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Gynécologie
Grossesse extra-utérine (Suite)
Cours de Gynécologie Obstétrique
 
 
 

Traitement :

Le traitement de la GEU fait appel à des traitements très différents, du moins invasif au plus invasif :

– abstention ;

– traitement par MTX ;

– microcoelioscopie ;

– coelioscopie avec salpingotomie ;

– coelioscopie avec salpingectomie ;

– laparotomie.

A - TRAITEMENT CHIRURGICAL :

1- Différentes techniques de traitement chirurgical :

Rappelons que deux temps sont systématiques dans la chirurgie de la GEU (que celle-ci soit réalisée par coelioscopie ou laparotomie) :

– l’exposition par une large toilette péritonéale : celle-ci permet, en coelioscopie, d’obtenir de bonnes conditions vidéo et, quelle que soit la voie d’abord, d’éviter les greffes trophoblastiques ;

– l’exploration pelvienne : il faut en effet vérifier immédiatement les deux annexes, la trompe controlatérale peut en effet être absente (antécédent de GEU ou trompe unique) et il serait préjudiciable de réaliser une salpingectomie et de s’apercevoir secondairement de l’absence de trompe controlatérale !

Le traitement chirurgical radical consiste en une salpingectomie, réalisée en passant au ras de la trompe, afin de limiter au maximum le risque de dévascularisation de l’ovaire.

La résection de la partie tubaire, qui permettrait théoriquement de diminuer le risque de récidive interstitielle, n’est pas justifiée ; en effet, dans une série de 75 cas de GEU interstitielle survenant après salpingectomie, 15 d’entre elles sont survenues malgré une résection cornuale.

Le traitement chirurgical conservateur peut être de trois types : pour certains la technique dépend de la localisation de la GEU ; pour d’autres la salpingotomie est réalisable, que la GEU soit isthmique, ampullaire ou fimbriale. Pour ces derniers, le siège de la GEU n’influe pas sur le taux de succès de la salpingotomie.

La salpingotomie est une incision réalisée au bord antimésial de la trompe sur la partie proximale de la GEU en utilisant un bistouri froid (par laparotomie) ou la pointe d’un crochet monopolaire en section (par coelioscopie).

Une fois la trompe incisée, la GEU est hydrodisséquée, puis la trompe irriguée avec du sérum.

L’hémostase est réalisée à la pince de De Bakey (par laparotomie) ou à la pince bipolaire (par coelioscopie).

La salpingotomie n’est pas suturée, elle cicatrise spontanément. L’expression tubaire est le traitement des GEU pavillonnaires.

L’intérêt de la résection tubaire segmentaire proposée par certains dans les GEU isthmiques est discuté, de nombreuses équipes préférant réaliser une salpingotomie.

* Laparotomie versus coelioscopie :

Trois études prospectives randomisées concernant 231 femmes ont comparé coelioscopie et laparotomie.

Dans toutes ces études, un état hémodynamique instable était un critère d’exclusion.

Les résultats sont unanimes : la coelioscopie permet une diminution des pertes sanguines, une diminution de la durée d’hospitalisation et une diminution des coûts.

Même si les taux de persistance de trophoblaste sont plus élevés dans deux séries, ceux-ci ne conduisent pas à un taux plus élevé de réintervention.

Il n’y a pas de différence significative dans les taux de récidive et ceux de GIU, que la patiente soit opérée par laparotomie ou laparoscopie.

En conclusion, pour ces trois équipes, il n’existe plus que trois indications de laparotomie :

– l’inexpérience de l’opérateur dans le maniement de la coeliochirurgie ;

– les contre-indications chirurgicales de la coelioscopie (antécédents de syndrome adhérentiel pelvien majeur, patientes multiopérées) ;

– les contre-indications anesthésiques de la coelioscopie (patientes en état de choc hypovolémique).

Cette dernière affirmation est discutable ; en effet, l’étude rétrospective de Soriano suggère que même les patientes en état de choc hypovolémique peuvent être traitées par coelioscopie.

La coelioscopie fournit à l’opérateur une meilleure exposition et permet de contrôler le saignement rapidement.

En cas de rupture tubaire, le traitement par coelioscopie permet de réduire significativement la durée d’hospitalisation.

Sous réserve de pouvoir réaliser immédiatement une laparoconversion, d’avoir une équipe anesthésique entraînée, même les GEU hémodynamiquement instables peuvent bénéficier d’une coelioscopie.

Compte tenu de l’urgence de ces situations, il est peu probable qu’une étude prospective puisse jamais être réalisée.

* Salpingectomie versus salpingotomie :

Ces deux techniques doivent être comparées sur trois points.

+ Efficacité :

Le traitement radical a par définition une efficacité de 100 %, le traitement conservateur une efficacité de 93 %.

