Glomérulopathie extramembraneuse Cours de Néphrologie
Physiopathologie
:
La glomérulonéphrite extramembraneuse (GEM) est caractérisée par
des dépôts sur le versant externe de la membrane basale
glomérulaire.
La cible antigénique se situe sur le podocyte.
La
protéinurie apparaît après la formation des dépôts, qui s’associent à
l’aplatissement des podocytes et à leur effacement.
Par la suite, la
membrane basale glomérulaire s’épaissit avec accumulation de
matrice extracellulaire.
La néphrite de Heymann constitue le modèle expérimental de la
GEM chez le rat. Dans ce modèle, les cibles antigéniques
identifiées sont la mégaline et le complexe protéique associé à la
mégaline (RAP pour receptor associated protein).
La mégaline est une
protéine transmembranaire de plus de 600 kD qui joue le rôle de
récepteur d’endocytose, fixant de multiples ligands tels que le
calcium, les apoprotéines E, J, et B 100, le complexe inhibiteur
activateur du plasminogène urinaire, des antibiotiques, la
lactoferrine, l’albumine, le complexe transcobalamine-vitamine B12,
la vitamine D binding protein et possiblement l’insuline
Dans le
rein, elle s’exprime dans les puits recouverts de clathrine à la surface
des podocytes et dans la bordure en brosse des cellules tubulaires
proximales.
Elle est également présente dans les cellules type II
pulmonaires.
Elle appartient à la famille des récepteurs low density
lipoprotein (LDL). Le complexe RAP se lie à la mégaline lors du
processus d’endocytose.
La RAP est essentiellement présente dans
le réticulum endoplasmique des podocytes.
La formation du
complexe inhibe la liaison de la mégaline à ses ligands.
Il existe un
seul épitope sur RAP, d’une longueur de 14 acides aminés.
L’injection d’un anticorps dirigé contre cet épitope a permis de
reproduire des dépôts d’immuns complexes.
De nombreux autres épitopes pathologiques sur la mégaline sont cependant nécessaires
pour la formation in situ de complexes immuns.
Les épitopes de la
mégaline sont situés dans les quatre domaines extracellulaires riches
en cystéine.
L’ensemble mégaline et RAP est désigné comme le
complexe antigénique de la néphrite de Heymann.
La néphrite de Heymann peut être induite par l’injection
intraveineuse de mégaline ou de RAP ou, de façon passive, par
l’injection d’anticorps antimégaline et anti-RAP.
Dans le modèle
passif, les dépôts sont détectés quelques minutes après l’injection et
la protéinurie apparaît 5 à 6 jours plus tard.
Les dépôts se forment
initialement dans les puits recouverts de clathrine situés à la base
du pied des podocytes, puis s’étendent sur le versant externe de la
membrane basale glomérulaire.
Les mécanismes de cette extension
vers la membrane basale, elle-même dépourvue de mégaline, ne sont
pas connus.
La formation de complexes immuns sur la surface membranaire des podocytes est responsable d’une activation du complément et de
l’insertion du complexe d’attaque membranaire C5b-9 dans la
membrane podocytaire via le récepteur à la vitronectine.
Ce
complexe d’attaque joue un rôle central dans les lésions podocytaires
et dans l’apparition de la protéinurie.
Son rôle a aussi été mis en
évidence chez l’homme.
Le traitement par venin de cobra après
induction de la néphrite de Heymann permet de bloquer
l’apparition de la protéinurie par déplétion en complément, alors
même que les dépôts de complexes immuns sont présents sur la
surface podocytaire.
Le podocyte répond à l’insertion membranaire
de C5b-9 par une endocytose de ce complexe, constituant
probablement un mécanisme de défense cellulaire.
Les vésicules
d’endocytose sont larguées dans l’espace urinaire, expliquant la
présence de C5b-9 dans les urines de patients atteints de GEM.
Dans
un stade avancé de néphrite de Heymann, associé au développement de la protéinuire, des complexes d’attaque sont
retrouvés dans la membrane podocytaire, ce qui pourrait être la
conséquence d’une limitation du système d’endocytose.
En réponse à l’insertion de C5b-9 dans la membrane podocytaire, de
nombreuses activités enzymatiques sont modifiées dans la cellule
podocytaire.
Une cascade d’activation d’oxydation va conduire à
l’apparition de la protéinurie.
L’enzyme oxydo-réductase
nicotinamide-adénosine-dinucléotide phosphate (NADPH) est
activée et l’effet antioxydant de la glutathion peroxydase et de la
superoxyde dismutase est diminué.
Le traitement par la vitronectine,
qui bloque l’insertion de C5b-9 après induction de la néphrite de
Heymann, permet de bloquer l’activation de l’oxydation dans la
cellule podocytaire.
L’oxydation génère des radicaux libres.
Des
capteurs de radicaux libres, administrés dans la néphrite de Heymann, permettent de diminuer l’intensité de la protéinurie sans
modifier l’intensité des dépôts.
Les radicaux libres engendrent à leur
tour une oxydation lipidique.
Les lipides membranaires ne sont pas
ceux qui sont directement oxydés, comme en témoigne l’absence de phosphatidylcholine oxydée dans la membrane.
De larges quantités
d’apolipoprotéine E (apoE) et d’apoB sont en revanche retrouvées
liées dans les complexes immuns à la mégaline, récepteur de ces
deux apolipoprotéines.
Ces apolipoprotéines sont soumises à
l’augmentation du pouvoir oxydant du podocyte.
