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Chirurgie
Chirurgie des paragangliomes cervicaux
Cours de Chirurgie
 

 

 

Introduction :

Les paragangliomes sont des tumeurs rares et en règle générale bénignes.

Elles sont développées aux dépens des paraganglions physiologiques.

Leur incidence est faible, entre 1/30 000 et 1/100 000.

Deux formes cliniques sont à distinguer :

les paragangliomes carotidiens dont l’exérèse se heurte à la dissection carotidienne, et les paragangliomes vagaux volontiers parapharyngés et à extension haute basicrânienne.

Généralités :

A - TERMINOLOGIE :

De nombreux synonymes sont utilisés pour qualifier les tumeurs paraganglionnaires en fonction des considérations histopathologiques ou anatomiques (glomus, chémodectomes, tumeurs non chromaffines).

ctuellement, seul le terme de paragangliome est validé par l’ensemble des histologistes.

La nomenclature utilise le terme de paragangliome suivi de sa localisation : paragangliome carotidien, paragangliome vagal...

Deux systèmes anatomofonctionnels ont été définis pour tenter de regrouper et classer les paragangliomes : le système amine precursor uptake and decarboxylation (APUD) et le syndrome neuroendocrinien diffus (SNED).

Parce qu’il est fondé sur des considérations uniquement fonctionnelles, le système APUD doit être abandonné pour lui préférer le SNED.

Les cellules du SNED sont diffuses dans l’organisme, ont une origine embryologique variable, exercent une fonction de contrôle sur d’autres types cellulaires via les amines et peptides produits (neurotransmetteurs, hormones, action paracrine locale).

Les tumeurs en dérivant peuvent être divisées en deux groupes :

– les tumeurs d’origine neurale (neuroblastomes, phéochromocytomes et paragangliomes) ;

– les tumeurs d’origine épithéliale (tumeurs carcinoïdes, tumeurs neuroendocrines éparses).

B - EMBRYOGENÈSE :

Les paraganglions physiologiques dérivent tous des cellules neuroépithélioïdes de la crête neurale.

Les cellules paraganglionnaires céphaliques sont soumises au développement des arcs branchiaux pour se situer finalement le long de la crête neurale rhombencéphalique postérieure ou glosso-pharyngo-vagale, parallèlement aux neuvièmes et dixièmes paires crâniennes (traînée de Terracol et Guerrier).

C - DISTRIBUTION DES PARAGANGLIONS :

Les paraganglions cervicocéphaliques se distribuent en rapports étroits avec les gros axes vasculaires depuis la crosse de l’aorte jusqu’à la base du crâne.

Leur migration suit celle des branches nerveuses du glossopharyngien (IX) et du nerf vague (X).

On cite :

– les paraganglions intercarotidiens ;

– les paraganglions vagaux ;

– les paraganglions laryngés ;

– les paraganglions orbitaires et nasosinusiens ;

– les paraganglions sous-claviers et médiastinaux supérieurs ;

– les paraganglions tympanojugulaires dont la prise en charge n’est pas développée ici.

En pathologie, toutes ces localisations peuvent devenir des sites de développement tumoral.

D - PHYSIOPATHOLOGIE DES PARAGANGLIONS :

Leur fonction précise est longtemps restée méconnue.

Ils fonctionneraient comme des chémorécepteurs, sensibles aux variations de pression partielle artérielle en oxygène, en CO2 ainsi qu’au pH artériel.

La conséquence de leur stimulation (hypoxie, hypercapnie, acidose) est une augmentation de la fréquence respiratoire via les afférences glossopharyngiennes.

Certaines situations cliniques ou pathologiques corroborent le rôle des paraganglions carotidiens, isolément ou en relation avec les barorécepteurs :

– une plus forte prévalence de paragangliomes carotidiens chez des populations soumises à une hypoxie chronique : sujet vivant à de hautes altitudes, insuffisants respiratoires chroniques ;

– un dysfonctionnement des paraganglions a été avancé pour expliquer les conséquences hémodynamiques des sujets souffrant de syndrome d’apnées du sommeil ;

– des anomalies histologiques du paraganglion carotidien (hypoplasie ou défaut du nombre de cellules de type I) ont été relevées lors d’autopsies d’enfants victimes du syndrome de mort subite du nourrisson.

E - RAPPEL ANATOMIQUE - RAPPORTS CHIRURGICAUX :

Les paragangliomes latérocervicaux se développent initialement dans la gouttière jugulocarotidienne et les espaces parapharyngés.

Ils s’étendent ensuite vers la base du crâne en haut en traversant les espaces sous-parotidien postérieur et rétrostylien.

Ces zones riches en éléments vasculonerveux expliquent d’une part la présentation clinique des tumeurs latérocervicales mais aussi les risques et séquelles attendus ou éventuels de leur exérèse.

Au niveau de ces espaces latéraux du cou, les principaux éléments en rapport avec la tumeur sont :

– des éléments artériels : l’artère carotide primitive en bas et les artères carotides internes et externes.

Les tumeurs issues du corpuscule carotidien, se développant entre les deux branches, refoulent de part et d’autre les deux artères carotides.

À l’inverse, les tumeurs issues du vague se situent plus médialement dans les espaces parapharyngés ; elles repoussent la bifurcation carotidienne en avant et en dehors.

Les principales branches de la carotide externe en rapport sont l’artère occipitale qui précroise la veine jugulaire interne, l’artère auriculaire postérieure et l’artère pharyngienne ascendante ;

– des éléments veineux : la veine jugulaire interne qui sort du foramen jugulaire, et dont l’hémostase est délicate en cas de brèche haut située ;

– des éléments nerveux : le nerf vague (X) en arrière de l’axe vasculaire, la branche descendante du grand hypoglosse (XII), les rameaux du glossopharyngien (IX) et la chaîne sympathique cervicale.

L’espace sous-parotidien postérieur prolonge la région sterno-cléidomastoïdienne à hauteur de l’angle de la mandibule jusqu’à la base du crâne.

