Le terme « insuffisance hépatique fulminante » (fulminant liver failure) a été
proposé en 1970 par Trey et Davidson pour désigner un syndrome caractérisé
par la survenue d’une encéphalopathie dans les 8 semaines faisant suite à
l’apparition des premiers symptômes d’une maladie aiguë du foie.
Cette
définition est imparfaite pour trois raisons.
Premièrement, elle ne tient pas
compte du degré de gravité de l’insuffisance hépatique.
Deuxièmement, elle
se réfère à la date d’apparition des premiers symptômes, qui est le plus
souvent difficile à déterminer a posteriori avec précision.
Troisièmement, elle
ne reflète pas le caractère hétérogène de ce syndrome, comportant des formes
dont l’évolution est rapide (de l’ordre de quelques jours) et des formes dont
l’évolution est plus lente (plusieurs semaines).
Afin de pallier ces inconvénients, une nouvelle nomenclature a été proposée
en 1986, tenant compte de la gravité de l’insuffisance hépatique (mesurée par
le taux de prothrombine ou le facteur V), de l’existence d’une encéphalopathie
(complication ayant la valeur pronostique la plus importante), et de
l’intervalle de temps séparant l’apparition de l’ictère et l’apparition de
l’encéphalopathie (élément ayant également une valeur pronostique).
La
date d’apparition de l’ictère a été choisie comme référence chronologique car,
à l’inverse de la date d’apparition des premiers symptômes, elle est
habituellement facile à déterminer a posteriori par le malade ou par son
entourage.
Tenant compte de ces critères, l’insuffisance hépatique aiguë
sévère a été définie comme une baisse du taux de prothrombine (ou du
facteur V) au-dessous de 50 %de la normale, en l’absence d’encéphalopathie.
Cette définition individualise ainsi un groupe de malades à haut risque
d’encéphalopathie et pour lesquels un diagnostic précoce est capital.
À un
stade plus avancé, l’insuffisance hépatique fulminante définit une insuffisance
hépatique aiguë compliquée d’encéphalopathie, celle-ci survenant dans les 2 premières semaines faisant suite à l’apparition de l’ictère.
Une insuffisance
hépatique subfulminante définit une insuffisance hépatique aiguë compliquée
d’encéphalopathie entre 2 semaines et 3 mois après l’apparition de l’ictère.
Dans la littérature anglo-saxonne, cette nomenclature correspond à la
terminologie suivante : severe acute liver failure, fulminant liver failure et
subfulminant liver failure.
Cette nomenclature sera retenue dans la suite du
texte.
En 1993, une autre nomenclature été proposée, séparant les insuffisances
hépatiques aiguës en trois catégories selon que l’intervalle de temps entre
l’apparition de l’ictère et l’apparition de l’encéphalopathie est inférieur à
7 jours (insuffisance hépatique hyperaiguë), compris entre 8 et 28 jours
(insuffisance hépatique aiguë), ou compris entre 5 et 12 semaines
(insuffisance hépatique subaiguë).
Dans la littérature anglo-saxonne, cette
nomenclature correspond à la terminologie suivante : hyperacute liver failure,
acute liver failure et subacute liver failure.
Il est important de noter que selon
cette nomenclature, l’insuffisance hépatique n’existe qu’à partir du moment
où il apparaît une encéphalopathie et que, par conséquent, une baisse isolée
des facteurs de coagulation (même si elle est profonde) au cours d’une
maladie aiguë du foie n’est pas considérée comme étant le reflet d’une
insuffisance hépatique.
Il n’existe pas actuellement de consensus concernant
l’une ou l’autre de ces nomenclatures.
Mécanismes des insuffisances
hépatiques aiguës
:
A - Notions préliminaires
:
Les insuffisances hépatiques aiguës s’observent le plus souvent au décours
d’une hépatite aiguë d’origine virale, médicamenteuse ou toxique.
Toutefois,
les hépatites aiguës, dans leur ensemble, se compliquent rarement d’une
insuffisance hépatique.
En effet, parmi les malades qui ont une hépatite aiguë,
la plupart (plus de 95 %) guérissent spontanément et n’ont pas de séquelles.
Dans quelques cas cependant, une insuffisance hépatique s’installe, toujours
inaugurée par une baisse des facteurs de coagulation.
Il s’agit alors d’une
hépatite aiguë sévère dont l’évolution est, là encore, souvent favorable.
Chez
certains malades, l’insuffisance hépatique persiste, s’aggrave, et il apparaît
finalement une encéphalopathie.
Il s’agit alors d’une hépatite fulminante ou subfulminante.
Dans ce cas, les
chances de guérison sont plus faibles, mais non nulles. Lorsque l’insuffisance hépatique ne s’améliore pas
rapidement, une hypertension intracrânienne en rapport avec un oedème cérébral se développe.
La guérison spontanée est encore possible, mais très
souvent (environ 9 fois sur 10), l’hypertension intracrânienne est responsable
du décès si l’insuffisance hépatique n’est pas corrigée en urgence.
Dans de rares circonstances, une insuffisance hépatique aiguë peut se
constituer en l’absence de lésions d’hépatite aiguë.
Il peut s’agir d’une
hypoxie hépatique, d’une stéatose microvésiculaire ou d’une réduction
importante de la masse de parenchyme hépatique telle que celle qu’on observe
à la suite d’une hépatectomie majeure.
Comme dans le cas précédent,
l’insuffisance hépatique, si elle persiste et s’aggrave, expose au risque
d’encéphalopathie et d’hypertension intracrânienne.
B - Insuffisance hépatique : déséquilibre entre la nécrose
et la régénération
La destruction des hépatocytes et la régénération s’observent au cours de
toutes les formes d’hépatites aiguës cytolytiques, quelle qu’en soit la gravité.
Au total, l’insuffisance hépatique aiguë résulte d’un déséquilibre entre la
destruction des hépatocytes et la régénération.
Elle peut être liée soit à une
nécrose hépatocytaire trop étendue et/ou trop prolongée dans le temps,
dépassant les capacités de régénération, soit à une régénération insuffisante.
En pratique, des arguments expérimentaux suggèrent que l’insuffisance
hépatique aiguë est le plus souvent la conséquence d’une destruction hépatocytaire massive, qui dépasse des capacités de régénération par ailleurs
normales.
1- Mécanismes de la destruction des hépatocytes :
mort passive et apoptose
La destruction des hépatocytes se traduit histologiquement par des lésions
réunies sous le terme de nécrose hépatocytaire.
Cette nécrose peut en fait
résulter de deux mécanismes distincts.
Le premier mécanisme correspond à
une mort cellulaire « passive », telle qu’on l’observe par exemple au cours de
l’anoxie cellulaire.
Le second mécanisme correspond à une mort cellulaire
« active » ou apoptose.
L’apoptose est une mort cellulaire programmée qui
permet à l’état normal l’élimination dans l’organisme de cellules
endommagées ou sénescentes et leur remplacement par de nouvelles cellules.
L’apoptose peut être induite par de nombreux types de signaux parmi lesquels
on peut citer la libération de tumor necrosis factor á (TNF-alpha) ou l’action de
lymphocytes T cytotoxiques activés.
Ces signaux conduisent à l’activation
dans la cellule de portéases à cystéine appelées caspases.
Une fois activées,
les caspases clivent de nombreuses protéines cellulaires, ce qui détermine la
mort apoptotique de la cellule.
Ce processus est caractérisé
morphologiquement par une rétraction de la cellule, une fragmentation du
noyau, puis une fragmentation de la cellule elle-même en corps apoptotiques,
entourés de fragments de membrane cellulaire intacte contenant les résidus
des organites cellulaires.
Les fragments de membrane cellulaire intacte
préviennent en principe l’apparition d’une réaction inflammatoire de
voisinage, stimulée par la libération des composants intracellulaires. Les
corps apoptotiques sont phagocytés par les cellules épithéliales voisines ou
par des cellules mononucléées.
L’apoptose est un processus rapide qui se
développe en 2 à 4 heures.
Au cours de la réaction immunitaire à médiation cellulaire faisant intervenir
des lymphocytes T cytotoxiques, l’apoptose peut être initiée par deux
mécanismes différents.
Il s’agit d’une part du système perforine/granzyme et,
d’autre part, du système Fas/Fas Ligand.
Le système perforine/granzyme
consiste en une libération de perforines par les lymphocytes, conduisant à la
constitution de pores dans la membrane de la cellule cible et permettant
l’entrée dans cette cellule de granzyme qui active les caspases et aboutit à
l’apoptose. Fas est un récepteur membranaire présent à la surface de
nombreuses cellules, dont les hépatocytes.
Fas Ligand n’est présent qu’à la
surface des lymphocytesTcytotoxiques et des cellules natural killer activées.
La liaison Fas/Fas Ligand s’accompagne également d’une activation des
caspases qui détermine l’apoptose.
2- Mécanismes de la nécrose hépatocytaire
au cours des hépatites virales A et B
:
L’insuffisance hépatique aiguë est la conséquence directe de l’étendue des
lésions hépatocytaires, correspondant le plus souvent à une nécrose des
hépatocytes.
Au cours des hépatites virales A et B, la nécrose des hépatocytes
ne semble pas directement liée aux effets cytopathogènes du virus.
En effet,
les virus des hépatites A et B sont peu (ou pas) cytopathogènes.
Au cours de
ces hépatites, la nécrose des hépatocytes semble liée à la réponse immunitaire
de l’hôte vis-à-vis des cellules infectées par le virus.
Les hépatocytes infectés
par le virus expriment à leur surface des protéines virales.
Ces protéines
virales sont reconnues comme étrangères par le système immunitaire, et sont
la cible d’une réponse immunitaire à médiation cellulaire, faisant intervenir
des lymphocytes T cytotoxiques.
Cette réaction immunitaire conduit en outre
à une destruction des cellules infectées par des virus par des mécanismes
d’apoptose.
Ainsi, l’apoptose peut être considérée comme un mécanisme de
défense naturel de l’organisme contre les infections virales.
L’apoptose
conduit en effet à la destruction des cellules infectées et par conséquent à
l’interruption de la réplication virale.
Au cours d’une hépatite virale aiguë, on
peut ainsi imaginer qu’une réaction d’apoptose limitée conduise à la guérison
alors qu’une induction massive de l’apoptose conduit à une destruction
étendue intéressant les hépatocytes infectés et, éventuellement, des
hépatocytes sains adjacents, ayant pour conséquence une insuffisance
hépatique aiguë.
Il a été montré que la nécrose massive observée au cours des hépatites
fulminantes et subfulminantes résulte au moins en partie de l’activation du
complément et de la fixation du complexe membranaire d’attaque du
complément sur la membrane cellulaire.
La fixation de ce complexe
s’accompagne d’altérations majeures de la membrane et, finalement, de la
nécrose de la cellule.
Il semble qu’au cours des hépatites fulminantes et subfulminantes, il existe un déficit en protéines régulatrices du complément,
favorisant l’extension de la nécrose.
3- Mécanismes de la nécrose hépatocytaire au cours
des hépatites médicamenteuses
:
La nécrose des hépatocytes observée au cours des hépatites médicamenteuses
peut être liée à deux principaux mécanismes.
Le premier mécanisme est
caractérisé par la formation de métabolites réactifs, provenant du
métabolisme des médicaments par les hépatocytes et pouvant altérer les
composants de la cellule.
Il s’agit alors d’hépatites toxiques. Le second
mécanisme est caractérisé par la constitution par les médicaments ou leurs
métabolites d’altérations de certaines protéines constitutives de la cellule.
Les
protéines ainsi modifiées sont reconnues comme étrangères par le système
immunitaire et sont la cible d’une réaction immunitaire.
Il s’agit alors
d’hépatites immunoallergiques.
Au cours des hépatites toxiques, le métabolisme des médicaments par les
cytochromes P450 aboutit à la formation de métabolites réactifs.
Il s’agit de
composés instables qui ont la propriété de former des liaisons covalentes avec
des molécules constitutives de la cellule.
Il peut résulter de ces liaisons des
altérations du réseau microfilamentaire ayant pour conséquence une
déformation puis une rupture de la membrane plasmique, une inactivation des
calcium translocases ayant pour conséquence une augmentation de la
concentration de calcium ionisé cytosolique et l’activation d’enzymes telles
que des protéases et des endonucléases.
Les protéases et les endonucléases
ainsi activées sont responsables d’altérations des composants cellulaires et de
la mort cellulaire.Àl’état normal, il existe des mécanismes de protection vis-à-vis des métabolites réactifs.
Ces mécanismes associent l’inhibition des
cytochromes P450 par le métabolite réactif qu’il a formé (évitant ainsi la
formation d’autres métabolites réactifs), le réarrangement de plusieurs
métabolites réactifs entre eux (conduisant à la formation de composés stables)
et la combinaison des métabolites réactifs au glutathion hépatique (sous
l’influence des glutathion-S transférases).
On ne connaît pas précisément les
mécanismes par lesquels certains individus ayant une hépatite toxique
développent une nécrose hépatocytaire étendue, responsable d’une
insuffisance hépatique, alors que chez d’autres individus la nécrose
hépatocytaire reste limitée.
A priori, ces mécanismes peuvent correspondre soit à la production d’une quantité anormalement importante de métabolites
réactifs (dépassant les capacités de défense), soit à une réduction des capacités
de défense vis-à-vis de ces métabolites.
Il existe à l’état normal de nombreux isoenzymes des cytochromes P450, dont
la répartition est variable selon les individus.
Cette répartition est
génétiquement déterminée.
Certains individus ayant constitutionnellement un
taux élevé de l’isoenzyme responsable de la production de métabolites
réactifs d’un médicament donné, ont ainsi une prédisposition génétique à
l’hépatotoxicité de ce médicament.
Certains facteurs acquis prédisposent
également à l’hépatotoxicité de ces médicaments. Ainsi, l’induction des
cytochromes P450 par la prise concomitante de médicaments inducteurs
enzymatiques (tels que la rifampicine) ou par l’ingestion d’alcool, favorise la
production d’une quantité importante de métabolites réactifs.
