Pronostic et traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte Cours
d'hématologie
Introduction
:
Les leucémies aiguës lymphoblastiques correspondent à des
affections hématologiques malignes résultant d’une prolifération
médullaire d’un clone anormal de précurseurs lymphoïdes
s’accompagnant d’un arrêt de maturation.
Elles représentent près
de 20 % des leucémies aiguës de l’adulte.
La maladie peut se
développer à partir de cellules lymphoïdes appartenant à différentes
lignées, donnant ainsi naissance, soit à des leucémies de la lignée B,
soit à des leucémies de la lignée T, soit à des formes indifférenciées,
voire parfois à des formes mixtes. Environ 20 % des leucémies aiguës
lymphoblastiques appartiennent à la lignée T.
Environ 80 %
proviennent de la lignée B, dont 75 % de cellules B précurseurs et
5 % de cellules B plus matures (leucémies aiguës lymphoblastiques
de type Burkitt).
Les leucémies indifférenciées sont rares mais
souvent traitées comme les leucémies aiguës lymphoblastiques.
Dans environ 25 % des cas de leucémies aiguës lymphoblastiques
de l’adulte, les lymphoblastes expriment à la fois des antigènes lymphoïdes et myéloïdes.
D’importants progrès ont été faits ces 20
dernières années sur le plan de la détermination de critères
diagnostiques et de critères pronostiques pour ce type de leucémies.
Le diagnostic de leucémie aiguë lymphoblastique ne peut plus
reposer aujourd’hui sur les seules caractéristiques morphologiques
et cytochimiques, mais doit inclure les éléments du phénotype
immunologique des cellules leucémiques.
Actuellement, une
classification, basée sur des données immunophénotypiques et
cytogénétiques ainsi que sur des données de la biologie moléculaire,
est nécessaire pour la détermination du traitement optimal.
En effet,
les leucémies aiguës lymphoblastiques regroupent un certain
nombre d’entités distinctes.
On estime actuellement que 70 à 90 %
des adultes présentant une leucémie aiguë lymphoblastique
obtiennent une rémission complète et que 25 à 50 % ont une survie
longue sans maladie.
L’utilisation de traitements adaptés aux
différents types de leucémies aiguës lymphoblastiques a permis
l’amélioration significative des résultats.
Cependant, de nombreuses
questions restent posées. Ainsi, la durée optimale des traitements
reste à déterminer.
Le rôle des greffes de cellules souches
hématopoïétiques (allogreffe ou autogreffe) en première
rémission complète, en fonction du type de malades (leucémies à
risque standard ou leucémies à haut risque), est en cours
d’investigation.
Facteurs pronostiques
dans les leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte
:
Plusieurs facteurs cliniques et biologiques ont une influence sur les
taux de rémission complète, la durée de rémission et les taux de
survie.
A - ÂGE
:
L’âge est le facteur pronostique le plus important dans les leucémies
aiguës lymphoblastiques de l’adulte en termes d’obtention de
rémission complète.
La durée de rémission, de même que la
survie globale, diminue avec l’augmentation de l’âge des patients.
Chez l’adolescent, les taux de rémission complète sont autour de
95 % et les survies longues sans maladie de l’ordre de 65 %.
Des
résultats identiques ont été retrouvés chez l’adulte de moins de
30 ans en l’absence d’autres facteurs de risque.
La survie diminue
progressivement avec l’augmentation de l’âge pour atteindre des
taux de survie de moins de 10 % chez les patients de plus de
60 ans.
Ce mauvais pronostic chez les sujets âgés peut avoir
plusieurs causes.
Il peut être lié, d’une part au nombre plus
important de facteurs de risques dans la population âgée, dont
essentiellement la présence d’une translocation t(9 ; 22), et d’autre
part à une plus mauvaise tolérance de la chimiothérapie avec
augmentation de la toxicité hématologique et non hématologique.
Enfin, il peut aussi être envisagé des différences dans la
pharmacologie des agents utilisés en chimiothérapie, ainsi qu’une
plus forte expression de la protéine de membrane p170 associée aux
mécanismes de résistance multiple aux chimiothérapies (multidrug
resistance, MDR).
B - PHÉNOTYPE IMMUNOLOGIQUE :
Le phénotype immunologique est considéré comme un facteur
pronostique indépendant.
La valeur pronostique du phénotype
immunologique s’est modifiée avec les améliorations technologiques
et l’évolution des traitements.
La plupart des essais actuels tiennent
compte du phénotype immunologique pour déterminer le schéma
thérapeutique à administrer.
1- Leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T
:
Ce type de leucémie aiguë lymphoblastique est généralement associé
au sexe masculin (73 %), à une hyperleucocytose supérieure à
30 G/L (62 %), à une masse tumorale médiastinale (50 %), de même
qu’à un envahissement du système nerveux central (15 %).
Les
leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T, classiquement
connues pour leur évolution défavorable, ont vu leur pronostic
s’améliorer considérablement ces dernières années avec l’obtention
de taux de rémission de l’ordre de 80 % et de taux de survie longue
sans maladie de l’ordre de 45 %, voire plus.
Cette
amélioration du pronostic des leucémies aiguës lymphoblastiques
de la lignée T, qui aujourd’hui répondent mieux à la chimiothérapie
que les leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée B, semble
être liée à une modification des thérapeutiques et en particulier à
l’introduction du cyclophosphamide et de la cytarabine dans les
protocoles de chimiothérapie au côté de drogues plus
conventionnelles.