Au niveau de cette région, les tumeurs glomiques sont en rapports avec :

– les quatre derniers nerfs crâniens : le nerf glossopharyngien (IX), issu du trou déchiré postérieur, le nerf pneumogastrique (X) avec son ganglion plexiforme, le nerf spinal (XI) se divisant en deux branches, une externe traversant le muscle sterno-cléido-mastoïdien, l’autre interne s’anastomosant au nerf vague dans le ganglion plexiforme.

Enfin, le nerf grand hypoglosse (XII), issu du canal condylien antérieur, restant en arrière de l’artère carotide interne pour se diriger en bas et en dedans, vers le plancher buccal en passant médialement à la veine jugulaire interne ;

– la chaîne sympathique cervicale et son ganglion cervical supérieur, responsable, en cas de lésion (tumorale ou chirurgicale), du syndrome de Claude Bernard-Horner.

F - CLASSIFICATION DES PARAGANGLIOMES :

1- Classification des tumeurs du corpuscule carotidien :

La principale classification utilisée reste celle décrite et modifiée par Shamblin en 1971.

Elle distingue trois stades anatomocliniques :

– les tumeurs du stade I sont de petite taille, facilement extirpables sans lésion artérielle ;

– les tumeurs du stade II engainent tout ou partie de l’artère carotide interne mais elles sont clivables par le biais de la dissection sous-adventicielle ;

– les tumeurs du stade III sont volumineuses, enserrant globalement l’axe carotidien et nécessitent une résection carotidienne avec pontage dans le même temps.

Le stade III a été divisé en stades IIIa et IIIb en distinguant les tumeurs sans contact avec la base du crâne (IIIa) et en contact avec la base du crâne (IIIb), ne laissant pas de segment de carotide accessible.

2- Classification des tumeurs d’origine vagale :

Les paragangliomes vagaux ont une plus forte propension à l’extension basicrânienne que leurs homologues carotidiens.

Netterville et Glasscock rapportent une classification en trois stades selon l’extension vers la base du crâne :

– stade A : tumeur localisée à la région cervicale ;

– stade B : tumeur en contact avec la base du crâne et le foramen jugulaire, responsable d’un déplacement antérieur et/ou d’un enveloppement de l’artère carotide interne ;

– stade C : tumeur pénétrant dans le foramen jugulaire, avec fréquemment extension intracrânienne.

Fisch propose une classification sensiblement identique en trois stades également :

– stade I : tumeur essentiellement parapharyngée, sans invasion du foramen jugulaire ;

– stade II : tumeur parapharyngée avec invasion du foramen jugulaire sans lyse osseuse ;

– stade III : tumeur parapharyngée envahissant le rocher, l’oreille moyenne et s’associant éventuellement à une atteinte de la carotide interne.

Ces classifications sont importantes car les stades I et II réclament un abord purement cervical alors que le stade III doit être abordé par une voie infratemporale.

G - HÉRÉDITÉ DES PARAGANGLIOMES :

Les recherches les plus récentes en matière de développement tumoral expliquent la transformation des paraganglions physiologiques en tumeurs par l’inactivation d’un gène suppresseur de tumeur (PGL1) situé sur le bras long du chromosome 11 au niveau du locus 11q22-q23.

Chez un sujet normal, une double mutation est donc indispensable afin d’initier le développement tumoral.

En revanche, si un sujet est déjà porteur d’une anomalie au niveau d’un de ses allèles (hétérozygotie), il suffit d’une mutation sur l’allèle sain restant pour que la tumeur se développe : c’est la « perte de l’hétérozygotie ».

La prédisposition génétique de certains sujets à développer des paragangliomes ou d’autres types de cancers par double mutation succède à la perte de l’hétérozygotie pour l’antioncogène PGL1.

Le mode de transmission particulier des paragangliomes se fait de façon dominante (toutes les générations peuvent être atteintes) avec inactivation génomique maternelle (seuls les descendants d’hommes atteints développent la maladie).

Les enfants d’une femme atteinte ne développent pas de paragangliomes mais en transmettent l’anomalie génétique.

H - IMAGERIE DES PARAGANGLIOMES :

Le diagnostic ainsi que le bilan préthérapeutique des paragangliomes reposent sur l’imagerie.

L’examen tomodensitométrique et l’imagerie par résonance magnétique (IRM) permettent de discuter les principaux diagnostics différentiels et de préciser l’extension locorégionale, indispensable pour définir la tactique chirurgicale.

L’angiographie peut, en cas de doute, apporter des éléments diagnostiques mais sa place est actuellement restreinte au bilan préopératoire et à un éventuel geste d’embolisation, de moins en moins réalisé en pratique.

Les examens par scintigraphies sont utiles pour un bilan plus général de ces tumeurs en dépistant d’autres localisations synchrones.

1- Échographie :

Sa spécificité est médiocre et n’autorise pas à différencier un paragangliome d’une adénopathie.

L’effet doppler caractérise l’hypervascularisation de ces tumeurs et restreint le diagnostic différentiel aux autres tumeurs solides très vascularisées comme les adénopathies métastatiques des cancers de la thyroïde ou du rein.

2- Tomodensitométrie :

La tomodensitométrie assure une analyse précise de la tumeur en définissant des caractéristiques morphologiques et topographiques.

Le paragangliome apparaît comme une masse tissulaire homogène, à contours nets, de densité tissulaire moyenne.

Lors de l’injection iodée, la prise de contraste est rapide, intense et fugace du fait de phénomènes de lavage vasculaire.

C’est l’analyse topographique, en localisant la tumeur par rapport aux espaces parapharyngés et à la bifurcation carotidienne, qui est l’élément fondamental de l’étude tomodensitométrique.

Toutefois, les tumeurs du corpuscule de plus de 5 cm ont fréquemment un prolongement parapharyngé.

Le paragangliome est une tumeur vascularisée de l’espace rétrostylien.

Les tumeurs du corpuscule se situent entre le sternocléido- mastoïdien en avant et en dehors, et le scalène en arrière.

Les tumeurs vagales sont plus hautes et plus médiales, jouxtant les espaces parapharyngés.