Le traitement conservateur comporte en effet un risque de persistance du trophoblaste.

Ce risque varie entre 3 et 20 % et impose un suivi de tous les traitements conservateurs par des dosages de b-hCG réalisés une fois par semaine. Une augmentation ou une stagnation du taux d’hCG permet de diagnostiquer cette complication.

En cas de diminution de l’hCG, on peut analyser la vitesse de décroissance en reportant les chiffres sur les courbes de référence.

Les facteurs qui augmentent le risque de persistance du trophoblaste sont : une taille de GEU de moins de 2 cm, un traitement très précoce (avant 42 jours d’aménorrhée), un taux d’hCG supérieur à 3 000 UI/L en préopératoire. Un traitement prophylactique peut être réalisé.

Une étude prospective contrôlée randomisée a ainsi démontré qu’une injection intramusculaire de MTX de 1 mg/kg permettait de faire passer le risque de persistance du trophoblaste de 14,5 à 1,9 %.

Cinq pour cent des patientes ayant reçu la prophylaxie ont eu un effet secondaire du MTX, mais tous les effets secondaires étaient mineurs et ont disparu spontanément.

La persistance du trophoblaste pouvant entraîner des saignements potentiellement létaux, ce traitement prophylactique doit être évoqué à chaque fois qu’un traitement conservateur est réalisé, si la compliance de la patiente est mise en doute.

Le traitement curatif des persistances du trophoblaste repose sur le MTX qui, utilisé à la dose de 50 mg/m2, a une efficacité de 100 %.

La réalisation d’une salpingotomie expose également la patiente au risque de saignement peropératoire qui conduit à réaliser une salpingectomie d’hémostase.

Dans sa série rétrospective de 157 cas de tentative de salpingotomie, Milad observe 23 % de salpingectomie d’hémostase.

Cet auteur a démontré qu’au-delà de 8 000 UI/L de b-hCG, un échec de salpingotomie était hautement probable.

La taille de la GEU (échographique ou estimée en peropératoire), le type de localisation de la GEU (fimbriale, ampullaire, isthmique ou cornuale), l’existence ou non d’une rupture, l’existence ou non d’adhésions et l’âge gestationnel n’influencent pas le taux de succès de la salpingotomie.

+ Fertilité ultérieure :

Toute les études retrouvent un taux équivalent de grossesses après traitement conservateur ou après traitement radical.

Dans la revue de la littérature de Yao, sur un total de 2 635 GEU correspondant à neuf études, le taux de GIU est de 53 % après traitement conservateur et de 49,3 % après traitement radical. À notre connaissance, il n’existe pas de série prospective randomisée entre ces deux techniques.

Les études récentes de Mol et de Job-Spira confirment ces données ; même s’il existe une tendance vers plus de GIU après traitement conservateur, cette différence n’est pas significative.

L’étude rétrospective de Dela Cruz montre que le facteur qui modifie significativement les chances de fertilité n’est pas le type de chirurgie réalisé mais les antécédents d’infertilité.

Ce facteur est également retrouvé par d’autres auteurs.

S’il n’y a pas de facteurs de risque d’infertilité, le choix de la technique chirurgicale ne semble pas être déterminant ; en revanche, s’il existe des lésions tubaires, le traitement conservateur permettrait d’obtenir un taux de grossesse supérieur au prix d’un risque de récidive de GEU également supérieur.

L’état de la trompe controlatérale semble également un facteur important retrouvé par plusieurs auteurs.

Il est aujourd’hui impossible de savoir si les taux de GIU post-GEU sont influencés par le type de chirurgie, par l’état des trompes ou par les deux.

Dubuisson a montré que 93 % des grossesses après GEU surviennent dans les 18 mois suivant l’intervention et suggère, passé ce délai, la FIV.

Toutes les études relatives à ce problème comportent les mêmes limites : caractère rétrospectif et non randomisé, rendant les biais de sélection probables, absence de stratification des résultats selon l’état des trompes au moment de la chirurgie, délai de suivi variable selon les études, désir de grossesse non mentionné, mode de calcul différent des taux de grossesse (soit restreint aux grossesses à terme, soit étendu aux FCS et aux récidives de GEU).

Seule une étude randomisée prospective permettrait de répondre définitivement à cette question, mais elle nécessiterait plus de 1 000 patientes dans chaque bras et ne sera probablement jamais réalisée !

+ Risque de récidive de GEU :

La revue de Yao montre que le risque de récidive de GEU est de 10 % après traitement radical et de 15 % après traitement conservateur.

Là encore, c’est l’état tubaire avant l’intervention qui a probablement le rôle le plus important, même si mathématiquement le risque de GEU est augmenté en cas de conservation tubaire et diminué en cas de traitement radical.

