Malaise, lipothymie et syncope Cours de
réanimation - urgences
Introduction
:
Le terme de « malaise » est commun, employé par les patients dans
des situations variées.
Il n’est pas défini dans les manuels médicaux.
Il faut se référer au dictionnaire français pour en trouver une
définition : « sensation pénible souvent vague d’un trouble des
fonctions physiologiques ».
Sans
définition médicale, c’est en pratique un motif de consultation
fréquent en médecine générale comme en médecine d’urgence où il
représente 3 à 5 % des admissions.
D’autres termes proches sont définis dans les dictionnaires médicaux
(Dictionnaire des termes techniques de médecine Garnier-Delamare).
La lipothymie est un malaise passager caractérisé par une
impression angoissante d’évanouissement imminent.
Sa
symptomatologie est riche et variée.
La syncope est une perte de
connaissance brutale et complète liée à une soudaine anoxie
cérébrale.
La syncope d’Adams-Stokes est une perte de connaissance
brutale, sans prodrome, de durée courte avec restauration rapide et
complète de la conscience.
Une syncope précédée de prodromes est
souvent appelée perte de connaissance brève.
Seuls ces termes
médicaux devraient être utilisés pour décrire la sémiologie d’un
motif de recours.
La définition de la lipothymie et de la syncope est
uniquement clinique.
Les pathologies responsables de lipothymies ou de syncopes sont
de nature et de gravité très hétérogènes.
Certaines étiologies s’associent à un risque de mort subite, l’examen
révélant une pathologie menaçant le pronostic vital.
Ces patients nécessitent une hospitalisation et des investigations rapides.
La
plupart des étiologies, cependant, n’engagent pas le pronostic vital.
Les patients peuvent alors être pris en charge en ambulatoire et ne
justifient que d’un nombre limité d’investigations.
Si la banalité du « malaise » ne doit jamais conduire à en sousestimer
la gravité potentielle, il est par ailleurs illégitime de
multiplier systématiquement des investigations paracliniques
inutiles.
La prise en charge d’un « malaise » est donc un exercice
médical difficile et les pièges sont fréquents.
La démarche clinique
doit toujours être soigneuse, prêtant attention aux moindres détails.
Une prise en charge raisonnée repose sur une bonne connaissance
des mécanismes, des étiologies et des éléments prédictifs de gravité.
Physiopathologie, fréquence
et classification des syncopes
:
La syncope est de mécanisme univoque. Elle est secondaire à une
diminution transitoire du débit sanguin cérébral.
La baisse de la
pression artérielle en est responsable.
Une chute de la pression
artérielle peut être secondaire à une diminution du débit cardiaque
ou des résistances vasculaires périphériques.
Le maintien de la
perfusion cérébrale fait intervenir les mécanismes d’autorégulation
du débit sanguin cérébral et le contrôle de la pression artérielle par
les barorécepteurs et le maintien de la volémie.
De nombreuses
étiologies peuvent compromettre l’arc baroréflexe ou interfèrent avec
le système rénine-angiotensine-aldostérone.
La faillite ou la
diminution de l’efficacité des mécanismes complexes de régulation
neuroendocriniens et musculaires de la tension artérielle peut être
transitoire (drogues, médicaments) ou, dans certaines pathologies,
définitive.
Cette approche physiopathologique permet de définir un cadre
nosologique cohérent mais suppose une connaissance initiale des
mécanismes impliqués dont l’approche est difficile, en particulier pour les lipothymies.
La plupart des études publiées dans la
littérature, pour des raisons d’homogénéité de la population étudiée,
n’incluent que des patients présentant des syncopes et excluent les
lipothymies.
Certaines étiologies sont théoriquement exclues car elles ne
s’accompagnent pas d’une baisse du débit sanguin cérébral.
Il en est
ainsi des troubles métaboliques, des intoxications et de l’épilepsie.
À l’opposé, toute pathologie s’accompagnant d’une défaillance
hémodynamique brutale répond à la définition, même si la syncope
n’est pas le symptôme clinique principal comme dans l’infarctus du
myocarde ou l’embolie pulmonaire.
La prévalence des « malaises » est inconnue car ce symptôme
imprécis peut regrouper de multiples entités cliniques.
Par ailleurs,
le pourcentage de patients consultant après un « malaise » est
également inconnu.
Dans la cohorte de Framingham 3 % des
hommes et 3,5 % des femmes ont présenté au moins une syncope
pendant un suivi de 26 ans.
La prévalence est plus élevée chez les
femmes que chez les hommes et chez les patients âgés que chez les
sujets jeunes.
Dix pour cent des chutes de la personne âgée sont
liées à des syncopes et 20 % des personnes âgées chutent après
65 ans. Une syncope récidive dans 15 à 40 % des cas.
La majorité des auteurs proposent plusieurs catégories
diagnostiques.
La plupart des séries de référence
n’étudient que les syncopes.
Le pourcentage de chaque catégorie
varie selon les études, les populations étudiées et les critères
diagnostiques utilisés.
La lipothymie ou syncope vasovagale est le
diagnostic le plus fréquent (10 à 40 %).
Les causes cardiaques
représentent 5 à 25 % des étiologies selon les séries.
L’hypotension
orthostatique est fréquente et responsable de 4 à 10 % des syncopes
et lipothymies.
Les autres causes sont plus rares (10 à 20 % des
diagnostics) et sont dominées par les crises convulsives (selon les
auteurs, la plupart les excluant), les intoxications surtout éthyliques
et oxycarbonées et les causes psychiatriques.
