Toute parotidectomie doit être menée dans un souci à la fois
oncologique et esthétique.
Oncologique d’abord car le développement des techniques
chirurgicales permet d’envisager une exérèse complète,
éventuellement élargie aux régions anatomiques voisines.
Ceci impose au chirurgien une parfaite connaissance des modalités
d’extension tumorale propres à chaque variété anatomopathologique
et de l’anatomie chirurgicale du rocher et des cavités buccale et
pharyngée.
Esthétique ensuite, et si les impératifs carcinologiques priment toute
considération cosmétique, la préservation de la fonction faciale peut
et doit, dans la plupart des cas, être assurée.
Aucun des procédés
actifs ou passifs dont le chirurgien dispose pour pallier une paralysie
faciale n’équivaut à un geste préventif.
Aussi a-t-on pu dire qu’une parotidectomie est d’abord et avant tout une dissection nerveuse.
Cette double préoccupation justifie qu’en maints points de ce
chapitre un rappel anatomique précède la description du geste
technique.
Ainsi conçue, la parotidectomie reste cette intervention
faite d’élégance et de précision qui en fait l’un des fleurons de la
chirurgie cervicofaciale.
Bilan préopératoire
:
A - CLINIQUE
:
L’examen doit préciser les caractéristiques de la tumeur mais
également certains éléments ayant des implications diagnostiques
ou thérapeutiques : caractère douloureux de la tumeur faisant
suspecter un cylindrome ou un schwannome ; parésie ou paralysie
faciale ou infiltration cutanée faisant suspecter une tumeur maligne ;
anomalie de l’orifice et du canal de Sténon ; aspect et palpation de
la loge amygdalienne à la recherche d’un prolongement
parapharyngien ; signes otologiques faisant suspecter une extension
intrapétreuse ; présence d’adénopathies cervicales.
B - IMAGERIE
:
Un bilan d’imagerie n’est pas indispensable.
Dans certains cas toutefois, un bilan d’extension est nécessaire :
l’imagerie par résonance magnétique apparaît aujourd’hui comme
l’examen de choix pour l’extension aux parties molles parapharyngées, nerveuses ou cutanées ; la tomodensitométrie est
indispensable en cas de suspicion d’extension à l’os pétreux ou à la
mandibule.
La sialographie est en règle inutile.
L’échographie a pour intérêt
essentiel de guider la cytoponction.
C - CYTOPONCTION
:
Le cytodiagnostic, très éventuellement guidé par l’échographie en
cas de noyau profond, possède certaines indications : étayer une
décision chirurgicale et en prévoir les modalités, justifier une attitude attentiste, convaincre un patient réticent.
La spécificité de la cytoponction est évaluée à 95 %.
Son résultat dépend de la qualité
de la ponction mais aussi de l’entraînement du cytologiste. Dans
environ 5 %, cette cytoponction n’est pas contributive.
D - INFORMATION DU PATIENT
:
Le patient doit être informé des buts, modalités et complications
possibles de l’intervention : type d’incision, examen histologique
extemporané conditionnant l’importance du geste d’exérèse,
éventualité d’un évidement ganglionnaire complémentaire ;
dépression postopératoire en arrière de l’angle de la mâchoire,
insensibilité transitoire du pavillon de l’oreille et surtout possibilité
d’une paralysie faciale d’intensité et de pronostic variables et
pouvant nécessiter des gestes spécifiques, notamment
ophtalmologiques en attendant la récupération habituelle.
La
paralysie faciale définitive est exceptionnelle, due à une intervention
particulièrement difficile ou à un sacrifice délibéré du nerf pour une
tumeur maligne ayant envahi le nerf.
À distance, la possible survenue d’un syndrome de Frey doit être
mentionnée.
Installation du malade
:
Le patient est habituellement intubé par une sonde orotrachéale ;
une intubation nasotrachéale permet toutefois une mobilisation
mandibulaire plus facile pendant l’intervention et facilite l’exérèse
d’un prolongement parapharyngé.