Celles-ci refoulent la bifurcation et l’artère carotide interne vers l’avant alors que les paragangliomes carotidiens, se développant au niveau de la bifurcation, écartent celle-ci en déplaçant la carotide externe vers l’avant et l’interne vers l’arrière.

De plus, alors que les paragangliomes vagaux restent séparés des vaisseaux carotidiens par un liseré graisseux, il est parfois difficile d’individualiser les artères carotidiennes d’une tumeur du corpuscule.

L’examen tomodensitométrique précise l’extension tumorale vers la base du crâne et le foramen jugulaire, et recherche des adénopathies ou d’autres tumeurs cervicales synchrones. Les principaux diagnostics différentiels seront les tumeurs vascularisées de l’espace rétrostylien :

– les anévrismes artériels dont les parois sont épaisses et calcifiées et dont la cinétique de prise de contraste est similaire à celle des paragangliomes ;

– les schwannomes qui miment volontiers un paragangliome vagal, mais dont la prise de contraste est moins intense et surtout prolongée ;

– les adénopathies inflammatoires qui prennent le contraste en périphérie ;

– les métastases ganglionnaires hypervascularisées des cancers du rein ou de la thyroïde qui posent le plus de difficultés diagnostiques et justifient la réalisation d’une IRM ou d’une angiographie.

3- Imagerie par résonance magnétique :

Elle donne une évaluation précise de l’extension locorégionale par la réalisation de coupes dans les trois plans de l’espace.

Ces tumeurs demeurent homogènes, avec un signal intermédiaire en séquence pondérée en T1 sans gadolinium et en T2.

Un aspect hétérogène avec des zones hyperintenses peut se rencontrer et traduit une nécrose ou une hémorragie intratumorale.

L’existence de signaux serpigineux linéaires, hypo-intenses, d’allure vasculaire est très évocatrice du diagnostic, donnant à la tumeur un aspect « poivre et sel » caractéristique.

La réalisation d’une angio-IRM apporte une bonne définition des rapports vasculaires mais ne peut que partiellement remplacer l’angiographie sélective en cas de contre-indication.

L’IRM serait en effet moins sensible dans le bilan de la vascularisation que l’angiographie.

4- Angiographie :

L’angiographie sélective n’est plus indispensable pour confirmer le diagnostic de paragangliome.

Elle conserve néanmoins certaines indications :

– diagnostiques, pour « trancher » devant un cas douteux, tels les petits paragangliomes pour lesquels l’IRM ne retrouve pas les images serpigineuses évocatrices ou les paragangliomes de topographie atypique, laryngés, sinusiens, orbitaires... ;

– dans le dépistage des formes multifocales de plus petites tailles et chez les collatéraux de sujets atteints d’une forme familiale (angiographie des quatre axes) ;

– en préopératoire, lorsqu’un geste de plastie vasculaire est à envisager : l’angiographie doit répondre aux questions du chirurgien concernant le nombre de pédicules nourriciers de la tumeur, l’existence d’une invasion de la paroi artérielle (signe de la morsure, rétrécissement artériel), la distance de carotide accessible entre le pôle supérieur de la tumeur et la base du crâne et enfin la fonctionnalité du polygone de Willis par une épreuve de clampage de 30 minutes ;

– lorsqu’une embolisation est envisagée.

L’artériographie met en évidence le blush vasculaire caractéristique, intense, avec un lavage du contraste très rapide. Pour les tumeurs cervicales, l’effet de masse sur la bifurcation carotidienne affirme le diagnostic topographique.

Les paragangliomes du X sont situés plus haut que la bifurcation et refoulent en bloc les vaisseaux carotidiens vers l’avant et le dehors selon une courbe harmonieuse.

Les tumeurs du corpuscule font diverger la bifurcation en lui donnant le classique aspect en « lyre ».

Indications de l’embolisation tumorale : l’embolisation préopératoire est restée longtemps un sujet de controverse, facilitant pour beaucoup le geste chirurgical en minorant le saignement peropératoire et en diminuant la taille tumorale.

Actuellement, la plupart des auteurs s’accordent pour ne pas réaliser d’embolisation préalable, inutile, voire même source de difficultés opératoires pour certains du fait d’une réaction inflammatoire péritumorale.

Pour limiter cette complication, l’exérèse devrait être pratiquée dans les 24 à 48 heures après l’embolisation.

5- En conclusion :

Devant un paragangliome, on doit réaliser un bilan qui permet :

– le dépistage d’une forme multifocale ou d’une autre tumeur de la crête neurale synchrone ;

– le diagnostic d’une forme familiale et les cas collatéraux ;

– la réalisation du bilan d’opérabilité de cette tumeur.

Les limites sont principalement la sensibilité des examens paracliniques, leur coût et leur disponibilité et la morbidité secondaire qu’ils engendrent.

En pratique, un bilan minimal doit inclure :

– le bilan topographique de la tumeur : tomodensitométrie, IRM ;

– la recherche d’une autre localisation : examen clinique (tension artérielle), audiogramme et impédancemétrie, dosages hormonaux urinaires sur 24 heures (métanéphrines, acide vanilmandélique, acide homovanillique, acide 5-hydroxy-indol-acétique [HIAA]), scintigraphie corps entier (123I-méta-iodo-benzyl-guanidine [MIBG] ou au mieux 111In-pentétréotide), tomodensitométrie et IRM cervicale ;

– le bilan préopératoire : l’artériographie reste indispensable pour les tumeurs latérocervicales.

Traitement :

A - TRAITEMENT CHIRURGICAL :

1- Chirurgie du paragangliome carotidien :

La réalisation correcte de la voie d’abord et la qualité de l’exposition sont les premières des conditions nécessaires pour permettre l’exérèse de la tumeur en toute sécurité.

* Abord de la bifurcation carotidienne pour un paragangliome carotidien :

+ Installation :

Le patient est installé en décubitus dorsal, la tête tournée du côté opposé à celui qui doit être opéré.

Une légère extension cervicale est obtenue par un billot de taille moyenne glissé sous les épaules.

Le patient est placé en léger proclive à 25°. Le chirurgien est assis en regard de la bifurcation carotidienne à aborder, l’aide est placé à la tête et l’instrumentiste aux pieds du patient.

