L’objectif chirurgical de la gastrectomie pour cancer est d’obtenir
une exérèse curative de la lésion gastrique (gastrectomie R0 de
l’UICC).
Pour ce faire, elle doit répondre aux exigences de la
chirurgie carcinologique.
La résection doit être précédée d’un bilan
pré- et peropératoire minutieux de façon à pouvoir adapter la
stratégie opératoire à la lésion, tout en offrant au malade un confort
de vie optimal par rapport à son pronostic.
Selon une étude de l’American College of Surgeons portant sur plus
de 18 000 patients, la localisation des cancers de l’estomac est, dans
31 % des cas, au tiers supérieur, dans 14 % au tiers moyen et dans
26 % au tiers inférieur.
La tumeur envahit la totalité de l’estomac
dans 10 % des cas (la localisation exacte de la tumeur n’était pas
précisée dans 20 % des cas).
La situation, la nature histologique
et l’envahissement locorégional de la tumeur permettent de préciser
les indications du type de gastrectomie et du curage à effectuer.
L’extension des cancers de l’estomac prend cinq directions : une
extension horizontale dans la paroi gastrique, une extension verticale
vers les organes de proximité, une extension lymphatique, une
dissémination péritonéale et une dissémination hépatique se
traduisant par des métastases.
Le traitement chirurgical doit agir
dans ces cinq directions.
Indications chirurgicales
:
A - BILAN PRÉOPÉRATOIRE
:
Il a pour but de caractériser précisément la tumeur gastrique et sa
classification tumor-nodes-metastases (TNM) afin de définir le
traitement le plus approprié.
Nous n’envisageons pas le bilan
oncologique en général, mais le bilan chirurgical d’extirpabilité et
d’extension.
L’incidence du cancer gastrique est en diminution dans
le monde, mais il reste un problème grave en raison de sa faible
survie dans les séries (5 % à 5 ans, tous stades confondus).
L’endoscopie digestive est à l’origine du diagnostic de cancer dans
94 % des cas.
Elle confirme l’aspect macroscopique de la tumeur,
sa taille, précise sa localisation et permet de définir le type de
résection qui peut être envisagé.
Elle permet de réaliser une biopsie qui donnera le type histologique de la tumeur.
Le cancer de
l’estomac est habituellement un adénocarcinome.
Tous les autres
types de tumeurs peuvent se rencontrer, lymphome (mucosaassociated
lymphoid tissue), sarcome.
L’examen anatomopathologique
définit la sous-classification en tumeur intestinale ou diffuse
(classification de Lauren).
La différenciation cellulaire est précisée
(bien, moyennement ou peu différenciée).
Le bilan local peut être
complété par une échoendoscopie qui précise l’invasion pariétale de
la tumeur, facteur pronostique majeur.
Elle a une sensibilité de
85 % et différencie une tumeur T2 d’une tumeur T3 (tumeur locale
ou avancée).
L’échoendoscopie est « opérateur-dépendante » et n’est,
à ce jour, pas disponible dans tous les centres.
Une échographie conventionnelle permet de détecter des tumeurs
volumineuses, des métastases hépatiques ou des localisations
distantes de la tumeur primitive (tumeur ovarienne métastatique,
dite « de Krukenberg »).
L’examen tomodensitométrique doit être
systématique dans le bilan d’extension d’un cancer de l’estomac.
L’augmentation de la résolution des scanners spiralés et l’usage
habituel des produits de contraste ont rendu cet examen très
performant.
Il objective une augmentation de l’épaisseur de la paroi
gastrique, les ganglions, et permet d’évaluer le critère N de la
classification TNM.
Il permet de suspecter l’envahissement d’un
organe de voisinage, une carcinomatose péritonéale et l’existence de
métastases hépatiques.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM)
n’apporte que peu d’informations supplémentaires dans le bilan
d’extension des tumeurs gastriques.
Elle permet d’évaluer le
retentissement biliaire de tumeurs compressives (cholangio-IRM) et
effectue, en cas de tumeur de grande taille, une approche de volume
par une reconstruction en trois dimensions.
