Urgences en ophtalmologie
(Suite) Cours de
réanimation - urgences
Urgences traumatologiques
:
Elles représentent une part importante des urgences ophtalmologiques,
en raison de leur fréquence et de leurs étiologies variées.
Elles peuvent
mettre en jeu le pronostic anatomique et fonctionnel du globe oculaire,
d’où l’importance d’une prise en charge efficace.
Le médecin généraliste
confronté à une urgence ophtalmologique traumatologique doit évaluer
l’importance des lésions oculaires afin d’établir le degré d’urgence,
effectuer les premiers soins avant de diriger si besoin le patient en milieu
spécialisé.
Nous étudierons successivement les différentes causes de traumatisme
oculaire.
A - Corps étranger externe cornéoconjonctival
:
Il s’agit d’un motif fréquent de consultation en urgence, notamment en
médecine du travail.
Typiquement, le patient se plaint d’une gêne importante, voire d’une
douleur oculaire intense, permanente, survenue pendant une activité
professionnelle ou de bricolage (meulage, perçage…).
Il existe souvent
un intervalle libre de durée variable. Le patient présente également une
photophobie importante, avec larmoiement et blépharospasme.
Après avoir instillé une goutte de collyre anesthésique, le médecin
généraliste doit examiner avec soin la cornée, la conjonctive, les culs-de-sac conjonctivaux à la recherche d’un corps étranger superficiel.
Il faut également retourner la paupière supérieure.
Cet examen
peut être effectué en s’aidant du grossissement de l’ophtalmoscope.
Un corps étranger conjonctival superficiel peut être facilement enlevé à
l’aide d’un coton, après instillation d’un collyre anesthésique.
Il
convient ensuite de prescrire un collyre antibiotique pendant quelques
jours.
Si les signes persistent après l’ablation du corps étranger, un
recours au spécialiste est indispensable (corps étranger associé
méconnu, lésion associée, corps étranger intraoculaire…).
En cas de corps étranger cornéen, il est préférable d’adresser le patient à
l’ophtalmologiste qui peut, grâce à l’examen au biomicroscope :
– apprécier la taille, la profondeur et la situation par rapport à l’axe
optique du corps étranger ;
– éliminer la présence d’une perforation cornéenne (corps étranger transfixiant) ;
– apprécier l’importance d’une éventuelle réaction inflammatoire
secondaire ;
– effectuer sous contrôle biomicroscopique l’ablation du corps étranger
qui est souvent enchâssé dans l’épithélium cornéen ; après l’ablation du
corps étranger, un pansement occlusif pour 24 heures et un traitement
associant un collyre antiseptique et un collyre ou une pommade
cicatrisants sont prescrits.
Un contrôle est souvent nécessaire après un délai d’environ 6 jours afin
d’apprécier la cicatrisation cornéenne et d’éviter l’évolution vers une
complication (abcès de cornée, réaction inflammatoire persistante
devant faire suspecter une plaie perforante méconnue…).
La survenue d’un corps étranger cornéen superficiel est un accident
fréquent, dont la symptomatologie et les circonstances de survenue sont
souvent évocatrices.
Confronté à cette pathologie, la prudence est de
mise et le recours au spécialiste doit être systématique afin d’éviter de
sous-estimer la gravité de l’atteinte ou de méconnaître une atteinte
associée.
Le traitement préventif repose sur le port d’une protection oculaire lors
d’activités à risques.
B - Brûlures oculopalpébrales
:
1-
Brûlures thermiques
:
Les brûlures thermiques peuvent être occasionnées par un grand nombre
d’étiologies (flamme, jet de vapeur, projection de métal en fusion…).
Les brûlures palpébrales sont plus fréquentes que les brûlures oculaires
proprement dites et leur prise en charge est similaire à celle des brûlures
cutanées, avec la particularité de la nécessité d’une attention particulière
au niveau des points lacrymaux.
Les brûlures du globe oculaire sont rares, en raison du film lacrymal qui,
en s’évaporant juste avant le réflexe de clignement, permet d’absorber
la majeure partie de l’énergie thermique.
