Néphropathies glomérulaires et interstitielles chez les sujets âgés Cours de Néphrologie
Introduction
:
Les maladies glomérulaires et insterstitielles sont les affections
rénales les plus fréquentes de l’adulte, il n’est pas étonnant qu’elles
aient retenu l’attention et aient été explorées chez les personnes
âgées.
Des séries épidémiologiques de maladies glomérulaires ont
ainsi été publiées, elles intéressent surtout des « jeunes-vieux » et
peu de personnes de plus de 75 ans.
Seules les pathologies à
sémiologie clinique haute en couleur ont bénéficié d’examen
histologique, le devenir évolutif n’a pas été exploré.
La fréquence
des modifications immunologiques habituelles à la vieillesse en a
sans doute augmenté la fréquence et compliqué le traitement.
Les
néphropathies interstitielles (NI) ont longtemps été dominées, du
moins chez l’homme, par la pathologie urologique obstructive ; un
meilleur dépistage et le traitement précoce de celle-ci ont réduit la
fréquence de ce type d’atteinte. Les lésions toxiques du tissu
interstitiel sont reconnues de plus en plus fréquemment.
Dans une première rubrique, les glomérulopathies seront décrites,
divisées en maladie rénales primitives et secondaires.
La place de la
biopsie rénale et des traitements immunosuppresseurs sera
brièvement évoquée.
Puis les néphropathies interstitielles aiguës
(NIA), en particulier médicamenteuses, suivies des atteintes
chroniques seront envisagées. Le rein du myélome est également
traité dans cette partie.
L’accent sera mis sur les néphropathies dont la fréquence est la plus
élevée, et sur les particularités que le vieillissement confère aux
maladies rénales parenchymateuses dans leur aspect clinique, leur
évolution et les modalités de leur traitement.
Néphropathies glomérulaires
:
Les données concernant les néphropathies glomérulaires des sujets
âgés proviennent pour l’essentiel des séries biopsiques.
Elles sont
donc entachées d’un biais, car elles résultent de politiques
d’exploration différentes selon les pays voire les équipes.
Ainsi,
malgré une croissance régulière des biopsies pratiquées au profit des
plus vieux (6 % du total en 1978 et 21 % en 1990), comme en
témoigne la consultation du Medical Research Council’s
Glomerulonephritis Registry (MRCR), des anomalies isolées du
sédiment urinaire sont bien moins souvent à l’origine de l’examen
chez des sujets âgés que chez des plus jeunes (8 % comparés à
35 %).
Une tendance identique est confirmée par l’analyse du
Registre piémontais, qui met en évidence une croissance générale
du nombre de biopsies, se développant surtout au profit des
personnes âgées (7 % entre 1980 et 1984, 15 % entre 1990 et 1994), un
recul de l’âge des biopsiés mais une différence des indications par
rapport à une population plus jeune (6,1 % des biopsies pour
anomalie isolée du sédiment urinaire comparé à 35,7 %).
L’approche par les documents histologiques doit donc être
complétée par la recherche de séries cliniques des néphropathies les
plus fréquentes à cet âge, et par la consultation des registres de
dialyse, soit européens (souvent incomplets), soit de l’United States
Renal Data System (USRDS), qui permettent de connaître la
fréquence des maladies rénales parvenant au stade de l’insuffisance
rénale chronique terminale (IRCT).
A - ÉPIDÉMIOLOGIE
:
La prévalence des maladies glomérulaires s’accroît à partir de la
cinquantaine.
Au Danemark, entre 1985 et 1997, elle est évaluée à 80
par million d’habitants et par an chez les 60-70 ans, deux fois celle
des 40-50 ans, et à 60 par million d’habitants et par an pour les plus
de 80 ans.
Les hommes sont plus souvent affectés que les femmes (sex-ratio :
1,61) ainsi que le montrent six séries de la littérature.
L’USRDS révèle que les glomérulopathies (en incluant le diabète)
représentent 53,2 % du recrutement des 357 051 nouveaux cas
dialysés entre 1993-1997.
Les plus de 64 ans comptent pour un peu
moins de la moitié des diabétiques (44,1 %), un tiers des glomérulopathies primitives (34,5 %) et un quart des
glomérulopathies secondaires ou expression d’une vascularite
(23,7 %).
Dans cette tranche d’âge, le diabète rend compte de 37,3 %
des nouveaux dialysés, les glomérulopathies primitives de 7,6 % et
les secondaires de 1,2 %.
En Europe et plus particulièrement en
France, la proportion de diabétiques est moindre ; en 1998, en Île-de-
France, elle est de 20,6 % (tous âges compris) et en Rhône-Alpes de
10,8 %.
B - SYMPTOMATOLOGIE
:
La symptomatologie conduisant à la biopsie rénale, dans le registre
du MRCR, est un syndrome néphrotique dans 52 % des examens
(contre 32 % chez les moins de 65 ans), une néphrite aiguë avec
insuffisance rénale dans 14 % (contre 11 %), une insuffisance rénale
chronique dans 20 % (contre 7 %), une protéinurie-hématurie chez seulement 8 %
(comparé à 35 %). On retrouve des données semblables dans le registre
piémontais.
Outre une stratégie biopsique, ces indications
traduisent aussi les limites du dépistage des maladies rénales chez
les sujets âgés.
En effet, hormis certaines circonstances (hypertension
artérielle, maladie ou traitement susceptible de complication rénale,
hospitalisation), la recherche d’une protéinurie ou d’une hématurie
n’est guère de pratique courante dans cette population et, même en
leur présence, elles ne donnent pas lieu à une investigation
complète.
Les néphropathies sont donc généralement mises en
évidence et étudiées en présence d’un tableau clinique agressif ou
susceptible de bénéficier d’un traitement efficace.
Il est probable que
la fréquence de la maladie rénale glomérulaire demeure minorée,
malgré une politique plus libérale de la biopsie rénale.
C - NÉPHROPATHIES GLOMÉRULAIRES
IDIOPATHIQUES OU PRIMITIVES :
Ces
néphropathies glomérulaires ne reconnaissent actuellement pas de
cause : elles sont définies par leur seul aspect histologique. Leur
incidence paraît plus élevée que dans la population plus jeune : 82
nouveaux cas par million d’habitants et par an pour les 65-74 ans,
comparés à 58 pour la population comprise entre 15 et 64 ans.
La répartition
ne diffère pas dans les 107 glomérulopathies biopsiées chez des
sujets âgés de plus de 75 ans.
Ces études sont antérieures à 1993,
la néphropathie membranoproliférative est actuellement moins
fréquente et a pratiquement disparu en France.
Les glomérulonéphrites (GN) extramembraneuses (GNEM) et
prolifératives rapidement progressives (GNRP) y sont plus
nombreuses que chez l’adulte.
1- Glomérulonéphrite extramembraneuse
:
La GNEM idiopathique est la forme histologique la plus fréquente,
et rend compte de 26 à 45 % des glomérulopathies.
Son incidence en Italie entre les années 1990-1994 est de 34 nouveaux
cas par million d’habitants et par an pour les plus de 65 ans, et de
20,5 pour les plus de 75 ans, l’incidence pour la population totale
est de 13,1 et elle est plus fréquente chez les hommes que chez les
femmes.
Elle représente 70 % des GNEM rencontrées dans cette
tranche d’âge, les GNEM secondaires rendent compte des 30 %
restants.
Un syndrome néphrotique en est la traduction clinique la plus
fréquente (de 29 à 62,5 %), et 48,5 % des syndromes néphrotiques à
cet âge sont dus à une GNEM.
Une hématurie est présente dans
29 % des cas, une hypertension artérielle dans 39 %, l’insuffisance
rénale initiale y est plus fréquente que chez les adultes.
R Zent et
al ont comparé l’évolution de la GNEM avec syndrome néphrotique
des plus de 60 ans à celle d’une population d’adultes.
Au terme
de la période d’observation, les plus âgés sont plus souvent en
insuffisance rénale chronique (59 %) que les jeunes (25 %), mais leur
clairance de départ est aussi plus basse, et la pente évolutive sur
10 ans ne montre pas de différence entre les deux cohortes.
Les
pourcentages de décès et d’insuffisance rénale terminale ne diffèrent
pas.
Si l’on peut donc créditer la GNEM du sujet âgé d’un pronostic
plus médiocre, on ne peut cependant conclure que l’âge accélère la
dégradation fonctionnelle.
Le principe du traitement des formes primitives n’est pas
unanimement accepté, et on sait peu de chose sur l’efficacité et la
tolérance du traitement de la GNEM.
Seules les formes révélées par
un syndrome néphrotique ont reçu une thérapeutique.
Dans l’étude
de Zent, les plus de 60 ans traités par une corticothérapie prolongée
n’en ont pas tiré de bénéfice, et sont même plus nombreux en
insuffisance rénale que les non traités.
L’étude est rétrospective,
et il est possible que ceux qui reçurent un traitement aient eu une
forme initialement plus grave que les non traités.
Dans la série
rapportée par Bizarri, où le traitement comportait alternativement
corticoïdes et immunosuppresseur (chlorambucil ou
cyclophosphamide), les taux de rémission totale (64 %), partielle
(21 %) et d’évolution vers l’IRCT (8 %) étaient semblables à ceux des
plus jeunes.
La fréquence des complications (infectieuse, cataracte)
y est légèrement mais non significativement plus élevée.
Rollino
obtient des résultats moins brillants, mais qui demeurent identiques
chez les jeunes et les vieux pour la fréquence des rémissions
complètes (respectivement : 31 et 37 %), partielles (26 et 21 %) et
l’absence de différence de fréquence des complications.
Ponticelli
fait état de rémission plus fréquente avec le traitement associant
corticoïdes et chlorambucil (69 %) que dans un groupe non traité
(23 %) ou traité par les seuls corticoïdes (20 %).
Les évolutions
rénales terminales étaient aussi moins fréquentes, mais les effets
secondaires très fréquents.
Certains auteurs dont JV Donadio
mettent en doute l’opportunité d’un traitement agressif dans cette
maladie et à cet âge.
En revanche, il paraît justifier de traiter
vigoureusement les formes rapidement évolutives compliquées
d’une prolifération extracapillaire.