B - BILAN PEROPÉRATOIRE
:
Les possibilités diagnostiques de la laparoscopie et l’échographie
peropératoire sont en cours d’évaluation.
Ces techniques mettent en
évidence des micrométastases péritonéales ou hépatiques, qui ont
échappé au bilan préopératoire dans 10 à 23 % des cas et qui
vont modifier l’approche thérapeutique, par exemple en contreindiquant
un geste de résection étendu.
L’échographie permet
l’exploration de régions inaccessibles à l’examen direct telles que
l’arrière-cavité des épiploons et la région mésentérique.
Le lavage péritonéal avec recueil du liquide pour réaliser une
cytologie à la recherche de cellules libres reste recommandé par de
nombreux auteurs.
Ces cellules, présentes lorsque plus de 20 cm2 de
séreuse sont envahis, constituent un facteur pronostique péjoratif
pour les tumeurs de stade supérieur à T2.
C - RÉSECTION GASTRIQUE
:
L’indication chirurgicale optimale devant une tumeur de l’estomac
dépend de plusieurs facteurs.
La résection gastrique agit dans un
premier temps sur l’extension horizontale de la tumeur.
Celle-ci est
précisée par le bilan préopératoire et est complétée au début de
l’intervention par une exploration et par une échographie.
La forme
histologique (type de Lauren) et l’aspect macroscopique
(classification de Borrmann) sont pris en compte pour la décision
thérapeutique. Dans les formes histologiques de cancer
différencié (type intestinal), la résection de la tumeur doit être
effectuée avec une marge de sécurité de 5 cm. Cette marge permet
d’envisager une gastrectomie partielle pour les tumeurs de petite
taille.
À l’inverse, dans les formes histologiques indifférenciées (type
diffus), il est recommandé de respecter une marge supérieure, ce qui
amène en fait à réaliser une gastrectomie totale dans la plupart des
cas.
Dans les formes de cancer superficiel, sans envahissement de
la sous-muqueuse (early gastric cancer des Anglo-Saxons et Japonais),
il est recommandé de respecter une marge de sécurité encore plus
faible, de 2 cm.
Ceci permet d’envisager des résections segmentaires
de l’estomac hautes, basses ou atypiques.
Avec une bonne
sélection des patients, les résections gastriques partielles sont
envisageables dans plus de trois quarts des cas sans diminution
de la survie, mais avec une diminution de la mortalité opératoire et
une amélioration de la qualité de vie.
Dans certaines séries, les
résections partielles représentent 70 % des interventions réalisées.
En cas d’envahissement d’un organe adjacent à l’estomac (pancréas,
côlon transverse, mésocôlon, rate, foie), il est possible d’envisager,
outre la gastrectomie, la résection de l’organe envahi dans le même
temps opératoire.
Ce type de résection majeure combinée ne se
justifie qu’en l’absence de métastase associée : la survie de patients
présentant des tumeurs T4/M0 peut atteindre 43 %, mais ce cas
de figure reste rare.
D - CURAGE LYMPHATIQUE
:
Le choix du curage à réaliser devant une tumeur gastrique est
actuellement discuté.
Les cancers gastriques ont une
dissémination essentiellement locale et lymphatique.
L’extension lymphatique existe dans 60 à 80 % des cas au moment du diagnostic.
Sa progression se fait de proche en proche dans les ganglions périgastriques de proximité, puis vers les ganglions pédiculaires de
second ordre et enfin vers les ganglions distaux qui sont considérés
comme des métastases.
L’envahissement ganglionnaire est
présent dans 2 à 9% des cancers superficiels (early gastric cancer).
Dans ces tumeurs, il convient de distinguer les cancers superficiels
limités à la muqueuse, qui présentent exceptionnellement un
envahissement ganglionnaire (2 %), des cancers atteignant la sousmuqueuse,
avec un taux d’envahissement ganglionnaire
significativement plus élevé (20 %).
Le curage n’est donc pas
impératif dans le premier cas et les solutions chirurgicales limitées
(résections cunéiformes), mais également les alternatives plus
récentes (résection endoscopique, destruction par laser), trouvent
leurs applications dans les formes limitées.
Un curage emportant les
ganglions N1 est systématiquement réalisé lors d’une gastrectomie,
partielle ou totale.
