Le lithium est disponible en France sous 2 formes : le
carbonate de lithium en comprimés à libération immédiate
à 250 mg et en comprimés à libération prolongée à
400 mg (Téralithe 250 = 6,8 mEq et LP 400 = 10 mEq)
et le gluconate de lithium en ampoules buvables à 5 ou
10 mL (1 mL = 1 mEq) (Neurolithium).
A - Mode d’action
:
Le lithium semble agir à différents niveaux sur l’activité
du système nerveux central, mais à ce jour aucun mode
d’action spécifique n’a été objectivé.
Il traverse les membranes cellulaires par diffusion passive
ou en empruntant les mécanismes de transports cellulaires
actifs des ions sodium, potassium et calcium sur
lesquels il va agir, entraînant dès lors des modifications
de l’équilibre hydroélectrolytique et membranaire.
Son
action porte sur certaines activités enzymatiques intracellulaires
ainsi que sur les seconds messagers (inhibition
des systèmes inositol-phosphate et adénylate-cyclase).
Il agit enfin sur les neuromédiateurs, soit par action sur
le transport des précurseurs des médiateurs (diminution
du passage de la choline, élévation du taux intracérébral
du tryptophane), soit par interaction directe avec le
système des neuromédiateurs tels que la sérotonine
(effet potentialisateur sur la fonction sérotoninergique),
la noradrénaline (diminution du turn over), l’acide
gamma-amino-butyrique (GABA) dont il facilite
l’activité, l’acétylcholine (effet stabilisateur).
B - Pharmacocinétique
:
Le lithium possède le double avantage de ne pas être
métabolisé et d’être facilement dosable.
Après administration orale, la résorption par le tube
digestif est rapide et proche de 100 %.
Le pic plasmatique est obtenu en 1 à 3 h pour la forme
classique et en 4 h pour la forme retard, qui permet ainsi
d’éviter les pics plasmatiques itératifs après chaque
prise (Cmax diminuée d’un facteur 2).
Le lithium ne se lie pas aux protéines plasmatiques, ce
qui facilite sa diffusion dans les différents secteurs intraet
extracellulaires, au travers du maintien d’un équilibre
dynamique (la pénétration cellulaire entraîne une sortie
de sodium et de potassium).
Le rapport taux de lithium
extracellulaire/intracellulaire (r = 2) s’explique par
l’extrusion active du lithium de la cellule avec inhibition
partielle de la pompe à sodium par le lithium. La diffusion
tissulaire est variable selon les organes (elle est plus
élevée pour le rein et le coeur).
Le lithium franchit mal la
barrière hémato-encéphalique, la pénétration dans le
système nerveux central est lente (concentration maximale
atteinte en 24 à 48 h), et moins importante que
dans les autres organes.
En revanche, le lithium pénètre
plus facilement la barrière placentaire et se retrouve
dans le lait maternel.
L’élimination du lithium est essentiellement rénale (90 %).
Sa réabsorption est importante (80 %) et s’effectue à
plusieurs niveaux.
• Au niveau du tubule proximal et dans une moindre
mesure au niveau de l’anse de Henle, la réabsorption est
passive et s’effectue avec celle du sodium.
Toute perte
sodique, notamment un régime hyposodé, s’accompagne
d’une augmentation de la lithémie par retenue
compensatrice de sodium et donc du lithium.
La clairance
du lithium (10 à 40 mL/min) dépend ainsi de l’apport
sodé (diminution de la clairance en cas de régime hyposodé)
; elle varie aussi selon les individus et diminue en
fonction de l’âge.
Les diurétiques ayant une action
proximale entraînent une diminution de la concentration
plasmatique du lithium car l’augmentation de l’élimination
de sodium d’origine proximale qu’ils provoquent
s’accompagne d’une perte de lithium sans réabsorption
distale (celle-ci ne concerne que le sodium car la membrane
distale est imperméable au lithium).
• Au niveau du tubule distal, la réabsorption est active.
L’ADH (antidiuretic hormone) et l’aldostérone facilitent
la réabsorption du lithium et de l’eau.
