Rétention aiguë d’urines Cours de
réanimation - urgences
Introduction
:
La rétention aiguë d’urines (RAU) se définit
comme l’impossibilité pour le patient
d’éliminer ses urines alors que la miction en
temps normal est facile, non douloureuse,
complète et contrôlée.
Celle-ci se fait selon
un arc réflexe qui prend ses origines dans la
moelle sacrée sous contrôle de centres
facilitateurs ou inhibiteurs supramédulaires
situés au niveau du tronc cérébral.
Devant une RAU se posent trois problèmes :
– reconnaître la distension vésicale ;
– drainer la vessie ;
– préciser le diagnostic et le traitement
ultérieur.
L’étiologie dépend beaucoup de l’âge et du
sexe.
Diagnostic positif
:
C’est reconnaître la distension vésicale.
Le diagnostic est évident en cas de rétention
complète, aiguë et brutale chez un patient
qui vidait bien sa vessie jusqu’alors : le
besoin douloureux et l’impossibilité d’uriner
évoquent le diagnostic.
La voussure hypogastrique, convexe et mate à la
percussion qui réveille d’ailleurs l’envie
d’uriner, la confirme.
Cependant, le diagnostic peut être plus
difficile en cas de rétention chronique
d’urines devenue complète, car le besoin est
moins douloureux, la matité sus-pubienne
est plus étalée et moins douloureuse.
Il existe également des diagnostics difficiles
du fait de conditions locales particulières
(pannicule adipeux, ascite, traumatisme du
bassin), lorsque la rétention se fait sur un
mode non douloureux (rétention chronique,
coma, paraplégie récente, entérocystoplastie), ou encore lorsque tout contact est
impossible avec le patient (démence,
Parkinson évolué, aphasie).
Diagnostic différentiel
:
Ce qui n’est pas une distension vésicale :
avant de porter le diagnostic de RAU, il faut
toujours éliminer les autres causes de masse
hypogastrique, en particulier une tumeur
pelvienne (kyste ovarien, fibrome utérin),
une possible occlusion intestinale, une
ascite…
Enfin, il ne faut pas confondre la rétention
d’urines qui correspond à l’impossibilité
pour le patient d’uriner, avec l’anurie qui
correspond, elle, à l’absence de sécrétion
d’urines par le rein et qui se fait sur un
mode indolore.
Au moindre doute, un cliché d’abdomen
sans préparation et/ou une échographie
pelvienne permettent en peu de temps de
poser le diagnostic avec certitude.
Il faut
alors sans délai soulager le patient en
dérivant les urines, après un interrogatoire
et un examen clinique qui, s’ils doivent être
rapides, n’en sont pas moins primordiaux
dans la mesure où ils vont non seulement
permettre le plus souvent de poser d’emblée
le diagnostic étiologique, mais également de
choisir le mode de drainage en fonction des
indications et contre-indications de chacun.
Interrogatoire
:
Il cherche à faire préciser l’anamnèse :
– âge ;
– sexe ;
– ancienneté des troubles (installation
brutale ou accentuation d’une dysurie ou
d’une pollakiurie préexistantes) ;
– facteur déclenchant (voyage en voiture,
prise de neuroleptique, d’antitussif…) ;
– antécédents urologiques : troubles
mictionnels traités ou non par alphabloquants,
hématurie, urétrite, résection
d’adénome, cure d’incontinence urinaire…
Examen clinique
:
Réalisé rapidement dans un premier temps
chez un patient qui nécessite d’être soulagé
en urgence, il ne doit pas être négligé car il peut faciliter le diagnostic étiologique
(adénome de prostate, prostatite, tumeur
pelvienne…) ou orienter le type de drainage
(cicatrice évoquant une chirurgie de pontage
artériel qui contre-indique le cathéter suspubien,
soit du fait de la prise d’antivitatime
K, soit du fait d’un pontage extraanatomique
rétropubien).
L’examen clinique porte donc sur l’abdomen
et les organes génitaux externes.
Les
touchers pelviens doivent être réalisés à cet
instant, facilitant par exemple le diagnostic
de globe chez l’obèse, mais devront être
renouvelés ultérieurement, lorsque la vessie
aura été vidée.
Traitement
:
A - TRAITEMENT MÉDICAL
:
Il n’a pas sa place dans la prise en charge en
urgence des rétentions aiguës d’urines.