En résumé, la salpingectomie est actuellement recommandée en cas :

– de saignement incontrôlable (échec de salpingotomie ou rupture tubaire) ;

– de récidive homolatérale de GEU ;

– chez les femmes qui ne désirent plus de grossesse ;

– dans les rares cas où la trompe porteuse de la GEU est visiblement lésée, alors que la trompe controlatérale est saine et perméable.

Un taux de b-hCG initial de plus de 8 000 UI/L doit faire, pour certains, préférer la salpingectomie.

La salpingotomie est recommandée chez les femmes qui n’ont qu’une trompe.

En l’absence de lésions tubaires, les deux techniques ont un pronostic identique sur la fertilité.

En cas de lésions tubaires, les avis sont divergents : pour les uns, le risque élevé de récidive de GEU doit faire préférer la salpingectomie ; alors que pour les autres, le taux de grossesse plus élevé doit faire préférer la salpingotomie.

2- Indications du traitement chirurgical :

Le traitement chirurgical est indiqué dans plusieurs situations :

– la rupture tubaire, que celle-ci soit suspectée cliniquement (syncope, défense, Blomberg, scapulalgie), biologiquement (anémie) ou échographiquement (épanchement péritonéal abondant) ;

– les GEU avec b-hCG > à 10 000 UI/L ;

– les GEU avec activité cardiaque ;

– les GEU hétérotopiques ;

– en cas de patiente non compliante (suivi par b-hCG impossible) ;

– en cas de récidive de GEU ;

– si le diagnostic nécessite la réalisation d’une coelioscopie.

3- Surveillance du traitement chirurgical :

Si un traitement conservateur (salpingotomie ou expression pavillonnaire) est réalisé, un suivi par b-hCG doit être effectué afin de dépister une persistance du trophoblaste qui justifie un traitement complémentaire par MTX.

Si le gynécologue pense que la patiente ne réalise pas les contrôles sanguins prescrits, il peut envisager un traitement prophylactique par MTX.

En cas de traitement radical, la surveillance par b-hCG est le plus souvent inutile (dans les cas où l’on observe en peropératoire une greffe trophoblastique péritonéale, on demande un dosage de b-hCG 15 jours après l’intervention).

4- Cas particulier : traitement des grossesses extra-utérines interstitielles, ovariennes et abdominales

Ces GEU sont une entité à part, leur traitement peut être radical mais il comporte alors un double risque : hémorragique et fonctionnel ; il peut être également à la fois « chirurgical » par laparotomie ou coelioscopie et « médical » par injection in situ de 50 mg/m2 de MTX.

B - TRAITEMENT MÉDICAL :

1- Différentes techniques de traitement médical :

* MTX :

Tanaka a été le premier, en 1982, à rapporter le traitement d’une grossesse interstitielle par MTX.

Les algorithmes diagnostiques qui permettent de réaliser un diagnostic purement médical de la GEU sont aujourd’hui disponibles.

La coelioscopie n’étant plus indispensable au diagnostic, une prise en charge purement médicale de la GEU est possible.

Le traitement médical permet d’éviter les risques liés à l’anesthésie et à la chirurgie.

Ce traitement médical peut être réalisé dans les hôpitaux universitaires ; il peut également être utilisé, avec le même taux de succès, dans les petites structures.

+ Mode d’action du MTX :

Le MTX est un antagoniste de l’acide folique, il inhibe la dihydrofolate réductase, enzyme nécessaire à la conversion de l’acide dihydrofolique, en acide tétrahydrofolique ; cela inhibe la synthèse des bases purines, empêchant ainsi la synthèse de l’ADN et inhibant la multiplication cellulaire.

Il est démontré que le MTX n’agit pas sur le syncytiotrophoblaste qui produit l’hCG, mais sur les cellules des cytotrophoblastes qui sont en phase de synthèse.

Cela permet de comprendre pourquoi, après une injection de MTX, il n’est pas observé de diminution rapide des hCG. Cette diminution est le plus souvent observée à partir du quatrième jour.

Par ailleurs, à un instant donné de la grossesse, le nombre de cellules cytotrophoblastiques en phase « S » diminue quand le terme augmente.

Le nombre de cellules-cibles qui peuvent être atteintes par le MTX diminue donc quand le terme augmente ; cela expliquerait la diminution de l’efficacité du MTX quand le terme augmente.

+ Trois protocoles :

Trois schémas thérapeutiques sont possibles : traitement intramusculaire monodose, traitement intramusculaire multidoses et injection in situ.

– Le traitement par injections répétées comporte quatre injections intramusculaires de 1 mg/kg de MTX à j0, j2, j4 et j6, avec des injections intramusculaires de 0,1 mg/kg d’acide folinique à j1, j3, j5, j7. De j7 à j14, aucun médicament n’est prescrit.