La possibilité d’aborder la veine saphène interne au niveau de la cuisse homolatérale à la lésion à traiter est généralement ménagée.

+ Incision cutanée :

L’incision cutanée est oblique et suit le bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien selon une ligne qui va de l’extrémité de l’apophyse mastoïde en arrière du lobe de l’oreille jusqu’à l’extrémité médiale de la clavicule.

Elle a une longueur variable de 12 à 15 cm ; elle peut être plus ou moins prolongée vers le haut, remontant sur la base du crâne.

+ Exposition de la bifurcation carotidienne :

– Les plans superficiels : le muscle peaucier du cou est incisé au bistouri électrique, la veine jugulaire externe sectionnée après ligature.

L’aponévrose cervicale superficielle est incisée au niveau du bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien, permettant ainsi de récliner ce dernier vers l’arrière.

Dans la partie supérieure de l’incision, il faut détacher ses adhérences avec le muscle, et rétracter vers le haut et en avant la glande parotide, après ligature de la communicante intraparotidienne jusqu’à la pointe de la mastoïde.

– Les plans moyens : le muscle sterno-cléido-mastoïdien maintenu vers l’arrière par un écarteur, on met en évidence la tumeur sous la forme d’une masse rougeâtre, hypervascularisée, centrée sur la bifurcation carotidienne, débordant plus ou moins selon le volume tumoral.

L’intervention se poursuit avec l’incision de l’aponévrose cervicale moyenne.

Elle permet de mettre en évidence dans le haut de l’incision le ventre postérieur du muscle digastrique qui constitue la limite supérieure de l’exposition dans ce type de tumeur, et vers le bas, le tendon du muscle omohyoïdien.

Il faut, dans un premier temps, libérer la veine jugulaire interne afin de pouvoir la récliner vers l’arrière, ce qui implique de repérer sur son bord antérieur le tronc veineux thyro-linguo-facial de Farabeuf.

Dans un nombre relativement important de cas, ce tronc veineux n’est pas bien individualisé.

Il existe en effet deux ou trois veines de taille variable venant se jeter sur la face antérieure de la veine jugulaire interne et qu’il faut prendre le soin de disséquer et de ligaturer individuellement.

Il faut également, vers le haut, repérer le nerf grand hypoglosse et sa branche descendante ; son dégagement impose la séparation de la glande sous-maxillaire en remontant le long du bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien.

On prend aussi la peine de repérer le nerf spinal.

– Le plan vasculaire : la dissection proprement dite artérielle débute par la libération de l’artère carotide commune qui est aisément disséquée dans la partie basse de l’incision en dedans de la veine jugulaire interne, en prenant soin d’identifier, sans le traumatiser, le nerf pneumogastrique et la partie basse de l’anse de l’hypoglosse.

Vers le haut, on isole une artère carotide interne et ses branches en dedans ; on effectue une libération de l’artère carotide interne en aval de la zone pathologique, ce qui nécessite le plus souvent la dissection et la ligature de l’artère occipitale ou de l’une de ses branches.

À la fin du temps d’exposition : les lacs sont mis en place sur l’artère carotide commune, l’artère carotide interne en aval de la lésion et de l’artère carotide externe après identification des différents éléments nerveux X, XI, XII et le sympathique.

* Variantes techniques :

Dans les tumeurs corpusculaires de stade II et celles à expression parapharyngée, il est nécessaire d’étendre vers le haut la dissection de l’artère carotide interne dans l’espace sous-parotidien postérieur.

Cette extension nécessite vers le haut de prolonger en cervicoparotidectomie l’incision cutanée qui doit s’infléchir en arrière le long du bord postérieur de l’apophyse mastoïde.

Le ventre intermédiaire du muscle digastrique est sectionné, sa partie postérieure est libérée puis récliné en arrière par un fil tracteur.

Sa rétraction vers le haut par une valve permet de voir les éléments du rideau stylien.

Cette rétraction est indispensable mais doit être prudente pour éviter de traumatiser le rameau cervicofacial du nerf facial.

Il est ainsi possible de gagner 1 à 2 cm d’exposition vers le haut en dégageant les éléments du rideau stylien, en réséquant avec une petite pince-gouge la pointe de l’apophyse styloïde et les muscles qui s’y rattachent (bouquet de Riolan).

Le nerf grand hypoglosse est mobilisé ; il faut sectionner avec prudence les adhérences qui le relient au gangliome plexiforme du X, cette libération pouvant être à l’origine de paralysie des cordes vocales.

Afin de ne pas traumatiser le tronc nerveux du XII lui-même, on sectionne sa branche descendante à 1 cm au-delà de son origine et on utilise le moignon de branche descendante comme tracteur.

On arrive ainsi, de proche en proche, à isoler l’artère carotide interne au-dessus de ce dernier.

Lorsque l’on a affaire à des tumeurs du corpuscule carotidien de stade III enfouies sur la base du crâne, il faut utiliser un abord infratemporal antérieur permettant le contrôle de la carotide interne à son entrée au niveau du canal carotidien.

La technique est décrite avec l’abord des paragangliomes vagaux.

L’exposition de l’artère carotide interne dans son segment intrapétreux peut se faire par d’autres approches ; il existe deux variantes : les voies infratemporales de Fisch :

– la voie de type A permet l’abord de la portion verticale et du coude de l’artère carotide interne intrapétreuse ; elle comporte le déroutement de la deuxième et de la troisième portion du nerf facial et le sacrifice de l’oreille moyenne.

Malgré cela, elle ne donne qu’un jour limité en avant au niveau de l’artère carotide interne ;

– la voie de type B expose la portion horizontale de l’artère carotide interne intrapétreuse.

Elle comporte l’abaissement du condyle mandibulaire après désinsertion du muscle temporal, le fraisage de l’oreille moyenne et le déplacement du nerf facial.

Le fraisage par rapport à la voie A est poursuivi au niveau de la fosse mandibulaire et de la grande aile du sphénoïde.