De même, la
déplétion des réserves hépatiques de glutathion, telle qu’on l’observe au cours
du jeûne, de la dénutrition, de la consommation excessive d’alcool ou de la
grossesse, réduit les capacités de défense vis-à-vis des métabolites réactifs et
augmente le risque de survenue d’une hépatite toxique.
Les facteurs qui
contribuent à majorer l’étendue de la nécrose hépatocytaire et qui favorisent
la survenue d’une insuffisance hépatique au cours d’une hépatite
médicamenteuse toxique.
Au cours des hépatites immunoallergiques, on pense que le métabolisme du
médicament conduit à la dégradation de certaines protéines hépatiques.
Ces
protéines comportent des peptides dégradés qui peuvent être présentés par des
cellules présentatrices d’antigènes aux lymphocytes T auxiliaires, en
association aux molécules HLA de classe II.
Les peptides dégradés sont
reconnus comme différents du soi.
Ils pourraient ainsi être à l’origine d’une
réaction immunitaire à médiation cellulaire faisant intervenir des
lymphocytes T cytotoxiques et conduisant à la nécrose des hépatocytes
présentant à leur surface ces mêmes peptides dégradés, en association aux
antigènes HLAde classe I.
Il est probable qu’une partie au moins des lésions
des hépatocytes est liée à une induction de l’apoptose par la réaction
immunitaire.
Toutefois, l’influence de l’apoptose au cours des hépatites
médicamenteuses n’est pas connue avec précision.
Il est important de noter que la nécrose des hépatocytes, qu’elle soit liée à des
mécanismes toxiques ou immunoallergiques, n’est pas la seule lésion qui
puisse être à l’origine d’une insuffisance hépatique aiguë.
En effet, certains
médicaments qui inhibent la â-oxydation mitochondriale peuvent aboutir à la
constitution d’une stéatose microvésiculaire massive, elle-même responsable
d’une insuffisance hépatique aiguë.
Des anomalies constitutionnelles du
génome mitochondrial, telles qu’on peut les observer dans la population
générale, peuvent rendre certains individus particulièrement exposés à la toxicité mitochondriale des médicaments.
3- Régénération hépatique
:
Les hépatites aiguës « communes » ne s’accompagnent pas d’insuffisance
hépatique, car au cours de ces hépatites la nécrose hépatocytaire est compensée
par la régénération.
La régénération correspond à une série
de mitoses des hépatocytes non nécrosés aboutissant à une reconstitution
rapide de la masse de parenchyme hépatique fonctionnel.
Les mitoses des hépatocytes sont initiées par l’activation de proto-oncogènes
(c-fos, c-jun et c-myc), puis d’oncogènes de la famille ras. L’activation de
ces oncogènes (marquée par l’apparition de leur acide ribonucléique [ARN]
messager correspondant), conduit à une synthèse d’acide désoxyribonucléique
(ADN) par les hépatocytes.
Il a été démontré que la synthèse
d’ADN, qui précède immédiatement la mitose, augmente dans les heures qui
suivent une réduction de la masse de parenchyme fonctionnel. Elle est
maximale entre le quatrième et le cinquième jour.
La régénération hépatocytaire est stimulée par des facteurs de croissance dont
les principaux sont l’epidermal growth factor (EGF), le transforming growth
factor á (TGFá) et l’hepatocyte growth factor (HGF).
Parmi ces facteurs
de croissance, l’HGF est celui qui stimule le plus fortement la régénération
hépatique.
L’HGF, synthétisé par le pancréas exocrine et la muqueuse du tube
digestif, est transporté au foie par la veine porte, ce qui explique en partie le
rôle hépatotrophique du sang portal.
Lorsque la régénération a permis de restaurer la masse de parenchyme
hépatique fonctionnel, la prolifération des hépatocytes s’interrompt.
Le transforming growth factor â (TGFâ), qui inhibe la prolifération des
hépatocytes, semble être un des principaux médiateurs de l’interruption de la
régénération.
Cependant, les mécanismes qui conduisent à l’interruption de
la régénération après la reconstitution de la masse de parenchyme hépatique
ne sont pas connus avec précision.
La fibrose, observée au cours des maladies chroniques du foie réduit les
capacités de régénération.
Les capacités de régénération sont particulièrement
réduites lorsqu’il existe une cirrhose, associée par définition à des
modifications de l’architecture du parenchyme hépatique.
On peut ainsi
expliquer l’apparition parfois plus rapide d’une insuffisance hépatique chez
des malades qui ont une affection aiguë du foie surajoutée à une affection
chronique.
Qu’il existe ou non des lésions chroniques du foie, les infections
bactériennes semblent également ralentir la régénération hépatique.
C - Encéphalopathie
:
L’encéphalopathie peut s’observer au cours des maladies aiguës du foie
comme au cours des maladies chroniques lorsque celles-ci sont parvenues au
stade de cirrhose.
Au cours des cirrhoses, l’encéphalopathie peut être liée soit
à la présence de dérivations vasculaires portosystémiques (résultant de
l’hypertension portale), soit à l’insuffisance hépatique, soit à l’association des
deux (comme c’est souvent le cas).
Au cours de l’insuffisance hépatique
aiguë, l’encéphalopathie est essentiellement liée à l’insuffisance hépatique.
En effet, il existe souvent une hypertension portale modérée.
Toutefois,
celle-ci s’étant développée dans un intervalle de temps court, elle ne conduit
pas à l’apparition de dérivations vasculaires portosystémiques volumineuses
comme celles qu’on observe au cours des maladies chroniques du foie.
Les mécanismes de l’encéphalopathie métabolique qui accompagne
l’insuffisance hépatique ne sont pas connus avec précision.
Ils sont
probablement multiples et semblent correspondre :
– à une augmentation de la perméabilité de la barrière hématoencéphalique ;
– aux effets de neurotoxines ;
– à des perturbations de la neurotransmission (résultant d’anomalies du
métabolisme des neurotransmetteurs physiologiques) ;
– ou à des perturbations du métabolisme cérébral (résultant d’une carence en
nutriments).
Au cours de l’insuffisance hépatique, il semble exister une augmentation non
spécifique de la perméabilité de la barrière hématoencéphalique.
Celle-ci peut
aboutir à la constitution d’un oedème cérébral (dont les mécanismes sont
discutés au chapitre suivant) ainsi qu’à une augmentation de l’exposition du
cerveau à diverses substances neurotoxiques présentes dans le sang.
En plus
de l’augmentation globale (et non spécifique) de la perméabilité de la barrière hématoencéphalique, il existe des anomalies spécifiques de certains systèmes
de transport, en particulier des systèmes permettant le transport des acides
aminés au cerveau.
Ainsi, au cours de l’insuffisance hépatique, des anomalies
du transport d’acides aminés (tels que la tyrosine et la phénylalanine) qui sont
nécessaires à la synthèse de neurotransmetteurs, ou des anomalies du
transport d’autres acides aminés (tels que le glutamate et la glycine), qui sont
eux-mêmes des neurotransmetteurs, peuvent aboutir à des perturbations de la
neurotransmission.
L’ammoniaque, dont la concentration sérique est habituellement augmentée
au cours de l’insuffisance hépatique, est une substance neurotoxique qui
induit plusieurs types de perturbations.
L’ammoniaque induit des
altérations du transport de certains acides aminés vers le cerveau, diminue la
concentration cérébrale du glutamate (acide aminé neurotransmetteur
activateur) et altère directement l’activité électrique neuronale.
D’autres
substances, telles que les composés phénoliques, semblent également pouvoir
jouer le rôle de neurotoxiques au cours de l’insuffisance hépatique aiguë.
Au cours de l’encéphalopathie, il semble exister un déséquilibre entre les
systèmes neurotransmetteurs inhibiteurs (dont l’activité est globalement
augmentée) et les systèmes neurotransmetteurs activateurs (dont l’activité est
globalement diminuée).
L’acide gamma-aminobutyrique (GABA) est un
neurotransmetteur inhibiteur, dont l’activité semble augmentée au cours de
l’insuffisance hépatique.
L’augmentation de l’activité GABA-ergique
pourrait être liée d’une part à une augmentation des concentrations cérébrales
de GABA(peut-être en rapport avec l’augmentation de la perméabilité de la
barrière hématoencéphalique) et, d’autre part, à une augmentation du nombre
de récepteurs au GABA.
L’activité des récepteurs GABA-ergiques peut être
modulée par les récepteurs aux benzodiazépines.
La stimulation de ces
derniers par des médicaments appartenant à la classe des benzodiazépines
(tels que le diazépam), augmente le tonus GABA-ergique.
Il pourrait exister
au cours de l’encéphalopathie une augmentation de la concentration cérébrale
de substances endogènes, proches des benzodiazépines, susceptibles de
stimuler les récepteurs aux benzodiazépines et d’augmenter ainsi le tonus GABA-ergique.
L’augmentation de la concentration de ces substances
pourrait être liée à un métabolisme hépatique insuffisant.
La possibilité d’une
activation anormalement importante des récepteurs aux benzodiazépines au
cours de l’encéphalopathie a conduit à proposer l’utilisation d’antagonistes
des benzodiazépines (tels que le flumazénil).
En pratique, ces antagonistes
semblent avoir une efficacité faible ou nulle sur les manifestations cliniques
de l’encéphalopathie.
Comme le tonus GABA-ergique, le tonus
sérotoninergique pourrait être augmenté au cours de l’insuffisance hépatique.
Le glutamate est un important neurotransmetteur activateur.
L’hyperammoniémie s’accompagne d’une déplétion du glutamate cérébral et
pourrait ainsi perturber la neurotransmission glutamatergique.
La
neurotransmission dopaminergique semble également perturbée au cours de
l’encéphalopathie.
Des amines, dont la concentration est augmentée au cours
de l’insuffisance hépatique, peuvent entrer en compétition avec les
catécholamines pour la fixation sur leur récepteur.
Ces « faux
neurotransmetteurs », qui sont moins fortement stimulants que les
neurotransmetteurs normaux, pourraient ainsi inhiber la neurotransmission
dopaminergique.
Des altérations du métabolisme cérébral ont été rapportées dans des modèles
expérimentaux d’encéphalopathie chez l’animal.
L’hypoglycémie, parfois
observée au stade terminal de l’insuffisance hépatique pourrait contribuer à
ces altérations.
L’existence d’altérations du métabolisme cérébral au cours de
l’insuffisance hépatique n’est pas clairement établie chez l’homme.
D - Hypertension intracrânienne
:
L’hypertension intracrânienne survient à un stade avancé de l’insuffisance
hépatique aiguë.
Elle résulte principalement d’une augmentation du volume
du parenchyme cérébral et, plus accessoirement, d’une augmentation du
volume du compartiment sanguin.
L’augmentation du volume du parenchyme cérébral est la conséquence d’un
oedème cérébral diffus avec une accumulation d’eau siégeant à la fois dans le
secteur interstitiel et dans les cellules du parenchyme cérébral.
L’augmentation de la perméabilité de la barrière hématoencéphalique conduit
à l’accumulation de liquide provenant du compartiment plasmatique dans le
secteur interstitiel (oedème interstitiel).
L’accumulation de liquide dans les
cellules du parenchyme cérébral conduit quant à elle à un oedème cellulaire
(ou cytotoxique).
L’oedème cellulaire est prédominant. Il peut être
visualisé en microscopie électronique sous la forme d’une augmentation du
volume des cellules gliales.
Dans le cytoplasme de ces cellules, on peut observer une augmentation de la taille des mitochondries et du réticulum
endoplasmique.
Ces anomalies sont associées à une dilatation des espaces
extracellulaires, traduisant l’oedème interstitiel.
Les mécanismes de l’oedème cérébral (comme ceux de l’encéphalopathie
hépatique) ne sont pas connus avec précision.
Les mécanismes qui ont été
proposés sont :
– une inhibition de la Na +/K + adénosine triphosphatase membranaire des
cellules du parenchyme cérébral par des composés toxiques ;
– une augmentation de la perméabilité de la barrière hématoencéphalique par
ces mêmes composés toxiques ;
– l’effet osmotique de la glutamine qui s’accumule dans les cellules
gliales ;
– et une toxicité directe sur les astrocytes.
Ces quatre mécanismes sont probablement associés.
L’oedème cérébral s’accompagne d’une hypertension intracrânienne qui
diminue la pression de perfusion cérébrale (différence entre la pression
artérielle moyenne et la pression intracrânienne).
On a montré que lorsqu’il
existe un oedème cérébral, il existe également une perte de l’autorégulation
du débit sanguin cérébral (c’est-à-dire de la capacité de maintenir un débit
sanguin cérébral constant dans une large plage de variation de la pression
artérielle, par une vasoconstriction ou une vasodilatation réflexe).
En
raison de la perte de cette autorégulation, une diminution de la pression
artérielle risque d’être à l’origine d’une réduction du débit sanguin cérébral
au-dessous du seuil critique de perfusion.Àl’inverse, une augmentation de la
pression artérielle risque de s’accompagner d’une augmentation du débit
sanguin cérébral et par conséquent d’une augmentation de la pression
intracrânienne, qui à son tour compromet la perfusion cérébrale.
La perte de l’autorégulation du débit sanguin cérébral semble constante chez
les malades normo- ou hypercapniques.
L’hypocapnie permet de restaurer
transitoirement une réactivité partielle aux variations de la pression artérielle.
Elle s’accompagne d’une réduction du calibre des artères cérébrales et
diminue par conséquent la pression intracrânienne.
Cependant, une
hypocapnie profonde et prolongée peut être à l’origine d’une ischémie
cérébrale.
La progression de l’hypertension intracrânienne expose rapidement à deux
risques vitaux.
Il s’agit d’une part d’un engagement cérébral et, d’autre part,
d’une hypoxie cérébrale secondaire à la réduction extrême de la perfusion
cérébrale.
Syndrome d’insuffisance hépatique aiguë
:
Le syndrome d’insuffisance hépatique aiguë associe des manifestations
directement liées aux lésions hépatiques (telles que l’ictère ou la diminution
des facteurs de coagulation) et des manifestations traduisant le
dysfonctionnement d’autres organes.
Il s’agit essentiellement de
manifestations neurologiques (dont les mécanismes ont été discutés au
chapitre précédent), cardiovasculaires et rénales.
