Il existe une prédisposition familiale et ethnique aux
fibromes utérins qui sont 2 à 3 fois plus fréquents chez
les femmes noires (prévalence de 50 % à l’âge de 30 ans).
En outre, les fibromes sont palpés plus tôt, sont plus
volumineux, grossissent plus vite et restent plus longtemps
asymptomatiques chez les femmes noires que
chez les caucasoïdes.
Il n’y a pas de fibromes avant la puberté et ils régressent
après la ménopause sauf en cas de traitement oestrogénique
ou de dégénérescence sarcomateuse.
L’âge
auquel se manifestent les myomes est le plus souvent
situé entre 30 et 50 ans.
Leur apparition ne semble pas
être favorisée par la grossesse, la multiparité, ni la prise
des pilules oestroprogestatives.
La pilule aurait même
plutôt un effet protecteur.
2- Symptomatologie d’appel :
La plupart des myomes (50 à 80 %) sont asymptomatiques.
Du fait d’un meilleur suivi gynécologique de
la population et de la diffusion de l’échographie abdomino-pelvienne, ils peuvent être découverts à
l’examen systématique, en cours de grossesse ou lors de
l’exploration d’une autre pathologie ou d’une infertilité.
• Saignement anormal ; il peut s’agir de :
– ménorragies : ce sont des règles anormales par leur
volume (hyperménorrhée) ou leur durée.
Les ménorragies
sont plutôt rencontrées en cas de fibrome sousmuqueux
;
– métrorragies : ce sont des saignements anormaux
survenant en dehors des règles qui doivent faire
évoquer une lésion associée ;
– ménométrorragies : l’association des deux.
• Douleurs pelviennes : elles peuvent être une simple
gêne à type de pesanteur, parfois augmentée en période
prémenstruelle.
Elles peuvent aussi être en rapport avec la compression
d’un organe de voisinage :
– vessie pouvant entraîner une pollakiurie, une dysurie,
l’aggravation d’une incontinence, et exceptionnellement
une rétention aiguë d’urines ;
– rectum avec constipation ;
– rarement urétérale, évoluant à bas bruit vers l’hydronéphrose,
dans les fibromes inclus dans le ligament
large.
Son origine peut être vasculaire ischémique : nécrobiose
d’un fibrome, torsion d’un fibrome pédiculé.
• Augmentation du volume de l’abdomen : parfois très
importante, elle peut être le seul symptôme.
• Leucorrhées : il s’agit de pertes anormales.
3- Examen clinique :
• État général : une fièvre, rarement élevée, peut
accompagner la nécrobiose d’un fibrome.
• Inspection et palpation abdominale : elle peut être
normale.
Elle met parfois en évidence une masse
pouvant déformer l’abdomen, dure, à contours arrondis, de taille variable, qui peut remonter au-dessus de l’ombilic.
Elle repère d’éventuelles cicatrices de chirurgie
antérieure.
• Examen au spéculum : il permet d’observer le col
utérin, de visualiser et quantifier un saignement ou des
pertes anormales, d’apprécier l’accessibilité à une
chirurgie vaginale et de réaliser à titre systématique des
frottis cervico-vaginaux de dépistage.
Il peut être
normal, montrer une déviation cervicale par la masse ;
rarement, il permet de découvrir un fibrome pédiculé
accouché par le col.
4- Toucher vaginal :
Réalisé vessie vide, combiné à la palpation abdominale
et éventuellement complété par un toucher rectal, il
explore systématiquement le col et le corps utérins, les
annexes et les paramètres, le cul-de-sac de Douglas, les
parois vaginales.
Il peut être non contributif ou paraître normal en cas
d’obésité, ou en cas de fibromes dont la taille ou la
localisation ne déforment pas les contours utérins.
L’utérus est généralement augmenté de volume, il reste
ferme, ses contours sont parfois lisses, réguliers, parfois
bosselés avec en surface une ou plusieurs saillies
rondes, indolores, fermes voire dures, solidaires du
corps utérin à la mobilisation.
Néanmoins, en cas de fibrome sous-séreux pédiculé, la
masse peut sembler indépendante de l’utérus et avoir les
caractères sémiologiques d’une tumeur annexielle.
5- Examens complémentaires :
• Échographie pelvienne : c’est l’examen de 1re intention.
Réalisée par voie abdominale et vaginale, elle est
interprétée en fonction du moment du cycle où elle est
réalisée et de la prise d’éventuels traitements hormonaux.
Elle suit un schéma d’analyse systématique.
On analyse d’abord l’utérus en déterminant sa position,
ses dimensions, ses contours et l’aspect du myomètre.
On recherche des images anormales dans la cavité utérine.
