Traitement des hydrocèles de l’adulte Cours de Chirurgie
Introduction
:
Lors du premier trimestre de grossesse, le testicule migre de la
région lombaire vers le scrotum, en passant au travers du canal
inguinal.
Il entraîne avec lui une expansion péritonéale : le canal péritonéovaginal.
Celui-ci s’occlut, normalement, durant la première
année de vie, individualisant deux cavités virtuelles, péritonéale et
vaginale.
La vaginale est une séreuse composée d’un feuillet pariétal
qui tapisse la face interne de la paroi scrotale et d’un feuillet viscéral
qui adhère à l’albuginé testiculaire.
L’hydrocèle vaginale de l’adulte est due à une sécrétion excessive
par la muqueuse vaginale d’un exsudat qui se collecte dans la cavité
vaginale non communicante.
Cependant, il convient, chez l’adulte
jeune, de dépister une hydrocèle communicante dont le traitement
est spécifique et rejoint celui des hernies de l’enfant.
Le traitement de référence de l’hydrocèle vaginale est chirurgical.
La réputation de facilité de cette chirurgie masque cependant
certains pièges, responsables de suites opératoires parfois
compliquées.
Soins préopératoires et indication
opératoire :
Si le diagnostic d’hydrocèle est clinique, une échographie testiculaire
préopératoire reste parfois utile pour ne pas méconnaître une
affection épididymotesticulaire sous-jacente.
L’indication opératoire sera posée devant des troubles fonctionnels
handicapants et non pas uniquement pour des considérations
esthétiques subjectives.
Le patient est prévenu des complications potentielles, y compris une
perte du testicule et une altération de fertilité toujours possibles.
Il
faut préciser que l’effet de la chirurgie sur le volume scrotal est
retardé et que le scrotum n’est, de toute façon, plus symétrique.
Anesthésie
:
L’anesthésie est le plus souvent locorégionale ou générale.
Mais elle peut être locale, alors aidée par une prémédication (10 mg
de diazépam ou 10 mg de chlorhydrate de morphine
intramusculaire par exemple).
Le cordon spermatique est repéré à
son émergence de l’orifice inguinal externe où il est maintenu entre
médius et index, contre le pubis.
Il est infiltré de 7 à 10 ml de lidocaïne à 1 % ou de 60 ml de novocaïne.
L’anesthésie est complétée
par l’infiltration intradermique du scrotum avec 5 à 7 ml de lidocaïne.
Voie d’abord
:
Le chirurgien droitier se positionne à la droite du patient.
Le
scrotum pathologique est exposé par sa main gauche, ou par les
deux mains de son aide.
La compression de l’hydrocèle permet de
tendre la peau pour l’inciser.
Une incision transversale du scrotum est le plus souvent utilisée.
Dans le cas d’une hydrocèle bilatérale, une incision sagittale sur le
raphé médian peut permettre l’économie d’une incision cutanée.
L’incision de la peau et des enveloppes est limitée à la longueur
nécessaire pour extérioriser le testicule (4 cm).
Elle se fait selon la
préférence du chirurgien au bistouri à lame froide, au bistouri
électrique dont le voltage de coagulation est diminué (30 Volts) ou
aux ciseaux de Metzembaum.
L’hémostase doit être particulièrement
soigneuse afin d’éviter la constitution d’un hématome, principale
complication de la technique dans une loge qui se distend facilement
sans contre-pression.
La dissection est menée jusqu’à la vaginale,
reconnue à son aspect bleuté.
Technique chirurgicale
:
A - TECHNIQUE DITE DE LORD
:
Cette technique consiste à froncer la vaginale pariétale pour entraver
sa sécrétion et son expansion.
La vaginale peut être ouverte d’emblée, sans être disséquée plus
avant.
Le contenu de l’hydrocèle est évacué, mais peut être prélevé
pour un examen bactériologique, éventuellement mycobactériologique en cas de nécessité.
Le testicule est extériorisé
et se présente au centre d’une vaginale éversée.
Il est exploré pour
confirmer sa normalité.
La vaginale est froncée en plicaturant celle-ci au fil résorbable fin
serti, de 3/0 habituellement.
Les points sont espacés régulièrement
tous les centimètres.
Ils faufilent la vaginale par des prises fines tous
les demi-centimètres au maximum.
