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Gynécologie
Grossesse extra-utérine
Cours de Gynécologie Obstétrique
 
 
 

Introduction :

La GEU est définie comme l’implantation d’une grossesse en dehors de l’utérus. Cette définition exclut les grossesses interstitielles, cervicales et cornuales.

Ces pathologies ne sont pas évoquées ici, mais en pratique il faut, une fois le diagnostic de GEU éliminé, savoir les évoquer.

La GEU occupe une place privilégiée dans la littérature médicale.

Malgré les avancées des techniques de biologie et de radiologie, plus de la moitié des articles sont encore consacrés au diagnostic de cette affection.

Nous rapportons ici les nouvelles techniques de diagnostic de cette affection.

Cette pathologie reste potentiellement létale ; aux États-Unis, elle est responsable de 9 % des morts maternelles et grève la fertilité des patientes.

Cette pathologie a enfin la particularité de faire appel à un arsenal thérapeutique de plus en plus large allant de l’abstention au traitement chirurgical radical, en passant par le traitement médical.

Épidémiologie :

A - INCIDENCE :

Aux États-Unis, l’incidence de la GEU a été multipliée par quatre entre 1970 et 1989.

En France, l’incidence de cette pathologie est difficile à évaluer.

En effet, le taux de GEU dépend de la définition et du dénominateur utilisé.

Le meilleur dénominateur semble être le nombre total de grossesses, mais celui-ci est difficile à estimer car il n’existe pas de registre national qui dénombre les grossesses avec fausse couche spontanée, fausse couche induite, et les grossesses déclarées.

Le registre tenu dans deux départements permet d’approcher ce taux.

En 1992, ce taux était de 2 % des naissances vivantes, de 1,6 % des grossesses et de 0,09 % des femmes âgées de 15 à 44 ans.

Contrairement aux États-Unis et à la Norvège où l’incidence augmente, à la Suède où l’incidence diminue, en France l’incidence de la GEU est stable.

B - FACTEURS DE RISQUE :

La connaissance des facteurs de risque a trois intérêts : permettre une prévention primaire de la GEU en éliminant les facteurs de risque, permettre une prévention secondaire en dépistant la GEU dans les populations à risque ; enfin, tenter d’éviter une récidive.

Deux méta-analyses ont été publiées en 1995 et 1996.

La première méta-analyse étudie les effets des différentes techniques contraceptives et fait la synthèse de 12 études castémoins et d’une étude de cohorte.

Ces études doivent être séparées en deux groupes ; le premier groupe est celui pour lequel les témoins sont des femmes non enceintes.

Toutes les études qui comparent le risque de GEU d’une série de femmes sous contraceptifs avec le risque de GEU d’une série de femmes sans contraception, trouvent un effet protecteur de tous les modes de contraception.

Le deuxième groupe est celui pour lequel les témoins sont des femmes enceintes.

Les études qui comparent le risque de GEU d’une série de femmes enceintes sous contraceptifs par rapport au risque de GEU d’une série de femmes enceintes sans contraception trouvent des résultats qui varient selon le mode contraceptif.

Si une femme est enceinte malgré l’utilisation de préservatifs, son risque de GEU n’est pas augmenté.

Si une femme est enceinte malgré une contraception hormonale, il existe une tendance vers une augmentation (non significative) du risque de GEU, cette tendance serait liée à l’effet des contraceptifs progestatifs qui diminuent la motilité tubaire.

Si une femme est enceinte malgré l’utilisation d’un dispositif intrautérin, son risque de GEU est multiplié par 4 à 45 selon les études ; si elle est enceinte malgré un antécédent de stérilisation tubaire, le risque est multiplié par 9.

En effet, ces deux techniques contraceptives protègent mieux contre les grossesses intra-utérines (GIU) que contre les GEU.

Il faut noter qu’un antécédent de contraception par dispositif intrautérin (DIU) est également un facteur de risque de GEU (risque multiplié par 1,6), ce qui suggère une relation entre la pose d’un DIU et l’apparition de lésions tubaires.

Les mécanismes qui pourraient expliquer l’augmentation des risques de GEU après ligature tubaire sont l’obturation tubaire incomplète déformant la structure tubaire, une reperméabilisation tubaire ou la formation d’une fistule utéropéritonéale.

La deuxième méta-analyse fait la synthèse de 27 études castémoins et de neuf études de cohorte représentant 6 718 cas de GEU, et s’intéresse à tous les facteurs de risque en dehors de la contraception.

Six éléments augmentent de manière importante le risque de GEU : les antécédents de GEU, les antécédents de chirurgie tubaire, l’exposition au Distilbènet, l’existence de lésions tubaires et une contraception de type DIU ou stérilisation tubaire.

Les facteurs qui augmentent de manière modérée les risques de GEU sont les antécédents d’infection à Chlamydia, à gonocoque, de pelvipéritonite, d’infertilité, de tabagisme et le nombre de partenaires sexuels supérieur à un.

Les autres facteurs augmentent faiblement le risque : antécédent de chirurgie abdominopelvienne, âge du premier rapport sexuel inférieur à 18 ans, antécédent de contraception par DIU et contraception microprogestative.

Impact préventif :

La connaissance de ces facteurs a un triple impact préventif.

La prévention primaire de la GEU repose d’une part sur la prévention des infections génitales par l’utilisation de préservatifs et le traitement rapide et efficace des infections à Chlamydia et, d’autre part, sur les campagnes antitabac.

Les travaux d’épidémiologie français de Coste et Job-Spira ont démontré que près de la moitié des GEU étaient en rapport avec une infection génitale, dont plus de la moitié étaient liées à une infection à Chlamydia.

L’étude suédoise d’Egger a démontré l’efficacité des mesures nationales pour le traitement précoce des infections à Chlamydia.

Une politique de dépistage a été instaurée en Suède dès les années 1980, avec réalisation de dépistage sérologique, traitement des partenaires atteints et création de consultations destinées aux jeunes, consultations qui prodiguent préservatifs, éducation sexuelle, dépistage et traitement des infections à Chlamydia.

Cette étude a démontré que chez les femmes de moins de 35 ans, l’incidence de la GEU était fortement corrélée au taux d’infection à Chlamydia.

Entre 1985 et 1995, il a été observé une décroissance simultanée des taux de GEU et des taux d’infection à Chlamydia.

Au-delà de 35 ans, il semble que les lésions tubaires soient plus souvent liées au gonocoque qui était une cause fréquente dans les années 1960-1970.

En France comme aux États-Unis, des mesures de santé publique devraient être prises pour non seulement promouvoir le préservatif, mais aussi dépister et traiter les jeunes porteurs de Chlamydia.

La prévention secondaire doit permettre le dépistage des patientes à risque.