Il doit comporter au moins 15 ganglions, pour
que ceux-ci soient représentatifs de l’extension ganglionnaire et que
le stade du cancer puisse être précisé, selon la dernière nomenclature
de l’UICC.
La réalisation d’un curage N2 complet est
de plus en plus souvent remise en cause, en raison de la morbidité
et de la mortalité associées au geste sans bénéfice associé pour le
patient.
En fait, la morbidité est essentiellement liée à la
pancréatectomie caudale, ce qui a amené Maruyama et al à proposer
un curage N2 avec conservation pancréatique.
La tendance est
aujourd’hui de privilégier un curage plus limité sans
pancréatectomie et même plus récemment sans splénectomie,
ce qui préviendrait la survenue des principales complications périopératoires de la gastrectomie, sans altérer la survie de ces
patients.
E - CANCER GASTRIQUE SUPERFICIEL
:
Les cancers gastriques superficiels (early gastric cancer) représentent
une forme de cancer gastrique à bon pronostic.
L’envahissement
ganglionnaire est rare pour les formes à extension uniquement
muqueuse : de l’ordre de 4 %. Pour cette raison, il est possible de
proposer à ces patients des traitements peu invasifs.
Les trois
possibilités thérapeutiques sont : une résection endoscopique, une
résection chirurgicale limitée, par laparoscopie ou par laparotomie,
éventuellement sous contrôle endoscopique, et une destruction par
laser.
Les deux premières techniques présentent l’avantage de
permettre une analyse histologique complète de la lésion, et de
s’assurer du caractère complet de l’exérèse.
Les critères d’inclusion
des patients pour ces techniques sont particulièrement stricts : cancer
muqueux, lésion de moins de 10 mm de diamètre, tumeur bien
différenciée, lésion non ulcérée.
Nous ne décrirons pas les
techniques de ces résections atypiques dans ce chapitre.
En effet,
aucune règle carcinologique particulière ne s’applique à ces
résections en dehors de la nécessité d’une exérèse complète sans
dissémination tumorale mécanique.
La troisième option
thérapeutique des lésions superficielles est la destruction au laser.
Cette technique est efficace mais a comme principal inconvénient
l’absence de contrôle histologique de la lésion.
Toutes ces approches
ne sont pas encore parfaitement codifiées et font l’objet d’études.
Facteurs pronostiques
:
Le pronostic du cancer de l’estomac est essentiellement lié à
l’envahissement local et à la dissémination lymphatique du cancer
au moment de sa prise en charge.
Ainsi, un curage ganglionnaire
élargi ne se justifie que s’il emporte les relais ganglionnaires au-delà
du dernier groupe envahi.
La présence de cellules libres au moment
de l’intervention chirurgicale aurait un impact négatif sur la survie.
La localisation des cancers pourrait jouer un rôle, les tumeurs du
tiers proximal ayant un pronostic plus péjoratif que les tumeurs
distales.
Enfin, les variables biologiques et les marqueurs tumoraux
n’ont pas de valeur déterminante.
Après une évaluation complète de la pathologie, le choix définitif
du geste à réaliser est fixé.
Nous décrivons dans un premier temps
les résections classiques les plus fréquemment utilisées, la
gastrectomie inférieure et la gastrectomie totale, puis nous
envisageons les résections moins fréquentes ou atypiques : résections
segmentaires, résections supérieures, résections étendues.
Gastrectomie des quatre cinquièmes
polaire inférieure type D1 :
La gastrectomie des quatre cinquièmes ou gastrectomie subtotale est
un geste de résection indiqué pour une tumeur du tiers inférieur de
l’estomac.
Les limites de la résection ne sont pas définies par des
repères anatomiques mais par la marge de sécurité nécessaire à la
réalisation d’une gastrectomie curative (R0).
Nous prenons pour
type de description une tumeur antrale envahissant la musculaire,
sans envahissement de contiguïté et sans métastases.
Le geste
proposé est une gastrectomie polaire inférieure de type D1.
Cette
résection, réalisée pour une tumeur distale de l’estomac, emporte
les ganglions des groupes 3, 4, 5, 6.