A - Manifestations directement liées aux lésions hépatiques
:
L’ictère est presque constant au cours des insuffisances hépatiques aiguës.
Il
peut cependant être absent lorsque l’insuffisance hépatique s’installe très
rapidement (comme c’est le cas au cours des hépatites toxiques au
paracétamol). Un fétor hépatique peut être présent.
Le plus souvent, le foie
n’est pas palpable car il est de taille normale ou réduite.
La palpation du foie
est indolore dans la plupart des cas.
Des douleurs de l’hypocondre droit
suggèrent l’existence d’un obstacle sus-hépatique et d’une congestion.
L’hypertension portale est presque constante chez les malades atteints
d’insuffisance hépatique aiguë.
Toutefois, l’élévation du gradient de pression
sinusoïdale reste habituellement modérée.
Une ascite de faible abondance
peut être observée.
Elle est plus fréquente au cours des hépatites subfulminantes (dont l’évolution est prolongée) qu’au cours des hépatites
fulminantes (dont l’évolution est plus brève).
L’activité sérique de l’aspartate aminotransférase (ASAT) et celle de l’alanine
aminotransférase (ALAT) sont constamment élevées.
La bilirubinémie est
élevée avec une prédominance de bilirubine conjuguée.
L’activité de la gamma-glutamyl transpeptidase (çGT) est élevée.
La phosphatase alcaline est
normale ou modérément augmentée.
L’albuminémie est habituellement
normale.
Elle peut être abaissée lorsque l’insuffisance hépatique est
prolongée, au cours des hépatites subfulminantes.
La baisse des facteurs de coagulation est constante, même en l’absence
d’ictère.
Elle intéresse à la fois les facteurs dépendant de la vitamine K (II,
VII et IX) et les facteurs ne dépendant pas de la vitamine K (V).
Elle
s’accompagne d’un allongement du temps de Quick.
Occasionnellement, il
peut exister une coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), également
marquée par une baisse des facteurs de coagulation mais aussi par une baisse
des plaquettes, la présence de complexes solubles et l’élévation de la concentration des D-dimères dans le sang.
Dans ce cas, il est impossible de
déterminer précisément la part de diminution des facteurs de coagulation qui
revient à un défaut de production (du fait de l’insuffisance hépatique) et la
part qui revient à un excès de consommation (du fait de la CIVD).
Toutefois,
l’insuffisance hépatique est habituellement prédominante.
Malgré la diminution importante des facteurs de coagulation, les hémorragies
spontanées sont rares.
Lorsqu’elles surviennent, les hémorragies sont
iatrogènes dans la quasi-totalité des cas.
Elles sont le plus souvent secondaires
à des ponctions artérielles accidentelles, lors de la mise en place de cathéters
centraux.
Parfois, elles sont secondaires à un ulcère gastrique ou duodénal.
B - Encéphalopathie et hypertension intracrânienne
:
Les manifestations cliniques de l’encéphalopathie ne sont pas spécifiques de
l’insuffisance hépatique.
Elles peuvent être classées en quatre grades de
gravité croissante.
Le grade 1 est caractérisé par l’absence de troubles de
la conscience et la présence d’un astérixis.
Le grade 2 est caractérisé par la
présence d’une confusion.
Habituellement, l’activité psychique est ralentie.
Parfois, au contraire, il existe une hyperactivité psychomotrice.
À ce stade,
une palilalie est fréquente.
Le grade 3 est caractérisé par la présence d’un état
stuporeux avec une somnolence marquée et un discours inapproprié.
Le
grade 4 est caractérisé par la présence d’un coma. Le coma s’accompagne
habituellement d’une hypertonie et d’une polypnée.
Les modifications électroencéphalographiques ne sont pas spécifiques de
l’encéphalopathie.
Elles sont précoces et apparaissent avant les premières
manifestations cliniques.
Ces modifications sont initialement constituées par
un ralentissement global du tracé et une augmentation de son amplitude. Le
ralentissement est plus marqué lorsqu’il existe un coma.
Il est important de noter que chez des malades atteints d’insuffisance
hépatique aiguë, de nombreux facteurs extrahépatiques peuvent induire ou
aggraver une encéphalopathie.
Le facteur principal est l’administration de
médicaments sédatifs (tels que des benzodiazépines ou des neuroleptiques),
dont le métabolisme et l’élimination sont fortement ralentis par l’insuffisance
hépatique.
Il peut également s’agir de facteurs métaboliques parmi lesquels
on peut citer l’hypoglycémie, l’hypophosphorémie, l’insuffisance rénale,
l’anémie et l’hypoxémie.
Les manifestations de l’hypertension intracrânienne surviennent après
l’installation du coma.
Ces manifestations peuvent être une tachycardie ou
une tachyarythmie, des poussées hypertensives, une polypnée (survenant
souvent en salves de quelques minutes), une fièvre, des sueurs profuses, des
crises convulsives généralisées et des mouvements de décérébration.
Ces
derniers sont des mouvements à type d’extension et de pronation et qui
peuvent apparaître spontanément ou être déclenchés par des stimulations nociceptives.
La survenue d’une asymétrie pupillaire doit faire craindre un
engagement cérébral.
La pression intracrânienne peut être mesurée par la mise en place d’un capteur
de pression épidural, à travers la boîte crânienne.
La mise en place de capteurs sous-duraux et intraparenchymateux est contre-indiquée en raison de la baisse
des facteurs de coagulation et du risque hémorragique.
L’utilité des capteurs
de pression chez les malades atteints d’insuffisance hépatique aiguë est
controversée.
Le principal avantage de ces capteurs est de permettre une
mesure continue de la pression intracrânienne.
Leurs principaux
inconvénients sont :
– le manque de fiabilité de la mesure de pression par les capteurs épiduraux ;
– le peu de moyens dont on dispose pour abaisser la pression intracrânienne
lorsque l’on constate qu’elle est élevée ;
– et le risque de complication hémorragique.
Malgré la position (en principe) épidurale de l’extrémité de ces capteurs, des
complications hémorragiques graves ont été rapportées dans 5 à 10% des
cas.
C - Insuffisance rénale aiguë
:
Une insuffisance rénale aiguë, marquée par une élévation de la créatininémie
et une diminution de la clairance de la créatinine, est présente chez 50 à 80 %
des malades atteints d’insuffisance hépatique aiguë.
Dans la majorité des cas,
il s’agit d’une insuffisance rénale de type fonctionnel.
Celle-ci est caractérisée
par une oligurie, une natriurèse basse et l’absence d’élévation de la
protéinurie.
Elle est la conséquence d’une vasoconstriction rénale et d’une
diminution du flux sanguin rénal.
Si elle est prolongée dans le temps, la
réduction de la perfusion rénale peut aboutir à la constitution de lésions
organiques correspondant à une nécrose tubulaire aiguë.
Comme
l’insuffisance hépatique, l’insuffisance rénale contribue au ralentissement du
métabolisme et de l’élimination des médicaments.
Elle favorise donc
l’apparition d’une encéphalopathie.
Par ailleurs, lorsque l’insuffisance
hépatique est très sévère, l’existence d’une insuffisance rénale concomitante
favorise l’apparition d’une hypertension intracrânienne et augmente
fortement la mortalité.
Comme pour l’encéphalopathie, des facteurs iatrogènes peuvent être à
l’origine de l’insuffisance rénale aiguë ou l’aggraver.
Les principaux facteurs
iatrogènes sont l’administration d’antibiotiques appartenant à la famille des aminoglycosides, l’injection de produits de contraste iodés et la
déshydratation.
L’administration de mannitol chez des malades ayant des
signes d’hypertension intracrânienne, peut aggraver l’insuffisance rénale
lorsqu’il existe une oligurie et une élévation de la créatininémie au-delà de
150 ímol/L.
D + Manifestations cardiovasculaires
:
L’insuffisance hépatique aiguë s’accompagne d’un syndrome d’hypercinésie cardiocirculatoire associant une vasodilatation, une diminution des
résistances vasculaires périphériques, une tachycardie et une augmentation
du débit cardiaque.
L’évolution de l’hypercinésie est parallèle à celle de
l’insuffisance hépatique.
La nature des substances vasodilatatrices
responsables de ce syndrome n’est pas connue avec précision.
E - Manifestations respiratoires
:
L’encéphalopathie s’accompagne habituellement d’une hyperventilation.
Cette hyperventilation est responsable d’une hypocapnie et d’une alcalose
respiratoire.
Lors des poussées d’hypertension intracrânienne, on peut
observer une accentuation transitoire de l’hyperventilation.
L’absence
d’hyperventilation et d’hypocapnie chez un malade dans le coma suggère que
ce coma est, au moins en partie, secondaire à la prise de sédatifs.
F - Désordres acidobasiques et hydroélectrolytiques
:
Parmi les désordres de l’équilibre acidobasique, l’alcalose respiratoire,
secondaire à l’hypocapnie, est la perturbation la plus fréquente.
Cependant,
une acidose métabolique peut s’observer, en particulier lorsqu’il existe de
façon concomitante une insuffisance rénale aiguë ou une insuffisance
circulatoire.
De plus, l’acidose métabolique est fréquente chez les malades
ayant une intoxication par le paracétamol.
Il s’agit alors d’un facteur de
mauvais pronostic.
Une acidose respiratoire, secondaire à une hypoventilation alvéolaire, peut
être observée.
Elle survient principalement chez les malades qui ont reçu des
médicaments sédatifs déprimant les centres respiratoires.
Elle s’accompagne
d’une hypercapnie.
L’hypercapnie est responsable d’une vasodilatation et
risque donc de majorer l’hypertension intracrânienne en augmentant le débit
sanguin cérébral.
Une rétention hydrosodée est fréquente.
Elle peut conduire à la constitution
d’oedèmes et favoriser l’apparition d’une ascite.
Les hyponatrémies
profondes peuvent contribuer à l’apparition d’une encéphalopathie.
Une hypophosphorémie est fréquente, particulièrement chez les malades qui
ont une intoxication par le paracétamol.
Elle peut être majorée par
l’administration intraveineuse de grandes quantités de solutés glucosés.
L’hypophosphorémie peut contribuer à l’apparition d’une encéphalopathie.
La glycémie est habituellement normale, même lorsque l’insuffisance
hépatique est profonde.
Au stade ultime de l’insuffisance hépatique, il peut
apparaître des épisodes d’hypoglycémie. Ces épisodes peuvent également
contribuer à l’encéphalopathie.
L’ammoniémie artérielle est fréquemment
élevée. Il ne s’agit pas d’un facteur pronostique.
Il n’est donc pas nécessaire
d’en faire des mesures répétées.
G - Infections bactériennes et fongiques
:
Les malades atteints d’insuffisance hépatique aiguë ont une sensibilité élevée
aux infections bactériennes.
Cette sensibilité résulte en outre d’une
diminution des mécanismes d’opsonisation, d’une diminution de l’activité du
complément, d’une diminution de la fonction des cellules de Kupffer et d’une
réduction de l’adhésion des polynucléaires neutrophiles.
Les infections
bactériennes constituent la seconde cause de mortalité après l’oedème
cérébral.
Il s’agit principalement de pneumopathies infectieuses (dont
certaines sont liées à une inhalation), d’infections urinaires et de septicémies.
La fréquence élevée des infections nosocomiales impose de limiter autant que
possible les procédures invasives (telles que la mise en place de cathéters
veineux centraux).
Les infections fongiques sont plus rares que les infections bactériennes.
Il
s’agit principalement d’infections disséminées. Les infections fongiques sont
associées à une mortalité très élevée.
Diagnostic
:
Le diagnostic d’une insuffisance hépatique fulminante ou subfulminante,
associée par définition à une encéphalopathie, est habituellement facile à faire
devant l’association d’un ictère, d’une confusion, d’une somnolence ou d’un coma, d’une importante élévation des transaminases et d’une diminution des
facteurs de coagulation.
Toutefois, les manifestations neuropsychiques en
rapport avec l’encéphalopathie peuvent conduire à porter à tort le diagnostic
de désordre psychiatrique aigu, en particulier lorsque l’ictère est absent.
Cette
confusion peut conduire à l’administration de médicaments sédatifs qui, du
fait de l’insuffisance hépatique sous-jacente, risquent d’aggraver
l’encéphalopathie.
Par définition, le diagnostic d’insuffisance hépatique aiguë sévère (sans
encéphalopathie) repose sur la seule diminution au-dessous de 50 % de la
normale du taux de prothrombine ou du facteur V au cours d’une maladie
aiguë du foie.
Du fait du manque de spécificité des manifestations cliniques
qui l’accompagnent, le diagnostic d’insuffisance hépatique aiguë sévère peut
être difficile à suspecter cliniquement.
La présence de nausées ou de
vomissements, ainsi que d’arthralgies et de fièvre (qui accompagnent souvent
les hépatites virales), peut conduire à porter à tort le diagnostic de troubles
digestifs fonctionnels, de gastroentérite virale ou de rhumatisme
inflammatoire.
Cette confusion conduit fréquemment à la prescription de
traitements symptomatiques.
Les médicaments le plus souvent prescrits sont
l’acide acétylsalicylique, le paracétamol, les anti-inflammatoires non
stéroïdiens, les corticoïdes, les modificateurs du transit et les antiémétiques
appartenant à la famille des neuroleptiques.
Comme pour les sédatifs, les
effets délétères de ces médicaments peuvent être très marqués en raison de
l’insuffisance hépatique aiguë, méconnue si l’on ne mesure pas le taux de
prothrombine.
Étiologies
:
Les insuffisances hépatiques aiguës résultent le plus souvent de lésions du foie
correspondant à celles d’une hépatite aiguë.
Ces lésions s’observent au cours
d’hépatites virales, médicamenteuses, toxiques ou auto-immunes.
Dans
certains cas, l’insuffisance hépatique aiguë est la conséquence de lésions
d’une nature différente de celles des hépatites aiguës.
Il peut alors s’agir soit
d’une nécrose hypoxique, soit d’une stéatose microvésiculaire.
A - Hépatite aiguë A
:
La plupart des hépatites aiguësAsont asymptomatiques.
On estime que chez
les malades qui ont une hépatite aiguëAsymptomatique (et qui représentent
donc une minorité des malades ayant une hépatite aiguë A), le risque
d’hépatite fulminante est de l’ordre de 0,01 %.