La translocation t(9 ; 22) est également rarissime
dans ce type immunologique.
La relation entre le pronostic et le
stade de différenciation T reste controversée.
La forme précoce pré-T
garde un plus mauvais pronostic que la forme plus mature, ce qui
semble lié à une plus forte expression de MDR.
L’expression du
marqueur T CD3 est souvent liée à un mauvais pronostic.
En
revanche, l’expression du CD10 (endopeptidase neutre 24.11 ou
antigène CALLA) semble conférer de meilleurs résultats pour les
leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T pourvues de cet
antigène.
2- Leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée B
:
Elles sont généralement classées en accord avec le stade de
différenciation.
On distingue les leucémies aiguës lymphoblastiques
pré-pré-B, les leucémies aiguës lymphoblastiques communes, les
leucémies aiguës lymphoblastiques pré–B et les leucémies aiguës
lymphoblastiques B matures.
Les leucémies aiguës lymphoblastiques pré-pré-B sont généralement
associées à un mauvais pronostic.
Cependant, leur pronostic s’est
récemment amélioré avec l’utilisation de traitements plus intensifs
permettant l’obtention de taux de survie de plus de 40 % à 4 ans.
Un tiers de ces patients présentent une translocation t(4 ; 11).
Les leucémies aiguës lymphoblastiques communes représentent le
type le plus fréquent de leucémie aiguë lymphoblastique de l’adulte
(55 %).
Les résultats n’ont pas beaucoup évolué au cours de ces
dernières années et le taux de survie reste autour de 30 %.
Ceci
s’explique en partie par le fait que l’on trouve dans 45 % de ces cas
une translocation t(9 ; 22) ou un transcrit BCR-ABL.
Les leucémies aiguës lymphoblastiques B matures, de type Burkitt,
sont fréquemment associées au sexe masculin (83 %), à la présence
d’adénopathies (77 %), à un âge inférieur à 35 ans (66 %), à une
masse tumorale médiastinale (3 %), à un envahissement du système
nerveux central (9 %), de même qu’à la présence de localisations
abdominales et rénales.
Elles représentent des formes
frontières avec les lymphomes correspondants.
Classiquement, le
taux de rémission est bas et les durées de rémission et de survie
sont courtes.
L’application de protocoles de traitement, initialement
développés chez l’enfant dans le lymphome de Burkitt, faisant appel
à de fortes doses de cyclophosphamide, de méthotrexate et de
cytarabine, a cependant permis d’améliorer considérablement les
résultats chez l’adulte, avec actuellement l’obtention de taux de
rémission de l’ordre de 77 % et de taux de survie sans leucémie de
l’ordre de 58 %.
La survenue de rechutes presque exclusivement
pendant la première année suivant l’obtention de la rémission
complète a eu pour conséquence la disparition du traitement
d’entretien dans ce type de leucémie.
3- Leucémies aiguës lymphoblastiques associées
à des antigènes myéloïdes
:
Des antigènes myéloïdes sont détectés sur environ 20 % des cellules
leucémiques dans les leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte.
Cette expression d’antigènes myéloïdes est classiquement associée à
un mauvais pronostic.
Cependant, des études récentes n’ont pas
montré de différence de pronostic par rapport aux leucémies aiguës lymphoblastiques n’exprimant pas de marqueur myéloïde.
Ceci
semble être lié à l’utilisation de traitements d’induction plus
intensifs.
Les vraies leucémies biphénotypiques avec deux
populations leucémiques distinctes lymphoïdes et myéloïdes
gardent toujours un mauvais pronostic.
L’expression de CD34 par
les cellules leucémiques a été corrélée à un pronostic défavorable.
C - LEUCOCYTOSE INITIALE :
L’élévation de la leucocytose est un facteur de mauvais pronostic
(sauf pour les leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T).
La
présence d’une hyperleucocytose au diagnostic est généralement
associée à de plus faibles taux de rémission complète.
Un
pourcentage élevé de cellules leucémiques circulantes confère
également un mauvais pronostic.
Bien qu’il y ait une relation directe
entre le nombre de globules blancs et le pourcentage de
lymphoblastes circulants, ces deux facteurs semblent avoir une
valeur pronostique indépendante.
Il semble que, chez les malades
présentant initialement un pourcentage élevé de cellules
leucémiques circulantes, l’administration avant le traitement
d’induction proprement dit de vincristine et de prednisone, ou
encore d’autres agents cytotoxiques capables de réduire la masse
tumorale, permette d’éliminer l’effet négatif de l’hyperleucocytose
sur le taux de rémission complète.
En revanche, l’hyperleucocytose
garde toujours un effet pronostique défavorable sur la durée de
rémission et sur la durée de survie.
Un nombre de globules blancs
entre 25 et 30 G/L représente le seuil le plus approprié pour une
stratification en leucémie aiguë lymphoblastique à risque standard
et leucémie aiguë lymphoblastique à haut risque.
Un taux de globules blancs supérieur ou égal à 100 G/L est définitivement
considéré comme un facteur de mauvais pronostic.
La valeur
pronostique de ce facteur est particulièrement importante pour les
leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée B, où les taux de
rémissions longues après traitement par une chimiothérapie
standard sont faibles en cas d’hyperleucocytose initiale.
En revanche,
un chiffre initial élevé de globules blancs dans les leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T ne semble pas être un facteur de
pronostic péjoratif.