Le malade est installé en décubitus dorsal.
Sa tête est surélevée par
rapport au corps grâce au proclive et défléchie par un billot
transversal placé sous les épaules.
Elle est ensuite tournée du côté
opposé au côté opéré et maintenue dans cette position par un ruban
adhésif prenant appui sur la têtière.
Après rasage de la patte des cheveux et instillation de collyre
protecteur, le champ opératoire est désinfecté : il comprend la région
parotidienne, l’oreille, toute l’hémiface, la région temporozygomatique, cervicale, et thoracique supérieure.
Un champ roulé est placé sous la région cervicale afin d’éviter la
souillure des cheveux, de la nuque, ou du dos.
Les champs sont
ensuite disposés de façon à laisser visibles l’oreille, la région
orbitaire externe, la commissure labiale, et toute la région cervicale.
Une petite mèche est glissée dans le conduit auditif externe de façon
à éviter que le sang ne s’y introduise.
Au plan instrumental, la boîte comprend les instruments habituels
de la chirurgie cervicale que peuvent utilement compléter une
spatule fine, une pince à coagulation bipolaire et, très
éventuellement, un stimulateur électrique.
Dans les cas de reprise de parotidectomie, il peut être utile d’utiliser
un monitoring du nerf facial.
Certaines études ont montré une
diminution de la fréquence de son atteinte.
Il faut se souvenir
cependant que l’utilisation de curare supprime les réponses faciales
aux stimulations mécaniques et électriques et rend tout monitoring
impossible.
Incision et décollement cutanés
:
A - POINTS IMPORTANTS
:
– L’incision de parotidectomie doit répondre à trois impératifs
essentiels : exposer correctement la totalité de la région parotidienne,
pouvoir, au besoin, se prolonger en incision d’évidement
ganglionnaire cervical, laisser un minimum de séquelles esthétiques.
– Au tracé de base, à la fois prétragien et cervical supérieur, de
nombreuses modifications, souvent judicieuses, toutes mineures, ont
été décrites.
Elles témoignent, en règle, de préoccupations plus
esthétiques qu’oncologiques.
– Des travaux anatomiques donnent une conception claire des
parois de la loge parotidienne et autorisent une description précise
des plans de dissection.
Sous la peau, se trouve
une couche de graisse plus ou moins développée selon les individus.
Sous-jacent se trouve le système musculoaponévrotique superficiel
de la face (SMAS).
– Le SMAS, décrit par Jost, est composé des muscles peauciers
superficiels engainés par une lame aponévrotique appelée fascia
superficialis.
Il est constitué de plusieurs segments prenant aussi le
nom de galéa aponévrotique entre les ventres du muscle
occipitofrontal, de fascia temporalis superficialis dans la région
temporale, de fascia parotidien dans la région parotidomassétérine.
Au niveau de la loge parotidienne, le SMAS est composé de la
régression fibreuse du platysma (ou peaucier du cou) et de son
aponévrose.
– L’aponévrose cervicale superficielle constitue la paroi profonde de
la loge.
Elle tapisse successivement d’avant en arrière la face latérale
du muscle masséter, la face profonde de la glande parotidienne, puis
la face superficielle du sterno-cléido-mastoïdien (SCM).
L’embryologie montre clairement que la glande parotidienne dans
sa migration antéropostérieure glisse d’abord sur la face antérieure
du masséter, c’est-à-dire en dehors de l’aponévrose cervicale
superficielle, puis bute contre la pointe de l’os temporal qu’elle ne
peut déborder en dehors en raison du platysma.
Elle se développe
donc en dedans, s’enfonçant entre pointe de la mastoïde et branche
montante de la mandibule, refoulant en profondeur les muscles stylohyoïdiens engainés par l’aponévrose cervicale superficielle.
B - EN PRATIQUE
:
Le tracé de l’incision est dessiné au crayon dermographique.
