Il tend à reproduire la structure normale des deux cartilages alaires, avec
la crus mésiale, la crus intermédiaire, les deux genoux et la crus latérale.
Des bandes de cartilage de 1,5 mm d’épaisseur et de 6 mm de large,
taillées en crosse de hockey, sont utilisées à cet effet.
Au contact l’une de
l’autre dans la columelle, elles s’écartent chacune de 25° à partir du
genou interne.
Au même niveau, la crus intermédiaire fait un angle de
50° vers l’arrière par rapport à la crus mésiale, qui correspond à l’angle
marquant la rotation de la portion sous-apicale de la pointe par rapport à
la columelle.
Cet angle doit être respecté pour reconstruire à l’identique,
comme l’a bien décrit Sheen, et éviter un aspect plat et rigide de la
columelle.
La convexité du dôme, ou genou latéral, est
ensuite formée par de multiples scarifications sur la face superficielle du
cartilage.
Cette charpente est soigneusement suturée aux moignons des
cartilages alaires ainsi qu’à la doublure à l’aide de monofilament 6-0.
Elle peut être renforcée à son sommet par une greffe rectangulaire de
4 x 9 mm, épaisse de 1,5 mm, dont les bords sont émoussés.
Cette greffe,
empruntée à Peck, est fixée par suture à cheval sur les deux dômes.
+ Greffes complémentaires
:
Différentes de l’anatomie normale, elles sont destinées à lutter contre la
rétraction cicatricielle et à exagérer le galbe de certaines régions.
Il faut ainsi renforcer le bord libre de l’aile du nez sur toute sa longueur
par une bande de cartilage modelée par des scarifications pour en simuler
la courbure naturelle.
À son extrémité antérieure, ce contrefort vient au
contact de la crus intermédiaire comme un arc-boutant.
Si elle est trop
courte, une petite greffe complémentaire renforce le triangle mou.
Pour éviter que les rétractions ne pincent le nez de chaque côté de l’arête
et de la pointe, des greffons sont disposés le long du dorsum, en lieu et
place du cartilage triangulaire, de même que dans l’espace séparant le
cartilage triangulaire du cartilage alaire.
On donne ce rôle aux greffons
les moins bons qui peuvent même être des fragments du septum osseux
et n’ont pas à être jointifs.
D -
Couverture par lambeau frontal
:
Coloration, texture, épaisseur, souplesse font des téguments frontaux
une zone donneuse privilégiée pour la reconstruction nasale, dès que
l’étendue de la perte de substance dépasse les possibilités des lambeaux
locaux.
La proximité du front et la qualité de sa vascularisation axiale
verticale permettent d’employer le lambeau frontal paramédian dans
toutes les situations, de la reconstruction de l’aile du nez à la
reconstruction nasale totale, en passant par la reconstruction héminasale.
Bien entendu, cela n’est possible dans ces conditions
que si la doublure nasale est réparée par les lambeaux locaux,
essentiellement septaux.
1- Lambeau frontal paramédian
:
* Vascularisation et tracé
:
La partie centrale du front est vascularisée par un riche plexus artériel,
alimenté par les artères sus-orbitaire, supratrochléaire, infratrochléaire,
nasale dorsale paramédiane, angulaire.
Le lambeau centré sur l’artère supratrochléaire est vertical avec une base étroite à cheval sur la ride du
lion, à limite interne strictement médiane et à limite externe en regard de
la tête du sourcil.
La perte de substance à recouvrir est dessinée de manière très exacte à
partir d’un modèle pris soit sur le côte opposé normal qui sert de
référence, soit sur la perte de substance elle-même lorsque toute la
préparation des plans de doublure et de soutien est terminée.
Un gabarit
tridimensionnel découpé dans une feuille d’aluminium provenant d’un
emballage de suture est soigneusement modelé sur la perte de substance
cutanée.