Le diagnostic n’est pas
déterminé pour 15 à 40 % des patients.
Mortalité et morbidité
:
Il a été démontré dans les années 1980 que la mortalité à 1 an des
patients ayant présenté une syncope avec une pathologie
cardiovasculaire est plus élevée que celle des patients ayant présenté
une syncope non cardiaque, et plus élevée encore que celle des
patients n’ayant jamais fait de syncope.
On oppose ainsi les étiologies cardiovasculaires aux autres étiologies
ainsi qu’aux syncopes d’origine indéterminée.
Les
patients ayant présenté une syncope de cause cardiovasculaire ont
une mortalité globale à 1 an de 18 à 33 % et, à 5 ans, de 50 %.
L’incidence dans l’année d’une mort subite est de 24 %. Les patients
pour lesquels l’étiologie n’est pas cardiovasculaire ou ne peut pas
être identifiée ont une mortalité à 1 an de 0 à 12 % et, à 5 ans, de
30 %.
L’incidence dans l’année d’une mort subite est de 3 à 4 %. Sans
étiologie retrouvée, la mortalité à 1 an est de 5 %.
Plusieurs essais cliniques ont essayé de déterminer des facteurs
pronostiques des syncopes évalués à partir de l’interrogatoire, de
l’examen clinique et de l’électrocardiogramme (ECG).
Dans ces études, les facteurs pronostiques de mortalité sont l’âge, la
présence d’une pathologie cardiaque, l’absence de prodrome avant
la syncope et des anomalies ECG.
Dans une étude récente, un score
en fonction de ces différents éléments a été mis au point par une
équipe italienne.
Des critères permettent de déterminer des
groupes de patients à bon pronostic.
Il s’agit de sujets jeunes
(< 45 ans) sans cardiopathie et avec un ECG normal.
Les syncopes vasovagales et secondaires à une hypotension orthostatique sont
également de bon pronostic.
La survenue d’une syncope n’est pas un facteur prédictif
indépendant de mortalité.
La mortalité est liée à différents facteurs
dont l’âge.
Le pronostic et la mortalité sont surtout liés à
l’étiologie et la pathologie sous-jacente.
Les patients jeunes sans
cardiopathie et ayant un ECG normal n’ont pas d’augmentation de la mortalité par rapport à la population générale.
La mortalité à
1 an est élevée chez les patients présentant une altération de la
fonction ventriculaire gauche et une cardiomyopathie dilatée,
passant de 4 ou 12 % selon les études à 45 ou 56 % si survient une
syncope.
Une syncope associée à une altération de la fonction
ventriculaire, à des extrasystoles ventriculaires ou à une tachycardie
ventriculaire provoquée en électrophysiologie a également un
pronostic très sévère.
Dépister les causes cardiaques étant un objectif essentiel, l’estimation
du risque de troubles du rythme est un élément décisionnel
important.
Dans l’étude de Martin, réalisée aux urgences, ce risque
est stratifié par quatre variables qui prédisent la survenue d’un
trouble du rythme.
Il s’agit d’un ECG anormal, d’antécédent
d’arythmie ventriculaire, d’une insuffisance cardiaque congestive et
d’un âge supérieur à 45 ans.
La mortalité et la survenue d’un trouble
du rythme à 1 an ont une probabilité de 4 à 7 % sans facteur de
risque, mais de 58 à 80 % si trois facteurs de risque (ou plus) sont
présents.
Le risque traumatique est diversement estimé, de 17 à 35 %.
L’existence d’un traumatisme grave oriente vers une syncope de
type Adams-Stokes, sans prodrome.
Cependant, il n’existe pas
d’argument justifiant une enquête plus agressive s’il existe un
traumatisme. Un accident de voiture survient assez rarement,
dans 1 à 5 % des cas, plus fréquemment pour les syncopes.
Le retentissement psychologique doit être évalué car il peut être
comparable à celui observé au cours d’une bronchopathie chronique
obstructive, d’une lombalgie chronique ou d’une polyarthrite
chronique.
Jusqu’à 75 % des patients modifient leurs activités
quotidiennes, 64 % diminuent la conduite automobile et 39 %
changent de métier ; 73 % deviennent anxieux ou dépressifs, en
particulier si une étiologie n’est pas trouvée et en l’absence de
proposition thérapeutique.
L’impact économique est important avec un coût annuel estimé à
750 millions de dollars aux États-Unis, soit 5500 dollars par patient,
1 million de personnes étant évalué pour ce motif chaque année.
La fréquence et l’importance du risque vital des syncopes ont font
un réel problème de santé publique.
Étiologies des syncopes et lipothymies
:
A - ÉTIOLOGIES VASCULAIRES
:
1- Hypotension orthostatique
:
L’hypotension orthostatique est une cause fréquente de lipothymie
et de syncope.
Elle est évoquée à l’anamnèse en raison d’un
changement positionnel déclenchant ou de l’association de
traitements potentiellement hypotenseurs, particulièrement chez les
sujets âgés.
Le lever après un décubitus prolongé ou en
postprandial, le temps chaud sont des circonstances favorisantes.
L’hypotension orthostatique se définit par une chute tensionnelle
supérieure à 20 mmHg pour la systolique ou une pression artérielle
systolique inférieure à 90 mmHg.
Elle doit être recherchée
systématiquement et précocement par une prise de la tension
artérielle au repos puis après passage en orthostatisme toutes les
minutes pendant au moins 5 minutes et idéalement jusqu’à
10 minutes, la chute tensionnelle survenant le plus souvent après
2 minutes.