Tout
au plus peut-il être instauré en même temps
que le drainage lorsque l’on pense pouvoir
faire reprendre les mictions au patient après
ablation rapide du système de drainage.
Chez la personne âgée, il faut s’attacher à
choisir un alphabloquant urosélectif et
rechercher la posologie optimale pour avoir
le meilleur rapport bénéfices/risques.
À cette condition, il a ainsi été démontré
dans cette étude, qui compare 292 patients
recevant un alphabloquant urosélectif
(groupe1) à 269 patients recevant un placebo
(groupe 2), que l’incidence des effets
secondaires était moindre dans le premier
groupe (18,5 %) que dans le second (15,8 %),
de même que le taux d’abandon pour effets
secondaires (3,4 % versus 5,7 %), alors que
le taux d’incidents pouvant être relié à un
effet vasodilatateur est équivalent dans
chaque groupe (2,7 %).
B - DRAINAGE
:
La rétention complète d’urines nécessite
d’être soulagée en urgence.
Il existe deux
moyens d’évacuer une rétention d’urines : le
cathétérisme urétral et le cathétérisme suspubien.
1- Cathétérisme urétral
:
Il reste le meilleur mode de drainage.
La
sonde urétrale doit être bien choisie, c’est-àdire
pas trop grosse, afin que les sécrétions
urétrales puissent s’écouler autour du méat,
faute de quoi une méatite suivie d’une
sténose est fréquente.
Le calibre de sonde
Charrière 16 est idéal.
La sonde doit être apte à franchir sans
difficulté les différents segments de l’urètre
chez l’homme.
La meilleure sonde dans ce
cas-là est la sonde béquillée à bout rond ou
à bout effilé olivaire.
En respectant les règles de mise en place
(sondes aseptiques, non traumatisantes et
convenablement entretenues) , le
cathétérisme urétral représente le mode de
drainage qui n’a aucun des dangers du
cathétérisme sus-pubien :
– dangereux pour le contenu de la cavité
abdominale s’il est manié par des mains non
expertes ;
– instable ;
– non étanche, exposant à l’infiltration
urinaire du Retzius.
C’est pourquoi les indications du
cathétérisme sus-pubien découlent des
contre-indications de la sonde urétrale :
– rétrécissement de l’urètre ;
– jeune garçon (fragilité urétrale) ;
– traumatisme urétral (chute à califourchon,
fracture du bassin…) ;
– antécédents récents de chirurgie urétrale
ou prostatique (risque de décollement soustrigonal
en passant la sonde) ;
– syndrome infectieux (prostatite, urétrite, orchiépidydimite) pour éviter le risque de
septicémie ;
– patient porteur d’une prothèse
urologique :
– prothèse endo-urétrale ;
– sphincter artificiel.
2- Cathétérisme sus-pubien
:
Après avoir revu les indications de la
cystostomie sus-pubienne, il faut cependant
bien connaître :
– les contre-indications qui lui sont propres :
– trouble sévère de l’hémostase
(anticoagulants à dose efficace) ;
– hématurie (les caillots risquent de
boucher le tuyau de petit calibre) ;
– tumeur vésicale (risque de dissémination
tumorale) ;
– ascite ;
– pyurie (risque de cellulite pelvienne) ;
– les contre-indications relatives :
– absence de globe vésical franc ;
– toute chirurgie sous-ombilicale.
En effet, dans ces deux situations, lorsqu’il
existe une contre-indication au cathétérisme
urétral, la pose d’un cathéter sus-pubien
peut être réalisée sous contrôle
échographique.
Les avantages du cathétérisme sus-pubien
sont :
– d’une part, l’absence de risque de
contamination des urines lors de sa pose et
durant les premiers jours, ce qui en fait un
traitement de choix chez le « rétentionniste »
chronique ou distendu à urines claires,
surtout dans l’attente d’une intervention
chirurgicale ;
– d’autre part, il peut être clampé, ce qui
permet d’évaluer la possibilité de reprise des
mictions par les voies naturelles après
quelques jours de traitement médical de
l’adénome (alphabloquant) ou de la
prostatite (antibiothérapie adaptée).
Mise en place
du drainage :
A - SONDAGE URÉTRAL
:
1- Choix de la sonde
:
Il existe actuellement un grand nombre de
sondes urétrales à la disposition du médecin.
S’il s’agit d’un simple sondage évacuateur,
on peut choisir une sonde sans ballonnet.
