Malgré les progrès importants réalisés au cours des dernières
décennies dans les domaines de l’imagerie médicale, l’examen de
référence de l’exploration du médiastin reste l’abord chirurgical.
La technique originale de la médiastinoscopie a été décrite à la fin
des années 1950.
Par la suite, elle s’est inscrite dans la dynamique
de progrès de la prise en charge des cancers bronchopulmonaires.
Elle est, aujourd’hui, considérée comme une procédure sûre et
efficace.
Les principales indications sont toujours le bilan d’extension des
tumeurs bronchopulmonaires et le diagnostic des tumeurs du
médiastin.
Ces indications se sont, cependant, sensiblement affinées.
Historique
:
C’est le pourcentage élevé de thoracotomies exploratrices (30 à 41 %)
et de résections carcinologiquement incomplètes du fait
d’envahissement ganglionnaire médiastinal méconnu qui incita,
dans les années 1950, nombre d’auteurs à imaginer une expertise
médiastinale.
Dix ans auparavant, Daniels, Harken ou Radner avaient déjà
tenté cette exploration au moyen des cervicotomies et de biopsies
ganglionnaires.
Ce sont en quelque sorte les précurseurs de la médiastinoscopie.
L’idée d’un véritable « examen par l’oeil, le doigt et le microscope des
structures ganglionnaires et/ou tumorales du médiastin » proprement
dit revient au Suédois Carlens : le concept de médiastinoscopie est
né à Stockholm en 1957.
Deux ans plus tard, il rapportait les cent
premiers cas.
À cette époque, les techniques d’explorations thoraciques permettant
de juger de la résécabilité étaient limitées ; l’essor de la
médiastinoscopie a donc été rapide.
Dès la fin des années 1960, la
technique fut reprise par des équipes nord-américaines.
Elle fut
défendue et développée par Pearson et Paulson, jusqu’à ce que
son utilité fût clairement démontrée par Deslauriers qui rapporta
en 1985 les résultats d’une étude rétrospective portant sur une série
de 1 200 médiastinoscopies.
Par la suite, la médiastinoscopie s’inscrivit dans la dynamique de
progrès de prise en charge des cancers bronchopulmonaires.
À partir
des années 1970, la classification tumor-nodes-metastases [TNM] fut
développée, améliorée puis appliquée à la médiastinoscopie.
Le scanner thoracique permit une meilleure évaluation des
possibilités d’exérèse au niveau de la tumeur elle-même mais
également au niveau de l’envahissement ganglionnaire.
Il permit
alors de mieux sélectionner les candidats à la médiastinoscopie en
tenant compte non plus seulement des ganglions invasifs mais ceux
de taille suspecte.
En parallèle, on assista à une amélioration de la
technique et des instruments pour aboutir à l’ultime évolution que
sont les vidéomédiastinoscopes actuels associés ou non aux
techniques de thoracoscopie.
Aujourd’hui, malgré le développement de la tomographie par
émission de positons, et celui de techniques diagnostiques moins
invasives, la médiastinoscopie reste le « gold standard » de
l’exploration ganglionnaire médiastinale.
Cependant, après une période d’engouement où la médiastinoscopie
fut même considérée comme incontournable par certains auteurs, elle n’est plus actuellement considérée comme un examen de
routine systématique. Les indications se sont nuancées, précisées.
Elles continuent, aujourd’hui, dans certains cas, de faire l’objet de
discussions, voire de controverses.
Médiastin
:
Le médiastin est la région anatomique encadrée par les deux plèvres
pariétales médiastinales, le défilé cervicothoracique et le
diaphragme.
C’est une région embryologiquement complexe, véritable carrefour
lymphatique, traversée par des éléments vasculaires, ganglionnaires,
nerveux, digestifs ou respiratoires, et contenant des éléments
glandulaires et l’ensemble cardiopéricardique.
LYMPHATIQUES DU POUMON
:
À partir de la fin des années 1970, le développement et
l’amélioration de la classification TNM ont modifié l’approche des
cancers du poumon.
En 1986, Mountain proposa une classification anatomique des relais
ganglionnaires en considérant trois grandes loges :
– une loge médiastinale supérieure comprenant des ganglions
paratrachéal haut et paratrachéal bas, la limite étant
constituée par le tronc artériel brachiocéphalique ;
– une loge aortique avec des ganglions sous-aortiques ou de la
fenêtre aortopulmonaire et des ganglions para-aortiques de
l’aorte ascendante et du phrénique ;
– une loge médiastinale inférieure avec des ganglions souscarinaires
, paraoesophagiens et du ligament triangulaire.