Les diurétiques antialdostéroniques diminuent donc la concentration plasmatique du lithium alors que la déplétion sodique
provoquée par les diurétiques d’action distale (thiazidiques)
entraîne une réabsorption réflexe du sodium
mais aussi du lithium au niveau du tubule proximal (car
la membrane proximale est perméable au sodium et au
lithium).
Le lithium est hémodialysable.
Sa demi-vie moyenne est
d’environ 24 h, l’équilibre plasmatique est atteint en 5 à
8 jours selon les individus.
Indications du traitement
:
A - Indications officielles
:
1- Troubles bipolaires : indication principale
de la lithiothérapie
• Traitement curatif de l’état maniaque : le traitement
curatif de l’état maniaque peut faire appel aux neuroleptiques
et (ou) aux thymorégulateurs (lithium, carbamazépine).
La prescription du lithium en monothérapie
dans cette indication est réservée à certains épisodes
maniaques d’intensité faible ou moyenne.
L’effet antimaniaque du lithium est largement démontré
bien que le taux d’efficacité soit variable selon les
auteurs (entre 60 et 95 %), dépendant en grande partie
du caractère typique ou non de l’épisode. Dans cette
indication, il est préférable d’obtenir une lithémie élevée
(entre 0,8 et 1 mEq/L).
Compte tenu du délai d’action
du produit (1 à 3 semaines), l’association à un traitement
par neuroleptique sédatif et (ou) incisif en début de traitement
est souvent indispensable notamment dans les
formes de manies agitées ou délirantes.
• Traitement prophylactique des troubles bipolaires :
dans cette indication, le lithium est le traitement de référence.
Le lithium est un régulateur de l’humeur, il permet au
mieux de prévenir les récidives, sinon de réduire la fréquence
et (ou) la sévérité (intensité et durée) des accès
maniaques et dépressifs.
Il agit donc sur les oscillations
de l’humeur, qui tendent à s’aggraver au fur et à mesure
des épisodes par un phénomène « d’emballement » ou kindling : après chaque épisode maniaque ou dépressif,
un patient bipolaire augmente sa probabilité de faire un
autre accès si on ne le traite pas par un thymorégulateur.
Cet élément incite à mettre en route précocement un
traitement prophylactique par le lithium, qui a en outre
pour effet de réduire le risque suicidaire.
En pratique, l’indication d’un traitement thymorégulateur
doit être posée devant un premier épisode
maniaque franc (trouble bipolaire de type I), même en
l’absence d’antécédents dépressifs. Dans les troubles
bipolaires de type II
– épisode(s) hypomaniaque(s) associé(
s) à un ou plusieurs épisodes dépressifs
– l’indication
doit être discutée en fonction des antécédents personnels
et des antécédents familiaux de troubles
bipolaires.
L’efficacité du traitement prophylactique est évaluée
après un délai minimal de 2 ans de traitement régulier,
sachant que, dans un tiers des cas environ, le traitement
n’est pas totalement efficace, notamment en raison de la
mauvaise observance.
Au terme de ce délai, la survenue
de récidives ne permet pas de conclure à l’échec de la lithiothérapie, dont l’efficacité peut se traduire par une
simple réduction de la fréquence, de l’intensité et (ou)
de la durée des épisodes.
2- Traitement prophylactique des troubles
unipolaires :
Le traitement prophylactique des troubles unipolaires
peut faire appel, soit aux antidépresseurs au long cours,
soit à la lithiothérapie.
L’utilisation du lithium dans cette indication, bien
qu’officiellement admise, est actuellement discutée,
d’une part du fait de la moindre efficacité du lithium sur
la prévention des rechutes dépressives en comparaison
des épisodes maniaques, d’autre part du fait de la
difficulté à reconnaître le caractère « endogène » d’un
trouble dépressif récurrent.
En pratique, on peut proposer
la mise en route du lithium chez un patient unipolaire
après au moins 3 épisodes dépressifs francs présentant
des caractéristiques endogènes (caractère mélancolique,
antécédents familiaux de maladie maniaco-dépressive,
absence de facteurs déclenchants…).
3- Traitement prophylactique des troubles schizo-affectifs
:
Relativement récente, cette indication trouve sa justification
dans le caractère récurrent des épisodes
maniaques et (ou) dépressifs qui peuvent survenir dans
ce sous-type de schizophrénie.