La section de l’artère méningée moyenne et du nerf mandibulaire rend possible l’abaissement supplémentaire du condyle à l’aide d’un écarteur afin de gagner de l’espace.

Il faut veiller à ne pas trop tendre le tronc rétroparotidien du nerf facial.

Le fraisage ainsi terminé, on visualise la portion horizontale de l’artère carotide interne jusqu’au niveau du foramen lacerum (trou déchiré antérieur).

* Dissection de la tumeur corpusculaire :

+ Principe :

L’exérèse d’une tumeur du corpuscule carotidien repose sur le principe d’une dissection sous-adventicielle avec contrôle de l’hémostase à la pince bipolaire.

L’intervention, quel que soit le volume tumoral, est menée de façon concentrique en terminant l’exérèse de la tumeur par la région rétrobulbaire qui constitue une zone à risque d’effraction de la paroi artérielle.

En effet, les ruptures surviennent presque toujours à ce niveau et il faut, dans tous les cas, que l’exérèse soit pratiquement terminée pour que le temps de clampage des axes vasculaires se limite au temps de la réparation.

+ Technique :

Afin d’éviter des réactions neurovégétatives délétères, on injecte quelques centimètres cubes de Xylocaïne en arrière de l’origine de la carotide interne, à proximité du nerf pneumogastrique.

L’artère carotide commune est aisément disséquée en commençant 2 cm sous la tumeur ; la dissection est menée en sous-adventiciel, en s’aidant de la coagulation bipolaire.

Le dégagement est concentrique de bas en haut à la pointe des ciseaux courbes mousses en mettant à nu la média.

Le cheminement va de proche en proche pour remonter jusqu’au niveau de la bifurcation carotidienne.

On effectue cette même dissection à partir des branches, à savoir : en amont de la tumeur au niveau de la carotide interne, dissection toujours menée en sous-adventiciel qui est effectuée du haut vers le bas, de même au niveau de la carotide externe de façon à terminer l’exérèse au niveau de la bifurcation.

Parfois, devant la consistance dure tumorale et devant son volume, on peut effectuer une section entre deux ligatures de la carotide externe au-dessus de l’artère thyroïdienne supérieure ; cet artifice permet de mobiliser la tumeur et d’aborder plus facilement la face postérieure de la bifurcation.

2- Chirurgie du paragangliome du vague :

Les paragangliomes vagaux peuvent naître de trois paraganglions décrits sur le vague (supérieur moyen ou inférieur).

Ils sont moins fréquents et ne représentent que 5 % de paragangliomes cervicocéphaliques.

En fonction de leur orientation supérieure ou inférieure, se pose le problème de l’envahissement de la base du crâne, soit de l’atteinte de la carotide interne cervicale.

C’est pourquoi, compte tenu de la situation de la tumeur, presque toujours incarcérée sous la base du crâne, l’abord que nous conseillons est celui utilisé dans l’exposition du segment vertical intrapétreux de la carotide interne.

* Installation :

Le patient doit subir un shampooing avec de la Bétadine avant de procéder à un rasage soigneux, périauriculaire, large de 4 cm audessus et en arrière de l’oreille.

En salle d’opération, un nouveau shampooing à la Bétadine est nécessaire.

Les mèches de cheveux sont rabattues en dehors du champ opératoire et gominées.

Le malade est couché en décubitus dorsal de préférence, la tête dans une têtière ou plus simplement sur le plan de la table d’opération.

Compte tenu de la durée moyenne de l’intervention, il est capital de protéger tous les points d’appui avec des sacs d’eau ou de gel de silicone.

Un matelas chauffant peut être utile.

La tête est tournée vers le côté opposé.

La région mastoïdienne est directement placée sour le regard du chirurgien qui est assis à la tête du patient, du côté à opérer.

Le champ opératoire est temporal et cervicomastoïdien.

* Incision cutanée :

Elle suit un tracé à double courbure de la région temporale jusqu’au cou.

La partie essentielle de l’incision est sus- et rétroauriculaire ; elle descend en bas dans le cou pour atteindre le bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien jusqu’en regard de la grande corne de l’os hyoïde ; vers le haut, elle suit à 3 cm au-dessus et en arrière le sillon sus- et rétroauriculaire.

Au niveau temporal, le décollement se fait d’emblée jusqu’à l’os pour récliner en bloc les parties molles en direction du méat auditif externe.

Ce dernier est sectionné et le décollement est poursuivi vers l’avant jusqu’à l’aplomb du condyle mandibulaire.

Ainsi, l’opérateur dispose d’une large voie d’abord. Les parties molles libérées sont maintenues vers l’avant par des fils de traction et sont couvertes d’une compresse humidifiée.

Il existe une variante à ce type d’abord cutané qui consiste à réaliser une voie préauriculaire qui rejoint ensuite le bord antérieur du sterno-cléido-mastoïdien.

* Exposition des vaisseaux :

Le dégagement du bord antérieur du sterno-cléido-mastoïdien ouvre la gouttière carotidienne.

Au préalable, on pratique sa désinsertion de l’extrémité de l’apophyse mastoïde, après avoir réalisé un lambeau musculopériosté mastoïdien à pédicule postérosupérieur permettant, en fin d’intervention, son réamarrage.

L’identification des gros vaisseaux se fait en amont de la zone pathologique en même temps que les nerfs crâniens X, XI, et XII sont repérés.

Le tronc rétroparotidien du nerf facial est mis en évidence dans l’angle dièdre qui se dessine entre la face antérieure de la mastoïde et la face inférieure du méat auditif externe.

Il est disséqué dans la parotide jusqu’à sa bifurcation.

On poursuit de même cette dissection au niveau de sa branche inférieure cervicofaciale.

La veine intraparotidienne est sectionnée.

On aborde ensuite l’espace sousparotidien postérieur.

Le muscle digastrique est désinséré dans sa rainure et refoulé vers l’avant.

La glande parotide, au niveau de son pôle inférieur, est libérée tout en contrôlant le rameau mentonnier du nerf facial qui est mobilisé vers le haut.

L’apophyse styloïde est sectionnée après avoir été ruginée à la pince-gouge.

