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Néphrologie
Transplantation rénale chez l’enfant
Cours de Néphrologie
 


 

Introduction :

Un programme de dialyse et transplantation rénale est envisagé chez l’enfant lorsque le débit de filtration glomérulaire est inférieur à 5 mL/min/1,73 m2.

Bien qu’il y ait eu de nombreux progrès au cours des dernières années dans le traitement conservateur de l’insuffisance rénale chronique chez l’enfant (dialyse péritonéale, hémodialyse, érythropoïétine et hormone de croissance recombinantes), la transplantation rénale reste le meilleur traitement chez l’enfant.

La survie des patients et des greffons s’est améliorée au cours des dix dernières années en raison des progrès dans la prise en charge des très jeunes enfants et des nouveaux immunosuppresseurs qui ont réduit la fréquence et la gravité des crises de rejet aigu et la survenue de rejet chronique.

Il reste quelques contre-indications à la transplantation rénale, en particulier les lésions neurologiques graves avec retard mental profond et les défaillances multiviscérales.

La transplantation rénale doit être reportée de quelques mois en cas de maladie infectieuse évolutive ou lorsque la maladie responsable de l’insuffisance rénale est toujours active, par exemple en cas de syndrome hémolytique et urémique ou de glomérulonéphrite à croissants.

L’infection par le virus de l’hépatite B ou de l’hépatite C n’est pas une contreindication, sauf en cas d’hépatite active.

En France, l’organisation générale du prélèvement et de la transplantation d’organes est sous la responsabilité d’un établissement public, l’Établissement français des greffes (EFG). L’EFG gère la liste d’attente des receveurs, répartit les greffons disponibles, assure la vigilance sanitaire et évalue les résultats de la transplantation.

L’inscription sur la liste d’attente est obligatoire avant une transplantation rénale et cette inscription doit être validée par l’EFG.

En raison d’un nombre limité de greffons provenant de donneurs décédés en état de mort encéphalique, la durée d’attente avant la transplantation peut être longue, parfois plusieurs années.

La répartition des organes par l’EFG est fonction de plusieurs règles qui prennent en compte de nombreux critères, en particulier le groupe sanguin, les groupes HLA, la présence dans le sérum d’anticorps anti-HLA (sujets hyperimmunisés).

Certaines priorités ont été définies.

Ainsi, les sujets hyperimmunisés bénéficient d’une priorité à l’échelon national lorsqu’ils partagent avec le donneur au moins cinq identités HLA.

Les enfants âgés de moins de 16 ans ont également une priorité par rapport aux adultes.

Cette règle de priorité des enfants, entrée en vigueur depuis quelques années, a permis de réduire de façon tout à fait nette la durée d’attente des enfants avant une transplantation rénale.

Au cours de l’année 1998, 1 883 greffes rénales ont été effectuées en France et 83 d’entre elles ont été réalisées chez des enfants de moins de 16 ans.

On peut noter que la proportion de greffes rénales pédiatriques à partir d’un donneur vivant apparenté, le plus souvent d’un des deux parents, est relativement faible. Au cours de l’année 1998, elle était de 14,5 %.

La durée moyenne d’attente avant la transplantation a été de 10,4 mois chez les enfants de moins de 16 ans alors qu’elle était de 27,3 mois chez les sujets âgés de plus de 16 ans.

Incidence et causes de l’insuffisance rénale terminale chez l’enfant :

L’incidence et les causes d’insuffisance rénale terminale chez l’enfant peuvent être analysées par l’étude de plusieurs registres nationaux, européens et américains.

Le nombre de nouveaux cas d’insuffisance rénale terminale chez l’enfant de moins de 15 ans se situe entre 5 et 8/million d’enfants chaque année.

Quinze à 20 % de ces enfants sont âgés de moins de 5 ans.

Les causes d’insuffisance rénale terminale chez l’enfant se répartissent en deux groupes principaux : les maladies congénitales et héréditaires d’une part, et les maladies acquises, principalement les pathologies glomérulaires, d’autre part.

Les malformations congénitales de l’arbre urinaire et/ou des reins représentent un tiers des cas et les maladies héréditaires un quart des cas.

Donneur vivant apparenté ou donneur en état de mort encéphalique ?

Les résultats de la transplantation rénale à partir d’un donneur vivant apparenté sont meilleurs que ceux des transplantations à partir d’un donneur en état de mort encéphalique.

L’incidence des nécroses tubulaires ischémiques est plus faible et la survie des greffes à long terme est meilleure de 15 à 20 %.

De plus, la date de la transplantation peut être décidée à l’avance et le délai d’attente réduit.

Les complications observées durant la période de dialyse, en particulier le retard de croissance staturale, sont ainsi réduites.

On observe de grandes disparités selon les pays en termes de proportion de greffes à partir d’un donneur vivant.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces différences : l’activité du programme de transplantation à partir de donneurs en état de mort encéphalique, différences culturelles, type d’informations données aux parents par les médecins, dont certains favorisent le don par les parents.

Avant d’envisager une transplantation rénale à partir d’un donneur vivant, un bilan très complet doit être effectué chez le donneur potentiel, une information détaillée sur les risques qu’il encourt doit lui être donnée et son consentement doit être obtenu auprès d’un magistrat du tribunal de grande instance.

Il est souhaitable que le bilan soit effectué et interprété par un néphrologue d’adultes non impliqué dans le programme de transplantation.

Le prélèvement ne peut être effectué que chez des individus majeurs.

La mortalité pour le donneur est très faible, de 0,025 % dans une étude rassemblant près de 20 000 néphrectomies pour don chez des donneurs vivants.

À long terme, il ne semble pas que les risques de diminution de la filtration glomérulaire ou d’apparition d’une protéinurie ou d’une hypertension artérielle soient augmentés.

Préparation à la transplantation :

Depuis que l’érythropoïétine recombinante est disponible, les patients en dialyse ne reçoivent plus de transfusions sanguines.

Avant l’introduction de la ciclosporine dans les protocoles d’immunosuppression, il était démontré que les transfusions sanguines avant la transplantation amélioraient la survie des greffes.

Depuis que l’on utilise la ciclosporine, l’effet des transfusions est moins évident et de nombreuses équipes ont abandonné les transfusions systématiques en préparation à la transplantation.

En effet, ces transfusions peuvent favoriser le développement d’anticorps lymphocytotoxiques et peuvent être responsables de la transmission d’agents infectieux.

Le risque de sensibilisation après transfusion de sang du futur donneur en cas de donneur vivant apparenté est évalué entre 10 et 30 %.

Certaines équipes continuent néanmoins à effectuer des transfusions sanguines en préparation à la transplantation sous couvert parfois d’azathioprine ou de ciclosporine qui limitent le risque de sensibilisation.

Les anticorps anti-HLA peuvent être induits non seulement par les transfusions mais également par une précédente greffe ou une grossesse.

Ces anticorps sont détectés par un test de cytotoxicité sur un panel de lymphocytes provenant de différents donneurs de sang.