Le lithium n’a donc
aucune propriété antipsychotique dans cette indication ;
il n’agit que sur le caractère dysthymique de la maladie,
ce qui nécessite une coprescription par un neuroleptique
au long cours.
B - Autres indications du traitement
par lithium :
1- Dépression résistante
:
De nombreuses études confirment l’intérêt du lithium
dans les dépressions résistantes.
L’adjonction de lithium
à un traitement antidépresseur bien conduit, mais pas ou
peu efficace, peut en effet permettre une potentialisation
de l’effet thérapeutique de celui-ci (délai d’action de
48 h à 2 semaines).
Les autres indications du lithium sont plus anecdotiques.
2- En psychiatrie
:
Il est prescrit en cas :
– d’alcoolisme chronique dans sa forme dipsomaniaque ;
– de troubles du comportement (impulsivité, agressivité) ;
– de syndrome de Kleine-Levin.
3- En médecine
:
On l’emploie lors :
– de leucopénies : le lithium entraîne une hyperleucocytose
et plus particulièrement une augmentation des
neutrophiles ;
– de syndrome de Schwartz-Bartter (SIADH) ;
– de certains syndromes algiques : herpès, algie vasculaire
de la face ;
– d’hyperthyroïdie : thyréotoxicose, certains cancers
thyroïdiens.
Contre-indications du traitement
:
• Toute pathologie pouvant entraîner des désordres hydroélectrolytiques sévères, une altération de la fonction
rénale ou nécessitant un régime désodé contreindique
la mise en route d’un traitement par lithium.
C’est le cas de l’insuffisance rénale, qui dans sa forme
sévère est une contre-indication absolue et définitive.
Certaines pathologies cardiovasculaires telles que l’hypertension
artérielle (HTA), l’insuffisance cardiaque ou
l’infarctus du myocarde récent peuvent aussi contreindiquer
l’utilisation du lithium pour les mêmes raisons,
auxquelles il faut ajouter les effets latéraux du lithium
sur l’activité myocardique.
En pratique, la majorité des contre-indications restent
relatives, dépendant de la gravité de la pathologie sousjacente
et des possibilités de surveillance stricte du traitement
par lithium.
• Cas particulier de la grossesse : actuellement le premier
trimestre de grossesse n’est plus une contre-indication
absolue du traitement par lithium, le risque de malformation
du coeur et des gros vaisseaux apparaissant
moindre que ce qu’avaient pu indiquer les premières
études.
La prudence impose toutefois de réaliser une
couverture contraceptive avant la mise en route d’un
traitement par lithium et de limiter au maximum sa prescription
lors du premier trimestre en cas de grossesse.
Lorsque le maintien du traitement est indispensable
durant l’embryogenèse, il convient d’en informer les
patientes désireuses de grossesse en prévoyant une surveillance
échographique (entre la 16e et 18e semaine).
Durant une grossesse sous lithium, il est conseillé de
maintenir une lithémie basse (contrôles lithémiques fréquents)
avec fractionnement des prises afin de limiter
les pics lithémiques (sauf en cas d’utilisation de la
forme à libération prolongée).
Dans la semaine qui précède l’accouchement et dans la
mesure du possible, il convient de diminuer par 2 la
posologie, voire d’arrêter transitoirement le traitement
par lithium.
Cela vise d’une part, à limiter l’imprégnation
du nouveau-né chez lequel il est licite de réaliser un dosage
plasmatique du lithium associé à une surveillance de la
fonction cardiaque, d’autre part, à s’adapter à la chute de
la clairance rénale chez la mère après l’accouchement.
Le lithium passe dans le lait maternel dans une proportion
de 30 à 50 %.
L’allaitement du nouveau-né au sein
est donc contre-indiqué.
Interactions et contre-indications
médicamenteuses
:
Les interactions doivent être connues des prescripteurs
du fait du risque vital qu’elles peuvent entraîner.
Aucune
association médicamenteuse n’est une contre-indication
absolue : certaines associations sont néanmoins déconseillées
et nécessitent une surveillance clinique et biologique
stricte si la coprescription s’avère indispensable.