Le drainage lymphatique du poumon a longtemps été considéré
comme systématisé, l’extension métastatique se faisant
successivement de groupe en groupe.
En 1994, les travaux anatomocliniques de Riquet ont permis de
prendre conscience que les limites entre les loges sont floues :
certains relais lymphatiques sont couramment sautés et, surtout,
tous les types de drainage lymphatique peuvent être observés sans
qu’ils puissent être prévisibles.
Procédures chirurgicales
:
A - MÉDIASTINOSCOPIE AXIALE CERVICALE
ET VIDÉOMÉDIASTINOSCOPIE AXIALE CERVICALE :
La médiastinoscopie axiale cervicale est le concept original décrit
par Carlens en 1965.
La vidéomédiastinoscopie axiale cervicale est
l’ultime évolution de la médiastinoscopie axiale cervicale par
l’adjonction des techniques modernes de vidéochirurgie.
1- Installation
:
L’intervention est pratiquée en décubitus dorsal sous anesthésie
générale avec intubation endotrachéale par une sonde armée. Un
billot est disposé sous les épaules du malade.
Le bras gauche est
placé le long du corps, le bras droit, équipé de voies veineuses, est
fixé sur un appui et reste accessible pour le médecin anesthésiste
.
L’opérateur se place à la tête du malade, l’aide opératoire
est à sa gauche.
L’instrumentiste est à la gauche de l’aide, les
instruments étant disposés sur une table en pont située au-dessus
des membres inférieurs du patient.
Au cours des vidéomédiastinoscopies, un écran de contrôle est placé
face à l’opérateur aux pieds du malade, un second écran pouvant
être placé face à l’aide.
2- Instrumentation spécifique
:
En plus des instruments « classiques », l’opérateur dispose
d’instruments plus spécifiques à la médiastinoscopie.
Il s’agit d’un aspirateur-coagulateur à embout métallique, de pinces et ciseaux
longs identiques à ceux utilisés en endoscopie, éventuellement de
tampons montés sur une pince longue et de pinces à biopsie.
Le vidéomédiastinoscope de Dahan et Linder a aujourd’hui
remplacé le médiastinoscope de Carlens.
Il est tout à la fois écarteur, canal opérateur, optique à 30°, source de lumière froide et caméra.
Il
s’agit d’une sorte de spéculum dont la valve inférieure peut s’ouvrir
largement de façon à exposer parfaitement les structures médiastinales qui peuvent être observées par toute l’équipe
chirurgicale.
L’apport de la vidéochirurgie à la médiastinoscopie axiale est
immense, tout autant en termes de confort chirurgical, de facilité
d’enseignement que de preuve médicolégale.
3- Voie d’abord
:
L’incision est une cervicotomie basse, transversale et symétrique.
L’ouverture de la lame superficielle du fascia cervical au
niveau de la ligne blanche cervicale permet d’écarter les muscles sous-hyoïdiens.
L’incision de la lame prétrachéale du fascia cervical
permet l’accès au plan trachéal, sous l’isthme thyroïdien.
La
dissection se poursuit au doigt dans les plans prétrachéal et
latérotrachéal droit.
Le (vidéo-) médiastinoscope est introduit dans l’espace ainsi libéré.
Une fois en place, il est maintenu par l’aide opératoire, ce
qui permet à l’opérateur de poursuivre la dissection sous contrôle
de la vue et par des manoeuvres bimanuelles.
Le décollement est prolongé vers le bas et la droite de la trachée
grâce à l’aspirateur-coagulateur, jusqu’à accéder aux ganglions
suspects.
La progression est rapidement gênée par la crosse aortique
en avant et à gauche, par le tronc artériel brachiocéphalique en avant
et par la veine cave supérieure à droite.
4- Prélèvements et biopsies
:
L’exploration des lésions s’effectue au doigt. Les biopsies
ganglionnaires sont pratiquées, sous contrôle de la vue, et après
dissection de la structure pathologique.
L’énucléation complète d’un
ganglion est parfois possible.