Cependant, tous les stades de gravité peuvent se voir, du simple chémosis conjonctival sans atteinte cornéenne à la brûlure grave
intéressant la totalité de la surface oculaire et caractérisée par une
nécrose conjonctivale ischémique (conjonctive pâle) et une atteinte
cornéenne (aspect trouble, parfois blanchâtre).
Dans tous les cas, le recours au spécialiste s’impose, avec un degré
d’urgence proportionnel à l’importance des lésions, après établissement
par le généraliste d’un bilan rapide des lésions et l’ablation d’éventuels
corps étrangers visibles.
L’administration de calmants par voie générale
et la réalisation d’un pansement occlusif après instillation de
mydriatique et de pommade antibiotique est souhaitable dans les formes
de moyenne à haute gravité et/ou quand l’accès au spécialiste est
difficile.
2- Brûlures chimiques
:
Les brûlures chimiques de la surface oculaire sont malheureusement
relativement fréquentes (accidents domestiques ou professionnels) et
ont des conséquences parfois dramatiques, surtout en cas de délai
thérapeutique.
On oppose classiquement :
– les brûlures par acides (chlorhydrique, nitrique, sulfurique) : leur
atteinte est d’emblée maximale et limitée, car ils coagulent les protéines
de la surface oculaire, ce qui stoppe leur pénétration en profondeur ;
– les brûlures par bases (soude, ammoniaque, potasse, chaux, certains
ciments) qui sont beaucoup plus graves car elles induisent une lyse
protéique qui favorise leur diffusion en profondeur, conduisant à des
atteintes souvent sévères et d’aggravation progressive.
Là encore, tous les stades de gravité peuvent se voir, en fonction de
l’importance de la projection, du temps de contact et de la nature de
l’agent responsable.
Dans tous les cas, un lavage oculaire immédiat, abondant, soigneux et
prolongé (jusqu’à 30 minutes) est nécessaire.
Il est le plus souvent
effectué sur le lieu même de l’accident, à l’eau courante ou, mieux, au
sérum physiologique s’il est disponible.
Le lavage est donc un geste
d’une extrême urgence et, en cas de blépharospasme important, il ne faut
pas hésiter à écarter les paupières de force.
Le recours au spécialiste n’est effectué qu’après le lavage initial mais
est bien entendu systématique, même en cas d’atteinte initialement
d’apparence mineure.
Celui-ci fait un bilan précis, complète le lavage
par l’ablation de corps étranger solides éventuels (ciments) et met en
route le traitement local et la surveillance, avec hospitalisation si
nécessaire.
3- Héliotraumatisme
:
Il est à l’origine de lésions cornéennes et, dans certains cas sévères, de
lésions rétiniennes.
Les lésions cornéennes se rencontrent généralement au cours d’un séjour
dans une zone de fort ensoleillement (montagne, plan d’eau), avec
réverbération et absence ou insuffisance de protection par des verres
filtrants.
Elles sont la conséquence de l’évaporation excessive du film
lacrymal, responsable de micro-ulcérations épithéliales cornéennes
(kératite ponctuée superficielle).
Le diagnostic repose sur l’anamnèse et
l’inspection de la surface cornéenne après instillation d’une goutte de
fluorescéine.
Outre le traitement préventif (port de verre filtrants
d’indice adapté), une fois les lésions constituées, il convient de prescrire
un traitement associant cicatrisants en collyres, antiseptiques en
couverture et pansement occlusif temporaire.
Le recours au spécialiste
n’est pas indispensable, à condition qu’il n’y ait pas de doute
diagnostique et que le traitement procure une amélioration rapide.
Les lésions rétiniennes surviennent au cours de circonstances
particulières, typiquement chez des sujets observant une éclipse solaire
sans protection adaptée.
La focalisation d’un flux lumineux intense au
niveau de la fovéa induit des lésions de l’épithélium pigmentaire de la
rétine et l’examen du fond d’oeil révèle une lésion initialement
oedémateuse, blanchâtre, au niveau de la région périfovéolaire.
Certaines atteintes sont réversibles et n’entraînent pas de séquelles
visuelles, d’autres aboutissent à la constitution d’une cicatrice
pigmentée du fond d’oeil, se traduisant selon leur localisation par une
baisse d’acuité sévère et/ou un scotome définitif.
