Les neuroleptiques (définition de Delay et Deniker, 1957) :
– possèdent une action psycholeptique à l’origine d’une
indifférence psychomotrice mais sans action hypnotique ;
– provoquent une diminution de l’agitation et de l’agressivité
;
– ont une action réductrice sur les psychoses aiguës et
chroniques ;
– sont à l’origine d’une production d’effets secondaires
neurologiques et neurovégétatifs ;
– et ont une action sous-corticale dominante.
Les neuroleptiques atypiques sont des molécules antipsychotiques
qui ne répondent pas nécessairement au
4e critère de définition.
Plusieurs neuroleptiques atypiques
sont commercialisés en France : les premiers ont
été les benzamides substituées (amisulpride, sulpiride)
suivis par la loxapine, la clozapine, la rispéridone, l’olanzapine
; d’autres molécules sont en développement (quétiapine,
sertindole, ziprazidone).
Modes d’action
:
Les neuroleptiques ont comme principale action pharmacodynamique
de bloquer les récepteurs dopaminergiques
(D1, D2, D3, D4 et D5) centraux ; ce mécanisme dans les
régions mésocorticale et mésolimbique sous-tendrait
l’action antipsychotique des neuroleptiques alors qu’au
niveau du système nigrostrié, il serait à l’origine des effets
secondaires neurologiques et au niveau du système tubéro-infundibulaire, des complications neuro-endocriniennes
(en lien avec la sécrétion de prolactine et de
l’hormone de croissance).
Simultanément, les neuroleptiques peuvent bloquer
d’autres récepteurs cérébraux et périphériques conduisant
à l’apparition d’effets secondaires :
– récepteurs cholinergiques et muscariniques (M1 et M2) ;
– récepteurs adrénergiques (en particulier a1) ;
– récepteurs histaminiques (en particulier H1).
Outre leur plus faible risque d’effets secondaires neurologiques,
les neuroleptiques atypiques présentent un
moindre risque d’hypersécrétion de prolactine.
Certains
ont une action essentiellement antisérotoninergique
(5HT2) souvent associée à une meilleure efficacité sur
les symptômes négatifs de la schizophrénie.
Classifications
:
Selon la structure chimique
:
Selon l’effet thérapeutique
1- Classification bi-axiale de Deniker
et Ginestet (1973)
:
Elle oppose les effets sédatifs aux effets désinhibiteurs,
tout en tenant compte d’une relative corrélation aux
effets secondaires prédominants.
2-
Classification bipolaire de Petit et Colonna (1978) :
Elle distingue :
• les neuroleptiques « monopolaires » toujours sédatifs
avec un effet neurovégétatif prédominant ;
• les neuroleptiques « bipolaires » possédant un effet
stimulant (ou désinhibiteur) à faible dose et un effet
réducteur (ou sédatif) à plus forte dose.
3- Groupe des neuroleptiques semi-retard
et retard
:
En dehors du penfluridol administré per
os, ils sont tous administrés par voie intramusculaire, dilués dans
un composé huileux ; leur durée d’action varie entre 2 et 4
semaines.
Il n’existe pas
de forme retard des neuroleptiques atypiques actuellement.
• L’intérêt à utiliser un neuroleptique retard porte sur
(Conférences de consensus, 1994) : la réduction de la
dose quotidienne ; l’amélioration de l’observance thérapeutique
; la facilitation de la prescription et de l’administration
du traitement ambulatoire.
• Les inconvénients sont : l’impossibilité d’interruption
immédiate en cas d’accidents graves (en particulier,
syndrome malin), d’où la nécessité absolue de
prescrire avant tout neuroleptique retard, le même neuroleptique per os ou un neuroleptique appartenant à la
même classe chimique ; les mêmes complications
qu’avec les neuroleptiques per os.
Effets latéraux
:
A - Effets neurologiques indésirables
:
1- Signes extrapyramidaux précoces
:
Ils peuvent survenir en dehors d’un surdosage et
dépendent de la sensibilité individuelle du patient.
Ils
s’observent avec une moindre fréquence pour les neuroleptiques
atypiques prescrits aux doses préconisées.