A - INSTALLATION DU PATIENT ET VOIE D’ABORD
:
L’installation du malade et la voie d’abord sont identiques à celles
proposées pour une gastrectomie pour ulcère.
L’incision est une
médiane allant vers le haut au-dessus de la xiphoïde, et vers le bas
2 cm sous l’ombilic.
Nous préférons utiliser un abord médian qui
permet au mieux d’exposer le cardia et de s’étendre vers le bas en
cas de nécessité.
Une large incision bi-sous-costale étendue sur la
gauche est également réalisable.
L’intervention débute après un
dernier bilan lésionnel qui doit confirmer les possibilités d’exérèse.
B - PRINCIPES GÉNÉRAUX
:
La gastrectomie comprend toujours l’exérèse de l’épiploon.
Le
premier temps opératoire doit séparer l’épiploon de ses attaches
coliques et aborder l’arrière-cavité.
La grosse tubérosité est mobilisée
par une libération complète de l’épiploon de l’angle colique droit à
l’angle colique gauche, laquelle est poursuivie jusqu’au hile
splénique.
Les temps suivants sont successivement la ligature de l’artère gastroépiploïque droite à son origine, la ligature de l’artère
gastrique droite, puis une libération et une section du duodénum.
La dissection du petit épiploon et la ligature de l’artère
gastrique gauche terminent le geste avant de réaliser la section de
l’estomac.
C - PREMIER TEMPS : DÉCOLLEMENT COLOÉPIPLOÏQUE
Le décollement coloépiploïque se fait de la droite vers la gauche.
L’opérateur, placé à droite du patient, extériorise le tablier épiploïque.
Le grêle est recouvert d’un petit champ abdominal qui
permet de le protéger et d’éviter qu’il ne bascule dans le champ
opératoire. Le premier aide attire l’épiploon vers le haut et la gauche.
Le côlon transverse droit est attiré vers le bas. La ligne de réflexion coloépiploïque est incisée.
Cette section peut être réalisée aux
ciseaux, ce plan étant avasculaire dans sa majeure partie.
Le début
de la dissection est parfois laborieux en raison des adhérences entre
le feuillet péritonéal postérieur de l’épiploon et le feuillet antérieur
du mésocôlon transverse.
Le repère initial est constitué par les
éléments du pédicule veineux colique supérieur droit qui sont suivis
jusqu’à leur jonction avec la veine gastrique réalisant le tronc gastrocolique.
La progression vers la gauche de la
désinsertion de l’épiploon ouvre l’arrière-cavité et facilite à ce
moment la présentation et l’abaissement du côlon.
L’aide modifie la
présentation de l’épiploon en le tractant vers le haut et vers la droite.
Le côlon gauche est abaissé et le décollement est poursuivi jusqu’à
l’angle splénique.
Vers la gauche, quelques pédicules vasculaires
plus volumineux sont liés avant d’être sectionnés.
La libération des
dernières attaches de la corne épiploïque gauche à l’angle gauche
est réalisée en abaissant l’angle gauche.
Les attaches coloépiploïques contiennent une branche terminale de l’artère
gastroépiploïque gauche qui est liée.
Les dernières attaches de la
corne gauche sont disséquées au ras de la rate.
L’épiploon est ainsi
libéré jusqu’au hile splénique.
Le principal risque de ce temps
opératoire est une possible lésion de la rate par arrachement d’une
frange épiploïque adhérente à la capsule, d’un pédicule vasculaire,
ou par traumatisme à l’aide d’une valve de présentation.
La
dissection coloépiploïque est réalisée jusqu’au contact de la grosse
tubérosité de l’estomac, dans le plan avasculaire situé entre les
branches gastroépiploïques gauches et les vaisseaux courts.
Ceux-ci
doivent être préservés. L’épiploon est alors totalement libéré.
Ce
temps réalise l’ablation des ganglions du groupe 4d et des ganglions
du groupe 4b.
Les ganglions du groupe 4a, le long des vaisseaux
courts, ne sont pas disséqués dans ce cas.
Il reste à sectionner
quelques adhérences secondaires entre la face postérieure de l’épiploon, de l’estomac et la face antérieure du pancréas.