En cas de suspicion d’envahissement
de la paroi externe de la trachée ou des bronches souches, une
biopsie peut être réalisée à ce niveau.
5- Traitement des fragments biopsiés
:
Un examen anatomopathologique en extemporané des biopsies
pratiquées pendant la médiastinoscopie est indispensable.
Dans les cas des bilans d’extension des cancers bronchopulmonaires,
si les ganglions sont envahis, le geste d’exérèse pulmonaire est le
plus souvent récusé et il est alors possible de mettre en place, par la
même voie d’abord, un site implantable en vue d’une
chimiothérapie.
Au contraire, si les ganglions sont sains, l’exérèse
peut se faire idéalement, dans le même temps opératoire, comme
c’est le cas dans la plupart des grandes équipes nord-américaines et
ce du fait de l’absence de faux positifs et du faible taux de faux
négatifs.
Dans les cas de diagnostic de lésions médiastinales, l’intérêt d’un
examen en extemporané n’est pas tant d’avoir un diagnostic précis
mais surtout d’avoir la certitude que les fragments prélevés sont
pathologiques, de bonne qualité et interprétables.
Les fragments doivent être adressés à l’état frais au laboratoire,
permettant au médecin anatomopathologiste de choisir la meilleure
technique pour un diagnostic le plus précis possible.
Dans les cas d’adénomégalies médiastinales sans diagnostic, les
prélèvements bactériologiques et en particulier la recherche de
bacilles de Koch (BK) (examen direct ou culture) peuvent être des
plus utiles.
6- Fermeture
:
Une fois les biopsies ganglionnaires réalisées, la fermeture s’effectue
plan par plan avec ou sans mise en place d’un drain aspiratif dans
le lit médiastinal.
Finalement, seules sont accessibles par cette voie axiale, les loges paratrachéales hautes droite et gauche, la loge de Barety
et la loge précarinaire et sous-carinaire antérieure.
Les loges aortiques, sous-carinaires
postérieures, paraoesophagiennes et du ligament triangulaire
restent inaccessibles par cette approche.
B - EXTENSIONS DE LA MÉDIASTINOSCOPIE AXIALE
CERVICALE :
1- Médiastinoscopie axiale cervicale antérieure
:
Le principe est le même que pour une médiastinoscopie axiale
cervicale.
Seul change le plan de dissection qui se situe en avant de
la lame prétrachéale du fascia cervical, du tronc brachiocéphalique
et du fascia thyropéricardique.
De cette
façon, l’accès aux tumeurs de la loge thymique est possible.
2- Médiastinoscopie cervicale étendue
ou médiastinoscopie élargie
:
L’impossibilité d’accéder facilement aux régions para- et sousaortiques
incita certains auteurs comme Ginsberg à imaginer une
extension de la médiastinoscopie cervicale axiale.
Ainsi fut décrite
« la médiastinoscopie cervicale étendue ».
Les principes généraux d’installation et de technique opératoire sont
les mêmes que ceux de la médiastinoscopie axiale cervicale.
La technique de la médiastinoscopie cervicale étendue consiste à
ouvrir la plèvre médiastinale gauche entre le tronc artériel en avant
et la carotide primitive gauche en arrière, ce qui permet d’accéder
aux ganglions para- et sous-aortiques.
Cette voie éminemment risquée n’a que des indications limitées d’où
son abandon progressif au profit des médiastinotomies et
médiastinoscopies antérieures.
C - MÉDIASTINOTOMIE ANTÉRIEURE OU PARASTERNALE
:
Décrite par McNeil et Chamberlain, la médiastinotomie
antérieure ou parasternale consiste à pratiquer une courte
thoracotomie antérieure dans le 2e espace intercostal afin d’aborder
la loge para-aortique et plus difficilement la fenêtre aortopulmonaire.
La vidéomédiastinoscopie parasternale n’est que l’introduction du
vidéomédiastinoscope, précédemment décrit au chapitre de la
vidéomédiastinoscopie axiale cervicale, dans la thoracotomie
antérieure.
1- Installation
:
L’intervention est pratiquée en décubitus dorsal sous anesthésie
générale.
Un billot est disposé au niveau de la pointe des omoplates
du patient. Les bras sont placés sur des appuis.
Équipés de voies
veineuses, ils restent accessibles au médecin anesthésiste.