En revanche, si la sonde est destinée à rester
en place plusieurs jours, il faut toujours
choisir une sonde autostatique à ballonnet.
(sonde à ballonnet siliconée, qui évite la
formation de lithiase vésicale et empêche
l’irritation de la paroi vésicale).
S’il s’agit d’une rétention à urines claires, on
peut utiliser chez la femme une sonde droite
type Foley.
Chez l’homme, s’il existe un
adénome de prostate, on peut être amené à
utiliser une sonde plus rigide et béquillée,
ce qui permet de passer sans encombre
l’obstacle cervicoprostatique.
S’il s’agit d’une
rétention sur hématurie, il faut porter son
choix sur une sonde de gros calibre, multiperforée et à double courant, qui
permet de procéder à des lavages de vessie,
et éventuellement à des décaillotages.
2- Pose de la sonde
:
L’introduction de la sonde urétrale doit être
faite de façon aseptique.
– Dans un premier temps, il faut procéder à
une désinfection des organes génitaux
externes (gland, vulve) avec une solution
antiseptique (polyvidone [Bétadinet],
hypochlorite de sodium [Dakin Coopert]…).
– Après cette première toilette, l’opérateur
doit se munir de gants stériles et mettre en
place un champ stérile troué, qui laisse
seulement passer la verge ou donne accès
au méat urétral chez la femme.
Ce n’est qu’à
ce moment-là que l’on procède à la
deuxième toilette avec le même antiseptique.
– Si l’on dispose d’anesthésique de contact,
il faut l’instiller dans l’urètre afin de lui
laisser le temps d’agir.
– L’assistant donne alors à l’opérateur la
sonde choisie. Celui-ci l’extrait de son sachet
stérile et l’enduit d’un produit lubrifiant
stérile (gel anesthésique de contact de
préférence).
De plus en plus de sondes
disponibles sur le marché sont siliconées et
enduites d’un produit hydrophile.
C’est avec
de l’eau stérile que l’on doit procéder à la
lubrification de ce type de sonde, et non pas
avec de la vaseline qui rend le ballonnet
poreux à moyen terme.
– Chez la femme, le cathétérisme urétral ne
doit poser aucun problème dans la mesure
où celui-ci est très court et il faut bien écarter
les grandes lèvres afin d’éviter le contact
avec la sonde.
– Chez l’homme, le cathétérisme de l’urètre
peut être décomposé en deux temps : le
pénis est tracté d’abord verticalement, de
part et d’autre de l’urètre dans lequel on
introduit la sonde qui est poussée jusqu’au
bulbe, puis, lorsque l’on aborde l’angle pénoscrotal, le pénis doit être horizontalisé
tandis que l’on continue de pousser la sonde
urétrale qui passe alors sans problème
l’angle pénoscrotal.
– Il faut toujours s’assurer du bon
positionnement distal de la sonde en
position intravésicale en enfonçant celle-ci
jusqu’à la garde, et en recueillant au moins
quelques gouttes d’urine.
Alors seulement, on peut gonfler le
ballonnet avec 10 mL d’eau distillée, ce qui ne doit pas provoquer de douleur chez le
patient, celle-ci traduirait une malposition de
la sonde.
Une fois le ballonnet gonflé, il faut tirer sur
la sonde vésicale jusqu’à ce que le ballonnet
vienne buter contre le col vésical.
L’urine s’écoule alors librement dans la
poche collectrice que l’on aura eu soin de
raccorder à la sonde vésicale dès le début
du geste ; on réalise ainsi un sondage en
vase clos, ce qui permet de réduire le
nombre d’infections urinaires iatrogènes.
Le drainage vésical doit ensuite s’effectuer
progressivement, en clampant la sonde dès
lors que 500 mL d’urines ont été recueillis et
ce afin d’éviter une hématurie a vacuo, une
hypotension ou un syndrome de lever
d’obstacle qui, même s’ils ne sont rencontrés
que rarement, doivent être évités, plus
particulièrement chez la personne âgée.
3- Surveillance et soins
:
Le méat urétral et l’ensemble des organes
génitaux externes doivent être nettoyés deux
fois par jour avec une solution antiseptique.
Après chaque toilette, le gland doit être recalotté chez l’homme afin d’éviter un
paraphimosis.