Le plus souvent, une tachycardie survient
simultanément et la chute tensionnelle est modérée.
Plus rarement,
l’absence de tachycardie témoigne d’un dysfonctionnement plus
sévère de l’arc baroréflexe associé à une chute tensionnelle profonde.
La recherche de l’hypotension orthostatique est rétrospective et doit
être interprétée avec prudence.
Le diagnostic de syncope
orthostatique est posé si la manoeuvre est positive avec reproduction
d’une lipothymie ou de la syncope.
Ces critères stricts manquent de
sensibilité. Si les critères de positivité sont plus larges, associant
chute tensionnelle ou survenue de symptômes, la spécificité est faible et le bilan étiologique doit être poursuivi car l’hypotension
orthostatique peut être symptomatique d’une autre étiologie (29 %
des étiologies cardiaques dans l’étude d’Atkins).
L’hypotension
orthostatique doit donc rester un diagnostic d’élimination en cas de
cardiopathie sous-jacente, sauf si la description des symptômes est
extrêmement typique.
Les mécanismes conduisant à la survenue d’une hypotension
orthostatique sont souvent multiples associant dysautonomie,
médicaments hypotenseurs et déplétion volémique.
Une hypovolémie vraie ou relative doit être recherchée,
l’hypotension orthostatique en étant habituellement le premier signe.
Une hémorragie non extériorisée doit être systématiquement
évoquée.
Une déplétion sodée est le plus souvent secondaire à des
pertes digestives ou rénales.
Plus rarement, on retrouve des
arguments en faveur d’une insuffisance surrénalienne ou
hypophysaire.
Une hypovolémie relative est observée en présence
de varices extensives des membres inférieurs.
L’alitement prolongé
peut entraîner une hypotension orthostatique, surtout chez les sujets
âgés ou diabétiques.
Une vasoplégie aiguë à médiation humorale,
syndrome carcinoïde ou une mastocytose systémique est
exceptionnelle.
Une chute tensionnelle sans tachycardie suggère une neuropathie
autonome. Une anomalie de l’arc baroréflexe peut être secondaire à
une neuropathie périphérique du système autonome (diabète,
amylose, éthylisme…).
La dysautonomie peut accompagner un
syndrome de Guillain-Barré ou une atteinte médullaire.
Exceptionnellement, on évoque une hypotension orthostatique
primitive, un syndrome de Bradbury-Eggleston ou de Shy-Drager
devant l’association d’un syndrome extrapyramidal et d’une ataxie
cérébelleuse.
La dysautonomie familiale (syndrome de Riley-Day),
autosomique et récessive est également exceptionnelle.
Les causes iatrogènes sont les plus fréquentes.
Les médicaments
responsables sont nombreux, vasodilatateurs (dérivés nitrés,
inhibiteurs de l’enzyme de conversion, hydralazine), alpha- ou
bêtabloquants, diurétiques, neuroleptiques et antidépresseurs.
Les
anti-inflammatoires non stéroïdiens peuvent diminuer les résistances
vasculaires et la réponse au stress orthostatique.
La
consommation d’alcool est également responsable d’une
vasodilatation, parfois associée à la prise de disulfirame (effet antabuse).
2- Syncope vasovagale ou réflexe
:
L’augmentation du tonus parasympathique, associée à une
diminution du tonus sympathique, est une réponse réflexe exagérée
et secondaire à la stimulation de récepteurs viscéraux (paroi des
ventricules, vessie, oesophage, bronches, sinus carotidien).
Il en
résulte une modification brutale des résistances vasculaires ou de la
fréquence cardiaque d’origine réflexe entraînant hypotension
artérielle et bradycardie.
Les lipothymies ou les syncopes vasovagales sont les plus fréquentes et peuvent représenter jusqu’à
50 %, voire 80 % des étiologies selon les séries.
Le tableau clinique est le plus souvent typique et le diagnostic est
posé à l’interrogatoire.
Les circonstances de survenue sont
évocatrices (confinement, douleur, émotion, station debout
prolongée, réplétion gastrique).
Les symptômes débutent par des
prodromes associant sensation vertigineuse, sueurs, nausées,
asthénie intense et pâleur.
Une perte de connaissance survient une
fois sur deux.
La récupération est souvent progressive avec
persistance d’une asthénie.
Il n’est pas rare que la lipothymie soit
récidivante ou persiste si la récupération est incomplète et que le
patient tente de se lever trop rapidement.
La syncope vasovagale est parfois de présentation atypique.
L’interrogatoire ne retrouve pas, en l’absence de témoin visuel, les
circonstances déclenchantes et les prodromes caractéristiques.
L’aspect peut alors évoquer une syncope de type Adams-Stokes.
L’âge jeune, des antécédents vagaux typiques, l’absence d’arguments
pour une cardiopathie conduisent à évoquer un mécanisme vagal.
L’origine vasovagale de la lipothymie ou de la syncope peut être
confirmée par un test d’inclinaison (inclinaison de 60 à 70° pendant 45 minutes, éventuellement sensibilisé par test
pharmacodynamique).
Il est positif quand il reproduit lipothymie
ou syncope conjointement à une chute tensionnelle et une
bradycardie importante pouvant conduire dans les cas extrêmes à
une pause cardiaque et des mouvements cloniques.
L’indication du
test d’inclinaison doit être large et prioritaire dans l’exploration des
syncopes inexpliquées chez le sujet jeune et en l’absence d’anomalie
cardiaque, clinique ou électrique.
Cependant, si la description des
symptômes est typique, il n’est pas indispensable.