Il est ensuite étalé, inversé et posé sur le front à la
verticale du pédicule du lambeau pour profiter au maximum de sa
vascularisation axiale.
On peut dessiner alors en deux dimensions le
tracé très précis du lambeau de couverture cutanée nécessaire.
Il faut en
respecter scrupuleusement les dimensions, aucun millimètre
supplémentaire n’étant souhaitable pour le meilleur résultat esthétique
possible.
Un lambeau trop petit écrase la pointe du nez, alors que, s’il est
trop grand, la rétraction ultérieure altérera la définition du modelé.
Le
dessin de la surface nécessaire est positionné de telle façon que sa limite
supérieure arrive au contact de la ligne d’implantation des cheveux, afin
que le pédicule du lambeau soit assez long pour permettre une mise en
place facile sans tension.
Si une longueur plus importante est
indispensable, le tracé pénètre dans le cuir chevelu.
Le lambeau
paramédian peut reconstruire toute la pointe du nez, y compris la
columelle.
Il faut pour cela un lambeau d’au moins 7 cm de hauteur, ce
qui est une hauteur frontale fréquente. Les fronts les plus courts ont 4 cm
de haut.
On peut allonger le lambeau dans le scalp de 15 mmà 20 mmet
en bas gagner 15 mm supplémentaires par une dissection plus poussée
et une incision traversant le sourcil et dépassant le rebord orbitaire.
La
racine du sourcil qui descend avec le lambeau est repositionnée lors du
sevrage.
La largeur du pédicule ne doit pas excéder 15 mm (entre 11 et 15 mm),
sous peine de faire courir le risque d’une strangulation par rotation du
pédicule lors de la mise en place. Le pédicule est à cheval sur la « ride du
lion ».
L’étroitesse du pédicule favorise la fermeture de la zone
donneuse et rend inutile la remise en place du pédicule après sevrage,
d’autant que la distance intersourcilière est raisonnablement maintenue.
Ce pédicule étroit sauvegarde également la possibilité d’un lambeau
identique sur le pédicule controlatéral. Lorsqu’un defect est unilatéral,
le pédicule est dessiné du même côté pour avoir un arc de rotation plus
court.
Si la perte de substance est médiane, le côté du pédicule est choisi
en tenant compte de l’état local des téguments, de l’existence ou non
d’une cicatrice frontale, de la perception d’un battement artériel, de l’axe
d’une veine frontale bien visible que l’on a tout intérêt à inclure dans le
lambeau car, comme l’a souligné
Servant, le lambeau frontal
paramédian est un lambeau à veine prédominante. Un pédicule droit
tourne dans le sens des aiguilles d’une montre, un pédicule gauche dans
le sens inverse.
* Soulèvement du lambeau
:
Le lambeau est incisé selon le tracé puis levé de haut en bas.
Les 15 à
25 premiers millimètres sont décollés dans le plan sous-cutané, en
laissant en place le muscle frontal.
Au-dessous, l’incision est plus
profonde et le décollement est mené facilement dans le plan prépériosté.
À hauteur du sourcil, on passe sous les muscles corrugator et frontal,
restant ainsi à distance de l’artère supratrochléaire qui passe entre les
deux muscles.
Un décollement sous-périosté dans cette région donne
encore plus de sécurité vasculaire.
Les 15 mm distaux du lambeau
peuvent être dégraissés et affinés, sous grossissement, en épargnant les
branches distales de l’artère supratrochléaire qui, à la partie haute du
front, sont adhérentes au derme.
Lorsque les conditions s’y prêtent, les téguments du dorsum sont
soulevés en un contre-lambeau à pédicule supérieur qui
peut couvrir temporairement la partie cruentée du lambeau frontal.
Ils
sont ensuite sacrifiés lors du sevrage du lambeau frontal qui les remplace
jusqu’à l’angle frontonasal.
L’intérêt de ce choix est développé à la fin
de ce paragraphe.
