La conjonctive est une membrane muqueuse qui couvre la surface
antérieure de l’oeil jusqu’au limbe et couvre la surface interne des
paupières jusqu’à sa jonction avec l’épiderme palpébral au niveau
du bord libre palpébral.
L’épithélium est de type non stratifié
kératinisé de surface, des cellules sont formées au niveau de la
couche basale et migrent vers la superficie où une exfoliation
spontanée survient.
De nouvelles cellules sont générées au limbe et
au niveau du bord libre palpébral d’où elles migrent vers le fornix
des deux côtés.
Entre les cellules épithéliales, des cellules isolées de type mucipare
sont présentes en nombre variable.
Les mélanocytes sont
normalement présents au niveau de la couche basale.
Leur nombre
et leur contenu en mélanine sont variables.
Le stroma conjonctival dans la région épibulbaire est composé de tissu conjonctif lâche avec
des lymphatiques de drainage à fines parois et de petits vaisseaux
sanguins.
La conjonctive du tarse est adhérente au stroma connectif
des paupières.
L’épithélium du fornix est de type colonnaire avec
un stroma lâche sous-jacent.
En général, de rares cellules
inflammatoires, lymphocytes, éosinophiles, granulocytes et
plasmocytes sont présentes.
Les tumeurs bénignes de la conjonctive sont divisées en hamartomes
et choristomes.
Les hamartomes sont formés d’une quantité
anormale de tissu qui peut être normalement présent sur ce site.
Dans les choristomes, il existe une quantité de tissu qui ne doit pas
être présent sur ce site.
Les hamartomes comprennent les pigmentations conjonctivales, le
nævus d’Ota, le melanosis oculi, les nævi conjonctivaux, les
hémangiomes capillaires et caverneux, les lymphangiomes.
Les choristomes comprennent les kystes dermoïdes, les tumeurs
dermoïdes, le dermolipome/lipodermoïde, les ectopies de la glande
lacrymale, les ectopies des glandes sébacées, les ectopies des glandes
sudoripares, de cartilage, les tératomes (choristome complexe),
auxquels s’apparentent le nævus sébacé de Jadassohn et le syndrome
de Goldenhar (dysplasie oculo-auriculo-vertébrale).
Kystes conjonctivaux
:
A - KYSTES PAR INCLUSION CONJONCTIVALE :
L’épithélium conjonctival se trouve enchâssé dans une petite plaie
par un traumatisme, un corps étranger ou la chirurgie et le kyste
s’agrandit par production de liquide et de mucus par les cellules
mucipares et par desquamation de cellules épithéliales.
Au fur et à
mesure de l’extension, l’épithélium s’affine aboutissant à ce que les
cellules non kératinisantes, épithéliales et mucipares, deviennent
difficiles à reconnaître.
Lorsqu’un kyste est localisé sur un canal de drainage de la glande
lacrymale, il est le plus souvent situé dans la région temporale du
cul-de-sac supérieur.
Dans la paroi d’un tel kyste, une
transition entre l’épithélium cuboïde du canal excrétoire et
l’épithélium stratifié peut être notée.
B - KYSTES DERMOÏDES/ÉPIDERMOÏDES :
Les tumeurs conjonctivales kystiques de la région supérotemporale
près du rebord orbitaire peuvent s’étendre vers la conjonctive et
dans l’orbite. Ceci peut causer un déficit osseux dans la paroi
orbitaire.
L’étiologie est probablement la même que celle d’un dermoïde solide du limbe : c’est un résidu embryonnaire,
ectodermique, qui durant le développement embryonnaire n’a pas
migré et est resté au voisinage de l’oeil et de l’orbite.
Ces kystes
peuvent s’agrandir du fait de la sécrétion de produits glandulaires
ou par croissance lente des composants variés à l’intérieur de la
tumeur.
Un kyste épidermoïde est seulement revêtu d’un épithélium
kératinisant, alors qu’un kyste dermoïde peut comporter des
annexes de type pileux, sudoripare, sébacé ou lacrymal et du tissu
connectif.