Un dosage d’hCG est réalisé à j14 et un échec est défini par un taux de b-hCG supérieur à 40 % du taux initial.

Entre 1982 et 1997, 338 cas de GEU ont été traités avec ce protocole, avec un taux de succès de 93 % (succès défini comme un protocole ne nécessitant pas d’autres thérapeutiques), un taux de trompes perméables de 58 % et un risque de récidives de GEU de 7 %.

En France ce protocole est peu utilisé, probablement en raison de sa toxicité ; en effet, dans sa série, Hajenius observe 4 % d’effets secondaires graves.

– Le traitement par injection unique est constitué d’une injection en intramusculaire à j1 de 50 mg/m2.

Un dosage d’hCG est réalisé à j4 et j7.

L’échec est défini si les b-hCG n’ont pas diminué de 15 % ou plus à j7 par rapport au taux de j4.

En cas d’échec, une deuxième injection est réalisée.

Si les b-hCG ont diminué de 15 % ou plus, le dosage est répété chaque semaine jusqu’à l’obtention d’un taux inférieur à 15 UI/L.

Un maximum de trois injections de MTX est réalisé.

À l’issue de ces trois injections, si les b-hCG ne diminuent pas, la patiente a un traitement chirurgical.

Le traitement avec injection unique a été réalisé pendant la même période chez 393 femmes.

Le taux de succès d’une injection est de 79 %.

Huit pour cent des femmes ont besoin d’une deuxième injection.

Le taux de succès total est de 87 %.

Le taux de trompe perméable et de fertilité ultérieure est identique à celui du protocole d’injections multiples.

Une série récente de 51 femmes retrouve les mêmes valeurs avec un taux de succès de 65 % avec une injection, de 78 % avec plusieurs injections et une perméabilité tubaire bilatérale de 80 %, et une perméabilité tubaire uniquement controlatérale à la GEU dans 20 % des cas.

La plus grande série de GEU traitées par injection unique comporte 350 cas et confirme ces résultats avec un taux de succès (sans chirurgie nécessaire) de 91 %.

Cette étude a démontré que seul le taux initial de b-hCG était un facteur prédictif de réussite du traitement médical. –

Le traitement peut également être réalisé par injection in situ sous contrôle échoguidé ou sous coelioscopie (n = 660).

On injecte alors in situ 100 mg de MTX.

Le taux d’efficacité est de 76 % et les taux de GIU, de perméabilité tubaire et de récidive de GEU ne sont pas améliorés.

L’avantage théorique de cette voie d’administration est de diminuer les effets secondaires du MTX.

En pratique, même avec cette voie, des effets secondaires ont été observés ; de plus, cette voie nécessite une technique invasive et n’apporte aucun bénéfice supplémentaire par rapport au traitement intramusculaire.

* Association MTX-mifépristone :

La mifépristone (RU 486, Mifégynet) est un antiprogestéronique puissant utilisé dans les interruptions de grossesse du premier trimestre en association avec les prostaglandines. Utilisé seul, il ne permet pas de traiter les GEU.

Il a été utilisé à la dose de 600 mg per os en association avec une dose de MTX de 50 mg/m2.

Deux études prospectives regroupant 122 patientes ont étudié cette association par rapport au traitement par MTX seul.

Au total, seules 55 femmes ont reçu l’association MTX-mifépristone.

Dans la série de Gazvani, les résultats ne sont pas significativement différents.

La seule série qui montre un bénéfice de l’association est la série non randomisée de Perdu et al dans laquelle 30 femmes ont reçu cette association.

Dans cette série, les douleurs abdominales post-MTX n’ont pas été traitées selon le même protocole induisant un biais important.

Une étude multicentrique prospective randomisée en double aveugle, réalisée sous l’égide du GROG, est en cours ; elle compare l’injection intramusculaire de MTX à l’injection de MTX associée à la prise de 600 mg de mifépristone.

* Autre traitement médical :

Les autres molécules n’ont été utilisées que dans de courtes séries.

Les prostaglandines de type F2a ont été injectées in situ ou de type E2 par voie systémique, cette dernière étant peu utilisée en raison de ses effets secondaires cardiovasculaires.

Le chlorure de potassium ou le glucose hyperosmolaire à 50 % (10 à 20 mL) peuvent être utilisés en injection in situ échoguidée, ils sont dénués d’effets secondaires graves et sont particulièrement indiqués en cas de grossesse hétérotopique ou de stagnation des b-hCG après un traitement par MTX pour éviter des doses itératives de MTX.

L’efficacité du chlorure de potassium est de 60 % et celle du glucose hyperosmolaire de 80 %.

Rappelons qu’en cas d’injection in situ il faut toujours commencer par aspirer le liquide du sac gestationnel.