Le lambeau est désormais prêt à être mis en place et suturé avec
précision, puis la zone donneuse est fermée après un vaste décollement
sous la galéa qui peut être striée pour gagner un peu de souplesse.
Il ne
faut pas créer de tension excessive, facteur de nécrose et de mauvaises
cicatrices.
On ferme couramment des largeurs de 30 à 35 mm.
Si on ne
peut pas fermer complètement, il vaut mieux recouvrir d’un pansement
gras pour préserver le périoste et conduire une cicatrisation dirigée qui
en7à8semaines, même pour de grandes surfaces, aboutit à une cicatrice
souvent de bonne qualité.
Les lambeaux d’avancement avec des
cicatrices sus-sourcillères ou frontotemporales laissent des séquelles
bien plus lourdes et s’opposent au prélèvement ultérieur de tout autre
lambeau frontal, ce qui est une très mauvaise gestion du capital frontal
disponible.
* Allongement du lambeau
:
Si une extension est faite dans le cuir chevelu, les bulbes des cheveux
peuvent être coupés un par un.
Ce travail d’affinement et d’épilation ne
doit pas être fait d’emblée chez le fumeur, même repenti depuis quelques
années, car le risque de nécrose serait élevé.
Millard et Burget
conseillent de le réaliser 3 semaines après la mise en place du lambeau
sous le couvert du pédicule et d’une partie de l’insertion inférieure du lambeau.
On peut alors dégraisser en partie le lambeau pour mieux
l’adapter.
Le sevrage du lambeau est simplement repoussé de
2 semaines.
* Section du pédicule
:
Elle peut être faite dès le 12e ou 15e jour, mais, à ce stade, son adaptation
idéale au site receveur nécessite des dissections partielles qui peuvent
faire courir un risque.
Au 20e ou 21e jour, les remodelages souhaitables
peuvent être accomplis sans arrière-pensées.
On doit, lors de la section du pédicule, respecter les limites des sousunités
esthétiques.
Toutefois, on peut faire exception à la jonction de la
pointe et de l’arête et les reconstruire d’un seul tenant ce qui donne plus
de naturel et d’unité à l’ensemble.
L’utilisation complète du lambeau
dispense de reposer entre les deux sourcils un V inversé plus visible
qu’une cicatrice verticale unique et inutile puisqu’un pédicule étroit
préserve l’espace intersourcilier.
* Reconstruction nasale et expansion
:
La fermeture assistée de la zone donneuse frontale par expansion
mécanique immédiate complique sans gain réel cette opération.
Quant à
l’expansion préalable, elle a ses partisans, mais à mesure que l’on en
découvre les inconvénients elle a aussi ses détracteurs.
En
l’absence de complications non exceptionnelles qui peuvent mener à un
échec complet du lambeau, elle risque de conduire à une médiocre
reconstruction, avec des tissus qui auront perdu leurs qualités de
souplesse et de finesse.
La tendance rétractile souvent intense se
manifeste dans les suites en altérant la forme et en réduisant la
perméabilité narinaire.
Privilégier la possibilité de fermeture de la zone
donneuse, en prenant le risque d’une reconstruction nasale
esthétiquement imparfaite, c’est tout simplement prendre le problème à
l’envers.
L’expansion préalable n’apporte rien de déterminant à la
reconstruction du nez quand on compare ses résultats avec ceux publiés
par Burget, franchement hostile à cette technique.
Tout au plus pourraitelle
être indiquée secondairement dans quelques rares cas, pour reprendre des séquelles cicatricielles frontales inaccessibles à des
procédés plus simples.
* Modelé de la reconstruction et contrôle des espaces morts
:
Finesse et vitalité des plans de couverture et de doublure, ainsi que
précision et raffinement de la charpente, ne sont rien si les phénomènes
cicatriciels viennent annihiler tous les efforts d’une reconstruction en un
temps.
Un point capital est le contrôle des espaces morts entre les
différents plans.