L’opérateur se place du côté de la médiastinotomie, l’aide opératoire
est en face de l’opérateur, l’instrumentiste aux côtés de l’aide.
Les
instruments sont sur une table en pont située au-dessus des
membres inférieurs du patient.
Au cours des vidéomédiastinoscopies, un écran de contrôle est placé
face à l’opérateur, un second écran pouvant être placé face à l’aide.
2- Instrumentation spécifique
:
En dehors d’une pince à biopsie, les instruments nécessaires sont
ceux de la chirurgie classique.
3- Voie d’abord
:
L‘incision est horizontale ou verticale en regard des 2e ou
3e cartilages costaux.
Les fibres du grand pectoral sont
sectionnées, le périchondre ruginé, le cartilage excisé en souspérichondral.
Les vaisseaux mammaires internes sont sectionnés
entre deux ligatures ou refoulés en dedans.
En intrathoracique, la dissection est menée sans ouvrir la plèvre
pariétale, selon un plan extrapleural : le cul-de-sac pleural
médiastinal est donc refoulé en dehors.
4- Prélèvements et biopsies
:
Les règles générales sont en tout point identiques à celles énoncées
au chapitre de la médiastinoscopie axiale cervicale.
5- Fermeture
:
La fermeture s’effectue plan par plan.
Un drain, de type drain de
Redon, est laissé en place pendant au moins 24 heures.
La médiastinotomie antérieure est moins douloureuse qu’une vraie
thoracotomie, elle permet d’accéder au médiastin moyen et au
médiastin antérieur (pour explorer les tumeurs de la loge thymique).
D - VIDÉOMÉDIASTINOSCOPIE ANTÉRIEURE
PARASTERNALE :
C’est une variante et un prolongement de la médiastinotomie
antérieure.
La dissection se poursuit au doigt, le médiastinoscope est ensuite introduit dans la médiastinotomie.
Ceci
est notamment nécessaire dans l’exploration ganglionnaire gauche médiastinale d’un cancer.
Toutes les tumeurs antérieures peu
latéralisées peuvent également être atteintes par cette voie.
E - MÉDIASTINOTOMIE POSTÉRIEURE
:
La médiastinotomie postérieure à visée diagnostique tend à être
abandonnée au profit de la ponction transpariétale radioguidée.
À
titre thérapeutique, elle n’a que d’exceptionnelles indications comme
la mise à plat d’un abcès médiastinal.
Malgré les variantes et prolongements des abords cervical axial et
antérieur parasternal, les loges sous-carinaire postérieure,
paraoesophagienne et du ligament triangulaire restent inaccessibles.
Ceci explique, dans la série de Saint-Louis, les 8 % de faux
négatifs dans l’appréciation des N2/3 par ces explorations classiques
du médiastin.
Ce problème a été en partie résolu avec le développement de la vidéochirurgie dans les années 1990 : l’association de la
vidéomédiastinoscopie et de la vidéothoracoscopie permet d’accéder
à toutes les localisations ganglionnaires, y compris postérieures.
Une expertise complète de toutes les loges médiastinales est donc
aujourd’hui techniquement possible.
Complications
:
A - MORTALITÉ
:
Si l’on se réfère aux plus grandes séries, on constate
que la mortalité de la médiastinoscopie varie de 0 à 1 %.
Cette mortalité est due pour un tiers au geste : effraction vasculaire
(aorte, artère pulmonaire, tronc artériel, veine cave supérieure, veine
azygos, voire artère bronchique) et pour deux tiers au terrain (sujet
très altéré, inopérable : défaillance cardiaque, détresse respiratoire
ou accident vasculaire cérébral).
B - MORBIDITÉ
:
Le taux de complications non mortelles oscille entre 0,5 et 4 %.
Outre les problèmes cardiaques (troubles du rythme) et autres
hypotensions en général bien contrôlées par le médecin anesthésiste,
les complications chirurgicales peuvent être plus préoccupantes.
1- Hémorragie
:
Il s’agit le plus souvent d’hémorragies en rapport avec la biopsie
ganglionnaire : elles cèdent par tamponnement, coagulation, voire
mise en place d’un clip.
Si l’hémorragie persiste après quelques minutes de compression, la
thoracotomie ou la sternotomie devient indispensable.
Remarquons qu’en cas de doute persistant sur la nature vasculaire
de la structure que l’on envisage de biopsier, une ponction préalable
à l’aiguille peut s’avérer des plus utiles.