Avant d’envisager une transplantation avec un donneur, le sérum du receveur est incubé avec les lymphocytes du donneur en présence de complément.

Une réaction positive avec les lymphocytes T du donneur, témoin de la présence d’anticorps anti- HLA de classe I, constitue une contre-indication absolue à la transplantation (cross-match positif).

La signification d’un crossmatch positif avec les lymphocytes B tandis que le cross-match est négatif avec les lymphocytes T est controversée.

Ces anticorps sont vraisemblablement délétères quand il s’agit d’une seconde greffe.

En revanche, la présence d’anticorps de type immunoglobuline M (IgM) ne constitue pas une contre-indication à la transplantation.

Une évaluation de l’appareil urinaire incluant une cystographie avec clichés permictionnels est indispensable.

D’éventuelles anomalies doivent être corrigées avant la transplantation car elles pourraient être responsables d’une dilatation des voies urinaires et d’une détérioration de la fonction du greffon.

En présence d’un reflux vésico-urétéral massif ou d’une infection des voies urinaires permanente, une néphro-urétérectomie peut être nécessaire pour éviter les complications infectieuses qui seraient favorisées par le traitement immunosuppresseur.

Lorsqu’il existe une uropathie malformative intéressant le bas appareil urinaire (valves de l’urètre postérieur, syndrome de Prune-Belly, vessie neurologique), une évaluation minutieuse doit être effectuée et des anomalies du fonctionnement vésical doivent être recherchées par une étude urodynamique.

Les vaccinations doivent être complétées.

La vaccination contre l’hépatite B est effectuée si possible avant le stade terminal de l’insuffisance rénale.

Des rappels de vaccin antitétanique et antipoliomyélite seront effectués si l’enfant a un taux insuffisant d’anticorps spécifiques.

Les vaccinations avec vaccins vivants, contre la varicelle ou la rougeole, doivent être effectuées au moins 2 mois avant la transplantation.

Chez les enfants présentant une hypertension artérielle rénine dépendante, une néphrectomie gauche est effectuée avant la transplantation tandis que la néphrectomie droite est réalisée au moment de la greffe.

La transplantation rénale peut être envisagée avant de commencer la dialyse.

Il s’agit souvent d’une transplantation d’un donneur vivant apparenté, effectuée lorsque la filtration glomérulaire est proche de 5 mL/min/1,73 m2 et/ou lorsque l’on peut prévoir que le traitement par dialyse devra être commencé dans un délai de 6 mois.

Il n’y a pas de différence de survie des greffes ou des patients, ni de différence dans l’incidence des crises de rejet lorsque la transplantation rénale a été effectuée avant le stade de dialyse en comparaison aux patients qui ont été traités par dialyse.

Le nombre de transplantations rénales avant le stade de dialyse a augmenté au cours des dernières années.

Ceci est également facilité par la priorité qu’ont les enfants sur la liste d’attente, permettant de réduire la période d’attente et d’améliorer la qualité de vie de ces enfants.

Acte opératoire :

Les enfants de plus de 10 kg peuvent recevoir un rein d’adulte.

La technique chirurgicale varie selon le poids de l’enfant.

Chez les enfants pesant moins de 10 à 15 kg, la transplantation est effectuée par voie transpéritonéale et les vaisseaux rénaux sont anastomosés à l’aorte et à la veine cave inférieure ou à l’origine des vaisseaux iliaques par des anastomoses terminolatérales.

Il est essentiel de maintenir une pression veineuse centrale aux alentours de 15 à 18 cm d’eau afin de maintenir une hémodynamique satisfaisante au moment où les vaisseaux rénaux sont déclampés.

L’uretère du donneur est ensuite anastomosé dans la vessie ou à l’uretère du receveur.

Chez les enfants de plus de 15 kg, la technique opératoire est la même que chez l’adulte avec une voie d’abord extrapéritonéale permettant d’anastomoser les vaisseaux rénaux aux vaisseaux iliaques externes ou primitifs.

Après déclampage, le rein se recolore rapidement et la production d’urines visible au niveau de la section de l’uretère témoigne de la reprise immédiate de la fonction rénale.

Cependant, dans certains cas, la reprise de la fonction rénale peut être retardée.

Traitement immunosuppresseur :

A - CORTICOSTÉROÏDES :

Ils sont prescrits à doses modérées dans le traitement préventif du rejet et à fortes doses pour traiter les épisodes de rejet.

L’efficacité des corticoïdes est en rapport essentiellement avec leur capacité d’inhiber l’activation et la prolifération des lymphocytes T.

Les corticoïdes inhibent la transcription de gènes qui codent pour plusieurs cytokines, comme l’interleukine 1, l’interleukine 2, l’interleukine 6, l’interféron gamma (IFN) et le TNF-alpha (tumor necrosis factor).

Les corticoïdes inhibent également l’activité des monocytes et des neutrophiles, mais ils ont peu d’action sur la production des anticorps.

Dans de nombreux centres de transplantation rénale pédiatrique, les corticoïdes sont prescrits en association à l’azathioprine et à la ciclosporine dans le traitement préventif du rejet.

La dose initiale est donnée durant la transplantation sous forme de méthylprednisolone, à une dose variant entre 2 et 10 mg/kg.

Par la suite, la dose orale varie selon les protocoles entre 15 et 60 mg/m2/j (0,5 à 2 mg/kg) puis est progressivement diminuée.

Certaines équipes tentent d’arrêter la corticothérapie au bout de 6 à 12 mois tandis que d’autres préfèrent le passage à une corticothérapie discontinue ou maintiennent une faible dose quotidienne de corticoïdes.

L’arrêt de la corticothérapie n’est pas dénué de risque en raison d’un taux élevé de rejet pouvant conduire à une perte de la greffe.

Les crises aiguës de rejet sont habituellement traitées par de fortes doses de corticoïdes sous forme de trois à cinq perfusions de méthylprednisolone à des doses qui varient selon les centres entre 5 et 30 mg/kg.

Par la suite, la dose d’entretien de corticoïdes est souvent augmentée en fonction de la sévérité du rejet sur la biopsie rénale, puis à nouveau progressivement diminuée jusqu’à la dose d’entretien.

Le taux de créatinine plasmatique, qui est augmenté au cours de la crise de rejet, peut continuer à s’élever pendant les 3 à 4 premiers jours après le début du traitement antirejet, mais ce taux doit diminuer au bout de 1 semaine et retourner au bout de 1 mois aux valeurs proches de celles que le patient avait avant la crise de rejet.

Dans le cas contraire, le rejet est dit corticorésistant et d’autres mesures thérapeutiques doivent être envisagées.

Actuellement, chez l’enfant, nous préconisons le traitement par tacrolimus après arrêt de la ciclosporine. Les corticoïdes ont de multiples effets secondaires.

En particulier, ils sont susceptibles d’entraîner un ralentissement de la croissance staturale, une susceptibilité accrue aux infections, un aspect cushingoïde, une acnée, une hypertension artérielle, une ostéonécrose aseptique, une déminéralisation osseuse, une cataracte, une hyperglycémie et un diabète, un retard de cicatrisation et des perturbations psychologiques.