Les femmes qui ont un antécédent de GEU, de lésion tubaire ou de chirurgie tubaire, un passé d’infection pelvienne ou qui sont enceintes malgré un DIU ou un antécédent de stérilisation tubaire, doivent être prévenues du risque de GEU.

Leurs médecins doivent les inciter à consulter un gynécologue dès que le diagnostic de grossesse est établi afin d’en préciser le siège.

Le dépistage systématique des GEU dans une population à risque a été tenté par l’équipe de Mol aux Pays-Bas.

Entre 1993 et 1996, 143 femmes à risque accru de GEU ont subi, dès le diagnostic de leur grossesse, un dépistage par b-hCG et échographie.

Les inconvénients de ce type de dépistage sont un coût élevé, une iatrogénicité élevée (angoisse des femmes, risque de faux positif).

Les avantages sont de pouvoir rassurer les patientes dont la grossesse est intra-utérine et de dépister des GEU à un stade qui permette de réaliser un traitement peu invasif (médical conservateur).

Malheureusement, même dans cette population à risque, le taux de GEU était faible : 5,6 % (n = 8).

Dans ce contexte, le rapport bénéfice/risque de ce dépistage est médiocre. Un tel dépistage ne pourra être efficace que si l’on isole un sous-groupe de femmes à très haut risque de GEU.

Physiopathologie :

A - FACTEURS DE RISQUE ET ÉTIOLOGIE :

Un facteur de risque épidémiologique n’est pas synonyme de facteur étiologique, néanmoins de nombreux travaux scientifiques ont montré que plusieurs facteurs de risque de la GEU étaient également des facteurs étiologiques.

1- Infection à « Chlamydia trachomatis » :

Une étude de biologie moléculaire récente a montré que l’acide ribonucléique (ARN) de C. trachomatis (CT) était présent dans sept cas sur dix de GEU.

Cette étude a un intérêt majeur ; en effet, la seule détection de l’acide désoxyribonucléique (ADN) de CT comme la seule détection des anticorps anti-Chlamydia ne permettent pas de distinguer une infection ancienne d’une infection récente.

En revanche, la détection de l’ARN permet d’affirmer l’existence d’une infection active.

2- Tabagisme actif et passif :

L’étude expérimentale réalisée récemment in vivo chez le hamster par une équipe californienne a démontré que l’inhalation active ou passive de fumée de cigarette entraînait d’une part un ralentissement du transport des embryons et d’autre part une diminution de l’activité contractile des trompes.

La fumée agit par un double mécanisme d’action sur les cellules ciliées et sur les cellules musculaires lisses.

Dans cette étude, la contraction des trompes est significativement inhibée à partir de 15 bouffées de cigarette.

En cas d’inhalation active de fumée de cigarette, il existe un effet dose-dépendant ; en cas d’inhalation passive, l’effet inhibiteur est rapide et indépendant de la dose.

La composition de la fumée inhalée est différente de celle qui se dégage à l’extrémité de la cigarette, la présence d’un composant toxique non encore identifié pourrait expliquer pourquoi, dans cette étude, le tabagisme passif est encore plus nocif que le tabagisme actif.

Ces données expérimentales confirment les données épidémiologiques françaises de Coste.

3- Anomalies de l’oeuf :

Même si 50 % des GEU sont expliquées par un facteur tubaire, d’autres mécanismes sont possibles.

L’étude de Bouyer a montré sur 1 955 femmes que le risque de GEU augmentait avec l’âge maternel et ceci indépendamment de la plus longue exposition aux divers facteurs de risque.

L’odds ratio passe de 1,55 à 28 ans à 5,56 après 40 ans.

L’hypothèse d’une altération chromosomique du produit de la GEU a été avancée pour expliquer la majoration de ce risque, mais n’est toutefois pas démontrée.

4- Cas particulier : grossesse extra-utérine et procréation médicalement assistée

L’infertilité est un facteur de risque de GEU, les médicaments utilisés en procréation médicalement assistée (PMA) pourraient également jouer un rôle, ainsi le citrate de clomifène perturbe le transport tubaire.

Quatre à 5 % des grossesses obtenues après fécondation in vitro (FIV) sont des GEU, un taux supérieur de deux à trois points à l’incidence dans la population générale.

Ces grossesses sont expliquées par le reflux de l’embryon dans la trompe malade.

La gravité des GEU qui surviennent en cours de PMA tient au fait que 1 % des grossesses sont hétérotopiques.

Dans ces cas, la visualisation d’une grossesse intra-utérine n’écarte en rien celle d’une grossesse extra-utérine qui peut lui être associée.

B - SIÈGE DE LA NIDATION :

La localisation tubaire est la plus fréquente (96 à 99 % des cas).

Le plus souvent, la GEU est localisée dans l’ampoule (60 à 92 %).

Anatomiquement, ce segment est large et extensible.

Les signes cliniques sont donc relativement tardifs et la rupture de la trompe est précédée d’un syndrome fissuraire.

L’isthme est une localisation plus rare (8 à 25 %).

Il est de petit calibre et peu extensible, du fait de la forte musculature tubaire : les signes cliniques sont donc précoces, avec une évolution rapide vers la rupture.

Les localisations interstitielles sont rares (2 %).

La rupture est la règle, elle se produit dans une zone très vascularisée.

En cas de localisation pavillonnaire, la trompe n’est pas distendue.

Le risque de rupture est faible. Ces GEU peuvent guérir spontanément par « avortement tuboabdominal ».

Les localisations ovariennes sont rares (moins de 1 %).

Le trophoblaste peut siéger en surface de l’ovaire ou en profondeur dans le corps jaune.

Les GEU abdominales pures correspondent à l’implantation du trophoblaste sur le péritoine.

Elles sont exceptionnelles et posent le problème de la date et du type d’intervention, soit immédiatement, soit lorsque la viabilité foetale est atteinte.

C - MODES D’IMPLANTATION :

Trois modes d’invasion trophoblastique sont possibles.

1- Implantation superficielle dite « intraluminale » :

C’est le cas dans 56 % des grossesses ampullaires.

Le trophoblaste s’implante superficiellement sur la muqueuse tubaire.

La grossesse se développe dans la lumière tubaire, l’apport vasculaire est faible.

La musculeuse n’est le plus souvent pas concernée (85 % des cas).

Dans ce cas, la rupture tubaire est un phénomène progressif lié à l’accumulation de sang dans la trompe, elle est précédée de saignements qui s’extériorisent par la trompe, ces saignements pourront parfois décoller l’oeuf et entraîner une guérison spontanée.

Ce type d’implantation permet de comprendre un des intérêts du test au bleu lors de la coelioscopie pour GEU ; ce test pourrait permettre, une fois le diagnostic de GIU éliminé, de « laver » la trompe sous pression et ainsi de décoller une GEU débutante dont l’implantation est superficielle et qui n’a pas de traduction macroscopique.

2- Implantation profonde dite « extraluminale » :

Cette implantation est rare et ne concerne que 7 % des cas.

