Traitement des éventrations de la paroi abdominale Cours de Chirurgie
Introduction
:
Les éventrations de la paroi abdominale sont des solutions de
continuité musculoaponévrotiques secondaires à une incision
chirurgicale ou à une plaie pénétrante de l’abdomen.
Elles
concernent exclusivement les parois antérieure et latérales de
l’abdomen.
Sont exclues de cette définition les solutions de
continuité spontanées telles que le diastasis des muscles droits et les
déformations pariétales lomboabdominales secondaires à une
dénervation d’origine chirurgicale.
Ce sont les « incisional hernias »
des auteurs anglo-saxons. Leur fréquence, dans les séries ayant un
recul suffisant, varie de 13 à 20 % des laparotomies.
L’incidence est corrélée au siège et à la taille des incisions, au type
de chirurgie, de pathologie initiale et au terrain du patient.
Elle a
diminué grâce à l’amélioration des techniques de suture pariétale, à
la protection rigoureuse des incisions et l’antibioprophylaxie qui ont
réduit le risque de complication septique pariétale, cause principale
des éventrations.
En chirurgie abdominale, les volumineuses
éventrations constituent une complication majeure dont le
traitement est responsable d’une mortalité pouvant atteindre 10,4 %
dans les formes compliquées.
L’impact économique est
considérable, aggravé par la fréquence des récidives qui peut
atteindre 51 %.
L’essor de la chirurgie mini-invasive par
vidéoendoscopie a fait disparaître le risque de volumineuse
éventration mais a donné naissance à une nouvelle entité, les
éventrations limitées sur orifice de trocart.
L’incidence des récidives
a fait abandonner nombre de techniques anciennes de pariétorraphie
au profit des pariétoplasties sans tension avec prothèse non
résorbable dont les perfectionnements incessants ont amélioré les
performances et diminué les risques.
Cette banalisation de l’usage
des prothèses est en tout point comparable à l’évolution du
traitement des hernies de l’aine.
Elle a été confirmée par la coeliochirurgie dont la technique et les
indications en matière d’éventration ont fait l’objet de nombreuses
publications récentes.
Classification
:
Le critère déterminant dans le choix de la technique chirurgicale est
la taille de l’éventration.
Plus que la longueur, c’est la largeur de la
brèche qui en détermine la gravité et la difficulté de réparation.
Des
calculs de surface complexes ont été proposés.
Ils ne reflètent pas la
différence de gravité entre une éventration plus longue que large
facilement réparable et une éventration plus large que longue de
surface identique mais de réparation aléatoire et exposée à la
récidive.
Un qualificatif usuel doit correspondre à une largeur
chiffrée.
Une éventration de largeur inférieure à 5 cm est dite
« petite », de 5 à 10 cm, « grande », de 10 à 15 cm « très grande », de
plus de 15 cm, « énorme ou géante ».
Physiopathologie
:
La paroi antérolatérale de l’abdomen est constituée par les deux
muscles droits enveloppés par une gaine résistante formée par les
aponévroses des muscles larges.
Les deux gaines sont réunies
sur la ligne médiane par l’entrecroisement des fibres à direction
transversale des trois aponévroses des muscles larges formant la
ligne blanche, plus large et plus résistante au-dessus de l’ombilic.
Le
feuillet postérieur de la gaine des muscles droits, dans son tiers
inférieur sous-ombilical, n’est plus formé que par un mince fascia
transversalis au-dessous de la ligne arquée ou arcade de Douglas.
Latéralement, l’orientation des fibres des trois muscles larges,
oblique externe, oblique interne et transverse, n’est pas parallèle.
Sur le plan fonctionnel, les muscles larges se comportent en muscles
digastriques dont le tendon intermédiaire est formé par la gaine des
droits et la ligne blanche.
Leur action antagoniste explique que
l’incision médiane, par ailleurs la plus utilisée, soit aussi la plus
fréquemment responsable d’éventration (80 %) avec rétraction
latérale progressive des muscles droits.
La localisation prédominante sous-ombilicale (26 à 33 %), en particulier après chirurgie
gynécologique, s’explique par l’absence de feuillet postérieur de la
gaine sous-arquée.
La répartition viscérale abdominale rend compte
de l’importance variable de la protrusion pariétale pouvant réaliser
dans la région sous-ombilicale l’aspect de « deuxième abdomen »
abondamment illustré dans les traités.
Latéralement, l’absence de
parallélisme des muscles larges implique, dans toute incision iliaque,
une section musculaire et, en cas d’éventration, la difficulté des
réparations plan par plan.
Les incisions transversales qui respectent
davantage l’orientation et la dynamique pariétale sont plus rarement
responsables d’éventration, l’incidence la plus faible étant celle de
l’incision de Pfannenstiel (0 à 2 %).
La perte de substance pariétale est habituellement virtuelle,
conséquence de la rétraction et de l’atrophie pariétale.
Elle peut être
réelle au niveau des insertions musculaires périphériques et le
rebord osseux ou cartilagineux participe alors au collet de
l’éventration.
Cette distinction a perdu de son intérêt pratique à l’ère
de la pariétoplastie prothétique.
Les éventrations de largeur supérieure à 15 cm sont définies par
leur siège, le plus souvent médian et sous-ombilical, et leurs
conséquences physiopathologiques locales et générales.
Localement,
la désinsertion de la sangle musculaire latérale entraîne une
rétraction et une atrophie musculaire, parfois une dégénérescence scléroadipeuse.
L’ouverture pariétale avec sagittalisation des muscles
droits facilite l’énucléation du contenu abdominal vers un
« deuxième abdomen ».
Les ulcérations ischémiques de la peau, les
lésions infectées et l’intertrigo sont des conséquences fréquentes
qu’il faut traiter avant toute intervention.
Sur le plan général, ces
éventrations constituent une véritable maladie systémique
d’évolution sévère dominée par la maladie respiratoire.
La perte
de substance pariétale entraîne une incoordination entre la paroi
thoracique, le diaphragme et la musculature abdominale.
La
diminution de la pression abdominale altère la fonction du
diaphragme avec un abaissement et une atonie progressive.
L’insuffisance respiratoire chronique qui en résulte est souvent
latente avec des épreuves fonctionnelles et une gazométrie peu
modifiées en l’absence de pathologie restrictive ou obstructive
préexistante.
Le risque de décompensation survient après réintrégration chirurgicale des viscères et remise en tension de la
paroi.