2- Plaie bronchique ou trachéale
:
Elle est rapidement reconnue.
La thoracotomie est alors
recommandée pour une réparation satisfaisante bien qu’une suture
sous vidéo soit possible.
3- Plaie oesophagienne
:
C’est une complication plus insidieuse ; elle doit être vite
diagnostiquée.
Une réparation immédiate est sans conséquence,
alors que le pronostic est beaucoup plus péjoratif au stade de médiastinite ou de pleurésie purulente.
4- Lésion du nerf récurrent gauche
:
La lésion du nerf récurrent gauche est rare.
Une biopsie ou une
électrocoagulation en est le plus souvent la cause.
5- Pneumothorax, infection des plèvres ou des plaies
opératoires :
Ce sont des complications moins préoccupantes.
Remarquons que
les taux de complications non létales rapportés par les grandes
équipes nord-américaines tiennent essentiellement au fait d’une
analyse anatomopathologique en extemporané rapide et fiable leur
permettant d’effectuer médiastinoscopie et thoracotomie dans le
même temps opératoire.
Les auteurs ne tiennent, en effet, pas
compte des complications traitées en même temps que le geste
d’exérèse.
Indications
:
Les indications de la médiastinoscopie sont le bilan d’extension des
tumeurs bronchopulmonaires et le diagnostic des tumeurs du
médiastin.
Ces indications font encore dans certains cas l’objet de controverses.
Nous ne les rapportons ici que dans leurs grandes lignes.
A - EXTENSION DES CANCERS BRONCHOPULMONAIRES
:
Dans le cadre des tumeurs bronchopulmonaires, l’expertise de
l’extension médiastinale est décisive : elle concerne la résécabilité de
la tumeur.
En pratique, c’est l’opérabilité du patient qui conditionne
la conduite thérapeutique, c’est-à-dire sa capacité ou son incapacité
à tolérer, par limitation fonctionnelle cardiaque ou respiratoire, une
chirurgie d’exérèse pulmonaire.
Cette évaluation initiale conditionne
les possibilités thérapeutiques et donne à l’exploration médiastinale
des objectifs différents.
1- Patient opérable
:
La médiastinoscopie peut être utile dans trois cas de figure.
– Une suspicion de «N 3» : toutes les localisations tumorales sont
concernées, puisque les travaux de Riquet ont bien démontré que
toutes les voies de drainage sont possibles.
– La recherche d’un « N2 » pouvant justifier une chimiothérapie néoadjuvante : pour certains, la présence d’adénopathies
homolatérales en possible rupture capsulaire est une bonne
indication de médiastinoscopie ; pour d’autres, l’envahissement de
plusieurs chaînes ganglionnaires médiastinales est un facteur
pronostique et donc une indication de médiastinoscopie.
– La suspicion d’un carcinome à petites cellules : en l’absence de
diagnostic histologique d’une tumeur bronchopulmonaire pouvant
correspondre à une tumeur non chirurgicale, la médiastinoscopie est
une excellente indication si la fibroscopie ou la ponction
transpariétale sont non contributives ou impossibles.
Finalement, si le patient est opérable, la médiastinoscopie est
indiquée à chaque fois que la résécabilité est mise en cause.
2- Patient inopérable
:
La médiastinoscopie est utile dans deux situations.
– Pour le diagnostic : en présence d’une tumeur bronchopulmonaire
sans diagnostic, si la fibroscopie et la ponction restent non
contributives, et si la tumeur est associée à des adénopathies
médiastinales de taille significative, la médiastinoscopie peut
permettre d’obtenir un diagnostic histologique, et donc d’instaurer
un traitement médical.
– Pour le traitement : la survenue d’un épanchement péricardique
abondant dans un contexte de tumeur bronchopulmonaire est une
indication de thoracoscopie gauche qui non seulement pourra
prouver l’envahissement mais aussi permettra de créer une fenêtre
pleuropéricardique.
Au total, si le patient est inopérable, la médiastinoscopie sera
indiquée chaque fois que l’obtention d’un diagnostic histologique
sera nécessaire ou qu’elle sera susceptible de modifier la conduite
thérapeutique.