D - RÉPONSE AU TRAITEMENT :
La rapidité de réponse au traitement est considérée comme un
facteur de bon pronostic.
La présence de cellules leucémiques
résiduelles dans le sang au huitième jour suivant le début de la
chimiothérapie d’induction (j8) ou dans la moelle de j14 est liée à un
plus faible taux de rémission complète et à une plus forte probabilité
de rechute.
Les leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte qui
n’entrent pas en rémission complète dans les 4 à 5 semaines suivant
le début du traitement évoluent défavorablement.
La plus courte
survie sans maladie observée chez les malades obtenant plus
lentement une rémission complète peut s’expliquer par la
persistance d’une population cellulaire blastique plus résistante et
par le fait que ces malades reçoivent moins de traitements de
consolidation du fait de la longueur de la période d’induction.
E - CYTOGÉNÉTIQUE ET BIOLOGIE MOLÉCULAIRE :
Il est maintenant possible (grâce à la détermination du caryotype, à
la biologie moléculaire et aux techniques d’hybridation in situ) de
caractériser différents types de leucémies aiguës lymphoblastiques
sur des éléments distinctifs génétiques.
Ces sous-groupes présentent
d’importantes différences en ce qui concerne leur réponse à des
traitements spécifiques.
Les plus fréquents de ces sous-groupes sont
ceux constitués par les leucémies aiguës lymphoblastiques
présentant une translocation t(9 ; 22), une translocation t(4 ; 11), une
translocation t(8 ; 14) ou l’un de ses variants [translocation t(2 ; 8) ou
translocation t(8 ; 22)].
Les anomalies chromosomiques sont corrélées
avec le pronostic de la leucémie aiguë lymphoblastique
indépendamment des autres caractéristiques de la maladie.
Il peut
s’agir d’anomalies numériques ou d’anomalies de structure.
Les
anomalies numériques (hyperdiploïdie et hypodiploïdie) sont moins
fréquentes chez l’adulte que chez l’enfant et n’ont donc pas la valeur
pronostique trouvée chez l’enfant.
En règle générale, les adultes
présentant une leucémie avec un caryotype normal ont une
meilleure survie que ceux porteurs d’anomalies caryotypiques.
1- Leucémies aiguës lymphoblastiques avec chromosome
Philadelphie
:
Les leucémies aiguës lymphoblastiques avec translocation t(9 ; 22),
dite encore à chromosome Philadelphie (Ph+), ou avec transcrit
BCR/ABL, sont les formes ayant le plus mauvais pronostic.
Il s’agit
généralement de leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée B.
Elles représentent 9 à 33% des leucémies aiguës lymphoblastiques
de l’adulte et leur incidence augmente avec l’âge.
Le
mauvais pronostic semble indépendant de l’âge et du nombre initial
de globules blancs.
L’association à une hyperdiploïdie supérieure
à 50 chromosomes, de même que l’absence d’anomalies
chromosomiques supplémentaires (monosomie 7, anomalies du bras
court du chromosome 9) sont considérées comme de meilleur
pronostic.
Il ne semble pas exister de différence sur le plan
pronostique selon le point de cassure chromosomique, qu’il
aboutisse à un transcrit BCR/ABL p190 ou BCR/ABL p210.
Aucun
progrès convaincant dans ce sous-groupe de leucémies n’a été réalisé
durant ces dernières années.
2- Leucémies aiguës lymphoblastiques
avec translocation t(4 ; 11)
:
Autrefois considérées comme de très mauvais pronostic, ces
leucémies aiguës lymphoblastiques semblent avoir beaucoup
bénéficié de l’amélioration des modalités thérapeutiques.
L’anomalie
moléculaire implique le gène MLL sur le chromosome 11q23,
conduisant à une fusion génique MLL/AF4.
Ces leucémies
représentent de 3 à 6% des leucémies aiguës lymphoblastiques de
l’adulte. Leur phénotype est pré-pré-B dans 71 % des cas.
Elles sont
fréquemment associées au sexe féminin (60 %), à une
hyperleucocytose initiale, à un âge supérieur à 50 ans et à une coexpression d’antigènes myéloïdes.
3- Leucémies aiguës lymphoblastiques
avec translocation t(8 ; 14)
:
Cette translocation [de même que les translocations apparentées t(2 ;
8) et t(8 ; 22)] conduit à la surexpression du proto-oncogène MYC.
Ces leucémies aiguës lymphoblastiques de type Burkitt représentent
moins de 5 % des leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte.
Elles correspondent morphologiquement aux leucémies aiguës
lymphoblastiques-3 de la classification internationale FAB (French-American-British) et phénotypiquement à des leucémies aiguës
lymphoblastiques B matures. Il existe une prédominance masculine
(78 %).
L’âge médian se situe, chez l’adulte, autour de 35 ans avec
une faible proportion d’adolescents entre 15 et 20 ans (9 %) et une
forte proportion de malades de plus de 50 ans (28 %).
Un
envahissement méningé est observé dans environ 30 % des cas au
diagnostic.
L’envahissement méningé, l’élévation du taux initial de lacticodéshydrogénase (LDH), un âge élevé au diagnostic sont des
facteurs d’impact pronostique négatif.
Ces leucémies ont perdu leur
classique mauvais pronostic depuis l’amélioration des traitements
dans ce type de leucémie.