A - Diurétiques
:
Seuls les diurétiques d’action distale, comme les thiazidiques,
induisent une natriurèse qui conduit à une augmentation
compensatrice de la réabsorption du sodium
et du lithium au niveau du tubule proximal, et donc un
risque d’hyperlithémie.
Les diurétiques d’action proximale
induisent aussi une natriurèse potentielle, mais du
fait que le segment distal du tubule est perméable au
sodium et non au lithium, cela entraîne une diminution
de la concentration plasmatique du lithium.
B - Inhibiteurs de l’enzyme de conversion
:
Bien que le mécanisme d’interaction ne soit pas clairement
expliqué, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion
(IEC) peuvent entraîner une augmentation (souvent
différée) de la concentration plasmatique du lithium,
plus particulièrement chez le sujet âgé.
C - Antagonistes calciques
:
La coprescription de diltiazem ou de vérapamil avec le
lithium entraîne une augmentation du risque de neurotoxicité.
En ce qui concerne la nifédipine, une augmentation
de la concentration plasmatique apparaît uniquement
en cas de prescription prolongée (après 6 semaines).
Anti-inflammatoires non stéroïdiens
Tous les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), à
l’exception de l’aspirine et du sulindac, peuvent augmenter
la concentration plasmatique du lithium, cet effet
étant très variable selon le produit et selon les individus.
Néanmoins, compte tenu de la fréquence d’utilisation de
ces produits dont certains sont vendus sans ordonnance,
il est indispensable d’en informer le patient.
D - Psychotropes
:
Bien que très largement utilisés en associations avec le
lithium en psychiatrie, l’usage des psychotropes n’est
pas sans risque et nécessite une surveillance appropriée.
• Les neuroleptiques pourraient augmenter le risque
de neurotoxicité (apparition d’un syndrome confusionnel,
syndrome extrapyramidal, syndrome malin), notamment
par augmentation de la concentration intracellulaire du
lithium.
Un tel mécanisme a été mis en évidence in vitro
avec les phénothiazines.
• L’association du lithium aux inhibiteurs sélectifs de
la recapture de la sérotonine (ISRS), ou aux inhibiteurs
de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline
(IRSNA) pourrait favoriser la survenue d’un syndrome
sérotoninergique (tremblements, myoclonies, hyperthermie,
tachycardie, troubles tensionnels, hyperréflexie).
• Si les antidépresseurs tricycliques peuvent favoriser
l’élimination rénale du lithium, il ne faut pas négliger le
risque de cardiotoxicité cumulé lors d’une telle coprescription.
• Aucune interaction spécifique n’a été décrite avec les
antidépresseurs inhibiteurs de la monoamine oxydase
(IMAO), sélectifs ou non.
• La carbamazépine est un anticonvulsivant qui,
comme le lithium, possède des propriétés thymorégulatrices.
Leur association peut être envisagée en cas d’échec des monothérapies ; elle doit toutefois rester
limitée aux cas de résistances les plus sévères du fait du
risque de neurotoxicité (syndrome cérébelleux, altération
des fonctions supérieures) et de cardiotoxicité (trouble
de la conduction cardiaque).
E - Autres médicaments
:
Certains médicaments augmentent la concentration
plasmatique du lithium : il s’agit des tétracyclines, de
l’alpha-méthyldopa, du métronidazole.
D’autres vont
faciliter l’élimination rénale du lithium et donc réduire son
efficacité : c’est le cas des dérivés xanthiques, du mannitol, des
corticoïdes et des antiacides contenant du bicarbonate de sodium.
Effets indésirables et complications du traitement :
Les effets
indésirables du lithium sont fréquents mais pour la plupart mineurs.
Sachant que ces
effets sont dépendants de la dose, il convient de les distinguer de
signes de surdosage.
Le contexte
d’apparition de ces symptômes est pour cela déterminant.
Certains effets
indésirables tels que la prise de poids et la baisse de la libido
peuvent être mal vécus par le patient, notamment sur le long terme
et peuvent entraîner une rupture du traitement.
Il est dès lors
indispensable d’informer le patient de la possibilité de survenue de
ces effets indésirables, ce qui permet d’obtenir une meilleur
observance thérapeutique au long cours.
Intoxication au lithium :
• L’intoxication
par le lithium est une urgence diagnostique et thérapeutique.