Il n’existe pas à notre connaissance d’étude spécifique concernant
l’utilisation à titre antiprotéinurique des inhibiteurs de l’enzyme de
conversion ou des antagonistes des récepteurs de l’angiotensine 2
dans cette population.
La vitesse évolutive de la GNEM n’est pas très considérable, et le
nombre de dialysés sous cette rubrique aux États-Unis est faible
(0,5 % de l’ensemble des dialysés incidents et 0,4 % des étiologies
chez les plus de 64 ans).
Le bénéfice du traitement est à mesurer
à la durée de vie raisonnablement attendue, et au risque de
complications graves.
2- Glomérulonéphrite rapidement progressive
:
La GNRP est caractérisée par un tableau de néphropathie
glomérulaire, dont l’insuffisance rénale évolue vers son terme en
quelques semaines ou peu de mois.
Elle est beaucoup plus fréquente dans cette tranche d’âge que chez
l’adulte (8 % contre 3,7 %) et sa fréquence s’accroîtrait au cours
de ces dernières années ; EE Petterson note une incidence de 39 par
million d’habitants et par an pour la période 1990-1992, comparée à
14 par million d’habitants et par an entre 1986 et 1989.
Sa présentation clinique est celle d’une insuffisance rénale aiguë
dans 43 % des cas, d’une insuffisance rénale chronique dans 36 % et
plus rarement sous la forme d’un syndrome néphrotique ou d’une
anomalie urinaire.
Haas relève que 45,8 % des biopsies pour
insuffisance rénale aiguë d’origine médicale chez des personnes de
plus de 60 ans relèvent de cet aspect histologique.
L’atteinte anatomique est constituée par la prolifération des cellules
épithéliales pariétales, et de macrophages formant des croissants
cellulaires dans l’espace urinaire ; elle est précédée dans certaines
étiologies d’une nécrose glomérulaire focale.
L’immunofluorescence en distingue trois formes.
Le type I, environ
20 % des GNRP, se caractérise par des dépôts linéaires continus
d’immunoglobuline G le long du versant interne du capillaire, le
type II (30 % des cas) par la présence de dépôts mésangiaux
granulaires d’immunoglobulines et le type III (40 % des cas) par
l’absence ou la très faible abondance des dépôts mésangiaux (pauciimmune).
Au point de vue étiologique, le type I est caractéristique
de la présence d’anticorps dirigés contre la membrane basale
glomérulaire et des capillaires pulmonaires, le type II se rencontre
au cours des maladies systémiques avec dépôts de complexes
immuns (lupus érythémateux, purpura rhumatoïde,
cryoglobulinémie) ou complique des néphropathies glomérulaires
primitives (néphropathies à dépôts d’IgA, GNEM).
Le type III
représente, soit une forme primitive de GNRP, soit le stade évolutif
intermédiaire d’une nécrose glomérulaire focale qui est la traduction
rénale d’une vascularite.
Celle-ci est très fréquemment suspectée sur
la présence d’anticorps anticytoplasme des polynucléaires (ANCA).
Quel que soit le type histologique de la GNRP, des lésions
interstitielles inflammatoires et/ou fibreuses sont toujours présentes.
Les GNRP primitives représentaient 11 % des glomérulopathies
idiopathiques du MRCR, et presque la moitié (42 %) de toutes les
GNRP de ce même registre.
La fréquence peut être surestimée
par l’absence d’utilisation des ANCA dans la période de constitution
du registre.
L’importance de l’atteinte histologique, l’évolution et la
récupération fonctionnelle sont dépendantes du délai séparant le
début de la maladie de son diagnostic et de son traitement.
Si les
lésions sont cellulaires, la thérapeutique immunosuppressive
(corticoïde et cyclophosphamide), parfois associée à des
plasmaphérèses, parvient à interrompre le processus et à améliorer
la fonction rénale mais, selon Donadio, l’IRCT est inévitable quand
la créatininémie est supérieure à 530 µmol/L et la survie rénale à
6 mois est de 46 %, à 5 ans de 31 % comparée à 81 % pour les moins
de 60 ans. Selon l’USRDS, 44,4 % des 1 479 dialysés pour cette
étiologie ont plus de 64 ans.
3- Syndrome néphrotique à lésions glomérulaires
minimes
:
Le syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes (LGM)
et de la hyalinose segmentaire et focale (HSF) n’ont de particularité
clinique que l’importance du syndrome oedémateux.
Dans la région
de Turin, l’incidence du syndrome néphrotique à LGM est 11,2 et de
1,3 nouveau cas par million d’habitants et par an et de la HSF de
12,8 et 2,6 respectivement pour les plus de 64 ans et de 75 ans.
La
sensibilité à la corticothérapie dans le premier cas est la règle.
Le
pourcentage de rémission de la néphrose à LGM est le même que
celui qui est obtenu chez l’adulte (80 à 90 %).
La glomérulopathie
par HSF rend compte de 2,1 % des dialysés incidents aux États-
Unis, dont les plus vieux forment un quart du contingent (23,9 %).
L’insuffisance rénale aiguë (IRA) est une complication inédite
particulièrement fréquente et redoutable chez les plus de 60 ans.
Elle
rend compte de 7,5 % des 259 biopsies d’IRA de la série de Haas.
Dans la revue de la littérature de Smith et Hayslett, la moyenne
d’âge est de 60 ans, 75 % sont hypertendus et 85 % des cas d’IRA
sont des syndromes néphrotiques à LGM.
Les oedèmes sont
massifs, la protéinurie très abondante, l’hypoalbuminémie majeure.
L’IRA débute environ 4 semaines après le début de la néphrose, et
7 semaines s’écoulent en moyenne avant la rémission.
La biopsie
rénale met en évidence une nécrose tubulaire aiguë dans 60 % des
cas, souvent accompagnée d’un important oedème interstitiel et des
lésions d’artériosclérose.
Le mécanisme physiopathologique en est
inconnu mais la régression du syndrome oedémateux par les
diurétiques associés et à forte dose en interrompt souvent
l’évolution, ce qui suggère que le mécanisme physiopathologique
est une diminution de la pression efficace de filtration par
augmentation de la pression due à l’abondance de l’oedème
interstitiel.
Une sensibilité particulière à l’ischémie du fait de
l’artériosclérose est aussi évoquée.
Cette complication ne doit pas
introduire de confusion avec le tableau particulier du syndrome néphrotique avec IRA, secondaire à la prise d’anti-inflammatoires
non stéroïdiens ; l’histologie dans ce cas montre bien des glomérules
sans lésion visible en optique, mais surtout une néphropathie
interstitielle aiguë (NIA).
Le traitement du syndrome néphrotique à LGM du sujet âgé n’est
pas codifié.
À cause des effets indésirables de la corticothérapie et
de la rareté des récidives à cet âge, Ponticelli propose un traitement
par les corticoïdes à la dose de 1 mg/kg/j jusqu’à la rémission ou
pendant 4 semaines.
La décroissance selon cet auteur peut être
rapide : 0,8 mg/kg/j pendant 2 semaines puis 1,6 mg/kg 1 jour sur
2 pendant 2 semaines.
La décroissance ultérieure s’effectue au
rythme de 0,4 mg/kg/48 h pendant 2 semaines.
4- Néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA
:
La néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA est beaucoup plus rare
que chez les plus jeunes, mais elle n’est pas exceptionnelle.
Entre 1990 et 1994, le registre de Turin compte une incidence de 6,3
et 2,9 nouveaux cas par million d’habitants et par an pour les plus
de 65 ans et de 75 ans, et de 14,7 pour la population générale.
Dans la série de Modesto-Segond, elle est retrouvée dans 22,7 % des
biopsies dans la population adulte et seulement 8,3 % chez les plus
vieux.
Le MRCR l’estime à seulement 4 % des glomérulopathies
primitives des vieux ; elle se manifeste parfois par un syndrome
néphrotique (3 % des syndromes néphrotiques) ou une IRA (2 % de
celles ci).
Haas la retrouve aussi dans 3,6 % des IRA.
Elle peut
s’accompagner de signes systémiques évoquant le purpura
rhumatoïde, et son évolution est alors souvent défavorable.
Il est
possible que la prévalence de cette néphropathie soit sous-estimée
par l’absence d’examen du sédiment urinaire et la politique de la
biopsie rénale.
La néphropathie à dépôts d’IgA est responsable, aux États-Unis, de
0,1 % des entrées en dialyse de cet âge, et de 0,5 % pour la
population générale.
D - NÉPHROPATHIES GLOMÉRULAIRES SECONDAIRES
:
La fréquence des néphropathies glomérulaires secondaires par
rapport aux néphropathies primitives est chiffrée par le MRCR à
31 % des néphropathies, proche de celui des autres séries de la
littérature.
L’amylose, les vascularites
sont plus fréquentes dans la population âgée que chez l’adulte.
En associant les
diverses étiologies (dont le diabète), 40 % (38,9 %) des dialysés de
plus de 64 ans ont été conduits à l’IRCT par une glomérulopathie
secondaire.
1- GNEM secondaires
:
Les GNEM secondaires ont même fréquence (31 %) chez les sujets
âgés que chez les adultes (28 %).
Cinquante pour cent d’entre elles
surviennent en présence d’anticorps antinucléaires positifs, 10 %
dans une vascularite, et 10 % après un traitement par les sels d’or
ou la D-pénicillamine.
L’association à une tumeur maligne se
manifeste dans 10 à 14 % des cas, le syndrome néphrotique est
généralement antérieur à la déclaration clinique de la tumeur.
L’existence de cette manifestation paranéoplasique est discutée par
certains auteurs.
Pour Burstein, si la tumeur (poumon, sein, estomac,
côlon, oesophage) n’est pas cliniquement décelable, un bilan initial
exhaustif n’est pas recommandé, la surveillance ultérieure est en
revanche nécessaire.
2- GNRP secondaires
:
Les GNRP secondaires rendent compte de 58 % des néphropathies
glomérulaires prolifératives extracapillaires selon Davison et al.
Elles sont responsables de la mise en dialyse de 1 % des personnes
âgés.