Dans environ 10 % des cas, l’épithélium est de type non
kératinisant.
Parfois, les éléments annexiels peuvent manquer, ce qui
peut les apparenter à un kyste conjonctival simple.
Ces kystes
sont entourés d’un épithélium conjonctival et sont souvent localisés
plutôt dans la région supéro-interne et interne.
La rupture des kystes
peut provoquer des réactions inflammatoires très sévères.
Ceci peut
aussi survenir lors de l’excision chirurgicale et doit être évité car des
granulomes à cellules géantes peuvent apparaître.
Les kystes dermoïdes peuvent être associés avec des malformations
congénitales du premier arc branchial, tel le syndrome de dysplasie
oculo-auriculo-vertébrale de Goldenhar.
Tumeurs conjonctivales solides
:
A - DERMOÏDE DU LIMBE
:
C’est une tumeur blanchâtre, le plus souvent située près du limbe
dans la région de l’ouverture palpébrale ou en inférieur avec parfois,
à sa surface, des follicules pileux.
Histologiquement, ces tumeurs
sont couvertes d’un épithélium stratifié kératinisant et dans le tissu
du stroma sous-jacent, des appendices cutanés tels que des glandes
lacrymales, sébacées ou des follicules pileux peuvent être présents.
Lorsqu’une glande lacrymale ou du cartilage est présent, la tumeur
doit être classée comme un choristome complexe.
B - DERMOLIPOME :
Cette tumeur molle blanc jaunâtre est souvent située latéralement
près du canthus externe, à proximité de la glande lacrymale. Son
excision doit respecter les voies excrétoires lacrymales.
Ce choristome doit être différencié d’une hernie graisseuse produite par
le passage de tissu graisseux orbitaire à travers une fente du septum.
Cette dernière a une surface lisse, un aspect rosé et un épithélium
superficiel intact et les patients ont généralement plus de 40 ans.
L’histologie des dermolipomes montre une masse composée
de peau, d’appendice sous-cutané, de graisse normale et de tissus
fibreux.
Comme les dermoïdes du limbe, les dermolipomes peuvent
être associés avec le nævus linéaire de Jadassohn et des altérations
du système nerveux central (syndrome de Solomon).
C - TISSU GLANDULAIRE LACRYMAL ECTOPIQUE :
Il peut être observé dans toute la région périoculaire, dans les culsde-
sac, dans la conjonctive tarsale, caroncule, ou faire partie d’un
choristome complexe du limbe.
Il est souvent mal reconnu
cliniquement et peut être parfois seulement détecté sur l’histologie
lorsque la tumeur a été enlevée pour des raisons cosmétiques ou en
raison d’une suspicion de tumeur maligne.
D - TISSU ECTOPIQUE SÉBACÉ :
Il peut lui aussi survenir dans toute la région, mais il s’agit rarement
d’une tumeur symptomatique et donc rarement reconnue
cliniquement.
Parfois, ces lésions sont retrouvées incidemment dans
un tissu tumoral qui est enlevé pour des raisons cosmétiques ou en
raison d’une suspicion de malignité.
E - CHORISTOMES OSSEUX
:
Ils sont rares au niveau de la région antérieure de l’oeil ; ils peuvent
être présents sous forme de tumeur sous-conjonctivale dans la
région supérotemporale de l’épisclère et sont composés d’un tissu
osseux entouré d’un tissu fibreux.
F - CHORISTOMES COMPLEXES :
Ils peuvent être considérés comme un fragment isolé de tissu ectodermique embryonnaire produisant de la peau, du tissu
graisseux, des appendices cutanés, du tissu lacrymal et
cartilagineux.
Lorsqu’ils surviennent dans l’orbite mais aussi dans
la région limbique, ils ressemblent à un dermoïde, à un
dermolipome ou à un ptérygion.
Ils peuvent être associés à des
malformations congénitales du globe oculaire, à un colobome
choroïdien ou à un nævus de Jadassohn.
