Glomérulopathies à dépôts organisés d’immunoglobulines Cours de Néphrologie
Introduction
:
Le terme de glomérulonéphrite à dépôts organisés
d’immunoglobulines (Ig) est préférable au terme de
glomérulonéphrite fibrillaire, qui regroupe des entités
anatomocliniques très différentes allant de l’amylose, dont il existe
une quinzaine de variétés en fonction de la nature du précurseur
circulant,
à la fibrillose d’origine collagène, pouvant être observée
au cours des glomérulopathies diabétiques, en passant par des
glomérulonéphrites fibrillaires familiales, avec des dépôts constitués
par exemple de fibronectine.
Par ailleurs, le qualificatif de fibrillaire
a été utilisé dans la littérature indifféremment pour désigner des
dépôts constitués de fibrilles (substructures pleines) ou de
microtubules (substructures avec lumière centrale). Le même
reproche peut être fait pour le qualificatif immunotactoïde proposé
par les auteurs américains.
Les glomérulonéphrites immunotactoïdes ont été par la suite démembrées en glomérulonéphrites
fibrillaires pseudoamyloïdes et glomérulonéphrites
microtubulaires.
La confusion persiste encore dans la
littérature entre ces différents types de dépôts organisés et la
recherche de la monotypie ou de la monoclonalité de l’Ig déposée dans les
glomérules n’est pas toujours effectuée.
Le diagnostic de
glomérulonéphrite fibrillaire pseudoamyloïde et de
glomérulonéphrite microtubulaire nécessite une étude
ultrastructurale de la biopsie rénale ; celle-ci étant de moins en
moins pratiquée de nos jours, l’incidence de ces néphropathies
glomérulaires est certainement sous-estimée (moins de 1 % des
biopsies effectuées sur les reins natifs).
Glomérulopathie fibrillaire
amyloïde AL
:
A - PRÉSENTATION CLINIQUE
:
Les patients souffrant d’amylose AL sont âgés en général de plus de
50 ans. Le rein est atteint dans 50 % des cas et le coeur dans 40 %.
Moins de 10 % des patients n’ont pas de chaîne légère d’Ig
monoclonale détectable dans le sérum ou les urines.
La présentation
clinique rénale est le plus souvent une protéinurie glomérulaire non
sélective rapidement néphrotique, sans hématurie microscopique
significative.
La recherche d’amylose sur la biopsie du rein est
pratiquement toujours positive en cas de manifestation clinique
rénale.
L’amylose AL est toujours secondaire à une prolifération
monoclonale de cellules de la lignée B manifestement maligne ou
apparemment bénigne et nécessitant une étude poussée de la moelle
osseuse pour être mise en évidence.
En dehors de l’atteinte rénale, l’amylose AL est souvent responsable d’un purpura cutané périoculaire, d’une macroglossie, d’un syndrome du canal carpien,
d’une neuropathie périphérique et autonome, d’une
cardiomyopathie restrictive et d’une hépatomégalie.
La survie
médiane est de 12 mois.
B - NATURE ET SIÈGE DES DÉPÔTS
:
Les dépôts fibrillaires amyloïdes AL sont extracellulaires, amorphes,
éosinophiles, faiblement PAS positifs, rouge Congo positifs, avec une
biréfringence et un dichroïsme vert-jaune en lumière polarisée.
En microscopie
électronique, ces dépôts sont formés de fibrilles rectilignes, non
branchées, de 8 à 10 nm de diamètre externe, sans lumière centrale
individualisable.
Ces fibrilles
sont disposées en tout sens, au hasard, en tas d’épingles et forment
des dépôts de densité variable. Ces dépôts sont constitués d’une chaîne légère d’Ig
monoclonale le plus souvent lambda (kappa/lambda = 1/4) avec
une prédominance du sous-groupe de variabilité lambda 6, ou
plus exceptionnellement d’une chaîne lourde c (amylose AH) délétée
dans sa région constante des domaines CH1 et CH2.