Il existe des situations trompeuses où la syncope vagale est
symptomatique d’une autre affection (cardiopathie, embolie
pulmonaire…).
Le diagnostic de syncope vagale inaugurale après
45 ans, en particulier chez l’homme, ne peut être retenu qu’avec
prudence, en particulier s’il existe des facteurs de risque
cardiovasculaire.
Une échocardiographie permet d’éliminer une
cardiopathie et peut être réalisée secondairement en consultation.
3- Syncopes réflexes
:
Elles sont plus rares et sont une variété particulière de syncope neurocardiogénique mettant en jeu le système nerveux autonome.
L’hypersensibilité sinocarotidienne est suspectée à l’anamnèse par
la notion d’une compression extrinsèque du sinus carotidien
(mouvement d’extension de la tête, compression locale par le col de
chemise ou un rasoir…).
La tumeur du sinus carotidien est
exceptionnelle.
Le massage du sinus carotidien est classiquement
réalisé de façon systématique en particulier chez le patient âgé et si
la clinique est évocatrice.
Il est prudent d’exclure la manoeuvre chez
les patients présentant un souffle carotidien ou un antécédent
d’accident vasculaire cérébral.
Le massage digital appuyé d’un seul
sinus est réalisé pendant 5 secondes en décubitus, la tête en hyperextension et sous surveillance tensionnelle et
électrocardiographique. Un intervalle d’au moins 1 minute est
respecté avant le massage du sinus controlatéral.
Les autres syncopes réflexes sont diagnostiquées par l’interrogatoire
sur des circonstances bien précises et caractéristiques : syncope
survenant lors d’une quinte de toux (ictus laryngé), d’une
défécation, d’une déglutition, d’une miction ou d’une compression
des globes oculaires.
Les syncopes de la miction sont le plus souvent
nocturnes car favorisées par l’hypertonie vagale nocturne et
l’hypotension orthostatique.
Elles surviennent au cours de la
vidange rapide de la vessie qui entraîne un réflexe vagal associé à la
manoeuvre de Valsalva forcée.
On en rapproche la syncope de la
défécation.
Les syncopes instrumentales surviennent lors d’actes
médicaux avec stimulation vagale observée également lors de crises
douloureuses paroxystiques (colique néphrétique ou hépatique …).
L’hyperpression thoracique peut entraîner des syncopes (plongeurs,
haltérophiles, trompettistes).
B - CAUSES CARDIAQUES
:
1- Troubles du rythme ou de la conduction cardiaque
:
Ce sont les premières étiologies à évoquer en raison du risque de
décès.
Que la lipothymie ou la syncope soit secondaire à une cause
cardiaque est prédit par la présence d’une cardiopathie avec une
sensibilité de 95 % alors que l’absence de cardiopathie exclut une
cause cardiaque pour 97 % des patients.
Une
douleur angineuse syncopale évoque un angor de Prinzmetal ou un
infarctus myocardique.
L’ECG peut permettre de porter le diagnostic de trouble de
conduction ou du rythme.
Le plus souvent, il n’apporte pas de
certitude mais oriente le diagnostic.
La lipothymie ou la
syncope peuvent survenir lors du passage brutal du rythme sinusal
au rythme pathologique, lors de sa régularisation ou encore être une
conséquence directe hémodynamique de la fréquence cardiaque
pendant le trouble conductif ou rythmique.
La syncope peut être résolutive même si le trouble du rythme persiste.
Quinze pour
cent des tachycardies ventriculaires vues aux urgences ont présenté
une syncope.
Une tachycardie paroxystique supraventriculaire
peut également être responsable de lipothymie ou de syncope.
L’anamnèse retrouve souvent des palpitations.
Les troubles du
rythme supraventriculaires sont responsables de lipothymies ou de
syncopes dans 15 % des cas.
L’existence d’une préexcitation
ventriculaire ferait évoquer une tachycardie supraventriculaire dans
le cadre d’un syndrome de Wolff-Parkinson-White.
2- Autres étiologies cardiaques
:
Le rétrécissement aortique orificiel réalise classiquement une
syncope d’effort de mauvais pronostic dans ce contexte.
L’examen
clinique retrouve un souffle systolique caractéristique avec une
hypertrophie ventriculaire gauche à l’ECG.
L’échodoppler cardiaque
permet d’apprécier l’importance du rétrécissement et son
retentissement.
La cardiomyopathie hypertrophique peut également
entraîner une syncope d’effort. L’auscultation retrouve un souffle
systolique et l’ECG une onde Q d’hypertrophie septale.
Le
diagnostic sera confirmé par l’échodoppler cardiaque.
Une pathologie pulmonaire doit être évoquée devant l’existence
d’une cyanose et d’une dyspnée, même transitoire.
L’hypertension
artérielle pulmonaire primitive, la sténose valvulaire pulmonaire
sont exceptionnelles.
Une lipothymie ou une syncope peuvent
révéler une embolie pulmonaire, une tamponnade, un vol
sous-clavier.
La découverte dans le contexte d’une syncope d’un myxome de
l’oreillette ou d’une thrombose de valve est exceptionnelle.
Chez un porteur de valve mécanique, une thrombose de valve doit
être systématiquement recherchée.
Des antécédents de mort subite familiale évoquent un syndrome du QT long, un syndrome de Brugada, une dysplasie ventriculaire
droite, des tachycardies ventriculaires catécholergiques ou une
cardiomyopathie hypertrophique.
Une échocardiographie est le premier examen réalisé, l’existence
d’une cardiopathie étant un élément prédictif important de
mortalité.
