Les plaquettes sanguines sont issues des mégacaryocytes
médullaires.
Chaque mégacaryocyte mature donne naissance
de 1 000 à 8 000 plaquettes.
Les plaquettes sont
des fragments cytoplasmiques du mégacaryocyte mûr, et
sont donc des cellules anucléées, incapables de synthèse.
La durée de vie des plaquettes est d’environ 9 jours.
La numération plaquettaire normale chez l’homme est
de 150 à 400.109/L et une thrombopénie est définie par
un chiffre de plaquettes inférieur à 150.109/L.
Les plaquettes sanguines jouent un rôle central dans les
mécanismes de l’hémostase primaire.
L’hémostase primaire
représente l’ensemble des interactions complexes
entre les plaquettes, la paroi vasculaire, et les protéines
adhésives qui aboutissent à l’obturation de la brèche
vasculaire par un thrombus blanc plaquettaire.
Les plaquettes
sanguines participent également à la coagulation,
qui va permettre la formation de fibrine venant
consolider les agrégats plaquettaires.
Les plaquettes sanguines participent à l’arrêt du saignement,
et des manifestations cliniques hémorragiques
peuvent traduire une thrombopénie sévère.
L’utilisation
d’automates de numération qui rend systématique la
numération plaquettaire, entraîne la découverte de
thrombopénies infracliniques.
Examen clinique
:
Le syndrome hémorragique secondaire à une anomalie
de l’hémostase primaire [thrombopénie et (ou) thrombopathie]
est cutanéo-muqueux.
Il est caractérisé par le
purpura d’apparition spontanée, ne s’effaçant pas à la pression avec des pétéchies (ponctuations pourpres), des
ecchymoses (placards bleu violacé), des vibices (stries
ecchymotiques allongées), des gingivorragies, des épistaxis,
des bulles ecchymotiques buccales.
Les ménorragies
ou les saignements digestifs sont une des caractéristiques
du syndrome hémorragique.
La gravité de ces
manifestations hémorragiques est dominée par l’hémorragie cérébro-méningée, urgence médicale avec risque
vital.
Elle est précédée par des hémorragies au fond
d’oeil, d’où l’examen du fond d’oeil en cas de thrombopénie
sévère.
Il est donc capital d’apprécier la gravité du
syndrome hémorragique.
Un purpura extensif, des
bulles ecchymotiques buccales et des hémorragies rétiniennes
sont des facteurs de gravité précédant l’hémorragie
intracrânienne.
Les manifestations hémorragiques peuvent exister dès
que la numération plaquettaire est inférieure à 100.109/L si
elles sont favorisées par une cause sous-jacente, alors
qu’elles sont le seul fait de la thrombopénie pour des plaquettes
inférieures à 50.109/L et surtout 20.109/L.
Le terrain
(âge, facteurs de risque vasculaire, thrombopénie
centrale) peut aggraver le risque hémorragique.
L’examen clinique est capital pour l’orientation étiologique
d’une thrombopénie.
L’interrogatoire fait préciser
les antécédents personnels et familiaux de syndrome
hémorragique, de notion de thrombopénie.
Cet interrogatoire
devra être « policier » quant à la recherche de
prises médicamenteuses précédant de quelques jours
l’apparition de la thrombopénie.
La recherche d’une
hépatomégalie, de signes d’hypertension portale, d’une
splénomégalie, d’un syndrome tumoral, d’une infection
virale récente, d’infections à répétition, les circonstances
de survenue (thrombopénie brutale isolée), la
notion d’affection connue, les traitements en cours, et le
contexte (état fébrile, état général) sont des éléments
d’orientation étiologique.
Diagnostic différentiel
:
Une thrombopénie devra toujours être vérifiée par un
prélèvement au doigt ou sur citrate de sodium, car il
existe de fausses thrombopénies par agglutination des
plaquettes in vitro en présence de l’anticoagulant EDTA
(éthylène-diamine-tétra-acétique) sur lequel le sang est
prélevé.