Associées
à ce précurseur immunoglobulinique, peuvent être mises en
évidence des protéines non spécifiques, c’est-à-dire pouvant être
rencontrées dans tous les dépôts amyloïdes quelle que soit leur
nature : composant amyloïde P sérique, glycosaminoglycanes,
apolipoprotéine E et amyloid enhancing factor. La nature
immunoglobulinique d’une amylose peut être affirmée facilement
sur des tissus congelés par l’utilisation de sérums spécifiques antichaînes
légères et, plus exceptionnellement, anti-chaînes lourdes
d’Ig.
Les gammapathies monoclonales, fréquentes chez les sujets
âgés, peuvent coexister avec une amylose d’origine non
immunoglobulinique, ce qui rend indispensable l’identification des
dépôts par les anticorps appropriés.
Les amyloses héréditaires
constituées de la chaîne alpha mutée du fibrinogène, de transthyrétine mutée ou de l’apolipoprotéine A1 mutée peuvent être
de révélation tardive, à l’âge où l’amylose AL est la plus
fréquente.
L’amylose AA complique les états inflammatoires
chroniques, la fièvre méditerranéenne familiale et le syndrome de Muckle et Wells : un sérum spécifique anti-SAA permet facilement
le diagnostic.
C - TRAITEMENT
:
Sur le plan thérapeutique, seule la chimiothérapie lourde suivie de
l’autogreffe de cellules souches hématopoïétiques circulantes peut
permettre une rémission.
La mortalité et la morbidité de cette
thérapeutique peuvent être réduites par une bonne sélection des
malades souffrant d’amylose AL et sa mise en oeuvre précoce, avant
la survenue d’une atteinte cardiaque et/ou hépatique trop évoluée.
L’effet thérapeutique d’anticorps monoclonaux anti-feuillets b est
démontré dans certains modèles expérimentaux murins d’amylose
AL.
Des inhibiteurs compétitifs pharmacologiques de la fixation
du composant amyloïde P sur les fibrilles amyloïdes sont
actuellement à l’étude chez l’homme.
Glomérulonéphrites avec dépôts
organisés non amyloïdes
d’immunoglobulines :
Elles comprennent les glomérulonéphrites à dépôts fibrillaires pseudoamyloïdes et à dépôts tubulaires.
A - PRÉSENTATION CLINIQUE
:
La présentation rénale de ces deux entités n’est pas différente, avec
une protéinurie glomérulaire non sélective de rang néphrotique dans
deux tiers des cas et une hématurie microscopique fréquente.
L’hypertension artérielle et l’insuffisance rénale chronique sont
communes.
L’insuffisance rénale progresse rapidement vers le stade
terminal dans 50 % des glomérulonéphrites fibrillaires, plus lente et
plus rare dans les glomérulonéphrites microtubulaires, avec
rémission possible du syndrome néphrotique induite par le
traitement d’une prolifération B lymphocytaire ou plasmocytaire
assez souvent associée.
Les atteintes extrarénales et
extraglomérulaires sont exceptionnelles.
Les données de la
microscopie optique et de l’immunofluorescence de la biopsie rénale
permettent d’évoquer le diagnostic de dépôts organisés d’Ig.
Des
dépôts diffus mésangiaux éosinophiles, PAS positifs, rouge Congo
négatifs, constitués principalement d’IgG4 polyclonales, doivent faire
rechercher une organisation fibrillaire pseudoamyloïde en
microscopie électronique. Un aspect de glomérulite extramembraneuse
atypique ou de glomérulonéphrite membranoproliférative
volontiers lobulaire, avec dépôts d’IgG 1, 2 ou
3 monotypique, correspond souvent à une organisation
microtubulaire des dépôts.
Parmi les glomérulopathies avec dépôts organisés non amyloïdes
d’Ig, les dépôts fibrillaires pseudoamyloïdes et les dépôts
microtubulaires ont toutefois des caractères distinctifs.
B - PARTICULARITÉS DE LA GLOMÉRULONÉPHRITE
FIBRILLAIRE PSEUDOAMYLOÏDE :
Les dépôts, en règle uniquement glomérulaires, sont extracellulaires,
amorphes, éosinophiles, fortement PAS positifs et rouge Congo
négatifs.
En microscopie électronique, ils sont constitués de fibrilles
rectilignes disposées au hasard et évoquant donc l’amylose.
