Intoxications aiguës par barbituriques, tranquillisants, tricycliques, paracétamol, salicylés
Cours de Médecine Légal
e
Intoxications aiguës
par les carbamates
:
Les carbamates sont essentiellement prescrits comme tranquillisants
(Équanil, Atrium) ou comme hypnotiques en
association avec une phénothiazine (Mépronizine).
Les
intoxications sévères s’observent pour des doses généralement
supérieures à 6 grammes.
1- Cinétique et métabolisme :
En cas de prise massive on note un allongement du temps
d’absorption digestive ainsi que de la demi-vie plasmatique.
Le taux de liaison aux protéines plasmatiques est de l’ordre
de 20 % et le volume de distribution de 0,7 l/kg.
60 % environ
sont métabolisés au niveau hépatique avec élimination
des métabolites dans les urines (dont 2/3 sous forme inactive).
2- Symptomatologie :
Les troubles de la conscience apparaissent 1 à 3 heures
après l’ingestion. L’intensité du coma dépend de la dose
ingérée.
Il s’agit d’un coma calme, hypotonique, hyporéflexique
avec parfois hypothermie, rhabdomyolyse et pneumopathie
de déglutition.
Des signes pyramidaux avec
réflexes ostéotendineux vifs et signe de Babinski sont
observés dans certain cas.
La gravité de cette intoxication est liée à la survenue d’une
insuffisance circulatoire aiguë qui n’est pas corrélée aux
troubles de la vigilance.
L’hypotension ou le choc sont la
conséquence, soit d’une vasoplégie (PVC basse) soit, dans les intoxications sévères, d’une dépression myocardique
(PVC augmentée) qui peut se compliquer d’oedème pulmonaire.
Il existe une corrélation entre les concentrations plasmatiques
de carbamates et la profondeur du coma. Habituellement,
un coma profond est observé pour des concentrations
supérieures à 100 mg/L.
3- Traitement :
• Il est essentiellement symptomatique.
La correction de
l’état de choc se fait, soit par remplissage en cas d’hypovolémie,
soit par médicaments inotropes positifs en cas
d’insuffisance myocardique.
Dans les cas sévères une étude
hémodynamique peut-être nécessaire pour adapter au
mieux la thérapeutique.
• Le lavage gastrique peut-être réalisé en cas d’ingestion
supérieure à 6 grammes et lorsque le délai est inférieur à
1-2 heures.
• L’indication de l’administration répétée de charbon
activé per os n’est pas prouvée.
• Une épuration extrarénale par hémoperfusion, qui est
efficace du point de vue cinétique, n’est cependant indiquée
qu’exceptionnellement en cas d’intoxication massive
avec perturbation des voies d’élimination normales.
Intoxications aiguës
par les benzodiazépines :
Les benzodiazépines sont une des classes médicamenteuses
les plus prescrites dans les pays occidentaux.
Ce groupe
renferme des molécules aux propriétés anxiolytiques, hypnotiques,
sédatives, anticonvulsivantes et myorelaxantes.
L’efficacité thérapeutique et la grande sécurité d’emploi
des benzodiazépines expliquent en partie l’importance de
la prescription.
1- Cinétique et métabolisme :
L’absorption digestive est généralement rapide.
Le délai
d’apparition du pic plasmatique varie entre 1 et 3 heures.
Les benzodiazépines sont très liposolubles, ont un volume
de distribution élevé et une importante fixation protéique
(85 à 99 %).
Le métabolisme est exclusivement hépatique
avec formation de métabolites actifs pour certaines molécules
(desméthyldiazépam par exemple).
La demi-vie des
benzodiazépines est très variable d’une molécule à l’autre
(de 3 à 70 heures) et ne reflète qu’imparfaitement la durée
de l’action clinique. L’excrétion rénale concerne essentiellement
les métabolites.
2- Symptomatologie :
Elle comporte principalement une obnubilation, une somnolence,
parfois un coma.