Nous utilisons des conformateurs faits de feuilles de
silicone fines et souples, enroulées sur elles-mêmes, qui soutiennent le
plan de doublure au niveau des narines et des fosses nasales.
Ces
conformateurs internes sont fixés entre eux à travers la ligne médiane
par des monofilament de Nylon, mais également à une feuille de silicone
externe.
La transparence de ce matériau permet de préserver la
vascularisation cutanée lors du serrage des fils.
Avec cette technique en
sandwich, on peut aussi améliorer la forme, faire glisser le plan de
couverture par rapport à la doublure nasale, mieux recréer les facettes
concaves et les sillons.
Dans les reconstructions les plus difficiles, par
lambeau scalpant par exemple, cette conformation affine le contour des
rebords narinaires, assure la symétrie, prévient les rétractions et crée des
conditions très favorables, inconnues sans cette précaution, pour une
reconstruction différée de la charpente.
Bien entendu, une surveillance
sans faille, surtout les premiers jours, doit prévenir la moindre nécrose
dont la crainte interdisait les procédés de ce type avec des matériaux
opaques.
* Corrections secondaires
:
Des retouches pour parfaire le modelé et la symétrie, estomper une
cicatrice, peuvent être indiquées.
Un délai minimal de 4 à 6 mois est
nécessaire pour retravailler dans de bonnes conditions.
Recréer le sillon alolabial est l’une des entreprises les plus délicates.
L’avancement des téguments géniens vers la muqueuse vestibulaire
nasale externe pour confier ensuite à la rétraction cicatricielle la tubulisation de la base narinaire selon la technique de Chait est la
bonne réponse.
2- Autres lambeaux frontaux à pédicule inférieur
:
* Lambeau frontal médian centré sur la ligne médiane
et à pédicule large basé sur les deux artères supratrochléaires :
Il n’a pas de raison d’être.
Il gaspille le capital frontal, avec une artère en
trop, et son pédicule large favorise un phénomène de strangulation avec
risque de nécrose lors de sa mise en place.
* Lambeau frontal oblique
:
Lorsque le front est bas, la tentation est grande d’allonger le lambeau en
l’inclinant vers le golfe temporal opposé au pédicule.
Ce choix change
radicalement les caractéristiques du lambeau frontal paramédian qui est
un lambeau axial.
L’extrémité du lambeau oblique est mal vascularisée.
La fermeture de la zone donneuse ascensionne le sourcil du côté du
prélèvement et une greffe peut s’avérer nécessaire.
Plus on pratique le
lambeau paramédian aux multiples possibilités, plus on sait l’allonger,
plus on oublie le lambeau oblique.
* Lambeau frontal en mouette
:
Il n’est qu’une variété du lambeau paramédian dont la palette est trifoliée
pour reconstruire les deux ailes et la columelle.
L’autonomisation
préconisée par Millard permettait de doubler les futures ailes narinaires
d’une greffe de peau totale rétroauriculaire et de les armer d’une greffe
de cartilage auriculaire.
Cela compliquait la mise en place d’un lambeau
devenu trop rigide.
La reconstruction en un temps est sans aucun doute
le plus grand progrès de cette chirurgie, mais il faut veiller à ne pas
exagérer les extensions de ce lambeau sous peine de nécrose, surtout
chez le fumeur.
* Autres lambeaux frontaux
:
Le lambeau en îlot à pédicule inférieur comble l’angle nasolabial et
risque de se nécroser.
Il est d’indication exceptionnelle.
Quant au lambeau fourchu de Pollet qui reconstruit la columelle et le
lobule de la pointe du nez, il est détrôné par le lambeau frontal
paramédian tel qu’il est conçu par Burget, avec un ajustement parfait à
la perte de substance.
3- Lambeau frontal scalpant de Converse
:
Inspiré du lambeau frontal up and down de Gillies, il reste
aujourd’hui le seul lambeau frontal capable d’apporter à la pointe du nez
l’ensemble des deux plans de couverture et de doublure.