Le risque d’évolution
fulminante au cours d’une hépatiteAest donc extrêmement faible.
Selon les
séries, les hépatites A représentent 1,5 à 20 % de l’ensemble des hépatites
fulminantes d’origine virale.
Chez un malade atteint d’insuffisance hépatique aiguë, le diagnostic
d’hépatite A repose sur la mise en évidence dans le sérum de
l’immunoglobuline M (IgM) anti-VHA (virus de l’hépatite A).
Au cours de
ces hépatites, une fièvre élevée (au-delà de 39 °C) peut être observée
transitoirement.
Le pronostic des hépatites fulminantes A est globalement
meilleur que celui des hépatites fulminantes B et des hépatites fulminantes ou subfulminantes médicamenteuses.
En effet, en l’absence de transplantation
hépatique, la survie des malades atteints d’hépatite fulminante A est d’au
moins 50 %.
B - Hépatite aiguë B et réactivation aiguë
d’une hépatite chronique B
:
Une insuffisance hépatique aiguë peut survenir à la suite d’une infection par
le VHB dans deux circonstances.
La première correspond à une infection
aiguë par le VHB.
La seconde correspond à la réactivation brutale d’une
infection chronique par le VHB (qu’elle soit connue ou non).
Chez les malades qui ont une forme symptomatique d’hépatite B, le risque
d’hépatite fulminante est de l’ordre de 1 %.
Selon les séries, les hépatites
aiguës B représentent 50 à 70 %des causes d’hépatites fulminantes d’origine
virale.
Dans les pays occidentaux, les malades atteints d’hépatite
fulminante B sont principalement des toxicomanes, des partenaires sexuels
de toxicomanes ou des partenaires sexuels de porteurs asymptomatiques du VHB, qui n’ont pas été vaccinés contre le VHB.
Le diagnostic d’hépatite aiguë B repose sur la mise en évidence, dans le
sérum, de l’anticorps de type IgM dirigé contre l’antigène HBc (IgM anti-
HBc) du VHB.
Il est important de noter que l’antigène HBs est absent chez
environ 20 % des malades ayant une hépatite B fulminante.
L’absence de
l’antigène HBs ne permet donc pas d’écarter le diagnostic.
Chez la plupart de
ces malades, le génome du VHB (VHB-ADN) est devenu indétectable dans
le sérum ou est présent à un titre très faible, ce qui témoigne d’une réplication
virale absente ou faible.
Chez les malades dont l’encéphalopathie et
l’insuffisance hépatique se corrigent spontanément, le risque d’évolution
secondaire vers une hépatite chronique B est faible.
De même, chez les
malades qui doivent être transplantés en urgence, le risque de récidive de
l’infection par le VHB est faible.
En l’absence de transplantation, la survie des malades atteints d’hépatite fulminanteBest de l’ordre de 20 %.
La survie des malades chez qui l’antigène HBs est absent semble un peu supérieure à celle des malades chez qui
l’antigène HBs est présent.
Il a été suggéré que l’infection par un virus mutant, ayant perdu la capacité de
coder pour l’antigène HBe, favorisait l’apparition d’une hépatite fulminante.
Cette hypothèse n’a pas été démontrée.
Une insuffisance hépatique aiguë peut survenir chez un porteur chronique du VHB à l’occasion d’une réactivation (c’est-à-dire de la reprise de la
réplication virale jusqu’alors interrompue). Les réactivations sont favorisées
par un état d’immunodépression.
Elles s’observent donc plus fréquemment
chez les malades ayant une infection concomitante par le virus de
l’immunodéficience humaine (VIH), un cancer, une chimiothérapie ou un
traitement immunosuppresseur au long cours.
Chez certains malades, les
réactivations surviennent spontanément, sans facteur déclenchant
identifiable.
Les manifestations cliniques des réactivations peuvent être similaires à celles
d’une hépatite aiguë B.
De plus, lors des réactivations, l’IgM anti-HBc est le
plus souvent présent dans le sérum.
Il peut donc être difficile de différencier
une hépatite aiguë B d’une réactivation lorsque l’infection chronique par le VHB est méconnue.
Les arguments en faveur d’une réactivation sont ceux
qui suggèrent une hépatite chronique B sous-jacente.
Il s’agit en particulier :
– de l’origine géographique (zone d’endémie du VHB) ;
– de l’existence de signes cliniques de maladie chronique du foie (tels que
des angiomes stellaires ou une érythrose palmaire) ;
– et de l’existence d’une dysmorphie hépatique ou de signes d’hypertension
portale à l’échographie.
Une biopsie hépatique permet, dans la plupart des cas, de mettre en évidence
une fibrose, témoignant de la maladie chronique du foie.
Toutefois, le
diagnostic histologique de maladie chronique peut être difficile car, lorsque
la nécrose hépatocytaire est très étendue, elle masque une fibrose modérée.
C - Hépatite aiguë D
:
LeVHDest un covirus défectif duVHB. Il ne peut se répliquer qu’en présence
duVHB.
En pratique, on peut donc observer soit des co-infections par leVHB
et par leVHD, soit des surinfections par leVHDchez des porteurs chroniques
du VHB.
Les manifestations des insuffisances hépatiques aiguës liées à une coinfection
par leVHB et leVHD sont identiques à celles d’une infection par le
VHB seul.
Les co-infections s’observent principalement chez les
toxicomanes.
Elles sont associées à un risque d’évolution fulminante un peu
plus élevé que les infections par le VHB seul.
Le diagnostic repose sur la
présence de l’IgM anti-HBc ainsi que l’antigèneVHDet l’IgM anti-VHD.
Le
pronostic ne semble pas différent de celui des hépatites fulminantes B.
Une surinfection par le VHD chez un porteur chronique du VHB peut
également se manifester par une insuffisance hépatique aiguë.
Le diagnostic
repose sur l’apparition de marqueurs sérologiques d’infection par le VHD
(antigène VHD, IgM anti-VHD, puis anticorps anti-VHD totaux) chez des
malades qui n’avaient au préalable que des marqueurs d’infection chronique
par le VHB.
La mortalité des hépatites fulminantes ou subfulminantes liées à
une surinfection par le VHD est plus élevée que celle des co-infections par le
VHB et le VHD.
D - Hépatite aiguë C et hépatite aiguë non-A non-B
:
Le VHC ne semble pas pouvoir être, à lui seul, responsable d’hépatites
fulminantes ou subfulminantes (ou de façon tout à fait exceptionnelle).
L’influence réelle d’une co-infection par le VHC chez des malades atteints
d’hépatite fulminante B ou B et D n’est pas connue avec précision.
Il a été
suggéré récemment que l’hépatite chroniqueCexposait à un risque plus élevé
d’évolution fulminante au cours d’une hépatite aiguëA.
Cette association,
qui inciterait à proposer une vaccination systématique contre l’hépatiteAchez
tous les sujets atteints d’hépatite chronique C, n’a pas été observée dans toutes
les séries.
Dans plusieurs séries, des hépatites (dont l’évolution est plus souvent subfulminante que fulminante) ont été attribuées à une infection par un virus
non-A non-B (et non-C).
Chez la plupart de ces malades, aucun facteur de
contage viral n’était identifiable.
L’origine virale de ces hépatites n’a pas été
démontrée.
Il serait donc préférable de les qualifier d’hépatites d’étiologie
indéterminée.
E - Hépatite aiguë E
:
Le VHE, dont le mode de transmission entéral est comparable à celui du
VHA, est responsable d’épidémies d’hépatites aiguës en Asie et en Afrique.
Le risque d’apparition d’une insuffisance hépatique fulminante ou subfulminante semble plus élevé au cours d’une hépatite aiguë E qu’au cours
d’une hépatite aiguë A.
Il est particulièrement élevé chez les femmes
enceintes au troisième trimestre de la grossesse.
En Inde, le VHE semble
responsable de 20 à 30 %des cas d’hépatites fulminantes ou subfulminantes.
Des hépatites fulminantes E peuvent être observées dans les pays
occidentaux, chez des sujets ayant séjourné récemment dans une zone
d’endémie.
Le diagnostic repose sur l’apparition d’IgG anti-VHE et la
présence d’IgM anti-VHE.
F - Hépatite aiguë due aux virus du groupe herpès
:
Les hépatites dues aux virus du groupe herpès sont le plus souvent
asymptomatiques ou bénignes.
Ces virus sont rarement responsables
d’insuffisances hépatiques aiguës.
Les hépatites fulminantes dues aux virus herpès simplex de type 1 et de type 2
(VHS 1 et VHS 2) s’observent habituellement chez des sujets
immunodéprimés.
La cause de l’immunodépression peut être un cancer, une
infection par le VIH, une chimiothérapie anticancéreuse ou une
corticothérapie.
En dehors des causes classiques d’immunodépression, la
grossesse (en particulier au troisième trimestre) et la période néonatale chez
les enfants constituent également un facteur de risque vis-à-vis des hépatites
herpétiques.
Occasionnellement, des hépatites herpétiques peuvent être
observées chez des adultes, apparemment immunocompétents.
À l’inverse du VHB, les VHS 1 et 2 sont directement cytopathogènes.
La
nécrose des hépatocytes est donc directement liée à la présence et à la
réplication du virus (et non à une réaction immunitaire dirigée contre des
protéines virales).
L’immunodépression favorise l’apparition d’une
insuffisance hépatique aiguë en réduisant l’intensité de la réponse
inflammatoire vis-à-vis des cellules infectées par le virus, en augmentant le
nombre d’hépatocytes infectés et en augmentant par conséquent l’étendue de
la nécrose hépatocytaire.
Le rôle de l’immunodépression est illustré par le fait
que chez les malades immunodéprimés qui présentent une hépatite herpétique
grave, les lésions histologiques sont très peu inflammatoires.
Chez un sujet atteint d’insuffisance hépatique aiguë, les manifestations qui
doivent faire évoquer une hépatite herpétique sont :
– un état d’immunodépression ;
– une fièvre élevée (39-40 °C) ;
– une leucopénie ;
– une élévation des transaminases supérieure à 100 fois la normale ;
– et une élévation modérée de la bilirubinémie (souvent inférieure à
100 ímol/L).
Une éruption vésiculeuse cutanée ou muqueuse peut être observée, mais elle
n’est pas constante.
Le pronostic des hépatites herpétiques est très mauvais si elles sont traitées
tardivement.
Dès qu’on suspecte ce diagnostic, il est donc indispensable
d’administrer en urgence de fortes doses d’aciclovir par voie intraveineuse.
S’il est débuté précocement, ce traitement peut entraîner la guérison sans
séquelles.
Le diagnostic d’hépatite herpétique peut être confirmé d’une part par une
biopsie hépatique (qui peut être réalisée par voie transveineuse lorsqu’il existe
une baisse importante des facteurs de coagulation) et, d’autre part, par
l’identification du virus en culture à partir d’un prélèvement de sang ou de
foie.
L’examen de la biopsie hépatique met en évidence des lésions tout à fait
caractéristiques, constituées par des foyers de nécrose non systématisée, sans
infiltrat inflammatoire.
Ces foyers sont parfois confluents.
La biopsie
hépatique est l’examen qui permet le plus rapidement de confirmer le
diagnostic.
Les résultats des cultures virales ne peuvent être obtenus qu’en
quelques jours.
Occasionnellement, d’autres virus du groupe herpès peuvent être
responsables d’insuffisance hépatique aiguë.
Il s’agit du virus herpès de type 6
et du virus de la varicelle et du zona. Le premier s’observe plus
particulièrement chez les enfants.
Le second s’observe essentiellement chez
les sujets gravement immunodéprimés.
Le virus d’Epstein-Barr et le cytomégalovirus peuvent être responsables
d’hépatites aiguës bénignes.
Il n’est pas clairement démontré que ces virus
puissent être responsables à eux seuls d’hépatites fulminantes ou subfulminantes.
G - Hépatites aiguës dues à d’autres virus
:
L’adénovirus peut être responsable d’infections disséminées,
s’accompagnant d’une hépatite et d’une insuffisance hépatique aiguë.
Ces
infections s’observent essentiellement chez des sujets immunodéprimés.
Le
diagnostic repose sur la culture du virus à partir d’échantillons de sang ou de
tissu hépatique.
Occasionnellement, une insuffisance hépatique aiguë a été observée chez des
malades ayant une infection grave par le virus coxsackie B, des arbovirus ou
le virus de Marburg.
Il n’a pas été clairement démontré que ces virus peuvent
à eux seuls être responsables d’une insuffisance hépatique aiguë.
Le parvovirus B19 peut être responsable d’aplasies médullaires associées à une
insuffisance hépatique aiguë.
H - Hépatites médicamenteuses
:
Dans les pays occidentaux, 10 à 15 % des hépatites fulminantes et subfulminantes sont dues à l’hépatotoxicité des médicaments.
De nombreux
médicaments peuvent être responsables d’hépatites aiguës.
Il peut s’agir
d’hépatites cytolytiques ou d’hépatites cholestatiques.
Seuls les médicaments
habituellement responsables d’hépatites cytolytiques peuvent être à l’origine
d’une insuffisance hépatique aiguë.
Les médicaments responsables
d’hépatites cholestatiques, à l’inverse, n’induisent pas de nécrose
hépatocytaire étendue.
Les mécanismes des hépatites médicamenteuses ont
été décrits aux chapitres précédents.
D’une façon générale, au cours d’une hépatite médicamenteuse, la survenue
d’une insuffisance hépatique aiguë est favorisée par la poursuite de la prise du
médicament après l’apparition des premiers symptômes.
Il est donc impératif
d’interrompre toute prise médicamenteuse lorsque des manifestations
suggérant une hépatite aiguë (et en particulier un ictère) apparaissent, même
si une origine virale est d’abord envisagée.
Chez un malade ayant une insuffisance hépatique aiguë, les arguments en
faveur d’une hépatite médicamenteuse sont :
– l’absence de toute autre cause décelable ;
– un délai (parfois prolongé de plusieurs mois) entre le début de la prise du
médicament et le début des manifestations compatible avec une hépatite
médicamenteuse ;
– la présence de manifestations d’hypersensibilité (éruption cutanée, fièvre
ou hyperéosinophilie) lorsqu’il s’agit d’une hépatite immunoallergique ;
– et la topographie centrolobulaire de la nécrose (bien que celle-ci soit
inconstante).
