire ou diffuse.
Elle aide enfin au diagnostic d’ischémie
rétinienne et de néovascularisation.
Elle facilite parfois le
diagnostic rétrospectif d’uvéite intermédiaire devant la constatation
d’atteintes séquellaires à type d’atrophie ou de remaniement
pigmentaire périvasculaire.
Les autres anomalies angiographiques fréquemment retrouvées sont
des atteintes de l’épithélium pigmentaire et des atteintes papillaires.
D - FLUOROPHOTOMÉTRIE :
Les études fluorophotométriques, même si elles ne sont pas utiles
au diagnostic clinique, ont pour avantage de dépister des troubles
de la perméabilité vasculaire plus précocement que l’angiographie.
Les troubles de la perméabilité vasculaire jouent un rôle
majeur dans la pathogénie des uvéites intermédiaires, à tel point que Schenck et Boke se demandent si l’uvéite intermédiaire n’est
pas plus la conséquence d’une vascularite que d’une atteinte uvéale
primitive.
L’importance de la diffusion à partir des vaisseaux
rétiniens dans la physiopathologie de l’uvéite intermédiaire est
soulignée par la bonne corrélation existant entre les valeurs de fluorophotométrie et la fréquence de l’oedème maculaire cystoïde.
Ces valeurs sont par ailleurs bien corrélées avec l’intensité de la
hyalite, l’importance des exsudats de la pars plana et l’acuité
visuelle.
Les constatations fluorophotométriques ont d’autre part
permis de supporter l’opinion que le siège inférieur de l’exsudation
était le fait de mécanismes gravitationnels.
E - ÉLECTROPHYSIOLOGIE
:
Des altérations électrophysiologiques sont parfois détectées en cas
d’uvéites intermédiaires, à type de réduction des potentiels
oscillatoires, d’augmentation des latences, de diminution de
l’amplitude des réponses de l’onde B.
Ces altérations électrophysiologiques sont la conséquence des altérations rétiniennes
provoquées par le processus inflammatoire et ne sont pas
primitives.
Étiologies
:
La majorité des uvéites intermédiaires sont idiopathiques.
Cependant, dans 15 à 32 % des cas, elles s’associent à des
pathologies générales ou oculaires.
A - UVÉITES INTERMÉDIAIRES IDIOPATHIQUES :
Il n’y a pas de consensus quant à la définition des uvéites
intermédiaires idiopathiques.
Elles seraient pour certains associées à
une plus grande fréquence de survenue de neuropathies optiques et
de sclérose en plaques, et pour d’autres seraient caractérisées par
l’absence d’association à une affection systémique, par l’absence de
lien avec des affections neurologiques et par une évolution
relativement bénigne.
Pour Park et al, elles affectent préférentiellement des femmes
jeunes ou d’âge moyen et se caractérisent par l’association hyalite,
oedème maculaire cystoïde et périphlébite.
Il s’agit d’affections
typiquement bilatérales, avec atteinte essentiellement du segment
postérieur (bien que certains yeux présentent un certain degré
d’inflammation en chambre antérieure, des précipités rétrodescemétiques et des synéchies iridocristalliniennes).
La
présence d’une pars planite est exceptionnelle.
Le pronostic visuel
de ces patients est excellent.
Les études angiographiques montrent
que les formes avec oedème maculaire cystoïde comportent un
moindre degré de diffusion que dans l’oedème maculaire cystoïde
des pseudophakes et des pars planites.
Ces patients ne présentent
pas d’association avec les antigènes HLA-B8, HLA-B51, et HLADR2.
Il est à noter que dans la série de Park et al, aucun des
patients n’a par la suite développé de sclérose en plaques.
De leur côté, Malinowski et al décrivent sous le terme d’uvéites
intermédiaires idiopathiques des uvéites caractérisées cliniquement
par une association à des neuropathies optiques dans 7,4 % des cas,
et par une association à une sclérose en plaques dans 14,8 % des cas.
Ils mettent par ailleurs en évidence une association avec les
antigènes tissulaires HLA-B8, HLA-B51 et HLA-DR2.
Les uvéites intermédiaires dites idiopathiques représentent la
majorité des uvéites intermédiaires.
B - UVÉITES INTERMÉDIAIRES ASSOCIÉES
À DES PATHOLOGIES GÉNÉRALES ET COMPORTANT
DES MANIFESTATIONS EXTRAOPHTALMOLOGIQUES
(MALADIES SYSTÉMIQUES ET INFECTIEUSES)
:
1- Pathologies inflammatoires :
* Sarcoïdose
:
Les uvéites intermédiaires sont des complications fréquentes au
cours de la sarcoïdose. Elles sont présentes chez plus de 10 % des
patients.