Afin de maintenir une autonomie suffisante
chez les patients porteurs d’une sonde à
demeure, on peut fixer celle-ci à la face
interne de la cuisse de manière à ce qu’il n’y
ait pas trop de traction à la mobilisation.
L’utilisation d’un bouchon amovible (fosset)
ne semble pas de provoquer plus d’infection
et augmente en revanche l’autonomie.
Les sondes laissées à demeure doivent être
changées régulièrement et les sondes
siliconées actuellement disponibles peuvent
être facilement maintenues 4 à 6 semaines
sans problèmes, car elles ralentissent
l’incrustation du cathéter par les biofilms
produits par les germes uréasiques, à
condition que le pH urinaire soit maintenu
acide et que le flux urinaire permette un
lavage permanent.
Parfois, l’ablation de celle-ci peut être
rendue difficile par l’impossibilité de retirer
l’eau du ballonnet, soit que celui-ci se soit
calcifié, soit qu’il y ait un dysfonctionnement
de la valve antiretour.
Dans ces
conditions, on peut tout d’abord tenter de
sectionner aux ciseaux la voie destinée au
ballonnet au ras de la sonde vésicale, ce qui
a pour effet de supprimer un éventuel
dysfonctionnement du système antireflux.
Sinon, il faut se résoudre à ponctionner
celui-ci par voie percutanée sous contrôle
échographique.
D’autres petits moyens
peuvent être utilisés, comme l’introduction
d’un guide fin dans la tubulure ou
l’injection de 0,5 mL d’éther dans le tuyau
du ballonnet, ce qui a pour effet d’obtenir la
dissolution du latex.
En revanche, il ne faut
pas tenter de faire éclater le ballonnet par
surpression, car des lambeaux de celui-ci
peuvent persister dans la vessie et risquent
de se calcifier.
B - CYSTOSTOMIE SUS-PUBIENNE
:
La mise en place d’un cathéter sus-pubien
ne doit être réalisée que chez un patient
ayant un globe vésical manifeste.
En effet,
même dans des mains entraînées, la
manipulation d’un tel matériel peut se
compliquer d’une perforation d’élément
digestif si le globe vésical n’est pas
suffisamment constitué.
En l’absence de
celui-ci, il faut toujours soit différer le geste
en attendant que la vessie se remplisse, soit
mettre en place le cathéter sous contrôle
échographique.
La mise en place d’un cathéter sus-pubien
est un geste chirurgical qui doit être réalisé
dans un contexte d’asepsie rigoureux.
1- Matériel
:
Le matériel nécessaire doit être rassemblé à
l’avance sur un chariot spécifiquement
préparé.
Celui-ci doit comporter :
– le cathéter et ses accessoires qui font le
plus souvent partie d’un pack ;
– un champ troué, des gants stériles ;
– un bistouri à lame fine ;
– un fil à peau ;
– un flacon de Xylocaïnet, solution à 1 % ;
– une seringue de 20 mL avec une aiguille
intramusculaire.
2- Pose du cathéter sus-pubien
:
Après rasage et désinfection par un
antiseptique de la région sus-pubienne, on
localise le point de ponction qui doit se
situer sur la ligne médiane à deux travers
de doigt au-dessus de la symphyse pubienne.
Après avoir installé le champ troué, on
pratique une anesthésie locale au point de
ponction et l’on infiltre progressivement et
verticalement les différents plans tout en
aspirant jusqu’à ramener de l’urine, ce qui
confirme la bonne direction de la ponction,
mais également la présence d’urines.
Une fois l’anesthésie installée, on incise le
plan cutané à l’aide d’une lame froide ce qui
permet de passer sans difficulté le trocart
sur lequel on a préalablement monté le
cathéter.
Le geste en lui-même consiste donc à se
munir du trocart monté du cathéter que l’on
doit bien empaumer dans la main
dominante.
Une fois passés les plans cutané,
sous-cutané, il faut enfoncer le trocart bien
verticalement dans la même direction que
l’aiguille de l’anesthésie jusqu’à l’issue
d’urines.
On doit alors immédiatement arrêter de
pousser sur le trocart, qui risquerait d’être transfixiant et de blesser le rectum en arrière,
et faire coulisser le plus loin possible le
cathéter dans la vessie tout en retirant le
trocart.
En fin de mise en place, celui-ci est retiré
selon un trajet prédécoupé, et il faut se
méfier à ce moment-là de ne pas sectionner
le cathéter avec les bords qui sont très
tranchants de même qu’il faut
prendre soin de ne pas se blesser.