Dans le cas des hépatites liées à une stéatose microvésiculaire, les lésions
histologiques, constituées par des microvacuoles lipidiques
intracytoplasmiques au sein des hépatocytes, sont tout à fait caractéristiques.
L’attribution d’une hépatite aiguë à un médicament peut être difficile chez des
malades ayant pris de façon concomitante plusieurs médicaments
potentiellement hépatotoxiques.
De très nombreux médicaments ont été rendus responsables d’hépatites
aiguës cytolytiques.
Parmi ceux-ci, les médicaments le plus souvent
responsables d’insuffisance hépatique aiguë sont l’halothane (bien que son
utilisation ait fortement diminué dans les pays occidentaux), l’isoniazide, le pyrazinamide, les anti-inflammatoires non stéroïdiens, les antiépileptiques et
les antiviraux.
1- Hépatotoxicité de l’halothane
:
L’halothane est un agent anesthésique halogéné.
Les insuffisances hépatiques
secondaires à l’administration d’halothane surviennent habituellement 5 à
15 jours après une anesthésie générale.
L’administration préalable
d’halothane augmente le risque d’insuffisance hépatique fulminante et
raccourcit l’intervalle de temps entre la réadministration d’halothane et le
début de l’hépatite.
La mortalité des hépatites fulminantes et subfulminantes
à l’halothane est de l’ordre de 90 %.
Chez l’adulte, l’isoflurane (autre
anesthésique halogéné) est actuellement plus souvent utilisé que l’halothane.
L’hépatotoxicité de l’isoflurane est beaucoup moins fréquente que celle de
l’halothane.
2- Hépatotoxicité des antituberculeux
:
L’isoniazide et le pyrazinamide sont deux agents antituberculeux
hépatotoxiques, qui peuvent être responsables l’un et l’autre d’insuffisance
hépatique aiguë.
La rifampicine est un inducteur enzymatique qui semble
potentialiser l’hépatotoxicité de l’isoniazide.
Il est probable que la
rifampicine potentialise également l’hépatotoxicité du pyrazinamide, bien
que ceci n’ait pas été démontré.
Les insuffisances hépatiques aiguës dues à l’isoniazide surviennent le plus
souvent dans les 2 premières semaines qui suivent le début du traitement.
Elles sont favorisées par l’administration de fortes doses d’isoniazide
(supérieures à 5 mg/kg/j) et par l’administration concomitante de rifampicine.
Les manifestations immunoallergiques sont habituellement absentes.
L’évolution de ces hépatites est le plus souvent favorable si le traitement est
interrompu dès les premiers symptômes.
Les insuffisances hépatiques aiguës
dues au pyrazinamide surviennent habituellement plus de 2 semaines après le
début du traitement.
Elles semblent favorisées par l’administration de fortes
doses de pyrazinamide (supérieures à 30 mg/kg/j), mais peuvent aussi
survenir avec des doses inférieures.
L’évolution est souvent défavorable,
même si le traitement est interrompu précocement.
Le mécanisme des
hépatites à l’isoniazide est probablement toxique.
Le mécanisme des hépatites
au pyrazinamide n’est pas connu avec précision.
3- Hépatotoxicité des antiviraux
:
De nouveaux médicaments antiviraux ont été développés au cours des
dernières années dans le but de traiter plus efficacement les infections par le VIH, le VHB et le VHC.
La fialuridine est un analogue des nucléosides qui a
été proposé dans le traitement des hépatites chroniques B.
Plusieurs cas
d’insuffisance hépatique aiguë associée à une acidose lactique ont été
attribués à ce médicament.
L’insuffisance hépatique était parfois associée
à une acidose lactique, une pancréatite ou une rhabdomyolyse.
Dans certains
cas l’insuffisance hépatique a conduit au décès ou a nécessité une
transplantation hépatique en urgence.
L’utilisation de la fialuridine a été
interrompue.
Au cours de ces hépatites, les lésions hépatiques
correspondaient à une stéatose microvésiculaire diffuse.
Ces lésions
semblaient liées à une toxicité mitochondriale, marquée par une incorporation
de la molécule à l’ADN mitochondrial et conduisant à une altération majeure
des fonctions mitochondriales.
Des observations comparables ont été
rapportées avec des antirétroviraux tels que la névirapine et la 2’,3’-didéoxyinosine
(ddI).
I - Hépatites secondaires à une intoxication
:
L’intoxication le plus fréquemment responsable d’une insuffisance hépatique
aiguë est l’intoxication par le paracétamol.
Il s’agit habituellement d’une
intoxication volontaire dans un but suicidaire.
Toutefois, il est important de
noter que dans certaines circonstances, l’administration de paracétamol à dose
thérapeutique peut également occasionner une hépatite sévère.
D’autres
substances hépatotoxiques (telles que l’amanite phalloïde et certains solvants
industriels) peuvent également être à l’origine d’une insuffisance hépatique
aiguë à l’occasion d’une ingestion accidentelle.
1- Intoxication par le paracétamol
:
Les intoxications par le paracétamol représentent plus de 50 % des causes
d’insuffisance hépatique aiguë en Grande-Bretagne.
Cette proportion est plus
faible dans les autres pays d’Europe et aux États-Unis.
Elle a toutefois
augmenté au cours des dernières années.
L’ingestion de quantités massives de paracétamol (supérieures à 10 g)
s’accompagne de la production d’une quantité importante de métabolites
réactifs.
Le mécanisme de l’hépatotoxicité du paracétamol est comparable à
celui des hépatites toxiques idiosyncrasiques.
En dehors de sa toxicité
hépatique, le paracétamol à fortes doses peut être responsable d’une
insuffisance rénale aiguë dont les manifestations et l’évolution sont
comparables à celles des nécroses tubulaires aiguës.
Chez certains individus,
l’administration de doses thérapeutiques (ou un peu plus élevées que la dose
thérapeutique) peut aboutir à l’apparition d’une insuffisance hépatique aiguë
indissociable de celle qu’on observe après une intoxication massive.
Les
facteurs favorisant l’hépatotoxicité du paracétamol sont la dénutrition, une
consommation excessive d’alcool, le jeûne, la grossesse et un traitement par
l’isoniazide.
L’insuffisance hépatique apparaît 48 à 72 heures après l’ingestion de
paracétamol.
La baisse des facteurs de coagulation est brutale.
Elle
s’accompagne d’une importante élévation des transaminases (parfois
supérieure à 100 fois la normale).
Une insuffisance rénale aiguë et une acidose
métabolique sont fréquemment observées. L’insuffisance rénale est souvent
décalée dans le temps par rapport à l’insuffisance hépatique.
Au cours des
formes dont l’évolution est favorable, elle continue de s’aggraver après la
normalisation des facteurs de coagulation, traduisant la correction de
l’insuffisance hépatique.
Elle peut nécessiter une épuration extrarénale
transitoire, pendant quelques jours ou quelques semaines.
La survie des
hépatites sévères au paracétamol est élevée (de l’ordre de 90 %).
L’absence
d’administration précoce de N-acétylcystéine, l’existence d’une acidose
métabolique, d’une insuffisance rénale et d’une baisse importante des facteurs
de coagulation sont des facteurs de mauvais pronostic.
Il n’existe pas de
bonne corrélation entre la dose totale de paracétamol ingérée et la gravité des
manifestations hépatiques.
Il existe, en revanche, une assez bonne corrélation
entre la concentration sanguine de paracétamol dans les 12 heures qui suivent
l’ingestion et le risque d’hépatotoxicité sévère.
Le traitement des intoxications par le paracétamol repose sur l’administration
précoce de fortes doses de N-acétylcystéine par voie intraveineuse.
La dose
de charge est de 150 mg/kg. Elle est suivie d’une dose de 50 mg/kg en
4 heures puis 100 mg/kg en 16 heures, pendant un total de 72 heures.
L’administration de N-acétylcystéine permet de reconstituer les réserves
hépatiques de glutathion, composé ayant la propriété de limiter les lésions
cellulaires induites par les métabolites du paracétamol.
Le traitement par la N-acétylcystéine est d’autant plus efficace qu’il est débuté précocement après
la prise de paracétamol.
Il conserve cependant une certaine efficacité (illustrée
par une réduction de la mortalité) lorsqu’il est débuté plus de 10 heures après
la prise de paracétamol, et même après l’apparition de l’encéphalopathie.
2- Intoxication par l’amanite phalloïde
:
Les toxines contenues dans l’amanite phalloïde, les phallotoxines et surtout
les amatoxines, sont potentiellement létales à faibles doses. Elles sont
résistantes à la chaleur.
Elles ne sont donc pas dégradées par la cuisson des
champignons.
Le syndrome phalloïdien comporte deux phases.
La première phase débute
entre 6 et 12 heures après l’ingestion des champignons.
Elle est marquée par
des douleurs abdominales diffuses, une diarrhée profuse et des vomissements.
L’intervalle libre d’au moins 6 heures après le repas de champignons est
nécessaire et suffisant au diagnostic d’intoxication phalloïdienne.
La diarrhée
peut être à l’origine d’une déshydratation majeure accompagnée d’un
collapsus, d’une insuffisance rénale aiguë fonctionnelle, d’une acidose
métabolique et d’une ischémie hépatique.
À ce stade, il est donc
particulièrement important de compenser les pertes hydriques par voie
parentérale.
La seconde phase débute 48 à 72 heures après l’ingestion des
champignons.
Elle est marquée par la survenue d’une nécrose hépatocytaire
directement liée à la toxicité du champignon.
Cette phase est caractérisée par
une importante élévation des transaminases (parfois supérieure à 100 fois la
normale) et par une baisse des facteurs de coagulation.
Lorsqu’il apparaît une
encéphalopathie, la mortalité est élevée.
Une transplantation hépatique en
urgence peut être nécessaire.
Les toxines peuvent être mises en évidence dans
le sang par des techniques qui ne sont pas utilisables en pratique courante (et
qui ne sont pas indispensables au diagnostic).
3- Autres intoxications
:
Certains champignons appartenant à la famille des lépiotes ont une toxicité
comparable à celle de l’amanite phalloïde.
L’ingestion accidentelle de ces
champignons a été responsable de plusieurs cas d’insuffisance hépatique
aiguë (parfois mortelle) en Europe.
Le diagnostic étiologique repose sur
l’identification du champignon ingéré (lorsque celle-ci est possible).
Quelques cas d’insuffisance hépatique aiguë ont été rapportés après une
intoxication accidentelle par des solvants tels que le tétrachlorure de carbone,
le trichloréthylène ou le monochlorobenzène.
Des cas d’insuffisance
hépatique aiguë ont également été rapportés après l’ingestion de quantités
importantes de tisanes à base de plantes, contenant de la germandrée ou des
herbes médicinales chinoises.
Plusieurs observations d’hépatite aiguë (dont certaines étaient compliquées
d’une insuffisance hépatique) ont été rapportées chez des toxicomanes ayant
ingéré des amphétaminiques du type « ecstasy ».
La buprénorphine est un produit de substitution des opiacés qui peut être
proposé depuis quelques années aux toxicomanes pour obtenir un sevrage de
l’héroïne et faciliter l’abstinence.
Ce produit est normalement administré par
voie orale.
Certains toxicomanes utilisent cette substance aux doses
habituellement prescrites, mais par voie intraveineuse.
Plusieurs cas
d’hépatite aiguë ont été observés après la prise de buprénorphine par voie
intraveineuse (expérience des auteurs).
L’arrêt de la buprénorphine semble
associé dans la plupart des cas à une régression rapide des manifestations.
Bacillus cereus est une bactérie qui peut contaminer des aliments et être à
l’origine de toxi-infections alimentaires avec une diarrhée et des
vomissements.
Occasionnellement, des insuffisances hépatiques aiguës ont
été rapportées chez des sujets ayant ingéré des aliments contaminés par B. cereus.
Elles étaient en rapport avec une stéatose microvésiculaire diffuse.
Le mécanisme de cette stéatose semble être une inhibition de la bêtaoxydation
mitochondriale par une des toxines de B. cereus.
Une rhabdomyolyse était
associée à l’insuffisance hépatique, résultant de l’inhibition de la
bêtaoxydation mitochondriale musculaire.
J - Autres causes
:
1- Hypoxie hépatique
:
Une hypoxie hépatique aiguë peut survenir à la suite d’une réduction
importante du débit sanguin hépatique (artériel et/ou porte) ou, beaucoup plus
rarement, d’une désaturation profonde en oxygène.
La nécrose hépatocytaire
prédomine dans les régions centrolobulaires, régions où les hépatocytes sont
les plus éloignés de l’apport sanguin portal et artériel et donc sont plus
sensibles à l’hypoxie.
Une insuffisance hépatique aiguë par nécrose
hypoxique des hépatocytes peut s’observer à la suite de défaillances
circulatoires telles qu’un choc hémorragique, un choc septique, un infarctus
du myocarde, une myocardite aiguë ou un trouble du rythme cardiaque.
Elle
peut également s’observer à la suite d’une embolie pulmonaire ou d’un
syndrome d’apnée du sommeil.
L’augmentation de la pression dans les
veines sus-hépatiques (telle que celle qu’on observe au cours des insuffisances
cardiaques droites décompensées) favorise l’hypoxie en diminuant la
pression de perfusion hépatique.
Lorsqu’elle existe, l’augmentation de la
pression dans les veines sus-hépatiques est à l’origine de lésions de
congestion prédominant, comme les lésions de nécrose, dans la région centrolobulaire.
Le diagnostic d’hypoxie hépatique aiguë est habituellement facile à établir
car le désordre hémodynamique est au premier plan. Parfois, le diagnostic est
plus difficile à faire car l’insuffisance hépatique est au premier plan.
Cette
situation s’observe plus particulièrement chez les malades atteints de
myocardite aiguë.