La prise débute par la tranche
vaginale et se dirige vers le sillon épididymotesticulaire.
Il faut être
attentif, premièrement, à ne pas léser les éléments nobles, tout
particulièrement l’épididyme, et, deuxièmement, à ne pas laisser
persister de « poche » de vaginale non plicaturée qui serait à
l’origine d’une récidive surtout au cul-de-sac supérieur.
Tous les
points sont passés à l’avance et repérés avant d’être noués les uns
après les autres.
Il faut vérifier l’absence de torsion du cordon lors de la réintégration
du testicule dans la bourse.
Aucun drainage n’est habituellement
utile, mais une lame est volontiers mise en place pour 24 heures en
cas de doute sur l’hémostase ou d’hydrocèle volumineuse.
La
fermeture s’effectue par un surjet inversant sur le dartos au fil
résorbable, et par des points séparés au fil résorbable
préférentiellement incolore sur le plan cutané.
Certains réalisent un
pansement compressif sur les bourses afin de limiter le risque
d’hématome.
Ce n’est qu’au 3e mois postopératoire que le testicule retrouve sa
mobilité intrascrotale et que le bourrelet de la plicature vaginale
s’estompe.
B - RÉSECTION DE LA VAGINALE TESTICULAIRE
:
La vaginale n’est généralement pas ouverte d’emblée afin de la
maintenir sous tension et de faciliter sa dissection de la fibreuse
commune.
Une fois isolée, elle sera ouverte longitudinalement.
Certains, pour ne pas risquer de progresser dans un mauvais plan,
ouvrent la vaginale d’emblée avant d’en débuter la dissection. Les
berges sont saisies à l’aide de pinces plates.
L’opérateur droitier tient
une pince de sa main gauche, introduit l’index gauche dans la cavité
vaginale et, sur le billot que constitue son index, la vaginale est mise
en tension et son feuillet viscéral est libéré aux ciseaux ou à la
compresse.
Ainsi, la séreuse est disséquée comme un sac herniaire,
le plus haut possible jusqu’à la ligne de réflexion sur le cordon
spermatique.
La section de la vaginale se fait au bistouri électrique après avoir
régulièrement disposé des pinces repères sur la tranche de section,
qui permettent de déplisser le tissu et de repérer le cordon et
l’épididyme.
La section est circonférentielle et doit ménager une
collerette de sécurité d’un à un demi-centimètre au minimum autour
du testicule et de l’épididyme.
Le cul-de-sac supérieur doit aussi
être réséqué, les éléments nobles étant alors particulièrement
exposés, notamment en cas de pachyvaginalite.
L’hémostase
doit être particulièrement attentive.
Il faut réaliser un surjet
hémostatique sur la tranche de section de la vaginale, à l’aide d’un
fil résorbable de 3/0, le surjet étant volontiers passé.
Une
hémostase parfaite permet de faire l’économie d’un drainage, mais
plus encore que pour la plicature vaginale, le moindre doute impose
de mettre en place une lame.
La fermeture est identique à celle
décrite pour la technique de Lord. Un pansement compressif peut
aussi être réalisé en fin d’intervention.
Une variante à cette technique a été décrite par Jaboulay en 1902.
La résection laisse persister une collerette plus large. Celle-ci est retournée pour envelopper en arrière le cordon spermatique et
suturée par un fil résorbable 3/0, en prenant garde de ne pas
étrangler le cordon.
C - FENESTRATION
:
Cette méthode est rapide, peu hémorragique, mais présente un taux
de récidive plus important que les précédentes lors du traitement
des hydrocèles volumineuses.
Elle est donc indiquée pour des
hydrocèles essentielles non cloisonnées de volume modéré, chez des
sujets âgés à risque anesthésique élevé.
Le principe de l’intervention consiste à réaliser une ouverture
réduite de la vaginale, permettant alors la réabsorption de l’exsudat
par les lymphatiques du tissu sous-cutané et du dartos.
L’incision cutanée est réduite et de préférence très basse.
La
dissection est menée sur environ 1 cm, dans le plan exsangue entre
le tissu sous-cutané et le dartos qui est repéré par deux fils de
suspension.
La vaginale est ensuite ouverte, à la partie la plus
déclive, et la totalité de son contenu est évacuée, sans toutefois que
le testicule soit extériorisé.