• Les dystonies aiguës sont des troubles aigus du mouvement
apparaissant brutalement dans les 36 premières
heures du traitement ; elles touchent :
– la zone bucco-linguo-faciale, avec un trismus, un
défaut d’occlusion buccale avec protrusion de la
langue, une hypersalivation, des troubles de déglutition,
des crises dyspnéiques, des crises oculogyres ;
– l’axe corporel, avec un torticolis ou un opisthotonos.
Elles relèvent d’un traitement par les antiparkinsoniens
anticholinergiques administrés per os ou par voie intramusculaire,
en tenant compte des effets secondaires
atropiniques.
Selon les Références médicales opposables (RMO,
1995) « il n’y a pas lieu d’administrer d’emblée, à titre
préventif, des correcteurs anticholinergiques lors de la
mise en route d’un traitement neuroleptique, sauf chez
les malades à risque (personnes âgées, antécédents de
parkinsonisme, ou d’autres dysfonctionnements cérébraux)
; par ailleurs, il n’y a pas lieu, du fait des dangers
potentiels (augmentation du risque des effets secondaires
atropiniques), d’associer 2 correcteurs anticholinergiques
».
• Le syndrome parkinsonien apparaît à l’imprégnation
du traitement neuroleptique.
Des effets extrapyramidaux
peuvent apparaître au-delà de 6 mg de rispéridone et 15
mg d’olanzapine.
Ce tableau regroupe l’akinésie ou rareté du mouvement
(diminution des réflexes de posture) et de la mimique
(hypomimie, avec réflexe nasopalpébral inépuisable),
l’hypertonie musculaire plastique (phénomène de la
roue dentée : hypertonie musculaire de repos plastique
cédant par à-coups), un tremblement lent à la fois intentionnel
et de repos, un appauvrissement émotionnel
(apathie) avec ralentissement de l’activité mentale
(bradykinésie).
Un traitement correcteur par anticholinergiques
est indiqué.
• L’akathisie et la tasikinésie (syndrome hyperkinétique)
: l’akathisie correspond à l’impossibilité de rester
assis et la tasikinésie au besoin incoercible de mouvements.
Ces effets peuvent toucher jusqu’à 50 % des
patients, précocement après l’instauration du traitement
ou non. Seuls les b-bloquants ou les benzodiazépines
peuvent parfois engendrer une amélioration.
2- Signes extrapyramidaux tardifs :
les dyskinésies tardives
Leur prévalence varie de 20 à 30 % et augmente avec
l’âge.
L’incidence varie avec la durée d’exposition aux
neuroleptiques.
Les dyskinésies tardives peuvent apparaître
après plusieurs semaines à plusieurs mois de
traitement, à l’occasion d’une baisse de posologie voire
à l’arrêt du traitement et concernent tous les neuroleptiques.
Les neuroleptiques atypiques (clozapine)
induiraient moins de dyskinésies tardives.
Le tableau est caractérisé par des mouvements involontaires,
répétitifs, sans but, dans la sphère orofaciale (syndrome
bucco-linguo-masticateur) mais également au
niveau du tronc (mouvements choréo-athétosiques). Un
tiers des dyskinésies tardives régresse après plusieurs
mois d’interruption de traitement, or les correcteurs
antiparkinsoniens sont inefficaces et peuvent même les
aggraver.
3- Épilepsie
:
Les neuroleptiques abaissent le seuil épileptogène et sont
à utiliser avec prudence chez les patients épileptiques.
B - Effets divers
:
1- Effets cardiovasculaires
:
Ces effets sont :
– a-adrénolytiques, à l’origine d’une sédation par action
centrale ou d’une hypotension artérielle orthostatique
initiale imposant une surveillance tensionnelle.
Les
correcteurs sont l’Hept-a-myl, le Praxinor, le Séglor ;
– une tachycardie sinusale : elle est dépendante de la dose ;
– l’allongement de l’axe QT : il concerne les neuroleptiques
classiques ou atypiques (sertindole, ziprazidone)
; une arythmie grave (torsade de pointes) peut
survenir, d’origine polyfactorielle (maladie cardiaque
antérieure, troubles électrolytiques, association à des
substances médicamenteuses arythmogènes).