En dehors du
traitement préventif, il n’y a guère de mesures thérapeutiques
satisfaisantes pour ce type d’affection.
4- Coup d’arc
:
C’est un motif de consultation nocturne fréquent, en raison du caractère
retardé (de 4 à 6 heures) des signes fonctionnels par rapport à l’atteinte
initiale.
Les patients consultent pour douleurs oculaires, avec
photophobie majeure, parfois blépharospasme.
L’anamnèse est très
évocatrice (soudure à l’arc sans protection oculaire dans les heures
précédant la consultation).
L’examen, aidé par l’instillation d’un collyre
anesthésique, retrouve typiquement un aspect de kératite ponctuée
superficielle bilatérale et diffuse, avec hyperhémie conjonctivale.
Le traitement associe, outre l’occlusion, la prescription d’une pommade
antiseptique, de collyres cicatrisants et un mydriatique temporaire.
L’instillation répétée de collyre anesthésique est à proscrire et constitue
un facteur aggravant.
C - Contusion orbitaire
:
Toute contusion orbitaire doit faire rechercher une contusion oculaire
associée.
1- Examen clinique
:
À l’interrogatoire, la présence d’une diplopie peut traduire :
– soit la présence d’un hématome au niveau de la gaine musculaire
(droit inférieur) ;
– soit l’incarcération du muscle droit inférieur au niveau du foyer de
fracture.
À l’inspection, on retrouve fréquemment :
– un hématome palpébral dont l’importance gêne parfois l’examen des
structures sous-jacentes ;
– une énophtalmie, plus rare, parfois difficile à mettre en évidence, mais
évocatrice de fracture du plancher.
La palpation permet parfois de découvrir :
– un léger décalage osseux, avec sensation douloureuse exquise, très
évocateurs de fracture du rebord orbitaire ;
– un emphysème sous-cutané qui signe la présence d’une effraction
sinusienne ;
– une hypo- ou anesthésie dans le territoire du nerf sous-orbitaire.
2- Examens paracliniques
:
– Examens radiologiques standards du crâne (face, profil, Blondeau, Hirtz).
– Examen tomodensitométrique de l’orbite et/ou du massif facial en cas
de signes cliniques évidents de solution de continuité osseuse.
3- Traitement
:
En cas d’hématome palpébral isolé, un traitement associant antiinflammatoires
locaux et généraux est indiqué.
En cas de fracture du plancher de l’orbite, un avis spécialisé est
nécessaire, afin de compléter le bilan (Lancaster, imagerie par résonance
magnétique [IRM]...) et de poser l’indication d’une intervention
réductrice par voie sanglante, réalisée au mieux sans urgence, mais dans
les jours suivant le traumatisme initial.
D - Syndrome de contusion oculaire
(sans plaie du globe) :
Il peut être isolé ou associé au syndrome de contusion orbitaire décrit
précédemment.
C’est une pathologie fréquente dans la vie courante (classique bouchon
de champagne, rixes, sports, accidents du travail...) qui impose un avis
spécialisé rapide.
L’interrogatoire du patient précise les circonstances de survenue et les
signes fonctionnels induits par le traumatisme (gêne, douleurs, baisse
d’acuité visuelle...).
L’examen en milieu spécialisé permet de rechercher
différentes atteintes.
1- Atteinte traumatique du segment antérieur
:
– Ulcérations cornéennes (fluorescéine).
– Hyphéma (comblement partiel ou total du segment antérieur par du
sang provenant de la rupture traumatique d’un ou plusieurs vaisseaux
iriens).
– Mydriase post-traumatique.
– Iridodialyse (rupture de la base de l’iris à l’origine d’un décentrement
pupillaire).
– Luxation du cristallin, cataracte post-traumatique (plus ou moins
complète et d’apparition parfois retardée).
– Hypertonie oculaire, voire glaucome, de mécanisme souvent
complexe et de traitement difficile.