Les produits de
l’oxydation lipidique de ces apolipoprotéines se lient au collagène
IV sur le domaine NC1 riche en résidus cationiques et pourraient
être responsables de la dégradation protéolytique de la membrane
basale.
Le probucol, qui bloque l’oxydation lipidique, s’est montré
capable expérimentalement de réduire de 85 % la protéinurie dans
la néphrite de Heymann.
On ne sait encore comment expliquer les modifications de
perméabilité de la membrane basale glomérulaire à la suite de ces
phénomènes.
Les modifications de structure du collagène IV mais
aussi l’oxydation des apolipoprotéines peuvent y contribuer.
On ne
sait le rôle précis des modifications des protéinases dans
l’augmentation de perméabilité membranaire.
L’insertion de C5b-9 induit de plus une augmentation de l’activité
de la gélatinase, de la métallo-protéinase 9, du facteur de croissance
des fibroblastes, du système phospholipase C, A2 et de la protéine
kinase C.
L’épaississement de la membrane basale glomérulaire
survient secondairement à l’accumulation des protéines de la
matrice extracellulaire.
Le transforming growth factor b (TGF-b)
pourrait jouer un rôle de médiateur dans cette accumulation.
Étiologies et associations
:
La GEM est le plus souvent idiopathique.
Les formes secondaires
représentent 20 % des cas, elles sont plus fréquentes chez l’enfant
que chez l’adulte.
Chez l’enfant, les causes infectieuses et le lupus érythémateux
disséminé sont les étiologies les plus fréquentes, tandis que les
causes néoplasiques et médicamenteuses prédominent chez l’adulte.
Les agents infectieux tels que le paludisme, la bilharziose et
l’hépatite B sont probablement les causes les plus fréquentes dans le
monde.
En Asie, l’hépatite B est répertoriée comme l’agent
étiologique le plus fréquent.
À Taiwan, où 20 % de la population
est AgHBs-positive, 96 % des enfants atteints de GEM sont AgHBs
positifs. Au Japon, où la prévalence n’est que de 2 à 3 %, 57 %
des enfants atteints de GEM sont AgHBs-positifs.
Aux États-Unis, la
prévalence de l’AgHBs est de 0,3 % dans la population générale et
de 20 % chez les enfants atteints de GEM.
Dans une population en
contact avec un porteur de l’antigène HBs, la fréquence de la
protéinurie augmente par rapport à une population témoin.
Le rôle pathogénique propre de l’antigène Hbs est discuté, son poids
moléculaire élevé ne lui permettant pas de franchir la membrane
basale glomérulaire.
Il est le plus souvent absent des dépôts immuns
en immunofluorescence.
L’antigène Hbe, d’un poids moléculaire de
30 000 daltons, est plus probablement l’agent pathogène. Il est le
plus fréquemment retrouvé dans les dépôts extramembraneux.
Dans cette forme étiologique, les patients peuvent avoir une hypocomplémentémie (27 à 91 % des patients).
Le pronostic est
relativement favorable, avec 8 % d’insuffisance rénale terminale dans
une série d’adultes.
Les facteurs de non-rémission identifiés sont
l’âge supérieur à 6 ans, la durée de la protéinurie supérieure à
12 mois, l’absence de séroconversion pour l’AgHBe, le stade
histologique II et III.
L’interféron alpha, anciennement recommandé
pour le traitement de l’hépatite B, n’avait pas d’effet thérapeutique reconnu sur la GEM lié au virus de l’hépatite B (HBV).
Des cas
de régression de la GEM sous traitement antiviral ont en revanche
été publiés.
Dans la GEM associée à l’infection par le virus de
l’immunodéficience humaine (VIH), un cas de rémission a été publié
après initiation du traitement antirétroviral.
Une réponse à la
corticothérapie a également été signalée dans cette étiologie.
Le syndrome néphrotique secondaire aux anti-inflammatoires non
stéroïdiens (AINS) est le plus souvent lié à une glomérulopathie à lésions
glomérulaires minimes, mais la survenue de GEM n’est pas rare.
Radford montre que sur 125 patients atteints de GEM,
29 avaient pris des AINS et 13 remplissaient des critères
d’imputabilité du médicament, avec notamment une régression
rapide de la protéinurie à l’arrêt de celui-ci.
Toutes les classes
d’AINS sont impliquées : diclofénac, fénoprofène, ibuprofène,
flurbiprofène, oxaproxine, sulindac, nabumétone, naproxène,
piroxicam et tolmetin.
Le mercure est un métal liquide très volatil même à température
ambiante. Il peut être absorbé par inhalation, ingestion ou à travers
la peau.
Sa toxicité est liée à des inactivations enzymatiques qui
engendrent en toxicité aiguë une pneumopathie interstitielle ou une
gastroentérite érosive, selon la voie d’intoxication, et une nécrose
tubulaire.
En intoxication chronique, le mercure affecte
principalement le système nerveux central et le rein par une atteinte extramembraneuse.
Les expositions anciennes rapportées sont les
diurétiques mercuriels, le dentifrice et les crèmes contenant du
mercure contre le psoriasis.
Le mercure est encore utilisé de nos jours
dans l’industrie notamment dans les batteries, les tubes fluorescents
et dans les appareils de mesure.
Des crèmes utilisées pour
blanchir la peau contiennent du mercure jusqu’à 2 000 fois le taux
autorisé et ont été incriminées dans la survenue de GEM.