3- Syndrome de Goodpasture
:
La maladie des anticorps antimembrane basale glomérulaire
(syndrome de Goodpasture en présence d’une pneumopathie
hémoptoïque hypoxémiante), type I de la classification en
immunofluorescence, est une maladie rare aussi bien chez les
adultes que les personnes âgées.
Il s’agit d’une vascularite affectant
les petits vaisseaux, avec présence dans le sang d’anticorps
antimembrane basale glomérulaire.
Elle représente 4 % des biopsies
dans la série de Haas et 3 % dans celle du MRCR.
La
population étudiée par Lévy permet de déceler un pic de fréquence
à la sixième décennie, et une répartition égale entre hommes et
femmes.
Les patients de cette série reçurent un traitement
immunosuppresseur et des plasmaphérèses, et si nécessaire des
dialyses.
L’évolution vitale et rénale à moyen terme (1 an) est
déterminée par le nombre de croissants à la biopsie et la créatininémie (supérieure ou inférieure à 500 µmol/L), l’âge n’a pas
d’influence sur l’évolution immédiate et ultérieure.
* GNRP secondaires type II
:
La fréquence des GNRP secondaires type II est difficile à évaluer,
car leur classification varie dans les différentes séries de la littérature.
Ces atteintes rénales associées à un lupus ou des anticorps
antinucléaires (AAN) paraissent paradoxalement plus fréquentes
chez les âgés que chez les jeunes (12 % comparés à 8 % des GNRP).
Dans la population du MRCR, la fréquence accrue de la positivité
des AAN au cours de la vieillesse pourrait rendre compte de ce
fait.
Les vascularites avec cryoglobulinémie, dont l’aspect rénal
anatomopathologique n’est pas celui d’une GNRP, sont traitées au
chapitre des glomérulonéphrites postinfectieuses.
* GNRP type III
:
Les GNRP pauci-immunes secondaires type III sont l’expression
rénale des angéites affectant les vaisseaux de petit calibre (excluant
la polyartérite noueuse).
Ce sont des maladies de la cinquième et
sixième décennie. Elles se différencient entre elles par la présence ou
l’absence d’ANCA et la nature de ceux-ci.
Les angéites avec présence d’ANCA recouvrent la maladie de
Wegener, de Churg et Strauss et l’angéite microscopique.
Elles
représentent 40 % des biopsies effectuées pour insuffisance rénale
aiguë par Haas dans une population de plus de 65 ans.
L’incidence s’accroît avec l’âge : 0,8 cas par million d’habitants et
par an entre 18 et 39 ans, 5,2 entre 40 et 59 ans, et 8,2 au-delà de
60 ans mais, au-delà de 60 ans, elle paraît stable.
Dans la maladie de Wegener, l’association d’un granulome nécrosant
et d’une angéite est spécifique.
L’âge moyen de début est de 55 ans
dans une grande série récente.
L’atteinte rénale est reconnue dans
80 à 94 % des cas, bien qu’elle ne soit présente dans la période
initiale que dans 20 à 80 %.
La symptomatologie extrarénale
affecte les poumons et la sphère oto-rhino-laryngologique dans 90 %
des cas, les muscles dans 60 % des cas, le système nerveux et
l’appareil digestif dans 50 % des cas.
En immunofluorescence, les ANCA sont de type diffus cytoplasmique (cANCA) et, en enzymelinked
immunosorbent assay (Elisa), ils sont dirigés contre la
protéinase 3 des polynucléaires (anti-Pr3).
Leur sensibilité est de
90 % dans le cas de Wegener actif et étendu (avec présence de
granulome pulmonaire).
Pour des formes moins complètes, la
sensibilité demeure de 64 %, et la spécificité de 68 %.
Les ANCA
sont absents dans 10 % des maladies de Wegener. Malgré le
traitement, le pronostic vital demeure grave, puisque la survie à 1 et
2 ans est 88 et 74 %.
L’âge et la faible concentration d’albumine
sérique sont des facteurs déterminants de la mortalité.
L’aspect et
l’abondance des lésions histologiques sont un déterminant pronostique supérieur à la réduction fonctionnelle.
D’autres
mettent en évidence le caractère prédictif du nombre de glomérules
normaux pour le devenir de la fonction rénale.
La survie rénale
à 1 et 2 ans est de 86 et 75 %, sans influence de l’âge mais
dépendante de la créatininémie initiale.
L’angéite microscopique affecte les artérioles, les capillaires et les
veinules ; à la différence de la maladie de Wegener, elle ne comporte
pas de granulome.
La glomérulonéphrite y est présente dans 90 %
des cas accompagnée d’une atteinte musculosquelettique (60 %),
pulmonaire (50 %), gastro-intestinale (50 %), cutanée (40 %), otorhino-
laryngologique (ORL) et neurologique (30 % chacune).
Les ANCA sont positifs dans 80 % des cas, ils sont majoritairement
de type périnucléaire (pANCA) et dirigés contre la myéloperoxydase
(anti-MPO).
Comme dans la maladie de Wegener, les ANCA
peuvent être négatifs dans un cas sur dix.
La présence d’anti-MPO
conduit à une glomérulonéphrite d’évolution plus lente, marquée
histologiquement par l’abondance de la sclérose, tandis que les anti-Pr3 se distinguent par l’activité des lésions rénales.
Un diagnostic
précoce est la meilleure garantie de la récupération de la fonction
rénale, car le nombre de glomérules scléreux est relié à la durée de
délai du traitement.
Ces deux formes d’angéites sont efficacement traitées par les
corticoïdes et les immunosuppresseurs, à la condition que leur
diagnostic soit précoce.
Les plasmaphérèses ou l’immunoadsorption
se montrent également utiles, même quand le nombre de glomérules
lésés dépasse 50 %.
La présence d’hémorragies pulmonaires
nécessite la plasmaphérèse.
Le pronostic vital est fonction de l’âge,
et le pronostic fonctionnel de l’augmentation de la créatinine, de
l’intensité de la défaillance rénale et du recours à la dialyse.
Les
rechutes sont fréquentes et se manifestent chez un tiers des patients
et, dans deux cas sur trois, elles sont sensibles au traitement
initial. La permanence d’un taux élevé d’anticorps est de mauvais
pronostic.
L’âge est également un facteur favorisant des
complications iatrogènes.
La maladie de Churg et Strauss est beaucoup plus rare, surtout chez
les personnes âgées : l’âge moyen est 38 ans.
La lésion anatomique
associe une angéite et un granulome éosinophile.
La
glomérulonéphrite est moins fréquente et moins sévère que dans les
deux angéites précédentes (environ 50 % des cas).
La coronarite et la
myocardite sont responsables de 50 % de la mortalité.
Les ANCA
périnucléaires (anti-MPO) sont retrouvés dans 70 % des cas. Un
traitement par les corticoïdes à forte dose est efficace.
Les angéites d’allure primitive sans ANCA représentent 27 % des
cas de la série décrite par N Hedger, les différences avec la
symptomatologie du groupe à ANCA positif sont minimes : délai
au diagnostic plus court et moindre atteinte de la sphère
respiratoire.
Parmi les rares formes secondaires d’angéites sans ANCA, seules les
angéites paranéoplasiques et secondaires à la polyarthrite
rhumatoïde sont, à cet âge, retrouvées avec une fréquence non
négligeable.
4- Glomérulopathies diabétiques
:
Le diabète est aujourd’hui, aux États-Unis, la cause la plus fréquente
des glomérulopathies et la cause première de l’insuffisance rénale
terminale.
La fréquence de la néphropathie diabétique est très
amplement sous-estimée par les séries histologiques : les
néphropathies diabétiques ne sont pas biopsiées lorsqu’elles
surviennent dans les conditions épidémiologiques et cliniques
caractéristiques.
Le diabète type 2 est de loin le plus fréquent chez
les sujets âgés.
* Importance du diabète dans l’insuffisance rénale terminale
:
La néphropathie au cours du diabète est responsable, selon le
registre de l’USRDS, de 37,3 % des mises en dialyse du groupe le
plus âgé ; le diabète type 2 y prend part pour 30 % et le type 1 pour
7,3 %.
Au cours de la période d’observation antérieure (1991-1995)
et pour la même population, le pourcentage s’établissait à 33,9 %
(22,9 % pour le type 2 et 11 % pour le type 1).
Ces données
démontrent l’accroissement de l’incidence dans la période récente.
L’âge médian d’accès à la dialyse est de 56 ans pour le type 1 et de
64 ans pour le type 2.
La forte proportion de patients africains,
américains victimes de néphropathie diabétique ne permet pas une
transposition immédiate de ces données aux pays européens.
En Europe, la fréquence de la néphropathie du diabète de type
2 s’est aussi accrue au cours des 20 dernières années, se multipliant
par un facteur deux ou trois selon les pays.
Cette croissance n’est
pas uniforme et suit un gradient de fréquence nord est-sud auquel
la France n’échappe pas.
L’Europe du Nord est relativement
épargnée puisque le Danemark en 1997 ne compte que 20,2
diabétiques en IRCT par million d’habitants et par an (40 % de type
2) et les Pays-Bas 13,3 par million d’habitants et par an, dont 47 %
de type 2.
En Allemagne de l’Ouest, l’incidence en 1993 est de 52
par million d’habitants et par an (dont 90 % de diabète type 2) ; en
Lombardie, l’incidence est plus faible à 16,2 par million d’habitants
et par an dont 63 % de type 2.
En France, elle est en moyenne de
17,2 par million d’habitants et par an (86 % de type 2) mais avec de
larges disparités régionales puisqu’en Alsace, en 1996, elle est de 46
par million d’habitants et par an (dont 95 % de type 2).
En Île-de-
France, 20,6 % des dialysés sont diabétiques et 12,2 % en Rhône-
Alpes.
À l’Île de La Réunion, la prévalence et l’incidence sont
très élevées (respectivement 1 155 et 35,6 par million d’habitants et
par an) et le diabète de type 2 en est pratiquement le seul
responsable (92,7 %).
Si les pourcentages dans de nombreuses
régions de la France métropolitaine sont moindres qu’en Alsace ou
à La Réunion, la pente de progression de la maladie demeure
positive, et la néphropathie diabétique deviendra probablement une
des premières causes de dialyse.