Le cathéter est ensuite fixé à la peau par
deux points de fil tressé qu’il faut ne pas
trop appuyer, afin d’éviter d’étrangler
celui-ci.
L’orifice de cystostomie est ensuite couvert
par un pansement occlusif en évitant les
coudes au niveau du cathéter.
Une fois le malade
soulagé :
A - IL FAUT LE RÉEXAMINER
:
– Pour poursuivre l’interrogatoire dans de
meilleures conditions.
– Examiner les urines drainées.
– Refaire le toucher rectal à vessie vide.
– Faire un examen neurologique (tonus anal,
anesthésie en selle, réflexes ostéotendineux
[ROT] rotuliens et achilléens).
B - SURVEILLER LE MALADE DRAINÉ
EN HOSPITALISATION
:
– La diurèse, dans les heures qui suivent la
mise en place du drainage pour dépister un
syndrome de levée d’obstacle pour
compenser la polyurie.
– La température, pour être sûr de ne pas
avoir infecté par le geste réalisé un distendu
initialement à urines claires.
Examens
complémentaires
:
Nous avons vu que ceux-ci étaient rarement
nécessaires avant le drainage.
En revanche,
une fois celui-ci pratiqué, un bilan minimal
devrait être effectué afin de poser le
diagnostic étiologique, d’évaluer les
répercussions de cette rétention sur
l’appareil urinaire et enfin d’adapter une
conduite à tenir.
A - EXAMENS BIOLOGIQUES
:
– Examen cytobactériologique des urines
afin de rechercher une infection qui sera
traitée par antibiothérapie adaptée.
– Ionogramme sanguin, créatininémie,
urémie, à la recherche d’une altération de la
fonction rénale.
– Numération formule sanguine à la
recherche d’un syndrome infectieux ou
inflammatoire.
– Dosage du PSA (prostate specific antigen)
chez l’homme de plus de 50 ans.
– Hémocultures en présence d’un syndrome
fébrile.
– Bilan d’hémostase complet devant la
notion d’une prise d’anticoagulant.
B - EXAMENS RADIOLOGIQUES
:
1- Abdomen sans préparation
:
– Recherche d’une lithiase radio-opaque se
projetant sur l’arbre urinaire.
– Recherche de matériel prothétique
(prothèse endo-urétrale, sphincter artificiel).
– Étude du cadre osseux (métastases).
2- Échographie abdominale
et de l’appareil urinaire
comprenant rein, vessie et prostate :
C’est un examen non invasif et indolore
réalisé de principe dans le bilan d’une RAU.
Il permet par exemple de connaître le
volume prostatique total, le volume de la
zone adénomateuse qui est en rapport avec
l’épisode de rétention et l’homogénéité de la
prostate, mais n’élimine pas la possibilité
d’une sténose urétrale.
3- Urographie intraveineuse
:
Elle vise à préciser la nature de l’obstacle,
son retentissement sur la vessie (distension,
diverticule, trabéculation, empreinte
prostatique…) et sur le haut appareil
urinaire (dilatation des voies excrétrices,
amincissement cortical).
Si le patient est
porteur d’un cathéter sus-pubien, il est possible d’obtenir des clichés
mictionnels.
4- Urétrocystographie
:
Si le siège de l’obstacle n’est pas connu avec
certitude (prostate ou urètre) ou s’il existe
un doute sur une sténose de l’urètre et que
l’urographie intraveineuse n’a pas permis d’opacifier l’urètre, il faut alors, d’une façon
ou d’une autre, obtenir une visualisation de
celui-ci.
Elle peut être réalisée par voie
rétrograde à l’ablation de la sonde urétrale
ou par voie antérograde, par la sonde de
cystostomie sus-pubienne.
Cet examen peut
donc apporter des informations utiles et
complémentaires de celles apportées par
l’urographie intraveineuse.
C - EXAMENS ENDOSCOPIQUES
:
Qu’il s’agisse d’une fibroscopie souple sous
anesthésie locale ou d’une urétrocystoscopie
réalisée au bloc opératoire, c’est l’examen
qui permet au mieux d’apprécier la
perméabilité de l’urètre, la bonne ouverture
du col vésical, le retentissement sur la vessie
de l’hypertrophie prostatique, d’étudier la
muqueuse vésicale et d’éliminer la présence
de calcul ou de corps étranger.