2- Contre-indications et indications du traitement médical :

* Contre-indications absolues :

– Absence de compréhension ou de compliance au suivi.

– État hémodynamique (pouls, tension artérielle) instable.

– Épanchement extrapelvien à l’échographie.

– Coelioscopie nécessaire pour avoir un diagnostic de certitude.

– Antécédent de GEU homolatérale.

Dans toutes les études, les patientes ayant les contre-indications absolues citées ci-dessus sont exclues du traitement médical.

Contre-indications du MTX : anomalie du bilan hépatique (aspartate aminotransférase [ASAT] ou alanine aminotransférase [ALAT] supérieurs à deux fois les valeurs normales), anomalie du bilan rénal (créatinine supérieure à 133), thrombopénie (inférieure à 100 000/mm3), leucopénie (inférieure à 2 000/mm3), anémie.

La proportion des patientes chez qui l’on suspecte une GEU et qui bénéficient d’un traitement médical est très variable selon les équipes, allant de 32 à 77 %.

La place de l’échographie dans les algorithmes diagnostiques de la GEU est très importante et il est probable que le taux d’inclusion soit en partie lié au niveau d’expertise de l’échographiste.

* Contre-indications relatives :

+ Taux initial d’hCG :

Dans la série de Lipscomb, le taux d’hCG initial est le seul paramètre significativement lié au taux d’échecs du traitement médical.

Cette observation clinique confirme les données expérimentales de Deloia.

Kooi a montré qu’en dessous de 10 000 UI/L, le risque de rupture sous MTX était de 3 %.

Même si plusieurs équipes réalisent un traitement par MTX sans tenir compte des valeurs de b-hCG, le taux d’échecs élevé (plus de 20 %) au-delà de 10 000 UI/L rend ce traitement peu souhaitable.

+ Activité cardiaque :

La présence d’une activité cardiaque est considérée par certains comme une contre-indication absolue au traitement médical.

Dans la série de Lipscomb, le taux de succès est de 87,5 % en cas de GEU avec activité cardiaque.

Quoi qu’il en soit, le taux d’activité cardiaque positive est significativement plus élevé dans le groupe des échecs.

Cette notion est confirmée par l’étude récente de Tzafettas pour lequel le taux de succès est de 79 % dans le groupe avec activité cardiaque contre 89 % dans l’ensemble du groupe.

La présence d’une activité cardiaque témoigne de l’activité de la grossesse, les GEU avec activité cardiaque ont ainsi un taux de b-hCG plus élevé.

Dans la série de Lipscomb, une activité cardiaque est présente dans 5 % des GEU dont le taux de b-hCG est inférieur à 5 000 UI/L, mais dans 50 % des cas avec taux de b-hCG supérieur à 15 000 UI/L.

Au même titre qu’un taux d’hCG supérieur à 10 000 UI/L, la présence d’une activité cardiaque est associée à un taux significativement plus élevé d’échecs et constitue donc une contreindication relative au traitement par MTX.

+ Épanchement péritonéal :

Pour de nombreuses équipes, la constatation d’un épanchement péritonéal modéré (< 300 mL) et stable n’est pas une contreindication au traitement médical.

Ainsi, dans la série de Lipscomb, 33 % des patientes ont un épanchement du Douglas.

L’existence d’un épanchement n’est pas synonyme de rupture tubaire puisque seulement 50 à 62 % des épanchements sont associés à une rupture tubaire.

La valeur diagnostique de l’épanchement augmente avec sa taille.

Dans une série récente, 94 % des GEU sans rupture avaient un épanchement du Douglas.

L’existence d’un épanchement n’est pas prédictive du succès du traitement (32 % d’épanchement dans le groupe succès contre 40 % dans le groupe échec, p = 0,48).

Un épanchement péritonéal d’abondance faible ou modérée n’est pas une contre-indication au traitement médical.

+ Taille de la GEU :

De nombreux auteurs excluent du traitement médical les GEU dont la taille est supérieure à 3 ou 4 cm, mais récemment, plusieurs équipes ont inclus des GEU quelle que soit leur taille, incluant des images qui mesurent jusqu’à 52 mm.

L’étude de Lipscomb a montré que la taille de l’image échographique n’était pas un facteur prédictif du succès du traitement médical.

L’étude de Milad confirme ces données : la taille peropératoire ou l’estimation échographique peropératoire de la GEU ne sont pas corrélées au taux de b-hCG.

La taille de l’image ne reflète pas l’activité de la GEU, certains pensent même que l’existence d’un volumineux caillot organisé pourrait comprimer les vaisseaux qui alimentent la GEU et diminuer les saignements !

En effet, il est très difficile de distinguer au sein de l’image échographique ce qui correspond à des caillots et ce qui correspond à la grossesse proprement dite.