Le pronostic vital est en jeu avec risque de coma, puis de
décès par défaillance cardiovasculaire et complications
neurotoxiques.
Celles-ci peuvent sinon entraîner des
séquelles irréversibles (syndromes cérébelleux, extrapyramidal,
bulbaire, démence et neuropathie périphérique).
Il est indispensable de rechercher les circonstances d’apparition
du surdosage : prise d’un nouveau traitement,
pathologie organique sous-jacente, baisse des apports hydrosodés (coup de chaleur, vomissements, diarrhées,
fièvre), erreur de prise ou intoxication volontaire.
En outre, dès l’introduction du traitement, le patient et
son entourage doivent apprendre à reconnaître les premiers
symptômes évocateurs d’un surdosage (symptômes
d’alerte) afin de corriger au plus vite un surdosage éventuel.
• L’arrêt du traitement, la réalisation de la lithémie et
une consultation médicale sont dans ce cas indispensables
et urgents.
Si nécessaire, on réalise une diurèse
osmotique voire une épuration extrarénale.
Modalités de prescription
:
A - Mise en route du traitement
:
1- Bilan prélithium
:
• Un bilan clinique est indispensable comprenant :
– l’interrogatoire (antécédents médico-chirurgicaux
personnels et familiaux, connaissance des traitements en
cours) à la recherche d’éventuelles contre-indications au
lithium ;
– l’examen clinique minutieux et complet avec notamment
palpation de la thyroïde, examen neurologique et
cardiovasculaire ;
– des examens complémentaires : électrocardiogramme
chez les sujets de plus 40 ans ou présentant des antécédents
cardiaques, électroencéphalogramme en cas d’antécédents
neurologiques notamment comitial (abaissement
du seuil épileptogène sous lithium).
• Chez les femmes en période d’activité génitale, il
convient de s’assurer que la patiente n’est pas enceinte
(date des dernières règles), et qu’elle bénéficie d’une
contraception efficace.
En cas de doute il faut réaliser le
dosage des bêta-hCG (human chorionic gonadotropin)
plasmatiques.
• Un bilan biologique va venir compléter le bilan clinique.
Il permet la recherche de contre-indications et
sert de bilan initial.
Il comprend : un bilan hématologique
(numération formule sanguine, plaquettes) ; un
ionogramme sanguin (natrémie, kaliémie, chlorémie) ; une glycémie à jeun ; un bilan de la fonction rénale, sanguin
et urinaire (urémie, créatininémie, bilan phosphocalcique,
clairance de la créatinine, recherche d’une protéinurie,
examen cytobactériologique des urines) ; un
bilan thyroïdien (TSH ultrasensible).
2- Méthode « pas à pas »
:
La mise en route du traitement par lithium se fait par
« tâtonnements », de façon progressive.
On débute généralement
par une dose correspondant à 10 mEq par 24 h,
soit 1 comprimé et demi de Téralithe 250 en deux prises,
ou 1 comprimé de Téralithe LP 400 en une prise unique
vespérale, ou encore 2 ampoules de 5 mL de
Neurolithium en deux prises.
La posologie est adaptée en fonction du dosage sanguin
du lithium.
La demi-vie du lithium étant de 24 h, il faut
donc en pratique un minimum de 6 jours avant de réaliser
le contrôle sanguin.
3- Concentration sanguine efficace et dosage
du lithium :
Le dosage plasmatique du lithium (par photométrie de
flamme, moins coûteuse ou spectrophotométrie d’absorption
atomique, plus sensible) est réalisé le matin
avant la prise matinale, soit 12 h après la dernière prise.
La fourchette thérapeutique (concentration minimale
efficace) dans le traitement prophylactique du trouble
bipolaire se situe entre 0,5 et 0,8 mEq/L pour la forme à
libération immédiate et entre 0,8 et 1,2 mEq/L pour la
forme à libération prolongée (l’augmentation de la fourchette
thérapeutique pour la forme à libération prolongée
tient au fait que pour des raisons pratiques on dose
12 h après la prise vespérale une forme retard dont la
cinétique est plus lente ; si l’on réalisait le dosage
24 h après la dernière prise, on obtiendrait un dosage
identique à la forme à libération immédiate).