L’épiploon
est alors basculé vers le haut, hors de l’abdomen et est placé dans
une compresse abdominale.
D - DEUXIÈME TEMPS : LIGATURE DE L’ARTÈRE
GASTROÉPIPLOÏQUE DROITE
Une valve est placée à la face postérieure de l’estomac et expose la
région duodénale.
La dissection postérieure est poursuivie jusqu’au
tronc veineux gastrocolique.
Celui-ci est disséqué et la veine gastroépiploïque droite est liée au niveau de son abouchement dans
le tronc gastrocolique.
La veine mésentérique n’est pas disséquée.
L’opérateur prend garde, en particulier chez un patient obèse avec
un tablier épiploïque lourd, à bien faire maintenir l’épiploon par
l’aide pour éviter d’arracher par traction une veine du fin lacis
veineux de la jonction gastrocolique, siège d’un saignement diffusant
rapidement dans les feuillets épiploïques et pouvant rendre la fin de
la dissection très laborieuse.
Il est possible de suivre la face
antérieure du pancréas et de disséquer l’origine de l’artère gastroépiploïque droite à son émergence de l’artère
gastroduodénale.
Chez un patient gras, le bord supérieur du
pancréas sert de repère pour retrouver l’origine de l’artère gastroépiploïque droite.
Tout le tissu celluleux entourant cette artère
doit être emporté avec la pièce opératoire.
Il contient les ganglions
du groupe 6.
E - TROISIÈME TEMPS :
DISSECTION DE L’ARTÈRE GASTRIQUE DROITE
La dissection de l’artère gastrique droite permet de libérer
totalement le pylore et le premier duodénum.
L’épiploon et
l’estomac sont rabattus vers le bas et vers la gauche. Une valve est
placée sur le lobe hépatique gauche pour présenter l’espace de
dissection.
Le petit épiploon est incisé au ras du foie, de la pars flaccida au pédicule hépatique.
Cette incision laisse les adénopathies
du groupe 3 au contact de l’estomac.
L’artère hépatique propre est
identifiée et disséquée de haut en bas.
Cette dissection retrouve
l’origine de l’artère gastrique droite, ou artère pylorique.
Elle doit
être liée à son origine, en emportant le tissu cellulograisseux qui
l’entoure, celui-ci contenant les adénopathies du groupe 5.
La
présence éventuelle d’une ou deux branches directes, allant de
l’artère gastroduodénale au premier duodénum, nécessite leur
ligature.
Le premier duodénum est ainsi totalement disséqué.
F - QUATRIÈME TEMPS : SECTION DU DUODÉNUM
Le pylore agit habituellement comme une « barrière » et n’est que
rarement franchi par la tumeur.
La section sur le duodénum est
réalisée à 1 cm en aval du pylore.
La réalisation d’une anastomose
selon Péan n’est pas recommandée dans les gastrectomies pour
cancer en raison du risque d’envahissement de l’anastomose en cas
de récidive locale.
La section duodénale est donc toujours complétée
par sa fermeture, mécanique ou manuelle. Nous préférons
l’utilisation de pinces à agrafage linéaire.
La solution la plus simple,
la plus rapide et la plus sûre est d’utiliser une pince réalisant
agrafage et section qui est à même d’assurer l’hémostase, l’étanchéité
et la section du duodénum sans ouverture de l’organe et donc sans
contamination du champ opératoire.
Un surjet complémentaire doit
être effectué afin d’enfouir les rangées d’agrafes du moignon.
La section peut également être réalisée à l’aide d’une
agrafeuse linéaire sans section qui assure la fermeture du moignon
duodénal en un temps.
Un clamp est alors placé au niveau de
l’estomac avant section pour éviter une contamination du champ
opératoire.
Cette ouverture gastrique peut éventuellement
permettre de s’assurer de l’existence d’une marge de sécurité
suffisante par rapport à la tumeur.
Enfin, une section duodénale avec
suture entièrement manuelle est réalisable : deux clamps droits sont
placés de part et d’autre de la zone de section.
La section duodénale
est effectuée aux ciseaux droits ou à l’aide d’un bistouri, manuel ou
électrique (position coupe).
