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Médecine Dentaire
Fractures de la mandibule
Cours de Médecine Dentaire
 
 
 

Introduction :

Les fractures de la mandibule sont les fractures les plus fréquentes du massif facial (fractures isolées des os nasaux exclues).

La topographie et la mobilité de la mandibule par rapport à la base du crâne expliquent sa vulnérabilité.

Leur traitement vise à restituer une anatomie fonctionnelle et stable.

Si les fractures de la mandibule sont en règle générale des fractures de l’adulte jeune, les fractures de l’enfant et du sujet âgé méritent néanmoins un grand intérêt par leurs caractéristiques mais aussi par leur relative fréquence.

Les études anatomiques et biomécaniques permettent de mieux comprendre le comportement de l’os mandibulaire vis-à-vis du traumatisme et donc de mieux adapter le traitement.

Anatomie :

La mandibule est un os membraneux constitué par la fusion des deux os dentaires.

C’est un os impair médian, symétrique qui constitue l’étage inférieur de la face.

Unique structure mobile de la face, elle comprend un corpus en forme d’arc horizontal qui porte les dents et sur lequel s’insèrent les muscles abaisseurs.

À l’aplomb des prémolaires se situe le foramen mentonnier, orifice de sortie du nerf alvéolaire inférieur.

Le corpus est prolongé en arrière de deux branches, les ramus, qui sont des lames quadrilatères verticales aplaties transversalement et surmontées de deux processus, condylaire et coronoïdien, séparés par l’incisure mandibulaire.

Sur le ramus s’insèrent de puissants muscles élévateurs, à sa face interne se trouve l’orifice d’entrée du nerf alvéolaire inférieur bordé en avant par la lingula.

La tête condylienne est une saillie ovoïde à grosse extrémité médiale, orientée en arrière et en dedans soutenue par un col rétréci.

Elle s’articule avec la base du crâne par l’intermédiaire de l’articulation temporomandibulaire, diarthrose de type bicondylien qui forme une unité fonctionnelle avec l’articulé dentaire.

L’architecture du col mandibulaire en fait une zone de faiblesse qui protège la base du crâne en absorbant les ondes de choc.

Malgré la faible épaisseur et la fragilité du toit de la fosse mandibulaire temporale, les luxations crâniales avec impactions intratemporales du processus condylaire sont extrêmement rares.

Les changements de courbure au niveau de la symphyse, les deux angles mandibulaires et les dents incluses créent des zones de faiblesse favorables à la survenue de fracture.

L’os mandibulaire est un os corticospongieux qui présente une corticale externe dont les propriétés lui permettent de supporter l’essentiel des contraintes mécaniques.

Entre les corticales interne et externe se trouve l’os spongieux dans lequel est creusée la gouttière du pédicule alvéolaire inférieur.

Le bord inférieur ou basilaire est épais et convexe.

Le bord supérieur ou arcade alvéolaire est creusé par les alvéoles dentaires.

L’os alvéolaire apparaît et disparaît avec les dents.

Les sollicitations mécaniques de la fonction occlusale sont nécessaires à son maintien.

Les apex des incisives centrales et latérales sont plus proches de la corticale externe que de la corticale interne.

L’apex de la canine en fait la dent la plus longue de l’arcade dentaire inférieure et il est situé à proximité de la corticale externe ; en outre, à son niveau, se situe le changement de courbure de la mandibule.

Le site d’implantation de la canine devient ainsi une zone de faiblesse.

Les racines des prémolaires sont équidistantes des corticales interne et externe et les racines des molaires inférieures sont d’autant plus proches de la table interne qu’elles sont postérieures.

La topographie des apex dentaires trouve une application dans le traitement chirurgical des fractures.

Le nerf alvéolaire inférieur parcourt le canal dentaire de son origine, le foramen mandibulaire, au foramen mentonnier.

Il innerve les dents, la gencive et la région labiomentonnière.

La vascularisation intraosseuse est sous la dépendance de l’artère maxillaire et assurée essentiellement par l’artère alvéolaire inférieure qui se termine par l’artère mentonnière au niveau du foramen mentonnier.

L’artère sous-mentale ou submentonnière (issue de l’artère faciale) apporte une vascularisation périostée.

Il existe des anastomoses entre les deux systèmes.

La croissance osseuse de la mandibule est sous la dépendance des noyaux cartilagineux condyliens et de l’ossification périostée sous l’action combinée de l’ensemble des muscles s’insérant sur la mandibule : les muscles linguaux, masticateurs et peauciers.