L’intoxication au formaldéhyde survient dans des habitations où le
formaldéhyde a été utilisé dans des résines d’assemblage ou
anciennement dans l’isolation.
L’air en contient habituellement
moins de 0,01 particule par million (ppm) et peut en contenir jusqu’à
2 ppm dans des maisons ou mobile-homes où le formaldéhyde a été
utilisé.
À partir de 0,05 ppm, une forte odeur est sentie et des signes
d’irritation des yeux et des voies respiratoires peuvent apparaître.
L’exposition au formaldéhyde a également été rendue responsable
d’urticaires, de dermatoses et de cancers des voies ORL.
La classe V de l’OMS des atteintes rénales lupiques fait référence à
la GEM.
Elle représente environ 14 % des néphropathies du lupus
érythémateux disséminé (LEAD) si les classes associant une
prolifération cellulaire sont incluses et moins de 10 % sans les formes
prolifératives.
L’ancienne classification regroupait les GEM sans
prolifération cellulaire (pure, Va) et les GEM associées à une
prolifération extracapillaire diffuse (Vd).
Dans la nouvelle
classification de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les sousclasses
Vc et Vd ont été supprimées et réintégrées dans les classes
III et IV dont elles partagent le pronostic.
La GEM peut précéder la
survenue du LEAD clinique et l’apparition des facteurs
antinucléaires.
Certains signes histopathologiques, parmi lesquels
l’extension des dépôts immuns au versant endocapillaire et
tubulaire, la nature des dépôts et l’existence d’une prolifération
cellulaire mésangiale à extracapillaire, peuvent faire suspecter cette
étiologie.
Les dépôts associent communément des IgG, des IgM,
des IgA et du C1q.
L’hypocomplémentémie existe dans 6 à 59 % des
cas avec le plus souvent un taux d’anticorps anti-acide
désoxyribonucléique (ADN) faible, une faible capacité de
précipitation de ces anticorps et peu de complexes immuns
circulants.
La littérature fait état d’une survie rénale de l’ordre
de 80 à 90 % à 10 ans, l’évolution péjorative pouvant être liée à une
évolution fibrosante comparable à la forme idiopathique ou à une
transformation en néphropathie lupique proliférative de type III ou
IV.
La vascularite urticarienne hypocomplémentémique se
compliquerait le plus souvent de glomérulopathie
mésangioproliférative mais des cas de GEM ont également été
rapportés.
La thyroïdite de Hashimoto aussi bien que la maladie de Basedow
ont été décrites en association avec une GEM.
Des lésions rénales
ont été reproduites chez le lapin en injectant de la thyroglobuline,
avec prolifération des cellules endothéliales et épaississement de la
membrane basale glomérulaire.
La présence de thyroglobuline a
été démontrée le long de la membrane basale glomérulaire chez
l’homme au cours de GEM secondaires à une hyperthyroïdie.
Sur
une série de 84 patients atteints de thyroïdite auto-immune,
30 avaient un rapport urinaire protéine/créatinine anormal.
Il n’y
avait pas de relation démontrée entre le niveau d’auto-anticorps et l’existence
ou non d’une protéinurie dans cette série. Des cas de GEM après
traitement à l’iode radioactive ont également été rapportés.
Weetman recense l’apparition d’une protéinurie chez
neuf des 14 patients atteints de maladie de Basedow traités par iode
radioactive et sans protéinurie avant le traitement.
Il est possible
que le relargage de thyroglobuline au cours du traitement par iode
radioactif conduise au développement de la GEM.
Les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde peuvent développer
des GEM induites par les sels d’or ou la D-pénicillamine, mais
également spontanément.
Nakano recense neuf patients sans
traitement avant l’apparition de ce type d’atteinte rénale.
Des GEM avec atteinte extracapillaire en dehors du LEAD ont été
décrites en association à des anticorps antimembrane basale
glomérulaire ou anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles.
Chez l’enfant, il est décrit des GEM en association avec un
anticorps antimembrane basale tubulaire.
Cette forme se caractérise
par un syndrome de Fanconi complet ou incomplet et par la
possibilité d’atteintes extrarénales telles que hémorragie alvéolaire
et atrophie villositaire intestinale.
Sur le plan génétique, il existe des cas familiaux, des cas chez des
jumeaux homozygotes et une association à l’antigène
d’histocompatibilité DR3.
En Europe, il a également été démontré
des associations avec HLA B8, B18 et DQW2 et au Japon avec DR2
et DQW1.
Certains patients atteints de GEM présentent un allotype
rare du facteur properdine B (BfF1) associé à HLA B18 et DR3.
L’association GEM et diabète serait liée à la susceptibilité génétique
commune de ces deux maladies.
Le polymorphisme du gène TAP1,
gène codant pour une protéine transporteuse impliquée dans la
présentation antigénique, est augmenté chez les patients avec GEM.
Ce gène est présent dans la région du complexe majeur
d’histocompatibilité HLA II.
Évolution et facteurs pronostiques
:
La survie rénale est de l’ordre de 90 % à 5 ans
et de 65 % à 10 ans.
L’évaluation précise du potentiel évolutif de la
maladie doit permettre, au stade initial et au cours de l’évolution,
d’apprécier la nécessité de débuter un traitement (évaluation du
rapport bénéfice/risque).
Le travail de Schieppati est une étude prospective sur la GEM
réalisée chez des patients sans traitement.
Sur 100 patients atteints
de GEM, la probabilité de survie rénale à 5 ans était de 88 ± 5 % et à
10 ans de 73 ± 7 %.