2- Effets anticholinergiques (atropiniques)
:
Ils sont surtout le fait des phénothiazines et se traduisent
par des effets centraux et périphériques.
3- Effets endocriniens
:
Générés essentiellement par l’hyperprolactinémie due
au blocage des récepteurs dopaminergiques au niveau
tubéro-infundibulaire, ils concernent tous les neuroleptiques
avec une prédominance pour les benzamides.
Les neuroleptiques atypiques comme la clozapine et
l’olanzapine engendreraient moins d’hyperprolactinémie.
• Les troubles sexuels sont représentés par l’anorgasmie,
une baisse de la libido, une impuissance, une frigidité,
des troubles de l’éjaculation.
• La gynécomastie avec éventuelle galactorrhée : chez
la femme, l’apparition de dysménorrhée ou d’un syndrome aménorrhée-galactorrhée justifie un bilan gynécoendocrinien et un traitement correcteur par la bromocriptine,
un agoniste dopaminergique (Parlodel, 2,5 ou 5 mg/j),
associé ou non à un changement de neuroleptique.
• prise de poids : elle s’observe surtout en début de traitement
et est d’origine polyfactorielle.
Elle nécessite un
régime hypocalorique, une diminution de la posologie
voire un changement de neuroleptique.
La plupart des
nouveaux neuroleptiques induisent une prise de poids
parfois invalidante probablement en lien avec leur action
au niveau du système sérotoninergique.
C - Manifestations diverses
:
1- Manifestations cutanées
:
Il s’agit de :
– coloration mauve en aile de papillon au niveau de la
face (purple-people) ;
– photosensibilisation (phénothiazines) d’où la nécessité
d’une protection cutanée lors de l’exposition des
patients au soleil et (ou) de changer de classe chimique
de neuroleptique ;
– dépôts pigmentaires cornéens, cristalliniens et rétiniens
surtout avec des traitements prolongés par phénothiazines
;
– diverses réactions allergiques cutanées, nécessitant de
changer de classe chimique de neuroleptiques.
2- Accidents hématologiques
:
Le plus fréquent est une leucopénie bénigne, dépendante
de la dose, avec lymphocytose relative qui ne doit pas
faire arrêter le traitement.
Une agranulocytose peut
survenir notamment sous phénothiazines entre le 10e et
le 90e jour de traitement (1 à 2 % pour la clozapine),
nécessitant l’arrêt immédiat du traitement
3- Accidents digestifs
:
Les accidents digestifs sont :
– une sécheresse de la bouche à l’origine de gingivite,
caries, candidoses buccales ;
– une constipation qui peut évoluer vers une occlusion
intestinale par atonie (à redouter chez le sujet âgé) ;
– des complications hépatiques toxiques (hépatites cholestatiques)
provoquées surtout par Largactil, réversibles
à l’arrêt du traitement, et hépatites cytolytiques (avec
Zyprexa par exemple).
Ces complications nécessitent
de changer de classe chimique de neuroleptique.
4- Accidents urinaires
:
La dysurie, en rapport avec les effets atropiniques des
neuroleptiques, peut aboutir à une rétention aiguë d’urine.
Des incontinences urinaires ont été rapportées avec Leponex, dans les 3 premiers mois du traitement.
5- Syndrome malin
:
Il s’agit de l’accident le plus grave : le taux de mortalité
est de 10 à 20 %.
Ce syndrome peut survenir avec n’importe
quel neuroleptique au cours du traitement, quelles que soient la voie d’administration et la posologie.
Il est
favorisé par des antécédents de pathologie neurologique,
une lithothérapie, des antécédents d’un tel accident.
Le tableau clinique associe une hyperthermie inexpliquée
avec sueurs profuses, une pâleur, des troubles du
tonus avec rigidité extrapyramidale très importante, un
état d’hébétude et des signes de déshydratation avec
hypotension et tachycardie.
Progressivement et rapidement
(en 24 à 48 h) s’installent des troubles de la vigilance
et des troubles cardio-respiratoires et neurologiques.