Une lithémie
inférieure à 0,4 mEq/L s’accompagne d’une
moindre efficacité thérapeutique.
En règle générale, l’équilibre lithémique est obtenu en
2 à 3 semaines.
Chez le sujet âgé, on débute le traitement à des posologies
plus faibles, de façon plus progressive, en recherchant
une concentration minimale efficace légèrement inférieure
à la normale (entre 0,3 et 0,6 mEq/L).
Dans le traitement curatif de l’accès maniaque, on
cherche à obtenir une concentration plasmatique un peu
plus élevée (entre 0,8 et 1 mEq/L).
4- Indication du dosage érythrocytaire
du lithium :
En cas de difficultés d’équilibration du traitement (lithémie
faible malgré des posologies importantes), d’inefficacité
clinique malgré une lithémie adaptée, ou au
contraire de l’apparition de symptômes de surdosages
malgré une lithémie dans les limites de la normale, on
peut réaliser le dosage de la lithémie érythrocytaire.
La
concentration intra-érythrocytaire est un meilleur indicateur
de la concentration intracérébrale de lithium et un
bon indicateur de l’observance du traitement.
La concentration intra-érythrocytaire minimale efficace
se situe alors entre 0,2 et 0,4 mEq/L.
Au-delà peuvent
apparaître des symptômes de surdosages.
B - Surveillance du traitement au long cours
:
1- Fréquence des dosages sanguins
:
Après avoir obtenu l’état d’équilibre, des contrôles réguliers
de la lithémie sont réalisés à des intervalles de 2 à 6 mois, en
tenant compte avant tout des modifications qui peuvent
survenir dans l’histoire clinique du patient.
On rapproche
les contrôles lithémiques en cas de modification des
doses, d’instauration de nouveaux traitements, d’apparition
d’une pathologie intercurrente, de modifications de
l’état clinique du patient et chez la femme enceinte.
Il faut par ailleurs contrôler régulièrement la fonction
rénale en réalisant une créatininémie, et la fonction
thyroïdienne par un dosage de TSH ultrasensible annuel.
2- Éducation du patient et de sa famille
:
Dès l’instauration du traitement, il faut informer le patient
et son entourage proche sur les règles de surveillance, les
effets indésirables et les précautions d’emploi (notamment
respect d’une bonne hydratation et contre-indication
du régime sans sel), ainsi que sur les signes
d’alertes de surdosage qui lui permettront d’aller
consulter en urgence si de tels symptômes apparaissent.
Il faut aussi lui conseiller de porter sur lui une carte indiquant
qu’il est traité par lithium et d’en informer tout
médecin prescripteur qu’il est susceptible de consulter.
3- Choix de la forme galénique
:
La forme à libération prolongée (Téralithe LP 400) permet
de réduire la prise du traitement à une prise quotidienne
vespérale, ce qui peut dans certains cas améliorer
l’observance du traitement.
Du point de vue pharmacocinétique,
la forme retard permet d’écrêter le pic lithémique
et donc d’améliorer la stabilité lithémique.
En cas de relais de la forme classique à la forme retard,
l’équivalence est réalisée en multipliant par 0,75 le
nombre de comprimés à 250 mg.
4- Durée du traitement
:
En théorie, le traitement doit être prolongé à vie.
Néanmoins, après plusieurs années de stabilisation thymique,
on peut discuter l’arrêt du traitement, sachant
qu’il n’existe pas de consensus sur la question.
Après un « contrat » minimal de 3 ans avec le patient
(l’alliance thérapeutique est indispensable à l’instauration
du traitement), une telle décision peut être discutée,
en tenant compte avant tout de l’histoire de la maladie,
de l’efficacité du traitement, de l’observance et des
inconvénients évoqués par le patient.
C - Références médicales opposables
:
Il n’y a pas lieu d’entreprendre un traitement prophylactique
par le lithium en dehors des malades ayant un
trouble maniaco-dépressif bipolaire ou unipolaire et des
états schizo-affectifs.
Il n’y a pas lieu pour la surveillance d’un traitement par
le lithium de pratiquer d’autres examens biologiques de
routine que le dosage de la lithémie et de la créatininémie
et, une fois par an, le contrôle de la TSH ultrasensible.