Méthodes thérapeutiques
:
A - PRINCIPES GÉNÉRAUX
:
L’objectif du traitement est de rétablir la continuité et la solidité de
la paroi.
Le principe de la reconstitution anatomique, en particulier
de la ligne blanche par suture ou autoplastie aboutit à de fréquents
échecs.
Sur le plan biologique, la cicatrisation d’une laparotomie aux
berges vascularisées n’est pas comparable à celle d’une cure
d’éventration aux berges cicatricielles.
La tension nécessaire pour
affronter les berges est un élément majeur de la cicatrisation.
Les
décollements larges et les incisions de relaxation ont pour but de
diminuer la tension excessive, facteur de récidive.
Au principe de
reconstitution anatomique tend à succéder celui de substitution
prothétique sans tension où une prothèse résistante comble la brèche
pariétale et secondairement génère une nouvelle paroi.
C’est
également le principe du traitement coelioscopique.
La réduction des viscères herniés dans un « deuxième abdomen » a,
comme conséquence, une augmentation de la pression intraabdominale
et, par retentissement diaphragmatique, une restriction
ventilatoire.
Le pneumopéritoine thérapeutique préopératoire à dose
progressive a été préconisé pour favoriser la distension pariétale et
permettre l’adaptation à l’hyperpression abdominale.
La pariétoplastie prothétique sans tension a considérablement réduit les
indications de cette technique non dénuée d’inconvénients.
Les manipulations des anses intestinales herniées et les viscérolyses
étendues doivent être évitées pour réduire l’intensité et la durée de
l’iléus postopératoire.
Ce serait l’un des avantages de l’abord coelioscopique.
L’asepsie rigoureuse, la préparation cutanée et l’antibioprophylaxie
permettent de réduire le risque septique et d’étendre les indications des prothèses.
L’hémostase scrupuleuse, l’utilisation du bistouri
électrique pour les décollements sous-cutanés, les drainages
aspiratifs, voire l’utilisation de colles biologiques, les pansements
compressifs et les gaines de contention pariétale permettent de
réduire le risque d’hématome et de sérome facteur d’infection.
Dans
le choix de l’intervention, il faut privilégier celle qui comporte le
moins de dissection et de décollement pariétal.
Quelle que soit la technique, les sutures ne peuvent être effectuées
que sur des aponévroses et non sur des muscles.
La fixation des prothèses se fait par suture simple prothétoaponévrotique lorsqu’elles sont superficielles, par suture
transfixiantes, transpariétales largement appuyées lorsqu’elles sont
profondes.
Le matériel de suture doit permettre le maintien de l’affrontement
tissulaire pendant une durée suffisante pour assurer la cicatrisation.
Les matériaux à résorption lente qui perdent 60 % de leur force de
tension en 21 jours ne peuvent convenir.
En revanche, les
prothèses macroporeuses qui sont intégrées dans le tissu cicatriciel
en 2 semaines peuvent être fixées avec des sutures résorbables.
Le résultat cosmétique doit être pris en considération.
En chirurgie
ouverte, l’excédent cutané doit être excisé.
Il est illogique et
préjudiciable au résultat d’associer une dermolipectomie à une cure
d’éventration.
En chirurgie coelioscopique, la persistance de la
disgrâce cutanée est un inconvénient qui peut nuire à la satisfaction
du patient.
La qualité de vie, outre l’absence de récidive, doit être appréciée
après réparation.
Elle est parfois affectée par la persistance de
douleurs et, après implantation de prothèse, par une restriction de
la mobilité abdominale avec répercussion sur l’activité physique.
B - PRÉPARATION ET ANESTHÉSIE
:
Localement, le traitement par antiseptique des lésions infectées, en
particulier chez l’obèse, est indispensable jusqu’à guérison complète.
La préparation générale, dans les volumineuses éventrations, est
essentiellement respiratoire avec kinésithérapie, réduction du
tabagisme.
Le pneumopéritoine thérapeutique préopératoire n’est
plus guère utilisé.
Son intérêt est contestable.
Certains lui
préfèrent la ventilation artificielle postopératoire.
Chez l’obèse, les
tentatives de perte pondérale sont en général infructueuses.
Des
contre-indications à la chirurgie peuvent apparaître au terme de la
préparation.
L’obésité morbide et l’insuffisance respiratoire
chronique sont des facteurs de risque vital.
L’abord coelioscopique
serait plus efficace et moins risqué chez les patients obèses.
Le mode d’anesthésie dépend de la taille, du siège de l’éventration
et des conditions générales.
Une éventration de petite taille, de siège
péri- et sous-ombilical peut être traitée sous anesthésie locorégionale.
La réparation d’une volumineuse éventration avec réintégration
viscérale et remise en tension pariétale impose la curarisation et
l’anesthésie générale.
L’association d’une rachianesthésie par
cathéter avec infusion de bupivacaïne et de morphine permet une
analgésie postopératoire efficace.
L’antibioprophylaxie (Céporexine 2 g à l’induction de l’anesthésie)
est de pratique systématique en cas d’implantation prothétique.
C - TRAITEMENT PAR LAPAROTOMIE
:
1- Incision
:
L’incision cutanée comporte l’excision elliptique de l’ancienne
cicatrice.
L’excédent cutané ne peut être apprécié et excisé qu’après
achèvement de la réparation pariétale en tenant compte de la trophicité des berges.
La conservation de l’ombilic est toujours
préférable.
2- Exposition du sac
:
Le sac herniaire constitué par le péritoine et le tissu fibreux cicatriciel
est disséqué de la graisse sous-cutanée jusqu’au niveau du collet et
des berges aponévrotiques.
L’opérateur empaume et tracte de la
main gauche le sac qui est clivé aux ciseaux ou au bistouri électrique
pendant que l’aide rétracte la graisse sous-cutanée et la peau avec
des écarteurs de Farabeuf larges.
3- Traitement du sac
:
À l’exception d’éventrations de petite taille, inférieures à 3 cm, où,
par analogie avec une hernie ombilicale, le sac peut être réintégré et
une prothèse prépéritonéale mise en place pour le contenir, tout sac
volumineux doit être ouvert et son contenu épiploïque ou intestinal
libéré en s’abstenant de toute viscérolyse injustifiée.
Le sac est
ensuite réséqué de façon économique en conservant des larges
lambeaux périphériques dont la suture, sans valeur de soutien, est
indispensable pour couvrir une prothèse sous-jacente.
La face
profonde de la paroi autour de la brèche doit être explorée sur toute
l’étendue de l’ancienne incision à la recherche d’orifices juxtaposés.