Le trophoblaste se développe en dehors de la lumière, et le plus souvent la muqueuse et la musculeuse tubaire sont respectées (83 % des cas).

3- Implantation mixte :

Ce mode d’implantation est fréquent, concernant 37 % des GEU ampullaires.

Dans la grande majorité de ces cas, on observe des lésions de la muqueuse et de la musculeuse tubaire (81 % des cas).

Le trophoblaste envahit la musculeuse tubaire ; elle peut même dépasser la musculeuse et continuer à se développer entre le péritoine et celle-ci.

L’apport vasculaire est important. Dans ces cas, les ruptures tubaires sont les plus hémorragiques.

On retiendra que l’implantation est le plus souvent intraluminale ou mixte avec, dans le premier cas, un respect de la musculeuse et, dans le deuxième cas, une atteinte de celle-ci.

La connaissance du mode d’invasion trophoblastique serait intéressante puisqu’elle permettrait de proposer un traitement médical ou un traitement chirurgical conservateur dans les cas d’implantation intraluminale, et un traitement radical dans les cas d’implantation mixte ou extraluminale.

On peut également distinguer deux modes d’implantation selon que la GEU s’implante en regard ou non du mésosalpinx.

Cette différence semble avoir une traduction clinique ; ainsi Kemp montre que sur 21 cas de GEU tubaires, les 13 GEU évolutives s’implantent toutes en regard du mésosalpinx tandis que sept des huit GEU non évolutives sont implantées du côté opposé au mésosalpinx.

Nous verrons que cette distinction, qui semble accessible au doppler couleur, pourrait participer au choix thérapeutique.

D - THÉORIES ÉTIOPATHOGÉNIQUES :

Le trophoblaste ne peut s’implanter que lorsque le blastocyste est sorti de la zone pellucide, soit 4 à 5 jours après l’ovulation.

À cette date, l’embryon se trouve normalement dans la cavité utérine.

Pour qu’il y ait une implantation tubaire, il est indispensable que l’embryon soit dans la trompe entre le quatrième et le septième jour.

Trois théories existent.

– Anomalie de captation de l’ovocyte. La trompe n’assure pas son rôle de captation de l’ovocyte.

Ceci entraîne une fécondation dans le cul-de-sac de Douglas.

Ce mécanisme permet d’expliquer l’existence de GEU non tubaires, ovariennes ou abdominales.

– Retard de migration.

La trompe n’assure pas le transport embryonnaire de façon correcte et 4 à 5 jours après l’ovulation, l’oeuf est toujours dans la trompe.

La cause peut être hormonale ou mécanique.

La progestérone favoriserait la migration de l’oeuf dans la trompe, alors que l’estradiol la freinerait.

Un excès d’estradiol serait donc susceptible d’induire cet asynchronisme.

Ceci pourrait expliquer l’augmentation d’incidences des GEU chez les femmes qui ont une insuffisance lutéale.

Les causes mécaniques sont plus évidentes.

Il peut s’agir de perturbations des cellules musculaires lisses tubaires ou des cellules ciliées.

Les arguments en faveur de cette théorie sont très nombreux : rôle délétère de la chirurgie tubaire, fréquence des adhérences lors des GEU, fréquence des lésions de la trompe proximale chez les patientes ayant présenté une GEU, déciliation fréquente chez les patientes porteuses de stérilet, rôle du tabac.

– Reflux tubaire.

C’est une théorie décrite en 1963.

Le blastocyste arrive normalement dans la cavité utérine, mais, sous l’effet de perturbations hormonales, il est renvoyé dans la trompe 6 à 7 jours après l’ovulation, à une date où le trophoblaste est un tissu particulièrement agressif.

Ce mécanisme permet d’expliquer les GEU après FIV.

E - HISTOIRE NATURELLE :

1- Hématosalpinx :

La GEU entraîne une érosion des vaisseaux tubaires, le saignement se collecte dans la trompe et conduit à une dilatation tubaire.

Ce mécanisme explique l’absence de corrélation entre la dimension de l’image échographique et l’évolutivité de la GEU.

Un volumineux hématosalpinx peut accompagner une GEU peu évolutive.

2- Rupture tubaire :

Elle correspond, soit à l’évolution ultime d’un hématosalpinx, soit à l’envahissement de la paroi tubaire par le trophoblaste.

La rupture est d’autant plus hémorragique que la GEU a une implantation proximale (interstitielle ou isthmique) ou en regard du mésosalpinx.

3- Avortement tuboabdominal :

Si la GEU s’implante superficiellement et si elle s’implante à l’opposé du mésosalpinx, sa vascularisation est parfois insuffisante.

La GEU se sépare alors de la paroi tubaire et est évacuée par le pavillon.

L’évolution peut se faire sur trois modes : la guérison spontanée, la grossesse ectopique abdominale (implantation du trophoblaste sur l’épiploon ou la séreuse utérine), ou l’hématocèle enkysté (comblement du Douglas par un hématome).

Diagnostic de la grossesse extra-utérine :

A - CLINIQUE :

1- Interrogatoire :

Il recherche l’ensemble des facteurs de risque précédemment décrits.

2- Signes cliniques :

La symptomatologie clinique de la GEU est hétérogène, allant de la forme asymptomatique de découverte fortuite à l’état de choc hémorragique.

Le nombre important d’examens paracliniques qui sont proposés pour faire le diagnostic de cette affection traduit bien les limites de la clinique.

Devant toute femme en période d’activité génitale qui consulte pour métrorragie ou pour douleurs pelviennes, le premier diagnostic à évoquer est la GEU.

Le tableau classique associe aménorrhée, douleurs pelviennes, métrorragies.

* Douleurs abdominales :

Présentes dans plus de 90 % des cas, il s’agit, contrairement à la douleur de la fausse couche qui est médiane, d’une douleur latéralisée.

Il n’existe pas de douleur spécifique de la GEU.

Cette douleur est parfois totalement absente.

Les scapulalgies appartiennent au syndrome péritonéal et correspondent à l’irritation diaphragmatique par l’hémopéritoine.

* Aménorrhée :

Elle se rencontre dans 70 % des cas.

Elle n’est parfois pas reconnue par la patiente ; en effet, les métrorragies peuvent être prises pour des règles.

* Métrorragies :

Elles sont classiquement de couleur brune, sépia, peu abondantes et récidivantes, et s’opposent ainsi à celles des fausses couches qui sont rouges et abondantes.

Elles sont la conséquence d’une stimulation hormonale de l’endomètre décidualisé.

Parfois les saignements sont absents ou au contraire plus abondants, simulant une fausse couche.

* Autres symptômes :

– Les signes sympathiques de grossesse sont inconstants.

– Toute syncope, lipothymie ou malaise doivent faire systématiquement évoquer la GEU, ces signes sont des signes de gravité et évoquent un hémopéritoine.