Chez ces malades, les arguments en faveur d’une hypoxie
hépatique sont :
– l’importante élévation des transaminases (habituellement plus de 100 fois
la normale) ;
– l’élévation modérée de la bilirubinémie (habituellement inférieure à
100 ímol/L) ;
– l’existence d’une insuffisance rénale aiguë de type fonctionnel ;
– et la correction rapide de l’insuffisance hépatique après l’amélioration du
désordre circulatoire ou respiratoire sous-jacent (si c’est le cas).
Le traitement de l’insuffisance hépatique est celui de la cause.
Un traitement
efficace de la cause s’accompagne le plus souvent d’une correction rapide et
sans séquelles de l’insuffisance hépatique.
2- Hyperthermie et coup de chaleur
:
Une insuffisance hépatique aiguë peut survenir au décours d’une
hyperthermie maligne ou d’un coup de chaleur.
La nécrose des hépatocytes
semble être liée d’une part à l’effet direct de l’augmentation de la température
sur les hépatocytes et d’autre part à une hypoxie, elle-même secondaire aux
troubles circulatoires.
Il peut exister une CIVD. Les lésions histologiques sont
comparables à celles des hypoxies hépatiques aiguës.
3- Hépatites à cellules géantes
:
Une insuffisance hépatique aiguë peut s’observer au cours d’hépatites à
cellules géantes.
Ces hépatites sont caractérisées par la présence
d’hépatocytes de grande taille, comportant plusieurs noyaux et correspondant
à la fusion de plusieurs hépatocytes entre eux.
L’évolution des formes les plus
graves de ces hépatites est plus souvent subfulminante que fulminante.
Chez
certains malades, la présence de marqueurs sérologiques d’auto-immunité et
une réponse au traitement par les corticoïdes suggèrent une origine autoimmune.
Chez d’autres malades, les marqueurs d’auto-immunité sont absents
et il n’y a pas de réponse au traitement par des corticoïdes.
Chez quelques-uns
d’entre eux, on a observé dans les hépatocytes des inclusions intracytoplasmiques dont l’aspect est comparable à celui de capsides virales.
La réponse à un traitement antiviral et la récidive de l’hépatite après la
transplantation, telles qu’elles ont été observées occasionnellement,
suggèrent que ces hépatites sont la conséquence d’une infection virale.
Toutefois, la responsabilité d’un virus n’est pas clairement démontrée.
4- Obstruction des veines et des veinules sus-hépatiques
:
Une obstruction aiguë des veines ou des veinules sus-hépatiques peut être
responsable d’une nécrose hépatocytaire massive.
La nécrose est liée d’une
part à la congestion et d’autre part à la diminution du débit sanguin hépatique.
Elle prédomine dans les régions centrolobulaires.
Au cours du syndrome de Budd-Chiari, l’obstruction siège au niveau des gros
troncs des veines sus-hépatiques.
Elle est habituellement liée à une thrombose cruorique. Les facteurs favorisants sont les syndromes myéloprolifératifs (tels
que la maladie de Vaquez) ainsi que des anomalies de la coagulation (telles
que le déficit en protéine C, le déficit en protéine S ou le facteur V Leiden).
Outre le syndrome d’insuffisance hépatique aiguë, les manifestations
comportent des douleurs épigastriques, parfois une ascite et une insuffisance
rénale aiguë.
Une dérivation portosystémique chirurgicale ou une
transplantation hépatique sont parfois nécessaires.
Lorsque le diagnostic est
porté dans les quelques heures qui suivent la thrombose (ce qui est rare), une
thrombolyse en urgence peut être efficace.
Dans tous les cas, un traitement
anticoagulant doit être débuté en urgence pour éviter en particulier que la
thrombose des veines hépatiques se complète d’une thrombose de la veine
porte et de la veine mésentérique.
En effet, la thrombose de la veine porte et
de la veine mésentérique, favorisée par l’hypertension portale et la diminution
du débit sanguin portal, réduit considérablement les possibilités de traitement
chirurgical et aggrave le pronostic.
Au cours de la maladie veino-occlusive, l’obstruction vasculaire siège au
niveau des veines centrolobulaires.
L’obstruction n’est pas due à une
thrombose mais à un rétrécissement concentrique de la lumière des veines centrolobulaires.
Les facteurs favorisants sont la prise de tisanes contenant
des alcaloïdes de la pyrrolizidine (parfois utilisées auxAntilles et enAfrique),
la radiothérapie et la chimiothérapie anticancéreuse.
Ainsi, la maladie veinoocclusive
s’observe principalement chez les malades ayant eu une greffe de
moelle, une radiothérapie ou une chimiothérapie.
Comme au cours du
syndrome de Budd-Chiari, des douleurs abdominales et une ascite sont
fréquentes.
5- Infiltration massive du foie par des cellules néoplasiques
:
Elle peut conduire à une nécrose hépatocytaire étendue et à une insuffisance
hépatique aiguë.
La nécrose hépatocytaire est principalement liée à une
ischémie, secondaire à l’infiltration diffuse des sinusoïdes hépatiques par les
cellules tumorales.
Cette infiltration s’observe plus particulièrement au cours
des cancers du sein, des mélanomes malins et des leucémies aiguës.
Le diagnostic peut être difficile lorsque la tumeur primitive n’est pas connue.
Du fait du caractère diffus de l’infiltration néoplasique, l’aspect du foie peut
être homogène sur les examens d’imagerie.
Une altération importante de
l’état général et une augmentation du volume du foie sont fréquemment
observées.
L’infiltration massive du foie par des cellules néoplasiques
constitue une contre-indication à la transplantation hépatique.
6- Maladie de Wilson
:
Chez certains sujets, la maladie de Wilson est révélée par une insuffisance
hépatique aiguë.
Il s’agit en fait de l’aggravation brutale d’une maladie
chronique du foie qui s’est constituée silencieusement pendant les premières
années de la vie (et non d’une authentique maladie aiguë du foie).
Chez un malade atteint d’insuffisance hépatique aiguë, les arguments en
faveur d’une maladie deWilson sont :
– le jeune âge (moins de 30 ans) ;
– une consanguinité parentale ;
– l’existence de sujets atteints de la maladie dans la fratrie ;
– une anémie hémolytique à test de Coombs négatif ;
– une concentration sanguine de céruloplasmine effondrée ;
– une forte élévation de la cuprurie ;
– et la présence d’un anneau de Kayser-Fleischer (visualisé par un examen
ophtalmologique à la lampe à fente).
L’anémie hémolytique et l’élévation de la cuprurie sont constantes. À
l’inverse, la concentration sanguine de céruloplasmine n’est pas toujours
abaissée.
Elle est normale dans 5 % des cas environ. L’anneau de Kayser-
Fleischer est inconstant.
Cependant, lorsqu’il est présent au cours d’une
insuffisance hépatique aiguë, il est spécifique de la maladie de Wilson.
La
biopsie hépatique permet de mettre en évidence des lésions correspondant à
la maladie chronique du foie sous-jacente.
Le plus souvent, il existe une
cirrhose ainsi qu’une stéatose. La mesure de la concentration de cuivre dans
le tissu hépatique permet de confirmer le diagnostic.
Cette concentration est
très élevée (de 3 à 25 ímol/g de poids sec).
De nombreux types de mutations de natures différentes peuvent être à l’origine de la maladie de Wilson.
Actuellement, il n’est donc pas possible de faire un diagnostic génétique
direct chez un sujet atteint d’insuffisance hépatique aiguë.
Le traitement des formes aiguës de la maladie de Wilson repose sur
l’administration de fortes doses de D-pénicillamine.
Toutefois, chez certains
malades ayant une insuffisance hépatique particulièrement sévère, le
traitement médical est inefficace et il peut être nécessaire de réaliser une
transplantation hépatique en urgence.
Certains sujets, dont la maladie est traitée depuis plusieurs années par la D-pénicillamine et qui sont asymptomatiques, ont tendance à interrompre leur
traitement.
Chez ces sujets, l’arrêt brutal du traitement peut également
conduire à l’apparition d’une insuffisance hépatique aiguë.
7- Hépatites auto-immunes
:
Les hépatites auto-immunes se traduisent rarement par une insuffisance
hépatique aiguë.
Trois groupes distincts peuvent être observés.
Le premier groupe est constitué par des hépatites associées à un titre élevé
(supérieur au 1/50e) d’anticorps antimuscle lisse et/ou d’anticorps antinoyau
dans le sérum.
Il s’agit en fait d’hépatites chroniques jusqu’alors
asymptomatiques et qui sont révélées par une poussée aiguë, responsable
d’une insuffisance hépatique.
Ces hépatites s’observent principalement chez
des femmes jeunes. En dehors de la présence d’autoanticorps, les arguments
en faveur d’une hépatite auto-immune sont :
– une élévation importante de la concentration sérique des
gammaglobulines ;
– la mise en évidence par la biopsie d’une fibrose hépatique (témoignant de
la maladie chronique sous-jacente) ;
– et l’existence d’autres manifestations d’auto-immunité (telles qu’une
thyroïdite auto-immune ou un vitiligo).
L’administration de corticoïdes peut s’accompagner d’une correction rapide
de l’insuffisance hépatique.
Le second groupe est constitué par des hépatites associées à la présence dans
le sérum d’un titre élevé d’anticorps antimicrosomes de type anti-LKM 1.
Ces hépatites s’observent principalement chez des enfants et des adultes
jeunes.
Elles sont inconstamment sensibles à la corticothérapie et peuvent
nécessiter une transplantation hépatique en urgence.
Le troisième groupe est constitué par des hépatites sans autoanticorps. Les
manifestations de ces hépatites sont en fait comparables à celles des hépatites
associées à des anticorps antimuscle lisse et antinoyau.
Leur diagnostic
repose sur la présence d’une hypergammaglobulinémie, de lésions de fibrose
hépatique, d’autres manifestations d’auto-immunité et la réponse favorable
au traitement par des corticoïdes.
8- Maladies du foie et de la grossesse
:
La stéatose hépatique aiguë gravidique peut être responsable d’une
insuffisance hépatique aiguë. Elle survient essentiellement au troisième
trimestre de la grossesse.
Rarement, elle peut être observée à la fin du
deuxième trimestre de la grossesse.
Elle est caractérisée par la constitution
d’une stéatose microvésiculaire diffuse.
Dans la plupart des cas, la stéatose
aiguë gravidique peut être reconnue précocement.
Le déclenchement de
l’accouchement par voie basse (ou éventuellement par césarienne) permet
alors de prévenir l’apparition d’une insuffisance hépatique.
Les manifestations inaugurales de la stéatose hépatique aiguë gravidique sont
des nausées, des vomissements et, surtout, un syndrome polyuropolydipsique.
Ce dernier, bien qu’il ne soit pas constant, est très évocateur du diagnostic.
Les transaminases sont modérément élevées (habituellement moins de 20 fois
la normale).
La bilirubinémie est normale ou discrètement élevée.
Une hyperuricémie est fréquente. L’aspect échographique du foie est parfois
hyperéchogène de façon diffuse (ce qui traduit la stéatose), mais il est souvent
normal au début de la maladie.
La biopsie hépatique permet de confirmer le
diagnostic.
Elle doit être faite dans les quelques jours qui suivent l’extraction
de l’enfant car les lésions régressent rapidement.
La toxémie gravidique (comme la stéatose hépatique aiguë gravidique)
survient au troisième trimestre de la grossesse.
L’atteinte hépatique est
caractérisée par l’apparition de lésions vasculaires dont la répartition est
hétérogène.
Il s’agit de dépôts intravasculaires de fibrine, siégeant le plus
souvent dans les sinusoïdes périportaux, parfois dans les branches
intrahépatiques de la veine porte ou de l’artère hépatique.
Ces lésions
vasculaires sont à l’origine de foyers de nécrose hépatocytaire, d’infarctus
hépatiques et d’hémorragies intraparenchymateuses ou sous-capsulaires.
Les manifestations initiales de la toxémie sont représentées par des douleurs
siégeant dans l’épigastre, l’hypocondre droit, les lombes, le thorax ou même
les épaules.
Au début des symptômes, la tension artérielle n’est
qu’inconstamment trouvée élevée.
Les transaminases sont élevées (parfois à
plus de 50 fois la limite supérieure de la normale).
La bilirubinémie est très
modérément élevée. Une hyperuricémie, une protéinurie et une élévation de
la créatininémie sont fréquentes.
L’association d’une anémie hémolytique, d’une élévation des transaminases et d’une thrombopénie définit le syndrome HELLP(haemolysis, elevated liver enzyme, low platelet count).
Le diagnostic
précoce et l’interruption de la grossesse permettent de prévenir l’apparition
de lésions hépatiques graves, en particulier d’une rupture capsulaire du foie.
Seul cet accident, qui s’accompagne souvent d’un état de choc hémorragique,
peut entraîner au cours de la toxémie gravidique, une insuffisance hépatique
aiguë dont l’origine est principalement ischémique.
La grossesse n’est pas considérée comme un facteur aggravant des hépatites
aiguës virales, sauf dans le cas de l’hépatite E (surtout au troisième trimestre
de la grossesse) et de l’hépatite herpétique.
9- Syndrome de Reye
:
C’est une affection rare, survenant essentiellement chez l’enfant.
Quelques
cas ont été observés chez l’adulte.
Les lésions hépatiques sont constituées par
une stéatose microvésiculaire diffuse.
Le syndrome de Reye est souvent
précédé d’un syndrome grippal et de la prise d’acide acétylsalicylique.
Il se
manifeste par des vomissements, suivis d’une insuffisance hépatique et d’un
coma.
Le coma est en partie lié à un oedème cérébral. Le mécanisme du
syndrome de Reye n’est pas connu.
10- Hépatectomies majeures
:
Chez les sujets qui n’ont pas de cirrhose, une insuffisance hépatique aiguë
peut apparaître après une résection chirurgicale de plus de 80 % du
parenchyme hépatique.
Il s’agit le plus souvent de résections pour tumeurs du
foie (bénignes ou malignes) et, plus rarement, pour un traumatisme du foie.
Outre la quantité de parenchyme réséquée, l’insuffisance hépatique est
favorisée par un clampage vasculaire prolongé qui est à l’origine d’une
ischémie du foie restant.
Chez les sujets ayant une cirrhose, les capacités de
régénération du parenchyme hépatique sont faibles. Une insuffisance
hépatique aiguë peut donc apparaître pour une résection plus limitée du
parenchyme hépatique.