Le bilan biologique révèle une élévation de la
créatine phosphokinase (CPK) et des transaminases
ainsi qu’une hyperleucocytose avec polynucléose.
Le
meilleur traitement est préventif et repose sur l’arrêt
immédiat des neuroleptiques devant toute hyperthermie
inexpliquée et (ou) le transfert en réanimation dès la
moindre suspicion du syndrome malin.
En plus du traitement symptomatique pour refroidir le
patient, de la surveillance des signes vitaux et de la
fonction rénale, le dantrolène (Dantrium, relaxant du
muscle squelettique qui interfère avec la libération du
calcium par le réticulum sarcoplasmique) est utilisé à la
dose de 1 mg/kg par voie orale 4 fois par jour, ou de 1 à
5 ou 10 mg/kg par voie intraveineuse.
Certains utilisent
de plus la bromocriptine, des anticholinergiques ou des
benzodiazépines.
6- Effets psychiques indésirables
:
• Le syndrome d’indifférence psychomotrice ou syndrome
de passivité comprend un état de passivité, d’asthénie,
de perte de l’affectivité, du refus des contacts, de
désintérêt, et parfois d’une somnolence diurne.
Il nécessite
une diminution de la posologie voire un changement
de neuroleptique. Parallèlement à leur efficacité sur les
symptômes psychotiques, les neuroleptiques atypiques
semblent mieux préserver les fonctions cognitives
(attention, mémoire, fonctions exécutives) que les neuroleptiques
classiques.
• Le syndrome dépressif est fréquent (la fréquence de
survenue d’une dépression post-psychotique serait de
25 %). L’étiopathogénie n’est pas univoque (perte de
la fonction du délire, effet iatrogénique des neuroleptiques)
et peut nécessiter une coprescription par des
antidépresseurs qui doit alors prendre en compte l’effet
additif éventuel anticholinergique, sédatif et hypotenseur.
Les neuroleptiques atypiques induiraient moins de
manifestations dépressives (clozapine, rispéridone,
olanzapine) que les neuroleptiques classiques.
• La somnolence est le fait des neuroleptiques sédatifs
et de l’administration de posologies élevées.
Elle peut
être associée à des céphalées et des nausées.
Il est alors
nécessaire de réduire la posologie voire de changer de
produit ; une administration vespérale peut aussi être
envisagée. Les neuroleptiques atypiques, en particulier
l’olanzapine et la rispéridone ont moins d’effets sédatifs
aux doses préconisées que les neuroleptiques classiques.
• Les accès d’angoisse et la réactivation délirante
sont retrouvés dans 2 situations : l’apparition d’effets extrapyramidaux aigus et l’aggravation d’un état délirant
par utilisation d’une trop faible dose d’un neuroleptique
stimulant ou désinhibiteur.
• Les accès confuso-oniriques sont observés surtout
chez le sujet âgé lorsque les neuroleptiques sont associés
à des antiparkinsoniens ou lorsque ces neuroleptiques
ont une action anticholinergique.
Indications et efficacité
:
Les principaux effets recherchés sont : la sédation, les
effets antipsychotiques réducteurs, les effets antipsychotiques désinhibiteurs ou stimulants ou effets antidéficitaires.
Les psychoses représentent le champ d’action le plus
spécifique des neuroleptiques, et la schizophrénie l’indication
de choix.
A - Psychoses aiguës
:
1- Accès maniaques
:
Les accès maniaques bénéficient de la prescription de
neuroleptiques de type sédatif (chlorpromazine, cyamémazine,
lévomépromazine) efficaces sur l’excitation
psychomotrice.
La prédominance du délire et des hallucinations
nécessite la mise en place d’un traitement par
halopéridol.
L’acétate de zuclopenthixol, d’action semiprolongée,
permet d’obtenir un effet sédatif rapide et
prolongé pendant 2 à 3 jours.
2- Psychoses délirantes aiguës
:
Il s’agit de la bouffée délirante aiguë, des accès confusooniriques,
des pharmacopsychoses ou des psychoses
puerpérales.