Une des raisons principales pour lesquelles certains auteurs souhaitent arrêter la corticothérapie ou passer à une corticothérapie discontinue est le retard statural de ces enfants, très fréquent sous traitement continu.

B - AZATHIOPRINE :

L’azathioprine est convertie dans le foie en 6-mercaptopurine, métabolite actif qui est incorporé dans l’acide désoxyribonucléique (ADN).

L’azathioprine est principalement un agent antiprolifératif, ce qui explique que le nombre de lymphocytes circulants soit peu affecté par le traitement.

L’azathioprine est prescrite dans le traitement prophylactique du rejet, mais elle a peu d’efficacité dans le traitement curatif d’une crise aiguë de rejet.

L’azathioprine est prescrite à des doses de 1 à 3 mg/kg.

Les posologies les plus élevées sont données lorsque l’azathioprine est associée à la seule corticothérapie.

En revanche, en association à la ciclosporine ou au tacrolimus, les posologies doivent être plus faibles, entre 1 et 2 mg/kg.

L’azathioprine est en règle bien tolérée.

Elle peut être administrée en une seule prise quotidienne.

Le principal effet secondaire est la toxicité médullaire avec une leucopénie et plus rarement une thrombopénie.

La dose d’azathioprine doit en conséquence être ajustée en fonction du taux de leucocytes.

Le traitement peut induire une anémie macrocytaire.

Parmi les autres effets secondaires, citons l’hépatotoxicité, le risque accru d’infections virales, l’alopécie et le risque de développement de tumeurs.

C - MYCOPHÉNOLATE MOFÉTIL (MMF) :

Le MMF est le précurseur du produit actif, l’acide mycophénolique.

Comme l’azathioprine, le mycophénolate inhibe la synthèse des purines.

Il s’agit d’un inhibiteur de la 5-phosphate inosine déshydrogénase et de la guanosine monophosphate synthétase qui inhibe la synthèse de novo des purines dans les lymphocytes T et B.

Dans la mesure où les lymphocytes, contrairement aux autres cellules, dépendent de la synthèse de novo des purines, ces cellules sont la principale cible du MMF.

Le MMF en association à la ciclosporine et aux corticoïdes a été comparé à l’azathioprine et à un placebo dans plusieurs essais thérapeutiques contrôlés.

L’incidence des crises de rejet pendant les premiers 6 mois était réduite de 24 à 46 % selon les études chez les patients sous MMF en comparaison aux patients recevant l’azathioprine ou le placebo.

En revanche, la survie des greffes ne semble pas significativement différente chez les patients sous MMF et chez les patients sous azathioprine.

Le MMF a également été utilisé avec un certain succès dans le traitement du rejet chronique.

La dose préconisée chez l’enfant est de 600 mg/m2 matin et soir.

Cette dose doit être réduite de moitié lorsque le MMF est donné en association au tacrolimus.

Les effets secondaires sont proportionnels à la dose et comportent des troubles digestifs (diarrhée, nausées, vomissements), leucopénie, anémie et complications infectieuses.

Ces troubles digestifs peuvent rendre difficile la poursuite du traitement.

D - CICLOSPORINE :

La ciclosporine est un métabolite du champignon, Tolypocadium inflatum.

Ses effets immunosuppresseurs ont été initialement décrits par Borel.

La ciclosporine agit à un stade précoce de l’activation du lymphocyte T, essentiellement les lymphocytes T4. La ciclosporine inhibe la transcription du gène de l’interleukine 2 et des gènes d’autres cytokines (IL1, IL3, IFN gamma, IL4), de protooncogènes et de récepteurs des cytokines.

La ciclosporine se fixe dans le cytoplasme sur une isomérase, la cyclophyline.

Le complexe cyclophyline-ciclosporine se lie à une phosphatase dépendante du calcium, la calcineurine.

Ainsi, la ciclosporine inhibe l’action de la calcineurine qui consiste à déphosphoryler le facteur d’activation des lymphocytes T activés et permettre ainsi la translocation de ce facteur dans le noyau.

L’inhibition des gènes de l’interleukine 2 et d’autres cytokines empêche la prolifération des lymphocytes T et la génération des lymphocytes cytotoxiques.

La ciclosporine est un peptide cyclique de 11 acides aminés et son poids moléculaire est de 1 200.

Elle est insoluble dans l’eau mais soluble dans l’huile et dans l’alcool.

Son absorption intestinale varie de 10 à 60 % de la dose ingérée avec une moyenne de 30 %.

Le taux sanguin maximal est observé au bout de 2 à 6 heures après la prise orale.

La présentation orale actuelle, Néoralt, est une microémulsion dont l’absorption est meilleure avec un profil pharmacocinétique plus reproductible que ce qui était observé avec Sandimmunt.

Dans le sang, 50 à 70 % de la ciclosporine sont liés aux hématies et à un moindre degré aux leucocytes. Dans le plasma, la ciclosporine est surtout liée aux lipoprotéines.

Ceci explique que la fraction libre, active, est diminuée en cas d’augmentation du taux des lipides plasmatiques.

Le métabolisme de la ciclosporine est assuré au niveau du foie par le cytochrome P450.

Les métabolites sont éliminés principalement dans la bile tandis que l’élimination urinaire ne concerne que 5 % du produit.

Plusieurs facteurs peuvent perturber le métabolisme de la ciclosporine.

Il s’agit surtout des drogues qui interfèrent avec le cytochrome P450. Le phénobarbital, la phénytoïne, la rifampicine induisent l’activité de cette enzyme et entraînent une diminution des taux de ciclosporine, ce qui augmente le risque de rejet.

Le kétoconazole, l’érythromycine, la méthylprednisolone à forte dose inhibent l’activité du cytochrome P450 et de ce fait augmentent les taux de ciclosporine.

Ceci peut entraîner une augmentation de la toxicité du médicament.

La mesure des taux circulants de ciclosporine est donc très utile lorsque l’on est amené à associer une drogue qui peut interférer avec le métabolisme de la ciclosporine, ce qui a priori doit être évité.

La ciclosporine a plusieurs effets secondaires.

Le plus préoccupant est la néphrotoxicité.

La néphrotoxicité aiguë est liée à l’effet vasoconstricteur de la ciclosporine au niveau de l’artériole afférente, entraînant une diminution du débit sanguin rénal.

Pour cette raison, la ciclosporine peut aggraver les lésions ischémiques survenues au moment du prélèvement et aggraver le pronostic de la greffe en cas de nécrose tubulaire avec reprise retardée de la fonction rénale.

La néphrotoxicité de la ciclosporine se traduit souvent par une élévation de la créatininémie.

La constatation de taux sanguins élevés doit faire suspecter le rôle de la ciclosporine et la diminution des doses s’accompagne alors d’une amélioration de la fonction rénale.

La néphrotoxicité chronique est probablement liée également à l’effet vasoconstricteur sur l’artériole afférente.

Cette action est expliquée en partie par une inhibition de la synthèse des prostaglandines rénales qui sont de puissants vasodilatateurs et une augmentation de la synthèse de thromboxane qui est un puissant vasoconstricteur.