C’est
précisément dans les cas les plus difficiles où la muqueuse nasale fait
défaut et où les autres lambeaux frontaux ont échoué qu’il trouve encore
des indications.
Ces antécédents contraignent souvent à une
autonomisation préalable.
La palette cutanée est prélevée sur la partie latérale du front, du côté
opposé au pédicule temporal.
L’arc de rotation très vaste lui donne une
grande mobilité et lui permet d’atteindre facilement la partie médiane et
basse de la face.
Tessier, convaincu de la suprématie du lambeau frontal, a adapté le
dessin de la palette cutanée : dans une reconstruction totale de la pointe
du nez, la palette tracée sur la partie latérale et la plus haute du front, à
l’aplomb du golfe temporal, un peu obliquement pour gagner de la
hauteur, doit être de forme trapézoïdale, un peu plus large en bas.
Il faut
de 7 à 8 cm de largeur pour reconstruire l’ensemble de la pointe.
Le
contour inférieur, arrondi, donne plus de hauteur au centre destiné à la
columelle.
Le respect du muscle frontal confère à la palette cutanée une grande
finesse, tout en préservant la mobilité du front réparé par greffe de peau
totale ou épaisse.
Au-dessus du front, l’incision devient plus profonde et
le décollement est mené sous la galéa.
Sur la ligne médiane, l’incision qui
sépare les deux muscles frontaux donne au lambeau toute sa mobilité.
La
zone dénudée du scalp est protégée par un pansement gras maintenu par
un bourdonnet.
La zone donneuse frontale peut être greffée d’emblée, mais
la greffe retardée faite lors du sevrage du pédicule (21e jour) a notre
préférence car le bourgeonnement atténue la dépression.
* Mise en place du lambeau
:
Une double plicature distale de la palette cutanée, verticale sur la ligne
médiane et horizontale latéralement, va dessiner la columelle et les
contours narinaires.
La plicature, ébauchée par des points de montage
selon le procédé de Petrali, est confirmée par la suture de la doublure
narinaire du lambeau frontal aux lambeaux cutanés charnières du site
receveur et l’installation des conformateurs.
Lors du montage du lambeau, tous les petite trucs du métier doivent être
utilisés. Par exemple, il ne faut pas sacrifier prématurément les
excédents.
Désépidermisés, ils augmentent les surfaces de contact du
lambeau et de la zone receveuse et renforcent le montage, en particulier
au niveau de l’angle nasolabial et de l’implantation des narines.
Il faut
veiller à ce que ces dernières ne soient pas implantées trop haut par
rapport à la columelle.
* Mise en place d’une charpente et conformation
du lambeau :
La réalisation simultanée d’une charpente n’est pas simple, ni même
possible à tous les niveaux.
Le procédé le plus utile est la greffe osseuse
en cantilever, synthésée à la zone d’appui, mais il faut que sa couverture
soit d’emblée excellente.
La préparation de la zone receveuse de la
greffe osseuse pour une mise en place différée lors du sevrage du
pédicule a l’avantage de permettre une réalisation bien programmée
avec une protection satisfaisante du greffon.
Il faut alors se méfier d’un
excès de tension sur le lambeau responsable de nécrose cutanée et
d’exposition secondaire de la greffe.
La greffe osseuse retardée quelques
mois plus tard peut se révéler être la seule solution raisonnable.
Elle a
l’inconvénient de laisser s’installer une rétraction du lambeau qui exige
une vaste libération de celui-ci avec excision de la fibrose.
Ce travail est
mené par une incision verticale médiane étendue qui donne un excellent
jour sur l’ensemble du nez.
Sa rançon cicatricielle est généralement très
discrète, voire invisible.
À ce stade, la charpente nasale peut associer
greffe osseuse pour l’arête et greffe de cartilage pour la pointe, au niveau
de laquelle il est impossible d’installer un support réellement satisfaisant
lors du premier temps, sauf réintervention précoce sous couvert du
pédicule.