Proches et séparés par des bandes fibreuses étroites, il faut les réunir
à la brèche principale.
Distants, dans les éventrations plurifocales, il
faut les inventorier, en réintégrer le sac et s’assurer que la couverture
distale par la prothèse, indispensable dans ces cas, sera suffisante.
Les anciens fils de suture doivent être supprimés et, si besoin,
cultivés pour étude bactériologique.
Quant à l’avivement des berges,
il doit être limité à l’excision du tissu cicatriciel sans ouverture
aponévrotique intempestive avant d’avoir arrêté le choix du procédé
de réparation.
4- Procédés de réparation
:
Ils sont multiples mais un consensus tend à s’imposer en faveur de
la pariétoplastie prothétique.
* Procédés autologues
:
Leur objectif est la reconstitution anatomique et fonctionnelle de la
paroi abdominale, soit par suture simple, soit par autoplastie, soit
par auto- et alloplastie combinées.
Sutures simples. Les réparations par suture simple, en un ou deux
plans, doivent être abandonnées du fait d’une incidence de récidive
dépassant 50 %.
La suture de tissus cicatriciels et la tension
nécessaire à l’affrontement sont des éléments péjoratifs, facteur de
risque de récidive.
L’artifice de Mayo-Judd (« vest-over-pants ») qui
réalise une suture en deux plans superposés a donné un taux de
récidive de 54 % à 10 ans dans une série prospective de 68
patients.
Dans les éventrations de plus de 12 cm, l’incidence
d’échec à 5 ans a été de 78 %.
Les procédés de relaxation pariétale : afin de diminuer la tension
pariétale, outre le très large décollement sous-cutané qui s’impose
dans tous les cas, plusieurs procédés ont été décrits.
Pas toujours
suffisants pour garantir l’efficacité d’une suture simple, ils peuvent
être utiles pour assurer le recouvrement aponévrotique d’une
prothèse.
La technique de Gibson consiste en deux
incisions verticales sur le feuillet antérieur de la gaine des droits de
part et d’autre de la ligne médiane.
Dans la technique de Clotteau-Premont, de petites incisions aponévrotiques verticales,
longues de 15 mm, séparées les unes des autres d’une longueur
identique, sont effectuées en quinconce sur trois ou quatre rangées,
permettant un élargissement transversal comparable à celui des
greffes de peau en filet.
Sutures avec autoplasties. De nombreuses techniques d’avancement
de tissus sains pour combler le defect pariétal utilisant des lambeaux
aponévrotiques ou musculoaponévrotiques ont été décrites.
Elles ont
toutes l’inconvénient de nécessiter une dissection plus ou moins
complexe avec un risque hémorragique et de fragilisation d’autres
zones pariétales.
Les autoplasties aponévrotiques aux dépens de la
gaine des muscles droits permettant une reconstitution de la ligne
blanche sont les plus courantes.
Procédé de Welti-Eudel : le feuillet antérieur de la gaine
des droits est incisé longitudinalement à 15 mm de la berge de
l’éventration.
Le lambeau interne est décollé du muscle et rabattu
vers la ligne médiane en évitant d’ouvrir la charnière entre feuillet antérieur et postérieur de la gaine.
La suture est ensuite faite en un
plan en prenant successivement et de chaque côté le bord du
lambeau aponévrotique et la berge de l’éventration.
Cette technique
n’est applicable qu’aux éventrations sus-arquées.
Les deux lambeaux internes rabattus
sont suturés bord à bord sur la ligne médiane en refoulant le sac
péritonéal qui n’a pas été ouvert.
Pour s’opposer à la fragilisation
pariétale au niveau des muscles droits étirés et amincis, un laçage
est effectué à l’aide d’un fil monofilament double prenant les berges
externes de l’incision aponévrotique et la suture médiane mais sans
chercher, dans les éventrations larges, à affronter les deux berges.
L’auteur préconise cette technique pour des éventrations ne
dépassant pas 8 cm de large.
Procédé de Da Silva : cette autoplastie en trois plans,
applicable en zone sus-arquée, est originale par la conservation et
l’utilisation du sac péritonéal.
Il est séparé en deux lambeaux
latéraux.
La gaine aponévrotique est incisée de façon longitudinale
à sa face antérieure d’un côté et à sa face postérieure de l’autre, à
3 cm du bord interne.
Le plan profond péritonéoaponévrotique
ferme la cavité péritonéale.
Le plan moyen suture gaine antérieure
et gaine postérieure controlatérale.
Un plan superficiel péritonéoaponévrotique reconstitue la gaine antérieure.
Procédé de Ramirez (« components separation repair »).
Il
comporte une incision longitudinale de la gaine postérieure des
droits et une section du tendon du muscle oblique externe au bord
latéral du grand droit.
Le muscle oblique externe est séparé du
muscle oblique interne sous-jacent.
Cette séparation bilatérale
permet un avancement de 20 cm sur la ligne médiane.
Les autoplasties musculaires et autotransplants : les myoplasties
(muscles droit interne, droit antérieur, tenseur du fascia lata) et les autotransplants aponévrotiques (fascia lata) ou cutanés ne
conservent d’indication que dans les pertes de substance pariétale
complète, entité nosologique distincte des éventrations.
Autoplasties et alloplasties combinées. Il existe différents procédés.
Procédé de Chevrel. Applicable aux éventrations sus- et sous-arquées, son principe est un renforcement de la suture médiane
par retournement aponévrotique, comparable au procédé de Welti-
Eudel.
Il en diffère par le siège plus externe de l’incision du feuillet
antérieur de la gaine et par une suture en deux plans : suture des
bords fibreux de l’éventration puis suture « en paletot » des deux
lambeaux aponévrotiques larges de 3 ou 4 cm, décollés et retournés
vers la ligne médiane.
Une prothèse prémusculoaponévrotique
permet de renforcer la paroi au niveau des corps musculaires étalés
et amincis.
Procédé de Slim. Il réalise un recouvrement aponévrotique
associé à une prothèse rétromusculaire.
Il n’est applicable qu’aux
éventrations sus-arquées.
Le feuillet antérieur de l’aponévrose des
droits est incisé verticalement d’un côté à 1 cm du bord externe du
muscle et rabattu sur la ligne médiane.
Le corps musculaire est
séparé de la gaine sur ses faces antérieure et postérieure.
Du côté
opposé, une incision identique est pratiquée sur le feuillet postérieur
de l’aponévrose qui est libéré et étalé vers la ligne médiane.