La taille de l’image échographique ne reflète pas l’activité de la grossesse et n’est donc pas une contreindication au traitement médical.

Des b-hCG initiales supérieures à 10 000 UI/L ou la présence d’une activité cardiaque doivent faire préférer un traitement chirurgical ; en revanche, l’existence d’un épanchement péritonéal modéré et la taille de l’image échographique ne reflètent pas l’activité de la grossesse et ne sont pas des contre-indications au traitement médical.

* Indications du traitement médical :

+ En première intention :

En cas de GEU pour laquelle le diagnostic ne nécessite pas de coelioscopie, en l’absence de contre-indications absolues au traitement médical, les GEU peu évolutives (sans activité cardiaque, avec des b-hCG inférieures à 10 000 UI/L et de diamètre inférieur à 4 cm) peuvent être traitées par MTX.

Le traitement médical peut également être proposé dans certains cas particuliers : GEU sur trompe unique, GEU interstitielle.

+ En deuxième intention :

Le traitement par MTX permet de traiter les persistances de trophoblaste qui s’observent après traitement chirurgical conservateur.

3- Surveillance du traitement médical :

* Effets secondaires du MTX : description, prévention

L’innocuité du MTX sur la fertilité ultérieure a été prouvée par son utilisation chez les patientes atteintes de tumeurs trophoblastiques depuis les années 1970.

Chez ces femmes, il n’y avait pas d’augmentation du risque de fausse couche, ni augmentation du risque d’anomalie congénitale ou de cancer.

Le MTX est un agent potentiellement toxique qui peut entraîner des accidents graves : myélotoxicité touchant les trois lignées, hépatotoxicité, atteinte pulmonaire à type de fibrose pulmonaire.

Dans une série de 51 femmes traitées pas quatre injections de MTX, Hajenius a constaté deux effets secondaires graves : un syndrome de Stevens-Johnson et une colite avec diarrhée sanglante fébrile.

Deux cas de myélotoxicité graves ont été rapportés dans la littérature, ainsi que deux cas de pneumopathie.

Nous avons récemment observé à l’hôpital Bichat une aplasie grave avec agranulocytose (30 polynucléaires neutrophiles [PNN]/mm3), thrombopénie (44 000) et anémie (7,7 g/dL) après administration de 200 mg de MTX.

Cette atteinte a nécessité un séjour en réanimation.

Des effets mineurs peuvent exister : atteinte des muqueuses buccale et gastrique, photosensibilité.

Dans la série de Hajenius, 61 % des femmes ont présenté un effet secondaire mineur : conjonctivite (35 %), nausée ou vomissement (25 %), stomatite (24 %), diarrhée (12 %), cytolyse hépatique (6 %) et cystite (4 %).

La supplémentation en acide folinique permet de limiter ces effets secondaires.

Ces cas permettent de rappeler l’importance du bilan préthérapeutique qui doit systématiquement comprendre un interrogatoire avec recherche d’une maladie immunosuppressive, numération-formule-plaquette, bilan hépatique et l’importance, en cas de traitement médical, de l’adjonction d’acide folinique .

Si des doses importantes de MTX s’avèrent nécessaires, on peut utiliser des produits non aplasiants comme le KCl.

* Syndrome de « séparation » :

Le traitement médical par MTX entraîne, dans environ la moitié des cas (33 à 60 %), une recrudescence des douleurs pelviennes dans les jours qui suivent le traitement. Cette douleur apparaît en moyenne 8 jours après l’injection, avec des extrêmes allant de 1 à 27 jours.

Ce syndrome est appelé, dans la littérature, le syndrome de « séparation ».

Si ce syndrome survient, le problème consiste à le différencier d’une rupture tubaire.

En effet, l’interrogatoire et l’examen clinique ne peuvent pas différencier avec certitude ces deux complications.

Ce syndrome entraîne le plus souvent une recrudescence de douleurs abdominales d’intensité modérée et dure moins de 48 heures.

En cas de douleur importante, une hospitalisation est justifiée.

La patiente peut être surveillée cliniquement et par des dosages répétés de l’hématocrite et de l’hémoglobine.

Dans ce contexte, la seule constatation d’un épanchement péritonéal n’est pas une indication chirurgicale.

* Risque de rupture tubaire et compliance des patientes :

Ce risque constitue la limite la plus importante du traitement médical.

En effet, le risque de rupture tubaire persiste pendant toute la durée du traitement par MTX.

La rupture peut survenir à des taux d’hCG compris entre 10 et 189 720 UI/L.

Onze pour cent des GEU rompues ont des taux d’hCG inférieurs à 100 UI/L.

La rupture peut survenir quelques heures ou jusqu’à 3 mois après le traitement par MTX.

Dans la série de Heard, sept des 11 ruptures surviennent lors de la décroissance des b-hCG.