Pronostic
:
Le pronostic des insuffisances hépatiques aiguës varie fortement en fonction
de leur étiologie.
Le pronostic des hépatites au paracétamol et leur histoire
naturelle se démarquent nettement de ceux des autres hépatites.
Habituellement, on considère donc leur pronostic indépendamment de celui
des autres hépatites.
Le pronostic des hépatites au paracétamol est lié à la valeur des facteurs de
coagulation, ainsi qu’à l’existence d’une acidose métabolique et d’une
insuffisance rénale.
Le pronostic des hépatites au paracétamol a été établi
à partir de séries de malades observés principalement au Royaume-Uni (où
l’incidence de ces hépatites est élevée). Dans ces séries, les facteurs de
coagulation sont évalués par le temps de prothrombine avec des valeurs
exprimées en secondes.
Ces séries indiquent qu’un pH inférieur à 7,30 à
l’admission, une créatininémie supérieure à 300 ímol/L et un temps de
prothrombine allongé au-delà de 100 secondes sont associés à une mortalité
égale ou supérieure à 80 %.
En dehors du cas particulier des hépatites au paracétamol, la valeur des
facteurs de coagulation (et en particulier celle du facteur V), la gravité
maximale de l’encéphalopathie, l’étiologie, la durée de l’évolution et l’âge
sont les principaux facteurs pronostiques.
La présence d’une confusion
sévère ou d’un coma est associée à une mortalité accrue.
En présence de l’une
ou l’autre, la diminution du facteur V au-dessous de 20 % chez des sujets de
moins de 30 ans, et au-dessous de 30 % chez des sujets de plus de 30 ans, est
associée à une mortalité de plus de 90 %.
À valeur égale de facteur V et à
gravité égale de l’encéphalopathie, la mortalité est plus faible chez les
malades ayant une hépatite A que chez les malades ayant une hépatite
médicamenteuse.
D’une façon générale, pour une gravité d’encéphalopathie
et des valeurs de facteurs de coagulation comparables, la mortalité des
hépatites fulminantes au paracétamol est en moyenne plus faible que celle des
hépatites fulminantes et subfulminantes d’une autre origine.
L’importance de
l’élévation des transaminases n’a pas en soi de valeur pronostique.
Prévention des facteurs aggravants
:
Au stade d’insuffisance hépatique fulminante ou subfulminante, les hépatites
aiguës sont associées à une mortalité élevée.
Il est important de noter que ce
stade d’insuffisance hépatique fulminante ou subfulminante est précédé dans le
temps par un stade d’insuffisance hépatique sévère, au cours duquel
il n’existe pas d’encéphalopathie.
Il est capital
de reconnaître la maladie dès ce stade, ce qui permet d’avoir
précocement un avis spécialisé, de favoriser la correction rapide de
l’insuffisance hépatique et d’éviter dans la mesure du possible la
progression vers le stade de gravité ultérieur.
Au cours d’une
hépatite aiguë, les circonstances qui doivent conduire à un
transfert rapide dans une unité spécialisée (ou, à défaut, à un avis
spécialisé).
Dès le stade d’insuffisance hépatique sévère, il est prudent d’interrompre
toutes les prescriptions médicamenteuses.
En effet, les médicaments pris
auparavant peuvent être la cause de l’hépatite et, par ailleurs, certains
médicaments peuvent aggraver la maladie en majorant la nécrose hépatocytaire, en induisant une encéphalopathie ou une insuffisance rénale.
Les médicaments le plus souvent à l’origine de complications iatrogènes sont
les sédatifs (et en particulier les benzodiazépines), les antiémétiques dérivés
des neuroleptiques (qui ont également un effet sédatif), les antiinflammatoires
non stéroïdiens et les aminoglycosides (qui sont
potentiellement néphrotoxiques).
Les examens radiologiques avec injection
de produit de contraste iodé, qui ne sont habituellement pas justifiés, peuvent
également induire une insuffisance rénale.
Traitement
:
On ne dispose pas jusqu’alors de traitement pharmacologique permettant
spécifiquement de limiter la nécrose hépatocytaire ou d’accélérer la
régénération hépatique.
Par ailleurs, les techniques de suppléance artificielle
des fonctions hépatiques (foie artificiel) ne sont actuellement utilisées qu’à
titre expérimental.
Il n’existe pas de foie artificiel dont la capacité à remplacer
les fonctions hépatiques soit clairement démontrée et qui soit utilisable en
pratique courante.
Le traitement médical de l’insuffisance hépatique aiguë
consiste donc essentiellement à éviter les facteurs susceptibles d’aggraver
l’évolution de la maladie, à prévenir les complications et à maintenir une
situation propice à une régénération hépatique rapide, condition indispensable
à la guérison.
Lorsque ces objectifs ne peuvent pas être atteints, la seule
possibilité thérapeutique est la transplantation hépatique en urgence.
A - Traitement médical
:
Malgré la baisse importante des facteurs de coagulation, les hémorragies
spontanées sont exceptionnelles au cours des insuffisances hépatiques aiguës.
Par conséquent, il n’y a pas de justification à transfuser à titre préventif du
plasma frais congelé. Les transfusions de plasma frais congelé n’améliorent
pas la survie.
De plus, ces transfusions augmentent artificiellement la valeur
des facteurs de coagulation, ce qui rend impossible leur utilisation (capitale)
comme facteur pronostique.
Bien que les complications hémorragiques soient
rares, l’administration de médicaments protecteurs de la muqueuse gastrique
tels que le sucralfate est recommandée.
L’intérêt d’une antibioprophylaxie est controversé.
Dans tous les cas, les
infections bactériennes documentées doivent être rapidement traitées par une
antibiothérapie adaptée.
Les bêtalactamines et les quinolones sont des
antibiotiques de prédilection car ils ont un spectre antibactérien large et peu
d’effets secondaires.
Les aminoglycosides sont contre-indiqués car leur
néphrotoxicité est accrue par l’insuffisance hépatique.
L’apport calorique repose essentiellement sur la perfusion de solutés glucosés
associés à du phosphate (dans le but de prévenir les hypophosphorémies
profondes).
Les épisodes d’hypoglycémie imposent la perfusion en bolus de
soluté glucosé hypertonique.
La coexistence de signes d’hypertension intracrânienne et d’une hypotension
nécessite l’utilisation d’amines pressives telles que la dopamine à forte dose,
la noradrénaline ou l’adrénaline. Un remplissage vasculaire excessif risque
d’aggraver l’hypertension intracrânienne.
Une altération profonde de la vigilance, une hypoxémie sévère ou une
hypercapnie imposent une ventilation assistée. L’encéphalopathie
s’accompagne habituellement d’une hyperventilation.
L’hypercapnie traduit
le plus souvent la prise de médicaments sédatifs.
Lorsqu’elle est nécessaire,
l’intubation orotrachéale doit être préférée à l’intubation nasotrachéale qui est
plus traumatique et risque de s’accomppagner d’un saignement muqueux
abondant.
Chez les malades ayant reçu des benzodiazépines, l’administration de
flumazénil peut améliorer transitoirement les troubles de la vigilance.
En cas de coma, la tête et le tronc doivent être surélevés de 30° au-dessus du
plan horizontal, ce qui semble réduire la pression intracrânienne.
En l’absence
d’insuffisance rénale, le traitement de l’hypertension intracrânienne repose en
premier lieu sur l’administration intraveineuse de mannitol, qui induit une
diurèse osmotique.
Des bolus de 0,5 g/kg peuvent être renouvelés toutes les
4 heures en fonction de la réponse clinique.
En présence d’une insuffisance
rénale avec une créatininémie supérieure à 150 ímol/L, l’administration de
mannitol est inefficace et dangereuse.
Dans ce cas, l’hypertension
intracrânienne doit être traitée par une ultrafiltration à l’aide d’un dispositif
d’hémofiltration ou d’hémodialyse.
L’ultrafiltration permet de diminuer la
volémie et de réduire les effets de l’oedème cérébral.
Par rapport à
l’hémodialyse, l’hémofiltration a l’avantage de s’accompagner d’une
ultrafiltration progressive et d’avoir une meilleure tolérance
hémodynamique.
Elle a
l’inconvénient de ne pas corriger les anomalies métaboliques
associées à l’insuffisance rénale (ou de façon minime).
Dans la mesure
du possible, il est préférable de ventiler les malades en hypocapnie
modérée.
L’hypocapnie
s’accompagne en effet d’une vasoconstriction, responsable d’une
diminution de la pression intracrânienne.
L’administration
de barbituriques à fortes doses a été proposée chez les malades
ayant une hypertension intracrânienne grave.
L’utilisation de
barbituriques n’est pas recommandée car leur efficacité n’est pas
démontrée et ils font courir le risque d’une hypotension artérielle
sévère (pouvant compromettre la perfusion cérébrale).
Par ailleurs,
ces médicaments induisent une forte diminution (voire une
disparition) de l’activité électrique cérébrale.
Ils rendent donc
impossible la surveillance neurologique clinique et électrique.
B - Traitements
spécifiques :
Certaines causes
rares d’insuffisance hépatique aiguë justifient un traitement
spécifique.
Il est donc
important d’en faire un diagnostic précoce.
1- Hépatites herpétiques
:
Chaque fois que la présence d’une fièvre élevée, d’une importante élévation
des transaminases (supérieure à 100 fois la normale) et éventuellement d’une
leucopénie fait suspecter une hépatite herpétique, il est impératif de débuter
en urgence un traitement par l’aciclovir.
Ce traitement a d’autant plus de
chances d’être efficace qu’il est administré précocement.
L’aciclovir a peu
d’effets secondaires.
Il y a donc peu d’inconvénient à l’administrer par excès
(avant que le diagnostic ait été formellement établi) et, éventuellement, à
l’interrompre au bout de quelques heures ou de quelques jours, si le diagnostic
d’hépatite herpétique n’est pas confirmé.
À l’inverse, l’administration
retardée d’aciclovir chez un malade ayant une hépatite herpétique compromet
fortement les chances de guérison.
2- Hépatites au paracétamol
:
Le diagnostic d’hépatite au paracétamol doit conduire à la prescription
urgente de N-acétylcystéine.
La N-acétylcystéine doit être administrée aux
malades ayant une intoxication par des doses massives de paracétamol, mais
également aux malades développant une hépatite pour des doses
thérapeutiques.
La N-acétylcystéine est d’autant plus efficace qu’elle est
administrée précocement.
La voie intraveineuse doit être préférée à la voie
orale.
En effet, l’administration de fortes doses de N-acétylcystéine par voie
orale s’accompagne fréquemment de vomissements, ce qui réduit la quantité
ingérée.
On recommande l’administration de 150 mg/kg de N-acétylcystéine
en bolus de 15 minutes, puis de 50 mg/kg en 4 heures et enfin de 100 mg/kg
pendant les 16 heures qui suivent.
* Syndrome de Budd-Chiari
:
Chez un malade ayant une insuffisance hépatique aiguë secondaire à un
syndrome de Budd-Chiari, le diagnostic de thrombose des veines sushépatiques
doit conduire à débuter rapidement un traitement anticoagulant à
dose efficace.
Ce traitement a pour but de prévenir l’extension de la thrombose
(en particulier une thrombose de la veine porte et de la veine mésentérique
supérieure qui, si elle survient, aggrave la maladie et réduit fortement les
possibilités thérapeutiques) et de favoriser la résorption spontanée du caillot.
Chez les malades pour qui le diagnostic est fait précocement (quelques heures
après la survenue de la thrombose), un traitement fibrinolytique par voie
systémique ou locale peut être discuté.
Il a été rapporté quelques observations
de malades chez qui un tel traitement a permis d’obtenir une résorption du
caillot.
* Maladie de Wilson
:
Le diagnostic d’insuffisance hépatique aiguë secondaire à une maladie de
Wilson doit conduire à l’administration rapide de D-pénicillamine (sauf si la
gravité extrême de l’insuffisance hépatique justifie une transplantation en
urgence).
La posologie initiale de la D-pénicillamine est de 300 mg/j.
Cette
posologie doit être augmentée progressivement pour atteindre 1 500 à
2 100 mg/j, en 1 semaine environ.
* Hépatite auto-immune
:
Le diagnostic d’insuffisance hépatique aiguë secondaire à une hépatite autoimmune
doit conduire à l’administration de corticoïdes.
Dans les formes corticosensibles, on observe une réponse rapide avec des doses de
prednisolone de l’ordre de 1 à 2 mg/kg/j.
Cependant, les formes graves
d’hépatite auto-immune sont fréquemment corticorésistantes.
* Stéatose aiguë gravidique
:
Le diagnostic de stéatose aiguë gravidique doit conduire à déclencher
l’accouchement par voie basse en urgence, ou éventuellement à pratiquer une
césarienne.
Un diagnostic précoce permet de prévenir l’apparition d’une
insuffisance hépatique aiguë.
3- Foie bioartificiel
:
Au cours des dernières années, plusieurs équipes ont tenté d’élaborer un foie
bioartificiel qui pourrait remplacer temporairement les fonctions hépatiques
défaillantes, au même titre que l’hémodialyse remplace les fonctions rénales.
Cependant, il est techniquement beaucoup plus difficile de remplacer les
multiples fonctions du foie que de remplacer les fonctions du rein.
Dans un premier temps, des systèmes d’épuration destinés à éliminer des
substances toxiques accumulées au cours de l’insuffisance hépatique et
supposées responsables des troubles neurologiques ont été testés.
La structure
de ces systèmes était comparable à celle des hémodialyseurs avec un circuit
extracorporel et une membrane semi-perméable au travers de laquelle
s’effectuaient les échanges entre le compartiment sanguin et le dialysat.
Les
substances toxiques étaient censées passer du compartiment sanguin vers le
dialysat au travers de cette membrane semi-perméable.
Des cartouches
comportant des particules de charbon activé étaient fréquemment ajoutées au
circuit de dialysat afin de favoriser la chélation des substances toxiques.
L’expérience a montré que ces systèmes ne permettent pas à eux seuls
d’améliorer significativement l’état neurologique des malades atteints
d’insuffisance hépatique aiguë, ni d’améliorer leur survie.