F - ENVAHISSEMENT EXTRAMÉDULLAIRE :
L’envahissement d’organes extramédullaires (hépatomégalie,
splénomégalie, envahissement du système nerveux central, masse
médiastinale) s’accompagne d’une baisse des taux de rémission ainsi
que d’une diminution de la durée de rémission.
L’envahissement
du système nerveux central, qui représente 7 à 10% des cas de
leucémie aiguë lymphoblastique, n’est cependant pas reconnu par
tous comme ayant une valeur pronostique.
La présence d’une masse
tumorale médiastinale généralement associée à une leucémie aiguë
lymphoblastique de la lignée T n’a pas d’influence sur le taux de
rémission complète et la durée de rémission complète.
Ces résultats
semblent liés à l’amélioration du pronostic des leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T grâce aux thérapeutiques récentes.
G - RÉSISTANCE MULTIPLE AUX CHIMIOTHÉRAPIES :
L’expression du phénotype de MDR, associé à la glycoprotéine
gp170, confère également aux leucémies aiguës lymphoblastiques un
mauvais pronostic.
Dix à 15 % de ces leucémies expriment MDR au
diagnostic.
Les leucémies aiguës lymphoblastiques MDR+ au
diagnostic ont un plus faible taux de rémission complète, des
rechutes plus fréquentes et des survies plus courtes que les
leucémies MDR-.
H - EXPRESSION DE BCL-2
:
Bcl-2 est un oncogène impliqué dans la régulation de la mort
cellulaire programmée ou apoptôse. Une surexpression de Bcl-2 a
été démontrée dans tous les types de leucémies aiguës
lymphoblastiques (sauf pour les leucémies aiguës lymphoblastiques
de type Burkitt).
Cette surexpression de Bcl-2 n’est cependant pas
associée à un plus mauvais pronostic.
Modèles pronostiques :
Le développement de nouvelles techniques cliniques et biologiques,
capables de caractériser des facteurs pronostiques et ainsi de mieux
identifier les différentes catégories de leucémies aiguës lymphoblastiques, est important sur le plan stratégique pour
améliorer les résultats des traitements.
Les facteurs pronostiques
permettent de définir différents types de leucémies aiguës lymphoblastiques pour lesquelles une approche thérapeutique
stratifiée sur le risque évolutif peut être définie.
L’établissement de
groupes de risques dans les leucémies aiguës lymphoblastiques de
l’adulte repose sur un certain nombre de paramètres mesurés au
moment du diagnostic.
Les principaux paramètres sont : l’âge, le
phénotype immunologique, le caryotype, le nombre de globules
blancs et des caractéristiques cliniques.
Ces facteurs sont prédictifs
pour l’obtention de la rémission complète et pour la durée de cette
rémission.
Ces facteurs pronostiques sont néanmoins dépendants du
traitement utilisé et ne peuvent donc être extrapolés d’une étude à
une autre.
Plusieurs modèles pronostiques ont été proposés chez
l’adulte.
La plupart des essais thérapeutiques actuels
tendent à regrouper les leucémies aiguës lymphoblastiques en
leucémies à risque standard et leucémies à haut risque afin d’utiliser
des thérapeutiques plus conservatrices pour le premier groupe et
des traitements plus agressifs pour le second, basés sur une
intensification de la chimiothérapie et le recours à des greffes de
cellules souches (allogreffe ou autogreffe).
Les leucémies à haut
risque regroupent la grande majorité des cas de leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte.
Les facteurs à haut risque le plus
classiquement reconnus sont ceux définis par le groupe allemand.
Ceux-ci comprennent : un nombre de globules blancs au diagnostic
supérieur à 30 G/L, un âge supérieur à 35 ans, un temps d’obtention
de la rémission complète supérieur à 4 semaines, l’expression de
phénotypes immunologiques immatures pré-B et pré-T, enfin la
présence de translocations t(9 ; 22) et t(4 ; 11) ou de leurs transcrits
de fusion moléculaire correspondants BCR-ABL et HRX-4F4.
Traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte
:
A - CHIMIOTHÉRAPIE :
La chimiothérapie des leucémies aiguës lymphoblastiques comprend
différentes phases.
La première phase est la phase d’induction dont
le but est d’obtenir une rémission complète, correspondant à
l’obtention d’un myélogramme normocellulaire contenant moins de
5 % de cellules blastiques, associée à l’absence d’infiltration cellulaire
leucémique patente extramédullaire et à une numération-formule
sanguine normale.
Suite à cette phase d’induction, le traitement
comprend une phase d’intensification ou consolidation et/ou une
phase d’entretien.
À ces différentes phases s’ajoute un traitement
prophylactique du système nerveux central.
1- Chimiothérapie d’induction :
Au cours de la dernière décennie, l’intensification des traitements
d’induction a permis d’obtenir une amélioration significative des
taux de rémission complète, avec des taux de l’ordre de 80 % pour
la plupart des études multicentriques.
Cette amélioration constitue
une étape importante pour l’amélioration de la survie globale des
adultes atteints de leucémie aiguë lymphoblastique.
Le traitement
d’induction standard des leucémies aiguës lymphoblastiques
consiste en une association de plusieurs produits.
L’association de
vincristine, de prednisone, d’asparaginase et d’une anthracycline
(généralement daunorubicine) reste la base du traitement à laquelle
peuvent être associés d’autres produits.
Cette chimiothérapie
d’induction est administrée de façon séquentielle sur 4 à 8 semaines.
L’association uniquement de vincristine et de prednisone permet l’obtention de taux de rémission complète de
l’ordre de 36 à 67 %, mais avec des médianes de durée de rémission
seulement de 3 à 7 mois.