Cette étude incluait 37 patients non néphrotiques
et la moyenne de protéinurie sur la cohorte était de 5 ± 3,6 g
24 heures–1.
Soixante-deux pour cent des femmes et 59 % des
hommes étaient en rémission partielle ou complète à 4 ans.
Les seuls
facteurs de pronostic défavorable étaient le sexe masculin et l’âge
supérieur à 50 ans.
Au moment du diagnostic, la présence d’un
syndrome néphrotique, d’une hypertension artérielle, le taux de la
protéinurie ne sont pas des facteurs pronostiques.
Depuis la
publication de cet article et l’avènement des traitements
immunosuppresseurs dans la GEM, soit en une décennie, a-t-on pu
affiner le risque évolutif d’un patient se présentant avec une GEM ?
Pei et al. ont tenté de quantifier le risque évolutif à l’aide d’un
modèle utilisant les facteurs pronostiques les plus importants, à
savoir la protéinurie et sa durée, la clairance de la créatinine et la pente 1/créatininémie en fonction du temps.
Cette étude incluait
184 patients ayant au diagnostic une fonction rénale normale.
Sur
une moyenne de suivi de 5,8 ans, 26 % des patients vont développer
une insuffisance rénale et 26 % vont entrer en rémission.
Cinquante
pour cent des patients recevaient des corticoïdes et 26 patients un
immunosuppresseur additionnel.
Dans le modèle étudié pour le
pronostic, le traitement immunosuppresseur n’avait pas d’influence
sur l’incidence de l’insuffisance rénale ni sur le pourcentage de
rémission.
La protéinurie sans notion de sa durée avait peu de
valeur prédictive.
Une valeur de protéinurie supérieure à 8 g
24 heures–1 pendant plus de 6 mois est associée au risque le plus
élevé de développer une insuffisance rénale chronique, avec une
probabilité de 66 %.
Inversement, même quand elle est supérieure à
8 g 24 heures–1, une protéinurie de durée inférieure à 6 mois a une
valeur prédictive négative d’insuffisance rénale chronique de 88 %,
traduisant la possibilité de rémission spontanée quel que soit le
niveau de protéinurie.
Si la protéinurie se situe entre 6 et 8 g
24 heures–1 et si elle perdure 9 mois ou plus, le risque d’insuffisance
rénale est de 55 %.
Ce modèle va bénéficier d’une large validation sur trois populations
originaires du Canada, d’Italie et de Finlande (363 patients).
Pour
prédire l’évolution vers l’insuffisance rénale chronique (clairance de
la créatinine < 60 ml min–1), la probabilité de progression prend la
forme :
P = exponentielle Y/(1 + exponentielle Y)
avec Y = [1,26 + (0,3 × taux moyen de protéinurie sur la période de
suivi en g/24 h–1) – 0,3 × (pente 1/créatinine pendant le suivi en ml
min–1 et par mois) – 0,05 × clairance de la créatinine à l’entrée dans
la période de suivi].
Ce modèle est applicable pour les patients ayant une clairance
supérieure à 60 ml min–1 au diagnostic.
Le modèle permet
d’améliorer la précision (sensibilité × spécificité) par rapport à la
protéinurie seule.
Par rapport à un critère de protéinurie
supérieure à 3,5 g j–1, le modèle améliore la spécificité (89 versus
28 %) mais diminue la sensibilité (75 versus 92 %).
Par rapport à un
critère de protéinurie supérieure à 8 g j–1 pendant plus de 6 mois, le
modèle améliore la sensibilité (83 versus 58 %) mais diminue la
spécificité (86 versus 93 %).
D’autres facteurs pronostiques ont également été mis en valeur et
confirmés dans une méta-analyse sur 1 248 patients ayant inclus les
études prospectives et rétrospectives.
À noter tout
particulièrement l’excrétion d’immunoglobulines G (IgG), de C5b-9
et de b2microglobulines, qui sont attachés à un risque de
progression vers l’insuffisance rénale avec un pouvoir prédictif
élevé.
Traitement
:
A - TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE
:
Le traitement symptomatique doit être discuté quel que soit le
niveau de fonction rénale et de protéinurie.
Le traitement
immunosuppresseur n’a de place que pour les patients ayant un
syndrome néphrotique persistant et suivant le niveau de fonction
rénale.
Le traitement symptomatique optimal pourrait comprendre :
inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou inhibiteur de
l’angiotensine II ou leur association et inhibiteur de l’hydroxy-3-méthyl glutaryl coenzyme A (HMG CoA) réductase.
Dans des essais prospectifs, les IEC diminuent l’excrétion protéique
de l’ordre de 25 à 50 % chez des patients néphrotiques.
Certains patients ne répondent cependant pas au traitement de façon
significative, ce qui pourrait constituer un facteur pronostique
additionnel.
Praga a ainsi rapporté un effet antiprotéinurique allant
de 0 à 85 % parmi 11 patients.
La réponse aux IEC pourrait bien
être un facteur pronostique indépendant, non corrélé au degré de
protéinurie ni à l’excrétion de C5b-9.
La réduction de protéinurie est
un bon marqueur d’amélioration du pronostic rénal même si la
démonstration directe d’une amélioration du pronostic de la GEM
par les IEC n’a pas à ce jour été faite.
L’effet des inhibiteurs de l’angiotensine II a été moins étudié dans le
cas de GEM que celui des IEC.