Il tient
compte des plis de flexion naturels de la face et du cou et dessine
classiquement un trajet en « baïonnette » comprenant trois segments :
– un segment vertical préauriculaire qui emprunte le sillon
prétragien (aisément retrouvé par simple plicature du tragus entre
pouce et index), allant du pied de l’hélix au lobule de l’oreille ; un
refend horizontal à la partie supérieure peut améliorer l’exposition ;
– un segment intermédiaire, horizontal ou légèrement curviligne
vers le haut, qui contourne l’insertion du lobule et s’arrête au bord
antérieur de la mastoïde ;
– un segment vertical qui descend le long du bord antérieur du SCM, rejoint le pli de flexion cervical supérieur et descend à deux
travers de doigt du bord inférieur de la mandibule, pour s’arrêter à
environ 2-3 cm en avant de l’angle de la mâchoire.
La jonction entre ces différents segments doit être arrondie,
curviligne, évitant soigneusement, notamment dans la région souslobulaire,
entre les deuxième et troisième segments, un angle de
raccordement trop aigu, facteur de nécrose ultérieure.
De nombreuses variantes à cette incision ont été décrites dont les
deux principales visent à dissimuler : le premier segment dans le
conduit auditif externe, en passant dans le sillon inter-hélicéotragien,
à la face postérieure du tragus, puis dans le sillon intertragolobulaire
; le troisième segment dans le cuir chevelu, en
empruntant le classique tracé de face-lift dissimulé derrière la racine
d’implantation nucale des cheveux.
Pour élégants qu’ils soient, ces
tracés ne doivent jamais compromettre la qualité de l’exposition
parotidienne.
L’incision est alors effectuée après infiltration au sérum adrénaliné
.
Le décollement du lambeau cutané antérieur est d’abord
effectué à sa partie supérieure, en regard du premier segment
vertical préauriculaire.
La recherche du plan de clivage peut s’aider
de la différence de coloration entre le jaune clair du tissu cellulaire
sous-cutané et le jaune chamois du fascia parotidien.
Le décollement ne doit pas être mené au-delà du bord antérieur du
parenchyme glandulaire.
C’est, en effet, à ce niveau qu’émergent les
branches antérieures très grêles de subdivision du nerf facial qu’il
sera plus facile d’identifier d’arrière en avant lors de la parotidectomie superficielle.
Le décollement est poursuivi dans la partie inférieure, en regard du
troisième segment cervical de l’incision.
Cette manoeuvre expose la
face externe et le bord antérieur du SCM, que croisent la veine
jugulaire externe et la branche auriculaire du plexus cervical
superficiel.
Plus en avant, le décollement cutané doit être mené avec
prudence en raison de la branche cervicofaciale du nerf facial qui
descend le long du bord postérieur de la branche montante de la
mandibule.
Le dernier temps consiste à récliner vers l’arrière le pavillon en discisant les tractus fibreux qui l’amarrent au bord postérieur de la
glande.
Ce temps est rapide, peu hémorragique, et dépourvu de
danger vis-à-vis du nerf facial à la condition de rester très
jalousement au contact du conduit cartilagineux sans le dépasser en
profondeur.
Une fois libéré, le pavillon de l’oreille est récliné vers
l’arrière à l’aide d’une pince à champ ou d’un fil serti prenant appui
sur la partie inférieure du conduit auditif externe.
Libération de la face postérieure
de la glande :
Ce temps prépare la découverte du tronc du nerf facial.
Il consiste à
libérer la glande de la paroi postérieure de la loge parotidienne de
part et d’autre de l’émergence supposée du nerf facial.
Il se
décompose donc en deux temps.
En haut, la tranchée interparotidotragienne est complétée aux
ciseaux ou au doigt recouvert d’une compresse jusqu’à atteindre la
surface plane et dure du tympanal.