L’ouverture, bien que limitée, doit
permettre une exploration du contenu scrotal.
Une petite résection
vaginale, pour faire une biopsie, est réalisée.
La fenestration vaginale consiste, tout d’abord, à ourler le pourtour
de la fibreuse profonde et de la vaginale à l’aide d’un fil résorbable
de 4/0.
La suture commence par la fibreuse profonde dont le bord
libre est replié sur la face externe et est légèrement décalé, afin qu’il
se trouve en contact étroit avec le dartos.
Le feuillet pariétal est à
son tour éversé, de manière à individualiser l’espace celluleux entre
les deux sutures.
Le pourtour de la fenêtre, ainsi largement ouverte,
est ensuite amarré par son feuillet fibreux à la face profonde du dartos, resté solidaire du tissu cellulaire sous-cutané, riche voie de
drainage lymphatique.
Le diamètre de la fenêtre ne doit pas excéder
2 à 3 cm, de façon à éviter toute luxation du testicule.
La fermeture du plan sus-jacent est assurée par un surjet de fil
résorbable 4/0.
Quelques points de fils résorbable fin sur la peau
terminent l’intervention.
Ponction-évacuation et sclérose
:
Il s’agit d’une technique simple mais qui expose à des douleurs
postopératoires, à des récidives cloisonnées et à des lésions épididymaires obstructives.
Par ailleurs, ses résultats sont décevants.
Elle s’adresse donc à des patients âgés, ayant une contre-indication
anesthésique et sans désir de paternité.
Elle peut être réalisée en
ambulatoire. Le patient se place en décubitus dorsal.
Le point de
ponction est déterminé par transillumination pour éviter de léser les
vaisseaux.
Après désinfection, les champs sont installés.
Une anesthésie locale
de la peau et du tissu sous-cutanés est réalisée avec de la lidocaïne
2 % sans adrénaline.
La ponction est effectuée avec un cathlon à perfusion de 18 G.
Celui-ci est connecté à une tubulure qui permet un drainage déclive
dans un collecteur gradué.
Une fois la totalité de l’exsudat évacué, il est conseillé d’injecter de
la lidocaïne 2 % dans la vaginale afin de réaliser une anesthésie de
contact.
Le volume injecté correspond à 1 % du volume évacué, sans
excéder 5 ml.
Après une minute, l’anesthésique est évacué à son
tour.
C’est alors que peut être instillée la solution sclérosante.
Celle-ci peut
être de nature diverse.
Les tétracyclines sont les plus utilisées et les
plus efficaces, mais elles sont sources de douleurs.
On peut utiliser
500 mg de doxycycline dilué dans 2 ml d’eau pour préparation
injectable (PPI) ou 100 mg de chlorhydrate de minocycline dilué
dans 5 ml de sérum physiologique.
D’autres solutions ont aussi
été utilisées, comme 2 ml de polidocanol à 3 % et à pH 6, ou
une à deux ampoules de sodium tétradécyl sulfate dans une solution
salée avec 6 ml à 2 %, moins de 50 ml de phénol à 2,5 % dans une
solution aqueuse à pH 4 à 6.
Suite à l’instillation, il faut masser
le scrotum pendant cinq minutes afin que le produit se répartisse
dans toute la cavité vaginale.
Les patients peuvent reprendre une activité normale dès la fin de
l’intervention.
Aucune antibiothérapie de principe n’est nécessaire.
Le volume scrotal augmente pendant deux à trois semaines, puis
diminue pour arriver à un volume final après deux ou trois mois.
Il
est souvent nécessaire de répéter plusieurs fois l’intervention de
sorte que cette technique ne doit être proposée qu’à des patients
pour lesquels un suivi est possible.
Conclusion
:
L’hydrocèle vaginale de l’adulte est une affection bénigne, mais parfois
invalidante, dont le traitement doit être discuté avec le patient.
Le traitement de référence est chirurgical, par plicature selon
Lord ou par
résection ; la simple fenestration vaginale, si elle est choisie, est réservée
aux hydrocèles de petit volume.
C’est le soin apporté à l’intervention, et
en particulier à l’hémostase qui est le garant d’un résultat satisfaisant
et de suites simples.
Ce n’est qu’en cas de contre-indication
anesthésique que l’on aura recours à l’évacuation simple et à la sclérose.