Tumeurs épithéliales
:
A - PAPILLOMES :
Ils peuvent survenir dès l’enfance, être multiples, bilatéraux et
d’origine infectieuse ; ils sont souvent pédonculés.
Le papillome
survenant chez l’adulte est plus souvent unilatéral et peut être pédonculé ou sessile.
Le site de prédilection est la conjonctive nasale
près de la caroncule et du pli.
Le système de drainage lacrymal
peut être atteint dans les papillomatoses.
Cliniquement, le
papillome apparaît comme gélatineux, rosé, avec souvent de petites
taches rouges représentant de fins vaisseaux sanguins
perpendiculaires à la surface.
Les papillomes, pigmentés chez
le mélanoderme, peuvent être confondus avec un nævus ou un
mélanome.
Histologie :
L’épithélium conjonctival hyperplasique et acanthotique couvre des
capillaires arborisés inclus dans des tiges de tissu conjonctif lâche.
Des cellules caliciformes peuvent être présentes.
Quelques cellules
épithéliales individuelles près de la surface peuvent présenter un
aspect de poïkilocytose.
Les papillomes juvéniles et de l’adulte ont
une origine virale supposée et les virus de papillome humain (hPV)
de types 6, 11, 16 ainsi que l’herpès virus simplex de type 1 ont été
retrouvés par des techniques en immunoperoxydase, en hybridation
in situ et par polymerase chain reaction (PCR).
Cependant, ces
souches d’hPV peuvent aussi être présentes dans la conjonctive
normale et dans les membranes muqueuses.
Elles peuvent envahir
la tumeur secondairement ou induire la prolifération tumorale dans certaines conditions, par exemple après irradiation aux
ultraviolets.
De ce fait, leur rôle n’est pas clair. Une entité séparée
apparaît être le papillome limbique sessile qui est difficile à
différencier cliniquement du carcinome in situ, avec aussi une
tendance à la récidive mais il ne s’agit pas d’une tumeur
précancéreuse. Sur le plan thérapeutique, l’excision simple est
suffisante.
Treize pour cent des papillomes ont une tendance à la
récidive.
La cryothérapie, les médicaments antiviraux, l’interféron
en administration topique ou systémique ont été utilisés avec des
résultats favorables.
Il est très rare qu’un papillome progresse vers
la dysplasie ou le carcinome.
B - PAPILLOME INVERSÉ :
C’est une tumeur rare de la conjonctive.
Il peut survenir au niveau
du pli, de la conjonctive nasale ou tarsale.
Il est plus fréquent au
niveau du système du drainage lacrymal.
Histologie :
On constate une croissance inversée de l’épithélium conjonctival acanthotique incluant des cellules caliciformes qui peuvent donner
un aspect kystique à la tumeur.
Ils peuvent récidiver après excision.
Au niveau du système conjonctival et du drainage lacrymal, ils ont
moins tendance à progresser que dans d’autres sites.
C - LEUCOPLASIE
:
C’est une décoloration blanchâtre de la surface conjonctivale.
L’oeil
peut montrer des signes d’inflammation.
Histologie
:
On note une kératinisation des couches superficielles et l’architecture
épithéliale est normale.
D - KÉRATOSE ACTINIQUE :
Il s’agit d’une plaque blanchâtre bien délimitée, le plus souvent
située dans les zones de la conjonctive exposées au soleil ; l’aspect
clinique peut être identique à celui d’une leucoplasie.
Histologie
:
L’épithélium présente des signes de dysplasie et d’atrophie.
Il peut
exister une dégénérescence élastotique (atteinte de l’élastine du tissu
connectif d’aspect irrégulier et fracturé) dans le stroma sous-jacent.
E - HYPERPLASIE PSEUDOCARCINOMATEUSE
OU PSEUDOÉPITHÉLIOMATEUSE :
L’épithélium conjonctival au-dessus d’une lésion inflammatoire de
la conjonctive peut devenir épais et leucoplasique, simulant un
carcinome.
Histologie :
L’épithélium acanthotique et parakératotique peut « envahir » le
stroma sous forme de longs prolongements réticulés irréguliers.