L’ostéogenèse d’origine périostée est en relation avec la croissance du condyle.

L’adaptation morphofonctionnelle de la mandibule est sous l’influence des stimuli sensitivomoteurs et de la dynamique de la croissance.

La coordination de la croissance de la mandibule et du reste de la face se fait par l’intermédiaire de l’articulé dentaire et du complexe condylo-discomusculaire.

La mandibule provient d’une ossification de type membraneux et de la fusion de plusieurs sousunités qui représentent différents sites d’induction.

L’induction neurale trigéminale est assurée par le nerf alvéolaire inférieur qui crée un axe neuromatriciel.

L’induction neuroectodermique correspond à l’invagination des lames dentaires et à l’édification des procès alvéolaires et dentaires.

L’induction musculaire aboutit à la formation des processus d’insertion des muscles (symphyse mentonnière, coroné, condyle, angle).

Les deux os dentaires droit et gauche sont indépendants jusqu’à l’âge de 1 an, avant l’ossification totale de la symphyse mentonnière.

D’où la possibilité de disjonction et de fracture symphysaire médiane chez le nouveau-né et le nourrisson.

Chez l’adulte, les fractures symphysaires sont en règle paramédianes.

Biomécanique :

A - Étude par la méthode des éléments finis (MEF) ou modélisation physicomathématique :

L’os mandibulaire est une structure vivante anisotrope et viscoélastique, dont l’étude biomécanique est complexe et pose des problèmes qui ne sont pas tous résolus.

L’étude par la MEF permet une approche physicomathématique.

Elle consiste à établir un modèle plus simple que la structure à étudier.

La structure réelle est découpée en un nombre d’éléments géométriques simples et homogènes dont le comportement mécanique est facile à déterminer.

Son application à la mandibule, bien que séduisante et permettant une analyse tridimensionnelle, présente plusieurs difficultés : la connaissance exacte des propriétés mécaniques de l’os mandibulaire et la validation par des données expérimentales fiables.

Malgré ces difficultés, l’étude par la MEF prend de plus en plus d’importance dans les études biomécaniques.

Les modèles tridimensionnels actuels sont très perfectionnés et permettent des représentations réalistes, indéfiniment réutilisables dans des conditions variées.

La validité du modèle par éléments finis a été confirmée par :

• la reproduction de fractures à la suite de sollicitations sur le menton conformes aux données anatomocliniques classiques ;

• la suppression des muscles du modèle donne lieu à des fractures aberrantes démontrant ainsi l’importance de l’environnement immédiat anatomique dans la mécanique mandibulaire ;

• la démonstration que la mandibule est une structure à revêtement travaillant ; son inertie est déterminée par la corticale ; le tissu spongieux maintient la distance intercorticale quelles que soient les pressions exercées ;

• l’assimilation du condyle à un « pion de centrage » destiné à guider des mouvements complexes par l’étude des contraintes et des moments de force ;

• la description d’un système de protection de la base du crâne par l’absorption de l’énergie cinétique par les tissus périmandibulaires (muscles suspenseurs et plexus vasculaires), la cavité articulaire et les « fusibles mécaniques » que représentent les différentes zones de fragilité de la mandibule.

B - Photoélasticimétrie par réflexion :

C’est l’étude des déformations se produisant dans un revêtement biréfringent.

Les déformations osseuses s’inscrivent sur le revêtement sous forme de franges lumineuses qui sont étudiées en lumière polarisée.

Elle permet une analyse de la structure réelle par un examen de surface.

Les études de photoélasticimétrie effectuées par Kessler trouvent dans l’axe du col mandibulaire des flux de contrainte en compression (segment antérieur) et en traction (segment postérieur) ; et parallèlement à l’incisure mandibulaire, des flux de contrainte en traction. Par ailleurs, il est admis que les forces de traction s’exercent au niveau du rebord alvéolaire et les forces de compression sur le bord basilaire.

L’ostéosynthèse a pour objet de transformer les forces de traction en forces de compression, sinon de s’opposer aux forces de traction.

Or, Kessler note également des flux de traction au niveau du bord basilaire.

Ce dernier point est en contradiction avec les principes habituellement admis, et énoncés notamment par Champy.

C - Théories sur le fonctionnement biomécanique de la mandibule :

Plusieurs théories ont été émises quant au fonctionnement biomécanique de la mandibule.

La mandibule peut être assimilée à une structure anatomique avec des « fusibles mécaniques ».

En mécanique, quand la rupture d’une structure est inévitable, elle est prévisible en des endroits précis. Les sièges préférentiels des fractures peuvent être assimilés à des « fusibles mécaniques ».