Il est révélateur d’anomalies de la fonction cardiaque dans
5 à 10 % des cas.
Un monitorage ambulatoire Holter ne donne aucun renseignement
chez 79 % des patients, permet le diagnostic de syncope par
arythmie chez 4 % des patients et permet de l’exclure chez 17 % des
patients qui récidivent une syncope sans troubles du rythme.
Les études électrophysiologiques ne permettent de mettre en
évidence un trouble du rythme ventriculaire que pour 1 % des
patients alors que ce pourcentage est de 3 % s’il existe un trouble de
conduction à l’ECG et de 21 % s’il existe une cardiopathie.
La mise
en évidence d’une bradycardie manque de sensibilité et de
spécificité.
Le caractère inopiné des syncopes avec des rémissions souvent
longues rend compte des difficultés diagnostiques, la corrélation
entre la symptomatologie et l’enregistrement ECG étant
exceptionnelle.
Le R-Test est un holter de 8 jours qui permet une durée de
surveillance un peu plus longue que le holter classique.
Le moniteur électrocardiographique implantable permet un
enregistrement continu en boucle pendant 14 à 18 mois et le recueil
de l’ECG au moment des symptômes en gelant l’enregistrement.
Un nouvel
épisode est enregistré dans 47 à 68 % des cas.
Un trouble
du rythme est diagnostiqué dans 26 à 60 % des cas selon les
séries dont le recrutement est inhomogène.
C - CAUSES MÉTABOLIQUES ET TOXIQUES
:
Deux étiologies méritent une attention particulière.
L’intoxication éthylique aiguë est une cause assez fréquente de
« malaise » aux divers stades de l’intoxication.
La symptomatologie
peut être trompeuse. Le dosage de l’alcoolémie est nécessaire au
moindre doute.
Il s’agit cependant d’un diagnostic ne pouvant être
retenu qu’en l’absence d’autres anomalies cliniques ou électrocardiographiques.
L’intoxication oxycarbonée doit être recherchée par l’anamnèse à
titre systématique.
Une source potentielle de monoxyde de carbone,
un « malaise » collectif nécessitent la détermination de la carboxyhémoglobinémie.
Définie par un début brutal et une récupération complète, une
lipothymie ou une syncope est rarement de cause toxique ou
métabolique.
Un bilan biologique non orienté et systématique n’a
pas d’intérêt.
S’il peut survenir lors d’intoxication médicamenteuse
volontaire ou accidentelle, le trouble de vigilance n’est alors ni isolé
ni surtout rapidement régressif et le diagnostic est porté devant les
signes associés.
La recherche de toxiques, la détermination de
l’ionogramme ou d’un hémogramme reste bien sûr indispensable
dans certaines circonstances déterminées par le terrain, les
antécédents, les traitements ou l’observation d’anomalies cliniques
(pli cutané, oedème, pâleur…).
D - CAUSES PSYCHIATRIQUES
:
L’existence d’une pathologie psychiatrique est fréquente chez les
patients présentant des syncopes récurrentes.
Deux aspects doivent
être évalués.
La survenue très fréquente de lipothymies ou de syncopes est
invalidante.
Le retentissement psychologique, quelle que soit
l’étiologie, peut être important.
Des pathologies psychiatriques peuvent être à l’origine de
« malaise ».
Les diagnostics les plus fréquents sont les syndromes
dépressifs majeurs, les attaques de panique (anxiété généralisée et
somatisation).
Les patients présentant des malaises d’origine
psychiatrique sont volontiers jeunes, de sexe féminin.
Les
« malaises » sont souvent récidivants et associés à un cortège
fonctionnel riche, pouvant être reproduit par une manoeuvre
d’hyperventilation.
La lipothymie ou la syncope sont rares en
dehors d’une grande hyperventilation.
L’origine psychiatrique, évaluée systématiquement au terme d’une
enquête étiologique complète et négative, est confirmée une fois sur
dix.
Diagnostic différentiel
:
A - DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE DEVANT LIPOTHYMIES
ET SYNCOPES :
Le terme de malaise, très souvent utilisé par les patients ou leur
entourage, doit être analysé soigneusement.
Il est indispensable
d’analyser et de préciser ce cadre nosologique dans lequel va être
mené une démarche médicale diagnostique et pronostique.
Trois
caractéristiques définissent cliniquement la lipothymie et la
syncope :
– c’est un épisode aigu et régressif, le retour à l’état antérieur est
spontané, rapide ou progressif.
Une symptomatologie secondaire est
fréquente, parfois prolongée ;
– il est caractérisé par un trouble de la conscience ou de la vigilance.
En l’absence de perte de connaissance, on parle de lipothymie.
S’il
existe une perte de connaissance, on parle de syncope.
Les
lipothymies et les syncopes sont sur le plan pratique parfois difficiles
à distinguer avec certitude, la perte de connaissance pouvant être
difficile à préciser ;
– il est associé à une hypotonie qui est parfois responsable de chute
et d’un traumatisme, en particulier crânien.
Au terme de l’interrogatoire du patient et de l’entourage, le terme
de malaise ne sera utilisé que pour décrire le motif de recours du
patient.
Plusieurs situations doivent être différenciées des
lipothymies et syncopes.
B - LE « MALAISE » N’EST PAS UN TROUBLE DE VIGILANCE
:
Lipothymies et syncopes ainsi définies éliminent les états
pathologiques d’apparition progressive ou ceux qui ne sont pas
caractérisés par un trouble de vigilance.