– Des épisodes de douleur de l’hypocondre droit doivent être recherchés et font évoquer un syndrome de Fitz-Hugh-Curtis.

– Un ténesme évoque une hématocèle mais n’est pas spécifique de la GEU.

– L’expulsion de la caduque est peu fréquente, source d’erreur diagnostique. Seul l’examen anatomopathologique permet de redresser le diagnostic.

3- Examen clinique :

* Tension artérielle, fréquence cardiaque :

Il est le plus souvent normal, rappelons que chez la femme jeune la tachycardie précède la baisse de la tension artérielle qui, même en cas de rupture tubaire, est tardive.

Mais même en cas de rupture, la tachycardie n’est pas constante…

* Palpation abdominale :

On retrouve souvent une sensibilité sus-pubienne ou une douleur provoquée en fosse iliaque.

Les signes du syndrome péritonéal doivent être recherchés : douleur controlatérale à la décompression (signe de Blomberg), défense péritonéale (celle-ci doit être recherchée avec la pulpe des doigts qui sont posés à l’horizontale et dépriment lentement la paroi abdominale).

* Examen au spéculum :

Il confirme l’origine endo-utérine des saignements, montre un canal cervical fermé.

Il exclut le diagnostic de fausse couche en cours.

* Toucher vaginal :

Classiquement, il retrouve un utérus de taille plus petite que ne le suggérerait l’aménorrhée, une masse annexielle sensible (50 %) ou une douleur d’un cul-de-sac (90 % des cas).

Le syndrome péritonéal inconstant comprend le fameux « cri du Douglas ».

4- Formes cliniques :

* État de choc hémorragique :

La patiente est le plus souvent adressée par le Samu avec un syndrome péritonéal net : abdomen hyperalgique, défense péritonéale, cri du Douglas, tachycardie, pâleur.

L’échographie, éventuellement réalisée aux urgences, confirme l’hémopéritoine avec comblement des gouttières pariétocoliques ; un sondage aller-retour permet de récupérer quelques centilitres d’urine sur lesquels les b-hCG sont réalisées.

Aucun examen paraclinique ne doit retarder la prise en charge.

L’anesthésiste, la panseuse sont immédiatement prévenus, l’indication opératoire est formelle et immédiate.

* Formes pseudoabortives :

Cette forme mime une fausse couche.

Les métrorragies sont rouges et abondantes, s’accompagnant de coliques expulsives.

C’est le bilan paraclinique qui redresse le diagnostic.

* Formes hétérotopiques :

Particulièrement trompeuses, il s’agit de l’association d’une GEU et d’une GIU.

Les formes spontanées sont rares, entre 1/3 000 et 1/10 000 grossesses ; elles sont plus fréquentes après FIV, atteignant dans certaines séries des taux de 1 %.

Dans ce cas, la constatation d’une GIU évolutive ne doit pas rassurer le médecin qui doit rechercher une masse latéro-utérine.

Le traitement est compliqué par le souci de préserver si possible la GIU.

* Hématocèle enkystée, GEU « chronique » :

Cette forme est devenue rarissime.

Le tableau clinique est dominé par des douleurs abdominales et des douleurs au toucher vaginal dans le cul-de-sac de Douglas, associées à un ténesme et à des épreintes.

Dans la série de Bedi, il existe 22 cas formellement diagnostiqués par examen histologique.

On note que dans un cas sur deux les b-hCG sont négatives. Une hématocèle semble survenir après une rupture tubaire à bas bruit ou un avortement tuboabdominal.

* GEU après hystérectomie :

Plus de 30 cas ont été rapportés dans la littérature entre 1895 et 1983, ces cas peuvent survenir dans les jours qui suivent mais aussi plusieurs années après une hystérectomie.

Les cas immédiats sont expliqués par un rapport sexuel dans les 48 heures qui précèdent l’intervention.

* GEU au début :

La GEU peut prendre la coelioscopie en défaut ; en cas de coelioscopie « blanche », il faut réaliser un curetage à la recherche de villosités choriales et un suivi par hCG.

* GEU bilatérale :

Elle doit être évoquée systématiquement en cas d’échec du traitement médical ou chirurgical.

* GEU après interruption volontaire de grossesse (IVG) :

Chez une femme qui consulte pour des métrorragies ou des douleurs abdominales après une IVG, la GEU doit être évoquée.

Il faut dans ces cas vérifier la réalité de la grossesse intra-utérine en demandant à la patiente l’échographie qui doit montrer un embryon intra-utérin, ou en récupérant les résultats de l’examen histologique du curetage.

+ En conclusion :

Comme l’a démontré Dart dans sa série de 441 femmes enceintes admises pour douleurs abdominales ou métrorragies, on doit retenir qu’aucun regroupement de signes cliniques n’est suffisamment sensible ou spécifique pour confirmer ou éliminer le diagnostic de GEU.

B - BILAN PARACLINIQUE :

Le couple b-hCG-échographie reste indispensable en cas de suspicion de GEU.

Les dosages biochimiques ont l’intérêt, contrairement à l’échographie, de ne pas être opérateur-dépendants et d’être disponibles à moindre coût.

1- b-hCG :

L’hCG est une hormone glycoprotéique produite par le blastocyste avant l’implantation. Elle est composée de deux sous-unités alpha et bêta.

La sous-unité alpha a une structure identique à celle des sous-unités de luteinizing hormone (LH), follicle stimulating hormone (FSH) et thyroid stimulating hormone (TSH).

La sous-unité bêta est spécifique de chaque hormone.

Le taux sérique d’hCG atteint sa valeur maximale entre 8 et 10 semaines de grossesse, puis décroît.

L’utilisation d’anticorps monoclonaux anti-hCG permet de dépister et de quantifier l’hCG dans le plasma dès le huitième jour postovulatoire, soit dès le 22e jour du cycle, donc avant le retard de règles.

Mais la valeur absolue d’hCG ne renseigne ni sur le siège ni sur le terme de la grossesse.

* Précaution d’utilisation :

Il existe trois standards de référence pour le dosage des b-hCG, il existe également plusieurs anticorps monoclonaux utilisés pour le dosage.

Ceci explique pourquoi seuls les taux de b-hCG issus d’un même laboratoire peuvent être comparés.

* Dosage qualitatif :

C’est le seul examen qui, négatif, permet d’exclure le diagnostic de GEU aiguë (en revanche, des b-hCG négatifs n’excluent pas le diagnostic d’hématocèle enkystée encore appelée par certains « GEU chronique »).

* Dosage quantitatif :

Un unique dosage d’hCG ne permet pas de diagnostiquer le siège d’une grossesse.

Des taux de 10 à plus de 100 000 UI/L sont observés dans les GEU.