Sur une série de 234 ruptures tubaires, Saxon a montré qu’aucun élément d’anamnèse, clinique, biologique ou échographique, ne permettait d’isoler toutes les femmes à risque de rupture. Ainsi, le nombre de facteurs de risque de GEU, l’âge gestationnel et le taux initial d’hCG, ne sont pas prédictifs.

Après analyse multivariée, seules la multiparité et l’absence d’antécédent de GEU placent la patiente dans un groupe à risque de rupture, ces deux paramètres traduisant probablement les retards diagnostiques qui se produisent dans cette population a priori à moindre risque.

Mol a tenté de réaliser un modèle pour prédire le risque de rupture tubaire.

Ce modèle inclut 13 paramètres dont les suivants : douleur abdominale, épanchement échographique du Douglas, âge gestationnel, taux de b-hCG.

Dans ce modèle, l’existence d’une douleur abdominale, d’un épanchement du Douglas, d’un âge gestationnel supérieur à 10 semaines, d’un taux de b-hCG supérieur à 8 500 UI/L entraînent une probabilité de rupture ou de saignement actif supérieure à 10 % !

Mol suggère de limiter le traitement médical aux patientes dont le risque de rupture est inférieur à 10 %.

Cette série est critiquable dans la mesure où elle repose sur l’étude de seulement 65 patientes (l’étude de Saxon, qui ne retrouvait pas les mêmes résultats, reposait sur 234 ruptures).

Les critères utilisés sont mal définis.

Ainsi l’épanchement péritonéal est une variable binaire (oui/non) alors qu’il est aujourd’hui démontré que ce n’est pas son existence qui a une valeur diagnostique, mais son volume.

Dans une série de GEU récente, 94 % des patientes sans rupture tubaire avaient un épanchement péritonéal.

Toutes les femmes traitées par MTX doivent bénéficier d’une information sur les signes de la rupture tubaire.

La compliance au suivi doit être optimale, ce traitement est à notre avis contre-indiqué chez les patientes qui ne peuvent comprendre ou suivre les conseils qui leur sont donnés.

Jusqu’à négativation des b-hCG, les patientes doivent éviter les rapports sexuels.

Les échographies endovaginales et les touchers vaginaux ne doivent pas être inutilement répétés.

* Cinétique des b-hCG après injection de MTX :

Après un traitement par MTX, les b-hCG augmentent souvent pendant les 4 premiers jours, ce délai d’action correspondant au mode d’action du MTX.

Stovall a montré qu’après MTX, 86 % des patientes avaient une augmentation des b-hCG entre j1 et j4.

Ce chiffre a été confirmé par d’autres auteurs.

Les taux de b-hCG diminuent entre j5 et j7 dans 97 % des cas.

Le dosage des b-hCG doit être poursuivi chaque semaine jusqu’à devenir inférieur à 15 UI/L.

Le délai nécessaire pour obtenir cette « négativation » des b-hCG, appelé « délai de résolution », est variable.

Dans la série de Lipscomb, le délai de résolution est en moyenne de 34 jours avec un extrême de 109 jours.

C - TRAITEMENT MÉDICAL VERSUS CHIRURGICAL :

Hajenius a réalisé une étude prospective contrôlée et randomisée comparant le schéma MTX multidoses et la salpingotomie coelioscopique.

Le taux de succès du traitement médical était de 86 % (succès = chirurgie non nécessaire), et le taux de succès de la coelioscopie était de 80 % (succès = MTX non nécessaire).

Le taux de perméabilité tubaire de la trompe porteuse de la GEU était de 55 % dans le groupe MTX et de 59 % dans le groupe salpingotomie, les taux de GIU étaient, à 18 mois, respectivement de 36 et 43 % pour le bras MTX et le bras coelioscopie.

Dans cette étude, le traumatisme chirurgical ne semble pas avoir un effet plus délétère que le traitement médical.

Cette dernière affirmation confirme le travail de Tolaymat pour lequel la perméabilité tubaire homolatérale est de 81 % après MTX et 72 % après salpingotomie.

Seules 32 % des patientes présentant une GEU ont pu bénéficier de ce protocole.

Fernandez a réalisé une étude qui compare le MTX par injection in situ échoguidée ou intramusculaire et la coelioscopie.

Le taux de succès est identique dans les deux groupes.

Ces résultats ont confirmé ceux des deux études précédentes. Nieuwkerk a récemment comparé l’impact de ces deux traitements sur la qualité de vie des patientes.

Pendant les 16 premières semaines, le traitement par MTX est moins bien toléré aux niveaux physique et psychique que le traitement coelioscopique.

Cette notion doit être connue et expliquée à la patiente avant de choisir le traitement.