L’effet antiprotéinurique est probable,
par analogie avec l’effet démontré dans la glomérulopathie
diabétique.
Un seul cas a été rapporté à ce jour avec une réduction
de protéinurie.
Enfin étant donné l’intérêt de l’association IEC-inhibiteur
angiotensine II, démontré par des études prospectives
dans la glomérulopathie diabétique (COOPERATE), cette association
mériterait une évaluation dans la GEM et peut d’ores et déjà faire
partie du traitement symptomatique d’emblée ou en cas de
persistance d’une protéinurie néphrotique sous IEC.
L’étude chez l’animal montre que l’hyperlipidémie accélère la
progression de l’insuffisance rénale en induisant l’équivalent de
lésions athéroscléreuses intraglomérulaires et en accélérant les
lésions fibreuses interstitielles.
Dans une étude prospective portant
sur neuf patients atteints de GEM avec syndrome néphrotique, la
simvastatine, comparée au régime seul, a permis non seulement une
amélioration du bilan lipidique, mais aussi une réduction de la
protéinurie et une augmentation significative de l’albuminémie (26 à
46 g l–1).
Malgré cela, la progression de l’insuffisance rénale dans
le groupe simvastatine a été comparable à celle du groupe avec
régime seul.
L’effet du probucol a été démontré chez l’animal, avec une réduction
de protéinurie pouvant atteindre 85 %.
Cet effet passe par
l’inhibition de la peroxydation des lipides et pourrait bloquer
l’altération de la membrane basale, en dépit de la formation de
complexes immuns à sa surface.
Cet effet a également été retrouvé
en clinique humaine, dans une série de 15 patients néphrotiques
résistants à un traitement immunosuppresseur (n = 7) et(ou) traités
par IEC (n = 12) à raison de 1 g par jour pendant 3 mois.
Un
ensemble de traitements antioxydants, visant également à
l’inhibition de l’effet de peroxydation lipidique, est en cours
d’évaluation.
Le schéma suivant a été proposé : vitamine C 1 200 mg
j–1 (à adapter à la fonction rénale), a tocophérol 600 UI j–1, b carotène
6 mg j–1, sélénium 60 µg j–1, N-acétylcystéine 200 mg j–1.
Chez une
patiente, atteinte d’un syndrome néphrotique sévère résistant au
traitement immunosuppresseur, cette association a permis une
réduction des produits de peroxydation lipidique, avec réduction
urinaire du complexe d’attaque C5b-9 et diminution parallèle de la
protéinurie.
Les patients atteints de GEM ont un risque thrombotique élevé.
En
cas de syndrome néphrotique, le risque de thrombose est évalué en
moyenne à 35 % (5 à 60 % selon les études) pour les thromboses des
veines rénales et entre 8 et 44 % pour les événements thrombotiques
d’une autre localisation.
En d’autres termes, l’incidence mensuelle
de thrombose clinique est de 0,5 % pour les thromboses des veines
rénales et de 1 % pour les thromboses d’un autre site.
Ces
événements sont encore plus fréquents en cas de GEM et
d’hypoalbuminémie sévère (< 20 g l–1).
La probabilité d’une embolie
pulmonaire en cas de thrombose veineuse profonde non traitée est
de l’ordre de 50%.
L’embolie pulmonaire est source d’un taux élevé
de mortalité.
D’un autre côté, le traitement anticoagulant induit un
risque hémorragique lié à l’intensité du traitement et à des facteurs
de risque :
– âge supérieur à 65 ans ;
– antécédent d’hémorragie intestinale ;
– antécédent d’hémorragie d’une autre origine ;
– facteurs de comorbidité sévères tels que infarctus du myocarde
récent, insuffisance rénale, maladie hépatique, cancer ;
– fibrillation supra-ventriculaire.
Le syndrome néphrotique induit une variabilité plus grande
d’efficacité liée à la variabilité de la fixation protéique.
Au total,
l’incidence d’événements hémorragiques chez les patients avec un
ou deux facteurs de risque est de l’ordre de 0,25 % par mois ou de
3 % par an.
Ce risque s’élève à 17 % par an pour les patients avec
plus de trois facteurs de risque.
En analyse de décision, le traitement
anticoagulant prophylactique se justifie chez les patients néphrotiques d’autant qu’ils sont atteints de GEM et qu’ils ne
présentent pas plus de deux facteurs de risque de saignement.
En effet, chez ces patients, le nombre d’embolies pulmonaires fatales
prévenues par un traitement anticoagulant prophylactique avant
tout événement thrombotique est supérieur au nombre
d’hémorragies induites par le même traitement.
La pentoxifylline (Torentalt) réduit la synthèse de TNF a.
Elle a été
testée dans une étude ouverte à raison de 1 200 mg j–1 chez
10 patients atteints de GEM avec syndrome néphrotique, naïfs de
tout traitement et avec une durée d’atteinte rénale allant de 7 à
46 mois.
À 6 mois de traitement, quatre étaient en rémission
partielle du syndrome néphrotique et cinq en rémission complète.
Le traitement a peu d’effets secondaires et pourrait être conseillé
même à ce niveau de preuve (recommandation de rang C).
B - TRAITEMENTS IMMUNOSUPPRESSEURS
:
1- Corticoïdes et agents alkylants (chlorambucil,
cyclophosphamide)
:
Deux méta-analyses permettent d’assurer des recommandations de
bonne qualité (rang A).