Nous retrouvons une fréquence d’uvéites
intermédiaires de près de 21 % dans une étude prospective réalisée
dans le service en 1988.
Il convient de noter le caractère volontiers
asymptomatique des uvéites intermédiaires au cours de la
sarcoïdose.
Le diagnostic d’uvéite intermédiaire est d’ailleurs
souvent porté rétrospectivement, lors de la découverte de lésions
rétiniennes périphériques, de condensations vitréennes en « oeufs de
fourmi », ou de séquelles de vascularite.
Sur le plan clinique, les uvéites intermédiaires présentent une
sémiologie caractéristique associant des lésions vitréennes
périphériques évocatrices et une grande fréquence de vascularites.
Landers fut le premier à préciser l’aspect du vitré au cours de la
sarcoïdose.
Il décrit des lésions vitréennes sphériques, sous forme
de corps arrondis de couleur gris-blanc, de taille variable, et pouvant
atteindre un tiers du diamètre papillaire.
Ces lésions en « oeufs de
fourmi » (snowballs) sont fréquemment associées les unes aux autres
sous forme d’un aspect en « collier de perles ».
Un certain nombre
d’auteurs ont même considéré cet aspect en « collier de perles »
comme spécifique de la sarcoïdose.
Il peut toutefois être retrouvé
dans d’autres causes d’uvéites.
Les uvéites intermédiaires au
cours de la sarcoïdose se distinguent par ailleurs des autres cas
d’uvéites intermédiaires par la relative rareté de la survenue de pars planite et d’un oedème maculaire cystoïde.
Le dernier élément
caractéristique des uvéites intermédiaires au cours de la sarcoïdose
est la fréquence de l’association à une vascularite périphérique ou
postérieure.
Cette vascularite est, dans quasiment tous les cas, une
périphlébite.
Comme le soulignent de nombreux auteurs,
l’association d’infiltrats périveineux et de lésions en « oeufs de
fourmi » est très évocatrice de sarcoïdose.
Les uvéites intermédiaires s’intègrent le plus souvent dans un
contexte de sarcoïdose multiviscérale évolutive.
En effet, on retrouve
dans plus de 80 % des cas des manifestations extrapulmonaires et
extraophtalmologiques (notamment cutanées, oto-rhinolaryngologiques,
articulaires et ganglionnaires) associées à l’uvéite
intermédiaire.
Un recours à un traitement systémique est
fréquent, le plus souvent motivé par une cause extraophtalmologique.
Plusieurs remarques peuvent être faites concernant le pronostic
fonctionnel des uvéites intermédiaires liées à la sarcoïdose.
Comme
nous l’avons précédemment souligné, ces uvéites intermédiaires
sont souvent asymptomatiques et découvertes de façon fortuite lors
d’un examen systématique.
Par ailleurs, les études montrent qu’au
cours de la sarcoïdose, les pars planites sont rares et que les
vascularites sont moins génératrices d’oedème maculaire cystoïde
que dans d’autres étiologies.
Enfin, comme le soulignent Zierhut
et Foster, la corticothérapie permet souvent de contrôler
favorablement le processus inflammatoire.
Il semble donc que les
uvéites intermédiaires au cours des sarcoïdoses aient un pronostic,
si ce n’est meilleur, tout au mois identique à celui des uvéites
intermédiaires relevant d’autres étiologies.
Enfin, en ce qui concerne l’histoire naturelle de la maladie, on sait
que des manifestations d’uvéite postérieure sont susceptibles de
précéder de plusieurs années la survenue d’une sarcoïdose
clinique.
Aucun des patients avec une uvéite intermédiaire que
nous avons suivis dans le service n’a présenté de manifestations
fonctionnelles uniquement ophtalmologiques avant que le
diagnostic de sarcoïdose n’ait été posé.
Chester et al, dans une
étude prospective portant sur 51 patients ayant une pars planite et
suivis 10 ans, ne retrouvent qu’un seul patient ayant développé par
la suite une sarcoïdose.
Graham et al, dans une série portant sur
70 patients ayant une pars planite et suivis pendant 10 ans, ne
retrouvent aucun patient ayant développé une sarcoïdose.