Il s’agit
d’une pseudoamylose puisque, d’une part la coloration par le rouge
Congo en microscopie optique est négative et que, d’autre part, en
microscopie électronique les fibrilles présentent un diamètre externe
plus grand, variant de 15 à 20 nm.
Ces fibrilles pseudoamyloïdes
forment souvent des dépôts de faible densité, de limites floues par
rapport au matériel membranoïde voisin.
Ces dépôts
fibrillaires peuvent coexister avec des dépôts granulaires osmiophiles.
Ils sont constitués le plus souvent d’IgG4 polyclonales.
Les IgG4 constituent normalement 2 % environ des IgG circulantes.
Cette sous-classe d’IgG est produite sous l’effet d’une stimulation
antigénique prolongée.
Les IgG4 sont des molécules compactes et
rigides, ce qui peut favoriser la fibrillogenèse.
Le composant
amyloïde P a pu être mis en évidence dans ces dépôts fibrillaires
comme dans l’amylose, mais pas les glycosaminoglycanes.
Seules
les observations les plus récentes ont bénéficié d’une étude avec les
sérums anti-chaînes légères d’Ig.
Dans notre expérience récente sur
une série de neuf cas, les dépôts sont constitués d’IgG polyclonales
dans huit cas.
Si on exclut le cas de Rosenmann et al qui, pour
nous, est une glomérulonéphrite microtubulaire avec dépôts d’IgG
monotypiques kappa, aucune prolifération lymphoplasmocytaire n’a
été mise en évidence dans les observations publiées, même après
une recherche poussée dans la moelle osseuse et avec une période
d’observation moyenne de 56 mois dans notre série.
L’évolution
spontanée ou sous traitement se fait vers l’insuffisance rénale
chronique dans 80 % des cas et jusqu’au stade terminal dans plus de
50 % des cas.
Cette glomérulopathie est susceptible de récidiver sous
traitement immunosuppresseur après transplantation rénale.
C - GLOMÉRULONÉPHRITE À DÉPÔTS MICROTUBULAIRES
:
En microscopie optique, les dépôts ne sont pas différents des dépôts
fibrillaires pseudoamyloïdes.
Ils sont également rouge Congo
négatifs. Il peut exister des pseudothrombi dans les lumières des
capillaires glomérulaires, en rapport avec des dépôts sousendothéliaux
très volumineux.
Contrairement aux lésions
glomérulaires des cryoglobulines, il n’y a pas de thrombus vrai, ni
d’afflux important de macrophages, ni de lésion de vascularite
associée intra- ou extrarénale.
En microscopie électronique, les
dépôts sont constitués de microtubules fréquemment rectilignes,
avec une lumière centrale bien visible.
Leur diamètre externe varie
de 10 à 50 nm et le diamètre interne de 6 à 20 nm.
Les dépôts sont le
plus souvent denses, osmiophiles, à limites nettes par rapport au
matériel collagène membranoïde voisin.
Par endroits,
les microtubules sont disposés parallèlement les uns aux autres,
formant des faisceaux qui, eux, sont orientés en tous sens.
Certains auteurs ont proposé de différencier les fibrilles pseudoamyloïdes des microtubules sur le seul diamètre externe des
substructures.
Si les microtubules peuvent présenter un diamètre
supérieur à 30 nm, jusqu’à 50 nm (« mégamicrotubule »), dans
certains cas le diamètre externe n’est pas différent de celui des
fibrilles pseudoamyloïdes (« petits microtubules »).
Dans ces
cas où le diamètre externe des substructures est inférieur à 30 nm, le
diagnostic repose sur l’arrangement parallèle, l’existence d’une
lumière centrale et le caractère bien limité et dense des dépôts par
rapport au matériel membranoïde collagène voisin.
Le terme immunotactoïde rencontré dans la littérature anglosaxonne
décrit l’organisation cristalline des dépôts d’Ig, par analogie
aux cristaux liquides constitués de biopolymères.
