Hémorragie méningée non traumatique Cours de Neurologie
Étiologie
:
1- Anévrisme artériel intracrânien :
Dans 80 % des cas, l’hémorragie méningée non traumatique
est due à la rupture d’un anévrisme.
• Description : l’anévrisme est une dilatation le plus souvent
sacciforme de l’artère, fait d’un sac et d’un collet, et
siège au niveau des bifurcations intracrâniennes des gros
vaisseaux de la base du crâne.
L’anévrisme s’accompagne
toujours d’une modification de la structure histologique de
la paroi artérielle, avec une altération de la média et une
disparition de la couche élastique (d’où la fragilité du fond
du sac et la croissance régulière des anévrismes).
• Siège : dans 90 % des cas, les anévrismes siègent sur la
partie antérieure du polygone de Willis (région de l’artère
communicante antérieure surtout, de l’artère sylvienne, de
l’artère communicante postérieure, de la terminaison carotidienne)
; dans moins de 10 % des cas, on les retrouve sur
le système artériel vertébro-basilaire ; enfin dans 20 % des
cas, ils sont multiples.
• Terrain : c’est une pathologie de l’adulte ; rare avant 15
ans, l’incidence augmente avec l’âge, favorisée en partie
par l’hypertension artérielle.
2- Autres causes :
– Dans 20 % des cas, aucune cause vasculaire décelable ne
peut être retrouvée.
Dans l’ensemble, ces hémorragies idiopathiques
sont moins sévères, comportent moins de complications,
sont d’un meilleur pronostic et ne récidivent pas.
– Des anévrismes d’autres origines (mycotique, disséquants,
autres…).
– Des hémorragies méningées non anévrismales (tumorales,
au cours des diathèses hémorragiques…).
– Quant aux malformations artério-veineuses, elles saignent
exceptionnellement dans les espaces sous-arachnoïdiens
et se manifestent en règle générale par un hématome
intracrânien qui peut se rompre secondairement dans les
espaces sous-arachnoïdiens (hémorragie cérébro-méningée).
Diagnostic
:
1- Forme typique :
• Le début est brutal, marqué par une céphalée intense,
continue, diffuse, inhabituelle, accompagnée de vomissements,
le tout parfois à l’occasion d’un effort.
• L’examen clinique retrouve chez un patient obnubilé et
agité, un syndrome méningé, des signes d’irritation pyramidale,
un fébricule, une élévation de la pression artérielle
systémique.
• L’examen tomodensitométrique (SPC) confirme le diagnostic
clinique et a supplanté la ponction lombaire traditionnelle.
Si l’examen tomodensitométrique n’a pu être fait,
celle-ci est indiquée ; elle ramène un liquide uniformément
rosé ou rouge dans les 3 tubes, éliminant une piqûre vasculaire.
L’examen tomodensitométrique détecte la présence
de sang en intracrânien et son importance ; il localise la
rupture anévrismale dans un cas sur deux ; exceptionnellement
il peut visualiser un anévrisme géant.
Il apprécie enfin la taille du système ventriculaire pour
dépister une éventuelle hydrocéphalie.
• Artériographie : le diagnostic confirmé (par ponction
lombaire ou examen tomodensitométrique) impose le transfert,
en urgence, en milieu neurochirurgical pour la pratique
d’une artériographie.
Réalisée idéalement dans les 24 heures qui suivent l’hémorragie, celle-ci explorera la totalité de l’encéphale (artériographie
dite des 4 axes), même si la localisation tomodensitométrique
de l’anévrisme a pu être suspectée (en raison
des anévrismes multiples).
Elle permet de confirmer
le diagnostic, d’apprécier l’aspect de l'anévrisme, l’état de
l’artère porteuse, pour décider de la tactique thérapeutique
à adopter et sa date.
• Autres examens complémentaires : ils évaluent les conséquences
systémiques de l’hémorragie en même temps
qu’ils précisent l’état préthérapeutique du patient.
• La numération des globules blancs : l’élévation est proportionnelle
à la sévérité de l’hémorragie et est aspécifique ;
ils peuvent atteindre 10 à 12 000 ou plus.
• L’électrocardiogramme : les modifications du rythme
cardiaque sont également fréquentes et aspécifiques ; certaines
peuvent même simuler une ischémie myocardique.
• Une exploration de la coagulation et un bilan biologique.
• Le doppler transcrânien, enfin, qui étudie la vitesse circulatoire
moyenne et permet de dépister un éventuel vasospasme.
Il est surtout utilisé en période postopératoire ou
chez les patients transférés avec retard.
2- Formes cliniques :
– Forme comateuse d’emblée, évoquant une hémorragie
méningée importante avec hydrocéphalie ou une hémorragie
cérébrale associée.
– Forme fruste.
– Forme trompeuse, à début comitial.
– Forme avec atteinte oculomotrice du nerf moteur oculaire
commun (IIIe paire) qui évoque d’emblée un anévrisme
de l’artère communicante postérieure.