B - DIAGNOSTIC DES TUMEURS DU MÉDIASTIN
:
On entend par tumeurs du médiastin « l’ensemble des tumeurs
développées à partir des éléments, soit normalement présents dans
le médiastin, soit ne devant plus ou pas s’y trouver, en éliminant de
ce cadre les tumeurs des conduits ou des organes de passage ainsi
que la pathologie cardiopéricardique ».
La conduite pratique dépend directement du résultat des
explorations radiologiques et notamment scanner et/ou imagerie
par résonance magnétique (IRM).
Le contexte de survenue, la
localisation et surtout les rapports avec les tissus voisins permettent
de guider l’indication d’explorations diagnostiques : en pratique,
tout dépend du caractère invasif ou non de la tumeur.
Toute tumeur médiastinale ne semblant pas invasive, quels que
soient son contexte et sa localisation, doit être opérée.
Elle a toutes
les chances d’être bénigne ou en tout cas d’être résécable en totalité.
S’il apparaît que la tumeur est maligne, la résection complète est le
meilleur traitement pronostique.
Dans ce cas, l’association à d’autres
thérapeutiques médicales dépendra du diagnostic histologique final
obtenu sur la pièce opératoire.
Les tumeurs invasives doivent être considérées comme
potentiellement malignes.
Certaines tumeurs ne sont jamais
chirurgicales (lymphomes hodgkiniens ou non hodgkiniens),
d’autres sont très sensibles au traitement médical (séminomes, goniomes), enfin certaines peuvent bénéficier d’une chimiothérapie
préopératoire (tumeurs embryonnaires).
L’abord chirurgical du
médiastin, quelle que soit la technique, permet d’obtenir un
diagnostic histologique, ce qui est fondamental pour orienter la prise
en charge thérapeutique.
Contre-indications
:
Les contre-indications de la médiastinoscopie sont essentiellement
celles de l’anesthésie.
Place des techniques non invasives
:
Le rôle de l’expertise médiastinale chirurgicale reste toujours au
centre de nombreuses polémiques.
Plusieurs études ont comparé scanner et médiastinoscopie.
Aucune n’a prouvé la supériorité du premier sur la seconde.
Bien
au contraire, Hammoud constate que 13 % des patients ayant un
scanner considéré comme normal présentaient une médiastinoscopie
positive.
Plus récemment, l’association scanner et tomographie par émission
de positons (TEP-scan) s’est avérée être supérieure au scanner seul
dans l’appréciation de l’extension préopératoire de carcinomes non
à petites cellules.
La plupart des études retrouvent une faible
valeur prédictive positive (importance des faux positifs) et une forte
valeur prédictive négative du TEP-scan.
Il permettrait donc
de diminuer les indications de médiastinoscopie sans pour autant
pouvoir la remplacer.
Par ailleurs, les techniques de ponctions transthoraciques
radioguidées, les ponctions transoesophagiennes ou
transbronchiques peuvent parfois apparaître comme autant
d’alternatives à l’abord chirurgical.
Si les techniques de ponction transthoracique se sont aujourd’hui développées, la place des autres
techniques reste à préciser.
Conclusion
:
Malgré le développement récent de la tomographie par émission de
positons et celui de techniques de ponctions moins invasives, la médiastinoscopie reste l’examen de référence de l’exploration du
médiastin.
La médiastinoscopie ne se résume plus à la médiastinoscopie
axiale cervicale.
On entend aujourd’hui par médiastinoscopie « l’étude
du médiastin par tous les moyens à disposition : vidéomédiastinoscopie
axiale cervicale, antérieure, vidéomédiastinotomie ou vidéothoracoscopie
».
La médiastinoscopie doit donc être considérée comme
une véritable expertise des loges médiastinales sans préjuger des
moyens employés.
Reste que les indications classiques de la médiastinoscopie que sont les bilans d’extension des cancers
bronchopulmonaires et les diagnostics des tumeurs du médiastin se
sont sensiblement affinées : la médiastinoscopie n’est plus un examen de
routine, incontournable et systématique.
Enfin, en marge de ces
indications classiques sont apparues de nouvelles perspectives, la médiastinoscopie à visée thérapeutique : réalisation de fenêtre
pleuropéricardique, talcage pleural, traitement de fistules
bronchopleurales après pneumonectomie gauche, résection de kystes
mésothéliaux, sympathectomie thoracique, voire curage
ganglionnaire radical.