L’existence d’agrégats plaquettaires in vitro
peut être vérifiée sur les frottis sanguins colorés.
Il existe
quelques cas d’agglutination plaquettaire EDTA indépendante,
liée à des anticorps dirigés contre des épitopes
du complexe GP IIb-IIIa, qui sont exposés après dissociation du complexe GP IIb-IIIa par l’effet chélateur du
calcium de l’EDTA.
Ces fausses thrombopénies sont des
artéfacts in vitro.
Orientation du diagnostic
étiologique :
Si l’examen clinique est capital, l’hémogramme apporte
des renseignements importants pour ce diagnostic, montrant
le caractère isolé ou non de la thrombopénie, l’aspect
des plaquettes sur lame (plaquettes de grande ou de
petite taille dans certaines thrombopénies constitutionnelles,
aspect de plaquettes grises caractéristique de la
maladie des plaquettes grises).
La thrombopénie peut être
associée à des anomalies des autres lignées (processus
leucémiques) ou entrer dans le cadre d’une pancytopénie
globale (aplasie).
La thrombopénie peut être associée à
une anémie hypochrome microcytaire en cas de syndrome
hémorragique important, ou à une anémie macrocytaire
(carence en folates, vitamine B12, myélodysplasie).
Des tests simples d’hémostase rechercheront une insuffisance
hépatocellulaire ou des signes de consommation
[temps de céphaline activée (TCA), temps de Quick
(TQ), dosage du fibrinogène].
Un bilan hépatique peut
aider au diagnostic d’atteinte hépatique responsable de
thrombopénie devant des signes cliniques évocateurs.
En fonction de l’anamnèse clinique, des données de la
numération et de l’hémostase, le myélogramme sera ou
non réalisé.
Le myélogramme permet de distinguer
les thrombopénies centrales par trouble de la
production plaquettaire des thrombopénies périphériques
par hyperdestruction plaquettaire.
Diagnostic étiologique
:
A - Thrombopénies périphériques :
Elles sont secondaires à une hyperdestruction plaquettaire
ou à une anomalie de répartition.
Le myélogramme est
normal avec une richesse en mégacaryocytes normale,
voire augmentée.
Il n’est pas systématiquement effectué.
La durée de vie des plaquettes est raccourcie, mais n’est
étudiée qu’en cas de difficulté diagnostique.
1- Hyperdestruction plaquettaire
:
Elle est d’origine immunologique ou par consommation,
et dans ce cas la thrombopénie est associée à
d’autres anomalies de l’hémostase.
• Destruction immunologique des plaquettes
– Le purpura thrombopénique auto-immun
Il est dû à la production d’auto-anticorps antiplaquettaires
qui se fixent par leurs fragments F(ab) sur les plaquettes.
Les plaquettes sont ensuite détruites par le système
des macrophages qui possèdent un récepteur pour
le fragment Fc des immunoglobulines.
La rate représente
le lieu privilégié de la destruction plaquettaire par les
macrophages, et elle est également le siège essentiel de
la production des anticorps antiplaquettaires.
Les anticorps
du purpura thrombopénique auto-immun sont spécifiques
des glycoprotéines de la membrane plaquettaire,
GP IIb-IIIa ou GP Ib-IX.
Le purpura thrombopénique auto-immun est une affection
fréquente, en règle du sujet jeune mais touchant toutes
les tranches d’âge et surtout l’enfant de moins de 10 ans.
Il faut différencier le purpura thrombopénique autoimmun de l’enfant qui survient souvent après une infection
virale (dont la thrombopénie, qui peut être profonde,
va se corriger spontanément dans plus de 80 % des
cas), du purpura thrombopénique auto-immun de l’adulte
qui passe à la chronicité dans 80 % des cas.
Le syndrome hémorragique n’est pas toujours corrélé à
la sévérité de la thrombopénie, mais des chiffres de plaquettes
inférieurs à 20.109/L impliquent un traitement
d’urgence.