L’addition d’une anthracycline augmente
le taux de rémission complète à 70 à 85 %.
L’utilisation de plus
fortes doses d’anthracyclines lors de la phase d’induction serait
bénéfique pour les leucémies aiguës lymphoblastiques
communes.
L’asparaginase ne semble pas affecter le taux de
rémission complète mais semble, en revanche, améliorer la survie
sans maladie et fait partie du traitement de consolidation si elle
n’est pas utilisée en induction.
À ces agents cytotoxiques classiques
ont été ajoutés, suivant les protocoles, du cyclophosphamide et de
la cytarabine.
Ceux-ci ne semblent pas améliorer les taux
globaux de rémission complète mais améliorent la qualité de la
rémission.
Ces deux produits sont particulièrement utiles en
traitement de certains types de leucémie comme les leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T.
Il a récemment été proposé de faire suivre l’induction standard par
l’administration de fortes doses de cytarabine (1 à 3 g/m²
généralement pour un total de 12 doses).
Le but d’un tel
traitement n’est pas seulement d’améliorer le taux de rémission
complète mais aussi d’augmenter la qualité de la rémission en
allongeant la survie sans maladie.
Chez l’adulte, environ 15 à 20 % des leucémies aiguës lymphoblastiques ne sont pas mises en rémission complète après le
traitement d’induction.
Moins de 10 % des patients meurent durant
la période d’induction.
Cette mortalité est dépendante de l’âge et a
pour principale cause des infections sévères, principalement
fongiques (deux tiers des cas), en raison de la conjonction d’une
neutropénie sévère et d’une corticothérapie prolongée.
Les malades
réfractaires au traitement d’induction sont des candidats pour une
greffe de moelle osseuse immédiate si ceci est possible.
L’utilisation de facteurs de croissance hématopoïétiques tels que le granulocyte-colony stimulating factor (G-CSF) et le granulocytemacrophage-colony stimulating factor (GM-CSF) permet de réduire
l’incidence et la durée des épisodes fébriles liés à la neutropénie, de
même que les infections sévères, ce qui a pour conséquence une
diminution du pourcentage de décès en induction, surtout chez les
sujets âgés.
L’utilisation de ces facteurs semble associée aussi, dans
certaines études, à l’obtention de meilleurs taux de rémission
complète.
L’avantage de leur utilisation est particulièrement évident
pour les leucémies à haut risque, mais l’est moins pour les leucémies
aiguës lymphoblastiques à risque standard.
2- Traitement de consolidation :
Le traitement de consolidation fait appel à de fortes doses de
chimiothérapie, à l’utilisation de nouveaux agents, ou encore à la réadministration du traitement d’induction.
Son but est d’éliminer les cellules leucémiques résiduelles afin de prévenir une rechute et
l’émergence de cellules résistantes.
Les schémas d’intensification
incluent des produits tels que l’étoposide, l’amsacrine, la
mitoxantrone, l’idarubicine, la cytarabine à fortes doses, le
méthotrexate à fortes doses ou à doses intermédiaires.
Bien que les
cures de consolidation soient généralement utilisées dans la plupart
des protocoles thérapeutiques de leucémie aiguë lymphoblastique
chez l’adulte, les essais randomisés n’ont pour l’instant pas
démontré un avantage significatif en faveur d’un traitement de
consolidation particulier.
Une étude récente est cependant favorable
au traitement d’intensification.
Les protocoles de traitement n’ont,
par ailleurs, pas montré de supériorité pour l’association d’un
traitement de consolidation et d’un traitement d’entretien par
rapport à un traitement d’entretien conventionnel seul.
L’intérêt de l’utilisation de fortes doses de chimiothérapie tient
principalement dans la prévention de l’apparition des cellules
leucémiques résistantes et dans l’obtention de taux thérapeutiques
dans le liquide céphalorachidien.
Les produits utilisés à fortes doses
sont principalement la cytarabine et le méthotrexate.
Les doses fortes
de cytarabine ont été utilisées dans plusieurs essais thérapeutiques,
aussi bien en phase uniquement de consolidation qu’à la fois en
phases d’induction et de consolidation.
L’apport d’un
traitement par fortes doses de cytarabine en fonction des sousgroupes
de leucémies aiguës lymphoblastiques n’est pour l’instant
pas déterminé.
Cependant, des résultats récents très encourageants
ont été obtenus concernant la survie sans maladie pour des
leucémies B matures et les leucémies de la lignée T, dont les
lymphoblastes semblent particulièrement sensibles à la cytarabine.
Il semble également exister une tendance à l’amélioration des
résultats pour les leucémies aiguës lymphoblastiques Ph+.
Un
autre argument important pour son utilisation est son efficacité dans
le traitement des leucémies avec envahissement du système nerveux
central.
L’utilisation de fortes doses de méthotrexate a été étudiée
surtout chez l’enfant, mais encore peu sur l’adulte.
Les meilleurs
résultats obtenus chez l’adulte sont dans des essais où le méthotrexate à fortes doses fait partie d’un protocole de
consolidation combinant plusieurs produits.
L’utilisation
des fortes doses de méthotrexate a incontestablement amélioré les
résultats des traitements pour les leucémies B matures.
L’alternance de cures avec cytarabine à fortes doses et avec
méthotrexate à fortes doses durant la phase de consolidation semble
particulièrement intéressante et semble pouvoir améliorer les
résultats globaux.