* Facteurs de risque de la glomérulopathie diabétique
:
Les facteurs de risque de la néphropathie du diabète type 2 sont : le
sexe mâle, l’origine africaine ou afro-américaine, un âge avancé, une
tension artérielle élevée, une augmentation de l’hémoglobine glycosylée et du cholestérol, le tabagisme, un haut niveau de
résistance à l’insuline et peut-être une forte consommation de
protéines animales. Nombre de ces facteurs déterminent aussi le
risque cardiovasculaire.
L’aspect histologique de la glomérulopathie est, pour la lésion
glomérulaire, semblable dans les deux types de diabète, mais les
lésions vasculaires et ischémiques sont plus fréquentes dans le type
2.
Dans les deux types de diabète, la protéinurie est présente dans
50 % des cas au terme de 25 ans d’évolution.
La moitié des protéinuriques auront une insuffisance rénale après 4 ans
d’évolution.
Au moment de la découverte du diabète type 2, une
hypertension artérielle ou la disparition du rythme circadien de la
tension artérielle est découverte chez 80 % des patients.
L’une et
l’autre sont annonciatrices d’une protéinurie, d’une insuffisance
rénale et d’accidents cardiovasculaires.
Une microalbuminurie est
présente chez 28 % des patients au moment de la découverte de leur
diabète ; elle prédit la réduction de la filtration glomérulaire et la
mortalité cardiovasculaire précoce.
Cependant, environ un tiers des néphropathies découvertes au cours
d’un diabète type 2 n’est pas imputable à celui-ci.
Une atteinte rénale
non diabétique est retrouvée dans 28 % des échantillons biopsiques
lorsque le signe d’appel est une protéinurie.
Ces néphropathies
non diabétiques sont reconnues comme telles dans 23 % à 54 % des
cas par les seuls critères cliniques.
La microalbuminurie et la protéinurie sont également le reflet de la
diffusion de la maladie vasculaire affectant les vaisseaux de tout
calibre.
La rétinopathie diabétique est plus précoce et fréquente que
la glomérulopathie, elle est présente avant l’apparition d’un signe
d’atteinte rénale, et la neuropathie y est également associée.
La
morbidité et la mortalité de l’atteinte cardiovasculaire athéroscléreuse sont aussi liées à la néphropathie. La mortalité
cardiovasculaire augmente avec l’intensité de la protéinurie : la
présence d’une microalbuminurie double le risque de décès, par
rapport aux diabétiques qui en sont indemnes.
La prévalence de la coronaropathie, de la maladie cérébrovasculaire et de l’artériopathie
des membres inférieurs, croît en présence d’une microalbuminurie
et d’une protéinurie.
L’ischémie coronarienne silencieuse est
particulièrement fréquente chez ces personnes.
Le diabète est également un des facteurs de risque de la maladie rénovasculaire.
La survie est considérablement réduite du fait d’une
surmortalité cardiovasculaire ; pour les mêmes raisons, au stade de
l’insuffisance rénale terminale, la durée de la dialyse est abrégée et
la survie à 5 ans varie de 6 % à 40 %.
La protection néphronique doit aller de pair à tous les stades avec la
prévention des accidents cardiovasculaires.
* Approche thérapeutique
:
Il n’existe pas de procédure thérapeutique spécialement dédiée au
grand âge, et les dispositions préconisées pour la population
générale peuvent être adaptées.
La multidisciplinarité de l’approche
thérapeutique est encouragée par la complexité et la multiplicité des
problèmes.
Lorsque l’albuminurie est absente, le contrôle strict de la glycémie
par les sulfamides ou l’insuline réduit de 25 % l’apparition de la microangiopathie.
Le traitement rigoureux de l’hypertension
artérielle réduit de 44 % la survenue d’accident vasculaire cérébral,
et de 37 % la survenue d’une microangiopathie.
Le rapport du JNC VI recommande des valeurs de tension artérielle inférieures à
135/85 mmHg.
Les inbiteurs de l’enzyme de conversion de
l’angiotensine (IECA) et les bêtabloqueurs ont une efficacité
identique.
Le risque d’apparition d’une microalbuminurie est réduit
à 6 ans mais le bénéfice disparaît au-delà.
En présence d’une microalbuminurie (30-300 mg/j), l’étude STENO
2 a mis en évidence l’efficacité d’une intervention thérapeutique
multifactorielle intensifiée.
Un groupe de diabétiques type 2 microalbuminuriques a été suivi et traité rigoureusement au plan de
la surcharge pondérale, de la glycémie, de la tension artérielle, des
anomalies lipidiques, de l’apport d’antioxydants ; le tabagisme a été
déconseillé et l’exercice physique favorisé.
La comparaison avec un
groupe contrôle révèle la diminution du risque protéinurique (odds
ratio [OR] : 0,27), la diminution de l’évolution de la rétinopathie
(OR : 0,45) et de la neuropathie (OR : 0,31).
La mortalité et la
morbidité cardiovasculaires ne furent en revanche pas
influencées.
Au stade de la protéinurie (albuminurie > 300 mg/24 h), E Ritz
dégage cinq objectifs :
– contrôle de la glycémie de façon à obtenir une hémoglobine glycosylée inférieure à 7 % en évitant l’hypoglycémie ;
– maintenir la pression sanguine inférieure à 125/75 mmHg, en
utilisant de préférence les inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou
les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine (la tolérance et
l’innocuité de cette mesure ne sont pas avérées chez les vieux et une
diminution progressive est souhaitable) ;
– réduire le débit de la protéinurie à moins de 1 g/j ;
– arrêt du tabagisme ;
– réduire la ration alimentaire protidique à 0,8 g/kg de poids/j (la
surveillance de l’état nutritionnel du sujet âgé est indispensable).
La durée de vie d’un diabétique est de 5 à 7 ans après le début
d’une protéinurie persistante, et les causes du décès sont avant tout
cardiovasculaires.
Un traitement rigoureux de la tension artérielle
augmente ce délai à 14 ans, et ralentit la vitesse évolutive de la
diminution de la filtration à 4,5 mL/min/an au lieu des
12 mL/min/an habituels.
Le recours au néphrologue devrait avoir lieu à partir d’une clairance
de 60 mL/min quel que soit l’âge.
Lorsque l’insuffisance rénale est installée, le strict contrôle de
l’hyperglycémie ne paraît plus efficace pour en influencer
l’évolution.
À partir d’une concentration de 133 µmol/L de
créatinine, les biguanides doivent être interrompus.
Il n’existe pas
de recommandation officielle ni de seuil défini pour l’arrêt des autres
hypoglycémiants oraux.
Le risque de l’hypoglycémie ne doit pas être
sous-estimé chez les sujets âgés, et une surveillance soigneuse du
glucose sanguin est prudente.
Concernant l’évolution de la glomérulopathie, les mêmes objectifs qu’au stade précédent
demeurent valables.
Le traitement des complications de
l’insuffisance rénale doit prendre en compte l’âge et l’état diabétique,
elle est en elle-même un risque cardiovasculaire supplémentaire.
Idéalement, la préparation de la dialyse doit être envisagée à partir
d’une clairance de 30 mL/min, le choix du type de dialyse est
discuté avec l’intéressé et les accès vasculaires préparés.
Actuellement encore, trois diabétiques insuffisants rénaux
chroniques sur quatre (73 %) reçoivent leur première épuration dans
l’urgence ; l’hyperkaliémie et l’oedème aigu du poumon par
surcharge hydrosodée en sont les causes les plus fréquentes.
La
mortalité à moyen terme dans ces conditions d’impréparation est
supérieure à celle d’une intervention planifiée (mortalité à 455 jours :
27 % comparé à 7,7 %).
Les comorbidités cardiovasculaires au
moment de l’accès à la dialyse sont nombreuses : une insuffisance
ventriculaire gauche (72 %), un angor (41 %), un infarctus du
myocarde (24 %), une maladie cérébrovasculaire (27 %), une artérite
(16 %), un cancer ou une maladie générale (16 %).
La fréquence de
la dépendance physique est également élevée, puisque 39 % de ces
patients sont incapables de se déplacer seuls.
Ces multiples comorbidités sont un élément péjoratif de la réinsertion des
diabétiques qui est moins bonne que celle des autres dialysés, et le
retrait de dialyse est plus fréquent chez eux (3,1/100 dialysés/an
comparé à 1,7 pour la population en général).
La survie en dialyse est de courte durée, Chantrel et al observent
plus d’un quart de décès (27 %) en 262 jours.
Fenton a calculé
que le risque relatif de décès est de 1,65 en cas d’antécédents
cardiovasculaires, et de 3,69 pour les plus de 65 ans.
Aux
États-Unis, la mortalité annuelle est de 23,3 patients pour 100
dialysés (USRDS).
En Allemagne, la survie à 5 ans est seulement de
7 %.
L’importance du sujet mériterait un développement plus
approfondi.
Des informations complémentaires sur la procédure de
suivi et de traitement du diabétique type 2 sont disponibles dans la
publication de l’Agence nationale de l’accréditation et d’évaluation
en Santé (ANAES) et sur son site (http : //www.anaes.fr) et, pour
la prise en charge des diabétiques urémiques, dans la publication de
l’ALFEDIAM.
Le pronostic de la néphropathie diabétique du sujet
âgé est particulièrement redoutable et l’évolution de la néphropathie
particulièrement rapide.
Les objectifs de la néphroprotection sont
difficiles à mettre en oeuvre et risquent d’être imparfaitement
atteints, ne serait-ce que pour l’obtention des chiffres tensionnels
recommandés.
La maladie des dépôts glomérulaires d’Ig monoclonales est une
affection peu fréquente de la seconde moitié de la vie, qui implique
surtout des sujets âgés.
La série de G Gallo est 26 cas dont la
médiane d’âge est 59 ans et celle de V D’Agati de 34 cas d’âge
médian de 57,4 ans.
La microscopie électronique permet de distinguer des dépôts
granulaires et fibrillaires, et cette distinction morphologique est
utilisée comme classification.