On conçoit ainsi qu’un traumatisme du menton entraîne successivement selon son intensité une fracture sous-condylienne, angulaire, parasymphysaire et symphysaire.

Aussi bien les études biomécaniques de la mandibule que les statistiques des fractures confirment l’existence de zones d’élection pour les foyers de fractures.

En assimilant la région condylienne à un « fusible mécanique », on comprend la rareté des fractures de la fosse temporale avec pénétration intracrânienne du processus condylaire.

La protection du crâne est liée à la conjonction de trois éléments : musculaires, articulaires, mandibulaires.

La mandibule est un os appendu, soutenu par les muscles élévateurs qui absorbent une partie de l’énergie cinétique due aux traumatismes.

La disposition des veines périarticulaires et de la fosse infratemporale de même que la pression positive de la cavité discotemporale jouent un rôle dans la dispersion de l’énergie cinétique.

D - Classification classique :

La classification classique des fractures de la mandibule depuis Dingman et Natvig subdivise la mandibule en sept unités topographiques :

• au niveau de la portion dentée : la symphyse entre les faces distales des deux canines, la branche horizontale entre la face mésiale de la première prémolaire et la face distale de la deuxième molaire, l’angle réalisé par une ligne verticale passant par la face distale de la deuxième molaire et une ligne horizontale prolongeant le rebord alvéolaire mandibulaire ;

• au niveau de la portion non dentée : la branche montante entre l’angle et l’échancrure mandibulaire (incisure mandibulaire) ; la région condylienne au-dessus d’une ligne prolongeant en bas et en arrière le bord postérieur du coroné ; le coroné est situé au-dessus d’une ligne prolongeant le bord antérieur du col condylien.

Se référant à des données embryologiques, anatomiques et biomécaniques, la classification proposée par Gola et al. mérite d’être connue : les fractures du corpus comprennent les fractures de la symphyse (symphysaire médiane et paramédiane), les fractures préangulaires et les fractures alvéolodentaires ; les fractures du ramus comprennent les fractures de l’angle, du condyle (capitale ou condylienne, cervicale ou sous-condylienne, basicervicale ou sous-condylienne basse) et du coroné (intra-, extratemporale).

Épidémiologie - Physiopathologie :

A - Épidémiologie :

Malgré quelques variations liées aux biais de recrutement, il est possible de préciser les données essentielles.

La fracture de la mandibule survient dans 70 à 80 % des cas chez l’adulte jeune de sexe masculin.

Les circonstances de survenue sont variables et comprennent les accidents de la circulation notamment des deux roues, les agressions, les accidents de sport, les accidents domestiques dont essentiellement les chutes, plus rarement les fractures pathologiques et iatrogènes.

Malgré le caractère multifactoriel (niveau socioéconomique, centre urbain ou rural, criminalité...) de l’épidémiologie des fractures de la mandibule, des modifications ont été observées ces dernières années ; elles sont essentiellement géographiques.

Dans les centres urbains, les fractures de la mandibule surviennent dans environ 80 % des cas à la suite de violences interpersonnelles, chez des sujets de sexe masculin et dans plus de la moitié des cas associées à l’usage de substances addictives (alcool, marijuana, cocaïne, héroïne, LSD...).

La ceinture, l’air bag, l’ABS, le casque intégral ont considérablement fait chuter le taux de fractures liées à des accidents de circulation.

L’épidémiologie en fonction des foyers de fracture sera détaillée dans les chapitres correspondants.

B - Physiopathologie :

1- Mécanismes :

Deux types de traumatisme peuvent aboutir à la fracture de la mandibule :

• direct, la fracture se produit au niveau du point d’impact, indépendamment de l’architecture osseuse et dentaire du site lorsqu’une grande force est appliquée sur une petite surface de la mandibule ;

• indirect, la fracture se produit à distance du point d’impact, au niveau des zones de faiblesse que sont le col, l’angle et la parasymphyse.

Un traumatisme latéral peut entraîner une fracture parasymphysaire par diminution de la distance bigoniale ou un traumatisme antéropostérieur peut entraîner une fracture angulaire par augmentation de la distance bigoniale.

2- Déplacements des fragments fracturaires :

Les déplacements se font sous l’influence de plusieurs facteurs : le mécanisme de la fracture, le siège et le nombre des traits de fractures, leur orientation, l’articulé dentaire et l’action des muscles.

On distingue trois types de déplacements : l’angulation dans le plan frontal, le chevauchement dans le plan horizontal et le décalage dans le plan vertical.