Les
plis, à la différence de l’épithélium conjonctival normal, peuvent
contenir des kystes kératinisés mais il n’y a pas d’atypie cellulaire.
L’épithélium est souvent envahi par des cellules inflammatoires, ce
qui est rare dans les véritables carcinomes.
F - DYSPLASIE :
Elle est reconnue cliniquement comme une surface conjonctivale
irrégulière avec des bords anfractueux ; le patient se plaint de signes
non spécifiques : rougeur et irritation.
La dysplasie peut survenir
dans toutes les zones de la conjonctive épibulbaire, le plus souvent
à l’extérieur de la zone interpalpébrale.
Histologie
:
L’orientation des couches au niveau de l’épithélium est perturbée
avec souvent une acanthose (épaississement des couches médianes)
et une légère atypie.
Une kératinisation modérée est retrouvée.
Le
risque de transformation en tumeur de type carcinome invasif est
plus élevé que dans la kératose actinique.
G - CARCINOME IN SITU (CARCINOME INTRAÉPITHÉLIAL,
NÉOPLASIE INTRAÉPITHÉLIALE CONJONCTIVALE [CIN])
:
L’aspect est celui d’un épaississement conjonctival légèrement
surélevé, d’aspect sessile ou plat, parfois recouvert d’une leucoplasie
et quelquefois gélatineux ou rosé.
Les taches rouges caractéristiques
représentent des capillaires perpendiculaires à la surface comme
dans les papillomes bénins.
L’oeil est souvent légèrement rouge et le
patient se plaint d’une gêne, d’un larmoiement et de sécrétions.
Ces lésions peuvent être pigmentées chez le mélanoderme.
Les néoplasies intraépithéliales chez un patient jeune
peuvent indiquer la présence d’une infection par le virus de
l’immunodéficience humaine (VIH) ou un syndrome de
l’immunodéficience acquise (sida).
Les néoplasies intraépithéliales
conjonctivales sont considérées comme étant associées à l’infection
par le hPV et plusieurs études ont montré la présence de ce virus
dans les sous-types 16 ou 18 par des tests hPV.
Il n’est cependant
pas établi, si ceci représente une cause ou une coïncidence
épidémiologique. Dushku et al ont établi un lien avec
l’expression de p53.
La cytologie exfoliative montre des cellules
épithéliales atypiques, parfois kératinisées.
1- Histologie
:
L’architecture épithéliale est complètement perturbée avec une acanthose, une kératinisation et des mitoses non seulement au
niveau de la couche basale mais aussi plus près de la surface.
La
membrane basale est intacte et certaines de ces CIN peuvent évoluer
vers un épithélioma spinocellulaire invasif.
C’est pourquoi le CIN
est considéré comme une lésion précancéreuse.
Le pourcentage de
progression n’est pas clairement établi car la plupart de ces lésions
sont traitées pour empêcher leur évolution.
Il y a une importante
tendance à la récidive (normalement 50 %).
2- Traitement :
Sur le plan thérapeutique, la première lésion circonscrite doit être
excisée complètement de manière à établir le diagnostic histologique
et de réduire le risque de récurrence.
Si la tumeur est située au
limbe ou sur la cornée, une kératoplastie lamellaire ou pénétrante
peut être nécessaire.
Si la tumeur est très étendue ou si l’excision et
la cryothérapie menacent d’endommager la cornée ou la
vascularisation du segment antérieur, une combinaison d’excision et
de chimiothérapie locale avec 5-fluorouracile à 1 % ou mitomycine à 0,2-0,4 % a été proposée.
H - CARCINOME GLANDULAIRE SÉBACÉ DE TYPE PAGÉTOÏDE IN SITU AFFECTANT SECONDAIREMENT
LA CONJONCTIVE
:
Le carcinome sébacé se manifeste généralement chez les personnes
âgées à partir d’une des glandes sébacées, le plus souvent au niveau
de la paupière supérieure : glande meibomienne ou glande de Zeiss.