On aura recours aux neuroleptiques sédatifs surtout lorsqu’il
existe une agitation importante (chlorpromazine, cyamémazine, lévomépromazine) ou aux neuroleptiques
réducteurs (halopéridol) en raison de leur efficacité sur
les délires et les hallucinations.
De préférence, on choisira
une monothérapie (un seul neuroleptique).
Les neuroleptiques
atypiques comme le Zyprexa (10-15 mg/j) ou
le Risperdal (6-8 mg/j) peuvent également être prescrits
du fait d’une meilleure tolérance neurologique.
B - Psychoses chroniques
:
1- Schizophrénies
:
Les neuroleptiques représentent le traitement de fond,
autour duquel seront développées d’autres mesures
(psychothérapies et sociothérapies).
Le traitement varie
selon le moment de l’instauration (traitement d’attaque
ou d’entretien) et selon la forme clinique (paranoïde,
désorganisée, catatonique, déficitaire).
Dans les formes
paranoïdes, on aura recours aux neuroleptiques ayant
une action sur le délire et l’hallucination (par exemple
halopéridol, olanzapine, rispéridone).
Alors que dans les formes où prédominent les symptômes négatifs (forme
hébéphrénique, désorganisée…), on a recours aux neuroleptiques désinhibiteurs ou stimulants (sulpiride,
pimozide, pipotiazine, amisulpride à faibles doses ; à
titre indicatif : Solian, 100-300 mg/j).
L’action des neuroleptiques
atypiques dans le traitement de la symptomatologie
négative de la schizophrénie est également
une avancée par rapport aux neuroleptiques classiques
mais reste controversée.
Les Références médicales opposables précisent qu’« il n’y
a pas lieu, dans le traitement d’entretien de la psychose,
d’associer deux neuroleptiques à visée antipsychotique ».
2- Délires chroniques
:
• La psychose hallucinatoire chronique relève d’un
neuroleptique antiproductif tel que l’halopéridol ou la
rispéridone (action sur les hallucinations et le délire).
• Dans les délires paranoïaques, les neuroleptiques
permettent de diminuer l’asthénie, la vigueur revendicatrice
et les risques de passage à l’acte.
Cependant, les
éléments délirants sont peu accessibles au traitement.
Les neuroleptiques sédatifs sont les plus utilisés dans
cette indication, parfois associés aux neuroleptiques
incisifs ou antiproductifs.
La prescription d’un neuroleptique
retard est utile pour une meilleure observance.
• Les paraphrénies imaginatives relèvent aussi d’un traitement
neuroleptique en général sédatif ou antiproductif.
3- Schizophrénies dites résistantes
:
Dans le traitement de cette forme clinique, l’intérêt de la clozapine (Leponex) a été montré.
La résistance au traitement
neuroleptique peut être définie par la survenue de
3 phases psychotiques processuelles au cours des 5 dernières
années d’évolution et d’utilisation d’au moins
2 classes chimiques différentes de neuroleptiques à des
doses réputées efficaces pendant au moins 6 semaines.
4- Autres indications
:
• Les mélancolies délirantes relèvent avant tout d’un
antidépresseur auquel peuvent être associés des neuroleptiques
de type sédatif lorsqu’il existe des troubles du
comportement (agitation), une angoisse importante, ou
un risque de passage à l’acte redouté. Ainsi, la cyamémazine
ou la lévomépromazine peuvent être utilisées à
la posologie de 25 à 150 mg/j.
• Les insomnies rebelles peuvent relever de neuroleptiques
à petites doses (lévomépromazine, 10 à 20 mg au
coucher).
• Indications accessoires : dans la pathologie psychosomatique
surtout de type digestif, des benzamides
comme le sulpiride pourront être utilisés.
Dans les mouvements
anormaux, les neuroleptiques sont prescrits
dans le traitement de la chorée de Huntington, le syndrome
de Gilles de la Tourette, les tics, les dystonies.
Pour les nausées, les vomissements graves au cours de
chimiothérapies anticancéreuses, des neuroleptiques
comme la chlorpromazine ou l’halopéridol peuvent être
utilisés.
Au cours des vomissements gravidiques, on
peut prescrire le métoclopramide (Primpéran).