Il est le plus souvent facile
de distinguer d’une lipothymie un vertige, une asthénie, un
syndrome infectieux ou une crise d’angoisse.
L’hypotonie associée
au trouble de vigilance diffère d’une hypotonie associée à une drop-attack.
C - LES SYMPTÔMES NE SONT PAS RÉGRESSIFS
:
Un trouble persistant de la conscience et de la vigilance doit faire
poser le diagnostic de coma.
La persistance d’une hypotonie révèle
un syndrome déficitaire.
Une lipothymie ou une syncope n’est pas
secondaire à un accident neurovasculaire qui sera objectivé sur le
plan clinique par l’existence transitoire ou la persistance d’un
syndrome déficitaire et fera discuter une tomodensitométrie
cérébrale ou un doppler des vaisseaux cervicaux.
Compte tenu des
définitions retenues, un déficit neurologique doit faire exclure
l’accident neurovasculaire du cadre nosologique des lipothymies et
syncopes.
L’hypoglycémie est rarement responsable d’un trouble de vigilance
isolé et régressif.
L’absence de fiabilité de la glycémie capillaire en
situation d’hypoglycémie impose, pour affirmer le diagnostic, une
glycémie veineuse chez tout patient diabétique ou tout sujet prenant
des médicaments potentiellement hypoglycémiants.
Les troubles de l’ionogramme sanguin ne donnent
qu’exceptionnellement une lipothymie ou une syncope.
Leur
réalisation systématique a une rentabilité très faible et n’est pas
justifiée.
D - IL EXISTE UN TROUBLE DE VIGILANCE RÉGRESSIF
MAIS CONTINGENT D’UN AUTRE SYMPTÔME
ESSENTIEL
:
L’existence d’une douleur abdominale ou thoracique, d’une
céphalée, d’une dyspnée, doit guider la démarche diagnostique.
La survenue d’une défaillance hémodynamique brutale et réversible
peut entraîner un trouble de vigilance régressif qui répond au
mécanisme physiopathologique des syncopes. Cependant, centrer la
stratégie diagnostique sur la syncope et non sur l’origine du
collapsus peut conduire à une erreur ou un retard important dans la
prise en charge.
L’interrogatoire doit rechercher l’association au trouble de vigilance
d’un signe fonctionnel pouvant faire évoquer une situation
menaçant le pronostic vital qu’il s’agisse d’une dissection aortique,
d’un infarctus du myocarde, d’une embolie pulmonaire, d’une
hémorragie sous-arachnoïdienne, etc…
Ces pathologies ne seront
pas décrites dans ce chapitre.
Exceptionnellement, l’association à des
oedèmes peut évoquer un syndrome d’hyperperméabilité capillaire
idiopathique (Clarkson).
La persistance de signes d’hypoperfusion
tissulaire (marbrures des membres inférieurs, polypnée,
obnubilation, oligurie) conduit à la prise en charge d’un état de choc,
même en l’absence d’un collapsus franc.
La lipothymie ou la syncope n’est alors qu’un signe associé et
souvent un critère de gravité.
E - CRISES CONVULSIVES
:
Les crises convulsives ne sont pas liées à une baisse du débit
sanguin cérébral et sont donc exclues théoriquement du champ des
syncopes.
Elles sont habituellement facilement identifiées.
Le diagnostic d’une
crise convulsive généralisée peut être évident si des témoins
oculaires permettent d’affirmer la succession de phases tonique et
clonique suivies d’un stertor et d’un syndrome confusionnel
postcritique.
En l’absence de témoins visuels, le diagnostic peut être plus difficile
à redresser, en particulier si la crise est inaugurale.
Certaines
données cliniques permettent d’orienter le diagnostic.
L’insomnie,
un sevrage éthylique ou médicamenteux (antiépileptique,
benzodiazépine), une stimulation lumineuse intermittente sont des
situations favorisantes.
Certains éléments cliniques n’ont pas de
valeur d’orientation.
L’émission d’urines n’est aucunement
spécifique de la crise convulsive et peut ne témoigner que de
l’importance d’un bas débit cérébral.
Il en est de même de l’existence
d’antécédents de convulsions fébriles dans l’enfance, de prodrome à
type de paresthésies, d’une chute traumatique, de céphalées
apparues après la syncope.
Toute diminution du débit sanguin
cérébral peut entraîner des mouvements cloniques ou toniques et
ressembler à des convulsions.
Une morsure de langue est très
évocatrice mais n’est pas pathognomonique, sa valeur augmentant
s’il s’agit d’une morsure latérale et profonde.
La probabilité d’une
crise convulsive est élevée également si le patient présente des
douleurs musculaires et si l’on retrouve la notion d’une confusion
postcritique.
L’électroencéphalogramme (EEG) réalisé à titre diagnostique et sans
orientation clinique n’a aucune rentabilité en raison d’une faible
sensibilité et spécificité.
Jusqu’à 50 % des crises convulsives ont un
EEG négatif.
À l’opposé, les sujets âgés asymptomatiques ont une
anomalie dans 40 % des cas.
Une acidose lactique transitoire
est évocatrice.
Le diagnostic peut être très difficile si la crise est atypique.
Les crises akinétiques, rares chez l’adulte, apparaissent comme une syncope
brutale parfois sans syndrome postcritique.
Les crises comitiales
partielles sont de diagnostic difficile.
La symptomatologie peut être
riche, polymorphe et trompeuse.
C’est essentiellement le caractère
stéréotypé du déroulement d’un « malaise » récidivant qui fait
évoquer le diagnostic.