Le gain
de surface obtenu permet une transposition et une suture du feuillet
antérieur à la berge externe du feuillet postérieur controlatéral et
vice versa.
Cette autoplastie peut être considérée comme suffisante
lorsqu’un contexte septique interdit l’usage d’une prothèse.
Procédé de Girotto. Il utilise la technique de « séparation des
éléments » décrite par Ramirez mais par étapes progressives en
fonction de la taille de l’éventration suivant un algorithme
comportant, en définitive, en cas de nécessité, un renfort
prothétique.
* Réparations par alloplastie
:
La pariétoplastie prothétique tend à devenir la méthode de référence
pour toute éventration, quelle qu’en soit la taille.
Alors que l’incidence des récidives après suture peut atteindre 50 %, elle est
inférieure à 10 % après renforcement prothétique non résorbable.
La prothèse se comporte en substitut de la paroi comblant la perte
de substance et en canevas pour la reconstitution d’une paroi
néoformée.
Elle permet de transformer la tension excessive en
« tension fonctionnelle ».
Le choix d’une prothèse implique la
connaissance des propriétés des biomatériaux disponibles
permettant de les adapter à l’éventration concernée et au site
d’implantation envisagé.
La prothèse « idéale » doit être inerte
chimiquement, non modifiée par les fluides tissulaires, ne pas
entraîner de réaction inflammatoire ou à corps étranger, de réaction
allergique ou d’hypersensibilité, ne pas être cancérigène, résister à
la tension mécanique, pouvoir être fabriquée et découpée à la forme
requise, être stérilisable et résister à l’infection.
Cette prothèse
« idéale » reste à découvrir.
Trois types de biomatériaux sont
disponibles.
Biomatériaux non synthétiques à base de collagène. Ils sont
constitués par une matrice de collagène d’origine humaine
(Alloderm) ou animale (Pelvicol) permettant une colonisation par
les fibroblastes.
L’expérience clinique est encore limitée. Elles
pourraient être utilisées dans les pertes de substance pariétale en
milieu septique.
Biomatériaux synthétiques résorbables (Vicryl, Dexon).
Ils ont
une durée de vie insuffisante pour assurer une réparation définitive.
Environ 60 % de la résistance à la traction du Vicrylt est perdue en
21 jours alors que la phase de maturation de la cicatrisation ne survient qu’à partir de la 6e semaine.
Le taux de récidive après
cure par prothèse résorbable peut atteindre 75 %.
Ils ne sont
indiqués que pour la réparation temporaire d’un defect pariétal dans
un contexte septique.
Au contact de l’intestin, ils n’ont aucun effet
indésirable.
Biomatériaux synthétiques non résorbables. Pour être efficaces, ils
doivent provoquer une faible réaction inflammatoire et une forte
réaction fibroblastique garante de leur intégration pariétale.
Cette
colonisation fibroblastique est directement en rapport avec la
porosité des treillis.
On oppose sur ce plan les prothèses
macroporeuses (type I : ex. Marlex) à fort potentiel adhésiogène
qui ont des interstices supérieurs à 75 µm, taille requise pour la
pénétration des macrophages, des fibroblastes et des fibres de
collagène, et les prothèses microporeuses (type II : ex. Gore-Tex)
aux interstices inférieurs à 10 µm qui génèrent peu d’adhérence et
ne s’intègrent pas à la paroi.
La taille des pores joue également un
rôle important dans le risque infectieux.
À moins de 10 µm, elles
permettent la colonisation bactérienne mais s’opposent au passage
des macrophages et des granulocytes.
En cas d’infection déclarée, la
tolérance est bonne pour les prothèses de type I permettant un
traitement conservateur.
En revanche, l’exérèse d’une prothèse de
type II infectée est, en général, indispensable.
La texture et le grammage qui exprime la quantité de matériel
implanté doivent être adaptés aux besoins physiologiques.
Les
treillis usuels ont une résistance mécanique très supérieure aux
besoins et qui augmente avec le temps.
Le grammage doit être le
plus réduit possible afin de diminuer la réaction inflammatoire et la
limitation de la mobilité abdominale dont la réalité et l’intensité
variable ont été démontrées par Schumpelick en stéréographie
tridimensionnelle.
La rétraction des treillis lors de la cicatrisation qui peut intéresser 20
à 50 % de leur surface doit être connue.
Elle implique que les
prothèses soient fixées sans tension à la périphérie et qu’elles
doivent dépasser les limites de la brèche pariétale d’environ 5 à
8 cm.
La rétraction pourrait expliquer les possibilités de douleurs
résiduelles au niveau des sutures.
Les biomatériaux synthétiques non résorbables sont de trois sortes :
polypropylène, polyester, polytétrafluoroéthylène expansé (e PTFE).
Des produits composites ont été plus récemment mis au point.
Il
existe plus de 80 biomatériaux manufacturés.
Les adhérences induites par les biomatériaux dans la cavité
péritonéale exposent à l’occlusion ou à la fistule digestive.
Les
travaux expérimentaux ont montré que plus les pores sont larges
et le biomatériau épais, plus intenses sont les adhérences. Un score
d’adhérence a été établi.
Il est élevé pour le polypropylène et le
polyester, ce qui en interdit l’usage au contact de l’intestin.
Il est
faible pour le PTFE. Des produits composites ont été conçus pour
permettre l’utilisation au contact des viscères sans risque adhérentiel
majeur.
Ils comportent une surface pariétale textile (polyester ou
polypropylène) et une surface viscérale résorbable ou enduite d’une
membrane de PTFE ou de polyuréthane non adhésiogène.
Ce sont
les seuls utilisables par voie coelioscopique.
Technique de pariétoplastie par prothèse non résorbable dans les
éventrations médianes.
Quatre sites anatomiques peuvent être
utilisés pour l’implantation des prothèses.
Ce sont, de la profondeur
à la superficie, les sites : intrapéritonéal, prépéritonéal,
rétromusculaire préfascial, pré-musculoaponévrotique.
Implantation intrapéritonéale : la prothèse est implantée à
la face profonde de la paroi après viscérolyse suffisante.
Ce site a
l’avantage de ne comporter aucune dissection pariétale, d’être
toujours utilisable quel que soit le siège de l’éventration, en
particulier en cas de récidive après plastie plus superficielle et de
bénéficier au mieux de la pression abdominale.