Le décollement est rapide, peu
hémorragique, et sans danger pour le nerf facial tant que l’on reste
sur la face antérieure du tympanal et que l’on n’en dépasse pas le
bord inférieur.
En bas, la libération glandulaire du SCM doit être menée au bistouri.
À ce niveau en effet, la glande émet un petit prolongement
postérieur sous-lobulaire qui adhère intimement à la partie toute
supérieure du SCM.
Le bistouri entame donc franchement
l’aponévrose cervicale superficielle 1 à 2 cm en arrière du bord
antérieur du SCM, jusqu’à découvrir ses fibres musculaires et ses
attaches tendineuses mastoïdiennes.
Le dégagement de ce
bord antérieur mène à la veine jugulaire externe accompagnée de la
branche auriculaire du plexus cervical superficiel qui, toutes deux,
croisent la direction du muscle, à environ deux travers de doigt de
la pointe mastoïdienne.
La veine est liée, puis sectionnée avec le
nerf. Certains auteurs prélèvent 1 ou 2 cm de cet élément
nerveux de façon à réparer une éventuelle lésion du nerf facial.
Le pôle postéro-inférieur de la glande ainsi libéré est récliné vers
l’avant avec douceur à l’aide d’une pince en coeur.
Quelques coups
de ciseaux découvrent alors la région celluloganglionnaire sousdigastrique.
La face externe et le bord supérieur du ventre postérieur
du muscle digastrique sont dégagés depuis son tendon
intermédiaire jusqu’à son insertion osseuse mastoïdienne.
La région celluloganglionnaire sous-digastrique ainsi exposée est
explorée, la découverte d’adénopathies et leur analyse histologique
extemporanée pouvant modifier notablement la conduite
chirurgicale ultérieure.
À ce stade de l’intervention, la parotide n’est plus reliée aux
structures postérieures de la loge que par un cordon tissulaire
oblique en bas et en avant de 1 cm d’épaisseur environ, au sein
duquel est situé en profondeur le tronc du nerf facial.
Découverte du tronc du nerf facial
:
Ce temps, qui centre l’intervention de parotidectomie, implique la
parfaite maîtrise de l’anatomie du nerf facial et plus
particulièrement de son émergence extracrânienne et de son trajet
rétroparotidien.
A - POINTS IMPORTANTS
:
– Le nerf facial émerge du rocher par le trou stylomastoïdien,
véritable entonnoir de 2 mm de diamètre environ, qui représente un
élargissement progressif du canal de Fallope plutôt qu’un orifice
nettement dessiné.
Il est situé sur la face exocrânienne postérieure
du rocher, en arrière de l’apophyse styloïde, en dedans de la corne
inférieure du tympanal, en avant et en dedans de la pointe de la
mastoïde, à l’extrémité tout antérieure de la rainure du digastrique
qui vient se déverser dans l’entonnoir stylomastoïdien un peu
comme la gouttière d’une façade dans son chenal de descente.
– Dès sa sortie, le VII se dirige en avant et en dehors, presque
horizontal, au plafond de l’espace rétrostylien (ou sous-parotidien
postérieur).
Il y est accompagné d’un plexus veineux et de l’artère stylomastoïdienne, branche de l’auriculaire postérieure, qui se divise
en « T » à son contact, donnant deux branches : distale et proximale.
Dans ce court trajet rétroparotidien, le nerf passe en arrière, puis en
dehors de l’apophyse styloïde.
Il pénètre ensuite dans la loge
parotidienne à la partie haute du diaphragme stylien, entre ventre
postérieur du muscle digastrique en dehors et muscle stylohyoïdien
en dedans.
– Cette pénétration se fait schématiquement à égale distance du
zygoma et de l’angle de la mâchoire, à 25 mm environ de
profondeur.
Interne et postérieur à son entrée dans la région, le nerf
devient vite superficiel car sa direction est oblique en dehors et en
avant.
Il laisse ainsi en avant, puis en dedans de lui, l’artère carotide
externe.