Dans la méta-analyse de Hogan, sept
études prospectives (dont six randomisées mais aucune contre
placebo) ont été incluses.
Cinq comparaient les corticoïdes à
l’absence de traitement immunosuppresseur et trois comparaient
une combinaison de corticoïdes et d’un agent alkylant à l’absence
de traitement immunosuppresseur.
Ces études n’incluaient que des
patients néphrotiques. Une analyse complémentaire portait sur trois
études ne comprenant pas de groupe sans traitement ou comparant
un traitement autre qu’un agent alkylant et une dernière analyse
incluait, en plus de ces 10 études, 22 séries rétrospectives décrivant
l’évolution sans traitement, sous corticoïdes ou sous agent alkylant.
Trente-trois études ont été exclues soit parce qu’elles ne distinguaient
pas l’évolution suivant le type de traitement soit parce qu’elles
s’intéressaient uniquement aux rémissions ou aux rechutes.
Sur
l’ensemble de ces études, 78 % des patients étaient néphrotiques.
Sur
l’ensemble de la cohorte de 1 189 patients, le taux de survie rénale
est de 0,86 à 5 ans, de 0,65 à 10 ans et de 0,59 à 15 ans.
Le taux de
survie à 5 ans était identique dans les sept études prospectives.
À
5 ans, dans ces mêmes études, le taux de survie rénale était de
0,80 sans traitement ou sous corticoïdes et de 0,99 sous agent alkylant. Cette différence n’atteignait cependant pas le seuil de
significativité.
Les conclusions sont similaires sur l’ensemble des
32 études. D’après les études prospectives, la probabilité de
rémission est plus importante avec le traitement alkylant comparé à
l’absence de traitement et non modifiée par les corticoïdes.
Les conclusions principales de cette méta-analyse sont donc les
suivantes : le pronostic rénal est mis en jeu à long terme (> 10 ans) ;
il n’y a pas d’effet bénéfique rénal des corticoïdes seuls (que ce soit
en termes de survie rénale ou de rémission du syndrome
néphrotique) ; les agents alkylants ont un effet bénéfique en termes
de taux de rémission du syndrome néphrotique sur une durée de
24 à 36 mois après le début du traitement, sans effet significatif sur
la survie rénale.
Imperiale avait publié des résultats identiques dans une métaanalyse
portant sur cinq études prospectives randomisées évaluant
l’intérêt de la combinaison de corticoïdes et d’un agent alkylant, soit
un effectif total de 228 patients : les agents alkylants augmentent la
probabilité d’une rémission complète d’un facteur 4,6 (risque relatif
2,2-9,3) et d’une réponse en termes de diminution de la
protéinurie de 2,3 (RR 1,7-3,2), sans effet qui puisse être démontré
sur la préservation de la fonction rénale.
Il importe de souligner que les méta-analyses n’ont pas différencié
les traitements comprenant du chlorambucil ou du
cyclophosphamide.
Ponticelli conclut à une efficacité comparable
dans une étude prospective randomisée portant sur 97 patients
traités en cures mensuelles alternées de corticoïdes et d’un agent
alkylant (chlorambucil ou cyclophosphamide) pendant 6 mois.
À un niveau de preuve inférieur à celui de ces deux méta-analyses,
il existe un faisceau de présomptions en faveur d’une préservation
de la fonction rénale avec les protocoles comportant un agent
alkylant.
Le premier argument est tiré des données de l’équipe de Ponticelli, promotrice de ces traitements alternés, relatives à 10 ans
de suivi chez des patients néphrotiques sans insuffisance rénale au
début du traitement (critère exact : créatininémie < 150 µmol l–1).
Sur 81 patients randomisés pour recevoir un traitement
immunosuppresseur ou le seul traitement symptomatique, la
probabilité d’être en vie sans dialyse à 10 ans était de 0,92 pour les
patients sous immunosuppresseurs contre 0,60 chez les patients sous
traitement symptomatique ; cette différence est significative
(p = 0,0038).
Le deuxième argument vient d’études rétrospectives ayant inclus
des patients avec altération de la fonction rénale.
Reichert mentionne
une régression de créatininémie de 260 à 186 µmol l–1 chez 10 patients,
significative après 6 mois de traitement, avec un effet qui semble
perdurer jusqu’à 18 mois pour disparaître à 3 ans.
Branten retrouve un effet similaire sous cyclophosphamide per os
pendant 1 an, avec une régression de l’insuffisance rénale de 38 %
en valeur médiane chez 39 patients (créatininémie moyenne initiale :
226 ± 108 µmol l–1).
L’amélioration persistait à 36 mois chez
18 patients suivis pendant cette période.
Environ 40 % des
patients retirent un bénéfice du traitement, la progression vers
l’insuffisance rénale chronique terminale étant retardée d’environ
2,5 à 3 ans.
Dans une étude rétrospective portant sur 39 patients avec
atteinte de la fonction rénale, 20 ont reçu un traitement
symptomatique et 19 un traitement immunosuppresseur alterné.
La
probabilité de survie rénale à 4 ans sans dialyse était de 55 % pour
les patients sans immunosuppresseur contre 90 % avec
immunosuppresseur.
Les facteurs de gravité au moment de la
biopsie et lors de l’apparition de l’insuffisance rénale étaient
comparables dans les deux groupes.
Enfin, deux études rétrospectives ont été publiées après les métaanalyses
chez des patients sans insuffisance rénale. L
es résultats sont
mitigés.