Examen clinique
:
L’interrogatoire, les données cliniques et paracliniques simples
permettent une orientation diagnostique pour environ 50 % des
patients.
Dans l’étude de Kapoor, chez 433 patients, le diagnostic est porté par la clinique une fois sur trois et suggère un
examen paraclinique contributif au diagnostic pour 5 % des patients.
L’examen initial est plus rentable que les investigations ultérieures.
Il a pour objectifs principaux de préciser le motif de recours,
d’argumenter l’absence ou la présence d’une cardiopathie et de
décrire au mieux l’épisode afin d’approcher le diagnostic.
Au terme de l’interrogatoire et de l’examen clinique, un diagnostic
ou une orientation diagnostique peut être posé dans 50 à 70 % des
cas.
Ce diagnostic guide les investigations paracliniques
complémentaires.
La description de l’épisode doit être la plus soigneuse possible.
L’interrogatoire est capital.
Il est réalisé auprès du patient mais
également de l’entourage et de tout témoin visuel, au besoin par
téléphone.
Les données importantes sont les suivantes.
– Les antécédents et les facteurs de comorbidité, en particulier
cardiaques, l’existence d’une pathologie récente : les antécédents
familiaux de mort subite sont recherchés.
L’existence de « malaises »
antérieurs est extrêmement fréquente et ne doit pas modifier la
démarche diagnostique.
La prévalence des pathologies iatrogènes
justifie de relever tout traitement en cours ou récemment arrêté ainsi
que toute modification récente de posologie.
– Un facteur déclenchant et les circonstances de survenue : un
changement positionnel évoque une hypotension orthostatique.
La
survenue en postprandial, après un effort, une station debout
prolongée, une émotion, une douleur, un confinement, évoquent un
mécanisme vagal.
Pendant un effort, une cause cardiaque doit être
suspectée même chez le sujet jeune.
La survenue au moment d’une
quinte de toux, d’un effort de miction, d’une compression cervicale
évoque une cause réflexe.
Il convient de s’assurer de l’absence d’une
source potentielle de monoxyde de carbone.
– Les prodromes : les plus fréquents sont des palpitations, des
sueurs, un état vertigineux, des troubles visuels et auditifs, vagaux
le plus souvent. Une aura évoque une crise convulsive.
La survenue
de palpitations initiales a peu de valeur mais suggère de rechercher
un trouble du rythme.
Lorsque l’étiologie est cardiaque, la durée
des prodromes est plus brève que lorsqu’elle est vagale.
Ce critère
n’est cependant pas discriminant et son utilisation aboutirait à une
mauvaise orientation diagnostique chez 29 % des patients.
Les
caractéristiques de la perte de connaissance, précisées par un
interrogatoire prolongé et patient, peuvent orienter le diagnostic.
Il
n’existe cependant aucune relation entre l’existence d’une perte de
connaissance et la sévérité de la pathologie sous-jacente.
– Une symptomatologie clinique même fugace peut être rapportée
par le patient ou par l’entourage en cas d’amnésie postcritique.
Tout
symptôme associé est capital pour orienter le diagnostic, qu’il
survienne avant, pendant ou après la syncope ou la lipothymie.
La
nature de ces symptômes est très variable (dyspnée, douleurs,
céphalées, mouvements anormaux…).
– L’interrogatoire précise également la rapidité de la récupération
après la lipothymie ou la perte de connaissance, sa qualité,
l’existence d’un trouble confusionnel postcritique ou d’un syndrome
déficitaire transitoire. Une récupération lente évoque un mécanisme
vagal ou une cause toxique.
L’examen clinique doit être complet et systématique.
L’examen
cardiovasculaire et neurologique doit être soigneux avec prise de la
tension artérielle aux deux bras, palpation des pouls distaux,
auscultation cardiaque et vasculaire.
La recherche d’une hypotension
orthostatique, d’arguments pour une hypovolémie doit être
systématique, comprenant le cas échéant un toucher rectal pour
rechercher une hémorragie digestive.
Le massage du sinus carotidien
n’est pas standardisé et n’est à réaliser que si l’histoire évoque ce
mécanisme (rasage ou rotation de la tête).
Il ne se complique
qu’exceptionnellement de déficit neurologique, dans 0,28 % de
cas.
L’existence d’une lésion traumatique impose de préciser
qu’il s’agit bien d’une conséquence et non de la cause de la perte de
connaissance.
Examens paracliniques
:
L’ECG est le seul examen paraclinique obligatoire.
Il doit être réalisé
précocement et interprété immédiatement car il peut mettre en
évidence une anomalie grave justifiant d’une hospitalisation
immédiate, ce qui ne survient que dans 5 % des cas.
Normal, il n’exclut rien.
La plupart des anomalies sont non
significatives et n’expliquent pas la syncope mais orientent parfois
vers des examens cardiologiques de première intention devant une
syncope inexpliquée.
Aucun autre examen ne doit être réalisé systématiquement.
Une
numération formule sanguine n’a aucun intérêt en l’absence de signe
clinique d’orientation.
Il en est de même pour l’ionogramme
sanguin.
La réalisation d’un scanner cérébral systématique n’a
aucune rentabilité diagnostique, pas plus qu’un EEG.
Prise en charge selon l’orientation
diagnostique initiale
:
A - HOSPITALISATION
:
Elle peut être nécessaire en dehors de toute considération
étiologique.
La gravité et la nature du traumatisme secondaire peuvent nécessiter
une hospitalisation, impotence et perte d’autonomie rendant
impossible le retour au domicile en l’absence de soutien familial.