Schwartz et Korbet
ont proposé de qualifier d’immunotactoïde une glomérulonéphrite avec des dépôts d’Ig organisés sous forme de fibrilles et/ou de
microtubules, et survenant en l’absence de toute maladie
systémique, notamment de gammapathie monoclonale.
Il est
actuellement établi que des techniques très sensibles (Western-blot)
permettent d’identifier des Ig monoclonales alors que des techniques
conventionnelles (immunoélectrophorèse et même immunofixation)
restent négatives.
Par ailleurs, dans un grand nombre d’observations
anciennes, le caractère monotypique des dépôts d’Ig n’a pas été
recherché.
Nous avons montré que les dépôts microtubulaires sont
très souvent monotypiques et que le précurseur circulant est parfois
absent, même en utilisant des techniques sensibles.
Un examen
soigneux de la moelle osseuse et des cellules lymphoïdes circulantes
à la recherche d’une minime population B lymphocytaire
monoclonale doit être effectué pour éliminer une prolifération lymphoplasmocytaire incipiens.
Un examen en microscopie
électronique des cellules lymphoïdes B circulantes ou de la moelle
osseuse nous a permis d’identifier l’IgG monoclonale à l’origine des
dépôts et de montrer sa propriété à former des microtubules dans
les citernes ergastoplasmiques et périnucléaires, ces microtubules
étant strictement identiques à ceux retrouvés dans les dépôts
glomérulaires.
Par ailleurs, la prolifération lymphoplasmocytaire
peut siéger en dehors de la moelle osseuse et est
parfois retrouvée dans l’interstitium rénal.
Le caractère monotypique
des cellules lymphoplasmocytaires infiltrant le rein est affirmé grâce
à l’étude avec les antichaînes légères et lourdes d’Ig, mettant en
évidence des inclusions intracytoplasmiques en aiguilles d’Ig
monoclonale.
Les glomérulonéphrites à dépôts microtubulaires d’Ig
peuvent compliquer diverses pathologies liées à la stimulation et à
la prolifération de la lignée B lymphocytaire, comme cela a été
rapporté récemment dans un modèle expérimental.
Les souris
transgéniques pour un facteur de croissance des lymphocytes B, le
NNT-1/BSF-3/novel neurotrophin-1/B cell stimulating factor-3 ou
cardiotrophin-like cytokine appartenant à la famille des interleukines
6, présentent une hyperplasie B lymphocytaire avec plasmocytose
splénique mais aussi rénale, un taux élevé d’IgM, IgE, IgG2b, IgG3
(profil évoquant une réponse immune Th2) et des dépôts
glomérulaires d’Ig microtubulaires, non amyloïdes, dont la
monotypie et la monoclonalité n’ont pas été étudiées.
Sur le plan thérapeutique, dans notre série récente, sept patients sur
13 ont un syndrome lymphoprolifératif associé et la chimiothérapie
a induit une rémission du syndrome néphrotique chez dix malades.
Avec un recul moyen de 52 mois, six patients présentent une
fonction rénale normale, six ont une insuffisance rénale chronique,
sévère dans deux cas, et deux patients sont en hémodialyse
périodique.
Un de ces patients est décédé après 8 ans d’hémodialyse
après avoir développé une amylose AL lambda diffuse.
Un patient
est en rémission du lymphome et de la glomérulopathie, après
chimiothérapie aplasiante et autogreffe de moelle osseuse.
Glomérulonéphrite des cryoglobulines
:
A -
PRÉSENTATION CLINIQUE
:
Les signes cliniques rénaux surviennent en général après les
manifestations extrarénales (purpura, arthralgies, fièvre,
polyneuropathie ou mononévrite multiple, troubles digestifs,
myocardite...).
Ils consistent le plus souvent en un syndrome glomérulonéphritique aigu ou rapidement progressif, avec parfois
syndrome néphrotique impur.
La biopsie rénale en microscopie
optique révèle une glomérulonéphrite membranoproliférative ou des
lésions glomérulaires segmentaires avec, au moment des poussées
de la maladie, un afflux d’éléments cellulaires inflammatoires de
type polynucléaires neutrophiles et macrophages, et des thrombi
fibrinoïdes dans les lumières capillaires glomérulaires.