Le rideau des muscles styliens est dégagé en faisant attention de ne pas traumatiser le nerf glossopharyngien.

On réalise ensuite la luxation de l’articulation temporomandibulaire.

Cette manoeuvre commence par le dégagement de la face antérieure du méat auditif externe et de l’arcade zygomatique.

À l’aide d’une rugine de Tessier, on effectue une dissection sous-périostée de la cavité glénoïde audessus et en arrière du ménisque de l’articulation temporomandibulaire.

Ce temps chirurgical est parfois hémorragique ; il est cependant essentiel si on veut obtenir une luxation maximale ouvrant au mieux l’accès à l’espace interjugulocarotidien.

Pour maintenir cet écart, on met en place un écarteur spécial à crémaillère (XOMED).

Au cours de cette manoeuvre, il faut faire très attention à ne pas étirer le tronc du nerf facial.

On peut ensuite commencer l’exposition de la fosse infratemporale.

Le tronc du nerf facial est dégagé jusqu’à sa sortie du trou stylomastoïdien.

La partie sous-faciale de la glande parotide est enlevée.

La dissection dégage la partie inférieure du méat auditif externe puis se porte au niveau de l’apophyse vaginale en avant qui est progressivement exposée jusqu’à l’épine du sphénoïde.

À ce niveau est repérée l’artère méningée moyenne qui pénètre dans l’endocrâne par le foramen spinosum. La partie haute de l’artère carotide interne est recherchée au-dessus et en avant du nerf glossopharyngien.

Elle est profonde et oblique en haut et en arrière.

À ce niveau, sa dissection est souvent rendue difficile par les modifications induites par la pathologie tumorale.

Il faut donc se porter sur le canal carotidien.

Ce qui conduit à l’exposition de l’artère carotide interne dans son segment vertical intrapétreux.

On réalise si nécessaire, sous microscope opératoire, une pétrectomie de l’apophyse vaginale du tympanal après squelettisation du méat auditif externe aux niveaux antérieur, inférieur et postérieur.

Celle-ci est effectuée à l’aide d’une fraise coupante puis diamantée en passant au-dessus du tronc du nerf facial qui barre la région.

Le fraisage de l’apophyse vaginale ouvre la face externe de la portion verticale ; il remonte en haut jusqu’à l’ouverture du tube auditif.

Ceci permet un contrôle de l’artère carotide interne en amont de la tumeur.

Durant tout ce temps osseux de fraisage, il faut faire très attention à ne pas traumatiser le tronc du nerf facial.

Certains recommandent une fraise longue gainée ; on peut également, comme nous le faisons, protéger le nerf au moyen d’une petite lame malléable.

Le fraisage de la paroi antérieure du tympanal doit absolument respecter la cavité tympanique.

* Dissection tumorale :

Le jour obtenu par cet abord large favorise l’exérèse tumorale des tumeurs de type A (33 %). En règle générale, l’exérèse est facile vers le bas.

Le X est sacrifié d’emblée au-dessous du pôle inférieur de la tumeur.

La dissection est ensuite menée de proche en proche.

Dans un certain nombre de cas, la dissection de l’axe carotidien interne peut être extrêmement difficile ; la tumeur se comportant comme une « tenaille » laminant considérablement le diamètre de l’artère.

Il est impératif de contrôler la carotide interne en amont au niveau de sa pénétration dans le canal carotidien.

Le bilan préopératoire doit analyser le risque d’atteinte de l’axe vasculaire car il faut prévoir, si besoin est, son remplacement (greffe de saphène).

* Variantes :

Dans les types B et C (70 % des cas), un abord combiné du foramen jugulaire est indispensable ; il nécessite une déroutation partielle du nerf facial dans sa troisième portion (voie d’abord de Farrior) ou une voie infratemporale de Fisch type A ou B.

Dans tous les cas, l’intervention se termine par une médialisation de la corde vocale paralysée, soit au moyen d’injection de Téflont par voie endoscopique, soit au moyen d’un abord externe.

Dans un certain nombre de cas, il existe une paralysie du IX (voile du palais) qui nécessite plusieurs mois avant d’obtenir une récupération.

3- Complications de l’exérèse des paragangliomes cervicaux :

Les principales complications sont d’ordres vasculaire, neurologique et neuroendocrinien.

* Complications vasculaires :

Elles sont, soit secondaires au traumatisme chirurgical accidentel, soit la nécessité d’une réparation vasculaire peropératoire.

Dans les deux cas, le chirurgien vasculaire, normalement disponible, réalise dans l’urgence une réparation vasculaire, rarement par suture linéaire, surtout par interposition de matériel autologue (greffe de veine saphène) ou synthétique (prothèse).

Les données du bilan angiographique préopératoire et éventuellement du test de clampage sont précieuses dans ces circonstances.

* Prévention :

La préservation du flux artériel dans la carotide interne est l’un des concepts fondamentaux de la chirurgie du corpuscule carotidien et des paragangliomes vagaux.

Un geste spécifique de la réparation de la carotide interne, de la simple suture jusqu’à la reconstruction complexe par greffe, peut être indiqué dans plus de 30 % des cas.

Il s’agit habituellement de tumeurs volumineuses, englobant la carotide interne ou envahissant la paroi artérielle (groupe 3 de Shamblin).

L’indication de réparation artérielle n’étant toujours pas prévisible avant l’intervention, il est indispensable, en tous les cas, de laisser dans le champ opératoire l’accès possible à un segment de veine saphène interne, pour l’éventualité d’un remplacement artériel.

+ Clampage carotidien :

Des mesures de protection cérébrale sont indispensables avant tout clampage carotidien.

L’héparinisation systémique, à la dose de 50 UI/kg, est recommandée immédiatement avant le clampage.

Elle est souhaitable avant d’aborder un temps difficile de la dissection, en particulier avant la mobilisation finale de la tumeur de l’angle postérieur de la bifurcation, où le risque de plaie artérielle est important.

La mise en place d’un shunt endoluminal lors du clampage carotidien n’est pas systématique.