* Cinétique des b-hCG :

La cinétique des b-hCG a un intérêt diagnostique, le temps de doublement des b-hCG est de 48 heures dans la plupart des GIU évolutives, mais 17 % des GEU ont un taux de doublement normal, tandis que 15 % des GIU évolutives ont une augmentation de moins de 66 % après 48 heures.

À j4, une diminution de plus de 50 % des b-hCG rend la fausse couche spontanée (FCS) très probable, une élévation de plus de 50 % des b-hCG rend la GIU possible, enfin une diminution ou une élévation de moins de 50 % rendent le diagnostic de GEU plus probable.

* Seuil de discrimination :

L’utilisation du seuil de discrimination a été proposée pour la première fois par Kadar en 1981.

Le seuil de discrimination est défini comme la valeur d’hCG la plus faible au-delà de laquelle un sac endo-utérin peut toujours être visualisé par échographie endovaginale.

Grâce à l’amélioration de la résolution des échographes et à l’utilisation de sondes endovaginales, ce seuil est passé de 6 000 UI/L en 1981 à 1 500 en 2000.

Il a fallu attendre 1998 pour que Mol et al étudient la valeur de ce seuil en fonction des signes cliniques et des signes échographiques en établissant des courbes ROC (Receiver Operating Characteristic Curver).

Ce seuil n’est pas influencé par les signes cliniques de la patiente, en revanche les signes échographiques (existence d’une masse annexielle ou d’un épanchement du Douglas) ont un impact sur le choix du seuil.

En l’absence d’épanchement et de masse latéroutérine, le meilleur seuil est de 2 000 UI/L ; en présence d’un épanchement ou d’une masse latéro-utérine, ce seuil doit être de 1 500 UI/L.

En effet, dans cette série de 354 patientes dont 129 avaient une GEU, cinq patientes avaient un taux d’hCG compris entre 1 500 et 2 000 UI/L, une échographie sans épanchement ni masse annexielle, et avaient une fausse couche.

Au-dessus de ce seuil, le diagnostic de GEU est porté, s’il n’y a pas de sac gestationnel visible dans l’utérus.

En dessous de ce seuil, le dosage de b-hCG doit être répété 2 puis 4 jours après.

Cette même étude démontre que la notion de seuil de discrimination ne s’applique qu’au premier prélèvement.

* Valeur de b-hCG et risque de rupture tubaire :

Il est aujourd’hui démontré que le risque de rupture tubaire n’est pas proportionnel au taux de b-hCG.

Dans une série de 693 GEU, la distribution des valeurs de b-hCG est la même dans le groupe des GEU rompues (n = 234) que dans celle des GEU non rompues (n = 459) et 11 % des femmes qui ont une GEU rompue ont un taux de b-hCG inférieur à 100 UI/L.

Une GEU rompue peut être observée avec des taux de 10 à 189 720 UI/L.

Cette notion doit être toujours présente à l’esprit des gynécologues obstétriciens et toutes les patientes candidates au traitement médical doivent recevoir une information sur les symptômes de la rupture tubaire et sur la conduite à tenir dans cette situation.

2- Progestéronémie :

La progestérone est principalement synthétisée par le corps jaune stimulé par des facteurs lutéotrophiques émis par l’embryon implanté.

La progestéronémie se distingue de l’hCG par deux caractéristiques : elle reste relativement stable durant les 8 premières semaines de gestation et sa demi-vie est courte (10 minutes). L’utilisation de ce marqueur a été proposée dès 1980 par Milwidsky.

La méta-analyse de Mol avait pour but d’évaluer l’intérêt diagnostique d’un dosage unique de progestérone. Dans les 13 études qui utilisent un seuil de 5 ng/mL, 0,3 % des GIU évolutives ont un taux inférieur à ce seuil (5/1 615).

Dans les 12 études qui utilisent un seuil de 20 ng/mL, 2,6 % des GEU ont un taux supérieur à ce seuil (29/1 107).

Pour Gelder, 2 % des GEU ont un taux supérieur à 25 ng/mL. Il est donc actuellement impossible de proposer un seuil qui mette la patiente à l’abri d’une erreur de diagnostic.

À notre connaissance, aucune étude prospective n’a recherché la valeur diagnostique du dosage de la progestérone en fonction du taux de b-hCG et des constatations échographiques (épanchement masse latéro-utérine), enfin ce dosage est ininterprétable si la patiente a reçu des progestatifs ou subi une stimulation hormonale.

3- Créatine kinase :

La créatine kinase est une enzyme contenue dans les cellules musculaires lisses tubaires.

Les auteurs qui ont proposé ce dosage expliquent que, en cas de GEU, le zygote pénètre l’épithélium tubaire et que, du fait de l’absence de couche sous-muqueuse dans la trompe, il est immédiatement en contact avec la musculeuse tubaire et entraîne la libération de créatine kinase.

Ce mécanisme est discutable en effet, comme nous l’avons vu lorsque la GEU se développe sur le mode « intraluminal », elle épargne dans plus de 80 % des cas la musculeuse tubaire.

Plusieurs études ont recherché la valeur prédictive du taux de créatine kinase pour le diagnostic de GEU, mais aucune étude n’a eu pour objet de valider un seuil prédéfini.

Les études sont discordantes ; ainsi, pour un seuil de 45 UI/L, les spécificités vont de 67 à 100 % ; pour d’autres, une spécificité de 100 % n’est atteinte que pour un seuil de 75 UI/L.

De plus, on doit se rappeler que le taux de cette enzyme diminue de 20 à 30 % chez une patiente qui est au repos au lit par rapport à une patiente active.

Actuellement, en dehors de protocole de recherche, ce dosage n’a pas sa place dans le cadre du diagnostic de GEU.

4- Rénine et prorénine :

Les ovaires sont le principal lieu de production extrarénale de rénine et de prorénine.

Le taux de prorénine augmente dès le début de la phase lutéale pour atteindre son pic vers 5 semaines d’aménorrhée (SA), et reste ensuite stable jusqu’au deuxième trimestre de la grossesse.

La rénine active s’élève dès le milieu de la phase lutéale et reste stable durant les 9 premières SA.

L’étude rétrospective de Zorn démontre que le dosage de prorénine n’est pas intéressant puisque l’existence d’un kyste de l’ovaire peut augmenter les taux.

En revanche, le taux de rénine est significativement plus bas dans les GEU par rapport aux GIU évolutives et aux FCS.

Par ailleurs, l’association d’un taux bas d’hCG (inférieur à 15 000 UI/L) et d’une rénine active basse (inférieure à 30 pg/mL) a une valeur prédictive positive de 75 %.

Enfin, une valeur de la rénine active supérieure à 33 pg/mL(25e percentile) semble être capable d’exclure le risque de GEU.

Là encore, une étude prospective est nécessaire pour vérifier l’intérêt de ces dosages.

5- Fibronectine cervicale :

Les études réalisées ont montré que ce dosage n’améliorait pas l’efficacité du diagnostic de GEU.