Le traitement médical et/ou chirurgical et le suivi sont assurés par
l’ophtalmologiste en fonction de l’importance des lésions associées
2- Atteinte traumatique du segment postérieur
:
Elle est fréquente et grève le pronostic visuel.
Il peut s’agir :
– d’hémorragie du vitré, responsable d’une diminution de la lueur
pupillaire gênant, voire interdisant, l’examen du fond d’oeil ;
– d’oedème rétinien du pôle postérieur (oedème de Berlin) ; la rétine est
blanchâtre et il existe quelques hémorragies diffuses ;
– de décollement de rétine (classiquement désinsertion rétinienne à
l’ora serrata).
Là encore, tout patient suspect de contusion oculaire avec atteinte du
segment postérieur doit être pris en charge en milieu spécialisé.
E - Plaies perforantes oculaires
:
Leur incidence a nettement diminué depuis l’instauration de l’obligation
du port de la ceinture de sécurité.
Elles surviennent dans le cadre
d’accident du travail ou d’agressions (tessons de bouteille...).
Toute plaie oculaire met en jeu le pronostic visuel mais le diagnostic est
parfois difficile, surtout en cas de plaie minime.
Il est donc important
pour le médecin généraliste de connaître les signes qui, même si leur
absence n’élimine pas le diagnostic, permettent de suspecter une plaie
oculaire.
1- Examen
:
– L’oeil est mou à la palpation en cas de plaie d’importance moyenne.
– La déformation pupillaire est un bon signe et s’accompagne souvent
d’un aplatissement, voire d’un effacement de la chambre antérieure
(l’iris semble adossé à la face postérieure de la cornée).
Il faut alors
rechercher une plaie cornéenne ou limbique, avec ou sans hernie visible
de l’iris.
– En cas d’éclatement scléral, les structures oculaires internes
(choroïde, vitré) sont parfois extériorisées au niveau des plaies, mais
ceci est parfois difficile à mettre en évidence en cas de plaie sclérale
postérieure.
– Le véritable piège diagnostique est constitué par la plaie petite, voire
punctiforme, parfois masquée par une hémorragie sous-conjonctivale ou
peu visible en cas de trajet intracornéen spontanément coapté.
L’examen
minutieux et le recueil des facteurs déclenchants prennent ici toute leur
importance.
En conclusion, il ne faut pas hésiter à adresser un patient suspect de plaie
perforante au spécialiste au moindre doute.
Celui-ci peut s’aider
d’examens complémentaires (radiographie, échographie, scanner),
instaurer un traitement et prévenir les complications.
Rappelons que
l’IRM céphalique est contre-indiquée en cas de suspicion de corps
étranger de nature métallique.
2- Traitement
:
En cas de suspicion de plaie pénétrante, le médecin généraliste peut
légitimement instaurer une antibiothérapie prophylactique parentérale à
large spectre, en utilisant des molécules ayant une bonne pénétration
intraoculaire (quinolones de deuxième génération, fosfomycine...).
Le
patient doit être ensuite transféré en milieu spécialisé.
Le traitement est
chirurgical, réalisé sous anesthésie générale, avec évacuation du ou des
corps étrangers, nettoyage des plaies et sutures réparatrices.
Une prise en charge efficace vise à réduire l’incidence des complications
immédiates, en particulier infectieuses, et tardives.
Cependant, malgré
une prise en charge bien conduite, en fonction de la localisation et de
l’importance de la plaie, d’autres complications peuvent survenir à plus
ou moins long terme (cataracte, glaucome, décollement de rétine…).
F - Plaies palpébrales
:
Elles sont fréquentes, isolées ou associées à une plaie du globe oculaire
ou à d’autres plaies multiples.
L’interrogatoire doit faire préciser les circonstances de l’accident et
l’état vaccinal du patient.
L’examen débute par un nettoyage soigneux
des paupières, en s’aidant de compresses imbibées de sérum
physiologique, ce qui permet d’ôter les corps étrangers superficiels et
les caillots souvent abondants.
Il est utile pour le médecin généraliste de
connaître quelques règles simples.
– Une plaie purement épidermique, horizontale, ne nécessite en
principe pas de suture.
