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Hématologie
Leucémies aiguës lymphoblastiques (adulte et enfant)
Cours d'hématologie
 


 

Les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) se définissent comme la prolifération anormale, dans la moelle osseuse, d’un clone cellulaire anormal, issu de la lignée lymphocytaire, et bloqué à un stade précis de différenciation.

En Europe et aux États-Unis, elles représentent 80 % des leucémies et 35 % environ des cancers de l’enfant.

Chez l’adulte, elles sont au contraire 4 fois plus rares que les leucémies aiguës myéloblastiques.

Diagnostic positif :

A - Signes révélateurs :

La forme typique associe un syndrome d’insuffisance médullaire, un syndrome tumoral, et des signes métaboliques.

Leur intensité respective peut être très variée, et parfois nécessiter des soins d’extrême urgence.

1- Syndrome d’insuffisance médullaire :

• L’anémie est responsable de pâleur, tachycardie, dyspnée d’effort, souffle systolique.

• La thrombopénie avec des signes hémorragiques allant du simple purpura ecchymotique à l’hémorragie cérébroméningée, dont le risque est accentué en présence d’hémorragies rétiniennes au fond d’oeil.

• La granulopénie, source de complications infectieuses graves.

Cependant la fièvre est au moins aussi souvent d’origine tumorale qu’infectieuse.

2- Syndrome tumoral :

Après la moelle et le sang, tous les organes peuvent être envahis.

L’implication des organes lymphoïdes, l’envahissement des testicules ou du système nerveux central évoquent le caractère lymphoblastique de la leucémie aiguë.

• Adénopathies périphériques ou profondes, hépatomégalie et (ou) splénomégalie de taille variable présentes 3 fois sur 4 ne sont pas distinctives à l’exception des masses médiastinales antérieures parfois compressives qui suggèrent une leucémie lymphoblastique aiguë de phénotype T.

• L’envahissement du système nerveux central peut se manifester par une atteinte des nerfs crâniens (paralysies oculomotrices), un syndrome méningé, des signes d’hypertension intracrânienne, une hypo-estésie de la houppe du menton…

Dans tous les cas, la ponction lombaire est nécessaire pour affirmer l’atteinte méningée ou déceler un envahissement infraclinique.

• L’atteinte testiculaire initiale, rare, se traduit par de gros testicules fermes et indolores.

Le diagnostic est affirmé par ponction et (ou) biopsie.

L’infiltration testiculaire et les douleurs osseuses épiphysaires avec des bandes claires métaphysaires sur les radiographies (20 à 40 % des cas) sont plutôt l’apanage des formes de l’enfant.

Une boiterie, un refus de la marche peuvent en résulter.

Les localisations tumorales cutanées comme l’infiltration gingivale ou la détresse respiratoire hyperleucocytaire ne se rencontrent en pratique que dans les leucémies aiguës myéloïdes.

3- Syndrome de lyse tumorale :

Rare mais caractéristique : anurie par hyperuraturie, déshydratation par hypercalcémie, troubles du rythme par hyperkaliémie ont un pronostic spontané redoutable à court terme.

L’intensité de chacun de ces troubles et leur association est variable.

Dans les formes les plus aiguës, la symptomatologie est bruyante, susceptible de prendre un caractère d’urgence (anémie aiguë, syndrome hémorragique, signes de leucostase dans les formes très hyperleucocytaires).

B - Examens complémentaires :

Ils affirment le diagnostic de leucémie aiguë et les caractéristiques de la population blastique (indispensables à l’établissement d’un schéma thérapeutique adapté), précisent les différentes localisations de la maladie et permettent de se placer dans les meilleures conditions de sécurité.

1- Numération formule sanguine :

Elle peut montrer des cellules blastiques circulantes mais cela n’est ni nécessaire ni suffisant pour poser le diagnostic.

Elle permet par ailleurs d’apprécier :

• le degré de l’anémie (normochrome normocytaire arégénérative).

Un chiffre normal d’hémoglobine traduit souvent une forme rapidement évolutive, de mauvais pronostic ;

• l’intensité de la thrombopénie et le risque hémorragique ;

• le chiffre de la leucocytose, facteur pronostique majeur, distingue les formes cytopéniques des formes hyperleucocytaires. Celles-ci peuvent (8 à 15 % des cas) dépasser 100 000/mm3.