La dépression respiratoire est
modérée (en l’absence d’insuffisance respiratoire préexistante)
et l’inhalation bronchique peu fréquente.
Le pronostic
est généralement favorable et les décès exceptionnels.
L’existence d’un coma profond doit faire rechercher
une association à d’autres psychotropes ou à de l’alcool.
Chez le sujet âgé, l’évolution peut-être parfois très lente
avec un réveil progressif prolongé sur quelques jours.
Dans
certains cas, en particulier chez l’enfant, on peut observer
des états d’agitation avec troubles du comportement.
3- Traitement :
• Il est symptomatique et doit avant tout assurer la protection
des voies aériennes (position latérale de sécurité,
canule de Guedel, intubation si nécessaire).
• Le lavage gastrique est inutile en raison de l’absorption divestive rapide de ce type de molécule, de la faible quantité
épurée et de l’évolution généralement spontanément
favorable en moins de 48 heures.
• Le charbon activé (dose unique de 50 grammes) dans le
but de limiter l’absorption digestive, n’est pas justifié ; en
effet, en raison de l’absorption digestive rapide des benzodiazépines
il ne pourrait être efficace que s’il est administré
dans les 30 minutes suivant l’ingestion.
• Les indications d’administration du Flumazénil, antagoniste
pur et spécifique des benzodiazépines au niveau de
leurs récepteurs cérébraux sont limitées et répondent à deux
objectifs :
– éviter une intubation et une ventilation surtout chez le
sujet âgé ou insuffisant respiratoire.
L’administration se fait
par injection IV de doses de 0,2 à 0,3 mg qui peuvent être
répétées et titrées jusqu’à l’obtention du réveil.
Il peut être
administré en perfusion continue (0,5 à 1 mg/h) mais il
n’existe pas d’arguments cinétiques ou cliniques en faveur
de l’administration continue plutôt que discontinue ;
– aider au diagnostic d’un coma d’étiologie inconnue : dans
ce cas l’absence d’effet sur les troubles de la conscience
de l’administration de 1 à 2 mg de flumazénil permet d’exclure
une intoxication par benzodiazépines.
Ce type d’utilisation
n’est cependant pas dénué de risque : en effet, lors
d’une prise associée d’antidépresseur tricyclique, il existe
un risque de survenue de convulsions au décours immédiat
de l’injection de flumazénil.
Par ailleurs, l’administration
de flumazénil chez un sujet prenant régulièrement des benzodiazépines
peut induire un syndrome de sevrage brutal
avec convulsions.
Intoxications aiguës
par les barbituriques :
L’intoxication barbiturique aiguë était, jusque vers les
années 70 la plus fréquente des intoxications médicamenteuses
volontaires.
Sa fréquence a diminué du fait de l’apparition sur le marché
pharmaceutique de nouvelles substances à action hypnotique,
moins dépressives sur le plan respiratoire, telles
les benzodiazépines.
Actuellement, cette intoxication est
rare étant donné qu’il n’existe plus, sur le marché français,
que quelques spécialités renfermant des barbituriques à
savoir : Gardénal, Orténal, ainsi que 18 médicaments sédatifs
faiblement dosés en barbituriques.
Du point de vue pharmacologique, on classe les barbituriques
en 3 groupes selon leur mode d’action (rapides, intermédiaires,
lents).
A - Intoxications par les barbituriques d’action lente
(phénobarbital) :
1- Cinétique et métabolisme :
L’absorption digestive lente rend compte du délai d’apparition
des symptômes.
La demi-vie plasmatique est longue
(69,2 ± 55,2 heures) et la clairance corporelle totale basse
(10,1 ± 4,7 mL/min) 40 % sont éliminés par voie rénale et
60 % sont métabolisés au niveau hépatique.
2- Symptomatologie
:
Le phénobarbital induit un coma d’installation progressive,
calme, hypotonique avec abolition des réflexes ostéo-tendineux.