Pour pallier le risque adhérentiel intestinal, il faut, si le grand épiploon est disponible,
l’étaler largement au-devant des anses et le fixer à la séreuse antérieure en périphérie par des points de Vicrylt, et n’utiliser que
des biomatériaux composites ou à surface viscérale microporeuse.
Technique : la prothèse est de forme ovalaire et de taille adaptée à la
brèche pariétale en dépassant les limites de 5 à 8 cm.
Pour faciliter
l’ancrage et l’orientation, les points cardinaux et les points
intermédiaires distants d’environ 25 mm sont tracés sur la prothèse
à l’aide d’un crayon feutre stérile, reproduisant une « rose des
vents ».
La face antérieure de l’aponévrose ayant été libérée du tissu
sous-cutané jusqu’à la ligne axillaire, l’une des berges, saisie par une
forte pince, est mise en tension et soulevée.
De longues aiguilles
serties de fil non résorbable 0 ou 00 transfixient la paroi
musculoaponévrotique de dehors en dedans à proximité de la ligne
blanche externe, puis chargent un large ourlet de la prothèse et
traversent à nouveau la paroi de dedans en dehors à un centimètre
du point d’entrée.
La fixation commence par le point cardinal latéral
et progresse vers les pôles laissés libres.
Tous les points sont passés
avant serrage.
Après fixation d’un côté, la prothèse est implantée de
la même manière du côté opposé.
Le niveau latéral de fixation et le
degré de tension sont appréciés en rapprochant les deux berges sur
la ligne médiane. L’excédent prothétique est réséqué.
Le réglage final
de la tension est achevé par le passage et le serrage des points
d’ancrage polaires.
Les sutures transfixiantes peuvent être
remplacées par un agrafage automatique (Pariefix, Versatack).
Il
est toujours possible de recouvrir la prothèse en suturant soit les
bords de l’éventration à l’aide éventuellement d’un procédé de
relaxation, soit les lambeaux fibreux du sac conservés de part et
d’autre.
Le drainage aspiratif au contact des prothèses intrapéritonéales n’est pas justifié.
Dans le cas d’une éventration de petite taille, aucun agrandissement
à seule fin de réparation n’est justifié.
L’implantation prothétique est
réalisée à la manière de la cure des hernies ombilicales ou
épigastriques.
Après libération limitée au doigt de la face profonde
au pourtour de l’orifice, huit points transfixient la paroi en « U »
comme précédemment en chargeant la prothèse munie de ses
repères, à distance de ses bords.
Après passage et repérage de tous
les fils, leur traction simultanée entraîne le positionnement souspariétal
de la prothèse suivi du serrage des points à la face
superficielle de l’aponévrose.
Implantation prépéritonéale (Stoppa) : le principe est identique à
celui de la hernioplastie inguinale prépéritonéale.
Il consiste en
l’apposition à la face profonde de la paroi, au-devant du péritoine,
d’une prothèse souple débordant très largement les limites de la
brèche pariétale dans le but de renforcer le péritoine et de créer une
adhérence pariétoprothétique équivalent d’une néoparoi.
Technique : elle n’est applicable qu’aux éventrations sousombilicales,
sous-arquées où la séreuse est facilement clivable.
Les
treillis macroporeux de polypropylène ou polyester (Mersylène),
de grammage léger et de texture souple doivent être privilégiés.
Mieux vaut compléter la simple « suture par apposition » par
quelques points de fixation transfixiants périphériques ou par
agrafage ou encollage biologique.
En cas de perte de substance suspubienne,
l’ancrage aux ligaments de Cooper après décollement de
la vessie est indispensable.
Après drainage aspiratif, la couverture
superficielle de la prothèse est assurée par les moyens décrits
précédemment.
Implantation rétromusculaire préfasciale (Rives): dans
cette technique applicable aux éventrations sus-arquées, la prothèse
est implantée entre le corps musculaire des muscles droits et le
feuillet postérieur de la gaine.
Elle est suturée au niveau de la ligne
blanche externe.
La réfection pariétale est efficace, mais la dissection
pariétale expose aux épanchements sanguins ou séreux au contact
de la prothèse.
Des douleurs résiduelles par interposition
accidentelle de filets nerveux dans les points de fixation peuvent
survenir.
Technique : la gaine aponévrotique est ouverte au bistouri à
proximité de la berge de l’éventration jusqu’à identifier les fibres
musculaires.
L’incision est prolongée en haut et en bas aux ciseaux
jusqu’aux limites de l’éventration.
L’aponévrose postérieure mise en tension est facilement clivée du corps musculaire qui est récliné et
soulevé par des écarteurs jusqu’à atteindre la ligne blanche externe reconnaissable aux pédicules vasculonerveux qu’il convient de
respecter.
Après dissection identique du côté opposé, la cavité
péritonéale est fermée par suture des berges aponévrotiques et/ou
des lambeaux du sac de l’éventration à l’aide de points séparés de
fil non résorbable.
Cet affrontement est en général possible sans
tension excessive grâce à la relaxation pariétale ainsi obtenue.
Sinon,
une prothèse résorbable peut être suturée aux berges de l’orifice
évitant le contact avec les anses grêles.
La prothèse choisie pour sa
souplesse et son grammage léger, de taille et de forme adéquates est
étalée dans l’espace rétromusculaire.
Elle est fixée par des fils non
résorbables espacés d’environ 25 mm au niveau de la ligne blanche
externe en évitant les pédicules vasculonerveux.
Dans la technique originale de Rives, des points en U, après transfixion de toute la
paroi et de la prothèse à l’aiguille de Reverdin, étaient serrés sur la
peau sur des bourdonnets textiles.
Il est préférable, après avoir libéré
la face antérieure de l’aponévrose jusqu’à la ligne axillaire, de serrer
les points, largement appuyés, sur l’aponévrose elle-même.
La
gestuelle comportant traction et élévation de l’aponévrose antérieure
par l’opérateur et écartement du muscle par l’aide est identique à
celle de l’implantation intrapéritonéale.
La suture du plan
aponévrotique antérieur, à points séparés en commençant par les
extrémités est possible avec ou sans procédé de relaxation pariétale.
Un drainage aspiratif par un ou deux tubes de Redon au contact de
la prothèse est nécessaire.
Implantation prémusculoaponévrotique : le principe est de renforcer
par une prothèse une réparation pariétale par suture et autoplastie.
L’inconvénient de ce site est son caractère superficiel sans contrepression
autre que le plan cutané, cause de fragilité à l’occasion
d’une augmentation de la pression abdominale.
Toute infection
superficielle, toute nécrose cutanée expose inéluctablement la
prothèse.