6- « Vascular endothelial growth factor » (VEGF) :

Le VEGF est un facteur angiogénique impliqué à la fois dans la croissance du trophoblaste et dans celle de l’endomètre.

Dans des conditions d’implantation défavorables comme lors d’une implantation tubaire, on peut s’attendre à ce que l’organisme réagisse par une élévation « réflexe » de la production de VEGF destinée à compenser ces conditions défavorables.

Cette hypothèse a été récemment testée par Daniel. Dans cette étude, la forme libre du VEGF a été dosée chez 40 patientes dont 20 GEU.

Avec un seuil de 200 pg/mL, le dosage du VEGF a une valeur prédictive positive de 86 %.

Ce dosage apparaît prometteur dans la mesure où, contrairement à la progestérone et à la b-hCG, le VEGF a un rôle au niveau du trophoblaste, mais aussi de l’endomètre.

Des études prospectives portant sur des séries plus nombreuses doivent être réalisées et étudier l’apport de ce dosage isolé ou en association avec les signes échographiques et le dosage de b-hCG.

7- Échographie pelvienne :

Le dosage des b-hCG et l’échographie sont les deux examens paracliniques les plus importants.

8- Échographie abdominale (vessie pleine) :

L’échographie endovaginale doit aujourd’hui être réalisée en première intention.

La voie abdominale nécessite une vessie en réplétion imposant une attente incompatible avec un diagnostic qui est souvent réalisé dans le cadre de l’urgence ; par ailleurs, elle impose d’utiliser des sondes de faible fréquence qui ont une moins bonne résolution.

On se souvient qu’il existe cependant quelques rares cas où l’échographie endovaginale est négative mais l’échographie abdominale positive.

L’échographie abdominale peut avoir un intérêt en cas d’utérus polymyomateux, rétroversé, ou chez une femme porteuse d’anomalie annexielle connue.

La réalisation d’une échographie abdominale et endovaginale augmente de 0 à 5 % la sensibilité du dépistage par rapport à l’échographie vaginale seule.

Les signes échographiques décrits par voie abdominale ne sont pas spécifiques de cette voie ; ils sont décrits ci-après.

9- Échographie endovaginale (vessie vide) :

* Signe direct de GEU : masse annexielle

+ Localisation :

L’exploration de l’annexe doit débuter par le repérage des ovaires et du corps jaune ; en effet, la GEU est située le plus souvent du côté du corps jaune (dans 85 % des cas selon Bourne).

La GEU apparaît souvent comme une masse annexielle anormale située près de l’ovaire : dans 95 % des cas, elle est située à moins de 1 cm de l’ovaire, en saillie par rapport au contour ovarien.

+ Description :

– Sac gestationnel.

Il peut s’agir d’un sac contenant un embryon avec une activité cardiaque (6 à 16 % des cas) ou contenant une vésicule vitelline ou un embryon, mais sans activité cardiaque.

Il s’agit parfois d’un sac vide entouré d’une paroi épaisse (de 4 à 6 mm) correspondant à la réaction trophoblastique donnant une image d’« anneau tubaire » (tubal ring ou annexal ring).

Le sac est une image anéchogène ovalaire ou arrondie de 3 à 40mm de diamètre, cerclée par un anneau hyperéchogène.

Il existe parfois une image échogène hétérogène de 3 à 9mm, peu spécifique échographiquement, mais très suspecte dans ce contexte. Le diagnostic de GEU par visualisation du sac ectopique est obtenu dans 48 à 69 % des cas de GEU.

– Hématosalpinx.

Image hétérogène, d’autant plus échogène et hétérogène qu’elle est récente, qui devient en quelques jours finement échogène et plus homogène ; cette image est dans l’axe de la trompe ; la masse est en grande partie avasculaire, sauf au niveau du trophoblaste qui peut être situé au sein de l’hématosalpinx.

– Hématocèle.

C’est une image échogène, hétérogène, complexe, située dans le cul-de-sac de Douglas.

Elle correspond à un amas de caillots associé à un sac gestationnel et à des adhérences.

Elle peut être prise à tort pour un pelvis inflammatoire ou une endométriose.

* Signes indirects de GEU :

+ Vacuité utérine :

Dans une GIU, l’échographie permet l’identification d’un sac gestationnel intra-utérin, avec près de 8 jours d’avance par rapport à la voie abdominale.

Même si un sac gestationnel est normalement visible dès 5 SA révolues, compte tenu des erreurs fréquentes d’âge gestationnel, la visibilité du sac ne doit pas reposer sur le calcul du terme mais sur les corrélations avec le taux de b-hCG.

En théorie, dans une grossesse normalement évolutive, le seuil de visibilité du sac gestationnel est de 1 000 UI/L et le seuil de visibilité de l’embryon de 3 000 UI/L.

Ce travail a été confirmé par d’autres études.

En revanche, comme nous l’avons vu au chapitre sur le dosage des b-hCG, le seuil est plus élevé si l’on veut éliminer une GIU non évolutive, le seuil est alors de 1 500 UI/L s’il existe un épanchement pelvien ou une masse annexielle et de 2 000 UI/L s’il n’y a pas d’anomalie échographique.

Au-delà de ces seuils, la non-visibilité d’un sac gestationnel fait porter le diagnostic de GEU.

L’absence de sac gestationnel peut être expliquée en cas d’obésité ou de rétroversion utérine.

La présence d’un sac gestationnel intra-utérin permet a priori d’exclure le diagnostic de GEU, mais deux pièges sont à éviter :

– les grossesses hétérotopiques : les cas spontanés sont rares (1/3 000 à 1/10 000) ; en revanche, ce diagnostic doit être systématiquement évoqué en cas de grossesse après FIV (1 %) ;

– le pseudosac gestationnel : c’est une image anéchogène de quelques millimètres de diamètre, hypotonique, dont les limites n’ont pas la netteté des contours de la couronne trophoblastique.

Il est toujours médiocavitaire, tandis que le sac gestationnel, implanté sous la muqueuse, est plutôt excentré.

Ces fausses images sont liées à la décidualisation de l’endomètre et à l’hémorragie endocavitaire.

Benacerraf a démontré, en 1999, que l’utilisation d’une sonde de 10 MHz permettait d’améliorer significativement le diagnostic de sac gestationnel par rapport à l’utilisation d’une sonde de 6 ou 7 MHz.

Ainsi, parmi huit patientes chez lesquelles il existait un sac de moins de 10 mm, l’utilisation d’une sonde de 10 MHz a permis d’éliminer le diagnostic de pseudosac en visualisant, soit la vésicule vitelline, soit la couronne trophoblastique.

+ Épanchement péritonéal :

C’est une image anéchogène, de taille variable ; il est le plus souvent limité au cul-de-sac de Douglas.