La gravité du syndrome hémorragique est dominée par
l’hémorragie cérébro-méningée pouvant être responsable
de décès dans 3 % des cas.
La thrombopénie est brutale, isolée. Le myélogramme
lorsqu’il est effectué montre une moelle normale, riche
en mégacaryocytes.
L’hémostase est normale (temps de céphaline activée, temps de Quick) sans signe de
consommation.
La recherche d’anticorps antiplaquettes de type IgG ou
IgM est en règle effectuée par méthode ELISA.
Elle est
positive dans 85 % des cas.
La spécificité de ces auto-anticorps est effectuée par la
méthode MAIPA (Monoclonal antibody specific immobilisation
of platelet antigens), et ils sont en règle dirigés
contre les glycoprotéines de la membrane plaquettaire
(GP IIb-IIIa, Ib-IX).
Si la cinétique était réalisée, la durée de vie plaquettaire
serait inférieure à 12-24 heures.
Le traitement de la phase aiguë pour des plaquettes inférieures
ou égales à 20.109/L repose sur la corticothérapie.
Une dose de charge sous forme de méthylprednisolone
en injection intraveineuse (15 mg/kg/j x 3 j) peut
être réalisée, suivie de prednisone per os 1 mg/kg/j pendant
15 jours avec décroissance progressive.
Le traitement par immunoglobulines en intraveineux
(0,4 g/kg/j x 3 j) est justifié en cas de syndrome hémorragique
sévère avec relais par prednisone per os.
Les transfusions plaquettaires sont contre-indiquées,
sauf en cas de risque vital immédiat.
La splénectomie
est réservée aux formes de purpura thrombopénique
auto-immun chronique après échec des traitements classiques.
Elle n’est réalisée qu’après 6 mois d’évolution,
après vaccination contre le pneumocoque et l’hæmophilus.
La splénectomie entraîne une correction du purpura thrombopénique auto-immun dans 80 % des cas.
Dans
les formes réfractaires de purpura thrombopénique autoimmun
après splénectomie, la dapsone (Disulone), le
danazol (Danatrol), les alcaloïdes de la pervenche
(Vincristine), le cyclophosphamide (Endoxan) ont été
proposés.
Devant une rechute de purpura thrombopénique autoimmun,
la recherche de rate accessoire doit être effectuée.
– Formes particulières de purpura thrombopénique
auto-immun :
. chez une mère atteinte de purpura thrombopénique
auto-immun, qu’elle soit thrombopénique ou non, le
nouveau-né peut présenter une thrombopénie néonatale
liée au passage des auto-anticorps maternels ;
. le purpura thrombopénique auto-immun peut s’observer
au cours du syndrome des antiphospholipides primaires
et dans le lupus.
La thrombopénie est alors associée
à d’autres manifestations auto-immunes cliniques
et biologiques.
Le syndrome des antiphospholipides primaires
est caractérisé par des thromboses veineuses et
(ou) artérielles, des avortements spontanés, la présence
d’anticoagulant circulant et (ou) d’anticardiolipides.
La
thrombopénie auto-immune, en règle modérée, peut
faire partie de ce tableau.
Le syndrome des antiphospholipides
peut faire partie d’un lupus.
L’existence d’anticorps
anti-DNA, la diminution du complément sont en
faveur de ce diagnostic ;
. le purpura thrombopénique auto-immun peut être
associé à des hémopathies lymphoïdes (lymphome
hodgkinien ou non hodgkinien), à des pathologies virales
(cytomégalovirus, hépatite B et C, virus d’immunodéficience
humaine).
La thrombopénie auto-immune
peut être la première manifestation de la sérologie du
virus d’immunodéficience humaine.
– Thrombopénies médicamenteuses
Leur mécanisme est complexe.
La fixation de complexes
immuns
– médicament et (ou) métabolite-anticorps
anti-médicament – ou la fixation du médicament
sur les plaquettes, pourrait modifier les structures membranaires
et réaliser des néo-antigènes responsables de
la synthèse d’anticorps antiplaquettes.