Le degré de la neutropénie absolue prédit le risque infectieux immédiat.

2- Myélogramme :

Indispensable pour poser le diagnostic, même en cas de blastose circulante.

Il est généralement pratiqué chez l’adulte au sternum, chez l’enfant sous sédation analgésique en épine iliaque antérieure ou postérieure.

Il permet 3 types d’examens.

• L’étude cytologique : l’aspect morphologique (coloration de May-Grünwald-Giemsa) sur lame affirme le diagnostic de leucémie aiguë (plus de 30 % de cellules blastiques) et souvent en propose le type cellulaire.

La classification FAB (Franco-américano-britannique), la plus utilisée, décrit 3 groupes :

– LI : très fréquent chez l’enfant, assez rare chez l’adulte ; les cellules sont petites, monomorphes ;

– L2, caractérisé par l’hétérogénéité des blastes, dans leur taille comme dans leur aspect ;

– L3, de type Burkitt : cellules malignes de taille moyenne, très particulières par leur cytoplasme intensément basophile contenant des vacuoles.

Les réactions cytochimiques myéloïdes sont négatives (myéloperoxydase et noir Soudan B, estérases fluorosensibles) ou non spécifiques [positivité en mottes cytoplasmiques du Periodic Acid Schiff]).

La cytochimie ultrastructurale, lorsqu’elle est pratiquée, confirme l’absence de peroxydase.

La biopsie ostéomédullaire n’est pratiquée qu’en cas d’échec du myélogramme.

Ainsi, la définition cytologique des leucémies aiguës lymphoblastiques est pour l’essentiel négative : prolifération de blastes sans grains peroxydase négatifs.

Les limites de cette classification FAB résident d’une part dans l’impossibilité de classer par la morphologie 25 % environ des leucémies aiguës, d’autre part dans l’absence de toute corrélation entre l’aspect cytologique et l’appartenance à une lignée B ou T, à l’exclusion notable de la leucémie aiguë lymphoblastique 3 qui est toujours B. On conçoit l’apport qu’a pu constituer la détermination de l’immunophénotype des cellules leucémiques grâce à la disponibilité d’anticorps monoclonaux.

• L’étude immunologique permet d’établir la nature de la leucémie aiguë et d’en préciser le stade de différenciation.

Elle utilise le plus souvent la cytométrie en flux.

L’immunophénotype se définit comme l’ensemble des antigènes membranaires (CD) exprimés par les cellules leucémiques.

Il n’existe pas de néoantigène leucémique, aussi la nature maligne des blastes est-elle déduite soit de leur nombre, soit de la coexistence anormale d’antigènes en théorie mutuellement exclusifs, soit du caractère inhabituel de leur présence au sein d’un organe ou d’un tissu.

Il est ainsi possible de situer, avec une précision variable d’un cas à l’autre, l’étape de la maturation normale que le blaste leucémique n’a pu franchir.

L’usage clinique a distingué 4 formes, de répartition variable selon l’âge et qui chez l’enfant se répartissent ainsi :

– leucémie lymphoblastique aiguë T (15 à 20 % des cas) ;

– leucémie lymphoblastique aiguë pré-pré B (70 à 75 % des cas) caractérisée par l’antigène CD10 ou CALLA ;

– leucémie lymphoblastique aiguë pré B (environ 10 % des cas) ;

– leucémie lymphoblastique aiguë B (< 5 % des cas).

Dans un petit nombre de cas, les cellules leucémiques expriment à la fois des marqueurs lymphoïdes et myéloïdes ; on parle alors de leucémies bi-phénotypiques (6 à 15 % des leucémies lymphoblastiques aiguës), de signification exacte et de valeur pronostique encore inconnue.

• L’étude génétique : les anomalies affectent le génome.

Elles sont acquises, clonales et non aléatoires.

Fréquentes mais non obligatoires, elle contribuent de manière essentielle à la définition de facteurs pronostiques dans les leucémies lymphoblastiques aiguës.

Il existe 2 types d’anomalies :

– des anomalies de nombre (appréciées par l’étude cytogénétique et la mesure de l’index d’ADN) : . les formes hyperdiploïdes (> 50 chromosomes ou index DNA > 1,16) plutôt associées au phénotype pré-pré B et de meilleur pronostic ; . les formes hypodiploïdes (o 45 chromosomes) rares (moins de 8 % des cas) au pronostic nettement péjoratif ; . ploïdie comprise entre 47 et 50 chromosomes de pronostic intermédiaire (de même que les formes très hyperploïdes) ;

– des anomalies de structure mises en évidence soit par cytogénétique soit par biologie moléculaire [PCR et (ou) hybridation fluorescente in situ].