L’irradiation du médiastin, après une réduction tumorale initiale par
la chimiothérapie, réalisée, soit après disparition complète de la
masse initiale, soit sur une masse résiduelle, semble être bénéfique
pour les malades avec une leucémie de la lignée T.
Cependant,
ces données n’ont pas été confirmées par plusieurs études.
3- Traitement d’entretien :
La durée optimale ainsi que le schéma idéal du traitement
d’entretien dans les leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte
n’ont pas été précisément établis.
Le but d’un traitement d’entretien
est d’éliminer la maladie résiduelle.
La tendance actuelle est de
privilégier des traitements d’entretien de longueur variant entre
18 et 30 mois.
Le schéma standard est basé sur une association de
6-mercaptopurine et de méthotrexate.
Certains protocoles
ont utilisé cette association dans des chimiothérapies d’entretien
intensives incluant également, par exemple, du méthotrexate à fortes
doses, de la daunorubicine et de la prednisone ou encore de la
vincristine, de la prednisone, de la doxorubicine, de l’actinomycine
D, du cyclophosphamide et de la carmustine.
Dans d’autres
protocoles, le traitement d’entretien par 6-mercaptopurine et méthotrexate a été renforcé par des cures de chimiothérapie
d’intensification tous les mois ou tous les 2 mois.
Les traitements
d’entretien moins intensifs mais prolongés sur 5 à 6 ans n’ont pas
montré d’avantage par rapport aux traitements plus brefs.
Des essais
randomisés comparant traitement intensif et traitement
conventionnel d’entretien n’ont pas montré de différence.
En
revanche, les résultats sont inférieurs pour les protocoles ne faisant
pas appel à un traitement d’entretien mais se contentant d’une
induction et d’un traitement de consolidation.
Le traitement
d’entretien par 6-mercaptopurine et méthotrexate n’est pas
nécessaire dans le traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques
B matures (leucémies de type Burkitt).
4- Prophylaxie du système nerveux central :
L’atteinte du système nerveux central survient dans environ 6 % des
cas avec une plus forte incidence dans les leucémies aiguës lymphoblastiques de la lignée T et les leucémies aiguës
lymphoblastiques B matures (respectivement 8 et 13 %).
Chez
l’adulte, les facteurs de risque pour un envahissement méningé sont
le phénotype B mature, des taux élevés de LDH au diagnostic et un
index de prolifération cellulaire élevé.
Le traitement
prophylactique a permis une baisse significative de l’incidence des
rechutes au niveau du système nerveux central.
Les leucémies aiguës lymphoblastiques de l’adulte sans envahissement méningé ne
recevant pas de traitement prophylactique ont un taux de rechute
au niveau du système nerveux central de l’ordre de 30 %.
Une étude
randomisée, qui comparait l’association d’une irradiation
encéphalique et d’injections intrathécales de méthotrexate à
l’absence de prophylaxie neuroméningée, a montré l’augmentation
des taux de rechute méningée de 20 à 45 % en l’absence de
prophylaxie.
Le traitement prophylactique repose généralement
sur des injections intrathécales de méthotrexate seul ou associé à de
la cytarabine et/ou à de l’acétate de méthylprednisolone, une
irradiation du crâne et (ou) un traitement systémique par de la
cytarabine ou du méthotrexate à fortes doses.
Ce traitement
prophylactique peut parfois être responsable d’une neurotoxicité
aiguë ou chronique, de même que de certains effets secondaires tels
que des réactions fébriles, une arachnoïdite, une leucoencéphalopathie.
Ces effets secondaires sont surtout observés chez
l’enfant, mais peuvent également se voir de façon moins marquée
chez l’adulte.
L’utilisation d’une chimiothérapie intrathécale seule
permet de réduire le taux de rechute au niveau du système nerveux
central à environ 13 %.
L’association à une irradiation du système
nerveux central prophylactique (24 Gy) permet de réduire ce taux
de rechute à 9 %.
L’utilisation isolée de fortes doses de
chimiothérapie par voie intraveineuse pour prévenir les rechutes
méningées semble moins efficace.
En revanche, son association à une
prophylaxie intrathécale et à une irradiation encéphalique semble
donner les résultats les plus intéressants avec un taux de rechute de
seulement 2 %.
Les malades avec un envahissement du système nerveux central
doivent recevoir un traitement plus agressif, pouvant comprendre
une irradiation cérébrale et des injections intrathécales de
méthotrexate et de cytarabine deux fois par semaine jusqu’à
normalisation du liquide céphalorachidien, puis toutes les semaines
pendant 1 à 2 mois, puis tous les mois pendant 2 ans.
B - ALLOGREFFE DE CELLULES SOUCHES MÉDULLAIRES :
La greffe de moelle osseuse est l’une des stratégies thérapeutiques
permettant l’éradication de la maladie résiduelle après obtention
d’une rémission complète dans les leucémies aiguës
lymphoblastiques.
Elle remplace généralement le traitement de
consolidation ainsi que le traitement d’entretien.
1- Greffe de moelle osseuse à partir de donneurs
familiaux identiques :
La survie sans maladie après allogreffe de moelle osseuse est de
l’ordre de 50 % pour les adultes en première rémission complète.
Ces taux sont donc supérieurs à ceux obtenus avec la
chimiothérapie seule ou avec l’autogreffe. Les variations
importantes d’une série à l’autre (21 à 71 %) tiennent à la sélection
des patients.