Une fermeture par points séparés ou par
surjet extramuqueux est réalisée.
La plupart des auteurs effectuent alors un second plan d’enfouissement par une seconde rangée de
points ou par la réalisation d’une bourse d’enfouissement.
G - CINQUIÈME TEMPS :
DISSECTION DE L’ARTÈRE GASTRIQUE GAUCHE
Après section du duodénum, la pièce opératoire doit à nouveau être
relevée, l’épiploon placé sur le thorax du patient vers le haut et vers
la gauche.
La valve est replacée en arrière de l’estomac.
La région
du tronc coeliaque est exposée.
La trifurcation du tronc coeliaque est
disséquée pour identifier avec certitude l’origine de l’artère
gastrique gauche.
La dissection minutieuse implique de lier
quelques vaisseaux faisant partie du lacis ganglionnaire entourant
le tronc coeliaque, plus ou moins important selon l’envahissement
ganglionnaire et la morphologie du patient.
Habituellement, la veine
gastrique gauche est identifiée en premier.
Elle est disséquée et liée
isolément.
Le petit épiploon est réséqué jusqu’au contact de la partie
haute de la petite courbure, à proximité du cardia. Dans ce cas de
figure, la dissection n’emporte pas les ganglions du groupe 1
(gastrectomie des quatre cinquièmes D1 pour tumeur distale).
La branche ascendante de l’artère gastrique gauche
(branche cardiooesophagienne) est sectionnée au contact de la petite
courbure.
En cas de tumeur située sur les parties moyenne ou haute de
l’estomac, il peut être indiqué de réséquer les adénopathies du
groupe 1 dans le même temps opératoire.
La dissection de la pars flaccida est poursuivie au ras du foie jusqu’au diaphragme et
emporte le tissu cellulograisseux situé le long du pilier droit du
diaphragme ainsi que la totalité de la pars condensa, comprenant
les ganglions du groupe 1.
La branche haute de l’artère gastrique
gauche est emportée dans sa totalité et n’est pas sectionnée le long
de la petite courbure.
H - SIXIÈME TEMPS : SECTION DE L’ESTOMAC
Après dissection complète de l’estomac, celui-ci peut être sectionné.
La zone de section dépend de la position de la tumeur et de la
marge requise par rapport au type de cancer.
La marge de sécurité
habituellement reconnue pour les cancers infiltrants est de 5 cm.
Exceptionnellement, en présence d’un cancer superficiel ou un
cancer non infiltrant sans envahissement de la séreuse, il est possible
de se contenter d’une marge de sécurité de 2 cm.
I - SEPTIÈME TEMPS : RÉTABLISSEMENT
DE LA CONTINUITÉ
Le rétablissement de la continuité après gastrectomie polaire
inférieure pour cancer est effectué selon la technique de Polya.
Il est en
tout point identique à celui décrit pour les gastrectomies pour
pathologies bénignes.
Il est possible
d’envisager des anastomoses manuelles ou mécaniques, pré- ou transmésocoliques.
Gastrectomie totale type D1
:
La gastrectomie totale est réalisée pour des tumeurs localisées aux
tiers supérieur et moyen de l’estomac, ainsi que pour des tumeurs
diffuses.
Nous prenons pour type de description une tumeur du
corps de l’estomac, sans envahissement de contiguïté et sans
métastases.
Le geste proposé est une gastrectomie totale de type D1.
Cette résection, réalisée pour une tumeur moyenne de l’estomac,
emporte les ganglions des groupes 1, 2, 3, 4, 5, 6.
Bien entendu, le
choix entre une gastrectomie de type D1 et D2 qui emporte les
groupes ganglionnaires N2 dépend du type de lésion, de sa
localisation, du patient et des choix de l’opérateur, un consensus
n’existant pas à ce jour.
Nous décrivons successivement la
gastrectomie D1, puis les variations permettant la réalisation des
gastrectomies D2, D3 puis D4.
L’installation du patient, de l’équipe chirurgicale et l’incision sont
en tout point comparables à celles d’une gastrectomie polaire
inférieure.