D - EXAMEN URODYNAMIQUE
:
Il explore la physiologie du bas appareil
urinaire et permet de comprendre la
physiopathologie des troubles mictionnels
qui ont conduit à la RAU.
À ce titre, il s’agit
d’un examen indispensable dans le bilan des
rétentions aiguës d’urines liées à un
dysfonctionnement neurologique.
Il peut
également aider à dépister les patients qui
ne sont pas de bons candidats à une prise
en charge chirurgicale.
Ainsi, une étude menée chez 81 patients
ayant présenté un épisode de RAU, âgés en
moyenne de 72 ans (56 à 93 ans) et ayant
tous été traité par résection transurétrale de
prostate, a montré qu’il existait des facteurs
de mauvais pronostic quant à la reprise de
mictions spontanées.
Il s’agit :
– des patients âgés de plus de 80 ans ;
– des rétentions supérieures à 1,5 L
d’urines ;
– des pressions maximales du détrusor
inférieures à 28 cmH2O en urodynamique.
En revanche, cette étude n’a pas permis de
mettre en évidence de facteur prédictif
négatif en fonction :
– du nombre d’épisodes de rétention ;
– du volume global de la prostate ;
– du score international prostate score symptom (score IPSS).
Étiologie
:
Il faut distinguer les obstacles et les
dysfonctionnements neurologiques.
A - OBSTACLES
:
1- Chez l’homme
:
* Obstacles vésicoprostatiques
:
Si l’hyperplasie bénigne de la prostate (HBP)
est la cause la plus fréquente de RAU (53 %),
une étude prospective récente réalisée sur
2 115 hommes, âgés de 40 à 79 ans, porteurs
d’une hyperplasie bénigne de la prostate,
suivis pendant 4 ans dans le Comté
d’Olmsted (Minnesota, États-Unis), précise
quelques données concernant les RAU.
Cinquante-sept patients ont fait une RAU
pendant la période d’observation (6,8 pour
1 000 personnes-année).
Le risque relatif (RR)
de faire un premier épisode de RAU
augmente avec :
– l’âge : avec RR = 1 entre 40 et 49 ans
contre RR = 4 entre 70 et 79 ans ; un homme
de 60 ans a 23 % de risques de faire une
RAU dans les 20 ans ;
– la taille de la glande : RR = 3 quand le
volume prostatique est supérieur ou égal à
30 mL ;
– le score IPSS : RR = 3,2 quand le score
IPSS est supérieur à 7 ;
– la baisse du débit urinaire (Qmax) : RR =
3,9 quand Qmax est inférieur ou égal à
12 mL /s.
De l’observation de cette cohorte, les auteurs
concluent à l’effondrement de trois mythes :
– les RAU ne sont pas spontanées chez la
plupart des patients, 53 % sont dues à des
manoeuvres diverses endocanalaires ;
– seuls 14 % (8 sur 57) des patients en RAU
ont subi une résection transurétrale de la
prostate dans les 6 mois qui ont suivi (il
n’est pas précisé cependant si ces patients
ont fait l’objet d’une prise en charge
différente : sonde à demeure, médicament,
thermothérapie…) ;
– enfin, il est intéressant de noter que, dans
cette étude, seuls 25 % des patients ayant
des symptômes sévères liés à l’HBP
consultent un médecin (généraliste plutôt
qu’urologue).
Une étude récente menée pendant 2 ans et
portant sur 2 113 patients traités par finastéride (groupe 1) versus 2 109 autres
traités par placebo (groupe 2) a montré que
la prise d’un traitement médical par
inhibiteur de la 5-alpha-réductase réduisait
de façon significative le risque de RAU (RR
divisé par deux) et le recours à la chirurgie
(RR divisé par trois) pour le groupe 1.
Le cancer prostatique qui se développe au
départ de la partie périphérique de la glande
n’induit une RAU que lorsqu’il est à un
stade avancé.
En dehors de ce contexte, il
faut donc plutôt rapprocher l’épisode rétentionniste à la simultanéité d’une
hyperplasie de la prostate qui n’est pas
rare.
Chez un homme jeune consultant dans un
contexte fébrile et de troubles mictionnels à
type de brûlures ou de pollakiurie, il faut
bien évidemment dans un premier temps
évoquer le diagnostic de prostatite aiguë.