Ils font état, dans de petits groupes de patients, d’une
réduction du risque d’insuffisance rénale terminale, significative
dans l’étude de Polenakovik et non significative dans celle de
Stirling, ne permettant pas de contredire les données des méta-analyses.
2- Azathioprine
:
Deux études anciennes contrôlées n’ont mis en évidence aucun
bénéfice du traitement par azathioprine en combinaison avec les
corticoïdes.
Les études plus récentes sont rétrospectives.
Ahuja
n’a constaté aucun effet favorable de l’association azathioprinecorticoïdes
chez 38 patients comparés à 20 témoins sans traitement
immunosuppresseur.
Seule l’étude de Brown a montré, chez des
patients néphrotiques avec insuffisance rénale, un bénéfice en faveur
de l’association avec une régression de l’atteinte rénale et une
diminution de la protéinurie.
L’ensemble de ces études est
cependant en défaveur de l’utilisation de l’azathioprine.
3- Mycophénolate mofétil
:
Le mycophénolate mofétil (MMF) inhibe de façon spécifique la voie
de synthèse de novo des bases puriques en épargnant la voie de
sauvetage.
Cette propriété permet, dans une certaine mesure, une
action plus spécifique sur les lignées lymphocytaires, qui utilisent
préférentiellement cette voie de synthèse alors que les autres lignées
cellulaires peuvent avoir recours à la voie de sauvetage.
Le MMF a
une action antiproliférative sur les lymphocytes, avec une réponse
diminuée en présence de mitogène et diminue la réponse humorale
des lymphocytes B.
Dans le modèle murin de la néphrite de Heymann, le MMF s’est
montré capable de prévenir l’apparition de la protéinurie, la
formation des dépôts glomérulaires et l’infiltrat interstitiel lorsqu’il
est administré dans les 4 semaines qui suivent l’injection
d’antigènes.
Au-delà de ce délai, le MMF est en revanche
inefficace.
Les études chez l’homme ne sont que des études ouvertes.
Deux
auteurs ont rapporté leur expérience, qui porte sur un total de 25 patients néphrotiques.
La dose efficace est de 1,5 à 2 g par
24 heures.
Tous les patients étaient en échec d’un traitement par
corticoïdes + agent alkylant, sauf trois chez qui le MMF a été prescrit
d’emblée.
Les résultats sont une réduction de protéinurie dans les
deux études, sans modification de la créatininémie, avec une durée
médiane de suivi de 8 et 9 mois respectivement dans les deux
études.
La réponse en termes de réduction de la protéinurie
s’observe dans les deux études entre 3 et 6 mois.
Si aucune réponse
n’est obtenue à 6 mois, le traitement doit donc être interrompu.
Les
effets secondaires principaux sont la leucopénie, les symptômes
gastro-intestinaux et les infections virales par des virus du groupe
herpès.
La place du MMF dans le traitement de la GEM ne peut encore être
établie d’après le résultat de ces deux études, qui méritent d’être
complétées par des essais randomisés les comparant aux traitements
par corticoïdes et agent alkylant actuellement recommandés chez les
patients à haut risque évolutif.
Le MMF pourrait actuellement être
proposé comme traitement de seconde intention en cas d’échec du
traitement de première ligne, comme c’était le cas dans les deux
études ouvertes, ou pour limiter la corticothérapie en cas de rechute
de syndrome néphrotique (recommandation de rang C).
4- Fludarabine
:
La fludarabine est un analogue nucléosidique des bases puriques
qui a également une action plus spécifique sur les lymphocytes.
Boumpas a rapporté sept observations de patients atteints de GEM
néphrotiques résistants à un traitement par corticoïdes seuls ou avec
agent alkylant ou ciclosporine, traités pendant 6 mois par cures
mensuelles de fludarabine.
La réduction de
protéinurie a été supérieure à 50 % chez cinq patients sur sept et
non significative sur l’ensemble de la cohorte.
La fonction
rénale est restée en moyenne stable sur les 6 mois.
Il y a pas
d’étude de suivi à plus long terme. Aucune recommandation ne peut
découler de cette étude unique.
5- Tétracoside (Synacthène)
:
Seule une étude ouverte est à ce jour publiée, ne permettant pas de
faire pour le tétracoside de recommandation de prescription.
Les
auteurs se sont intéressés en premier lieu à l’effet hypolipémiant et
ont recherché une réduction des LDL et de la lipoprotéine (a).
L’étude portait sur 14 patients atteints de GEM avec syndrome néphrotique.
Quatre patients avaient été traités auparavant selon le
schéma de Ponticelli, sept par corticoïdes seuls et trois n’avaient
jamais été traités.
Ils ont reçu le tétracoside à dose progressivement
croissante pendant 8 semaines, jusqu’à obtention de la dose
considérée comme optimale, soit 1 mg trois fois par semaine.
Par la
suite, cinq patients atteints de GEM avec syndrome néphrotique
sévère corticorésistant ont été traités pendant 1 an à raison de deux
injections de 1 mg par semaine.
Les concentrations de cholestérol,
de triglycérides, d’apolipoprotéine B et de lipoprotéine (a) ont
diminué de façon significative après 8 semaines de traitement, de
même que la protéinurie (réduction médiane de 80 %) et la
créatininémie (réduction médiane de 28 %).
Douze patients sur
14 ont été mis en rémission partielle du syndrome néphrotique.
La
réduction de la protéinurie et de la créatininémie était maintenue à
30 mois pour les cinq patients ayant poursuivi le traitement pendant
1 an.