– Une plaie profonde localisée à la partie externe de la paupière
supérieure peut concerner la glande lacrymale principale.
– Une plaie profonde de la paupière supérieure peut concerner le muscle
releveur de la paupière et implique la réalisation d’une suture soigneuse
plan par plan afin d’éviter la constitution d’un ptosis post-traumatique.
– Une plaie palpébrale intéressant le bord libre expose, en cas de suture
imparfaite, à la constitution d’un aspect de colobome inesthétique, d’un
ectropion ou d’un distichiasis.
– Une plaie située à la partie interne des paupières peut occasionner une
section des canalicules lacrymaux.
La réparation d’une telle section
impose une suture soigneuse sous microscope opératoire afin d’éviter
un larmoiement chronique et une reprise secondaire.
La prise en charge d’une plaie de paupière suppose donc la parfaite
connaissance de l’anatomie palpébrale et, en cas de suspicion d’atteinte
de structures « nobles », le médecin généraliste ne doit pas hésiter à
« passer la main » au spécialiste.
G - Exophtalmie post-traumatique
:
Elle doit faire rechercher :
– une fistule carotidocaverneuse ; l’exophtalmie est alors pulsatile, il
existe une dilatation considérable des vaisseaux conjonctivaux et, au
fond d’oeil, une dilatation veineuse est visible ;
– une méningoencéphalocèle, caractérisée par la survenue d’une hernie
méningée dans l’orbite qui transmet le pouls cérébral.
Inflammation palpébrale aiguë
:
A - Pathologies bénignes des paupières
:
Ces pathologies, parfois spectaculaires en cas d’oedème ou d’érythème
associés importants, font plus partie de l’urgence « ressentie » que de la
véritable urgence et guérissent habituellement sans problèmes sous
traitement adapté.
– Le chalazion : il s’agit d’un granulome inflammatoire induit par
l’obstruction du canal excréteur d’une glande de Meibomius.
Il apparaît
comme une tuméfaction palpébrale arrondie, bien visible en éversant la
paupière.
En l’absence de régression sous traitement anti-inflammatoire
et antibiotique local, il faut pratiquer l’incision chirurgicale du chalazion
avec excision de la paroi.
– L’orgelet : c’est un furoncle de la base d’un cil, qui peut provoquer un
oedème palpébral adjacent. Les antibiotiques locaux suffisent à entraîner
la guérison en quelques jours.
– Les blépharites : elles sont fréquentes, d’origines variées (infections,
allergies...) et réalisent une inflammation du bord libre des paupières,
souvent associée à des sécrétions engluant la base des cils.
En
cas de blépharite infectieuse à germe banal, il faut rechercher un diabète.
– La dacryoadénite : elle se traduit par une inflammation localisée en
regard de la glande lacrymale, que l’on peut palper sous le rebord osseux
orbitaire externe supérieur.
Elle est le plus souvent virale (oreillons,
rougeole, adénovirus…) et régresse spontanément.
Quand elle est
bactérienne, l’évolution peut se faire vers l’abcédation avec douleurs et
oedème important.
B - Cellulite orbitaire
:
C’est une affection grave, qui complique l’évolution d’une affection
orbitaire ou faciale (plaie pénétrante négligée, sinusite…).
Le patient se plaint de douleurs rétro- et/ou périoculaires associées à une
baisse importante de la vision.
La palpation est douloureuse et il existe
une limitation plus ou moins marquée des mouvements du globe,
associée à un degré variable d’exophtalmie.
Ce tableau s’accompagne d’un syndrome infectieux général : fièvre,
accélération du pouls, frissons…
Le traitement doit être instauré de façon précoce en raison du risque
d’évolution vers la thrombophlébite du sinus caverneux.
Il repose sur
une antibiothérapie lourde et prolongée par voie parentérale, ainsi que
sur le traitement de la pathologie initiale après identification de celle-ci.
Il faut ainsi rechercher :
– une plaie pénétrante de l’orbite négligée ;
– une sinusite frontale, ethmoïdale ou maxillaire (radiographie de
sinus) ;
– un abcès du sac lacrymal négligé ;
– une ostéomyélite du maxillaire supérieur chez le nourrisson ;
– une staphylococcie de la face ayant provoqué une thrombophlébite
des veines orbitaires ;
– une septicémie à l’origine d’emboles septiques orbitaires.