La néphrotoxicité chronique s’accompagne d’une altération progressive de la fonction rénale et de lésions du parenchyme rénal avec des bandes de fibrose interstitielle contenant des tubes atrophiques.

La ciclosporine a d’autres effets secondaires : hypertension artérielle, hyperkaliémie, hypomagnésémie, neurotoxicité avec tremblements, convulsions, hépatotoxicité, hirsutisme et hypertrophie gingivale.

TACROLIMUS (FK506) :

Le tacrolimus est un macrolide dont le mécanisme d’action est très proche de celui de la ciclosporine. Le tacrolimus se fixe dans le cytoplasme à une immunophyline, une protéine porteuse (FK binding protein ou FKBP).

Le complexe tacrolimus-FKBP se lie à une phosphatase dépendante du calcium, la calcineurine, empêchant la transcription du gène de l’interleukine 2 et de plusieurs gènes impliqués dans les phases précoces de l’activation des lymphocytes T.

Plusieurs essais multicentriques effectués chez l’adulte ont montré que l’incidence des crises de rejet au cours des 3 premiers mois était significativement plus faible chez les patients recevant le tacrolimus en association à l’azathioprine et aux corticoïdes en comparaison aux patients recevant la ciclosporine sous forme de Sandimmunt.

L’incidence des rejets corticorésistants est également diminuée.

Le tacrolimus est un traitement efficace en cas de rejet corticorésistant.

Une étude portant sur 77 patients dans cette situation a montré une survie des greffes à 1 an de 74% après passage au tacrolimus.

L’expérience de l’utilisation du tacrolimus chez l’enfant après transplantation rénale est encore limitée.

La posologie habituellement conseillée est de 0,3 mg/kg en deux prises quotidiennes.

Un contrôle des taux sanguins résiduels est nécessaire de façon à adapter la posologie pour maintenir un taux compris entre 10 et 15 ng/mL pendant le premier mois et entre 5 et 10 ng/mL par la suite.

Les effets néphrotoxiques du tacrolimus sont assez identiques à ceux de la ciclosporine.

Contrairement à ce qui est observé avec la ciclosporine, le tacrolimus n’entraîne pas d’hypertrichose.

Le tacrolimus expose de plus au risque de diabète.

Une incidence élevée de syndromes lymphoprolifératifs a été observée chez des enfants recevant des posologies importantes de tacrolimus, en particulier lorsque ce traitement est associé à un traitement par anticorps antilymphocytaires.

Ce risque est plus élevé chez les patients qui développent une infection primaire par l’Epstein-Barr virus (EBV).

La diminution de la posologie ou l’arrêt du traitement permettent le plus souvent une régression du syndrome lymphoprolifératif lorsque le diagnostic est porté précocement.

F - ANTICORPS ANTILYMPHOCYTES :

Ces anticorps reconnaissent et se lient à des récepteurs présents à la surface des lymphocytes.

Ils bloquent la fonction des lymphocytes en masquant les récepteurs ou entraînent une lymphocytotoxicité.

Ils peuvent être utilisés pendant la période initiale de la greffe pour prévenir le rejet (traitement d’induction) ou comme traitement d’une crise de rejet.

1- Anticorps polyclonaux :

Les globulines antilymphocytaires sont des préparations polyclonales obtenues chez l’animal (cheval ou plus souvent lapin) immunisé avec des lymphocytes humains, des thymocytes ou des lymphoblastes.

Ces préparations contiennent une grande variété d’anticorps dirigés contre de nombreux antigènes de différenciation des cellules hématopoïétiques.

Les globulines antilymphocytaires contiennent en particulier des anticorps anti-CD2, CD3, CD4, CD8, CD18, et contre les molécules du complexe majeur d’histocompatibilité.

L’efficacité varie d’une préparation à l’autre selon le type d’animal immunisé, la source de lymphocytes utilisée pour l’immunisation, le degré de purification du sérum de l’animal (sérum, gammaglobulines, IgG), le type d’absorption effectué pour éliminer les anticorps non spécifiques des lymphocytes.

Actuellement les globulines antilymphocytaires de lapin sont les plus utilisées (Thymoglobulinet).

La durée du traitement ne doit pas dépasser 15 jours pour éviter les complications en rapport avec une immunosuppression trop importante.

En traitement d’induction, les globulines antilymphocytaires améliorent la survie des greffes de 10 à 15 % et permettent de retarder l’introduction de la ciclosporine dont on peut craindre la néphrotoxicité au moment de la reprise de la fonction rénale.

Cette amélioration de la survie des greffes est moins sensible avec les protocoles d’immunosuppression les plus récents utilisant Néoralt ou le tacrolimus et le MMF.

Les globulines antilymphocytaires sont également utilisées dans le traitement curatif des crises aiguës de rejet.

Les effets secondaires du traitement sont dus à la présence d’anticorps indésirables : neutropénie, thrombopénie.

Une maladie sérique est également possible de même que des accidents allergiques.

L’administration doit se faire par voie veineuse dans une veine de fort débit (fistule artérioveineuse, cathéter veineux central).

2- Anticorps monoclonaux :

Les anticorps monoclonaux utilisés sont dirigés contre différents récepteurs de surface des lymphocytes T.

Le premier utilisé en transplantation a été l’OKT3t, anticorps dirigé contre la chaîne epsilon du récepteur pour l’antigène du lymphocyte T.

Il s’agit d’un inhibiteur puissant de la plupart des fonctions du lymphocyte T.

L’OKT3t est très efficace dans le traitement des crises de rejet aigu, des rejets corticorésistants et dans le traitement prophylactique du rejet.

L’effet secondaire le plus sérieux survient lors de la première injection dans deux tiers des cas.

Les patients ont de la fièvre, des frissons, des céphalées, une diarrhée, une hypotension et dans certains cas, en particulier en cas de surcharge vasculaire, un oedème pulmonaire grave.

Ces symptômes sont secondaires à l’activation des lymphocytes T par l’OKT3t et la libération par ces lymphocytes activés de nombreuses cytokines (TNF-a, IFN-c, IL2, IL3, IL4, IL6, GM-CSF [granulocyte macrophage-colony stimulating factor]).

Ces symptômes peuvent être en partie prévenus par l’administration préalable de corticoïdes et/ou d’anticorps anti- TNF.

D’autres effets secondaires sont possibles, en particulier des accidents anaphylactiques, exceptionnels, une méningite aseptique, des convulsions.

De plus, le patient peut développer des anticorps anti-OKT3t, qui sont surtout des anticorps anti-idiotypiques, qui neutralisent l’action de l’OKT3t et empêchent une éventuelle utilisation ultérieure.

Ce type d’immunisation est plus fréquent chez l’enfant que chez l’adulte.

Enfin, l’utilisation de l’OKT3t expose aux risques d’une très forte immunosuppression avec des complications infectieuses et de syndrome lymphoprolifératif.

Des anticorps dirigés contre le récepteur de l’IL2 ont été utilisés dans le traitement d’induction.