– De ce rappel anatomique, le chirurgien doit retenir les points
suivants :
– l’émergence exocrânienne du VII se situe à environ 25 mm de
profondeur ; cette profondeur est donnée par le ventre postérieur
du digastrique ;
– le processus triangulaire du cartilage tragien (portion la plus
interne du conduit auditif externe) est un repère très utile.
Conley
et Montgomery le dénomment le pointer.
Le tronc du nerf se
trouve à 7,5 mm (± 2,5 mm) environ en avant et en dedans de lui ;
– le VII rétroparotidien forme à peu près la bissectrice de l’angle
constitué par le bord antérieur de la mastoïde et le bord inférieur
du tympanal ;
– il se trouve à 1 cm au-dessus du bord supérieur du ventre
postérieur ;
– l’apophyse styloïde constitue un repère chirurgical médiocre du VII car : elle est absente ou peu développée dans 50 % des cas ;
elle n’est souvent individualisée qu’après une dissection longue
et laborieuse d’une zone critique ; elle est plus profonde que le
VII, structure que l’on veut précisément épargner.
– Profond à son origine, le VII se superficialise vite puisqu’il va
passer à la face externe de la branche montante de la mandibule ;
il peut donc à son origine présenter une direction transversale et
non antéropostérieure.
B - EN PRATIQUE
:
Deux écarteurs de Farabeuf disposés de part et d’autre du cordon
tissulaire qui relie encore la glande parotidienne aux structures
postérieures de sa loge réclinent vers l’avant la face postérieure de
la glande.
Le doigt localise alors les deux repères essentiels du tronc
nerveux que sont la face antérieure de la pointe mastoïdienne d’une
part, et la face inférieure du conduit auditif externe formée par le
tympanal d’autre part.
À de rares exceptions près, le tronc du nerf
facial :
– constitue la bissectrice de l’angle formé par le bord antérieur de la
pointe mastoïdienne et le bord inférieur du tympanal ;
– se situe en regard du milieu de l’ongle de l’index apposé sur la
pointe mastoïdienne, dans un plan perpendiculaire au bord
antérieur de la mastoïde ;
– émerge en profondeur à un niveau donné par le bord supérieur
du ventre postérieur du digastrique, environ 1 cm au-dessous du
bord inférieur du tympanal.
Les ciseaux courbes ou la spatule sont introduits le long de la face
antérieure de la pointe mastoïdienne et, sans jamais perdre de vue
ce repère osseux, discisent progressivement, de la superficie à la
profondeur, les tractus fibreux qui se tendent entre parotide et plan postérieur.
Le dégagement nerveux, toujours un peu angoissant, ne
rencontre que quelques veinules et une branche artérielle, la stylomastoïdienne, branche de l’auriculaire postérieure ou de
l’occipitale.
Cette artériole représente le seul risque hémorragique à
cet endroit.
La proximité du tronc du nerf facial impose qu’elle soit
clairement isolée sur quelques millimètres, puis liée et sectionnée,
ou coagulée à la pince bipolaire.
C’est un peu en dedans et au-dessus du ventre postérieur du
digastrique que le nerf facial apparaît alors comme un cordon
presque horizontal, de 1 à 2mmde large, tranchant par sa blancheur
sur les tractus fibreux qui l’entourent.
En cas de doute, la dissection
de sa face superficielle à l’aide de ciseaux courbes dont la convexité
s’appuie sur le nerf ou d’une spatule permet de découvrir, à
quelques millimètres de l’émergence stylomastoïdienne, la
bifurcation caractéristique du tronc nerveux.
La position du tronc du VII peut se trouver modifiée par le
développement tumoral : une volumineuse tumeur du lobe
superficiel peut refouler le VII en dedans, contre la base de
l’apophyse styloïde ; à l’inverse, une tumeur du lobe profond peut
plaquer le tronc nerveux contre le bord antérieur de la mastoïde.