A - PREMIER TEMPS : DÉCOLLEMENT COLOÉPIPLOÏQUE
Le décollement coloépiploïque débute de façon identique au
décollement réalisé pour une gastrectomie polaire inférieure.
Lorsque le décollement est parvenu au hile splénique, il ne se
termine pas au contact de l’estomac, mais se poursuit vers le haut,
afin de sectionner les vaisseaux courts au contact de la rate.
L’aide
tire sur l’épiploon franchement vers la droite, tout en évitant
d’arracher les vaisseaux courts.
L’opérateur glisse une pince en
arrière des vaisseaux courts pour les contrôler un à un au contact de
la rate.
Ils sont liés au fil ou à l’aide de clips.
La grosse tubérosité
gastrique est libérée.
Une artère gastrique postérieure est
systématiquement recherchée et liée à son origine près de l’artère
splénique.
Ce temps réalise l’ablation des ganglions du groupe 4a.
B - DEUXIÈME, TROISIÈME, QUATRIÈME,
CINQUIÈME TEMPS :
Ces quatre temps opératoires pour gastrectomie totale D1 suivent
les mêmes modalités que lors de la réalisation d’une gastrectomie
polaire inférieure.
L’opérateur procède successivement à la ligature
de l’artère gastroépiploïque droite, à la dissection de l’artère
gastrique droite, à la section du duodénum et à la dissection de
l’artère gastrique gauche puis à sa ligature à son origine.
C - SIXIÈME TEMPS : DISSECTION DE L’OESOPHAGE
Après section de l’artère gastrique gauche, l’oesophage abdominal
est abordé.
La grosse tubérosité étant totalement libre, il peut être
intéressant de protéger la région splénique par une compresse
abdominale ou de soulager la tension sur la rate par la mise en place
d’une compresse abdominale derrière celle-ci, la splénectomie ne
faisant pas partie de la gastrectomie de type D1.
L’estomac et
l’épiploon sont basculés vers le bas, protégés par une compresse
abdominale.
La dissection de la pars flaccida est poursuivie au ras
du foie, du bas vers le haut jusqu’au diaphragme.
La pars condensa
est liée au ras du foie.
La dissection est poursuivie jusqu’au pilier
droit.
Le péritoine préoesophagien est ouvert et rejoint vers la gauche
la section du ligament gastrodiaphragmatique.
L’abord du pilier
droit libère le bord droit de l’oesophage et emporte tous les
ganglions latérocardiaux droits du groupe 1.
La pièce
opératoire est réclinée vers la gauche pour permettre la dissection
de la face postérieure droite du cardia, puis la pièce est basculée
vers la droite.
Il est possible de disséquer le pilier gauche et de
réséquer le tissu cellulograisseux du bord gauche du cardia,
comportant les ganglions du groupe 2.
Les nerfs vagues
antérieurs et postérieurs sont sectionnés.
L’oesophage est préparé sur
3 à 5 cm pour pouvoir réaliser une anastomose.
Une compresse
abdominale est placée en arrière de l’oesophage.
Il est possible de
mettre en place deux points de traction 2 cm au-dessus de la future
zone de section de l’oesophage, afin de s’assurer de pouvoir
facilement effectuer une anastomose sans avoir à craindre la
rétraction de l’oesophage dans le thorax.
La pièce est totalement
mobilisée et il est possible de sectionner l’oesophage.
La section doit
être effectuée à 5 cm de la lésion cancéreuse et à 2 cm du cardia sur
l’oesophage.
Le rétablissement de la continuité est le plus souvent réalisé par
agrafage mécanique.
Dans ce cas, il peut être intéressant de mettre
en place, à la partie terminale de l’oesophage, avant sa section, une
pince réalisant une bourse circulaire.
Celle-ci permet de maintenir
l’enclume d’une pince à anastomose circulaire.
Les deux fils tracteurs et les fils de la bourse sont laissés en attente
sur deux petites pinces.
La pièce opératoire est alors enlevée et l’on envisage le
rétablissement de la continuité.
Ses modalités et les diverses options
envisageables sont détaillées plus loin.
En cas de suture manuelle,
la pièce opératoire peut être maintenue en place le temps de
l’anastomose oesophagienne.