L’IL2 est produite par le lymphocyte T activé et joue un rôle clef dans la réponse immunitaire en induisant la prolifération des lymphocytes T.

L’administration d’anticorps dirigés contre le récepteur de l’IL2 peut ainsi bloquer l’activité de l’IL2.

Récemment, des anticorps monoclonaux humanisés ont été commercialisés.

Leur tolérance clinique est excellente.

Les résultats préliminaires dans le traitement d’induction sont encourageants.

Le basiliximab (Simulectt) est un anticorps chimérique dirigé contre le récepteur de l’IL2, administré à deux reprises le jour de la transplantation et au quatrième jour.

D’autres anticorps monoclonaux ont été utilisés, mais l’expérience clinique est moins importante qu’avec les précédents (anti-LFA1, anti-ICAM-1, anti- CD4, anti-CD45).

Résultats de la transplantation rénale chez l’enfant :

A - SURVIE DES GREFFES :

Les résultats de la transplantation rénale se sont améliorés au cours des 15 dernières années, surtout après l’introduction de la ciclosporine et, plus récemment, après l’introduction du tacrolimus et du MMF.

Un facteur important dans la survie des greffes est l’origine du donneur, soit un donneur en état de mort encéphalique (rein de cadavre) soit un donneur vivant apparenté.

Dans toutes les séries, de meilleurs résultats sont observés après transplantation de rein de donneur vivant.

D’autres facteurs interviennent dans le succès de la transplantation : l’âge du donneur, l’âge du receveur, la compatibilité HLA, la présence dans le sérum d’anticorps anti-HLA avant la transplantation.

L’analyse des résultats doit donc tenir compte de ces variables.

L’expérience de l’équipe de transplantation joue également un rôle important.

En 1998, le rapport du conseil médical et scientifique de l’EFG indiquait une survie du greffon rénal chez les enfants de moins de 15 ans de 85 % à 1 an, de 69 % à 5 ans et de 55 % à 10 ans.

La survie des greffes est plus élevée lorsque le greffon provient d’un donneur vivant apparenté que lorsqu’il s’agit d’un donneur décédé en état de mort encéphalique : 93 % à 1 an et 71 % à 10 ans dans le premier cas contre 84 % à 1 an et 52 % à 10 ans dans le second cas.

Dans le registre du NAPRTCS (North American Pediatric Renal Transplant Cooperative Study), la survie actuarielle à 1, 2 et 5 ans pour les greffes de donneur vivant apparenté était respectivement de 91, 87 et 77 % alors que pour les greffes à partir de donneur en état de mort encéphalique ces pourcentages étaient de 81, 75 et 61 %.

Globalement, 50 % des greffes sont perdus en raison d’un rejet : les rejets aigus irréversibles représentent 20 % des cas et les rejets chroniques 30 %.

Les principales autres causes d’échec sont les thromboses vasculaires (12 %), le décès du patient avec un greffon fonctionnel (12 %), la récidive de la maladie responsable de l’insuffisance rénale (6 %).

La survie des greffes chez les enfants âgés de 5 à 10 ans est identique à celle des enfants plus âgés.

En revanche, les résultats de la transplantation sont moins favorables chez les enfants de moins de 5 ans, surtout chez les receveurs de moins de 2 ans.

Les raisons principales en sont une incidence plus élevée de rejet due à une réponse immunologique plus forte et un risque plus élevé de thrombose des vaisseaux du greffon.

Plusieurs auteurs ont retrouvé une incidence plus élevée d’échecs lorsque le rein transplanté provient d’un donneur de moins de 5 ans.

Ceci s’explique par une incidence plus élevée de thrombose des vaisseaux du greffon.

Le rôle de la compatibilité HLA dans la survie des greffes de rein de donneur cadavérique est encore l’objet de discussions, surtout depuis que les inhibiteurs de la calcineurine ont été introduits dans les protocoles d’immunosuppression.

De nombreuses études multicentriques incluant un grand nombre de patients trouvent une corrélation entre la compatibilité HLA et la survie des greffes, surtout la survie à long terme, au-delà de 5 ans.

B - SURVIE DES PATIENTS :

La survie des enfants après transplantation rénale est meilleure que celle des adultes.

En France, la survie des enfants de moins de 15 ans est de 97 % à 1 an, de 95 % à 5 ans et de 92 % à 10 ans.

Le registre du NAPRTCS indique une survie des enfants de 96,5 % et 93 % 1 an et 5 ans après la transplantation.

Les principales causes de décès au cours des premiers mois sont les causes infectieuses.

Par la suite, les autres causes de mortalité sont les tumeurs malignes et les lymphomes, les complications cardiovasculaires et les complications liées à la dialyse après échec de la greffe.

La mortalité est plus élevée chez le très jeune enfant.

C - COMPLICATIONS DE LA TRANSPLANTATION RÉNALE :

1- Nécrose tubulaire aiguë :

La survie des greffes est meilleure lorsque la fonction rénale reprend rapidement et lorsqu’il n’est pas nécessaire de poursuivre la dialyse pendant les premiers jours qui suivent la transplantation.

La nécrose tubulaire secondaire à l’ischémie a en effet un rôle délétère avec une moins bonne survie de la greffe à long terme.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer la survenue de cette nécrose tubulaire : condition médicale du donneur, en particulier la fonction rénale avant le prélèvement, technique du prélèvement, qualité de la préservation de l’organe, durée de l’ischémie chaude au moment du prélèvement, durée de l’ischémie froide avant la transplantation, qualité du remplissage vasculaire pendant et après la transplantation.

Les lésions tubulaires peuvent être aggravées par la prescription initiale de ciclosporine ou de tacrolimus.

2- Thrombose vasculaire :

La thrombose de l’artère ou de la veine rénale est la seconde cause de perte de greffe dans la plupart des séries pédiatriques.

Les principaux facteurs de risque sont le jeune âge du donneur et le jeune âge du receveur.

Parmi les autres facteurs de risque, citons les artères rénales multiples, la réparation de l’artère après le prélèvement, une malformation de la veine cave inférieure chez le receveur, un état d’hypercoagulabilité, une hypotension pendant ou après la transplantation.

Pour prévenir l’accident de thrombose, une surveillance étroite de l’état hémodynamique est donc primordiale.

De plus un traitement préventif par une héparine de bas poids moléculaire chez les enfants présentant des facteurs de risque permet de réduire significativement l’incidence de cette complication.

3- Rejet :

* Rejet hyperaigu :

Le rejet hyperaigu survenant au cours des premières minutes après la transplantation est secondaire à la présence d’anticorps anti-HLA préformés qui se fixent aux cellules endothéliales et activent le complément.

L’agrégation des plaquettes sur l’endothélium entraîne des dépôts de fibrine et une thrombose vasculaire.

Cette complication s’observe si le cross-match entre les lymphocytes du donneur et le sérum du receveur est positif. Le rejet vasculaire peut survenir précocement et le pronostic est souvent sévère.