C’est ici que prennent toute leur valeur les repères anatomiques
mentionnés plus haut, le principe technique consistant à rester
toujours au contact de la mastoïde sans laisser aucune structure
glandulaire en arrière des instruments, l’utilisation des lunettesloupes,
voire, mais c’est exceptionnellement nécessaire, l’emploi de
l’excitateur électrique.
Repérage rétrograde des branches du nerf facial
:
Il est, cependant, des cas difficiles où le nerf facial doit être
découvert par voie rétrograde.
Cette dissection peut porter sur l’une
quelconque des branches de division du nerf facial, recherchée aux
confins antérieurs de la glande.
Préférentiellement, c’est aux dépens de la branche mentonnière
qu’est effectuée cette manoeuvre.
Le repère en est l’émergence de la
veine communicante intraparotidienne qui sort de la bandelette
sternomaxillaire.
La veine est isolée et dégagée du tissu parotidien.
Parallèlement à elle, se trouve, à quelques millimètres en dedans, le
rameau mentonnier qui sert alors de fil conducteur vers la branche cervicofaciale, puis au tronc nerveux.
D’autres auteurs recommandent de rechercher, dans la région massétérine, les rameaux du nerf facial au-dessus du fascia
massétérin dans un plan de tissu conjonctif lâche recouvert par le
SMAS.
Parotidectomie superficielle
:
Une fois le tronc du VII repéré, l’opération consiste surtout en une
dissection nerveuse, branche par branche.
L’exérèse du lobe
superficiel implique donc la connaissance, d’une part des modalités
de division du nerf facial, d’autre part des rapports que le nerf
contracte avec la glande parotide.
A - POINTS ANATOMIQUES IMPORTANTS
:
1- Division du nerf
:
De nombreux travaux ont tenté d’en préciser les modalités afin d’en
faciliter l’abord.
Ainsi, la division se fait-elle :
– sur une horizontale coupant le milieu de la branche montante du
maxillaire ;
– toujours en arrière d’environ 7 mm du bord postérieur de la
branche montante de la mandibule, à environ 35 mm de l’angle de
la mâchoire ;
– au milieu d’une ligne qui va du bord supérieur du tragus à l’angle
de la mâchoire et plus près du bord postérieur de la branche
montante que du bord antérieur de la mastoïde.
Leur parfaite
connaissance est, en réalité, purement académique et sans intérêt
pratique.
Mieux vaut, sans doute, pour le chirurgien retenir les
points suivants :
– l’extrême variabilité de la ramescence du tronc du nerf facial :
tantôt chacune des deux branches principales, la temporofaciale et
la cervicofaciale, est bien individualisée, et les branches secondaires
émanent tardivement de chacune d’elles réalisant les formes sans
anastomose ; tantôt l’épanouissement en branches secondaires est
précoce, et l’ensemble forme un véritable plexus parotidien, réalisant
les formes avec anastomoses ; le premier type serait plus fréquent
chez la femme et le second chez l’homme ;
– l’importance fonctionnelle probable des anastomoses nerveuses intraparotidiennes, ce qui en justifie le respect chirurgical ;
– la nécessaire individualisation de la branche inférieure cervicofaciale qui longe le bord postéro-inférieur de la mandibule et
croise la face externe de la veine faciale : cette intersection se situe
habituellement entre deux points extrêmes placés à 1 cm de part et
d’autre du bord inférieur de la mandibule, ce qui constitue un
excellent point de repère pour une dissection rétrograde du nerf ;
– l’importance esthétique de la branche inframandibulaire ou
mentonnière qui longe le bord inférieur de la mandibule : sa blessure
accidentelle, par un écarteur manié trop brutalement ou par une
dissection malencontreuse du pôle inférieur de la parotide ou lors
d’un éventuel évidement ganglionnaire complémentaire, entraîne
une asymétrie buccale très disgracieuse en raison du caractère très
mobile des lèvres lors de la mimique.