À
l’inverse, Zierhut retrouve quatre patients sur 62 présentant une
uvéite intermédiaire, sans autres signes évocateurs de maladie
générale, qui ont développé dans un délai de 1 à 5 ans une
sarcoïdose.
Au total, à la différence des uvéites postérieures, lorsqu’on découvre
une uvéite intermédiaire isolée, si le bilan initial ne retrouve aucun
élément en faveur d’une sarcoïdose, il est exceptionnel qu’une
sarcoïdose se révèle par la suite.
* Sclérose en plaques
:
La présence d’affections démyélinisantes est retrouvée chez 1,1 à
16 % de patients atteints d’uvéite intermédiaire.
À l’inverse, 5 à
27 % des patients atteints de sclérose en plaques présentent une
uvéite intermédiaire, l’uvéite intermédiaire constituant ainsi le
type d’inflammation oculaire le plus fréquemment retrouvé au cours
de la sclérose en plaques.
De nombreuses études ont insisté sur la
relation existant entre ces deux entités.
Engell et al, dans une
étude portant sur 303 patients, ont tenté de confirmer l’existence
d’une association entre uvéite intermédiaire et sclérose en plaques,
en corrélant l’importance de la diffusion vasculaire rétinienne au
degré d’activité clinique de la sclérose en plaques.
Sur les
303 patients étudiés, 27 (9 %) présentaient une diffusion vasculaire
rétinienne.
Ces 27 patients, à l’exception d’un, ont une maladie
neurologique active.
L’auteur souligne par ailleurs que la fréquence
de l’uvéite intermédiaire passe à 21 % chez les patients le plus
sévèrement atteints et dépendants d’une chaise roulante, alors que
seuls 7,3 % des patients qui ont une maladie bénigne ont une uvéite
intermédiaire.
La relation entre sclérose en plaques et uvéites
intermédiaires a par ailleurs été étayée par l’étude des antigènes
d’histocompatibilité.
De nombreux auteurs retrouvent une
association statistiquement significative entre uvéite intermédiaire
et HLA-DR2, HLA-DR2 étant par ailleurs significativement associé
avec la survenue de sclérose en plaques.
Cliniquement, vascularites rétiniennes et oedème maculaire cystoïde
sont habituels au cours de la sclérose en plaques.
Graham
confirme cette association existant entre périphlébite et sclérose en
plaques chez 50 patients présentant une sclérose en plaques et
n’ayant pas d’autres antécédents ophtalmologiques qu’une névrite
optique.
Sept patients sur 50 présentaient des engainements
vasculaires.
La sclérose en plaques ne doit cependant pas être nécessairement
active pour que l’uvéite intermédiaire soit présente ; l’uvéite
intermédiaire peut précéder la survenue de la sclérose en plaques
de plus de 7 ans.
Dans une étude portant sur 54 patients ayant
uvéite intermédiaire et sur un suivi de plus de 7 ans, Malinowsi et
al identifient huit patients (14,8 %) qui ont développé par la suite
une sclérose en plaques et quatre patients supplémentaires qui ont
développé une névrite optique.
* Autres
:
Des entérocolopathies inflammatoires chroniques, des
néphropathies tubulo-interstitielles, certaines formes de
dysthyroïdie, de maladie de Vogt-Koyanagi-Harada et de
maladie de Behçet peuvent prendre l’aspect d’une uvéite
intermédiaire.
2- Pathologies infectieuses
:
La présence de manifestations extraophtalmologiques permet
parfois d’identifier une cause infectieuse à l’uvéite intermédiaire.
Cette identification est essentielle car elle conditionne la mise en
route d’un traitement spécifique.
Des uvéites intermédiaires ont ainsi été rapportées chez des patients
atteints de syphilis, de tuberculose et de maladie de Lyme.
Au cours de la maladie de Lyme, l’uvéite est volontiers bilatérale,
avec exsudation en banquise habituelle au niveau de la pars
plana.
Une réaction inflammatoire en chambre antérieure, plus
importante que celle observée au cours des uvéites intermédiaires
idiopathiques, est souvent retrouvée.
Le diagnostic repose sur
l’anamnèse, la présence de manifestations systémiques (érythème migrans, manifestations articulaires, cardiaques et neurologiques) et
sur des arguments sérologiques.
L’épreuve thérapeutique permet
souvent de confirmer le diagnostic.
Breeveld rapporte ainsi le cas d’une patiente présentant une forme chronique d’uvéite
intermédiaire résistant à un traitement par corticoïdes et à une
cryothérapie et qui a répondu favorablement à un traitement
antibiotique adapté.