C - Dacryocystite aiguë
:
Elle se définit par la distension inflammatoire du sac lacrymal, réalisant
une tuméfaction, voire un véritable abcès siégeant entre l’angle interne
et la base du nez.
L’interrogatoire doit rechercher la notion
d’épisodes de larmoiement antérieurs et la pression du sac peut parfois
faire sourdre un liquide purulent par les points lacrymaux.
Le traitement
initial associe des antibiotiques par voie générale et éventuellement une
incision chirurgicale.
Le patient doit ensuite être adressé au spécialiste
qui pratique à froid une intervention destinée à rétablir la perméabilité
des voies lacrymales (dacryo-cysto-rhinostomie).
Diplopie
:
La survenue d’une diplopie impose de distinguer son caractère monoou
binoculaire.
Une diplopie monoculaire persiste après l’occlusion d’un oeil.
Elle
oriente vers une cause oculaire et il faut éliminer en fonction du
contexte : une cataracte, une luxation cristallinienne, une iridodialyse…
Une diplopie binoculaire disparaît après l’occlusion d’un oeil.
Elle
traduit la survenue d’une anomalie au niveau de l’équilibre oculomoteur.
Elle implique la réalisation d’un examen ophtalmologique et
neurologique complet. Celui-ci permet parfois de porter un diagnostic
de localisation de l’atteinte :
– les syndromes alternes traduisent une atteinte du tronc cérébral ; ils
associent paralysie d’un nerf crânien et hémiplégie controlatérale ;
– le syndrome de la fente sphénoïdale associe une paralysie de tous les
muscles oculomoteurs et une atteinte du trijumeau du même côté ;
l’atteinte se situe au niveau de la fente sphénoïdale ou de la paroi du
sinus caverneux ; l’association à une cécité traduit l’atteinte du sommet
de l’orbite (syndrome de l’apex orbitaire).
– toxiques (botulisme, intoxications par les champignons, les
barbituriques, le plomb, l’alcool…) ;
– diabétiques (paralysie du nerf abducens) ;
– musculaires (myasthénie, maladie de Basedow).
Les signes de gravité sont constitués par :
– un contexte traumatique neurologique ;
– un trouble de la conscience associé ;
– l’existence d’une mydriase unilatérale (risque d’engagement) ;
– la baisse d’acuité visuelle (compression du nerf optique par une
tumeur orbitaire, un hématome…) ;
– des douleurs (anévrisme intracrânien chez le patient jeune, maladie
de Horton chez le sujet âgé).
2- Traitement
:
Il est avant tout étiologique, d’où l’importance du diagnostic, et il ne faut
pas hésiter à demander un scanner en urgence et transférer le patient en
milieu spécialisé quand il existe un ou plusieurs des signes de gravité
cités précédemment.
Une amélioration du confort du patient peut être obtenue par le port d’un
prisme, voire l’occlusion d’un oeil dans les cas moins graves.
Anomalies du champ visuel
:
La mise en évidence et la caractérisation du déficit sont parfois difficiles,
en dehors des déficits majeurs (type hémianopsie) pour lesquels
l’exploration du champ visuel aux doigts suffit à établir le diagnostic.
Les circonstances de survenue d’une anomalie du champ visuel sont
variables et peuvent correspondre à plusieurs types d’atteinte et de
localisation (rétine, papille, nerf optique dans sa portion intraorbitaire
ou intracrânienne, cortex visuel), en général sévères. Ces atteintes ne
seront pas détaillées ici.
L’examen ophtalmologique est donc toujours
nécessaire et le spécialiste peut avoir recours aux examens
complémentaires périmétriques cinétiques (périmétrie manuelle de
Goldmann) ou automatisés (périmétrie assistée par ordinateur).
Le diagnostic étiologique est donc effectué par l’ophtalmologiste et/ou
le neurologue et l’hospitalisation n’est justifiée que dans certaines
indications (décollement de rétine, tumeurs au niveau des voies
optiques…).