Du point de vue respiratoire, on note une hypoventilation
avec une bradypnée superficielle, pouvant aboutir à une
apnée, et se compliquer d’un encombrement trachéo-bronchique
et d’une pneumopathie de déglutition.
L’hypothermie,
conséquence d’un trouble central de la thermorégulation,
est souvent présente.
L’hypotension est fréquente
principalement liée à une hypovolémie relative par vasodilatation
artérielle.
La rhabdomyolyse avec élévation des
CPK est une complication fréquente et doit en particulier
être suspectée devant des lésions cutanées de type érythème,
phlyctène et oedème.
• Le dosage du phénobarbital dans le sang confirme l’intoxication,
mais l’interprétation des taux doit tenir compte
de la tolérance du sujet liée à l’ingestion chronique de barbituriques.
Ainsi à concentrations plasmatiques égales les
symptômes sont moins sévères chez les épileptiques traités
par phénobarbital que chez les sujets non traités.
• Le tracé EEG peut, objectiver des phases de silence voire
être isoélectrique sans que cela ait une signification pronostique
en l’absence de survenue d’un épisode d’anoxie
cérébrale.
3- Traitement :
• Il est essentiellement symptomatique : assistance respiratoire,
réchauffement, nursing, maintien de l’équilibre hydroélectrolytique et hémodynamique.
• Le lavage gastrique n’est indiqué que si le délai est inférieur
à 1-2 heures et si la dose supposée ingérée est supérieure
à 2 grammes.
• Le charbon activé, administré de façon répétée (doses de
50 g puis de 25 g toutes les 2 heures) augmente de manière
significative l’élimination du phénobarbital (diminution de
la demi-vie plasmatique).
• Le cure de diurèse alcaline osmotique était classiquement
préconisée.
En fait, seule l’alcalinisation est efficace
à condition d’obtenir un pH urinaire supérieur à 7,5. Dans
ce cas la clairance rénale du phénobarbital est augmentée
de 3 à 4 fois.
B - Intoxications par les barbituriques
d’action rapide ou intermédiaire :
• L’hépuration extrarénale par hémoperfusion n’a plus
d’indication.
Elles sont devenues exceptionnelles en raison de la disparition
du marché de la plupart des spécialités en renfermant.
Leur absorption digestive est rapide. Ils sont liposolubles,
métabolisés au niveau hépatique à 90 % et éliminés dans
les urines sous forme de métabolites inactifs.
Après ingestion,
ils entraînent un coma profond d’apparition rapide
avec risque d’apnée.
Le traitement est symptomatique.
Intoxications aiguës
par les antidépresseurs tricycliques :
Les antidépresseurs tricycliques ont gardé leur place dans
le traitement des états dépressifs malgré l’apparition sur le
marché d’une nouvelle génération d’antidépresseurs inhibiteurs
de la recapture de la sérotonine.
La gravité de l’intoxation
est liée aux troubles cardiovasculaires.
1- Cinétique et métabolisme :
L’absorption digeste est lente en raison d’une absorption
préférentielle au niveau intestinal et d’une action anticholinergique
ralentissant le transit gastro-intestinal. La fixation
protéique est de l’ordre de 90 %.
Le volume de distribution
est élevé (10 à 20 litres/kg). La métabolisation est
hépatique avec formation de métabolites dont certains sont
actifs.
L’excrétion est principalement urinaire sous forme
de métabolites.
2- Symptomatologie :
Elle associe des troubles neurologiques, des signes anticholinergiques
et des troubles cardiovasculaires.
• Troubles neurologiques : ils surviennent 1 à 4 heures suivant
la prise et comportent des troubles de la conscience
pouvant aller jusqu’au coma. Des convulsions peuvent survenir
précocement.
Il s’agit le plus souvent de crises tonicocloniques
généralisées rapidement résolutives.
Un syndrome
pyramidal bilatéral avec réflexes ostéotendineux vifs
et réflexes cutanés plantaires en extension est fréquent.