* Dépôts glomérulaires
:
L’aspect ultrastructural granulaire correspond à trois formes
distinctes selon le fragment d’Ig impliqué et révélé par
l’immunofluorescence rénale (chaîne légère, lourde, Ig complète).
Dans les observations de D’Agati, le dépôt isolé de la chaîne légère
est le plus habituel (35 %) mais, dans un tiers des cas (33 %), il est
associé à une néphropathie tubulo-interstitielle à cylindre
myélomateux ; les dépôts de chaîne entière d’immunoglobuline ou
de la seule chaîne lourde sont plus rares (15 et 17 % respectivement)
et, dans 33 % des cas et particulièrement chez les sujets âgés, le
dépôt de chaînes légères s’associe à une néphropathie tubulointerstitielle
à cylindres myélomateux.
L’examen en microscopie optique différencie des dépôts
glomérulaires nodulaires mésangiaux d’une part et, d’autre part, une
sclérose glomérulaire globale qui est présente dans environ 20 % des
glomérules.
Une atrophie tubulaire avec épaississement des basales
tubulaires et une fibrose interstitielle sont présentes.
Le composant
monoclonal est identifié à l’aide d’immuns sérums dans les
glomérules et le long des basales tubulaires et la paroi des vaisseaux.
Lorsque la chaîne légère est présente, elle est majoritairement de
type kappa (85 %).
La traduction clinique et l’évolution sont plus sévères quand la
maladie s’associe ou non à une néphropathie à cylindres tubulaires myélomateux.
En l’absence de celle-ci, l’âge moyen de découverte
est plus jeune (57 ans), l’hypertension est présente dans une majorité
de cas, la protéinurie est abondante et un syndrome néphrotique
s’observe dans un quart des cas.
L’insuffisance rénale est constante
avec un caractère aigu dans 30 % des cas, et la nécessité du recours
à la dialyse dans 26 %.
Dans la néphropathie mixte, l’âge est plus
élevé (67 ans), la protéinurie moins abondante, la créatininémie plus
élevée, l’insuffisance rénale est aiguë dans 82 % des cas et nécessite
l’épuration dans 64 %. Une cardiopathie par infiltration
myocardique et dysfonction diastolique est possible.
Le diagnostic histologique rénal précède tout autre signe de dysglobulinémie dans 70 % des formes pures et 64 % des formes
mixtes.
Le composant monoclonal sera mis en évidence dans 48 %
des cas dans le sang et 52 % dans les urines.
La gammapathie
monoclonale n’est confirmée que dans 25 % des néphropathies des
chaînes légères isolées.
Un myélome est mis en évidence dans 39 %
des formes pures et 91 % des formes mixtes.
La survie et le maintien de la fonction rénale sont meilleurs dans la
forme pure que dans la forme mixte, beaucoup plus meurtrière.
La créatininémie est le facteur prédictif de la durée de la survie.
La maladie des chaînes légères rend compte de 0,1 % de l’incidence
des dialysés et 65,9 % de ces patients ont plus de 64 ans, deux tiers
sont des hommes.
* Dépôts fibrillaires
:
Les dépôts immunoglobuliniques organisés, extracellulaires et non
branchés, se différencient en dépôts fibrillaires de 10 à 20 nm de
diamètre et dépôts de microtubules parallèles d’un diamètre de 20 à
40 nm.
À ce dernier aspect, on donne aussi le nom de glomérulopathie immunotactoïde dont, à part l’image
ultrastructurale, l’identité pathogénique est discutée.
Les dépôts de la glomérulopathie fibrillaire sont composés de façon
prédominante d’IgG de type gamma 4 (80 %) et des protéines du
complément C3 et C1q.
Six fois sur dix, la symptomatologie clinique
est une glomérulopathie néphrotique avec hématurie (80 %) dont la
moitié évolue vers l’insuffisance rénale.
Le traitement est
généralement inefficace.
Dans la forme immunotactoïde, l’âge est souvent supérieur à 50 ans,
et l’aspect clinique est semblable aux glomérulopathies fibrillaires.
Une Ig monoclonale circulante est retrouvée dans quelques
observations, parfois différente de l’Ig fixée. Un syndrome
lymphoprolifératif est mis en évidence dans la moitié des cas.
L’aspect en microscopie optique est généralement celui d’une glomérulopathie membranoproliférative, parfois d’une
glomérulonéphrite extramembraneuse.
L’immunofluorescence
montre la présence d’une IgG monotypique, avec une chaîne kappa
dans 70 % des échantillons.
En ultrastructure, les dépôts sont
uniquement glomérulaires, sous-endothéliaux ou mésangiaux.
Le
traitement du syndrome prolifératif réduit l’expression clinique de
la néphropathie.
Les cryoglobulines monoclonales IgG de type I peuvent donner
l’aspect microtubulaire, la symptomatologie clinique est enrichie par
les signes de la cryoglobulinémie.
Ces néphropathies sont peut-être moins rares que le nombre
d’observations décrites ne le laisse supposer.
Pour leur diagnostic,
elles nécessitent un examen en microscopie électronique, démarche
diagnostique lourde et coûteuse, dont la pratique n’est pas
systématique.
6- Amylose
:
L’infiltration rénale est la plus commune des atteintes viscérales de
l’amylose : le parenchyme rénal est infiltré dans 90 % des amyloses
AA et 50 % des amyloses primitives AL.
Elle rend compte de 10 % à
27 % des glomérulopathies secondaires et occupe la troisième
place des causes de syndrome néphrotique (8 % des cas) de la
personne âgée.
+ Amylose AA
:
Les maladies rhumatismales ont supplanté les infections dans la
genèse de l’amylose AA.
Depuis les années 1980, la fréquence des
syndromes inflammatoires rhumatismaux (polyarthrite rhumatoïde
surtout, spondylarthrite ankylosante à un moindre degré)
représentent 63 à 82 % des cas.
Les infections chroniques (les
bronchectasies au premier plan) rendent compte de 13 à 20 % des
dépôts de type AA.
L’âge moyen au moment du diagnostic est 51-
53 ans pour les femmes et 59-60 ans pour les hommes.
Les dépôts
histologiques (vasculaires en premier lieu) précèdent l’expression
clinique.
La protéinurie, premier signe apparu, évolue rapidement
en un syndrome néphrotique de grande intensité.
L’insuffisance
rénale conduit à la dialyse en 2 à 3,5 ans. L’hypoalbuminémie et une
protéinurie abondante sont les facteurs déterminants de l’évolution
vers l’insuffisance rénale.
+ Amylose AL
:
L’amylose immunoglobulinique AL peut être présente dans les
prélèvements biopsiques en l’absence d’expression clinique.
L’âge
médian au moment du diagnostic est de 65 ans, avec une
prédominance masculine.
L’amylose AL est formée à partir des
chaînes légères des Ig, la chaîne lambda étant deux fois plus
fréquente que la kappa, la protéinurie de Bence Jones y est
fréquemment mais non constamment retrouvée (présente dans 56 à
86 % des cas en fonction de la sensibilité des techniques mises en
oeuvre).
La présence d’un myélome est prouvée dans 21 % des cas,
la plasmocytose médullaire peut être supérieure à 6 % dans 57 %
des cas.
Le syndrome du canal carpien est plus fréquent si
l’amylose est associée à un myélome (38 % des cas). En son absence,
le syndrome néphrotique (37 contre 13 %), la neuropathie
périphérique (20 contre 6 %) et l’hypotension orthostatique (16
contre 4 %) sont plus souvent notés.
L’infiltration cardiaque
amyloïde est de même fréquence dans les deux circonstances
(23 %).
La mortalité est élevée (25 % de survie à 3 ans) et les
facteurs prédictifs du décès au cours de la première année sont
l’insuffisance cardiaque, la présence d’une protéinurie de Bence
Jones, l’hépatomégalie et l’existence d’un myélome.
Le traitement
par chimiothérapie (prednisone plus melphalan) apporte un bénéfice
limité en matière de survie.
L’amylose ne représente que 0,3 % des mises en dialyse aux États-Unis, et les plus de 64 ans y concourent dans une proportion de
55,5 %.
Ceux qui atteignent le stade d’insuffisance rénale
terminale ont malheureusement une courte survie ; pour Kyle, la
durée moyenne de survie est de 14 mois en dialyse péritonéale et
9 mois en hémodialyse.
Les résultats colligés par Moroni sont plus
favorables puisque, hémodialyse et dialyse péritonéale confondues,
la survie à 1 an de 41 patients atteints d’amylose (16 AL et 27 AA)
est de 68 % et de 30 % à 5 ans. N Joss chiffre la médiane de survie
en dialyse à 8,3 mois pour les amyloses AA.
7- Glomérulonéphrites postinfectieuses
:
Elles sont aussi présentes dans cette population.
Elles entrent pour
5,5 % des causes d’insuffisance rénale aiguë médicale chez les plus
de 65 ans biopsiés par Haas.
Elles forment 0,1 % de la population
incidente en dialyse, aux États-Unis, et les plus de 64 ans y sont
présents pour 32,2 %.
Les glomérulonéphrites poststreptococciques
prennent volontiers l’aspect d’une insuffisance
rénale aiguë oligoanurique découverte à l’occasion d’un oedème
pulmonaire ; elles sont généralement d’évolution favorable.
D’autres germes peuvent être en cause (staphylocoques ou
pneumocoques).
Il faut mentionner les glomérulopathies cryoglobulinémiques
secondaires à une infection. Dans la grande série de 443 patients
explorés par O Trejo et al, l’âge médian était de 54 ans et un extrême
à 90 ans.
Une infection était retrouvée dans 75 % des cas, impliquant
le virus de l’hépatite C chez 73 %, le virus de l’hépatite B chez 3 %
et le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) chez 19 %.
Les
autres étiologies étaient représentées par des maladies autoimmunes
pour 24 % des cas, des affections hématologiques pour 7 %
et la cryoglobulinémie était essentielle chez 11 % (les étiologies se
recouvrent parfois).