* Rejet aigu :

Le rejet aigu est une complication fréquente, pouvant survenir quelques jours, plusieurs semaines ou mois après la transplantation.

Il est caractérisé sur le plan histologique par une infiltration du greffon par des cellules mononucléées, des lésions de tubulite et éventuellement des lésions vasculaires.

Le rejet aigu est secondaire à l’activation des lymphocytes T du donneur par les molécules HLA du donneur.

Les lymphocytes T activés prolifèrent et libèrent plusieurs cytokines.

Il en résulte une activation des lymphocytes B, des lymphocytes T cytotoxiques et des cellules NK (natural killer) qui détruisent la greffe. L’IFN c, une de ces cytokines, augmente l’expression des antigènes HLA sur les cellules endothéliales et les cellules tubulaires, entretenant ainsi le rejet.

Les signes cliniques classiques du rejet, la fièvre, l’oligurie, l’altération de la fonction rénale, l’augmentation de la taille du greffon et la protéinurie sont moins souvent observés avec les protocoles immunosuppresseurs actuels, incluant la ciclosporine.

Avec ces nouveaux traitements, les signes de rejet se résument le plus souvent à une augmentation de la créatinine.

L’augmentation de la créatininémie doit aussi faire discuter une obstruction urétérale, une fuite urinaire au niveau de l’anastomose urinaire, une sténose de l’artère rénale, une complication infectieuse et une néphrotoxicité de la ciclosporine ou du tacrolimus.

L’échographie-doppler permet d’éliminer une complication urologique ou vasculaire.

Le rejet peut être confirmé histologiquement après une biopsie rénale qui peut être effectuée sans difficultés et avec un minimum de risques chez l’enfant.

Les traitements actuels d’induction ont permis de réduire l’incidence de cette complication.

Le traitement des crises de rejet repose en premier lieu sur des perfusions de méthylprednisolone.

En cas de rejet corticorésistant, on peut proposer un traitement par globulines antilymphocytaires ou par OKT3t.

Le remplacement de la ciclosporine par le tacrolimus donne également de très bons résultats et cette approche est souvent adoptée.

* Rejet chronique :

Le rejet chronique est la cause la plus fréquente d’échec de la transplantation rénale.

Il se traduit par une altération progressive de la fonction rénale, associée à une hypertension artérielle et une protéinurie.

Plusieurs facteurs peuvent participer à la destruction progressive du parenchyme rénal, certains d’origine immunologique, en rapport avec des lésions ischémiques, d’autres d’origine non immunologique, secondaires à une néphrotoxicité des inhibiteurs de la calcineurine ou à l’hyperfiltration.

Les épisodes de rejet aigu constituent un facteur de risque de rejet chronique, en particulier les épisodes de rejet tardif après les premiers mois.

Un traitement immunosuppresseur insuffisant, en particulier des doses trop faibles de ciclosporine, constituent également un facteur de risque de rejet chronique.

Sur le plan histologique, les lésions vasculaires sont prédominantes et s’accompagnent de lésions tubulo-interstitielles de fibrose et d’atrophie tubulaire.

Dans certains cas, des lésions glomérulaires sont prédominantes consistant en une accentuation de la matrice mésangiale et une lobulation du floculus donnant un aspect de glomérulonéphrite membranoproliférative, sans dépôts en immunofluorescence.

Sur le plan thérapeutique, en l’absence de traitement spécifique disponible, il est essentiel de contrôler la pression artérielle, et les inhibiteurs de l’enzyme de conversion constituent un excellent traitement.

4- Hypertension artérielle :

L’hypertension artérielle est fréquente après transplantation rénale et expose à des risques d’encéphalopathie et de séquelles neurologiques.

De plus l’hypertension a un effet délétère sur la greffe.

L’hypertension artérielle s’observe chez 60 à 80 % des patients au cours des premiers mois après transplantation rénale.

Cette incidence élevée a été confirmée par des mesures ambulatoires de la pression artérielle sur 24 heures (Holter tensionnel) chez des enfants ayant une fonction rénale stable.

Son incidence diminue ensuite au fil des mois.

La pression artérielle doit être très régulièrement contrôlée et un traitement hypotenseur prescrit si des chiffres élevés sont constatés.

Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion doivent être utilisés avec précaution, en particulier si l’on suspecte une sténose de l’artère rénale après un examen doppler.

Dans ces cas, une artériographie peut être indiquée, suivie d’une éventuelle angioplastie.

Pendant la période initiale, l’hypertension peut être secondaire à une surcharge volémique, une crise de rejet, une hypercalcémie ou surtout au traitement immunosuppresseur, en particulier la corticothérapie, la ciclosporine ou le tacrolimus.

Après les premiers mois, les principales causes d’hypertension sont le rejet chronique, la corticothérapie et les inhibiteurs de la calcineurine (ciclosporine, tacrolimus), une sténose de l’artère rénale, les reins natifs si une binéphrectomie n’a pas été effectuée avant la transplantation, une récidive de la maladie initiale ou une obstruction de la voie urinaire.

5- Infections :

Les infections constituent un risque permanent chez les patients recevant un traitement immunosuppresseur. L’infection urinaire par Staphylococcus aureus ou Escherichia coli est fréquente pendant la période postopératoire, de même que les infections pulmonaires.

Le traitement prophylactique par triméthoprime-sulfaméthoxazole permet d’éviter ces infections urinaires et réduit l’incidence des infections à Pneumocystis carinii.

Pneumocystis carinii est responsable d’une pneumopathie diffuse s’accompagnant d’une dyspnée et d’une hypoxie, dont l’évolution peut être sévère en l’absence de traitement rapide.

Le risque élevé de cette complication au cours du premier mois justifie la prophylaxie par triméthoprimesulfaméthoxazole.

Les infections virales, en particulier par les virus du groupe Herpès, sont fréquentes et peuvent mettre en jeu le pronostic vital.

L’infection à cytomégalovirus (CMV) peut survenir chez des patients séronégatifs recevant une greffe de donneur séropositif ou chez un receveur séropositif du fait d’une réactivation ou d’une surinfection par la souche virale du donneur.

L’infection à CMV peut s’accompagner de symptômes cliniques, en particulier une fièvre, une leucopénie, une thrombopénie, une pneumopathie, une hépatite, une rétinite ou une altération de la fonction rénale.

L’incidence des infections symptomatiques est plus élevée chez les patients séronégatifs présentant une infection primaire.

De même, l’infection est souvent plus sévère lorsque le traitement d’induction a comporté des anticorps antilymphocytaires.

Le traitement prophylactique par gammaglobulines anti-CMV ou aciclovir peut réduire la gravité de la maladie.

Le traitement curatif par ganciclovir par voie intraveineuse est très efficace et a considérablement réduit la gravité des infections à CMV.

Le ganciclovir par voie orale a également été proposé dans le traitement préventif de l’infection à CMV.

Le virus de la varicelle peut être responsable d’une maladie sévère avec encéphalite, pneumonie, atteinte hépatique et parfois décès.

Un enfant porteur d’une greffe rénale et soumis à un contage doit recevoir dans les 3 jours des gammaglobulines antivaricelle, en raison d’un risque élevé d’infection grave.