On s’intéresse ensuite à l’aspect de l’endomètre : visible
sous la forme d’un liseré échogène dont l’épaisseur
varie au cours du cycle.
Linéaire juste après les règles, il
atteint sur ses 2 faces une dizaine de millimètres en fin
de phase proliférative et constitue un repère pour localiser
les myomes.
Dans certaines indications, son étude peut
être sensibilisée par l’instillation de quelques millilitres
de sérum dans la cavité utérine, ce qui décolle ses 2 faces,
permet de les mesurer indépendamment et de mieux
repérer certains processus à développement endocavitaire.
Cette technique est appelée échosonographie de contraste.
On examine les ovaires : position, taille, échostructure,
présence de kyste.
On recherche des images annexielles anormales et un
épanchement péritonéal au niveau du cul-de-sac de
Douglas.
Dans certains cas, l’examen est complété par l’étude au
doppler des vascularisations locales (artères utérines,
ovaires, kyste, endomètre, myome).
L’utérus myomateux est généralement augmenté de taille (hauteur > 8 cm, largeur > 6 cm, épaisseur > 4 cm),
ses contours sont souvent déformés, son échostructure
est hétérogène.
Les myomes se présentent sous la forme d’images
arrondies, dont l’échogénicité avoisine celle du myomètre,
bien limitées par un liseré plus échogène qui correspond
à une pseudo-capsule.
Le centre peut être remanié par
divers phénomènes dégénératifs et apparaître hypoéchogène,
d’échogénicité hétérogène ou être le siège de
calcifications (hyperéchogènes).
L’échographie permet
de préciser :
– le nombre de myomes et leur taille (intérêt de la voie
abdominale) ;
– le type de myomes : interstitiel (le plus fréquent) situé
au sein du myomètre et ayant tendance à faire protrusion
dans la cavité utérine, devenant sous-muqueux
(au contact de l’endomètre), sous-séreux sessile ou
pédiculé faisant saillie à la surface de l’utérus ;
– leur localisation antérieure ou postérieure, fundique,
isthmique (à la zone de jonction entre le col et le corps
utérin), cornuale pouvant avoir un retentissement sur
une trompe, ou latérale pouvant s’inclure dans le
ligament large, être confondus (notamment en cas de
pédicule fin) avec une tumeur annexielle et exceptionnellement
comprimer l’uretère ;
– l’existence d’une déformation de la cavité utérine.
La vascularisation des myomes se fait par de multiples
petits vaisseaux nourriciers qui traversent le plan de clivage
de façon plurifocale.
Il n’y a pas de pédicule vasculaire
proprement dit. L’évolutivité d’un fibrome peut être prédite
par l’étude au doppler de sa vascularisation.
• Hystéroscopie diagnostique : elle consiste à introduire
un système optique dans la cavité utérine dilatée par du
sérum physiologique ou du gaz.
Grâce à la miniaturisation du matériel, elle est réalisable
sans anesthésie au cabinet car il n’est pas nécessaire de
dilater le col utérin.
C’est actuellement l’examen de référence pour l’exploration
des saignements anormaux.
Elle analyse systématiquement le défilé cervicoisthmique,
la taille et la morphologie de la cavité utérine,
l’aspect des orifices tubaires (position, perméabilité),
l’aspect de l’endomètre et son épaisseur corrélés au
moment du cycle et au statut hormonal, l’existence et la
nature d’un processus intracavitaire (polype, fibrome,
rétention ovulaire, cloison, synéchie, lésion suspecte de
malignité) ainsi que les possibilités d’exérèse endoscopique
par hystéroscopie opératoire.
Elle est moins sensible pour le diagnostic d’adénomyose.
Les fibromes interstitiels et sous-muqueux sont habituellement
visibles sous la forme d’un bombement de
la muqueuse utérine à l’intérieur de la cavité qu’ils
déforment plus ou moins.
Ils peuvent obstruer un ostium
tubaire ou le défilé cervico-isthmique.
Les possibilités d’exérèse par résection hystéroscopique
dépendent de leur nombre, de leur position, de leur
caractère sessile ou pédiculé, de leur taille et du degré de
protrusion dans la cavité utérine dont témoigne l’angle
de raccordement à la paroi.
• Hystérosalpingographie : réalisée en phase folliculaire,
en dehors d’une grossesse, d’une infection et de la
période hémorragique, elle consiste à radiographier le
pelvis avant et à différents temps après l’injection
intra-utérine d’un produit de contraste et son évacuation,
ce qui permet d’analyser la morphologie de la cavité
utérine, les trompes (perméabilité et morphologie)
et habituellement le passage péritonéal du liquide radio-opaque.