• Signes anticholinergiques : ils sont fréquents, précoces
et non corrélés à la gravité de l’intoxication.
On peut noter,
simultanément ou isolément : une tachycardie sinusale, une
mydriase bilatérale faiblement réactive, une rétention urinaire
et des hallucinations.
• Troubles cardiovasculaires : ils déterminent la gravité de
ce type d’intoxication.
Par leur action stabilisante de membrane, de type « quinidine like », les ADT dépriment la
conduction myocardique avec survenue de troubles de la
conduction, principalement de la conduction intraventriculaire
(élargissement du complexe QRS).
Des torsades de
pointes peuvent survenir suite à un phénomène de réentrée.
Dans les intoxications graves, l’action inotrope négative
des ADT induit une insuffisance circulatoire de type cardiogénique
qui est souvent contemporaine d’un élargissement
majeur du QRS.
D’autres manifestations électrocardiograhiques peuvent
être notées : troubles du rythme à type de tachycardie
ventriculaire ou supraventriculaire, bradyarythmies ventriculaires,
troubles de la conduction (bloc auriculo-ventriculaire),
troubles de la repolarisation (aplatissement de
l’onde T).
• Autres troubles : ils ne sont pas spécifiques de ce type
d’intoxication.
On peut observer : une dépression respiratoire
et une rhabdomyolyse.
3- Traitement :
La gravité potentielle de cette intoxication impose un transport
médicalisé par SMUR et une hospitalisation en milieu
de réanimation.
La surveillance hémodynamique et électrocardiographique
en cours de transport et durant l’hospitalisation
est essentielle dans la prise en charge de ces
patients.
• Traitement symptomatique : il est primordial et comporte
:
– l’intubation et la ventilation mécanique en cas de coma,
de dépression respiratoire, de convulsions répétées, de
troubles cardiovasculaires.
En effet, l’hypoxémie et les
convulsions favorisent ou aggravent les troubles cardiovasculaires.
– Le traitement des troubles de la conduction par la perfusion
de lactate ou de bicarbonate de sodium molaire en cas
d’élargissement du QRS O 0,12 s. En effet, l’apport massif
de sels de sodium a un effet bénéfique (parfois seulement
transitoire) sur les troubles de la conduction intraventriculaire.
L’administration doit être réalisée en
perfusion de doses fractionnées de 100 à 200 mL avec une
dose totale maximale de 500 mL.
Ce traitement entraîne
une alcalinisation responsable d’une hypokaliémie qu’il
conviendra de prévenir par une supplémentation en potassium
de 2 grammes de KCI pour 250 mL de bicarbonate
de sodium.
– Le traitement de l’hypotension ou du choc qui peuvent
être liés à une vasodilatation et (ou) un effet inotrope négatif.
Il comporte essentiellement les catécholamines : la bodutamine, la dopamine voire l’adrénaline.
Dans les cas
graves un monitoring hémodynamique par sonde de Swan Ganz est indiqué pour adapter le traitement.
– Le traitement des troubles du rythme.
Les bradyarythmies
et les torsades de pointes relèvent plutôt des catécholamines
bêta-mimétiques que de l’entraînement électrosystolique qui
est le plus souvent inefficace.
Les anti-arythmiques de
classe I sont contre-indiqués.
En cas de tachycardie ventriculaire
et de torsades de pointes les sels de magnésium pourraient
être utilisés en première intention.
– Traitement des convulsions par le diazépam.
• Traitement évacuateur :
– Le lavage gastrique, lorsqu’il est réalisé, doit être effectué
sous surveillance stricte hémodynamique et électrocardiographique
avec une oxygénation correcte (après intubation
si nécessaire).
Il n’est indiqué que lorsque la dose
ingérée est supérieure à 1,5 gramme et que le délai est inférieur
à 1 heure.