Ainsi, les muscles abaisseurs de la mandibule et protracteurs de la langue qui s’insèrent sur la symphyse provoquent une glossoptôse en cas de fracture parasymphysaire bilatérale par recul de la symphyse et de ses insertions musculaires.

Le muscle ptérygoïdien latéral entraîne un déplacement ventromédial du fragment crânial des fractures du condyle.

Son action sur le disque peut compromettre la fonction articulaire en le lésant ou en le désolidarisant du processus condylaire.

Le trait de fracture peut être favorable ou défavorable selon les déplacements induits par la résultante des forces musculaires de part et d’autre du point de rupture.

Les muscles peuvent faciliter la coaptation des fragments osseux ou au contraire leur séparation.

L’édentation augmente l’amplitude des déplacements par inexistence de cale dentaire.

Sur le ramus, les muscles élévateurs (temporal, masséter et ptérygoïdien médial) auront leur action majorée par l’absence de dents postérieures.

Diagnostic :

Le diagnostic repose sur le triptyque : interrogatoire, examen clinique et imagerie.

L’examen du traumatisé de la face se passe bien souvent dans un service d’urgence, il doit être toujours précédé d’un examen général afin d’éliminer des urgences vitales et de dépister des lésions associées viscérales ou ostéoarticulaires, notamment du rachis cervical.

A - Interrogatoire :

L’interrogatoire du blessé ou des témoins du traumatisme précise la date, l’heure, les circonstances de l’accident, afin d’évaluer l’importance du traumatisme et de la possibilité de lésions associées.

Il précise une modification de l’engrènement dentaire.

Les antécédents généraux à type de crise comitiale, d’insuffisance cardiorespiratoire, de diabète, d’anorexie..., les terrains psychologique et somatique doivent être soigneusement appréciés afin d’éviter une décompensation postopératoire et de proposer une prise en charge globale et appropriée.

On apprécie également les antécédents maxillofaciaux familiaux, congénitaux, acquis, et de traitement orthodontique.

Les signes fonctionnels peuvent être importants avec une douleur, une gêne, une impossibilité de la mastication, de la déglutition et de la phonation.

B - Examen physique :

Il doit être méthodique et noté sur un schéma. Des photographies peuvent être utiles.

L’examen est exobuccal et endobuccal.

L’examen exobuccal : l’inspection recherche des éraflures, des plaies (siège, profondeur, degré et type de souillure, pigmentation...), des ecchymoses, des hématomes ou des déformations osseuses, avec modification nasale, élargissement de la distance intercanthale, effacement de la pommette, l’extériorisation d’une épistaxis, d’une otorragie, une rétrogénie, une déviation de la pointe du menton ou une plaie du menton.

La palpation minutieuse recherche une irrégularité douloureuse du contour mandibulaire.

Une douleur de la région condylienne sera appréciée directement ou par introduction d’un doigt dans le conduit auditif externe, par palpation prétragienne ou à la pression sur le menton.

La recherche d’un trouble de la sensibilité labiomentonnière est systématique.

À l’examen endobuccal, on recherche : les plaies muqueuses, les luxations ou les fractures dentaires, un hématome pelvilingual ; le type de denture (définitive, mixte, lactéale), l’état des dents (caries, amalgames, édentation...), du parodonte, l’existence de prothèses fixes ou amovibles, un trouble de la dynamique mandibulaire, une limitation douloureuse de l’ouverture buccale ou de la fermeture buccale favorisant l’écoulement d’une salive sanguinolente, une anomalie et/ou une modification de l’articulé dentaire (déviation du point interincisif, béance, linguoversion...) sinon une modification de l’articulé dentaire.

Tous les patients n’étant pas en classe I, la référence à un articulé antérieur se fait le plus souvent grâce aux facettes d’usure dentaires.

La palpation explore le vestibule inférieur gingivojugal ; en cas de doute, la morsure d’une cale entraîne une mobilité douloureuse.

La vitalité des dents de part et d’autre du foyer de fracture est testée.

Une hypoesthésie en aval du trait de fracture témoigne d’une lésion du nerf alvéolaire inférieur.

Le déclenchement d’une douleur prétragienne à la mobilisation du menton fait suspecter une fracture du condyle.

De même, le déclenchement d’une douleur antérieure à la pression des angles mandibulaires oriente vers une fracture symphysaire.

L’examen clinique permet d’affirmer ou de suspecter la fracture de la mandibule ; des lésions associées maxillofaciales et générales sont recherchées.

Au terme de ce bilan clinique, des radiographies sont demandées.

Suite

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