Technique : après réalisation de l’autoplastie par retournement
aponévrotique de Welti-Eudel ou de Chevrel, la perte de substance
aponévrotique entre les berges externes de la gaine antérieure est
comblée par implantation d’une prothèse non résorbable.
Dans la
technique de Chevrel, après autoplastie en paletot, la
prothèse dépasse de 5 cm de chaque côté la perte de substance, fixée
par quatre surjets de fil non résorbable à sa périphérie.
L’encollage
favorise l’adhérence immédiate de la prothèse.
Le drainage aspiratif
par deux tubes de Redon, voire davantage, et la contention
abdominale par bandage pendant 4 à 6 semaines permettent de
diminuer la fréquence des séromes sous-cutanés, facteurs de risque
infectieux.
Le choix entre ces quatre sites d’implantation n’obéit à aucune règle
stricte.
La tendance actuelle est d’éviter le site superficiel et de
préférer aux dissections pariétales complexes, à l’instar de la voie coelioscopique, la facilité et l’efficacité de l’implantation
intrapéritonéale de prothèses composites.
5- Formes cliniques
:
* Selon la topographie
:
Éventrations iliaques. Après appendicectomie compliquée ou
fermeture de colostomie, de taille en général peu importante, elles
siègent au niveau de la partie charnue des muscles larges.
La règle
de n’affronter que des aponévroses ne peut être respectée.
La suture
plan par plan au prix d’une dissection laborieuse est vouée à l’échec.
La plastie prothétique est le seul garant de succès.
Le site privilégié
est l’espace prépéritonéal.
La résection du sac n’est pas justifiée.
Le
péritoine est décollé alentour aux doigts.
Une prothèse
macroporeuse de forme arrondie débordant d’environ 5 cm les bords
de la brèche est disposée dans l’espace et fixée à sa périphérie par 6
à 8 points transfixiants en U, noués à la face superficielle de la paroi
musculoaponévrotique.
Les muscles larges sont suturés au fil
résorbable au-devant de la prothèse avec un double drainage
aspiratif au contact de la prothèse et sous-cutané.
Éventrations sous-costales. Elles sont rares et surviennent, à droite,
après cholécystectomie compliquée de suppuration pariétale.
L’importance et la gravité du defect pariétal sont fonction de la
longueur et du siège de l’incision.
Il convient à ce propos de rappeler
que la section exclusive du muscle droit par une incision
transversale à distance du gril costal est suffisante pour toute
chirurgie biliaire simple.
L’élément lésionnel commun est la perte
anatomique et fonctionnelle du muscle droit qu’il convient de
reconstituer pour en préserver la physiologie.
Dans le cas où
l’éventration est limitée au seul muscle droit, seule importe la
reconstruction de la gaine aponévrotique, toujours possible si la
distance du gril costal a été respectée.
Le feuillet postérieur ayant
été suturé au fil non résorbable, une prothèse macroporeuse, de taille
et forme requises, est implantée en rétromusculaire préfascial,
débordant d’au moins 5 cm les berges aponévrotiques.
Elle est fixée
par des points transfixiants en U à sa périphérie et, au centre,
quelques points solidarisant la suture postérieure et la prothèse.
Le
feuillet antérieur est ensuite reconstitué et les moignons musculaires
restés solidaires sont ainsi rapprochés.
Dans le cas d’une incision
trop proche du gril costal avec perte de substance réelle, une
prothèse superficielle avec ancrage aux reliquats fibreux costaux
demeure la seule issue, éventuellement recouverte par une
autoplastie de retournement aux dépens du feuillet antérieur intact
de la gaine controlatérale.
Dans les cas où la solution de continuité
est limitée aux extrémités d’une longue incision sous-costale (ligne
blanche et/ou muscles larges), une pièce prothétique macroporeuse
doit être implantée dans l’espace prépéritonéal et fixée à la
périphérie par quelques points transfixiants.
Une désunion totale ne
peut être traitée que par l’implantation intrapéritonéale d’une large
prothèse fixée, si besoin, aux cartilages costaux.
Le grand épiploon,
à ce niveau, sépare efficacement la prothèse des viscères.
* Selon la présentation clinique
:
En urgence. Devant un syndrome occlusif aigu chez un patient
porteur d’une éventration médiane, l’abord laparoscopique n’est
possible qu’en cas de brèche pariétale étroite manifestement
responsable d’une incarcération intestinale avec distension
abdominale modérée.
En revanche, devant une éventration
volumineuse avec incertitude quant au mécanisme de l’occlusion, la
laparotomie médiane itérative s’impose avec cure synchrone de
l’éventration.
L’obstruction du grêle implique une entérolyse
souvent complexe et à haut risque de traumatisme intestinal.
Le
volvulus par bride avec ischémie irréversible nécessite une résectionanastomose
du grêle.
Le traitement de l’éventration dans des
conditions de chirurgie propre-contaminée ne doit pas déroger au
principe de la pariétoplastie prothétique non résorbable, seul garant
de la solidité pariétale immédiate supprimant le risque
d’éviscération et de l’absence de récidive à distance.
En contexte
septique potentiel, il faut limiter la dissection pariétale, renoncer aux autoplasties et préférer, après protection par le grand épiploon et
grand renfort de Bétadinet, faire une implantation intrapéritonéale
d’un biomatériau composite.
Ce site met le mieux la prothèse à l’abri
de la survenue d’un sérome et d’une inoculation à partir d’un abcès
superficiel.
De nombreuses expériences, en chirurgie pariétale ou
viscérale associant prothèse non résorbable et résection
intestinale, en ont démontré l’innocuité.
En revanche, toute
péritonite interdit l’usage de prothèse non résorbable.
L’étanchéité
temporaire de la paroi ne peut être assurée que par une prothèse
résorbable en s’abstenant de toute dissection pariétale.
En dehors de l’urgence. Devant une pathologie viscérale
abdominale chez un patient porteur d’une éventration médiane, il
faut choisir, lorsqu’elle convient, une voie d’abord élective, souscostale
droite ou gauche, incision de Pfannenstiel, de préférence à la
cure synchrone de l’éventration, facteur potentiel de majoration du
risque opératoire.
6- Traitement des complications
:
* Hématome et sérome
:
Ils favorisent la survenue d’une infection.
L’hématome, conséquence
d’une dissection pariétale extensive et d’une hémostase incomplète
n’est pas toujours prévenu par un drainage efficace.