Ce rameau mentonnier ne
présente pas d’anastomose, ce qui explique le caractère définitif de
son atteinte.
2- Relation avec la glande
:
Classiquement, le plan parasagittal de ramification des branches du
VII divise la glande parotide en deux lobes, superficiel et profond,
reliés par un isthme de part et d’autre duquel s’effectue la division
principale.
Cette conception a fait l’objet de nombreuses
controverses et doit être nuancée au triple plan anatomique,
chirurgical et oncologique.
– D’un point de vue anatomique, il semble que la division de la
glande en deux lobes, superficiel et profond, réunis par un isthme
soit quelque peu artificielle.
En réalité, les ponts interlobaires sont multiples et les canaux excréteurs
paraissent communs aux deux lobes.
Tissu parotidien, canaux excréteurs et nerf facial paraissent intimement intriqués, les éléments
glandulaires s’insinuant telle une vigne vierge dans les mailles du
treillis nerveux.
Ainsi, toute systématisation anatomique des
relations entre VII et parotide paraît-elle impossible en raison de
l’extrême variabilité de leurs rapports.
– D’un point de vue chirurgical, la dissection du tissu glandulaire
le long du plan de ramification nerveuse autorise bien un clivage,
parfois difficile mais toujours réalisable, entre lobe superficiel et
profond.
Malgré le caractère parfois malaisé de cette réalisation,
aucune donnée histologique, embryologique ou anatomique ne
permet de réfuter cette réalité chirurgicale d’observation
quotidienne.
– D’un point de vue oncologique enfin, les deux lobes parotidiens
paraissent trop contigus, trop accolés l’un à l’autre, pour ne pas être
considérés comme une structure unique.
Toute lésion invasive
impose donc une exérèse ne pouvant respecter la division artéfactuelle en deux lobes.
3- Considérations
:
Le chirurgien doit retenir que :
– le nerf facial et la parotide sont étroitement intriqués ;
– un clivage chirurgical de la glande en deux lobes le long du plan
de ramescence du nerf est toujours possible, qui ne semble
cependant pas s’appuyer sur un plan anatomique réel ;
– le type de parotidectomie indiqué doit s’appuyer sur les
caractéristiques anatomopathologiques et topographiques de la
tumeur et non sur une distinction anatomique artéfactuelle.
B - EN PRATIQUE
:
L’ablation du lobe superficiel est effectuée d’arrière en avant, en
suivant une par une les branches de division nerveuse et en
débutant à l’opposé du siège de la tumeur (c’est-à-dire le long des
branches supérieures en cas de tumeur inférieure, et inversement).
L’avance se fait pas à pas, en s’aidant de ciseaux courbes ou
d’une spatule dont la convexité s’appuie sur la face superficielle de
l’élément nerveux, sans jamais le perdre de vue, c’est-à-dire en
évitant toute tunnellisation trop profonde.
À la périphérie, la
libération du pôle superficiel impose le repérage et la ligature, en
haut de quelques affluents des vaisseaux temporaux superficiels, en
bas de la veine jugulaire externe, puis de la veine communicante intraparotidienne.
Le décollement du lobe superficiel guidé
par la dissection des branches nerveuses de deuxième ou troisième
division conduit au bord antérieur de la glande.
À ce niveau, des
filets nerveux très fins se tendent.
Avant de les considérer comme
des filets sécrétoires que l’on peut sacrifier, il faut les poursuivre
dans la glande.
On constate alors parfois qu’ils s’échappent de son
bord antérieur pour se perdre dans la joue, signant ainsi leur nature
motrice.
L’exposition des ramifications ultimes permet de compléter
sans danger le décollement cutané au-delà du bord antérieur de la
glande.
À ce moment, le lobe ne tient plus que par une charnière
verticale.
À sa partie moyenne, un pédicule transversal
correspondant au canal de Sténon et à l’artère transverse de la face
peut être individualisé et sectionné entre deux pinces.