Un traitement par aciclovir par voie intraveineuse est prescrit si des symptômes cliniques apparaissent et l’azathioprine ou le MMF doivent être parallèlement arrêtés.

L’immunisation avec le vaccin vivant atténué est recommandée avant la transplantation chez les enfants qui n’ont pas d’anticorps antivaricelle.

Cette vaccination prévient les infections sévères.

L’infection par l’EBV est fréquente mais souvent asymptomatique.

Cependant, chez les enfants recevant une immunosuppression importante, en particulier des anticorps antilymphocytes, il existe un risque élevé de syndrome lymphoprolifératif.

Une diminution du traitement immunosuppresseur est nécessaire et, dans certains cas, des anticorps antilymphocytes B ou une chimiothérapie sont indiqués.

Le virus herpès simplex est souvent responsable d’ulcérations labiales et le traitement par aciclovir est efficace.

Enfin, les verrues secondaires au virus de type papilloma sont fréquentes après quelques années.

6- Récidive de la maladie initiale :

La récidive de la maladie responsable de l’insuffisance rénale est la cause de la perte de la greffe dans 5 à 15% des cas selon les séries pédiatriques.

Parmi les maladies glomérulaires qui peuvent récidiver après la transplantation, la plus fréquente est le syndrome néphrotique idiopathique corticorésistant avec hyalinose segmentaire et focale, à l’origine d’environ 10 % des insuffisances rénales terminales chez l’enfant.

Le risque de récidive du syndrome néphrotique dans cette affection est de 25 %.

Le risque de récidive est plus élevé lorsque la maladie débute après l’âge de 6 ans, lorsque la biopsie initiale a montré une prolifération mésangiale diffuse et lorsque la maladie a évolué rapidement vers l’insuffisance rénale terminale en moins de 3 ans.

La récidive s’accompagne d’une perte de la greffe dans 60 % des cas.

Cependant, certains patients gardent une fonction rénale normale pendant plusieurs années malgré la récidive.

Le traitement en cas de récidive fait appel à la ciclosporine par voie veineuse et éventuellement aux échanges plasmatiques.

La glomérulonéphrite membranoproliférative récidive souvent après transplantation et cette récidive entraîne la perte de la greffe dans 20 % des cas.

Dans les cas de néphropathie à IgA ou le purpura rhumatoïde, la récidive des dépôts d’IgA est très fréquente, mais une rechute clinique et histologique des lésions glomérulaires est inhabituelle.

La récidive est également rare dans les cas de néphropathie du lupus érythémateux disséminé.

Chez les enfants ayant présenté un syndrome hémolytique et urémique, il n’y a pas de risque de récidive de la maladie lorsqu’elle est survenue après un épisode diarrhéique (forme dite typique, la plus fréquente).

En revanche, le risque de récidive et de perte de greffe est important dans les formes atypiques de syndrome hémolytique et urémique.

Chez les enfants ayant présenté un néphroblastome, le risque de récidive ou de métastase est très faible si la transplantation est effectuée après 2 années de rémission complète.

Chez les enfants atteints d’hyperoxalurie primaire, la récidive des dépôts d’oxalate sur la greffe est constante, entraînant dans la majorité des cas une perte du greffon.

De ce fait, la meilleure approche, du moins chez le jeune enfant, semble être une transplantation combinée foie-rein.

Cette double greffe doit être effectuée le plus rapidement possible lorsque le stade d’insuffisance rénale est atteint afin d’éviter les dépôts de cristaux d’oxalate dans l’organisme (os, vaisseaux) et leur conséquences désastreuses.

Après la transplantation, il est indispensable de maintenir une diurèse très abondante pour prévenir les dépôts d’oxalate sur le greffon tant que l’oxalurie reste élevée.

7- Complications urologiques :

Les complications précoces, en dehors des thromboses vasculaires, sont essentiellement représentées par les fistules urinaires.

Ces fistules urinaires sont le plus souvent en rapport avec une nécrose de la portion terminale de l’uretère du rein greffé, parfois d’une portion étendue de l’uretère.

Elles se traduisent par un épanchement périrénal observé sur l’échographie et souvent une élévation de la créatininémie.

L’uroscanner permet de confirmer le diagnostic.

Les complications tardives possibles sont une obstruction de la voie excrétrice, en particulier lorsque le rein a été retourné pour faciliter les sutures vasculaires, un dysfonctionnement vésical et une lithiase urinaire.

8- Tumeurs :

Les traitements immunosuppresseurs favorisent le développement de tumeurs chez l’enfant après transplantation rénale.

Les lymphomes sont la forme la plus fréquente de tumeur chez l’enfant.

Penn a rapporté 208 cas de tumeurs chez l’enfant, dont 31 % étaient des lymphomes, 29 % des cancers de la peau, 6 % des carcinomes de la vulve ou du périnée, 5 % des tumeurs primitives du foie, 5 % des sarcomes, 3 % des cancers de la thyroïde, 3 % des sarcomes de Kaposi, 3 % des cancers du col de l’utérus et 15 % d’autres tumeurs.

Le rapport du NAPRTCS fait état de 12 tumeurs qui se sont développées chez 1 550 enfants.

Six avaient un syndrome lymphoprolifératif, cinq un sarcome et un, un cancer de la thyroïde.

9- Non-observance du traitement :

Plusieurs publications ont insisté sur l’incidence élevée de mauvaise observance du traitement médicamenteux, en particulier chez l’adolescent et le jeune adulte.

La fréquence est sous-estimée, mais des taux aussi élevés que 60 % ont été rapportés.

Parmi les raisons expliquant la moins bonne observance du traitement, l’aspect cushingoïde et le retard de croissance dont sont responsables les corticoïdes, l’hirsutisme et l’hypertrophie gingivale induits par la ciclosporine ont un rôle important.

La mauvaise observance du traitement est une cause majeure de perte tardive de la greffe. On estime qu’elle est responsable de 5 à 10 % des échecs.

Ce problème peut en partie être prévenu par des programmes d’éducation et de suivi.

10- Croissance après transplantation :

Bien que la croissance staturale s’améliore chez la majorité des enfants après une transplantation rénale réussie, un rattrapage du retard acquis pendant la période d’insuffisance rénale n’est pas souvent observé.

Les deux principaux facteurs qui interviennent dans la croissance staturale après la transplantation sont la fonction rénale et la corticothérapie.

Une croissance de rattrapage ne s’observe que si la fonction rénale est normale ou subnormale.

La croissance staturale est altérée lorsque la dose de prednisone dépasse 5 mg/m2/j.

Les corticostéroïdes interagissent avec l’hormone de croissance et l’IGF-1 (insulin-like growth factor).

Les taux d’hormone de croissance sont diminués lors de l’administration prolongée de corticostéroïdes, de même ceux de la protéine porteuse de l’hormone de croissance.

La réponse hypophysaire à la plupart des stimulants pharmacologiques ou physiologiques est diminuée.