Les modalités
thérapeutiques, évacuation précoce des caillots par incision limitée
ou drainage aspiratif percutané tardif, n’ont rien de spécifique.
Le sérome est la complication la plus fréquente.
Recherché par
échographie systématique, son incidence peut atteindre 100 %, le
plus souvent de taille minime sans traduction clinique.
Il peut
compliquer tout procédé de réfection pariétale. Le plus souvent, il
résulte de la réaction inflammatoire au corps étranger prothétique et
se développe dans l’espace décollable au contact de celui-ci.
Plus
rapide est l’incorporation de la prothèse (biomatériaux de type I) et
plus profonde est l’implantation sous une couche musculoaponévrotique soumise à la pression abdominale, plus rares
sont les séromes.
La résorption spontanée est la règle.
La ponction
évacuatrice risque de favoriser l’infection.
Le traitement par
drainage aspiratif percutané n’est justifié que pour une collection
importante et persistante après plusieurs semaines afin d’éviter
l’enkystement.
* Infection et prothèse
:
L’incidence, dans une revue de la littérature, varie de 0 à 29 %.
La
survenue d’une infection pariétale précoce ne permet pas de
conclure à l’inoculation de la prothèse sauf si celle-ci est en situation
sous-cutanée.
Après traitement local et antibiothérapie adaptée, le
passage à la chronicité témoigne de l’infection du biomatériau.
La
tolérance de celui-ci dépend de sa structure.
L’incorporation rapide
des prothèses macroporeuses (type I) permet presque toujours un
traitement conservateur.
La granulation progressive au contact de la
prothèse exposée évolue vers la guérison.
La persistance de sinus
infectés est souvent le fait de fils de suture non résorbables.
En
revanche, une prothèse microporeuse (type II) nécessite le plus
souvent son exérèse totale.
En pratique, devant un trajet fistuleux
persistant, l’exploration chirurgicale, après injection de bleu de
méthylène, permet l’exérèse totale ou partielle du corps étranger
sans qu’il soit justifié, à ce stade tardif, de le remplacer par une
prothèse résorbable.
Le drainage aspiratif après fermeture cutanée
étanche est indispensable.
* Éventration récidivée
:
L’incidence de nouvelle récidive augmente à chaque nouvelle
intervention avec souvent majoration de la taille, ce qui justifie de
ne jamais réitérer la même technique, de toujours opter pour une pariétoplastie prothétique après échec d’une autoplastie et de choisir
un site vierge après échec d’une précédente implantation.
D - TRAITEMENT PAR LAPAROSCOPIE
:
1- Généralités
:
L’essor de la coeliochirurgie dans le traitement des éventrations de
la paroi abdominale a été freiné par certaines difficultés techniques,
en particulier l’adhésiolyse et certains inconvénients essentiels.
Le
principe est la pariétoplastie par prothèse non résorbable non
adhésiogène excluant toute reconstitution anatomique.
La technique
habituelle est l’obturation du defect par une prothèse
intrapéritonéale débordant largement les limites sans résection du
sac péritonéal.
Les avantages sont ceux habituels de la coeliochirurgie : limitation des incisions, de la douleur, de la durée
d’hospitalisation et de l’invalidité, diminution du coût auquel
s’ajoute l’absence de dissection pariétale garante d’une morbidité
moindre que par laparotomie.
Quant à l’incidence des récidives, elle
semble, dans les séries comparatives égale ou inférieure à celle
de la pariétoplastie par laparotomie.
Les inconvénients tiennent à
une durée opératoire plus importante et, sur le plan
physiopathologique, à la persistance du sac, de la déformation
cutanée et à l’absence de reconstitution de la physiologie musculaire
pariétale.
La persistance du sac est contraire à tout principe de cure de hernie.
Elle explique la survenue constante de sérome dont la prévention
justifie la compression postopératoire par bandage.
Pour pallier cet
inconvénient, certains préconisent la destruction du péritoine par
coagulation ou laser.
D’autres préfèrent l’interposition prothétique prépéritonéale au prix d’une intervention beaucoup plus longue et
difficile.
La persistance de la déformation cutanée et de l’incoordination
musculaire est source potentielle de non-satisfaction du patient.
En
fait, la maturation de la cicatrisation qui survient en 90 ou 120 jours
entraîne un rétrécissement de la surface de la prothèse pouvant
atteindre 50 %.
Ainsi, le defect original se comble, ce qui aboutit à
un rapprochement des berges musculaires.
Le déficit résiduel serait
sans conséquence.
Au plan fonctionnel, la cinétique de la paroi
prothétique se rapprocherait davantage de celle de la paroi normale
avec le PTFE qu’avec le polypropylène.
Le mode de fixation de la
prothèse pourrait aussi intervenir.
La fixation automatique
endoscopique n’intéressant pas la totalité de la musculature large
serait préjudiciable à la cinétique normale à l’inverse de la fixation
par suture transaponévrotique.
Enfin, la fibrose cicatricielle
succédant au sérome pourrait effacer en partie la redondance
cutanée.
2- Indications - Contre-indications
:
En dehors des contre-indications de toute procédure coelioscopique
(cardiomyopathie, insuffisance respiratoire chronique), les
éventrations géantes, les contenus irréductibles, les antécédents
chirurgicaux multiples, les récidives après prothèse intrapéritonéale,
rendent impossible la création d’un espace de travail et aléatoire
l’adhésiolyse.
L’obésité morbide n’est pas une contre-indication
absolue sous réserve des difficultés prévisibles de l’adhésiolyse et
de disposer de matériel de longueur suffisante.
La meilleure
indication est constituée par les éventrations de petite taille, à
contenu réductible, de siège médian ou latéral, sans préjudice
esthétique tels qu’en réalisent les orifices de trocarts de 10 ou 12 mm,
caractérisées par un collet étroit, un sac volumineux à contenu
intestinal exposé au risque d’étranglement.
3- Technique
:
* Instrumentation
:
Elle comporte :
– une optique à vision axiale ou de préférence latérale à 30° ;
– 1 trocart de 10 ou 12 mm ;
– 2 trocarts de 5 mm ou davantage en fonction des besoins ;
– 2 pinces à préhension atraumatiques pour l’adhésiolyse ;
– des ciseaux orientables courbes avec coagulation monopolaire ou
une pince à coagulation bipolaire ou tout autre procédé de dissection
hémostatique (Ultracision) ;
– le matériel nécessaire à la fixation de la prothèse : sutures non
résorbables 0 ou 00 et/ou matériel de fixation automatique endoscopique (agrafes hélicoïdales [Protack, Tacker, Endo
universal], agrafes résorbables [Pariefix], clips métalliques [Endo
anchor, Endohernia]) ;
– un « passe-fil » pour la fixation transaponévrotique (Endocloset,
Gore Suture Passert ou, à défaut, une aiguille de Jalaguier droite).