Un cliché de profil est réalisé systématiquement.
Le risque essentiel de l’hystérographie est infectieux.
Ses indications se sont réduites avec les progrès de
l’échographie et de l’hystéroscopie.
Elle n’est plus systématiquement
demandée en cas de fibrome mais reste
indiquée pour l’exploration complémentaire des trompes
en cas de stérilité, pour étayer un diagnostic d’adénomyose
suspecté à l’échographie et pour le diagnostic des
malformations utérines.
Le premier temps de l’examen est un cliché sans préparation
qui peut être normal ou monter l’opacité propre
d’un fibrome, la déviation d’organes de voisinage ou des
calcifications.
Les myomes sous-séreux sont habituellement sans
retentissement sur la cavité utérine.
Ils peuvent être
visualisés, mais pas toujours, lors du passage péritonéal
du produit de contraste qui en dessine les contours.
Les myomes interstitiels, les plus fréquents, se manifestent
surtout par des signes indirects (c’est la déformation
qu’ils entraînent qui est visualisée : cavité utérine agrandie
ou soufflée, déviée, modification du trajet des trompes
voire obstruction de celles-ci) et parfois des signes
directs (image d’empreinte arrondie à bords réguliers
dans la cavité, augmentation de la distance entre les
cornes, allongement unilatéral d’une corne).
Les myomes sous-muqueux donnent des images
directes de lacunes intracavitaires, dont l’aspect
(régulier, arrondi ou semi-lunaire) dépend du degré
de protrusion dans la cavité utérine.
• Imagerie par résonance magnétique (IRM) : c’est
l’examen le plus sensible pour le diagnostic et la localisation
des fibromes.
En raison de son coût et de son
accessibilité inférieure à celle de l’échographie, il n’est
pas demandé en 1re intention.
Il est néanmoins utile :
– lorsque les conditions anatomiques limitent les
performances de l’échographie ;
– lorsque, devant une masse latéro-utérine, l’échographie-
doppler ne peut préciser s’il s’agit d’un kyste
ovarien suspect ou d’un fibrome compliqué d’une
transformation oedémateuse ou kystique, d’une nécrobiose
ou d’une dégénérescence sarcomateuse.
• Tomodensitométrie : le scanner n’est pas un examen
performant pour l’étude des viscères pelviens.
Sa résolution
en densité n’est pas bonne, sauf pour les calcifications.
La ceinture osseuse donne des artefacts gênants.
C’est une prescription inutile en cas de fibrome.
• Échographie rénale et urographie intraveineuse :
elles sont envisagées lorsqu’une compression urétérale
est suspectée en cas de volumineux myomes latéraux
ou inclus dans le ligament large.
• Examens biologiques : la numération formule sanguine
peut montrer une anémie microcytaire secondaire
à des hémorragies répétées.
L’exploration du métabolisme
du fer peut monter un syndrome carentiel.
Des formes
rares avec polyglobulie ont été décrites, en rapport avec
une sécrétion d’érythropoïétine par les myomes.
En cas
de fibrome en nécrobiose, une hyperleucocytose est
fréquente.
Mais ces signes ne sont ni sensibles ni spécifiques.
Il n’y a pas de marqueur biologique des fibromes
utérins présentant un intérêt diagnostique.
B - Diagnostic différentiel
:
1- Devant une masse pelvienne
ou une augmentation du volume utérin,
on évoque plusieurs causes
:
Une grossesse normale débutante peut être associée à
une pathologie fibromateuse : il faut toujours y penser
pour prévenir tout geste iatrogène sur la grossesse.
Une grossesse extra-utérine de la corne, quoique très
rare, peut ressembler cliniquement à un fibrome de
même topographie.
Le diagnostic repose sur le dosage
des bêta-hCG (human chorionic gonadotropin) et
l’échographie.
Une tumeur bénigne (fibrothécome) ou maligne de
l’ovaire peut être dure, fixée, de volume variable parfois
très important et se présenter comme un fibrome pédiculé
latéral, inclus dans le ligament large ou même postérieur,
en cas de bascule dans le cul-de-sac de Douglas.
On doit rechercher une ascite, une carcinose péritonéale,
des signes cliniques de localisation secondaire.
Là encore,
l’échographie est primordiale, complétée du dosage des
marqueurs du cancer de l’ovaire (antigène carcinoembryonnaire,
CA 125 et CA 19.9) et d’une imagerie
par résonance magnétique abdomino-pelvienne.
L’adénomyose (une infiltration du myomètre par de
l’endomètre et des lacunes sanguines) se présente, le
plus souvent chez une multipare, sous la forme d’un utérus
globalement augmenté de volume, dur, souvent
accompagné d’une dysménorrhée secondaire et de saignements
anormaux.