La thrombopénie immuno-allergique secondaire à l’absorption
d’un médicament s’observe après plusieurs jours
de traitement (6 à 15 j).
Elle est isolée, sans anomalie de
l’hémostase, l’accident est brutal, sans relation avec la
dose administrée, et implique l’arrêt du médicament.
La thrombopénie est réversible en une dizaine de jours
après l’arrêt du médicament.
De nombreux médicaments peuvent être responsables de
thrombopénies médicamenteuses, et ceux qui sont le plus
souvent en cause sont : quinine, quinidine, sulfamides,
digoxine, anti-inflammatoires non stéroïdiens, hydantoïne,
sels d’or ; il en est de même pour l’héroïne et la cocaïne.
La recherche d’anticorps antiplaquettes en présence du
médicament incriminé peut être utile au diagnostic.
Parmi ces médicaments, il faut noter l’héparine qui
entraîne une thrombopénie sévère, s’accompagnant de
complications thrombotiques artérielles et (ou) veineuses,
ce qui est unique pour les thrombopénies immuno-
allergiques médicamenteuses.
Le diagnostic biologique, parfois difficile, repose sur les
tests d’agrégation plaquettaire en présence du sérum du
patient et de l’héparine administrée.
Il existe de nombreux
faux négatifs. Le mécanisme est lié à l’interaction
d’un anticorps (IgG) reconnaissant le complexe héparine-facteur plaquettaire IV et entraînant l’activation plaquettaire
par sa liaison au récepteur Fc g II plaquettaire.
Les thrombopénies immuno-allergiques à l’héparine
impliquent la nécessité de surveiller la numération plaquettaire
2 fois par semaine pendant un traitement héparinique
sur 2 mois et impliquent l’arrêt de l’héparine si
elles surviennent.
La cinétique d’apparition de la thrombopénie par rapport
à la prise médicamenteuse est importante pour le diagnostic
de thrombopénie médicamenteuse entre le 6e et
le 15e jour, sauf en cas de prise antérieure.
L’interrogatoire
doit être minutieux.
Le traitement repose sur l’arrêt du
médicament.
Les transfusions de plaquettes sont délétères
et aggravent la situation.
En cas de thrombopénie à
l’héparine, avec complications thrombotiques ou nécessité
de poursuivre un traitement antithrombotique, les
traitements par hirudines recombinantes (Refludan) ou
danaparoïde sodique (Orgaran) ont été proposés.
– Thrombopénies post-transfusionnelles
Elles sont rares, isolées, sévères et surviennent 7 à 10 j
après transfusion d’érythrocytes chez la femme.
Elles sont
liées à un allo-anticorps dirigé contre un antigène plaquettaire
avec une sensibilisation pendant des grossesses ou
des transfusions antérieures. L’anticorps est dirigé contre
l’antigène HPA-Ia (PLA1) ; HPA-Ib(PLA2), HPA-3
(Bak), HPA-4 (Pen). Les allo-antigènes sont localisés sur
GPIIIa ou GPIIb.
La rareté des thrombopénies est liée
à la faible fréquence de la population HPA-Ia négative
(2 %) et à une susceptibilité individuelle (sujet HLA-DR3).
Le contexte clinique est évocateur : infections, contexte
chirurgical, affection maligne, complications obstétricales,
traumatisme étendu, brûlures, hémolyse intravasculaire.
Le syndrome hémorragique peut être important, et il est particulier avec des hémorragies en nappe
et des ecchymoses étendues.
La thrombopénie est de sévérité variable, et s’associe à
une consommation des autres facteurs de la coagulation :
le facteur V, les facteurs VII, X, II et le fibrinogène.
La
présence de complexes solubles (monomères de fibrine)
et de D-dimères (produits de dégradation de la fibrine)
confirme la coagulation intravasculaire disséminée.