En pratique, deux points limitent la diffusion du traitement par MTX :

– la nécessité d’obtenir une certitude diagnostique pour éviter de traiter des patientes qui ont une GIU évolutive ou une fausse couche (intérêt des progrès de l’échographie, intérêt de la microcoelioscopie sous anesthésie locale ?) ;

– le risque de rupture tubaire qui persiste jusqu’à négativation des b-hCG (nécessité de développer des outils qui permettent de prédire ce risque).

Dans l’avenir, les avancées technologiques permettront très probablement de dépasser ces obstacles et favoriseront une ample diffusion du traitement médical.

D - EXPECTATIVE :

Cette attitude a été prônée dès 1955 par Lund.

En effet, 9 à 26% des GEU guérissent spontanément.

De plus, l’expectative permettrait d’éviter un geste chirurgical délétère pour les trompes.

Dans la littérature, 628 GEU ont été traitées par expectative avec un taux de succès de 68 %.

Ce taux de succès est nettement inférieur à celui du traitement médical ou chirurgical.

Le problème réside dans la sélection des femmes qui pourraient bénéficier d’une abstention thérapeutique.

Les études publiées ont des critères d’inclusion différents rendant une méta-analyse impossible.

L’expectative est proposée pour des taux de b-hCG allant de moins de 250 à moins de 2 500 UI/L pour des GEU de diamètre allant de moins de 2 à moins de 5 cm, et dont le diagnostic est réalisé tantôt par échographie tantôt par coelioscopie.

L’étude de Shalev a montré que si on sélectionne les GEU dont le taux de b-hCG initial est de moins de 2 000 UI/L et diminue, le taux de succès de l’expectative est de 60 %. Pour Trio, le taux de succès est de 88 % en dessous de 1 000 UI/L.

L’ensemble des neuf séries qui ont inclus des patientes avec b-hCG inférieure à 1 000 UI/L trouve un taux de succès allant de 62 à 100 %.

Certaines équipes considèrent qu’un tel taux de succès justifie l’expectative, l’attitude active entraîne, selon les promoteurs de cette méthode, de très nombreux gestes inutiles !

Tant qu’aucun facteur ne permet de sélectionner les GEU susceptibles de guérir spontanément, cette attitude semble d’intérêt limité.

Par ailleurs, un traitement expectatif est formellement contre-indiqué en cas de GEU avec activité cardiaque, de GEU de plus de 4 cm ou de b-hCG supérieure à 2 000 UI/L.

L’argument qui consiste à mettre en avant l’effet délétère de l’expectative sur la perméabilité tubaire n’est pas fondé : après traitement expectatif, les trompes sont perméables dans 77 à 93 % des cas.

Après traitement expectatif, le taux de grossesse intrautérine varie de 68 à 83 % et le taux de récidive de GEU de 4 à 13%.

Il est en revanche exact de dire que même les patientes qui ont des taux de b-hCG initialement faibles et qui diminuent, ont un risque de rupture tubaire, risque qui persiste jusqu’à la négativation des b-hCG.

Une attitude d’expectative peut être discutée en cas de GEU hétérotopique.

L’expectative ne semble raisonnable que si les conditions suivantes sont réunies : patiente asymptomatique, masse inférieure à 3 cm, absence d’activité cardiaque, décroissance spontanée des b-hCG, taux initial inférieur à 1 000 UI/L.

Conclusion :

La GEU était classiquement une maladie « chirurgicale » traitée comme telle.

Aujourd’hui, des algorithmes diagnostiques permettent de réaliser un diagnostic et un traitement exclusivement médicaux.

Malgré les avancées diagnostiques et thérapeutiques, la GEU reste le plus grand ennemi du gynécologue pour deux raisons : la première est sa présentation clinique souvent insidieuse (GEU asymptomatique, GEU après stérilisation tubaire, GEU après DIU ou sous contraceptif, GEU hétérotopique) ; la deuxième est constituée par la rupture tubaire dont on ne connaît pas de marqueur prédictif et qui peut survenir même avec des taux de b-hCG de moins de 100 UI/L !

La diminution des décès maternels par GEU repose sur la prévention primaire : campagne de promotion des préservatifs, campagne de dépistage des Chlamydia, campagne antitabac.

La prévention secondaire repose sur l’éducation des femmes à risque et sur la diffusion des algorithmes diagnostiques.

Enfin, la prévention tertiaire repose, en cas de traitement médical, sur une information soigneuse des patientes qui doivent impérativement connaître les signes prédictifs de rupture tubaire.

La découverte d’un marqueur du risque de rupture tubaire permet de sélectionner au mieux les patientes candidates au traitement médical.

Aujourd’hui comme hier, l’aphorisme d’Henri Mondor est toujours valable : « La grossesse extra-utérine, y penser toujours c’est ne pas y penser assez. »

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