Certains laissent entre les plans de couverture et de doublure une lame
de silicone qui facilite ce travail secondaire.
Personnellement, nous
utilisons d’emblée des conformateurs en silicone à la fois intranarinaires et externes qui ferment les espaces morts, assurent le
meilleur modelage possible et peuvent être maintenus jusqu’à la mise
en place d’une charpente qu’ils soutiendront en attendant sa
stabilisation.
Ce procédé améliore considérablement les suites et
simplifie les travaux secondaires.
* Sevrage du pédicule
:
Il est possible dès le 14e jour, mais les manoeuvres doivent être très
délicates.
Sa date idéale paraît être le 21e jour.
Comme le conseillent Burget et Millard, on peut mettre à profit la période où le pédicule est en
place pour faire des corrections secondaires précoces adaptées à chaque
cas ou créer une charpente.
* Autonomisation du lambeau
:
Elle n’est pas utile dans les condition normales.
Chez les fumeurs
invétérés ou si le front est cicatriciel du fait d’antécédents traumatiques,
de brûlures, d’échecs antérieurs de reconstruction par lambeaux
frontaux, une autonomisation est conseillée, voire indispensable.
La technique d’autonomisation la plus classique est une incision menée
jusqu’au plan périosté tout le long du tracé du lambeau dans le cuir
chevelu, sans aucun décollement.
La palette cutanée est incisée sur ses
deux côtés jusqu’au muscle frontal qui est respecté.
Une semaine plus
tard, le bord inférieur de la palette est incisé à son tour, toujours sans
décollement.
Au 15e jour, le lambeau peut être soulevé.
Il est
généralement admis que, au-delà de 2 semaines, un délai supplémentaire
n’a pas d’intérêt et que le décollement risque de compliquer la mise en
place du lambeau en le rendant plus rigide.
Lors des
deux temps d’autonomisation de la palette a été fait un décollement
progressif de la portion située sous la cicatrice horizontale du front.
Les
suites de ce cas difficile ont été simples.
* Autres lambeaux scalpants
:
+ Lambeau frontal médian à pédicule supérieur de Raulo
:
Dans les cas les plus difficiles, de front court et de pertes de substance
très basses de la pointe du nez et de la columelle, Raulo
s’inspire du lambeau scalpant de Converse pour proposer un lambeau
frontal médian à pédicule supérieur.
Le lambeau médian, autofermant,
peut avoir de 3,5 à 4 cm de large.
Étant donné sa largeur maximale, ce
lambeau ne peut pas reconstruire plus d’un héminez.
Grâce à sa
longueur, il peut être replié sur lui-même pour les pertes de substance transfixiantes de la narine.
En rapprochant la palette frontale du pédicule
temporal, Raulo en réduit la capacité d’excursion.
On peut remédier
partiellement à cette limitation par une dissection plus poussée vers le
bas du pédicule temporal.
– On peut citer pour mémoire certains lambeaux scalpants qui n’auront
que d’exceptionnelles indications :
– leup and down flap de Gillies, précurseur du lambeau scalpant
de Converse ;
– le sickle flap de New, destiné à un apport frontal limité sur un
long pédicule temporal homolatéral préparé par autonomisation est peu utilisé.
Son principe adapté à un cas complexe (échec de lambeau
de Converse) a permis d’utiliser une palette frontale située du même
côté que le pédicule temporal pour une reconstruction complète et
satisfaisante de la pointe du nez mais avec d’évidentes difficultés liées
à une excursion réduite du lambeau vers la partie basse de la face.
– Deux autres lambeaux peuvent avoir encore quelques rares
indications :
– le lambeau suprasourcilier de Meyer autonomise une palette
cutanée temporale portée par un pédicule horizontal suprasourcilier
tubulé.