Sont de mauvais pronostic : . t(9;22)(q34;q11) : ou « chromosome Philadelphie » (Ph1), de pronostic catastrophique.

L’aspect cytogénétique est le même, mais les anomalies moléculaires (fusion Bcr-Abl) sont parfois différentes de celles observées dans la leucémie myéloïde chronique y compris en transformation aiguë.

Sa fréquence, basse chez l’enfant (5 %) s’élève chez l’adulte, pour atteindre près de 1 cas sur 2 après 50 ans ; . t(4;11)(q21;q23) : trouvée dans environ 2 à 5 % des cas, associée au jeune âge, à l’hyperleucocytose. D’autres anomalies impliquant cette région 11q23 sont très fréquentes chez l’enfant : le gène concerné (gène MLL), semble fortement impliqué dans la différenciation cellulaire ; . t(1;19)(q23;p13) : donne naissance à un gène de fusion E2A-PBX1 et à une protéine hybride, facteur de transcription aux propriétés transformantes.

Son mauvais pronostic initial a été effacé chez l’enfant par l’utilisation de protocoles intensifs. Semblent comporter un meilleur pronostic avec les traitements actuels : . anomalies 8q24 : « type Burkitt ».

Elles regroupent les t(8;14)(q24;q32), les t(2;8)(p12;q24) et les t(8;22)(q24;q11) qui toutes intéressent l’oncogène c-myc – dont la dérégulation apparaît critique dans le processus de transformation maligne – alors juxtaposé aux gènes codant les chaînes lourdes ou légères d’immunoglobulines.

Toutes trois sont associées à un immunophénotype B. Leur pronostic, autrefois effroyable, a été transformé par les chimiothérapies actuelles ; . t(12;21)(p13;q11) : elle semble très fréquente (20 à 30 % des leucémies lymphoblastiques aiguës de l’enfant), intéressant le gène tel. L’apparent bon pronostic reste néanmoins à confirmer sur le long terme.

3- Ponction lombaire :

L’atteinte méningée se définit par l’existence de plus de 5 éléments/mm3 dans le liquide céphalorachidien avec présence de blastes.

Elle influence le pronostic et surtout les modalités thérapeutiques.

4- Autres examens :

• Radiographie de thorax : à la recherche d’un gros médiastin, d’un syndrome alvéolo-interstitiel (leucostase), d’une pneumopathie infectieuse.

• L’étude de l’hémostase avec recherche de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) : indispensable, particulièrement dans les leucémies lymphoblastiques aiguës hyperleucocytaires.

• L’ionogramme et le bilan phosphocalcique : pour apprécier la fonction rénale, rechercher une hyperuricémie ou le retentissement métabolique de la lyse blastique.

• Le dosage de LDH reflète la masse tumorale et son renouvellement.

• Une étude de la fonction hépatique avant une chimiothérapie potentiellement toxique.

• Un phénotype érythrocytaire complet, avec recherche d’agglutinines irrégulières avant toute transfusion, pour réduire le risque d’immunisation chez des patients candidats à de multiples transfusions.

• Un groupage HLA pour prévoir l’immunisation transfusionnelle plaquettaire voire dans l’éventualité d’une greffe de moelle ultérieure.

• Une enquête bactériologique et virale pour déterminer la cause d’une fièvre initiale, mais aussi le statut sérologique vis-à-vis des hépatites B et C et du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) ce qui a un intérêt pratique immédiat (transfusions prévisibles) mais aussi médico-légal ultérieur.

• Une échographie abdominale lorsque la clinique y invite, pour détecter une tumeur mésentérique ou une infiltration rénale.

• Une échographie cardiaque avant utilisation des anthracyclines.

Diagnostic différentiel :

Il n’y a pas en pratique de diagnostic différentiel d’une leucémie aiguë.

Il importe pourtant de :

• ne pas ignorer le diagnostic devant un tableau clinique trompeur ou incomplet évoquant une arthrite chronique juvénile ou une mononucléose infectieuse.