– Forme spinale, débutant par une violente douleur rachidienne
évoquant une malformation vasculaire spinale, rare.
– Formes diagnostiquées tardivement (20 % des cas), ou à
l’occasion d’une complication ischémique, hydrocéphalique,
ou d’une récidive hémorragique (l’examen tomodensitométrique
peut être moins probant, le sang commençant
à se lyser, mais la ponction lombaire révélera un liquide xanthochromique).
Diagnostic
différentiel
:
Le problème est
essentiellement
posé par les
formes frustres et
les hémorragies
méningées traumatiques
dans les
cas avec perte de
connaissance ou
comitialité.
On sera parfois
amené après examen tomodensitométrique et ponction
lombaire à aller jusqu’à pratiquer une artériographie.
Évolution
:
1- Complications liées à l’anévrisme
:
Le resaignement est la cause majeure de mortalité et de
morbidité des hémorragies méningées.
Il est imprévisible,
et peut se produire dès le premier jour.
À 30 jours le risque
est de 35 % avec une mortalité de 50 % ; à 6 mois, il est de
50 % avec une mortalité de 70 %.
Ces chiffres montrent bien la nécessité d’une prise en
charge thérapeutique la plus rapide possible.
2- Complications liées à l’hémorragie méningée :
• L’hydrocéphalie : elle témoigne d’un blocage des citernes
de la base du crâne par l’hémorragie avec le reflux du
liquide céphalo-rachidien hémorragique, dans le système
ventriculaire, mais aussi de l’obstruction des granulations de Pacchioni qui empêchent la résorption correcte du
liquide céphalo-rachidien dans le sinus longitudinal supérieur.
Elle peut survenir aussi bien dans les premières heures
que dans les premiers jours ; à l’inverse elle peut se constituer
tardivement et se comporter comme une hydrocéphalie
chronique active. L’examen tomodensitométrique
montre une augmentation de la taille des ventricules.
• L’ischémie cérébrale par vasospasme : elle apparaît
d’une manière retardée (après le 5e jour), généralement
associée à une hémorragie méningée importante.
Elle se
manifeste par un déficit neurologique focalisé, des troubles
de la conscience, une température oscillante.
L’examen tomodensitométrique permet d’éliminer une
autre cause (un resaignement en particulier) et de découvrir
(quelques jours plus tard) une hypodensité dans le territoire
de l’artère porteuse de l’anévrisme, mais aussi quelquefois
dans des territoires plus distants (ischémie focale
ou diffuse).
Le doppler transcrânien révèle une accélération importante
de la vitesse circulatoire dans le territoire suspecté.
Pronostic
:
L’hémorragie méningée par rupture d’anévrisme intracrânien
est une pathologie grave, car seulement deux tiers des
patients reviendront à un état proche de la normale.
Le pronostic dépend :
– de l’âge et de l’état clinique du patient lors de son hospitalisation
;
– de l’importance de l’hémorragie diagnostiquée à l’examen
tomodensitométrique ;
– de la présence d’une complication évolutive (tomodensitométrie,
doppler) ;
– de la présence d’un anévrisme et alors, de sa topographie
et de sa taille (artériographie).
Principes du traitement
:
La prise en charge de l’hémorragie méningée doit être précoce
pour éviter le resaignement et prévenir les complications
ischémique et hydraulique de la maladie.
1- Prévention de la récidive hémorragique :
C’est exclure l’anévrisme de la circulation artérielle par 2
techniques possibles actuellement :
• La chirurgie classique, qui aborde sous microscope,
l’anévrisme par voie extracérébrale et qui l’exclut de façon
définitive, en posant un clip sur son collet.
• Depuis quelques années, une alternative est réalisée par
voie endovasculaire, au cours de l’artériographie, par la
mise en place, à l’aide d’une sonde montée, de petits ressorts
(« coils ») qui remplissent la lumière de l’anévrisme.
Les indications du traitement endovasculaire sont actuellement
limitées à certaines formes d’anévrismes et à des
localisations précises ; en outre, le recul est encore insuffisant
pour valider cette technique définitivement.
2- Traitement des complications :
• L’hydrocéphalie aiguë nécessite la pose immédiate d’une
dérivation ventriculaire externe, dès son diagnostic établi
au scanner, avant même toute artériographie.
• Le vasospasme doit être prévenu pour éviter la chute du
débit sanguin cérébral, prélude à une ischémie cérébrale
retardée.
Le traitement repose sur la correction de l’hypovolémie
par des inhibiteurs calciques associés à un soluté
de remplissage.
3- Problèmes médicaux essentiels associés :
• L’hypertension artérielle, fréquemment existante avant
l’hémorragie ou associée, peut favoriser une re-rupture.
Sa
correction doit néanmoins être prudente et progressive pour
ne pas précipiter une ischémie cérébrale.
• L’épilepsie précoce peut être traitée par des médicaments
anti-comitiaux à action rapide qui seront interrompues à la
fin de l’hospitalisation ou à court terme.