Le mécanisme de cette coagulation est lié à une activation
de celle-ci générée par une surexpression de facteur
tissulaire.
La génération de facteur tissulaire en présence
de facteur VII entraîne l’activation de la coagulation et
la génération de thrombine. La thrombine ainsi formée
en excès, active la coagulation par un phénomène de
rétrocontrôle positif.
La formation de microthrombus
dans la circulation entraîne des défaillances viscérales,
et au sein de ces microthrombus, il existe une consommation
des plaquettes et des facteurs de coagulation.
Le traitement repose sur le traitement de la cause et une héparinothérapie (héparine de bas poids moléculaire).
En cas de thrombopénie sévère inférieure à 20.109/L, les
transfusions de plaquettes peuvent être nécessaires si le
syndrome hémorragique est menaçant.
– Purpura thrombotique thrombopénique (syndrome de
Moschcowitz) et syndrome hémolytique et urémique de
l’enfant
Cette microangiopathie thrombotique associe sur le plan
clinique des signes neurologiques (céphalée, parésie,
aphasie, dysarthrie), de la fièvre et une atteinte rénale
(hypertension, oedème des membres inférieurs).
La thrombopénie est secondaire à une consommation.
Elle est associée à une anémie hémolytique mécanique
avec schizocytes par fragmentation des hématies au
contact des microthrombus dans la microcirculation.
L’ionogramme sanguin contrôle la fonction rénale.
– Syndrome de Kasabach-Merritt
Certains angiomes extensifs sont associés à une thrombopénie
par consommation de plaquettes au niveau de
l’angiome.
La thrombopénie est isolée et (ou) associée à
la présence de complexes solubles et à l’augmentation
de D-dimères.
– Circuits extracorporels
Tout circuit extracorporel peut être responsable d’une
thrombopénie par consommation plaquettaire au niveau
du circuit prothétique étranger.
La thrombopénie est
associée à une thrombopathie secondaire à l’activation
des plaquettes sur le matériel étranger.
2- Anomalies de répartition
:
Des thrombopénies par dilution sont observées en cas de
transfusions érythrocytaires massives.
Il en est de même
pour la grossesse où une thrombopénie modérée de dilution
est observée lors du dernier trimestre.
Toute splénomégalie quelle qu’en soit la cause peut être
responsable d’une augmentation de la séquestration de
plaquettes.
Dans une rate normale, 30 % de la masse
plaquettaire est séquestrée, et cette séquestration peut
atteindre 50 à 90 % de la masse plaquettaire globale en
cas de splénomégalie.
3- Cas particulier :
• Syndrome pseudo-Willebrand plaquettaire : très rare,
à transmission autosomale dominante, ce syndrome est
caractérisé par un allongement du temps de saignement,
une thrombopénie modérée avec de grandes plaquettes
associée à une diminution du facteur de von Willebrand.
Il existe une anomalie de la GP Ib, responsable d’une
fixation excessive de facteur von Willebrand qui entraîne
une agglutination anormale des plaquettes et une
consommation du facteur von Willebrand sur la membrane
plaquettaire.
La thrombopénie est isolée ou associée
à une anémie sidéropénique liée au saignement.
Le
dosage plasmatique du facteur Willebrand est diminué.
B - Thrombopénies centrales :
1- Constitutionnelles
:
Exceptionnelles, elles ne touchent que la lignée mégacaryocytaire
ou révèlent une aplasie médullaire globale
comme la maladie de Fanconi.
Certaines sont associées à une thrombopathie.
• Amégacaryocytose congénitale avec aplasie radiale :
la thrombopénie est sévère associée à de multiples malformations
du squelette, du coeur, des reins.
Le myélogramme
ne retrouve pas de mégacaryocytes.
Les autres
lignées sont normales.
• Thrombopénies congénitales à transmission autosomale
dominante : la thrombopénie est de sévérité
variable avec plaquettes de grande taille.