La pathologie du col vésical (sténose
congénitale, sclérose du col, maladie de
Marion…) voit son diagnostic reposer sur
l’endoscopie et l’urétrocystographie
mictionnelle.
* Obstacles urétraux
:
Le rétrécissement urétral peut être
secondaire soit à des manifestations
infectieuses (gonoccocie, bilharziose,
tuberculose…) ou, plus souvent en Occident,
à une cause iatrogène (sondage
traumatique, geste endoscopique, chirurgie
cervicoprostatique…).
Il faut savoir qu’il existe d’authentiques
RAU sur lithiase enclavée de l’urètre, après
que celle-ci ait été éliminée lors d’une crise
de colique néphrétique.
* Obstacles péniens
:
Ce sont les phimosis très serrés, le priapisme
ou les tumeurs locales.
2- Chez la femme
:
La RAU est rare en dehors des rétentions
postopératoire et du post-partum.
Sinon, il faut rechercher une cause
urogénitale et le mécanisme de la RAU se
fait alors par la compression extrinsèque du
col ou de l’urètre par une tumeur pelvienne
(fibrome utérin, utérus gravide rétroversé
[26 cas publiés], kyste ovarien…), soit par
envahissement en cas de tumeur maligne
(tumeur développée aux dépens du col
vésical ou, exceptionnellement, léiomyome
de l’urètre).
Il faut plutôt évoquer chez elle :
– l’herpès génital ;
– une neuropathie, une sclérose en plaques
(SEP).
3- Dans les deux sexes
:
* Pathologie urétrale
:
– Rupture traumatique : il faut la rechercher
systématiquement chez le traumatisé du
bassin de sexe masculin surtout lorsqu’il
existe une urétrorragie.
Dans ce cas-là, il est
formellement contre-indiqué de poser une
sonde urétrale avant qu’une urétrocystographie
rétrograde réalisée avec précaution
n’ait éliminé une solution de continuité au
niveau de cet urètre.
– Fécalome, qui agit à la fois comme facteur
obstructif, mais est également responsable
d’une rétention réflexe.
– Tumeur rectale.
– Calcul, caillot, corps étranger.
– Tumeur de l’urètre, étiologie rare mais
à connaître.
– Diverticule urétral congénital ou acquis.
– Tumeur vésicale avec envahissement
cervical ou prolabée dans le col.
– Sténose du méat, phimosis infecté chez le
petit garçon.
– Hydrocolpos ou hématocolpos par
imperforation hyménéale chez la petite fille.
– Tumeur : sarcome du sinus urogénital,
tératome sacrococcygien.
– Corps étranger.
– Maladie du col.
B - DYSFONCTIONNEMENT VÉSICOSPHINCTÉRIEN
:
1- Réflexe
:
Il se voit surtout en postopératoire et en
post-partum, mais aussi lors d’un
syndrome abdominal aigu et d’un
traumatisme abdominopelvien.
L’évolution
est favorable, mais il faut toujours éliminer
un obstacle sus-jacent.
Dans la RAU
postopératoire, l’âge et le sexe ne sont pas
des facteurs de risque, contrairement aux
types d’intervention (laparotomie, chirurgie anorectale et type ou durée de
l’anesthésie par opiacés par voie
intraveineuse).
Enfin, il ne faut pas méconnaître les causes
psychogènes.
2- Médicamenteux
:
Certains médicaments entraînent une RAU
par la diminution de la force de contraction du muscle vésical (anticholinergiques,
atropiniques, neuroleptiques…).
3- Organiques
:
La RAU est souvent rencontrée dans
certaines maladies plus que d’autres à
savoir :
– diabète qui s’accompagne de cystopathie
dans 40 à 85 % des cas, témoin de
la polyneuropathie liée à cette affection ;
– maladie de Parkinson ;
– spina bifida, myéloméningocèle ;
– méningite, poliomyélite ;
– syndrome de l’immunodéficience acquise
(Sida) ;
– herpès génital.
Cas particulier : RAU à la suite d’un
traumatisme médullaire.
À la phase initiale,
quel que soit le siège de la lésion
neurologique responsable, la vessie est
flasque, inerte, atone.
Quant au col vésical,
il se tient passivement fermé ; il en est de
même pour le sphincter strié de l’urètre.
Pour cela, dès les toutes premières heures, il
faut assurer le drainage pour éviter la
distension qui aboutirait à une vessie
claquée, témoin d’une rétention d’urine
négligée.