B - GLOMÉRULONÉPHRITES DES CRYOGLOBULINES
DE TYPE I ET GLOMÉRULONÉPHRITES
À DÉPÔTS ORGANISÉS MICROTUBULAIRES
D’IMMUNOGLOBULINE MONOCLONALE :
En l’absence de cryoglobulinémie détectable, ces atteintes
glomérulaires risquent d’être étiquetées « glomérulonéphrite à dépôts organisés microtubulaires d’Ig monoclonales » (glomerulonephritis
with organized microtubular monoclonal immunoglobulins
deposits [GOMMID]).
Les microtubules
en microscopie électronique sont les mêmes.
Dans les deux cas, il existe
souvent une prolifération lymphoplasmocytaire détectable.
Le
diagnostic de cryoglobuline est suggéré par l’existence de
substructures dans les lumières des capillaires glomérulaires au
sein de dépôts constituant des thrombi vrais, par l’afflux de
macrophages et de polynucléaires neutrophiles, la présence
d’inclusions denses organisées, parfois cristallines, dans les
cellules endothéliales et les macrophages, la prédominance sousendothéliale
des dépôts et le caractère plus rare des dépôts
extramembraneux.
Les thrombi et les dépôts sont parfois cristallins, évoquant la
crystalcryoglobuline.
Des cristaux identiques sont mis en évidence
dans le cryoprécipité sérique et dans le cytoplasme des
cellules tumorales lymphoïdes ou plasmocytaires et dans les
macrophages.
Nous avons pu montrer que la cristallisation d’une Ig
monoclonale est liée en partie à des particularités structurales de la
région V de la chaîne légère.
C - NATURE ET SIÈGE DES DÉPÔTS DANS LE TYPE II
:
Les dépôts glomérulaires sont constitués le plus souvent d’une IgM
kappa et d’IgG polyclonales. Ils sont mis en évidence aussi bien avec les anticorps anti-c, anti-µ, anti-j et anti-k.
L’organisation ultrastructurale des dépôts, quand elle existe, est très particulière,
avec des structures annulaires et tubulaires curvilignes de grand
diamètre (de 50 à 60 nm).
Ces structures sont parfois difficiles à
distinguer sur un fond granulaire osmiophile plus ou moins dense et
l’organisation peut être très focale.
Une hépatopathie
chronique liée au virus de l’hépatite C est à l’origine des
cryoglobulinémies de type II dans 90 % des cas.
D - NATURE ET SIÈGE DES DÉPÔTS DANS LE TYPE III
:
Les dépôts glomérulaires sont le plus souvent non organisés, et
constitués d’Ig polyclonales et de composants du complément.
Au
cours du lupus érythémateux aigu disséminé, ces dépôts peuvent
présenter focalement une organisation cristalline réalisant des
aspects d’empreintes digitales (fingerprints) constituées par des structures
lamellaires, curvilignes, avec une striation périodique de 22 nm.
Ces dépôts sont constitués des trois classes
principales d’Ig polyclonales, d’acide désoxyribonucléique et de
composants du complément.
Une cryoglobulinémie de type III est
détectée de façon quasi constante.
Structures fibrillaires et syndrome
de Randall :
A -
SYNDROME DE RANDALL ET AMYLOSE AL
:
Des dépôts fibrillaires amyloïdes AL constitués d’une chaîne légère
du même type que celle retrouvée dans les dépôts granulaires osmiophiles denses du syndrome de Randall ont été décrits chez le
même malade.
Il faut noter toutefois que, si les dépôts peuvent
coexister dans le rein, ils sont souvent dans des sites différents :
artériolaires pour les dépôts fibrillaires amyloïdes AL ; glomérulaires
au sein même des membranes basales capillaires glomérulaires, dans le mésangium, et en périphérie des membranes basales tubulaires et
des myocytes artériolaires pour les dépôts granulaires de type
Randall.
B - SYNDROME DE RANDALL ET FIBRILLES
NON AMYLOÏDES :
Des fibrilles pseudoamyloïdes peuvent aussi être mêlées aux dépôts
granulaires osmiophiles caractéristiques du syndrome de Randall.