Des infections virales (virus de l’immunodéficience humaine
[VIH], human T-cell lymphoma virus-1[HTLV-1], Epstein-Barr
virus, parvovirus et adénovirus), ont par ailleurs été rendues
responsables d’uvéites intermédiaires.
Parmi les autres causes
infectieuses, on peut citer les filarioses, la maladie de Whipple, la maladie des griffes du chat.
C - UVÉITES INTERMÉDIAIRES NON IDIOPATHIQUES
SANS MANIFESTATION SYSTÉMIQUE ASSOCIÉE :
1- Toxocarose oculaire
:
Les patients présentant une uvéite intermédiaire dans le cadre d’une
toxocarose oculaire sont en règle général indemnes de manifestation
systémique.
Il s’agit d’uvéites intermédiaires unilatérales survenant
chez de jeunes patients.
Le diagnostic repose sur l’anamnèse, les
signes ophtalmoscopiques (granulome rétinien avec traction
rétinienne en regard), des arguments sérologiques et des données
échographiques.
2- Autres causes :
La choriorétinite toxoplasmique peut également prendre l’aspect
d’une uvéite intermédiaire.
Parmi les autres syndromes uvéitiques oculaires isolés, il convient
de citer l’hétérochromie irienne de Fuchs et le syndrome de Eales.
D - PSEUDO-UVÉITES : LYMPHOMES
Une inflammation vitréenne sans atteinte rétinienne, simulant une
uvéite intermédiaire, peut être observée au cours d’un lymphome.
En raison de la possibilité de survenue d’un lymphome intraoculaire
à tout âge, il est nécessaire de ne pas limiter les investigations dans
ce sens au seul patient âgé. Une réponse faible aux corticoïdes, une
absence d’oedème maculaire cystoïde sont des éléments utiles au
diagnostic.
Traitement
:
A - PRINCIPES GÉNÉRAUX
:
Le traitement des uvéites intermédiaires repose sur un certain
nombre de principes généraux.
Il convient en premier lieu de
proposer un traitement étiologique spécifique de la cause à chaque
fois qu’une pathologie associée est retrouvée.
Seules les baisses d’acuité visuelle ou menaces de baisse d’acuité
visuelle sont traitées, l’objectif n’étant pas de faire disparaître du
vitré toute cellule ou exsudation en « banquise », si bien que
l’abstention thérapeutique est souvent la règle, notamment dans le
cas d’uvéites intermédiaires idiopathiques.
Même si certains auteurs
proposent des traitements plus agressifs destinés à restituer une
transparence parfaite au vitré, notamment en prévision d’une
chirurgie intraoculaire, la plupart des auteurs s’accordent à ne traiter
que les baisses sévères d’acuité visuelle définies par une acuité
visuelle inférieure à 5/10 ou par une perte de plus de deux lignes
d’acuité visuelle.
Il existe bien entendu des exceptions à cette
règle. Les yeux présentant une néovascularisation périphérique, des
logettes maculaires, des vascularites ou oedèmes papillaires
importants sont souvent traités, quel que soit le niveau d’acuité
visuelle.
Les corticoïdes représentent l’essentiel du traitement de la plupart
des uvéites intermédiaires.
La voie topique est réservée aux formes
associées à une inflammation importante du segment antérieur et
n’a que peu d’effets sur les manifestations du segment postérieur
chez le sujet phake.
B - MÉTHODES :
1- Injections périoculaires de corticoïdes
:
Les injections périoculaires sont à même de contrôler la plupart des
uvéites intermédiaires, surtout dans les formes unilatérales.
Schlaegel et al ont étudié 67 yeux de 46 patients présentant une
uvéite intermédiaire et traités par des injections périoculaires, ou
par une corticothérapie systémique, ou par la combinaison de ces
deux traitements.
Dans leur série, 57 des 67 yeux (85 %) ont conservé
une acuité visuelle supérieure à 5/10 ou ont présenté une
amélioration d’au moins deux lignes.
Une étude rétrospective menée
par Godfrey et al montre qu’aucun des yeux non traités ou traités
uniquement par une corticothérapie topique n’a amélioré son acuité
visuelle.
Helm et al, dans une étude portant sur 20 patients,
constatent un gain d’au moins deux lignes d’acuité visuelle ou une
acuité visuelle supérieure ou égale à 5/10 chez 85 % des patients
après une ou deux injections sous-ténoniennes postérieures.