– Le charbon activé per os (dose unique de 50 grammes),
peut être administré en cas d’ingestion récente (inférieure
à 2 heures) d’une dose importante supérieure à 1 gramme.
• Traitement épurateur : la diurèse forcée et l’épuration extrarénale n’ont aucune indication étant donné les propriétés
pharmacocinétiques des ADT : importante fixation
protéique, large volume de distribution, métabolisation
hépatique importante.
Intoxications aiguës par l’aspirine :
L’acide acétylsalicylique est toujours l’un des médicaments
les plus consommés en France.
Aussi est-il à l’origine d’un
certain nombre d’intoxications volontaires chez l’adulte,
ainsi que d’intoxications accidentelles, d’erreurs thérapeutiques
ou de surdosages accidentels chez l’enfant.
1- Cinétique et métabolisme :
L’acide acétylsalicyclique est hydrolysé en acide salicyclique
au niveau de l’estomac et rapidement absorbé en raison de
sa forme non ionisée induite par le pH acide gastrique.
Le pic plasmatique est atteint en 2 à 6 heures à dose thérapeutique
et en 12 heures maximum à dose toxique.
La liaison protéique est de 50 à 80 %, et le volume de distribution
de 0,1 à 0,2 l/kg.
Le métabolisme hépatique est
la voie d’élimination presqu’exclusive (95 %).
À dose massive,
l’élimination rénale devient prépondérante en raison
de la saturation des principales voies du métabolisme hépatique
et de la saturation des liaisons aux protéines plasmatiques
qui augmentent la fraction libre.
2- Symptomatologie :
La dose toxique de l’aspirine, en prise unique, est estimée
à 10-15 grammes chez l’adulte et à 150 mg/kg chez l’enfant.
Ils apparaissent précocement et pour
des doses relativement modérées (environ 5 grammes).
• Troubles respiratoires : l’acide salicyclique a une action
stimulante au niveau du centre respiratoire bulbaire.
On
note donc à la phase initiale une hyperventilation à l’origine
d’une alcalose respiratoire.
• Troubles métaboliques : en cas d’intoxication massive,
on voit apparaître, après la phase précoce d’alcalose respiratoire
une acidose métabolique avec hyperlactatémie et
trou anionique augmenté.
• Autres troubles : ils sont rares et inconstants :
• Particularités des intoxications salicyclées chez l’enfant
:
L’intoxication est beaucoup plus grave chez le jeune enfant ;
les troubles de la conscience sont fréquents, de même que
les convulsions. L’acidose métabolique est précoce et
sévère.
3- Traitement :
Les résultats de la gazométrie et le taux plasmatique des
salicylés sont des bons critères de la gravité de l’intoxication.
Un bilan sanguin de contrôle doit être réalisé au-delà
de la 6e heure suivant l’ingestion.
En se reportant au nomogramme de DONE, une salicylémie
supérieure à 1 g/L à la 6e heure correspond à une intoxication
sévère.
• Le lavage gastrique doit être réservé aux intoxications
massives avec délai inférieur à 1 heure.
• Le charbon activé per os n’est indiqué qu’en cas d’ingestion
d’une dose importante avec un délai inférieur à 1 heure.
• L’alcalinisation urinaire améliore l’élimination rénale,
car elle entraîne une ionisation plus forte de l’acide salicyclique
et augmente ainsi sa filtration glomérulaire, diminue
sa réabsorption tubulaire et favorise son élimination
rénale.
La quantité de bicarbonate de sodium à 14 ‰ à
administrer est celle qui permet d’obtenir un pH urinaire
supérieur à 7,3.
Ce traitement nécessite une surveillance
du pH et des électrolytes sanguins et présente le risque
d’une surcharge hydrosodée.
L’hémodialyse est indiquée dans les intoxications cliniquement
sévères, en particulier chez les patients insuffisants
rénaux, avec une salicylémie supérieure à 0,7 g/L et une acidose
métabolique non corrigée par du bicarbonate de sodium.