Ces fibrilles sont courtes, rectilignes, osmiophiles et mesurent
environ 14 nm de diamètre. Nous avons observé une fois ces dépôts
mixtes fibrillaires non amyloïdes et amorphes sur une série de 51 cas
de syndrome de Randall.
Il s’agissait d’une femme de 30 ans, dont
la maladie a débuté par des manifestations respiratoires et qui
présentait des dépôts diffus de chaînes légères monoclonales kappa
dans les petits vaisseaux de tous les organes, principalement des
bronches, du foie, de la moelle osseuse, des ganglions lymphatiques
et secondairement du rein.
L’étude du sérum a mis en évidence une IgM monoclonale kappa.
Dans la moelle osseuse, il existait un immunocytome IgM kappa et des dépôts artériolaires rouge Congo
négatifs, kappa positifs, à l’origine d’une réaction granulomateuse à
corps étranger.
Au niveau du rein, les structures fibrillaires non
amyloïdes et les dépôts amorphes denses coexistaient dans le mésangium, en
périphérie de la membrane basale capsulaire et des membranes basales
tubulaires.
Diagnostic différentiel
:
Il faut distinguer les glomérulopathies à dépôts organisés d’Ig des
glomérulopathies avec des substructures non immunoglobuliniques,
essentiellement fibres de collagène.
Des fibrilles de collagène sont très souvent observées dans le
mésangium des glomérules en voie de sclérose, quelle que soit la
néphropathie initiale.
Au cours de la glomérulopathie diabétique,
on peut observer une fibrillose du mésangium très marquée,
constituée de microtubules non rectilignes peu osmiophiles de 10 nm
de diamètre. Les souris CD2AP-/- présentent un syndrome
néphrotique congénital et une sclérose mésangiale fibrillaire
extensive constituée de fibronectine, de collagène IV, de perlecan et
de laminine 1, 2 et 10. Les fibrilles collagènes sont en fait constituées
de microtubules curvilignes de 10 nm de diamètre.
Au cours de l’ostéo-onycho-dysplasie, des fibres de collagène à
striation périodique sont présentes dans le mésangium, dans
l’espace sous-endothélial et au sein même de la membrane basale.
Les mêmes structures collagènes de type III sont décrites en
l’absence de toute malformation osseuse et unguéale, au cours de la
glomérulopathie à dépôts collagènes de type III, souvent familiale.
Enfin, il existe des observations de glomérulonéphrite familiale avec
des dépôts fibrillaires constitués de fibronectine, de laminine et de
collagène IV.
Conclusion
:
Il existe des glomérulonéphrites avec des dépôts organisés pouvant être
de nature immunoglobulinique ou collagène.
L’étude en microscopie
optique, en immunofluorescence et en microscopie électronique permet
de différencier facilement les dépôts immunoglobuliniques des dépôts
collagènes et, au sein des dépôts immunoglobuliniques, les dépôts
amyloïdes AL des dépôts non amyloïdes.
Les glomérulonéphrites à
dépôts organisés d’Ig sont constituées par les glomérulonéphrites
fibrillaires pseudoamyloïdes, les glomérulonéphrites à dépôts organisés
microtubulaires d’Ig le plus souvent monoclonales, les glomérulonéphrites
des cryoglobulines de type I et II.
Des fibrilles pseudoamyloïdes particulières sont décrites en association aux dépôts
amorphes d’Ig monoclonales du syndrome de Randall.
L’existence
d’une gammapathie monoclonale et d’un syndrome immunoprolifératif
B patent ou incipiens est fréquente chez les patients avec
une glomérulonéphrite à dépôts organisés microtubulaires d’Ig
monoclonales.
Le traitement du syndrome immunoprolifératif permet
alors la rémission de l’atteinte rénale en même temps que des signes
hématologiques.
Au contraire, dans les glomérulonéphrites fibrillaires pseudoamyloïdes, les dépôts sont constitués d’Ig polyclonales, un
syndrome immunoprolifératif associé est exceptionnel et aucun
traitement n’a fait sa preuve. L’évolution vers l’insuffisance rénale
chronique terminale est fréquente.
La récidive est possible sur le greffon
après transplantation rénale.