– Épanchement extrapelvien : la valeur diagnostique de l’épanchement augmente avec son volume. L’épanchement atteint parfois l’espace interhépatorénal et les gouttières pariétocoliques ; l’indication opératoire est alors formelle.

– Épanchement limité au pelvis : en cas de grossesse, l’existence d’un épanchement péritonéal n’est pas synonyme de GEU ; il peut en effet s’agir d’un épanchement d’origine ovarienne (rupture de kyste ovarien associée à une GIU).

En cas de GEU avérée, l’existence d’un épanchement n’est pas suffisante pour porter le diagnostic de rupture tubaire.

En effet, en cas d’avortement tuboabdominal, l’écoulement sanglant d’origine pavillonnaire est responsable d’un épanchement péritonéal. Dans une série récente, ce sont 94 % des GEU non rompues qui ont un épanchement péritonéal.

En revanche, l’absence d’hémopéritoine exclut la rupture tubaire.

+ Épaisseur et aspect de l’endomètre :

L’étude de Mehta a démontré que l’épaisseur de l’endomètre ne permettait ni d’exclure ni d’affirmer une GEU et ceci quel que soit le taux de b-hCG.

Ainsi, en cas de GEU, l’épaisseur endométriale varie de 2 à 20mm, alors qu’elle varie de 2 à 22mm dans les GIU évolutives et de 2 à 18mm dans les FCS.

L’étude de Spandorfer a également démontré que 11 % des GEU avaient un endomètre de plus de 8 mm et que 24 % des GIU (évolutives ou non) avaient un endomètre de moins de 8 mm.

De même, l’aspect en trois couches de l’endomètre n’est ni sensible ni spécifique de GEU.

* Performance de l’échographie dans le diagnostic de la GEU :

Brown a réalisé une revue de la littérature sur les performances de l’échographie dans le diagnostic de GEU.

Le meilleur critère échographique est la présence d’une masse annexielle, à condition qu’il ne s’agisse pas d’un simple kyste ni d’une lésion intraovarienne.

La présence d’une telle image a une spécificité de 98,9 % avec une sensibilité de 84,4 %, les valeurs prédictives dans une population où la prévalence des GEU est de 16 % sont respectivement, pour les valeurs prédictives positives et négatives, de 93,6 et 97 %.

La sensibilité de l’échographie endovaginale pour le diagnostic de GEU varie de 20 à 84 %.

En revanche, la spécificité varie entre 98,9 et 100 % selon les signes.

Il est donc capital de différencier les images intra- et extraovariennes, les images intraovariennes sont en effet le plus souvent dues à des anomalies du corps jaune.

En cas de doute sur la localisation de l’image annexielle, on peut s’aider d’une part de la palpation abdominale pour tenter de mobiliser la masse et d’autre part de la visualisation des follicules ; toute masse dans laquelle il n’existe pas de follicules est suspecte d’être extraovarienne.

L’intérêt de l’échographie est évident si les b-hCG sont supérieurs au seuil de discrimination.

En dessous de ce seuil, l’échographie est également capitale.

Ainsi, dans l’étude de Counselman, sur 18 patientes qui ont une GEU prouvée et un taux de b-hCG inférieur à 1 000, 16 ont des signes échographiques évocateurs de GEU.

* Limites de l’échographie :

Plusieurs études ont montré qu’en cas de suspicion clinique de GEU, 8 à 28% des patientes qui ont une échographie normale ont une GEU.

Une échographie normale ne permet pas d’exclure le diagnostic de GEU.

En cas de suspicion clinique de GEU avec b-hCG positif, il convient donc de répéter les examens.

De plus, l’échographie ne peut souvent être interprétée qu’en fonction du taux de b-hCG.

* Doppler :

+ Flux tubaire :

Le flux trophoblastique est caractérisé par des vitesses élevées et une faible résistance à l’écoulement, et cet aspect est le même qu’il s’agisse d’une grossesse intra- ou extra-utérine.

Une augmentation significative du flux dans la trompe, liée à l’invasion trophoblastique, peut faciliter le diagnostic de GEU.

En effet, l’index de résistance mesuré au niveau de la trompe atteinte diminue de 20 % en cas de grossesse tubaire.

Le doppler permettrait également de pouvoir apprécier la vitalité d’une GEU dans les GEU viables ; une série de 34 cas a montré que la couronne trophoblastique d’un sac de GEU viable était entourée d’une couronne vasculaire, tandis que les sacs des GEU non viables (susceptibles de guérir spontanément) étaient entourés d’un maximum de trois échodopplers.

+ Endomètre :

L’existence d’un flux artériel dans l’endomètre permet de diminuer la probabilité de GEU, mais il existe des faux positifs.

En revanche, l’existence d’un flux veineux endométrial ou l’absence de tout flux dans l’endomètre n’ont pas de valeur diagnostique.

+ Corps jaune :

Le doppler couleur peut aider au diagnostic de GEU en précisant la localisation du corps jaune.

+ Artère utérine :

Les résistances vasculaires des artères utérines et des artères spiralées diminuent au fur et à mesure qu’une GIU évolue.

En cas de GEU, les mesures répétées de l’index de résistance restent constantes dans les artères utérines.

En résumé, aucune étude prospective n’a démontré la supériorité du couple échographie doppler/b-hCG par rapport au couple échographie/b-hCG.

* Échographie tridimensionnelle :

Dans les GIU, l’invasion de l’endomètre entraîne une déformation de la cavité qui devient asymétrique, tandis que dans les GEU l’endomètre garde une forme symétrique.

Une étude a recherché la forme de l’endomètre dans le plan frontal.

Une asymétrie est constatée dans 83 % des GIU alors que la cavité est symétrique dans 90 % des GEU.

Là encore, il existe des faux positifs ; en effet, lors d’une GEU, une collection sanguine endométriale peut déformer la cavité.

10- Culdocentèse :

Classiquement, la ponction du Douglas était réalisée pour diagnostiquer un hémopéritoine, à l’heure actuelle, cette indication est désuète ; en effet, dans cette indication, la sensibilité de l’échographie est supérieure à celle de la culdocentèse.

De plus, la culdocentèse réalisée à l’aveugle entraîne un risque non négligeable de lésion des anses digestives ou de ponction vasculaire.

Afin de limiter les risques de la ponction, celle-ci doit aujourd’hui être réalisée sous échographie.

La culdocentèse a deux intérêts : elle permet d’une part de vérifier la nature d’un épanchement du Douglas, c’est-à-dire de différencier les épanchements citrins ou clairs des épanchements sanglants (en cas d’hémopéritoine, c’est le caractère incoagulable de l’épanchement. qui évoque la GEU), et d’autre part de calculer le ratio-taux de b-hCG du liquide péritonéal/taux de b-hCG sérique.