La durée de vie
des plaquettes est normale, le myélogramme montre des
mégacaryocytes en nombre normal mais il existe une
anomalie de la libération des plaquettes dans la moelle.
• Aplasie médullaire congénitale (maladie de Fanconi) :
maladie à transmission autosomale récessive, elle associe
un syndrome malformatif, un retard psychomoteur,
et une aplasie médullaire d’installation progressive en 4
à 10 ans.
La thrombopénie est l’élément initial constant,
isolée ou associée à une anémie non régénérative et à
une neutropénie.
L’évolution est caractérisée par l’évolution
vers l’aplasie médullaire avec ses complications
et une incidence élevée de leucémie.
Le caryotype
retrouve des anomalies à type de cassure et de remaniements
chromosomiques reflétant une fragilité chromosomique.
• Thrombopénies avec thrombopathies
– Maladie de Jean-Bernard et Soulier ou dystrophie
thrombocytaire hémorragipare
Cette affection à transmission autosomale récessive
associe un allongement majeur du temps de saignement
(TS), une thrombopénie avec plaquettes de grande taille,
une anomalie de l’adhérence des plaquettes au facteur
de von Willebrand sous-endothélial par défaut du complexe
glycoprotéique Ib-IX plaquettaire.
L’étude de
l’agrégation plaquettaire met en évidence une absence
d’agglutination en présence de ristocétine alors que les
autres inducteurs (adénosine diphosphate, collagène)
induisent une agrégation normale.
– Maladie des plaquettes grises
Elle associe un allongement du temps de saignement,
une thrombopénie modérée avec plaquettes de grande
taille et grises après coloration des plaquettes sur lame.
Elle est caractérisée par une absence de granules alpha intraplaquettaires.
Elle est à transmission autosomale
dominante.
La myélofibrose est constante dans cette
thrombopathie par sécrétion du PDGF (platelet-derived
growth factor), par absence de stockage dans les granules
alpha-plaquettaires.
– Maladie de May-Hegglin
Transmise sur le mode autosomal dominant, elle associe
une thrombopénie avec plaquettes géantes et la présence
de corps de Döhle dans les polynucléaires.
Le syndrome
hémorragique reste modéré.
La thrombopénie est isolée.
– Syndrome de Wiskott-Aldrich
Àtransmission liée au sexe, la thrombopénie est sévère avec
microcytose plaquettaire et des anomalies des lymphocytes
T responsables d’eczéma, d’infections récidivantes.
Il existe une dysmégacaryocytopoïèse avec des mégacaryocytes
quantitativement normaux mais qualitativement
anormaux, responsables de production plaquettaire
anormale avec durée de vie plaquettaire raccourcie.
2- Acquises :
Les thrombopénies centrales acquises sont liées à une
aplasie médullaire ou à une infiltration médullaire.
Dans ces thrombopénies centrales, la thrombopénie
n’est pas toujours isolée.
Elle peut être associée à une pancytopénie (aplasie) ou à une prolifération cellulaire
anormale.
Le myélogramme et (ou) la biopsie médullaire
retrouvent une absence ou une hypoplasie mégacaryocytaire
isolée ou associée à une aplasie-hypoplasie médullaire
plus globale ou objectivent une infiltration médullaire
par une prolifération tumorale.
La mesure de durée de vie des plaquettes n’est pas indiquée
et elle serait normale (8-10 jours).
• Amégacaryocytose acquise isolée : elle peut être d’origine
immunologique, ne touchant que la lignée mégacaryocytaire,
responsable d’une thrombopénie sévère
isolée.
Une forme particulière d’amégacaryocytose
cyclique chez la femme peut précéder une thrombopénie
persistante.
Elle peut être toxique, comme l’intoxication éthylique
aiguë qui bloque la mégacaryocytopoïèse au stade de
mégacaryocyte mûr et entraîne une thrombopénie.
• Aplasie médullaire acquise : la thrombopénie est un
des éléments de la pancytopénie qui associe une anémie
arégénérative, une neutropénie.