Vingt-six pour cent des patients avaient une créatininémie augmentée, une protéinurie était présente dans 20 %
des cas dont un tiers de niveau néphrotique. Lorsque la
glomérulopathie fut inventoriée par biopsie, il s’agissait d’une
glomérulonéphrite membranoproliférative dans 12 cas, d’une
prolifération mésangiale dans 12 examens supplémentaires et d’une
glomérulopathie segmentaire et focale pour les huit derniers.
E - PLACE DE LA BIOPSIE ET RÔLE DE L’ÂGE
DANS LE PRONOSTIC ET LE CHOIX THÉRAPEUTIQUE
:
Au terme de ce chapitre, trois questions peuvent être posées :
– quand la biopsie rénale est-elle nécessaire ou souhaitable chez le
sujet âgé ?
– l’âge confère-t-il un pronostic particulièrement défavorable aux glomérulopathies ?
– les risques d’un traitement par immunosuppresseurs sont-ils
supérieurs ?
1- Faut-il biopsier le rein des sujets âgés ?
La politique de biopsie rénale s’est modifiée au cours des 20
dernières années, et le nombre d’examens effectués au profit de
malades âgés s’est accru.
Levison signale ainsi que 53 % des
examens furent pratiqués, dans son institution, au profit de
personnes de plus de 65 ans.
Le rendement de ces biopsies est
aussi satisfaisant que dans une population plus jeune, puisqu’un
échantillon adéquat put être obtenu dans 80 à 95 % des
prélèvements.
Les complications survinrent dans 2,2 à 9,8 % des cas,
un pourcentage inférieur à celui des adultes jeunes.
La lecture de
l’examen est un peu plus complexe, et doit tenir compte des
modifications imprimées par la sénescence.
Le travail de Haas
souligne l’intérêt de la biopsie : le diagnostic étiologique de
l’insuffisance rénale aiguë sur des critères cliniques n’était correct
que dans un tiers des cas, un diagnostic spécifique était apporté par
l’anatomie pathologique dans plus de 90 %, une amélioration de
l’évolution pouvait être attendue dans trois cas sur quatre.
Il n’existe pas actuellement de consensus sur les indications de la
biopsie rénale chez les adultes en général.
Le résultat d’une enquête
effectuée auprès de néphrologues par Fuiano et al permet de
dégager une attitude majoritaire fondée sur une appréciation
subjective du rapport risque-bénéfice pour la population dans son
entier (jeunes et vieux).
Les participants à cette enquête expriment le sentiment que le geste
est justifié, si l’absence de traitement est responsable de risques
vitaux ou d’une évolution rapide vers l’urémie.
Concernant les
personnes âgées, il est probable que participe à la décision
l’évaluation subjective du délai d’évolution vers l’urémie sans
traitement, et de la durée de vie normalement espérée.
Lorsqu’une
thérapeutique efficace n’est pas le seul argument décisionnel, la
réflexion éthique est nécessaire.
La présentation à la personne des
enjeux et des risques est, de toute façon, indispensable.
2- Âge et pronostic
:
L’âge confère-t-il aux néphropathies glomérulaires un mauvais
pronostic ?
Le pronostic doit être jugé sur la mortalité globale et
cardiovasculaire, et sur l’évolution fonctionnelle rénale.
L’enquête épidémiologique de J Heaf et al apporte une donnée
importante, en montrant que la mortalité cardiovasculaire est deux
fois plus élevée pour l’ensemble des glomérulopathies y compris
celles dont le pronostic fonctionnel est bénin.
Les plus de 65 ans
développent une incidence supérieure à celle de la population de
même âge d’infarctus du myocarde, de thrombose cérébrale et
d’artériopathie des membres inférieurs.
De nombreuses
publications concernant les néphropathies indiquent, sans surprise,
l’âge comme facteur prédictif de la mortalité.
Le constat de Heaf est
amplifié par l’étude de Framingham dans la tranche la plus vieille
de la population suivie ; BF Culleton confirme le statut de facteur de
risque, pour la mortalité cardiovasculaire et globale, de la
protéinurie (à l’état de trace ou confirmée) chez l’homme et la
femme normotendus et non diabétiques.
Dans l’étude de EM
Damsgaard, la protéinurie, chez les vieux, était un facteur de risque
de la mortalité globale.
Le grand âge est généralement considéré comme un élément
défavorable du pronostic fonctionnel de toutes les néphropathies.
La vulnérabilité du rein, la décroissance spontanée de la fonction
rénale, et la diminution en valeur absolue de la compensation
glomérulaire justifient cette opinion.
Pour la nuancer, l’étude de la
progression d’une petite cohorte de patients de plus de 65 ans
porteurs d’une GNEM montre, certes, une altération initiale plus
importante de la fonction rénale que celle d’un groupe adulte, mais
la courbe évolutive de décroissance est parallèle et le pourcentage
d’insuffisance rénale terminale n’est pas supérieur.
Dans une
analyse récente, Reichert établit également que l’effet de l’âge sur
l’évolution de cette néphropathie est faible voire inexistant.
Le
syndrome néphrotique à LGM se complique plus volontiers
d’insuffisance rénale aiguë mais, sous traitement, son évolution est
comparable à celle des adultes.
L’expérience acquise dans le
traitement des vascularites ne permet pas d’attribuer à l’âge un
pronostic péjoratif.
L’analyse des séries des autres néphropathies ne
permet pas de réunir d’arguments sur la question de l’effet délétère
de la sénescence sur l’évolution rénale.
Des études utilisant des
marqueurs glomérulaires moins contestables que la créatininémie
sont nécessaires.
3- Âge et attitude thérapeutique
:
Quelle est la tolérance des sujets âgés à la corticothérapie et aux
immunosuppresseurs ?
Les défenses immunitaires manifestent une diminution de leurs
performances au cours de la sénescence.
La réduction de la
production d’anticorps et de la réponse immune cellulaire ouvre la
voie aux infections et aux proliférations tumorales.
L’utilisation
d’immunosuppresseurs, indispensable dans certaines situations, doit
logiquement aggraver cette tendance.
Les séries de la littérature ne
détaillent pas, pour cette population particulière, la fréquence de
ces effets secondaires.
Cependant les observations d’Aasarod, à
propos de 104 cas de maladie de Wegener, mettent en évidence un
taux de complications infectieuses de 32,4 %, avec un risque relatif
de 3,3 pour les plus de 65 ans par rapport au moins de 45 ans.
Une susceptibilité aussi importante ne devrait pas manquer de se
retrouver dans les autres publications.
La fréquence comparative des
tumeurs malignes n’est pas connue.
La corticothérapie accroît la fréquence du diabète, son rôle dans
l’apparition ou l’aggravation d’une cataracte est incertain.
Il n’existe pas de procédure accréditée pour le mode d’emploi de
ces substances chez les sujets âgés.
Son élaboration devrait non
seulement tenir compte de l’âge mais aussi de la réduction de la
filtration glomérulaire, de l’hypoalbuminémie.
Une diminution
initiale, arbitraire et prudente des posologies et les mesures
préventives anti-infectieuses peuvent être mises en oeuvre.
Néphropathies interstitielles (NI)
:
La présence d’une fibrose du tissu interstitiel avec quelques discrets
infiltrats inflammatoires fait partie de la description anatomique du
rein sénescent.
Le diagnostic de NI se fonde sur l’abondance
inhabituelle de l’infiltrat inflammatoire, de l’oedème, de l’intensité
de la fibrose et des lésions tubulaires. Davison fait état de la présence
d’une NI dans 8,8 % des 1 814 biopsies pratiquées chez des plus de
60 ans, dont 65 % comme lésion d’accompagnement d’une autre
néphropathie et 35 % à titre d’atteinte isolée ou prédominante.
Une atteinte interstitielle en effet se surajoute aux glomérulopathies
de toute nature, inflammatoire dans les GN prolifératives ou fibreuse
dans les GN avec sclérohyalinose.
Elle est également constante dans
le cadre des nécroses tubulaires aiguës.
Ces manifestations
histologiques secondaires doivent être distinguées des NI
anatomiquement isolées ou prédominantes que nous envisageons
dans cette rubrique.
Le registre de l’USRDS, pour la période 1993 et 1997, indique que
4,2 % des individus entrant en dialyse étaient porteurs de cette
affection, et le pourcentage augmentait à 4,4 % pour la tranche d’âge
de plus de 64 ans ; l’âge médian était de 65 ans et les plus de 64 ans
en formaient la majorité (50,1 %).
Une prédominance masculine est
notée (56,4 %).
Davison, pour le MRCR, remarque également une
prévalence plus importante chez les plus de 60 ans (3 contre 1,9 % ;
p < 0,01).
Preston indique que 6,9 % des 334 biopsies de plus de
65 ans présentent un aspect de NI.
Ces données suggèrent que la
NI est plus fréquente chez les sujets âgés que chez les adultes.
Leur tableau anatomique, clinique et évolutif différencie les
néphropathies interstitielles aiguës (NIA) des néphropathies
interstitielles chroniques (NIC).
A - NÉPHROPATHIES INTERSTITIELLES AIGUËS
:
Les NIA sont caractérisées histologiquement par un oedème, et une
infiltration focale du tissu interstitiel par des macrophages et des
lymphocytes T plus souvent que par des neutrophiles.
Des
éosinophiles sont présents dans les processus immunoallergiques.
1- Épidémiologie
:
La NIA est un événement rare sans être cependant exceptionnel.
Dans les séries biopsiques, elle est évaluée à 1,8 % par Davison pour
les plus de 60 ans (comparé à 0,8 % pour les plus jeunes), à 4,2 %
dans la série de Preston.
Haas, qui n’étudie que des biopsies
d’insuffisance rénale aiguë, la chiffre à 18,6 % (22,1 % entre 60 et 69
ans, 14,3 % entre 70 et 79 ans et 21,6 % au-delà de 80 ans).
Ces
données sous-évaluent certainement la fréquence des NIA, car celles
dont le diagnostic est cliniquement évident peuvent ne pas être
biopsiées.
À titre d’exemple, chez les octogénaires ayant une IRA
observés à l’hôpital Tenon, 16 NIA étaient diagnostiquées
cliniquement et cinq biopsies seulement avaient été effectuées.
2- Expression clinique
:
Dans cette population, l’expression clinique est semblable à celle des
plus jeunes, sinon que l’insuffisance rénale aiguë y paraît plus
fréquente.