Il apparaît souvent comme un gonflement arrondi ou ovalaire de la
paupière sur le côté cutané mais parfois au niveau du bord libre ou
de la conjonctive comme une masse jaunâtre simulant un chalazion.
Il peut aussi apparaître de manière multifocale ainsi que dans la
variété in situ dans laquelle la glande est remplacée par un tissu
carcinomateux sans invasion par le tissu tumoral du stroma périlésionnel (carcinome sébacé de type comédon).
1- Histologie
:
Des cellules spumeuses sont présentes, envahissant les structures
environnantes.
Dans 30 % des cas, la conjonctive tarsale ou
épibulbaire peut être secondairement envahie et le carcinome sébacé
peut s’étendre de manière intraépithéliale, donnant parfois l’aspect
d’une blépharoconjonctivite chronique unilatérale rebelle à tout
traitement et envahir les annexes cutanées, même la glande
lacrymale.
L’histologie montre une prolifération pagétoïde de cellules spumeuses atypiques dans l’épithélium
conjonctival avec une perte de cellules caliciformes.
Si le diagnostic
est fait, les paupières doivent être examinées de manière attentive à
la recherche de petits carcinomes sébacés solides infracliniques.
2- Traitement
:
Un carcinome in situ peut être plus diffus et il est difficile de le
traiter par excision et cryothérapie.
Cette lésion est cependant rare
et souvent négligée pendant de longues périodes.
Un traitement
cytostatique local peut être envisagé mais il est actuellement
complètement expérimental.
Lors d’une excision chirurgicale de ce
type de tumeur, le tissu frais doit être gardé pour les colorations
spécifiques des graisses et le laboratoire doit être averti de la
suspicion clinique.
I - CARCINOMES :
Le carcinome de la conjonctive est plus fréquent chez les personnes
qui ont vécu dans les zones tropicales ou d’une manière générale en
extérieur.
La plupart de ces carcinomes surviennent chez des
patients âgés.
S’ils surviennent à un âge plus précoce, ils peuvent
être associés à un sida.
Les tumeurs pédonculées ou sessiles
affectent généralement le limbe dans la région interpalpébrale.
L’exposition au soleil, l’irritation chronique pourraient jouer un rôle
étiologique.
Dans des cas évolués, la tumeur peut se développer
sous forme d’un aspect en « chou-fleur » blanc ou rosé.
La
variété non kératinisante doit être différenciée cliniquement d’un
papillome bénin ou d’un carcinome in situ.
La cytologie
d’exfoliation, qui ne peut pas différencier un carcinome in situ d’un
carcinome invasif, peut indiquer si la tumeur est un papillome ou
une lésion prémaligne.
L’invasion en profondeur dans le
stroma, dans l’orbite ou au niveau de l’oeil peut aboutir à la perte
fonctionnelle.
1- Histologie
:
La tumeur consiste en une prolifération des cellules épithéliales
atypiques sous forme de travées ou d’enroulement autour de perles
de kératine mélangées avec des cellules individuellement
kératinisées.
Le degré d’atypie et le nombre de mitoses sont
variables.
La cellularité est souvent celle d’une population mixte
comportant une importante réaction inflammatoire au niveau du
stroma.
Des extensions prolongées du carcinome peuvent atteindre
des zones très éloignées de la tumeur elle-même et rendre difficile
une excision totale.
2- Traitement
:
La tumeur initiale doit être excisée de manière complète.
Lorsque
les marges chirurgicales sont atteintes, il y a 80% de risque de
récurrence locale.
La technique de Mohs en salle d’opération peut améliorer les résultats de la chirurgie radicale.
Les récurrences
doivent être traitées par excision et cryothérapie d’adjonction ou
irradiation complémentaire.
Si l’oeil ou l’orbite sont envahis par
le carcinome, l’exentération est quasiment inévitable.
L’invasion
orbitaire est une porte d’entrée pour l’invasion de la base du crâne
qui doit être évitée à tout prix et traitée avec la plus grande précision
et exhaustivité.
L’excision incomplète histologiquement doit être
suivie d’une nouvelle intervention avec irradiation.