Ceci suggère un rôle de la somatostatine dans l’inhibition de la sécrétion de l’hormone de croissance par les corticostéroïdes.

Chez les enfants transplantés prépubères, on retrouve une relation inverse entre la dose de corticostéroïdes et le pic et le taux moyen d’hormone de croissance.

L’activité de l’IGF-1 est diminuée chez les enfants transplantés rénaux du fait d’un effet antagoniste des glucocorticoïdes et en raison de la présence d’inhibiteurs.

Ces inhibiteurs dont la synthèse est favorisée par les glucocorticoïdes sont des protéines de petit poids moléculaire et différentes des protéines porteuses de l’IGF-1.

L’effet délétère des glucocorticoïdes sur la croissance staturale est donc multifactoriel et fait intervenir une diminution de la sécrétion d’hormone de croissance, une diminution de l’expression des récepteurs hépatiques de l’hormone de croissance, une inhibition de l’activité biologique de l’IGF-1, des altérations des protéines porteuses de l’IGF-1.

Enfin, les glucocorticoïdes ont un effet direct sur le cartilage en inhibant la synthèse de collagène et la minéralisation osseuse.

Le mode d’administration des corticoïdes après transplantation rénale intervient dans leur effet sur la croissance.

L’effet bénéfique de la corticothérapie administrée un jour sur deux a été démontré clairement dans une étude prospective randomisée effectuée chez 35 enfants dont la corticothérapie a été passée en discontinu 14 à 27 mois après la transplantation rénale et après une biopsie du greffon ne montrant pas de signes histologiques de rejet.

La dose cumulative de prednisone était la même dans les deux groupes, de même que la fonction rénale et l’âge osseux.

Au cours de la première année d’observation, la croissance moyenne, exprimée en changement de score de dérivation standard (DS), était significativement meilleure chez les enfants recevant une corticothérapie discontinue (+ 0,49 ± 0,42 DS/an) par rapport aux enfants maintenus sous corticothérapie continue (- 0,12 ± 0,53 DS/an ; p < 0,005).

Au cours de la seconde année de l’étude, la plupart des enfants sous corticothérapie continue ont reçu une corticothérapie discontinue.

La vitesse de croissance moyenne a augmenté à + 0,29 ± 0,35 DS/an (p < 0,05 par rapport à l’année précédente).

Les enfants qui sont restés sous corticothérapie discontinue ont continué à avoir une croissance de rattrapage (+ 0,52 ± 0,37 DS/an).

La fonction rénale de ces patients est restée stable.

Ces données indiquent que chez les transplantés rénaux ayant une fonction rénale normale ou subnormale, la corticothérapie discontinue permet une croissance de rattrapage sans augmentation du risque de rejet.

Dans une étude rétrospective du NAPRTCS, la croissance de rattrapage au cours des deux premières années de greffe a été plus nette dans le groupe d’enfants recevant une corticothérapie discontinue (+ 0,5 ± 0,06 DS) que dans le groupe d’enfants recevant une corticothérapie continue (0,1 ± 0,03 DS) sans différence entre les deux groupes en ce qui concerne la fonction rénale ou la survie des greffons.

Il existe peu de données sur l’effet de l’arrêt de la corticothérapie sur la croissance staturale. Klare et al ont observé une croissance de rattrapage (0,8 ± 0,3 DS pendant la première année et 0,3 ± 0,2 DS pendant la seconde année) dans un groupe de 12 enfants ayant une fonction rénale normale ou peu altérée et stable.

Néanmoins, l’arrêt de la corticothérapie augmente considérablement le risque de rejet et une revue de la littérature estime ce risque à 39 %.

Il est possible que l’introduction d’immunosuppresseurs plus puissants tels que le tacrolimus et/ou le mycophénolate mofétil permette d’envisager un arrêt de la corticothérapie en diminuant ce risque de rejet.

Depuis 1989, plusieurs études ont montré que la croissance staturale après transplantation rénale était améliorée par l’hormone de croissance.

Une étude prospective randomisée multicentrique française effectuée de 1990 à 1993 et portant sur 90 enfants a étudié l’effet du traitement par hormone de croissance à la dose de 30 U/m2/semaine, soit d’emblée à l’inclusion, soit après une année dans le groupe témoin.

Les critères d’inclusion étaient un retard de croissance de plus de 2 DS, une vitesse de croissance ralentie, une période de plus de 1 an après la transplantation, une fonction rénale stable et un stade prépubère ou postpubère précoce.

Au cours de la première année, la vitesse de croissance était significativement augmentée dans le groupe d’enfants recevant l’hormone de croissance (7,7 cm avec un rattrapage de 0,3 DS) par rapport au groupe témoin (4,6 cm ; p < 0,0001).

La réponse au traitement était liée à la vitesse de croissance avant sa mise en route, à la fonction rénale au début du traitement, au mode d’administration des corticoïdes et au degré de résistance à l’insuline.

Durant les années suivantes, sous hormone de croissance, la vitesse de croissance s’est ralentie : 5,9 cm la seconde année, 5,5 cm la troisième année et 5,2 cm la quatrième année.

D’autres études ont montré que l’effet de l’hormone de croissance sur la croissance staturale s’atténue au fil des années, comme cela est également le cas dans d’autres indications de ce traitement. Tönshoff et Mehls ont montré que le degré de retard de la maturation osseuse est un facteur prédictif de la réponse au traitement par hormone de croissance après transplantation rénale chez l’enfant prépubère.

Il a été montré que l’hormone de croissance augmente certaines réponses immunitaires et il est possible qu’un tel traitement favorise des crises de rejet.

Dans la plupart des essais effectués à ce jour, il n’a pas été observé d’augmentation du risque de rejet.

Ce problème a été analysé dans l’étude multicentrique française.

Après 1 an, une altération modérée mais significative de la fonction rénale a été observée dans les deux groupes, traité et non traité.

Des épisodes de rejet confirmés histologiquement sont survenus avec une fréquence non significativement différente dans les deux groupes : 9/44 dans le groupe traité et 4/46 dans le groupe témoin.

Néanmoins, des crises de rejet sont survenues avec une plus grande fréquence chez les enfants traités par hormone de croissance et qui avaient eu au moins deux épisodes de rejet avant le début du traitement.

Parmi les enfants qui n’avaient présenté aucun ou qu’un seul épisode de rejet, trois dans chaque groupe, traité (n = 27) et témoin (n = 25), ont présenté un nouvel épisode de rejet au cours de la première année de l’essai.

Parmi les enfants ayant eu au moins deux épisodes de rejet avant l’inclusion, six des 17 enfants traités par hormone de croissance ont présenté une nouvelle crise de rejet contre un seul des 21 enfants du groupe témoin (p = 0,01).

Le principal effet métabolique du traitement par hormone de croissance est l’augmentation de la sécrétion d’insuline qui est observée malgré l’absence de modification de la tolérance au glucose et des concentrations d’hémoglobine glycosylée.

Néanmoins, cette augmentation de la sécrétion d’insuline et la relative résistance à l’insuline observées après un traitement de 2 ans semblent réversibles.

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