Le taux de rechute et la mortalité liée au traitement
sont tous deux de l’ordre de 30 %.
L’âge reste un facteur de risque pour la mortalité liée au traitement
et l’incidence des rechutes avec, en dessous de 40 ans, des taux de
l’ordre de 30 % contre 40 % chez les sujets plus âgés.
Le risque de
rechute peut être réduit en cas de maladie du greffon contre l’hôte
limitée, alors qu’il est plus important dans les cas sans maladie de
greffon ou avec une maladie du greffon extensive.
Ceci est
probablement lié à l’immunothérapie active (effet antileucémique du
greffon).
La comparaison en intention de traitement, suivant la disponibilité
ou non d’un donneur human leukocyte antigen (HLA) identique dans
la fratrie chez l’adulte de moins de 40 ans, montre 45 % de survie
sans maladie à 5 ans avec l’allogreffe en première rémission contre
seulement 31 % avec chimiothérapie conventionnelle.
L’allogreffe
est particulièrement bénéfique pour les leucémies aiguës lymphoblastiques à haut risque (leucémies aiguës lymphoblastiques
Ph+, leucémies aiguës lymphoblastiques indifférenciées, âge
> 35 ans, globules blancs initiaux > 30 G/L, ou obtention de la
rémission > 4 semaines) avec une survie sans maladie à 5 ans de
39 % contre 14 % avec les autres traitements.
Pour les leucémies
aiguës lymphoblastiques à risque standard, la différence n’est pas
significative puisque les taux de survie à 5 ans sont respectivement
de 48 et 43 %.
Ainsi, actuellement, il semble que dans le groupe à
risque standard, dont le taux de survie sans maladie avoisine 50 %
après chimiothérapie, la greffe puisse être différée jusqu’à la rechute
éventuelle.
Pour les leucémies aiguës lymphoblastiques du
groupe à haut risque, l’allogreffe en première rémission est le
traitement de choix.
Pour les malades réfractaires ou en rechute, ou en seconde rémission
complète, l’allogreffe de moelle représente aussi le traitement de
choix.
Chez les malades réfractaires ou en rechute, le taux de survie
sans maladie à 3 ans se situe entre 10 et 20 %.
En seconde rémission
complète, la survie à long terme sans maladie peut être estimée
suivant les études entre 15 et 45 %.
Ces résultats sont supérieurs
à ceux obtenus uniquement avec de la chimiothérapie, où les taux
de survie à 5 ans sont entre 5 et 10 %.
2- Greffe à partir d’un donneur non apparenté
:
Seulement un tiers des candidats à une greffe de moelle ont un
donneur familial génétiquement identique pour le groupe HLA.
Aussi, afin d’augmenter les possibilités de greffe, des greffes à partir
d’un donneur compatible non familial (greffes phéno-identiques) ou
d’un donneur non familial présentant une disparité mineure ont été
essayées.
Ces méthodes sont associées à un faible taux de rechute,
vraisemblablement lié à la réaction antileucémique du greffon.
En
revanche, il existe un taux élevé de mortalité liée à la toxicité du
traitement.
Les résultats sont cependant prometteurs, avec des taux
de survie sans maladie, des taux de mortalité liée au traitement et
des taux de rechute respectivement de 39 %, 48 % et 22 % chez les
patients en deuxième rémission ou en rémission ultérieure chez les
sujets jeunes.
En seconde rémission complète, les résultats
obtenus avec l’allogreffe à partir d’un donneur non apparenté sont
meilleurs que ceux de l’autogreffe.
Ces résultats suggèrent que
l’allogreffe non apparentée pourrait, en cas de leucémie à haut
risque, être indiquée en première rémission en l’absence de donneur
dans la fratrie.
C - AUTOGREFFE DE CELLULES SOUCHES
HÉMATOPOÏÉTIQUES :
Il s’agit d’une alternative thérapeutique qui peut être utilisée chez
l’adulte jeune comme chez le sujet plus âgé.
Les cellules souches
hématopoïétiques peuvent être d’origine médullaire.
Elles peuvent
aussi, et c’est aujourd’hui la méthode de référence, être recueillies
dans le sang circulant par cytophérèse, après recrutement par
administration d’un facteur de croissance hématopoïétique.
L’autogreffe entraîne une faible mortalité liée au traitement (de
l’ordre de 5 %).
Le principal inconvénient est le taux important de
rechutes (de l’ordre de 50 %) probablement liées à la réinjection de
cellules leucémiques, mais aussi à l’absence d’effet immunologique
lié au greffon.
Des essais de purge par des agents physiques,
chimiothérapiques ou immunologiques (anticorps monoclonaux) ont
été réalisés dans le but de réduire les cellules leucémiques
résiduelles et ont permis une réduction de la masse tumorale de
2-log dans des leucémies aiguës lymphoblastiques à chromosome
Philadelphie ou BCR-ABL+.
En première rémission, le taux de survie sans maladie après autogreffe
de moelle est de l’ordre de 40 %, ce qui semble inférieur aux
résultats obtenus avec l’allogreffe, mais meilleur que les résultats de
la chimiothérapie.
Cependant, deux études incluant un nombre
important de malades et comparant autogreffe et chimiothérapie
conventionnelle n’ont pu montrer un avantage significatif en faveur
de l’autogreffe.
Il est néanmoins à noter que les rechutes
tardives (après 3 ans de rémission) sont moins fréquentes après
autogreffe.