Les métastases
régionales au niveau des ganglions préauriculaires et sousmandibulaires
sont rares et doivent être diagnostiquées par cytologie
à l’aiguille.
Ces ganglions doivent être excisés par une chirurgie
radicale des ganglions du cou avec ou sans parotidectomie partielle
et irradiation.
La mortalité par métastases à distance est relativement
rare.
3- Cas particuliers :
Les variétés histologiques telles que le carcinome mucoépidermoïde, le carcinome spinocellulaire et le carcinome adénoïde
planocellulaire sont toutes rares mais peuvent se comporter de
manière agressive et progresser vers une invasion intraoculaire ou
orbitaire.
Affections dégénératives d’aspect
tumoral :
A - PINGUÉCULA :
Dans la zone interpalpébrale, une masse jaunâtre triangulaire peut
atteindre le limbe.
Elle est parfois inflammatoire et interfère
avec l’homogénéité du film lacrymal dans la cornée périphérique.
Histologie
:
La zone surélevée est recouverte d’un épithélium normal et contient
du tissu connectif dégénéré avec parfois nécrose de coagulation
caractérisant l’élastose du tissu connectif.
B - PTÉRYGION :
Cette lésion est facilement reconnaissable du fait de sa forme en
« aile » et d’une vascularisation riche dirigée vers le centre de la
cornée.
Un ptérygion au stade précoce peut ressembler à une
pinguécula, à un choristome complexe, à un carcinome in situ ou à
un nævus non pigmenté atteignant le limbe.
1- Histologie
:
Le ptérygion est une bande de tissu conjonctif vascularisé recouvert
d’un épithélium stratifié.
Dans le stroma, une dégénérescence élastotique peut être présente.
2- Traitement
:
C’est une excision primaire.
Le taux élevé de récurrences a abouti à
la mise au point de traitements expérimentaux adjuvants.
Soulignons cependant que l’autogreffe conjonctivale et parfois
cornéenne est d’une grande utilité pour éviter les récidives.
Dans
certains cas polyrécidivants, une radiothérapie de contact à faibles
doses, type curiethérapie, peut réduire les récidives ou bien un
traitement par cytostatiques locaux tels que le thiotepa ou la
mitomycine.
C - AMYLOÏDOSE :
Cette lésion peut être présente cliniquement sous forme de dépôts
jaunâtres denses sous-conjonctivaux.
1- Histologie :
Il y a une accumulation de tissu hyalin biréfringent sans réaction
inflammatoire.
La localisation conjonctivale est rarement associée à
la forme systémique de la maladie ou à une amyloïdose secondaire
et jamais avec une dégénérescence palissadique de la cornée.
2- Traitement
:
L’amyloïdose peut être enlevée pour des raisons symptomatiques et
cosmétiques.
La lésion peut récidiver.
Tumeurs d’origine inflammatoire
:
Certains processus inflammatoires conjonctivaux se manifestent sous
la forme d’une accumulation d’éléments du tissu connectif et de
cellules inflammatoires d’aspect pseudotumoral.
A - GRANULOME PYOGÉNIQUE :
Cette lésion est synonyme d’un excès de tissu de granulation qui
peut survenir en réponse à un microtraumatisme ou à la chirurgie, à
une inflammation (chalazion) ou à des maladies épithéliales.
Elle peut être localisée au niveau de la conjonctive épibulbaire ou
tarsale ou au niveau de la caroncule.
Histologie :
Elle est composée d’un tissu de granulation consistant en
fibroblastes jeunes proliférants, en capillaires et en de nombreux
granulocytes (d’où le terme « pyogénique »).
Cette lésion est rare au
niveau de l’oeil, mais survient souvent au niveau des membres
inférieurs.
B - GRANULOME À CORPS ÉTRANGER :
Une masse solide avec augmentation de la vascularisation peut
contenir un corps étranger.
Elle doit être différenciée du
granulome pyogénique, de l’épisclérite ou de la sclérite antérieure
localisée, de la sarcoïdose et de la granulomatose de Wegener.