Un tableau d’insuffisance rénale subaiguë est possible.
Le mode d’installation et le tableau clinique général dépendent de
l’étiologie.
La fièvre est généralement présente, ainsi qu’un
syndrome biologique inflammatoire.
La protéinurie de profil
tubulaire est modérée (rarement supérieure à 2 g), la cytologie
urinaire comporte une leucocyturie d’abondance variable (avec
éosinophilurie ou présence de germe selon la cause).
Une
éosinophilie est présente dans les NIA immunoallergiques.
Une
acidose métabolique hyperchlorémique n’est pas rare.
3- Étiologies
:
Les NIA peuvent être l’expression d’une infection, d’une réaction
immunoallergique à un médicament, d’une maladie générale.
* Infections :
Les infections responsables de NIA ne se différencient guère de
celles rencontrées chez les adultes ; cependant les infections urinaires
ou digestives sévères avec septicémie pourraient sur ce terrain être
plus fréquentes.
Ces dernières comptaient pour 1,86 % des IRA
chez les sujets de plus de 65 ans biopsiés par Haas, et Akposso
les évaluait à 2,1 % dans sa série d’octogénaires.
* Médicaments :
Les accidents immunoallergiques imputables aux médicaments sont
la cause la plus commune des NIA « isolées » et sont, selon Davison,
plus fréquents chez les sujets âgés (67 % des NIA au-dessus de
60 ans et 53 % en deçà).
La prescription médicamenteuse abondante et plus durable dans
cette population en est un facteur favorisant.
J Rossert en a
récemment décrit le panorama des aspects cliniques, la liste des
molécules incriminées, la pathogénie et le traitement.
Il est peu de
molécules qui ne puissent être impliquées, mais les antibiotiques
(pénicillines, céphalosporines, sulfamides, quinolones fluorées), les
hypo-uricémiants (allopurinol) et surtout les AINS (consommés pour
plus de 75 % par des personnes de plus de 65 ans) sont le plus
souvent en cause. Ainsi Haas attribue-t-il 42 % des NIA aux
antibiotiques et 30 % aux AINS.
La triade caractéristique « fièvre, éruption, malaise général »
accompagnée d’éosinophilie ne se rencontre guère qu’avec les
pénicillines, et en particulier la méthicilline.
Plus souvent, l’IRA
s’installe discrètement dans les 10 jours qui suivent l’exposition au
toxique, voire au bout de plusieurs semaines (diurétiques, AINS).
Dans plus de 70 % des cas de NIA secondaire à la prise d’AINS,
l’insuffisance rénale s’accompagne d’un syndrome néphrotique ; cet
accident survient surtout après 60 ans, environ 6 mois après le début
du traitement, et dans presque la moitié des cas est attribuable au
fénoprofène.
J Rossert signale que cet aspect clinique n’est pas
spécifique des AINS et qu’il a aussi été rencontré avec des
traitements par la rifampicine, l’ampicilline, le lithium, l’interféron,
la diphénylhydantoïne et le D-pénicillamine.
Une étude soigneuse des prescriptions médicales récentes doit être
entreprise, chez un sujet âgé dont la fonction rénale s’altère
rapidement en l’absence de désordre hémodynamique, d’obstruction
urinaire et d’un tableau infectieux.
L’évolution lentement favorable est habituelle, mais des séquelles
fonctionnelles sont loin d’être rares.
La fonction rénale n’a pas été
mesurée à distance de l’accident initial, et la réversibilité totale ne
peut être affirmée dans la population âgée.
Il n’existe pas de preuve irréfutable de l’efficacité du traitement
corticoïde, sauf pour la NIA secondaire à la méthicilline.
* Maladies systémiques
:
Les causes systémiques sont rares (maladie de Wegener, lupus
érythémateux disséminé, cryoglobuline) et s’accompagnent d’une
glomérulopathie.
Un syndrome uvéite-NIA, généralement décrit
chez les enfants, a été rapporté chez une femme âgée.
Aux États-Unis, en 5 ans, les NIA
ont fourni un contingent de 443 patients à la dialyse chronique dont
la majorité (58,3 %) était âgée de plus de 65 ans.
B - NÉPHROPATHIES INTERSTITIELLES CHRONIQUES
:
Dans les coupes histologiques, le tissu interstitiel est remplacé par
une fibrose peu cellulaire, les membranes basales tubulaires sont
épaissies, les cellules épithéliales atrophiques et les lumières
tubulaires dilatées sont comblées par des cylindres colloïdes.
1- Épidémiologie
:
Les données de l’USRDS, pour la période de 1993-1997, montrent
que l’âge médian des 14 836 patients dialysés incidents pour une
NIC était de 65 ans, et que les hommes y sont plus nombreux (56 %)
que les femmes.
2- Expression clinique
:
Les manifestations cliniques ne sont guère différentes de celles qui
sont observées chez l’adulte mais elles sont modulées par l’étiologie.
L’altération du pouvoir de concentration des urines est l’anomalie
initiale, et peut donner lieu à un diabète insipide néphrogénique.
Une acidose tubulaire distale et une fuite urinaire sodée sont
classiques à un stade plus tardif.
Une acidose tubulaire avec
hyperkaliémie, acidose type IV, est parfois présente.
La protéinurie
est modérée mais peut atteindre un débit néphrotique sans
s’accompagner d’hypoalbuminémie.
La leucocyturie est rarement
absente, d’abondance variable selon l’étiologie, et la morphologie
rénale dépend de la cause de la NIC.
3- Étiologies
:
Les causes des atteintes interstitielles chroniques sont originaires du
tractus urologique, fréquemment à cet âge, ou d’affections d’origine
systémique.
Les affections urologiques (obstruction, lithiase,
infection, reflux) sont responsables de 42 % des NIC conduisant à la
dialyse aux États-Unis, 16 % sont imputables aux intoxications
prolongées (analgésiques, métaux lourds) et 34 % aux anomalies
métaboliques (hypokaliémie, hypercalcémie).
Certaines ne
reconnaissent pas de cause actuellement discernable et sont donc
qualifiées d’idiopathiques.
La maladie rénale myélomateuse est
ajoutée à cette rubrique.
* Causes urologiques
:
La fréquence des IRC secondaires à une NIC d’origine urologique
demeure notable. Dans la tranche d’âge des plus de 65 ans, les
hommes en sont plus fréquemment affectés que les femmes.
Les causes extrinsèques et intrinsèques ont été décrites en détail.
+ Causes urologiques extrinsèques
:
Elles affectent surtout le bas appareil urinaire.
Chez l’homme de plus de 65 ans, l’obstruction urinaire d’origine
prostatique serait responsable d’une incidence de cinq IRCT par
million d’habitants et par an, mais il est évident que la néphropathie
obstructive est bien moins rare que ne l’indiquent ces chiffres.
L’adénome prostatique est plus souvent en cause que le cancer.
L’intensité des lésions rénales et de la réduction fonctionnelle est en
rapport avec la sévérité et la durée de l’obstruction urétérale.
La
traduction clinique, outre les signes d’obstruction, peut revêtir des
aspects plus inhabituels : polyurie, hypertension artérielle, acidose
métabolique avec hyperkaliémie.
L’échographie permet le diagnostic
d’obstruction mais il est difficile, à partir de l’épaisseur
parenchymateuse, d’évaluer avec certitude la capacité
d’amélioration que procurera la levée de l’obstacle.
Il est possible
d’observer des déficits majeurs durables malgré la persistance d’un
volume parenchymateux peu modifié.
Chez les femmes, le prolapsus utérin se complique dans 5 % des cas
d’un obstacle urétéral ; les autres causes sont les tumeurs bénignes
(fibrome utérin, kyste de l’ovaire) et malignes (cancer du col utérin)
du tractus génito-urinaire.
Les cancers des voies excrétrices sont responsables de la mise en
dialyse d’environ 1 % des individus, dont 62 % ont plus de 65 ans
72 % du sexe masculin.
Des affections malignes ou inflammatoires du tractus digestif (cancer
du rectum ou du côlon, diverticulose colique) peuvent être en cause,
et la chirurgie de ces tumeurs peut se compliquer d’une dysfonction
vésicale neurogène.
Prés de 10 % des anévrismes de l’aorte abdominale s’associent à un
obstacle urétéral uni- ou bilatéral ; les artères iliaques sont très
exceptionnellement en cause.
L’invasion tumorale de l’espace rétropéritonéal, quelle qu’en soit la
modalité (invasion de proximité ou métastase), rend compte de 70 %
des obstructions dues à des causes extrinsèques siégeant dans cet
espace.
La fibrose rétropéritonéale idiopathique a un pic de
fréquence à la cinquième et à la sixième décennie.
Dans quelques
cas, une utilisation chronique de méthysergide est retrouvée (1 %
des traitements), les bêtabloqueurs ont également été soupçonnés
mais, dans la majorité des cas, aucune cause n’est mise en évidence.
+ Causes urologiques intrinsèques
:
Elles sont moins fréquentes.
Les vessies neurogènes provoquent des lésions parenchymateuses
par urétérohydronéphrose ou reflux vésico-urétéral.
Elles peuvent
provenir d’une lésion motrice accroissant la contraction du détrusor
et du sphincter urétral (séquelles de chirurgie pelvienne) ou une
lésion sensitive provoquant la rétention vésicale chronique (vessie
neurogène du diabétique).
Au cours de la maladie de Parkinson,
une vessie neurogène peut être observée, et le traitement de la
maladie est lui-même susceptible de provoquer de tels troubles.
La lithiase rénale, rare chez les personnes âgées, est
exceptionnellement la cause isolée d’une NIC.
L’infection urinaire est fréquente chez le sujet âgé : la prévalence de
l’infection urinaire de la femme de plus de 65 ans est de 20 %.
La
prévalence de la bactériurie asymptomatique est même plus élevée
(17 à 33 % pour la femme et 6 à 13%pour l’homme non hospitalisé).
La relation entre bactériurie et altération rénale est discutée.