Le délai
moyen entre l’injection et le gain d’acuité visuelle était, dans la série
de Helm, de 3 semaines (compris entre 2 et 21 semaines).
Il peut
s’étaler sur plusieurs mois.
Le site de l’injection périoculaire conditionne à la fois l’efficacité et
les effets secondaires des corticoïdes.
Il n’existe cependant pas de
consensus quant au site d’injection.
Capone et Aaberg proposent
de réaliser des injections péribulbaires le long du rebord orbitaire
inférieur d’une combinaison d’acétonide de triamcinolone (40 mg)
et d’acétate de méthylprednisolone (40 mg).
Des études
échographiques recommandent d’injecter les corticoïdes dans le
quadrant temporal supérieur ; c’est à partir de cette localisation que
les corticoïdes, par effet gravitationnel, se positionneraient le plus
au contact de la macula.
Les injections sous-ténoniennes utilisant la
technique décrite par Nozik permettent un tel positionnement.
Pour Freeman et al, les injections latérobulbaires et sousconjonctivales
auraient une efficacité moindre en raison de leur site
d’action éloigné de la région maculaire.
Cependant, l’injection sousténonienne
postérieure expose à un risque d’hypertonie, de
survenue parfois retardée et d’évolution prolongée.
Lafranco Dafflon
et al rapportent une série de 58 yeux de 53 patients ayant
bénéficié, dans le cadre d’uvéite, d’une injection sous-ténonienne de
40 mg d’acétonide de triamcinolone.
Dans 32 cas l’injection était
motivée par la présence d’une uvéite intermédiaire.
Les auteurs
constatent une amélioration significative de l’acuité visuelle qui
passe en moyenne de 4/10 à 7,9/10, avec une diminution
significative de l’inflammation objectivée au laser flare meter (passant
de 29,6 à 13,6 photons/ms), avec cependant une élévation
significative du tonus oculaire, passant de 13,6 à 18,5 mmHg.
Cette
hypertonie a été transitoire dans 16 cas, mais chronique dans six
cas, nécessitant la réalisation d’une chirurgie filtrante.
Des cas de ptosis ont par ailleurs été rapportés avec cette technique, ainsi
qu’une progression de cataracte.
2- Corticothérapie systémique
:
Les corticoïdes par voie systémique, qui constituent sans aucun
doute les plus sûrs des immunosuppresseurs, sont utilisés dans la
plupart des formes bilatérales ou dans les formes unilatérales
résistant aux corticoïdes injectés par voie périoculaire.
Les
corticoïdes sont habituellement administrés à la dose de 1 mg/kg/j.
Ils peuvent par ailleurs avoir un effet bénéfique dans le traitement
des néovascularisations.
Les patients résistant à une
corticothérapie administrée par voie orale ou ayant développé de
multiples complications sous traitement peuvent bénéficier d’assauts
fortement dosés de méthylprednisolone.
3- Acétazolamide :
Le Diamoxt peut être utilisé pour traiter l’oedème maculaire
cystoïde.
Il est efficace dans un tiers à la moitié des cas.
4- Autres immunosuppresseurs :
D’autres immunosuppresseurs ont été proposés et ont fait la preuve
de leur efficacité dans le traitement des uvéites intermédiaires, notamment la ciclosporine, utilisée dans le traitement des formes corticorésistantes et chez l’enfant.
Cyclophosphamide,
azathioprine et méthotrexate ont également démontré une
certaine efficacité.
Cependant, les nombreux effets secondaires liés à
l’emploi de ces agents en font limiter l’utilisation.
5- Traitement chirurgical
:
Deux types de traitements chirurgicaux sont parfois utilisés pour le
traitement des uvéites intermédiaires : la cryothérapie et la vitrectomie.
* Cryothérapie
:
Aaberg et al ont les premiers démontré en 1973 l’efficacité de la
cryothérapie, chez les patients présentant une uvéite intermédiaire
avec pars planite, dans les cas où les corticoïdes étaient inopérants.
Dans cette série, 35 % des yeux montraient une complète rémission
du processus inflammatoire et tous les yeux présentaient des signes
marqués d’amélioration.
Devenyi et al confirment ces données et
suggèrent que si les corticoïdes doivent rester le traitement de
première intention des uvéites intermédiaires, la cryothérapie doit
être utilisée chez les patients réfractaires au traitement stéroïde ou
chez ceux présentant une néovascularisation.
De la même façon, Nussennblatt réserve l’utilisation de la cryothérapie aux formes
comportant une néovascularisation périphérique ou compliquées
d’hémorragies intravitréennes.