Histologie :
La masse inflammatoire sous forme pseudotumorale contient des
cellules géantes, des vaisseaux sanguins et des tissus conjonctifs
proliférants entourant le corps étranger, par exemple du matériel
opératoire ou un follicule pileux.
C - XANTHOGRANULOME JUVÉNILE
:
C’est une tumeur très rare du jeune enfant.
Histologie :
L’aspect est caractéristique avec une histiocytose et la présence de
cellules géantes chargées de lipides de type Touton.
D - GRANULOMATOSE DE WEGENER :
La granulomatose nécrosante avec artérite focale et
glomérulonéphrite thrombotique atteint le tractus respiratoire
supérieur, l’orbite, occasionnellement la conjonctive et l’épisclère.
L’oeil est rouge et douloureux.
Le diagnostic peut seulement
être fait par biopsie excisionnelle.
Histologie :
On note une quantité variable de cellules inflammatoires, de
fibroblastes et de vaisseaux sanguins.
L’aspect essentiel pour le
diagnostic est l’invasion par des lymphocytes et des granulocytes
des parois des petits vaisseaux sanguins, mais l’aspect histologique
peut être difficile à interpréter sans les signes cliniques et la biologie.
E - HYPERPLASIE LYMPHOCYTAIRE BÉNIGNE :
Cette lésion est caractérisée par une tuméfaction sous-conjonctivale
lisse, de couleur saumon, au niveau du fornix près de la caroncule
ou du limbe.
Elle peut survenir de manière bilatérale.
Histologie
:
Elle contient des thèques de lymphocytes normaux, matures, parfois
avec des centres germinatifs.
La masse contient des petits nids de
lymphocytes B de type monoclonal, ce qui peut classer ces lésions
dans le stade prémalin des lymphomes non hodgkiniens
appartenant souvent au groupe des tumeurs lymphoïdes associées
aux muqueuses (MALT).
De ce fait, une recherche de gammapathie
monoclonale ou d’anomalies sanguines doit être effectuée.
Cette
lésion peut être excisée mais elle répond de manière rapide à la
radiothérapie.
F - LYMPHOMES DE TYPE MALT PRIMAIRE
:
Ces lymphomes conjonctivaux non hodgkiniens sont d’aspect
clinique et histologique souvent non distinguables des hyperplasies
lymphocytaires bénignes.
Souvent, le site conjonctival représente un
stade extranodal 1 de la maladie, même s’il est parfois bilatéral.
L’estimation du potentiel malin des lymphocytes peut être effectuée
en étudiant la monoclonalité de la prolifération lymphocytaire et
leur classification en sous-types T et B et en immunocytes.
De
manière à estimer quel type de lymphome non hodgkinien est
présent et quel traitement peut être proposé selon le stade de
malignité et du pronostic, différentes classifications sont utilisées
mais elles sont souvent remises à jour en fonction de nouvelles
techniques de laboratoire.
Il s’agit notamment des classifications de Rappaport, de Kiel qui ont été remplacées par la Working
Formulation en 1982, la classification européenne et américaine des
lymphomes en 1994 et la nouvelle classification de Kiel mise à jour
en 1998.
Pour classer la tumeur, l’anatomopathologiste estime la
morphologie des cellules, leur type de croissance, leur stade de
développement à partir d’une cellule précurseur vers une cellule
adulte et si la population tumorale est de type monoclonal B ou T.
La cytométrie de flux peut être très utile pour mettre en évidence
un clone monoclonal au sein d’un tissu frais.
G - LYMPHOME NON HODGKINIEN :
Il peut atteindre de manière secondaire la conjonctive ou les autres
structures annexes.
La tumeur conjonctivale peut ressembler à un
aspect d’hyperplasie lymphocytaire bénigne, de lymphome primaire
de type MALT ou de petits nodules grisâtres.
La biopsie
permet d’identifier le type de cellules. Lorsqu’un lymphome de type
T ou B est noté et non pas un lymphome de type MALT, la
distinction nécessite une analyse histologique et une classification
très précises pour adapter le traitement.