Le diagnostic est confirmé
par le myélogramme et la biopsie médullaire qui
montrent l’hypoplasie ou l’aplasie médullaire avec
absence des précurseurs touchant les 3 lignées.
Différentes étiologies doivent être recherchées :
– les aplasies médullaires idiopathiques sont en règle
d’origine immunologique.
La thrombopénie est associée
à une anémie arégénérative et à une neutropénie.
Le
myélogramme et la biopsie médullaire retrouvent une
moelle très pauvre voire désertique ;
– l’aplasie médullaire peut être secondaire aux chimiothérapies,
à la radiothérapie.
La thrombopénie entre
dans le cadre de l’aplasie et est transitoire ;
– des toxiques médicamenteux (chloramphénicol, sels
d’or, sulfamides, anti-inflammatoires non stéroïdiens,
neuroleptiques) ou chimiques (benzène) peuvent être
responsables d’aplasie médullaire sévère dont la thrombopénie
est un des éléments ;
– les profondes carences en vitamine B12 et (ou) folates
sont responsables d’une thrombopénie qui est associée à
une anémie macrocytaire non régénérative et à une neutropénie
avec polynucléaires hypersegmentés.
Le myélogramme
retrouve des signes de dysmyélopoïèse avec
mégaloblastose.
Le traitement vitaminique permet une
récupération des anomalies hématologiques avec une
crise réticulocytaire au 8e-10e jour ;
– au cours des myélodysplasies, la thrombopénie peut
précéder l’anémie macrocytaire, non régénérative (anémie
réfractaire) ou être associée à cette anémie.
Le myélogramme
montre une moelle riche avec des anomalies
morphologiques touchant les 3 lignées, témoignant de la dysmyélopoïèse et des troubles de maturation.
L’évolution se fait sur le mode pancytopénique ou vers
une leucémie aiguë.
• Infiltration médullaire
– Tout processus malin envahissant la moelle est responsable
d’une pancytopénie où la thrombopénie est
fréquente.
Ce sont les leucémies aiguës, les lymphomes
malins, la maladie de Hodgkin, la leucémie lymphoïde
chronique, la maladie de Waldenström, le myélome, les
cancers.
L’infiltration médullaire traduit un pronostic
péjoratif.
L’examen clinique retrouve dans certains cas un
syndrome tumoral.
La thrombopénie peut être associée à
une prolifération leucémique objectivée dès la numération,
ou faire partie d’une pancytopénie globale reflétant
sur la numération l’infiltration médullaire du processus
néoplasique. Le diagnostic est obtenu par le myélogramme
et par la biopsie médullaire.
– Certaines formes de tuberculose hématopoïétique
peuvent se traduire par une pancytopénie.
La biopsie
médullaire retrouve des foyers épithélioïdes et la culture
de moelle recherche les bacilles de Koch.
– Le syndrome d’activation macrophagique associe :
altération sévère de l’état général, hépatosplénomégalie
et pancytopénie.
Le myélogramme retrouve une hyperplasie
histiocytaire avec activation macrophagique phagocytant
les plaquettes, les leucocytes et les hématies.
Conclusion
:
Le diagnostic étiologique de thrombopénie est orienté
par la clinique et des tests simples de dépistage.
Une
analyse plus fine reposant sur le myélogramme et (ou) la
biopsie médullaire permet de différencier les thrombopénies
centrales des thrombopénies périphériques.
Le
syndrome hémorragique cutanéo-muqueux n’est pas
corrélé au degré de la thrombopénie.
Le traitement du
syndrome hémorragique lié à la thrombopénie est adapté
au diagnostic étiologique.
Si les transfusions de plaquettes
sont nécessaires dans les thrombopénies centrales,
elles peuvent être délétères et (ou) inefficaces
dans certaines thrombopénies périphériques. Cette indication
doit être posée en tenant compte du bénéfice par
rapport au risque. Elle est généralement de 1 unité
plaquettaire pour 10 kg de poids.