* Dispositif opératoire
:
La position de l’opérateur, du patient (en décubitus dorsal strict ou
les membres inférieurs écartés), l’emplacement des trocarts sont
variables en fonction du siège et de la taille de l’éventration, de la
corpulence de l’opéré et des habitudes du chirurgien.
D’une façon
générale, il faut respecter les règles habituelles : trocarts en zone
saine, à distance suffisante (les flancs pour une éventration médiane)
avec triangulation des deux trocarts opérateurs et optique
intermédiaire, chirurgien du côté opposé au siège prédominant de
l’éventration.
* Création du pneumopéritoine
:
Le pneumopéritoine peut être créé par l’aiguille de Veress introduite
dans l’hypocondre gauche mais il est préférable d’utiliser une
technique ouverte ou un trocart type Visiport.
* Adhésiolyse
:
Elle est effectuée en associant préhension et traction de la main
gauche et section-coagulation de la main droite.
La coagulation monopolaire doit être évitée au contact de l’intestin.
Il est
fondamental de s’assurer de l’intégrité de l’intestin.
Toute plaie
méconnue est facteur de morbidité, voire de mortalité. Une plaie
limitée et franche peut être suturée par laparoscopie.
Sinon, une
courte laparotomie permet suture ou résection dans les meilleures
conditions.
Une plaie du grêle avec souillure limitée ne contreindique
pas la poursuite de l’intervention.
L’adhésiolyse doit être
suffisante pour délimiter la brèche pariétale en tenant compte du
débord nécessaire à l’implantation de la prothèse et pour repérer
des orifices adjacents.
* Préparation de la prothèse
:
Le biomatériau doit convenir à l’usage intrapéritonéal : soit prothèse
composite de polyester ou polypropylène avec couche viscérale
résorbable (Parietex Composite, Sepramesh) ou microporeuse non
adhésiogène (Intramesh, Bard Composix, Wallmesh), soit
prothèse de PTFE expansé avec une face viscérale lisse microporeuse
et une face pariétale irrégulière permettant une incorporation rapide
(Dualmesh Plus).
Sa taille doit dépasser de 3 à 5 cm les limites de
la brèche.
Pour la définir de façon précise, en particulier chez les
patients obèses, des aiguilles longues sont introduites à travers la
peau aux berges présumées de l’éventration et leur position est
contrôlée par voie endoscopique.
Les quatre points cardinaux sont
ainsi repérés et le contour de la brèche est tracé sur la peau au
crayon feutre.
L’abdomen ayant été exsufflé, la taille réelle de la
prothèse nécessaire est mesurée en ajoutant 3 à 5 cm de tous côtés.
Sur la prothèse découpée, des repères conventionnels sont dessinés
aux points cardinaux de sa face pariétale et reproduits à l’identique
sur la peau.
À chaque point cardinal, un fil de suture non résorbable est passé et lié en laissant les deux chefs suffisamment longs.
Pour
une large prothèse, mieux vaut mettre en place six sutures.
* Introduction de la prothèse
:
La prothèse enroulée, face viscérale et fils de suture à l’intérieur, est
introduite par le trocart de 10 ou 12 mm.
Pour un volume
prothétique plus important, l’introduction peut se faire par l’orifice
du trocart après l’ablation de celui-ci, en enveloppant la prothèse
dans un sac plastique, ce qui évite tout contact avec la peau et tout
traumatisme de la surface viscérale.
Une pince à préhension
provenant du trocart controlatéral facilite cette manoeuvre.
Dans
l’abdomen, la prothèse est déroulée et sa face viscérale identifiée
grâce à sa texture ou à sa couleur ou aux repères préalablement
dessinés.
* Fixation de la prothèse
:
Deux techniques sont utilisées.
Sutures transaponévrotiques et agrafage automatique.
À chaque repère cutané, une petite incision est faite et les fils de
suture sont extériorisés à l’aide du « passe-fil ».
Les deux chefs de
chaque suture émergent par le même orifice cutané mais par une
ponction aponévrotique distincte à 1 cm d’intervalle.
Toutes les
sutures sont passées puis liées dans le tissu sous-cutané.
La fixation
des berges est complétée par agrafage tous les 15 mm en exerçant
une contre-pression abdominale.
Des sutures transaponévrotiques
complémentaires à intervalle de 5 cm sont recommandées.
La
tension de la prothèse doit être suffisante pour éviter toute protrusion dans le defect pariétal après exsufflation de l’abdomen.
Agrafage exclusif. Préconisée par Morales-Conde, la fixation est
assurée par une « double couronne » d’agrafes hélicoïdales.
Une
première couronne fixe le bord externe de la prothèse en
commençant par les points cardinaux repérés, avec des intervalles
de 1 cm, en débordant de 3 cm les limites de la brèche.
Une
deuxième couronne solidarise la prothèse aux berges de
l’éventration.
En faveur de ce type de fixation plaident la rapidité
d’exécution, l’absence d’incision cutanée, un moindre risque
d’infection et de douleur résiduelle.
En revanche, il a été démontré
que la résistance à la traction des sutures transaponévrotiques était
deux fois et demie supérieure à celle des agrafes hélicoïdales.
* Fermeture des orifices
:
La prévention des éventrations justifie de fermer tout orifice de
trocart égal ou supérieur à 10 mm, par voie externe ou vidéoassistée.
* Soins postopératoires
:
Une compression par bandage pendant 1 semaine est appliquée à
toute éventration importante.
Elle n’évite pas la survenue constante
d’un sérome de résorption habituellement spontanée.
Le drainage
aspiratif préventif du sac péritonéal n’est pas recommandé.
4- En urgence
:
Devant une occlusion aiguë du grêle chez un patient porteur d’une
petite éventration présumée responsable sans météorisme important,
l’abord coelioscopique est justifié.
La réduction de l’anse herniée
dans l’orifice pariétal peut nécessiter un agrandissement de celui-ci
au crochet coagulateur. Une ischémie irréversible impose la résection
par courte laparotomie incluant l’éventration.
La pariétoplastie
prothétique non résorbable par coelioscopie ou laparotomie reste
indiquée en l’absence d’inoculation péritonéale massive.