Le traitement symptomatique comporte une correction des
troubles des électrolytes, de la glycémie, de la coagulation
et de l’acidose métabolique.
Intoxications aiguës
par le paracétamol :
Le paracétamol ou acétaminophène est un analgésique non
morphinique, antipyrétique, qui entre dans la composition
d’une soixantaine de spécialités pharmaceutiques.
Remarquablement
bien toléré à doses thérapeutiques, il possède,
en revanche, en cas de surdosage, une toxicité hépatique
importante.
1- Cinétique et métabolisme :
L’absorption digestive est rapide est quasi totale. Le pic
plasmatique est atteint en 1 heure à doses thérapeutiques
et avant 4 heures lors d’un surdosage.
La liaison aux protéines
plasmatiques est faible (environ 20 %) et le volume
de distribution est de 0,8 L/kg.
Quatre-vingt-dix pour cent
du paracétamol est métabolisé au niveau hépatique (glycuronoconjugaison
pour environ 70 %, sulfoconjugaison
pour environ 20 % et oxydation microsomale pour 4 %).
L’oxydation produit un métabolite hautement réactif qui
est détoxifié par conjugaison avec le glutathion.
En cas de
surdosage, l’oxydation microsomale devient la voie métabolique
prépondérante avec pour conséquence un épuisement
des réserves hépatiques en glutathion.
L’accumulation
des métabolites réactifs qui se fixent sur les protéines
cellulaires entraîne une nécrose hépatocytaire à prédominance
centrolobulaire.
2- Symptomatologie :
La dose toxique du paracétamol en prise unique, est estimée
à 8 grammes pour un adulte et à 100 mg/kg pour un
enfant.
L’intoxation se caractérise par la pauvreté des signes
cliniques : épigastralgies, nausées, vomissements.
Leur
absence, cependant, ne permet pas de préjuger d’une évolution
secondaire défavorable. L’atteinte hépatique apparaît
généralement à partir de la 24e heure et est maximale
au 3e jour.
La gravité de l’hépatite cytolytique est liée à une
évolution possible vers une insuffisance hépatocellulaire
majeure survenant entre le 3e et le 6e jour après l’ingestion.
3- Traitement
:
Il est basé sur l’administration de N-acétyl-cystéine (NAC)
qui est un fournisseur de radicaux sulfhydryles, un antioxydant,
un chélateur de radicaux libres et surtout un précurseur
du glutathion intracellulaire.
Son efficacité et sa
bonne tolérance justifient son administration, dès l’arrivée
du patient en milieu hospitalier, si les résultats de l’analyse
toxicologique ne peuvent être obtenus dans les deux heures.
En effet, on peut évaluer, à partir d’un nomogramme établi
par Prescott le risque d’hépatotoxicité en fonction des
concentrations plasmatiques de paracétamol mesurées
entre la 4e et la 16e heure. La N-acétyl-cystéine (Fluimucil
: flacon de 5 grammes/25 mL pour administration intraveineuse)
peut être administrée selon le protocole suivant :
Dose de charge : 150 mg/kg dilués dans 250 mL de sérum
glucosé à 5 % en 15 minutes, puis 50 mg/kg dilués dans
500 mL de glucosé à 5 % à passer en 4 heures puis 100
mg/kg dilués dans 1 000 mL de glucosé à 5 % sur les 16
heures suivantes.
Suivant les résultats de la paracétamolémie dosée entre la
4e et la 16e heure, ce traitement sera poursuivi ou interrompu
de même que la surveillance biologique de la fonction hépatique.
Un traitement par NAC, même instauré tardivement, alors
qu’il existe déjà une cytolyse biologique, est encore susceptible
de limiter la gravité de l’atteinte hépatique.
Les autres traitements : lavage gastrique, administration
de charbon activé, n’ont pas d’intérêt vu l’efficacité
du traitement préventif de l’hépatite par la N-acétyl-cystéine.