Des
études longitudinales anciennes (1969) font état d’une détérioration
plus rapide de l’hémodynamique rénale chez les bactériuriques, sans
qu’il soit établi de relation causale entre les deux phénomènes.
On a
également suggéré que la néphrosclérose anatomique puisse avoir
une évolution plus rapide en présence d’une bactériurie
asymptomatique au long cours.
Ces travaux anciens n’ont pas reçu
de confirmation récente.
Freedman estime qu’une anomalie
anatomique urinaire est nécessaire pour que l’infection urinaire soit
à même de provoquer des lésions rénales avec retentissement
fonctionnel.
Le diagnostic de pyélonéphrite chronique ou de NIC
postinfectieuse nécessite les critères morphologiques rénaux
habituels : réduction de la taille des reins, incisures corticales,
diminution de la distance corticomédullaire.
* Causes toxiques
:
Les NIC d’origine toxique rendent compte de 16 % des NIC des plus
de 65 ans parvenus à la dialyse, et concernent l’utilisation
chronique de longue durée d’analgésiques (36 % du contingent) et
du lithium.
+ Analgésiques :
L’atteinte rénale due aux analgésiques se définit comme la
conséquence d’une consommation assidue pendant au moins 5 ans
d’au moins deux analgésiques associés à la codéine ou la caféine ;
de nombreux arguments épidémiologiques, expérimentaux et
cliniques, soutiennent la réalité de cette entité.
Une consommation
de l’ordre d’une vingtaine d’années est nécessaire pour installer une
insuffisance rénale terminale, et les victimes de l’intoxication
commencent leur dialyse à la cinquième ou sixième décennie.
Les
signes radiologiques ou scanographiques diagnostiques sont
désormais incontestablement définis : réduction de la taille des reins,
incisures corticales, calcifications papillaires (témoins de la nécrose
papillaire chronique). Ils permettent rétrospectivement l’évocation
du diagnostic.
+ Anti-inflammatoires non stéroïdiens
:
Les nombreuses atteintes rénales que sont susceptibles de provoquer
les AINS ont déjà été évoquées (insuffisance rénale aiguë,
hyperkaliémie, syndrome néphrotique avec insuffisance rénale,
glomérulopathie extramembraneuse, nécrose papillaire).
Leur
toxicité au long cours est en revanche incertaine, bien que des études
épidémiologiques aient suggéré un risque accru d’insuffisance rénale
chronique, les résultats ont été mis en doute par S Delzell dont la
revue des travaux épidémiologiques concernant le sujet n’apporte
pas d’argument pour affirmer la toxicité chronique de l’aspirine et
des AINS.
Quelques cas ont été décrits, où la responsabilité des AINS dans la constitution d’une insuffisance rénale chronique a été
impliquée. Ils demeurent rarissimes cependant au regard de
l’énorme consommation de ces médicaments.
+ Lithium
:
L’utilisation au long cours du lithium peut se compliquer d’une
polyurie et d’un véritable diabète insipide néphrogénique.
L’étude
anatomopathologique montre un aspect de fibrose interstitielle et
une atrophie tubulaire, en relation avec la durée du traitement et
d’éventuels épisodes d’intoxication, des kystes tubulaires peuvent
également se former.
Des études transversales et longitudinales ont
montré que 15 % des personnes traitées avaient une réduction de la
filtration glomérulaire, mais de nombreux facteurs de confusion ne
permettent pas de conclusion définitive sur sa responsabilité. Markowitz et al ont rapporté 24 cas de NIC compliquée
d’insuffisance rénale chronique sévère et secondaire à la prise
prolongée de sels de lithium.
Un diabète insipide était présent dans
87 % des cas, une hypertension dans 33 % et une protéinurie néphrotique chez 25 %.
Des lésions glomérulaires à type de sclérose
segmentaire ou globale accompagnaient fréquemment les lésions
interstitielles et tubulaires kystiques classiques. Sept patients dont la
protéinurie était abondante évoluèrent vers une IRCT.
+ Toxiques environnementaux et professionnels
:
L’exposition chronique professionnelle ou environnementale au
plomb est susceptible, même en l’absence d’épisodes d’intoxication
aiguë, de provoquer des lésions interstitielles.
Une preuve
supplémentaire d’une surcharge chronique et silencieuse en plomb
a pu être apportée chez 5 % d’une cohorte de dialysés étudiée par
Van de Vyver et al.
La fréquence de cette atteinte est peut-être
sous-estimée ; la triade « crises de goutte-HTA-insuffisance rénale »
est très suggestive de l’affection, et impose un test diagnostique de
plomburie par chélation à l’éthylène-diamine-tétra-acétique (EDTA).
L’intoxication chronique par le cadmium est responsable d’une
néphropathie tubulaire proximale chronique qui n’évolue
qu’exceptionnellement vers l’urémie.
* Néphropathie interstitielle goutteuse
:
L’existence d’une NIC secondaire à l’hyperuricémie, la néphropathie
goutteuse, demeure controversée.
Malgré la présence dans la
presque totalité des documents autopsiques de lésions interstitielles,
tubulaires et artériolaires, malgré les perturbations des épreuves
fonctionnelles et l’existence d’une population évoluant vers
l’insuffisance rénale, la reconnaissance de l’entité néphropathie
goutteuse a connu une période d’occultation.
À la suite des travaux
de Yu et al, la notion d’une néphrotoxicité de l’hyperuricémie
chronique fut contestée.
La critique de ces conclusions par
Johnson et al suggère qu’une surestimation systématique du rôle
délétère sur le rein de l’hypertension artérielle et de l’âge obscurcit
probablement la néphrotoxité propre de l’acide urique.
La possibilité d’une confusion avec une néphropathie saturnine
chronique est possible dans certains cas.
* Néphropathie interstitielle granulomateuse
:
La néphropathie granulomateuse en relation avec une sarcoïdose est
rare chez les sujets âgés.
En présence d’un granulome interstitiel,
une étiologie médicamenteuse est incontestablement plus
fréquente.
Le syndrome de Gougerot-Sjögren, cause d’une
tubulopathie compliquée de lithiase, de néphrocalcinose, est très rare
et évolue exceptionnellement vers l’insuffisance rénale chronique.
* Néphropathie du myélome
:
La néphropathie myélomateuse ne fait pas partie à strictement parler
des NIC, car la lésion anatomique est initialement tubulaire puis
tubulo-interstitielle : cylindre tubulaire myélomateux, réaction à
corps étranger, néphrite interstitielle diffuse parfois.
Pour des raisons
de commodité qui ne défient cependant pas la logique de la
présentation, nous en traitons dans ce chapitre.
L’âge moyen des patients atteints de myélome est situé entre 60 et
65 ans.
Une atteinte rénale est fréquente, le cumul des grandes
séries montre que 43 % ont une créatininémie supérieure à 15 mg
(133 µmol/L) et 22 % supérieure à 20 mg (177 µmol/L).
Elle
va de pair avec une masse tumorale importante, une anémie plus
marquée, une hypercalcémie plus fréquente. Il existe plus souvent
une chaîne légère chez les malades ayant une IRA (20-62 %).
La
sévérité de l’altération rénale est un déterminant majeur du
pronostic ; Winearls constate une médiane de survie de 44, 18 et 4,3
mois respectivement pour une créatininémie inférieure à 120,
comprise entre 120 et 180 et supérieure à 180 µmol/L.
Cette
néphropathie est responsable de la mise en dialyse d’environ 1 %
des patients, dont 65 % ont plus de 65 ans.
Les néphropathies myélomateuses prises en charge initialement par
les néphrologues, généralement à l’occasion d’une IRA introductive,
constituent une minorité d’un type particulier dans cette population,
dont elle représente environ 10 %.
Haas la rencontre dans 6 %
des biopsies pour IRA et elle représente 3,7 % des étiologies des
IRA des octogénaires observés à l’hôpital Tenon.
Des événements
favorisants sont retrouvés : déshydratation extracellulaire,
hypercalcémie, hypotension, prise d’AINS. Selon Winearls, la
responsabilité de l’injection de produit de contraste iodé, souvent
incriminée, est largement surévaluée.
L’IRA est complètement
réversible dans un quart des cas, plus souvent lorsqu’elle a débuté
par une déshydratation, une hypercalcémie et que la créatininémie
est inférieure à 354 µmol/L.
Elle nécessite la dialyse dans 3 à
12,7 % des cas selon le recrutement.
La mortalité initiale est élevée
(30 %) et la réponse au traitement médiocre.
Le cumul de sept séries
révèle que la fréquence de récupération partielle de l’IRA est de
54 %, et la durée médiane de survie après l’événement de 13 mois
(4-22). L’IRC terminale affecte 10 % des myélomes.
En dialyse,
la mortalité à 1 an est supérieure à 50 % et les hospitalisations
intercurrentes sont très nombreuses.
L’âge n’est un facteur
déterminant ni de la survenue de l’IRA, ni de la récupération
fonctionnelle, ni de la survie.
C - PRONOSTIC
:
Les NIA ou NIC semblent plus fréquentes chez les plus de 65 ans et,
à l’exception des néphropathies d’origine médicamenteuse, les
hommes en sont plus souvent victimes et conduits à la dialyse.
Certaines de leurs étiologies (obstructive, médicamenteuse, métabolique) sont accessibles à la prévention.
Il est probable que les NIA se manifestent, dans cette population, sous une forme plus
sévère et soient affectées d’un pronostic plus défavorable.
Conclusion
:
La recherche des maladies glomérulaires est moins active chez les
personnes âgées que dans la population adulte.
En dépit de cela,
l’incidence et la prévalence des glomérulopathies y sont plus grandes.
Les maladies d’origine immunitaire y sont largement représentées,
aussi bien dans le groupe des néphropathies primitives que dans celui
des atteintes secondaires (angéite microscopique, amylose AL, dépôts
d’Ig).
L’âge ne paraît pas conférer à ces maladies une évolution
particulièrement péjorative.
Comme dans les autres pays à haut
niveau de vie, la néphropathie du diabète type 2 prend en Europe et
en France des allures épidémiques et pose un problème de santé
publique.
Les NIA sont également très représentées dans cette
tranche d’âge, elles reflètent l’impact de l’abondante prescription
médicamenteuse.