• Prescription
selon l’âge :
on évite les neuroleptiques ayant une action anticholinergique
chez le sujet âgé car ils risquent d’accentuer
ou d’engendrer une syndrome confusionnel.
La personne
âgée peut bénéficier des neuroleptiques atypiques
(rispéridone, olanzapine).
Les posologies seront plus
faibles qu’à l’âge adulte.
Chez l’enfant, les principales indications psychiatriques
sont les psychoses et l’autisme lorsqu’il existe des
troubles du comportement.
• Grossesse : l’apparition d’un épisode psychotique
aigu est une urgence médicale et obstétricale.
Le traitement
neuroleptique doit être poursuivi pendant la grossesse
des mères psychotiques : en limitant les rechutes,
cette couverture thérapeutique permet de minimiser
l’exposition globale du foetus aux médicaments.
Le
risque malformatif n’est pas évalué pour la clozapine ;
son utilisation, surtout au cours du 1er trimestre, ne doit
être envisagée que si nécessaire.
Enfin, il est souhaitable
de diminuer les posologies en fin de grossesse.
Conduite de la cure neuroleptique
:
La cure neuroleptique a pour objectif de suspendre un
certain nombre de symptômes cibles en permettant une
meilleure adaptation comportementale.
A - Mise en route et suivi du traitement
:
1- Éliminer les contre-indications
:
Il n’existe pas de contre-indication absolue.
Les contreindications
relatives et les précautions d’emploi sont :
• la maladie de Parkinson (si la prescription est indispensable,
on choisit un neuroleptique ayant peu d’effets
extrapyramidaux comme la clozapine, la rispéridone
ou l’olanzapine) ;
• la sclérose en plaques lors d’une poussée ;
• toute maladie dégénérative du système nerveux
central ;
• la porphyrie (seule la chlorpromazine peut être utilisée)
;
• une comitialité mal équilibrée ;
• un risque connu de glaucome à angle fermé qui
contre-indique les neuroleptiques anticholinergiques ;
• les antécédents de syndrome malin qui nécessitent
alors la mise en route d’un traitement par un neuroleptique
d’une autre classe chimique que celui incriminé ;
• la clozapine (antécédents de leucopénie, d’agranulocytose)
;
• des dyskinésies tardives invalidantes, diminuées puis
aggravées par les neuroleptiques ;
• les affections cardiovasculaires graves ;
• la grossesse et l’allaitement : le traitement doit être
évité surtout durant les 10 premières semaines même
si le risque tératogène est faible ; l’allaitement est à
proscrire. L’innocuité de Risperdal et de Zyprexa pendant
la grossesse n’a pas été établie.
2- Bilan
:
Au début et au cours de la cure neuroleptique, le bilan
doit comporter :
• une numération formule sanguine, afin d’apprécier
par rapport à l’examen initial une toxicité sanguine
imputable au traitement ; pour la clozapine, instaurée en
milieu hospitalier, un bilan hématologique préalable et
une surveillance hebdomadaire puis mensuelle de la
numération de formule sanguine est obligatoire ;
• un bilan hépatique, afin d’apprécier une éventuelle
toxicité hépatique des neuroleptiques et de préciser son
type ;
• un bilan ophtalmologique, afin de rechercher l’apparition
de dépôts pigmentaires ;
• une glycémie, afin de rechercher une hyperglycémie
discrète, décrite sous neuroleptiques ;
• la vitesse de sédimentation, afin d’évaluer une accélération
;
• un électroencéphalogramme, afin d’avoir un tracé de
référence sans traitement ;
• un électrocardiogramme, afin d’apprécier le retentissement
des effets cardiovasculaires.
B - Choix du neuroleptique
:
Le choix du neuroleptique et de sa posologie se fera en
fonction des effets psychiques attendus.
Le patient doit
être informé de la nature de son traitement et des effets
secondaires.
Un traitement neuroleptique conduisant à une stabilité
de la maladie schizophrénique et sans effets secondaires
indésirables ne nécessite pas de modification du traitement
(classe de neuroleptique, posologie).