Le mécanisme d’action de la
cryothérapie reste controversé.
La cryothérapie pourrait agir en
détruisant le réseau vasculaire de la périphérie rétinienne,
supprimant ainsi une porte d’entrée de l’inflammation.
Josephberg et al suggèrent, sur des arguments angiographiques,
que le mécanisme d’action de la cryothérapie serait l’occlusion d’une
néovascularisation rétinienne périphérique occulte.
Des
complications à type de membrane épirétinienne, cataracte, oedème
maculaire, hyphéma et décollement de rétine ont été rapportées.
* Vitrectomie
:
Une diminution de l’inflammation intraoculaire a été rapportée
après réalisation de vitrectomie par la pars plana chez les patients
présentant une uvéite intermédiaire, probablement parce que les
médiateurs de l’inflammation étaient ainsi retirés de l’oeil.
Il est par
ailleurs intéressant de noter que comme les uvéites intermédiaires
surviennent chez des sujets jeunes, un décollement physiologique
de vitré n’a pas encore eu lieu.
La réalisation d’une vitrectomie
permettrait de ne plus faire jouer au vitré le rôle de tuteur de
l’inflammation.
Cependant, dans la série décrite par Mieler, 50%
des patients ont dû, par la suite, subir une autre intervention
chirurgicale, en raison de la survenue de décollement de rétine,
d’hémorragies intravitréennes récidivantes ou de cataracte.
La vitrectomie doit être réservée aux formes comportant hémorragies
intravitréennes, décollement de rétine, membrane épirétinienne, ou hyalite dense
ne s’éclaircissant pas sous traitement médical.
*
Chirurgie de la cataracte :
La cataracte est une complication fréquente au cours des uvéites
intermédiaires, conséquence à la fois de l’inflammation et de
l’administration de corticoïdes.
Il est nécessaire de contrôler strictement l’inflammation en pré- et
postopératoire, l’intervention chirurgicale étant en elle-même
source d’exacerbation de l’inflammation.
Ces exacerbations s’observent le plus souvent 3 jours après
l’intervention.
L’administration d’une corticothérapie par voie générale encadrant
l’intervention est habituellement recommandée ; elle est associée à
une surveillance rapprochée, afin de détecter rapidement toute
complication et de la traiter de façon appropriée.
6- Photocoagulation :
En raison du risque de survenue de décollement de rétine après
cryothérapie, notamment lorsqu’elle est associée à une
vitrectomie, la réalisation d’une photocoagulation panrétinienne a
été proposée par certains auteurs comme une alternative à la
cryothérapie.
Park et al présentent une série de dix yeux
ayant bénéficié d’une photocoagulation périphérique dans le cadre
d’uvéite intermédiaire compliquée de hyalite, d’oedème maculaire,
d’une néovascularisation de la base du vitré.
Cinq yeux ont bénéficié
de ce seul traitement, tandis que cinq yeux ont de plus bénéficié
d’une vitrectomie.
Dans tous les cas, l’inflammation a été stabilisée,
l’oedème maculaire cystoïde diminué et la néovascularisation a
régressé.
Aucun cas de décollement de rétine ne fut observé.
L’intérêt de la photocoagulation serait triple : elle serait aussi efficace
que la cryothérapie pour réduire la néovascularisation de la base du
vitré, elle n’augmenterait pas l’incidence du décollement de rétine
et pourrait même constituer un barrage à la formation de celui-ci, et
contrairement à la cryothérapie, elle n’accentuerait pas la rupture de
la barrière hématorétinienne.
Conclusion
:
Il est important de noter que la prise en charge des uvéites
intermédiaires comporte deux difficultés principales.
La première est
d’ordre thérapeutique.
Les uvéites intermédiaires sont des affections
chroniques qui évoluent fréquemment sur plusieurs années.
Leur
pronostic visuel est globalement bon.
Il est de ce fait parfois difficile
d’appréhender au mieux le rapport risque/bénéfice de la mise en route de
traitement au long cours.
La seconde difficulté est d’ordre étiologique.
Reconnaître la cause d’une uvéite intermédiaire n’est pas toujours aisé,
notamment en l’absence de point d’appel extraophtalmologique.
Il
convient de réaliser une enquête étiologique orientée, minutieuse et
volontiers multidisciplinaire, avant de conclure au diagnostic d’uvéite
intermédiaire idiopathique.
La mise en route d’un traitement adapté en
dépend.