Oettinger a étudié ce ratio sur une série de 62 patientes et a démontré qu’en cas de GEU les taux d’hCG péritonéaux était supérieurs aux taux sériques, alors qu’en cas de GIU ces taux étaient similaires.

Le rapport b-hCG péritonéal/b-hCG sanguin est de 19,1 ± 16,9 en cas de GEU contre 1,1 ± 0,2 en cas de GIU.

À notre connaissance, aucun algorithme diagnostique n’utilise actuellement ce ratio.

11- Hystérosalpingographie :

Compte tenu de l’irradiation qu’elle entraîne, la grossesse est une contre-indication formelle de cet examen.

Tant qu’une GIU viable n’a pas été éliminée, cet examen n’a pas sa place dans le diagnostic de GEU.

12- Hystéroscopie :

Elle permet de vérifier la vacuité utérine et donc de différencier une GEU d’une GIU non évolutive.

Son intérêt est limité aux cas de suspicion de GEU en dessous du seuil de discrimination, mais même dans ce cas, aucune étude prospective n’a démontré son innocuité.

13- Imagerie par résonance magnétique :

Une équipe japonaise a étudié l’intérêt de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) dans le diagnostic de GEU.

Sur 18 cas, la sensibilité de l’IRM est de 80 % et la spécificité de 100 %.

L’IRM permet de visualiser l’hématosalpinx.

Selon les auteurs de cette étude, l’IRM est la seule technique qui puisse permettre de dater l’hématosalpinx, par ailleurs il peut exister un rehaussement de la paroi tubaire.

Là encore, les résultats de cette technique ne peuvent justifier le surcoût qu’elle provoque.

14- Coelioscopie diagnostique :

Depuis l’avènement des traitements médicaux, cette méthode diagnostique classique n’est plus systématique.

Le diagnostic de GEU peut en effet parfois être réalisé par le couple b-hCG/échographie ou par l’échographie seule ; la coelioscopie n’est plus indispensable pour faire le diagnostic. Dans les cas douteux, elle permet d’avoir un diagnostic rapide.

L’exploration de la cavité péritonéale peut montrer, soit un aspect typique d’hématosalpinx, soit une dilatation tubaire, soit un avortement tuboabdominal. Les signes indirects comprennent l’hémopéritoine et un éventuel syndrome de Fitz-Hugh-Curtis.

Une coelioscopie normale n’élimine pas une GEU ; en effet, il peut s’agir d’une GEU au début sans hémopéritoine ni hématosalpinx. Dans ce cas, la présence de quelques gouttes de sang, une nodosité tubaire sont des signes d’alarme.

Techniquement, il est recommandé de ne pas canuler l’utérus avant d’avoir exploré le pelvis, ceci évitant d’interrompre une GIU évolutive.

L’évaluation de la trompe controlatérale doit être systématique et doit précéder tout geste sur la trompe malade.

15- Microcoelioscopie :

Cette technique est basée sur l’utilisation de trocarts de faible diamètre qui permettent d’une part de réaliser l’intervention sous anesthésie locale et sédation parentérale, et d’autre part de minimiser les risques de blessure liés aux trocarts de gros diamètre.

Elle est utilisée par certains avec succès dans le diagnostic et le traitement (par injection in situ de méthotrexate [MTX]) des GEU.

À notre connaissance, cette technique n’a, dans le cadre de la GEU, fait l’objet d’aucune étude prospective comparative.

16- Curetage diagnostique :

La détection des villosités choriales par curetage puis examen microscopique a une faible sensibilité, ainsi aucune conclusion ne peut être tirée de l’absence de villosités choriales dans le curetage, que celui-ci soit réalisé à la canule de Karman ou par curetage ; en revanche, la présence de villosités choriales exclut le diagnostic de GEU.

Une décroissance des hCG de plus de 15 % 12 heures après un curetage est un signe de fausse couche. Si le taux de b-hCG s’élève, stagne ou diminue de moins de 15 %, le diagnostic de GEU est posé.

C - ALGORITHMES DIAGNOSTIQUES :

La prise en charge thérapeutique des GEU est passée par trois étapes : la laparotomie dans les années 1970, la coelioscopie dans les années 1980 et le traitement médical dans les années 1990.

Il est donc important d’avoir un diagnostic qui puisse reposer sur des techniques non invasives excluant la coelioscopie. Deux auteurs ont proposé de tels algorithmes.

1- Algorithme de Stovall (1990) :

En dehors des cas où la femme est admise avec un état hémodynamique instable, des cas où la GEU mesure plus de 3 cm et des cas avec activité cardiaque, Stovall propose un algorithme qui comprend le dosage initial de progestérone, les dosages de b-hCG, le curetage et l’échographie endovaginale.

Dans ce protocole, une augmentation de l’hCG de moins de 50 % en 48 heures est considérée comme excluant une GIU évolutive et entraîne la réalisation d’un curetage diagnostique.

Le seuil de progestéronémie en deçà duquel un curetage est effectué est discutable puisque 0,3 % des GIU évolutives ont un taux inférieur à 5 ng/mL.

De même, la réalisation d’un curetage diagnostique si l’hCG augmente de moins de 50 % en 48 heures est discutable puisque 15 % des GIU évolutives ont une augmentation de moins de 66 % en 48 heures.

Cet algorithme, très utilisé aux États- Unis, a selon Stovall une efficacité diagnostique de 100 %.

Cependant, parmi les 60 GEU décrites pas Stovall, 40 % avaient un état hémodynamique instable qui les excluait de l’algorithme, tandis que 2 % avaient une GEU avec activité cardiaque et 2 % une GEU de plus de 3 cm.

Ainsi, seuls 56 % ont pu bénéficier de son algorithme.

Cet algorithme est utilisé dans le monde par de nombreuses équipes.

2- Algorithme de Barnhart (1994) :

Sur 205 GEU, 18,5 % n’ont pas bénéficié de l’algorithme du fait de l’existence de signes de rupture.

Parmi les 167 patientes restantes, 41 % avaient un taux de b-hCG supérieur à 1 500 UI/L et 51/67 n’atteignaient pas le seuil échographique.

Cet algorithme repose sur les dosages répétés d’hCG et l’échographie endovaginale.

Dans ce schéma, le diagnostic de GEU est suspecté si les b-hCG sont supérieures à 1 500 et l’utérus vide, ou si les b-hCG sont inférieures à 1 500 et augmentent de moins de 66 % en 48 heures.

Parmi les patientes en dessous du seuil, 62 % ont un diagnostic dans les 4 jours qui suivent, et parmi les patientes au-dessus du seuil, 50 % nécessitent 48 heures d’attente.

Cet algorithme a une sensibilité pour le diagnostic de GEU de 100 % et une spécificité de 99,9 %.

L’intérêt majeur de ces algorithmes repose dans leur simplicité d’utilisation et leur reproductibilité, en particulier quand ils sont utilisés dans les services d’urgences.

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