La décision est prise en fonction des données du monitoring électroencéphalographique (ECG) peropératoire, ou encore en fonction des chiffres de pression carotidienne résiduelle, l’indication de shunt étant retenue pour un chiffre inférieur au tiers de la pression artérielle humérale.

+ Spasme carotidien :

Lors de la dissection et de la traction de la tumeur, un spasme artériel peut survenir, pouvant conduire à une thrombose.

Le spasme de la carotide interne est traité par l’application locale de papavérine et, au besoin, par la dilatation endoluminale de la carotide interne, ces manoeuvres permettant d’éviter une reconstruction artérielle.

+ Procédés de reconstruction carotidienne :

La réparation carotidienne est nécessaire dans les cas de blessure accidentelle de l’axe artériel, ou lors des résections en bloc de tumeurs volumineuses englobant les troncs artériels.

Les plaies latérales de la carotide interne peuvent être réparées par une suture simple.

Le plus souvent, cependant, les bords de la plaie doivent être recoupés, la fermeture artérielle se faisant au moyen d’un patch veineux autogène (saphène interne) ou synthétique (polytétrafluoroéthylène : PTFE).

Si la plaie est trop étendue sur la circonférence de la carotide interne, la suture directe ou sur patch n’est plus possible.

Le segment artériel blessé doit alors être réséqué, la réparation étant faite, soit par anastomose directe lorsqu’on dispose d’une longueur suffisante, soit par l’intermédiaire d’une greffe.

Le matériel de remplacement est habituellement un segment veineux autogène, rarement un tube synthétique (PTFE).

Lorsque la résection d’une tumeur volumineuse emporte l’axe carotidien, la réparation artérielle se fait par l’intermédiaire d’une greffe.

Le matériau de choix est la veine saphène interne crurale.

Le segment prélevé doit être dépourvu de jeu valvulaire et de collatérales et mesurer au minimum 4 mm de diamètre.

Lorsque la veine est d’aspect fibreux ou d’un calibre inférieur à 4 mm, il est préférable d’utiliser un tube de PFTE, paroi mince, de 5 ou 6 mm de calibre.

L’implantation proximale de la greffe se fait sur l’artère carotide commune en terminolatéral, par un surjet de fil monobrin 6,0.

L’implantation distale sur la carotide interne peut se faire selon un mode terminoterminal, à l’aide de points séparés de fils monobrin 7,0.

Cependant, il est plus simple, techniquement, de réaliser une anastomose terminolatérale spatulée, avec ligature du moignon de carotide interne.

De plus, cet artifice technique réduit le risque d’hyperplasie intimale secondaire au niveau de la suture, et peut faciliter l’utilisation d’un shunt endoluminal.

Le déclampage de la carotide interne doit être précédé d’une purge généreuse pour éviter les complications thromboemboliques cérébrales.

En fin de la procédure, le contrôle anatomique de la restauration est souhaitable, au mieux par une artériographie.

* Complications neurologiques :

Elles sont aussi de deux ordres, accidentelles ou inévitables.

Les séquelles inévitables sont le fait de la section du nerf vague lors de l’exérèse d’un paragangliome du X.

Le patient doit être prévenu de cette éventualité et de ses conséquences, tant sur la voix que sur la déglutition.

Du fait de la section tronculaire du pneumogastrique, la corde vocale homolatérale se trouve plus fréquemment en abduction.

Certains ont donc proposé d’effectuer une médialisation vocale dans le même temps opératoire par l’incision de cervicotomie.

Le matériel utilisé est soit du Téflont, du Gore-Tex, ou du Silastic.

Les séquelles accidentelles sont le fait du traumatisme opératoire lors de l’exérèse tumorale, soit pendant la dissection, soit du fait de la voie d’abord.

Elles se voient surtout en cas de tumeur à extension basicrânienne.

Une paralysie faciale, outre les problèmes esthétiques, expose à des complications oculaires.

Les lésions des branches du IX et du XII exposent à des complications sur la fonction de déglutition, d’autant plus fréquentes qu’une section du X a été réalisée.

La médialisation de la corde vocale, une rééducation intensive précoce postopératoire et la protection des voies aériennes via une alimentation par sonde nasogastrique transitoire sont indispensables pour limiter la morbidité de telles lésions.

En cas de sidération simple, une rééducation prolongée peut accélérer la récupération fonctionnelle.

Les atteintes du XI sont très invalidantes sur le plan moteur ; une rééducation précoce par kinésithérapie est indispensable. Une lésion du tronc sympathique cervical est responsable d’un syndrome de Claude Bernard-Horner.

Hallet décrit trois zones de dissection autour de la fourche carotidienne, avec leur risque correspondant de complications neurologiques et vasculaires :

– zone I : bifurcation carotidienne et X ;

– zone II : carotide externe, XII, nerf laryngé supérieur ;

– zone III : carotide interne, branche mandibulaire du facial, XII, X, branche pharyngienne du X, XI et IX.

* Complications neuroendocriniennes :

Elles sont de deux types.

D’un côté, les décompensations tensionnelles lors de l’exérèse des tumeurs sécrétantes ou du fait de la présence méconnue d’un phéochromocytome.

Ces situations ne doivent plus se voir.

En effet, le bilan préopératoire dépiste la nature sécrétante de ces tumeurs et un traitement médical préventif et des précautions anesthésiques préviennent les accès hypertensifs.

Le second type de complications neuroendocrines relève de l’exérèse bilatérale des tumeurs du corpuscule carotidien.

Lors de la seconde exérèse, des anomalies de l’équilibre tensionnel ont été rapportées, à type de labilité tensionnelle : accès hypertensifs associés à d’authentiques épisodes d’hypotension orthostatique.

Cette situation est expliquée par la suppression bilatérale du fonctionnement du complexe « paraganglion carotidien-sinus carotidien ».

Une telle situation doit être prévenue par une surveillance tensionnelle étroite des patients en postopératoire.

Un traitement antihypertenseur est administré à la demande. Netterville recommande l’administration de clonidine qui, par son action centrale alpha-2-inhibitrice, prévient les poussées hypertensives et les accès de tachycardie.