À l’inverse, l’existence d’effets indésirables invalidants
(en particulier neurologiques), à l’origine d’une mauvaise
observance, peut conduire à la substitution d’un neuroleptique
classique par un neuroleptique atypique.
C - Traitement précoce
:
La posologie est adaptée en fonction de l’évolution
clinique, en recherchant une dose minimale efficace.
La
règle doit être la monothérapie.
Dans les premiers jours,
il peut être justifié d’avoir recours à la voie parentérale.
Le passage à la forme orale se fait dès que possible.
1- Recherche rapide d’un effet sédatif
et d’un effet antipsychotique réducteur :
• En cas d’agitation psychomotrice : le sultopride
(contre-indiqué chez les insuffisants cardiovasculaires
graves, doit être prescrit en l’absence de bradycardie et
uniquement en monothérapie) ou le dropéridol ou la
loxapine par voie intramusculaire ou l’acétate de zuclopenthixol
semi-retard.
• En cas d’angoisse psychotique (souvent liée à un
délire) : cyamémazine, lévomépromazine, chlorpromazine
(100 à 300 mg/j).
• En cas de manifestations agressives : injection intramusculaire
de sultopride ou dropéridol.
2- Recherche d’un effet désinhibiteur
secondaire, voire d’un effet antidéficitaire :
Devant une symptomatologie négative prédominante,
il convient de prescrire des neuroleptiques à faibles
doses tels le sulpiride (100-200 mg/j), la pipotiazine
(5-10 mg/j), la thiopropérazine (5-10 mg/j), le pimozide
(2-5 mg/j), l’amisulpride (150-300 mg/j).
3- Recherche d’un effet antipsychotique
réducteur moyen :
Devant un syndrome délirant aigu ou chronique, l’halopéridol
(10-20 mg/j), la thiopropérazine (5-100 mg/j) ou
la fluphénazine (50-200 mg/j), la rispéridone (6-8 mg/j),
l’olanzapine (10-15 mg/j) sont les médicaments recommandés.
D - Traitement d’entretien
:
Le traitement des psychoses chroniques est prolongé,
souvent à vie.
Dans le cadre des psychoses chroniques
productives, l’amélioration peut se manifester dès la
3e semaine de chimiothérapie neuroleptique.
Une fois
l’accès processuel contrôlé, la posologie du neuroleptique
est diminuée jusqu’à l’obtention d’une dose minimale
préventive d’une rechute (en moyenne 20 à 30 % de la
posologie initiale).
Le passage d’un neuroleptique per
os à un neuroleptique retard est discuté. L’arrêt du traitement
peut se faire après une durée d’un an pour une
bouffée délirante aiguë.
Dans le cas d’une pathologie
chronique, l’arrêt se conçoit après une stabilisation de
5 ans au minimum avec une décroissance progressive des
doses sur 8 semaines.
Toutefois, l’évolution est émaillée
de rechutes nécessitant bien souvent un traitement à vie.
Chez le patient schizophrène, 2 situations cliniques particulières
peuvent bénéficier de l’association d’un autre
psychotrope au neuroleptique : le lithium pour la schizophrénie dysthymique, un traitement antidépresseur en
cas de dépression secondaire.
E - Mise en route d’un neuroleptique
atypique et (ou) substitution
aux neuroleptiques classiques :
Pour débuter un traitement par la rispéridone ou l’olanzapine,
il est conseillé de diminuer progressivement les
doses du neuroleptique classique jusqu’à l’arrêt tout en
augmentant progressivement celles du neuroleptique
atypique.
Du fait de leurs effets anticholinergiques, la transition de
la clozapine à l’olanzapine (et inversement) peut se faire
sans risque de rebond cholinergique (hypersialorrhée,
nausées, vomissements et diarrhées).
Le passage brutal
de la clozapine à la rispéridone, dépourvue d’effet anticholinergique,
peut cependant être à l’origine de ce
rebond.
Ce risque peut être atténué grâce à l’utilisation
transitoire d’un anticholinergique.
Tout début ou arrêt
d’un traitement par la clozapine doit être graduel, en cas
d’échec et après arrêt du neuroleptique classique.