Ces données suggèrent que l’autogreffe n’est pas plus
efficace que la chimiothérapie conventionnelle mais peut permettre
d’atteindre un plateau après 3 ans de survie sans maladie.
À un stade plus avancé de la maladie, les résultats de l’autogreffe sont
bien inférieurs à ceux de la greffe en première rémission avec
seulement 20 à 30 % de survie prolongée sans maladie.
Les meilleurs
résultats sont obtenus chez les malades ayant eu une durée de
première rémission complète de plus de 1 an.
L’administration d’un
traitement d’entretien après autogreffe peut contribuer à réduire le
taux de rechute.
De meilleurs résultats peuvent être attendus avec
les autogreffes de cellules souches périphériques.
Non seulement
elles permettent une reconstitution hématologique rapide, mais il
semble que le nombre de cellules tumorales résiduelles contaminant
le greffon soit plus faible, comme ceci a été mis en évidence chez les
malades atteints de leucémie aiguë lymphoblastique à chromosome
Philadelphie.
D - INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES PARTICULIÈRES :
1- Traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques
Ph+ ou BCR/ABL+
:
Le taux de rémission complète des leucémies aiguës lymphoblastiques Ph+ varie de 44 à 76 % suivant les études, avec
une médiane de durée de rémission complète de l’ordre de 5 à
11 mois et une survie globale entre 3 et 5 ans allant de 0 à 16%.
L’utilisation d’interféron alpha, initialement décrite
comme encourageante, n’a pas tenu ses promesses, de même que
l’association d’interféron alpha et d’interleukine 2 après autogreffe
de moelle osseuse.
La seule possibilité de guérison, en cas de
leucémie aiguë lymphoblastique à chromosome Philadelphie ou
BCR/ABL+, reste la greffe de cellules souches hématopoïétiques :
des taux de survie de l’ordre de 40 % ont été rapportés après
allogreffe à partir d’un donneur apparenté ou non apparenté et
de l’ordre de 20 à 30 % après autogreffe en première rémission
complète.
Dans ces formes à très haut risque, il est licite de
proposer, en l’absence d’un donneur familial HLA-compatible, une
greffe de moelle non apparentée chez les sujets jeunes, alors que les
sujets plus âgés pourront recevoir une autogreffe de moelle ou de
cellules souches périphériques.
Compte tenu du fait que les
leucémies aiguës lymphoblastiques Ph+ sont fréquentes après
50 ans, de nouvelles stratégies thérapeutiques doivent aussi être
développées dans ce type de leucémie.
On peut citer les
« minigreffes », précédées d’un conditionnement atténué et suivies
d’une immunothérapie, ou encore les traitements ciblés sur les
produits du gène de fusion BCR/ABL, comme les molécules
antisens ou les inhibiteurs spécifiques de la tyrosine kinase.
2- Traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques
avec t(4 ; 11)
:
Les résultats thérapeutiques ont été améliorés par l’introduction de
traitements d’intensification, utilisant notamment une association de mitoxantrone et de fortes doses de cytarabine, permettant l’obtention
de taux de survie sans maladie à 8 ans de 48 à 58 %.
L’âge
représente le principal facteur pronostique : le taux de survie n’est
plus que de 24 % au-delà de 50 ans.
L’allogreffe de moelle en
première rémission complète donne plus de 60 % de longues survies,
faisant proposer systématiquement ce traitement en cas de donneur
HLA identique.
3- Traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques
de type Burkitt :
L’identification des leucémies aiguës lymphoblastiques de type
Burkitt est capitale car ces malades doivent bénéficier d’un
programme thérapeutique intensif et court qui diffère
considérablement des schémas thérapeutiques utilisés dans les
autres types de leucémie aiguë lymphoblastique.
Le traitement
actuel repose sur des schémas thérapeutiques utilisés initialement
avec succès chez l’enfant et faisant appel au cyclophosphamide et
au méthotrexate à fortes doses, auxquels ont été associées par la
suite de la vincristine, une anthracycline, de la cytarabine à fortes
doses et des doses fractionnées de cyclophosphamide ou
d’ifosfamide données sur quatre à six cycles.
Les taux de rémission
sont actuellement autour de 70 % avec des taux de survie sans
maladie de l’ordre de 50 %.
Avec ce type de traitement,
les rechutes surviennent toujours durant la première année.
Compte
tenu de ces résultats, la greffe n’est pas envisagée en première
rémission complète, mais en cas de résistance ou de rechute.
4- Traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques en
rechute ou résistantes
:
Les malades qui ne peuvent obtenir une rémission ou ceux qui
rechutent après une première rémission complète ont été traités
selon des protocoles variés.
Globalement, les résultats de ces types
de traitement restent très décevants.
Les facteurs favorables pour
une réponse au traitement sont : l’âge inférieur à 40 ans, l’absence
de cellules leucémiques circulantes et une durée de première
rémission complète de plus de 1 an.
Le taux global de rémission
complète se situe autour de 30 %.
La durée de seconde rémission est
généralement courte.
Elle est de moins de 6 mois. Le pourcentage
de survie à long terme après traitement par chimiothérapie seule est
de moins de 5 %.
Aussi, la seule possibilité curative, pour les
malades en rechute ou présentant une maladie résistante à la
chimiothérapie, est la greffe.
Le but principal de la chimiothérapie,
chez le malade en rechute, est l’obtention d’une seconde rémission
complète suffisamment longue pour préparer à la greffe.