L’administration de 9-fluorohydrocortisone peut être préconisée dans les formes sévères d’hypotension orthostatique.

Cette situation s’améliore généralement en quelques jours.

De façon isolée, ce même auteur a décrit chez un certain nombre de patients (19 %) opérés d’un paragangliome du vague, des douleurs de la région parotidienne, souvent sévères, survenant lors des premiers repas postopératoires et accentuées par les sialagogues.

Il a retenu le nom de « syndrome de la première bouchée » et explique cette symptomatologie par la suppression de l’innervation sympathique de la glande parotide.

B - RADIOTHÉRAPIE :

Les localisations latérocervicales des paragangliomes sont classiquement considérées comme radiorésistantes.

Le plus souvent utilisée sur des patients inopérables ou sur des lésions non réséquables, elle peut se concevoir également comme complément d’un résidu tumoral postchirurgical (paragangliome du X stade III).

Quant aux exceptionnelles formes malignes ou devant l’existence d’une métastase cervicale, ce traitement semble pour certains justifié.

On applique le plus souvent une radiothérapie externe associant cobalt-électrons à la dose moyenne de 45 Gy sur 5 semaines.

Indications thérapeutiques :

Le seul traitement curatif ne peut être que chirurgical.

Les autres options ne se conçoivent à ce jour que pour des situations de contreindications opératoires ou de récidives tumorales inaccessibles.

A - CONTRE-INDICATIONS OPÉRATOIRES :

Les contre-indications chirurgicales généralement admises relèvent de :

– altération de l’état général ou âge physiologique avancé ; – contre-indication anesthésique majeure ;

– tumeur de petite taille chez un patient âgé ;

– forme maligne d’emblée ;

– tumeur inextirpable chirurgicalement.

Dans ces cas, trois attitudes se discutent : l’abstention thérapeutique avec une surveillance régulière, la radiothérapie externe et l’embolisation.

B - PARAGANGLIOMES CAROTIDIENS :

1- Tumeur isolée :

Les stades I et II de Shamblin sont réséqués sans qu’une réparation vasculaire soit effectuée.

Dans les stades IIIa, une réparation vasculaire doit être programmée.

Un bilan angiographique complet avec un test de clampage est nécessaire.

Pour les stades IIIb, l’extension endocrânienne rend délicates la réparation vasculaire et l’exérèse.

Un geste étendu avec un abord intrapétreux de la carotide peut se discuter au cas par cas.

2- Tumeur bilatérale :

La stratégie est délicate.

La plus petite tumeur est réséquée en premier pour minimiser les risques vasculaires et neurologiques.

Le deuxième temps opératoire est réalisé 1 an après environ.

Les conséquences potentielles d’une exérèse bilatérale sont :

– la diplégie laryngée : en cas de paralysie laryngée controlatérale, le deuxième paragangliome n’est pas opéré. Une radiothérapie est souhaitable.

L’exérèse peut néanmoins être permise sous couvert d’une surveillance étroite postopératoire. Une détresse respiratoire nécessite une trachéotomie en urgence ;

– la réparation vasculaire bilatérale : une telle situation est à haut risque.

Le taux de complications vasculaires potentielles (accident vasculaire cérébral) est plus élevé ;

– la décompensation tensionnelle : la suppression du complexe « sinus carotidien-paraganglion carotidien » par exérèse chirurgicale ou désafférentation est responsable d’une labilité tensionnelle et cardiaque déjà développée plus haut. Une surveillance étroite de ces patients est indispensable.

La situation s’améliore en quelques jours, le relais fonctionnel étant assuré par d’autres structures baroet chémoréceptrices (paraganglions interaortiques...).

3- Paragangliome aortique associé à un paragangliome vagal controlatéral :

L’exérèse de la tumeur vagale est responsable d’une paralysie laryngée quasi-constante.

La localisation carotidienne doit donc être réséquée en premier.

En l’absence de complications, le côté controlatéral est opéré à distance.

Dans le cas contraire, une radiothérapie est préconisée.

C - PARAGANGLIOME DU VAGUE :

1- Tumeur isolée :

La résection s’effectue au prix du sacrifice du nerf vague dans la plupart des cas.

Certaines tumeurs juxtavagales pourraient être disséquées du tronc du X.

Les principales difficultés de l’abord chirurgical résident dans le contrôle du pôle supérieur basicrânien et du prolongement parapharyngé.

La résection du rideau stylien est systématique.

2- Paragangliome vagal bilatéral :

Le sacrifice bilatéral du nerf vague n’est pas compatible avec une vie sociale normale et expose à une morbidité importante (trouble sévère de la déglutition, trachéotomie, déséquilibre tensionnel, tachycardie, désordres digestifs...).

En conséquence, la lésion la plus volumineuse est réséquée.

La tumeur controlatérale bénéficie d’une surveillance simple ou d’une radiothérapie.

En cas d’augmentation de volume, une exérèse peut s’envisager mais se discute au cas par cas.

D - PARAGANGLIOMES MALINS :

Le diagnostic est affirmé par la présence de métastases.

Ces métastases ont une évolutivité lente et des survies prolongées sont possibles.

Leur traitement relève de la radiothérapie à visée symptomatique, de la chimiothérapie ou des traitements par irathérapie in situ.

E - RÉCIDIVES TUMORALES :

Elles doivent bénéficier d’une nouvelle exérèse chirurgicale.

Si une nouvelle chirurgie est trop risquée, un traitement par radiothérapie est envisagé.

Conclusion :

Les paragangliomes latérocervicaux sont des tumeurs rares, généralement bénignes et isolées.

Le bilan initial est essentiel, tant pour éliminer une forme sécrétante, multifocale ou maligne que pour dépister d’autres cas familiaux dont la fréquence réelle est probablement sousestimée.

Une forme héréditaire doit déboucher sur une enquête familiale et le dépistage des tumeurs présymptomatiques.

Le bilan préthérapeutique doit pouvoir répondre à une question : y-aura-t-il besoin d’un geste de réparation vasculaire ?

Si tel est le cas, toutes les précautions doivent être prises pour en limiter la morbidité.

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