L’analyse des données hématologiques doit être rigoureuse, le contrôle médullaire réalisé au moindre doute ;

• ne pas poser le diagnostic trop précipitamment sur des seules données sanguines : le myélogramme est toujours indispensable au diagnostic de leucémie lymphoblastique aiguë.

La réelle difficulté peut provenir de l’affirmation du caractère lymphoïde d’une leucose aiguë, du fait de la négativité ou de la discordance des examens mis en oeuvre.

La distinction entre leucémie lymphoblastique aiguë à Ph1 et transformation aiguë de leucémie myéloïde chronique est actuellement purement intellectuelle : leur pronostic est pareillement effroyable ; à la frontière entre le diagnostic différentiel et les formes cliniques se situent les lymphomes leucémisés, dans lesquels c’est le ganglion qui constitue le site initial de la prolifération maligne, mais où moelle et sang peuvent être envahis lors du diagnostic.

Le seuil conventionnel

– 30 % de blastes médullaires

– définit la leucémie aiguë.

Pour artificiel qu’il puisse paraître, il est très utile en clinique.

Formes cliniques :

Deux formes méritent d’être individualisées par leur sémiologie particulière :

• les leucémies lymphoblastiques aiguës T, caractérisées par une forte masse tumorale médiastinale développée aux dépens du thymus et par un tropisme cérébro-méningé marqué ;

• les leucémies lymphoblastiques aiguës B matures, de type Burkitt [non liées au virus Epstein-Barr (EBV) contrairement au lymphome de Burkitt africain] : les blastes de morphologie L3 portent à leur surface des immunoglobulines de membrane monotypiques.

Le pronostic immédiat dépend de la qualité de la réanimation hématologique tant le syndrome métabolique est au premier plan.

La masse tumorale est considérable, avec souvent une localisation abdominale et (ou) neuroméningée.

Facteurs pronostiques :

1- Facteurs liés au malade :

• L’âge est le facteur le plus important ; chez l’adulte, le risque de rechute ou d’échec primaire s’accroît au-dessus de 35 ans ; chez l’enfant, un âge inférieur à 1 an est de mauvais pronostic : la maladie est souvent hyperleucocytaire avec atteinte méningée initiale, et le traitement plus toxique à cet âge ; chez l’enfant plus grand, le pronostic se dégrade à partir de 10-11 ans pour rejoindre celui de l’adulte à partir de 15 ans.

• L’infection initiale, l’obésité sont autant d’éléments péjoratifs.

2- Facteurs liés à la maladie :

• Le syndrome tumoral : l’existence d’un syndrome tumoral important, l’atteinte initiale du système nerveux central sont de mauvais pronostic.

• Le chiffre de globules blancs : le pronostic est plus favorable quand la leucocytose est inférieure à 10 000 GB/mm3.

Il est très défavorable au-dessus de 100 000 GB chez l’enfant, dès 30 000/mm3 chez l’adulte.

• L’immunophénotype :

– très utile pour définir précisément les leucémie lymphoblastique aiguë, le phénotype immunologique constitue un facteur pronostique sans doute mineur, et en tout cas non indépendant ;

– les leucémies lymphoblastiques aiguës T peuvent être, selon les protocoles utilisés, les « meilleures » ou les « pires ».

Classiquement de mauvais pronostic chez l’enfant, elles justifient une intensification thérapeutique.

Au contraire, elles sont plutôt meilleures chez l’adulte ;

• La cytogénétique.

3- Facteurs liés au traitement :

• La réponse au traitement : la rapidité et la qualité de la réponse à la chimiothérapie initiale ont une importance majeure.

La rapidité de mise en rémission apparaît comme un facteur prédictif essentiel pour la survenue de rechutes tardives.

Elle peut être appréciée de 3 manières :

– aspect médullaire entre le J7 et le J14 du traitement ;

– nombre de blastes circulants à J8 ;

– obtention de la rémission complète à l’issue de la première cure de chimiothérapie.

• Surtout, la qualité de la rémission est au mieux appréciée par la détection moléculaire de la maladie résiduelle.

On estime à 1012 le nombre de cellules présentes au diagnostic d’une leucémie aiguë et à 109 celles qui persistent dans l’organisme lors de l’état dit de rémission complète, non détectables par les méthodes morphologiques classiques.

Mieux détecter cette maladie résiduelle grâce à ses particularités moléculaires pourrait permettre de définir une base rationnelle d’intensification thérapeutique individualisée.

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