Chez les patients traités pendant 8 semaines, l’arrêt du
traitement a été suivi d’une nouvelle augmentation de la créatininémie et de la protéinurie dans un délai de 1 mois.
La dose
optimale proposée par les auteurs est de 2 mg par semaine.
Les résultats de cette étude apparaissent spectaculaires quant au
nombre de patients mis en rémission partielle et au taux de réponses
en termes d’amélioration de fonction rénale.
Aucune
recommandation issue de cette seule étude ouverte ne peut
cependant être formulée avant que des études à venir ne viennent
confirmer ou infirmer cette expérience.
6- Ciclosporine
:
L’étude de meilleure qualité, randomisée contre placebo, a porté sur
51 patients traités par corticoïdes à la dose de 0,15 mg kg–1 j–1 plus
ciclosporine à la dose de 3,5 mg kg–1 j–1 ou par corticoïdes à la même
dose plus placebo.
Soixante-quinze pour cent des patients (21/28)
sous ciclosporine ont eu une rémission partielle ou complète sans
détérioration de la fonction rénale contre 22 % dans le groupe
placebo.
Le pourcentage de rémission à la fin du suivi de
78 semaines est resté différent entre les groupes (39 versus 13 %).
Le
taux de doublement de la créatinine au cours de la même période
était similaire dans les deux groupes (7 versus 9 %).
Une
augmentation initiale de créatininémie dans le groupe ciclosporine
a été observée chez neuf patients contre trois dans le groupe placebo.
La réduction des doses de ciclosporine a été suivie d’une
amélioration chez sept patients tandis que l’aggravation s’est
poursuivie chez les deux autres malgré l’arrêt du traitement.
Le
nombre de patients hypertendus et la sévérité de l’hypertension
étaient plus grands sous ciclosporine.
La première étude effectuée par la même équipe avait permis de
relever chez 17 patients un ralentissement du rythme de progression
de l’insuffisance rénale (-2,05 contre –0,73 ml min–1 mois–1), fait
non confirmé dans l’étude ultérieure publiée en 2001.
L’amélioration du syndrome néphrotique est donc le bénéfice
majeur du traitement par ciclosporine, tandis que le bénéfice en
termes de préservation de fonction rénale reste à prouver, d’autant
que se surajoute à long terme la néphrotoxicité de la ciclosporine.
7- Rituximab
:
Le rituximab est un anticorps monoclonal dirigé contre l’antigène
CD20 présent à la surface des lymphocytes B.
Un essai inaugural a testé le rituximab chez huit patients
néphrotiques avec clairance de la créatinine supérieure à 20 ml
min–1.
Ces patients étaient sans rémission depuis une moyenne de
29 mois, sous IEC à pleine dose et statine, et n’avaient pas reçu de
traitement immunosuppresseur antérieur.
Ils ont reçu au total quatre
perfusions hebdomadaires de 375 mg m−2 de rituximab.
Au cours
d’une période de 20 semaines, deux patients sont entrés en
rémission complète et trois en rémission partielle (protéinurie < 3,5 g
24 heures−1).
À la fin de l’étude, la protéinurie avait diminué de
62 %. Selon une étude complémentaire à 1 an, la protéinurie était
inférieure à 0,5 g 24 heures–1 chez deux patients et inférieure à 3,5 g
24 heures–1 chez trois patients. Le suivi de ces mêmes patients a montré la persistance d’un bénéfice
à 12 mois, avec une réduction persistante de 66 % de la protéinurie
par rapport à l’état basal.
La fonction rénale est restée stable pendant
cette même période, mais il n’y a pas eu d’analyse de la fonction
rénale avant et après traitement.
Aucune conclusion quant à la
préservation de fonction rénale ne peut actuellement être avancée.
La même équipe a rapporté sous forme d’abstract les facteurs
prédictifs de réponse au rituximab.
Seuls les facteurs
histologiques ont une valeur prédictive, avec une moindre réduction
de protéinurie chez les patients à index élevé de lésions tubulointerstitielles
et vasculaires.
8- Immunoglobulines
:
Une équipe japonaise a rapporté son expérience chez 86 patients
atteints de GEM, suivis au moins 5 ans, dont 30 ont été traités par
immunoglobulines de façon ouverte. Le traitement comprenait
une à trois cures d’immunoglobulines à raison de 100 à 150 mg kg–1
j–1 pendant 6 jours.
Il y avait respectivement 68 et 70 % de patients néphrotiques dans les groupes avec et sans Ig.
La créatininémie était
inférieure à 1,5 mg dl–1 dans la majorité des cas dans les deux
groupes.
Dans le groupe n’ayant pas reçu d’Ig, 39 % des patients
ont reçu des corticoïdes associés à un agent alkylant et 30 % des
corticoïdes seuls.
L’analyse de la survie à 15 ans par la méthode de
Kaplan Meier n’indique aucun bénéfice en termes d’allongement de
la survie rénale (18 % de perte rénale dans le groupe Ig contre 10 %
dans le groupe témoin).
Recommandations pour le traitement immunosuppresseur
:
Issues de ces constatations, seules des recommandations concernant le traitement par corticoïdes ou agent alkylant ont été publiées à ce jour.
Les corticoïdes ne doivent pas être employés seuls pour le traitement de la GEM.
Le traitement par l’association agent alkylant et corticoïdes induit des rémissions prolongées.
Il doit être réservé aux patients à haut risque de
progression vers l’insuffisance rénale.