Il a donc été
suggéré que pour corriger les désordres associés à l’insuffisance hépatique
aiguë il était indispensable d’associer à l’épuration une fonction de synthèse
et de métabolisme comparable à celle des hépatocytes.
Ainsi, les dispositifs les plus récents (foies bioartificiels hybrides) sont basés
sur l’utilisation d’une membrane semi-perméable (assurant une fonction
d’épuration) et la perfusion extracorporelle d’hépatocytes fonctionnels en
culture (assurant une fonction de synthèse et de métabolisme).
Il peut s’agir
d’hépatocytes de porc ou d’hépatocytes humains.
Le principal obstacle à
l’utilisation d’hépatocytes en culture est qu’ils se dédifférencient en quelques
jours et perdent alors leurs fonctions spécifiques.
Pour prolonger la
différenciation, on peut avoir recours à l’adjonction de facteurs de croissance,
de composants de la matrice extracellulaire ou à une matrice artificielle.
On
peut aussi avoir recours à des hépatocytes humains immortalisés, obtenus à
partir de lignées d’hépatoblastome.
Ces hépatocytes humains ont
l’inconvénient théorique de pouvoir être à l’origine d’un cancer, en cas de
rupture de la membrane et de passage dans le compartiment sanguin.
Les
échanges entre les hépatocytes en culture et le sang (ou le plasma) se font au
moyen de cartouches de fibres creuses, disposées en faisceaux parallèles.
Les
parois des fibres creuses sont constituées par une membrane semi-perméable
délimitant un compartiment interne et un compartiment externe.
Dans l’un
des compartiments, on dispose les hépatocytes et dans l’autre, on fait circuler
le sang ou le plasma.
Chaque cartouche contient 200 à 400 g d’hépatocytes
en culture.
Deux modèles de foie artificiel ont été récemment utilisés chez l’homme à
titre expérimental.
La plupart des essais ont été réalisés chez des malades
atteints d’insuffisance hépatique aiguë, et la plupart de ces malades ont été
transplantés après l’utilisation du foie bioartificiel.
Dans quelques cas, il a été
observé une amélioration neurologique transitoire.
Cependant, en l’absence
d’étude contrôlée chez l’homme, il n’a pas été clairement démontré que ces
systèmes expérimentaux permettaient d’améliorer la survie ou de réduire le
risque de décès pendant la période d’attente d’un greffon.
Récemment, une équipe a mené une étude contrôlée avec un modèle animal (porcin)
d’insuffisance hépatique aiguë (Cuervas-Mons et al, données non publiées).
Dans cette étude, le foie bioartificiel testé (utilisant des hépatocytes porcins
en culture) permettait d’améliorer significativement l’état neurologique des
animaux atteints d’insuffisance hépatique aiguë.
Cette amélioration n’était
pas observée quand le système était dépourvu d’hépatocytes en culture et que
seul le dispositif d’épuration était fonctionnel (démontrant ainsi que la
fonction de synthèse et de métabolisme des hépatocytes est indispensable
pour que le système soit efficace).
Ces résultats expérimentaux sont
actuellement les plus solides pour penser qu’un foie bioartificiel pourrait être
efficace au cours de l’insuffisance hépatique aiguë.
Outre le fait que leur efficacité n’est pas démontrée, deux éléments limitent le
développement du foie bioartificiel.
Il s’agit d’une part de la complexité
technologique (et du coût) de ces systèmes et d’autre part, de la possible
transmission de maladies infectieuses animales (en particulier virales) à
l’homme.
Plusieurs équipes tentent actuellement de déterminer avec
précision la nature des virus qui pourraient être transmis à l’homme (en
particulier par le porc) et les moyens par lesquels on pourrait obtenir des
animaux non infectés par ces virus.
4- Transplantation hépatique
:
La transplantation hépatique en urgence est le seul traitement curatif des
formes présumées mortelles d’insuffisance hépatique aiguë.
L’indication de
la transplantation repose sur la sélection des malades dont on estime qu’ils ne
survivront pas.
Les principaux facteurs qui doivent être pris en considération
pour décider d’une transplantation en urgence sont :
– le risque de décès en l’absence de transplantation (d’autant plus élevé que
le stade de la maladie est avancé) ;
– le délai d’attente d’un greffon (dont on peut faire une estimation mais qui
reste imprévisible) ;
– et le risque opératoire (qui dépend de la gravité de la maladie au moment
de l’intervention).
Lorsqu’on prend la décision de transplantation à un stade précoce de
l’insuffisance hépatique, on augmente les chances d’obtenir un greffon avant
le décès du malade, on diminue le risque opératoire (car la maladie est de
moindre gravité), mais on augmente le risque de transplanter par excès un
malade dont l’insuffisance hépatique se serait corrigée spontanément, sans
transplantation.
À l’inverse, lorsqu’on prend la décision à un stade tardif de
l’insuffisance hépatique, on diminue les chances d’obtenir un greffon avant le
décès du malade, on augmente le risque opératoire mais on diminue le risque
de transplanter par excès un malade qui aurait guéri spontanément.
Les
critères de transplantation doivent constituer un compromis acceptable entre
ces deux extrêmes.
Ceux qui sont utilisés actuellement ont été établis à partir
de séries rétrospectives de malades atteints d’hépatite fulminante ou subfulminante.
Les critères de transplantation établis par l’équipe de Clichy
sont l’existence d’une confusion ou d’un coma, en association avec un facteur Vinférieur à 20 %chez des sujets âgés de moins de 30 ans, ou inférieur à 30 %
chez des sujets âgés de plus de 30 ans.
Ces critères prédisent le décès en
l’absence de transplantation dans environ 90 % des cas.
À partir du moment
où ils sont présents, le risque de transplanter par excès des malades qui
auraient guéri spontanément est donc de l’ordre de 10 %.
Ces critères ont été
validés prospectivement à partir de 1986.Au cours des 4 premières années,
80 %des malades qui avaient les critères de transplantation ont effectivement
pu être transplantés.
Parmi les 20 % de malades pour qui aucun greffon n’a
été disponible et qui n’ont pas pu être transplantés, aucun n’a survécu.
La
plupart de ces malades étaient arrivés dans une unité d’hépato-gastroentérologie
après le début de l’encéphalopathie clinique.
Ces résultats
suggèrent que le transfert précoce des malades dans une unité spécialisée peut
s’accompagner d’une réduction de la mortalité.
Les critères établis par
l’équipe de
Londres ne sont pas identiques selon que l’insuffisance hépatique
est liée à une intoxication par le paracétamol ou à une autre cause.
Pour les
hépatites au paracétamol, il s’agit soit d’un pH inférieur à 7,30, soit de
l’association d’un allongement du temps de prothrombine au-delà de
100 secondes, d’une élévation de la créatinine au-dessus de 300 ímol/L et
d’une encéphalopathie de grade 3 ou 4.
Pour les hépatites d’une autre cause,
il s’agit soit d’un allongement du temps de prothrombine au-delà de
100 secondes, soit de l’association de trois des cinq éléments suivants :
– un âge inférieur à 10 ans ou supérieur à 40 ans ;
– l’origine médicamenteuse ou indéterminée de l’hépatite ;
– un intervalle entre l’ictère et l’encéphalopathie supérieur à 7 jours ;
– un allongement du temps de prothrombine au-delà de 50 secondes ;
– et une bilirubinémie supérieure à 300 ímol/L.
La technique le plus souvent utilisée est la transplantation totale orthotopique,
consistant en l’exérèse complète du foie et la mise en place d’un greffon à la
place du foie natif.
Le plus souvent, on choisit un greffon compatible dans les
groupes ABO.
Cependant, chez les malades dont l’état neurologique est
particulièrement grave et pour qui aucun greffon compatible n’est disponible,
l’urgence peut conduire à utiliser un greffon incompatible dans les groupes ABO s’il est disponible rapidement.
En cas de transplantation incompatible
dans les groupes ABO, il existe un risque (de l’ordre de 25 %) de rejet hyperaigu très précoce, pouvant entraîner rapidement la perte fonctionnelle
du greffon. Par ailleurs, plus à distance de la transplantation, il existe un risque
élevé de rejet chronique (de l’ordre de 50 %).
Chez les malades qui ont une hypertension intracrânienne, il est capital de
maintenir une stabilité hémodynamique durant toute la transplantation.
Les
épisodes d’hypotension ou la diminution du débit cardiaque, secondaires aux
effets des médicaments anesthésiques, à l’hémorragie ou aux clampages
vasculaires (en particulier le clampage de la veine cave inférieure) risquent
d’être à l’origine d’une réduction de la perfusion cérébrale, conduisant au
décès ou à des séquelles neurologiques irréversibles.
La technique de
transplantation hépatique orthotopique avec conservation de la veine cave
inférieure du receveur et anastomose cavocave latérolatérale permet d’éviter
le clampage complet de la veine cave inférieure pendant l’intervention.
Cette technique, qui semble particulièrement adaptée aux malades ayant une
insuffisance hépatique aiguë, a pour avantage de ne pas interrompre le flux
sanguin cave inférieur, de maintenir un remplissage satisfaisant des cavités
cardiaques droites et, ainsi, de réduire le risque de diminution du débit
cardiaque ou d’hypotension.
Le risque de décès en rapport avec
l’hypertension intracrânienne persiste dans les 24 à 48 heures qui suivent la
transplantation.
Pendant cette période, il est donc important de maintenir la
tête et le tronc surélevés de 30° au-dessus du plan horizontal et d’éviter le
remplissage vasculaire excessif.
Le taux de survie à 1 an des malades transplantés en urgence pour hépatite
fulminante ou subfulminante varie selon les séries de 50 à 75 %.
Chez les 52
malades transplantés à l’hôpital Beaujon pour cette indication, la
survie était de 74 % à 1 an et de 68 % à 2 ans.
D’une façon générale, ce taux
de survie est un peu plus faible que celui des malades transplantés pour une
maladie chronique du foie non cancéreuse (de l’ordre de 80 à 90 %).
L’excès
de mortalité est lié aux complications per- ou postopératoires de
l’hypertension intracrânienne ainsi qu’aux infections bactériennes et
fongiques et aux défaillances multiviscérales.
Ce risque accru se manifeste
essentiellement dans le premier mois qui suit la transplantation.
Au-delà du
premier mois, la courbe de survie a tendance à s’horizontaliser (comme c’est le
cas pour les maladies chroniques du foie non cancéreuses).
Malgré le gain de survie que procure la transplantation, ses résultats sont
limités par le risque de transplanter par excès des malades qui auraient guéri spontanément et par la nécessité d’un traitement immunosuppresseur au long
cours.
La transplantation hépatique auxiliaire, récemment développée, a pour
but de limiter ces inconvénients.
Elle est basée sur le principe selon lequel
une masse d’hépatocytes fonctionnelle inférieure à la masse critique qui est
nécessaire à la survie d’un malade peut toutefois être suffisante pour donner
lieu à une régénération complète du parenchyme hépatique.
En d’autres
termes, au cours des formes graves d’insuffisance hépatique aiguë, il peut
exister à un moment donné une masse d’hépatocytes fonctionnels insuffisante
pour assurer la survie immédiate du malade, mais suffisante pour qu’une
régénération ultérieure se produise.
Basée sur ce principe, la transplantation
auxiliaire consiste à transplanter un greffon hépatique en laissant en place tout
ou partie du foie natif.
Elle préserve ainsi la possibilité d’une régénération
tardive et d’une récupération fonctionnelle du foie natif, rendant inutile le foie
transplanté.
En pratique, on effectue le plus souvent une hépatectomie partielle du foie
natif. Dans l’espace vacant, on transplante la partie complémentaire du
greffon.
Selon les cas, le greffon peut être constitué par un lobe gauche, ou un
foie gauche, par un lobe droit ou un foie droit.
Le flux sanguin portal est
partagé entre le foie natif et le greffon.
Par rapport à la transplantation orthotopique totale, les inconvénients théoriques de la transplantation
auxiliaire sont l’allongement du temps opératoire, la masse plus faible de
parenchyme hépatique amenée par le greffon, la présence de deux tranches
d’hépatectomie (exposant à un risque d’hémorragie) et d’anastomoses
vasculaires complexes (exposant à un risque de thrombose).
Les résultats de la transplantation auxiliaire montrent que, bien que la quantité
de parenchyme fonctionnel amenée par le greffon réduit soit inférieure à celle
d’une transplantation conventionnelle, elle est habituellement suffisante pour
entraîner une régression rapide des troubles neurologiques et la correction de
l’insuffisance hépatique.
Les complications chirurgicales semblent un peu
plus fréquentes que pour la transplantation conventionnelle.
La régénération
du foie natif n’est pas toujours suffisante pour qu’il soit autonome et qu’on
puisse arrêter les immunosuppresseurs.
Les facteurs prédictifs de la
régénération ultérieure du foie natif ne sont pas établis avec précision.
Il
semble toutefois que la régénération soit plus fréquente (et plus rapide) chez
les malades transplantés pour une hépatite fulminante que chez les malades
transplantés pour une hépatite subfulminante.
Ainsi, la régénération semble
fréquente chez les malades ayant une hépatite d’évolution brève telle qu’une
hépatite au paracétamol ou une hépatite A.
Il semble à l’inverse que la
régénération soit le plus souvent insuffisante chez des malades ayant une
hépatite d’évolution plus lente telle qu’une hépatite médicamenteuse immunoallergique ou une hépatite de cause indéterminée.
L’âge semble
également être un facteur prédictif de régénération, celle-ci étant plus
fréquente au-dessous de 50 ans.
Il est important de noter que la régénération peut nécessiter plusieurs mois,
voire plusieurs années.
Lorsqu’on estime que la régénération du foie natif est
suffisante et que l’immunosuppression a été interrompue progressivement, le
greffon peut s’atrophier en quelques mois, sans qu’il soit nécessaire de
l’explanter.
Lorsque l’arrêt de l’immunosuppression s’accompagne de
complications graves telles qu’une nécrose ischémique des voies biliaires du
greffon associée à une angiocholite ou à des abcès biliaires, il peut être
nécessaire d’explanter chirurgicalement le greffon.