Une évaluation est indispensable en particulier chez le patient âgé.
Une hospitalisation peut être nécessaire en raison de pathologies
associées sévères, indépendamment d’un lien de causalité avec la
syncope.
Enfin, rarement, l’existence de syncopes multiples récentes,
invalidantes et non encore explorées peut justifier une admission en
raison du retentissement personnel et social, même en l’absence
d’orientation diagnostique.
B - CARDIOPATHIE
:
L’interrogatoire, l’examen clinique et l’ECG orientent d’emblée vers
une cardiopathie.
Si une cardiopathie peut être à l’origine de la syncope ou de la
lipothymie, qu’il s’agisse d’une certitude ou d’une présomption,
l’hospitalisation immédiate s’impose pour surveiller le patient,
poursuivre les investigations et envisager un traitement.
Après examen, une cause cardiaque peut être retenue sur des
arguments anamnestiques ou cliniques.
La survenue à l’effort ou en décubitus, la prise de médicaments antiarythmiques, l’association d’une douleur thoracique, d’une
palpitation ou d’une dyspnée font évoquer une pathologie cardiaque
de principe.
L’existence d’une cardiopathie connue ou suspectée cliniquement,
des antécédents familiaux de mort subite évoquent un trouble du
rythme en première intention.
L’ECG peut permettre d’affirmer ou d’orienter d’emblée le
diagnostic vers un trouble du rythme ou de la conduction.
C - ÉTIOLOGIE NON CARDIAQUE
:
Une hypotension orthostatique symptomatique impose le plus
souvent une hospitalisation pour en traiter la cause.
Aux urgences,
l’admission en hospitalisation de courte durée est possible si la prise
en charge est envisageable en 24 heures.
Une syncope vagale typique ne justifie pas a priori l’hospitalisation
et ne nécessite pas d’examen complémentaire.
Cette attitude n’est
licite que sous certaines conditions. Il doit s’agir de sujets jeunes
sans antécédent.
La symptomatologie doit être typique ou très
évocatrice, l’examen clinique et l’ECG doivent être strictement
normaux.
La prise en charge d’une intoxication ou d’une hypoglycémie n’est
pas modifiée par la survenue d’un « malaise ».
Les pathologies psychiatriques nécessitent un avis spécialisé et
justifient le plus souvent d’une prise en charge ambulatoire.
D - SYNCOPE INEXPLIQUÉE
:
La syncope est inexpliquée au terme de l’examen initial.
La prise en charge repose sur l’estimation du risque de cardiopathie
et de troubles du rythme ou de la conduction.
Le terrain est essentiel
à prendre en compte afin d’estimer les facteurs de risque.
Les patients âgés de plus de 45 ans, ceux présentant des facteurs de
risques cardiovasculaires ou une anomalie de l’ECG même peu
prédictive d’un trouble du rythme (bloc de branche [BB] gauche
isolé) relèvent d’investigations cardiologiques qui doivent être
programmées (échocardiographie de première intention).
Si ces
investigations sont normales, un test d’inclinaison peut être réalisé
en deuxième intention.
À l’opposé, si une cardiopathie est
découverte, les investigations doivent être poursuivies (études électrophysiologiques ou moniteur électrocardiographique
implantable).
Les patients jeunes sans cardiopathie et avec ECG
normal peuvent bénéficier d’un test d’inclinaison.
Il n’est
nécessaire que dans certaines circonstances : syncopes
récidivantes, sévérité de symptômes (chute et accident), métier
ou loisir à risque.
Si le test
d’inclinaison est négatif, il peut être utile de compléter le
bilan par un bilan psychiatrique.
La
rentabilité de ces explorations est souvent insuffisante.
Elle est
nettement améliorée par une attitude rationnelle guidant le
choix et la chronologie des investigations complémentaires et
reposant sur une collaboration et un consensus
multidisciplinaire.
Conclusion
:
L’imprécision du terme « malaise » rend nécessaire de préciser le motif
de recours et les symptômes qu’il sous-tend.
Seuls les termes de
lipothymie et de syncope sont utilisables et médicalement définis,
limitant les « malaises » aux seuls troubles de vigilance de survenue
brutale et rapidement régressifs.
La démarche initiale repose sur l’interrogatoire, l’examen clinique et
l’ECG.
Elle a pour objectif d’identifier les patients présentant un risque
vital en raison d’une cardiopathie.
En dehors de l’ECG, tout examen paraclinique systématique et non orienté n’a pas de rentabilité
diagnostique.
Un diagnostic est souvent affirmé ou suspecté au terme de
l’interrogatoire et de l’examen clinique.
Il s’agit le plus souvent d’une
manifestation vagale, d’une hypotension orthostatique, parfois d’un
trouble du rythme ou de la conduction.
Des examens complémentaires
orientés sont nécessaires en fonction des étiologies pour confirmer ou
infirmer le diagnostic.
Des explorations cardiologiques ou un test d’inclinaison peuvent être
proposés secondairement devant une lipothymie ou une syncope
inexpliquée.
Le choix de ces examens complémentaires prend en compte
l’âge, le terrain et les arguments en faveur d’une cardiopathie.
En
l’absence d’orientation diagnostique au terme du bilan, une cause
psychiatrique doit être recherchée systématiquement.
Aux urgences, une procédure locale de prise en charge doit guider
l’orientation et les explorations et faire l’objet d’un consensus entre
urgentistes, cardiologues et neurologues.
Seule une attitude rationnelle
permet de limiter les investigations inutiles et d’augmenter la
rentabilité diagnostique des examens pratiqués.