La zone donneuse est fermée par un simple rapprochement qui
peut ascensionner le sourcil. Destiné à la réparation columellolobulaire ou de l’aile du nez, il peut être préfabriqué
pendant la phase d’autonomisation avec greffe de peau totale et de
cartilage pour répondre à des pertes de substance transfixiantes.
On
sait les difficultés d’une parfaite adaption de ces lambeaux
préfabriqués ;
– le lambeau rétroauriculaire de Washio apporte une
quantité limitée de peau mastoïdienne, juste suffisante pour la
reconstruction de l’aile du nez ou du complexe columellolobulaire.
Le lambeau est basé sur l’existence inconstante d’anastomoses entre
le réseau temporal superficiel et rétroauriculaire.
Une exploration
doppler préalable est indispensable et, de l’aveu de Washio, une
autonomisation peut être nécessaire.
Levet en a précisé le tracé pour améliorer sa fiabilité : le point
A est placé en avant de la racine de l’hélix, en arrière du pédicule
temporal ; le point B est l’intersection de la crête temporale avec la
ligne d’implantation chevelue frontale ; le point C, au-dessus et à la
verticale de l’oreille, est le troisième sommet d’un triangle
équilatéral :
AB=BC=AC ; le pointDsur la crête temporale est placé
de telle façon qu’il soit le troisième sommet du triangle BCD,
symétrique du triangle ABC.
L’incision réunit B à D et se poursuit le
long de la crête temporale pour s’arrondir vers la région rétroauriculaire où la palette mastoïdienne est levée dans l’espace de
Merkel.
L’incision sur la ligneACrejoint la palette en arrière et garde
en avant le pédicule le plus large.
Basculée en avant sur la ligne AB,
la palette va pouvoir rejoindre la région à reconstruire.
Si la rançon cicatricielle du lambeau est cachée, la couleur n’est pas
satisfaisante.
La fiabilité est discutable et la technique lourde. Le
lambeau deWashio ne peut être qu’une roue de secours.
– Les autres lambeaux rétroauriculaires, ceux d’Orticochéa ou de
Galvao, sont encore plus lourds et à autonomisation obligatoire.
Les
indications sont d’exception.
– On peut encore reconstruire le nez selon la technique de Tagliacozzi
avec un lambeau de la face interne du bras ou de l’avant-bras.
Si Miller
en a montré un beau résultat, il ne représente tout de même pas l’avenir
de cette chirurgie.
Il reste la possibilité très médiocre du lambeau tubulé et l’on peut aussi préfabriquer un nez à distance pour le transférer ensuite par
microanastomose avec le lambeau dorsopédieux ou antébrachial.
Ces
lambeaux imposent plusieurs temps opératoires et on peut sans peine
imaginer et vérifier que ni la couleur, ni le modelé, ni la fonction ne sont
satisfaisants.
À ce stade, il faut tout de même penser aux prothèses qui ont fait de gros
progrès avec les silicones et le développement de la fixation sur
implants.
En une quinzaine d’années, la qualité esthétique des
reconstructions nasales a atteint un niveau qui était impensable
auparavant.
C’est le travail de toute une lignée de chirurgiens
spécialisés en chirurgie plastique et reconstructrice qui, de Gillies
en passant par Converse, Millard, Tessier, prend du volume avec
leurs élèves, Burget et Menick.
En affinant l’étude de l’anatomie artistique, avec une application
rigoureuse du principe des sous-unités esthétiques et leur
obstination à faire le maximum en un temps, ils ont apprivoisé les
phénomènes de rétraction cicatricielle pour s’en faire des alliés
qui magnifient le modelé du nez reconstruit.
La sélection des
meilleurs lambeaux, non seulement pour leur fiabilité, mais aussi
pour leur souplesse, leur texture, leur couleur, le raffinement dans
la restauration de la charpente, un meilleur emploi des
conformateurs, feront encore progresser cette chirurgie dans les
années à venir.