L’échographie l’évoque, l’hystéroscopie
ou l’hystérosalpingographie précisent le diagnostic qui
reste histologique.
L’adénomyome ou endométriome
utérin se présente sous la forme d’un nodule d’adénomyose
situé dans le myomètre, qui peut être confondu
avec un myome interstitiel.
Le diagnostic, suspecté par
le chirurgien devant l’absence de plan de clivage, est
histologique.
Certaines tumeurs plus rares de l’utérus (sarcome) ou
d’origine extragynécologique seront suspectées sur
l’imagerie et au cours de la chirurgie mais le diagnostic
revient toujours à l’anatomopathologiste.
2- Devant des saignements anormaux
:
Il faut éliminer un cancer et une grossesse.
Étant donnée la fréquence des fibromes, il ne faut pas
s’arrêter à ce diagnostic.
Chez toute femme en âge de procréer, qui saigne et (ou)
qui a mal au ventre, on doit éliminer une grossesse
extra-utérine.
Les fausses couches précoces sont plus fréquentes en
cas de fibrome utérin.
Devant des métrorragies péri- ou post-ménopausiques,
on doit traquer une pathologie maligne endométriale et
(ou) ovarienne.
L’hystéroscopie est l’examen de choix
pour l’endomètre car elle permet de réaliser des biopsies
sous contrôle de la vue pour une étude histologique.
C’est elle qui affirme le diagnostic de polype, d’hyperplasie
ou d’adénocarcinome endométrial.
Les ovaires
sont systématiquement explorés par échographie, complétée
au besoin par un dosage des marqueurs tumoraux
(ACE, CA 125 et CA 19.9) et par une imagerie par
résonance magnétique du pelvis.
3- Devant des douleurs pelviennes fébriles :
Le diagnostic différentiel de la nécrobiose aseptique
est l’infection utéro-annexielle.
Le terrain, l’existence
de leucorrhées anormales, prélevées pour examen cytobactériologique,
l’échographie et l’évolution sous
traitement permettent de trancher.
C - Évolution :
1- Changements dégénératifs au sein
des fibromes :
Du fait d’altérations circulatoires, d’infection ou d’exceptionnelle
transformation maligne, des modifications
dégénératives peuvent changer l’aspect macroscopique
et microscopique des fibromes.
• L’oedème, après obstruction veineuse partielle, entraîne
un ramollissement de la tumeur, une dissociation des
fibres musculaires et peut donner l’aspect d’un pseudokyste.
• La dégénérescence hyaline survient habituellement
par ischémie dans les myomes de 4 à 5 cm.
Le tissu
conjonctif normal est remplacé par du matériel acellulaire
acidophile aux colorations usuelles.
Une obstruction
artérielle plus complète donne lieu à une dégénérescence mucoïde ou myxomateuse : l’oedème est diffus et la
consistance devient gélatineuse.
La nécrose centrale
peut conduire à la formation d’une cavité par liquéfaction
du tissu.
• La dégénérescence graisseuse voit un remplacement
du tissu conjonctif par des lobules graisseux.
Elle peut
être suivie de nécrobiose ou de calcification.
• Dans la nécrobiose, les fibres musculaires sont
entourées d’un stroma oedémateux où les vaisseaux
apparaissent dilatés et sont responsables de la couleur
« hortensia » des myomes en nécrobiose.
Si la nécrose
est focale, elle évolue vers une fibrose cicatricielle ; si elle
est importante, elle ressemble à un magma nécrotique.
La dégénérescence avec calcification est le stade ultime
après nécrobiose ou dégénérescence graisseuse.
Des
cristaux se sont déposés dans le noyau central du
myome et entre les fibres musculaires qui ont perdu leur intégrité. Les calcifications peuvent être centrales, périphériques
ou dispersées.
La dégénérescence sarcomateuse est exceptionnelle,
avec une incidence estimée entre 0,04 et 0,29 %.
Elle
s’observe généralement au centre de la tumeur qui
devient molle, friable, avec des hémorragies.
Le diagnostic
histologique repose sur le nombre de mitoses
et d’atypies cellulaires.
On parle de tumeur maligne
lorsqu’il existe plus de 10 mitoses par champ.
2- Évolution clinique :
• Quiescence : le plus souvent, les fibromes restent
stables et asymptomatiques.
• Croissance : les mécanismes qui gouvernent la croissance
des myomes sont encore incomplètement connus.
On a observé des modifications génétiques, des anomalies
de certains facteurs de croissance et de leurs récepteurs
qui se traduisent par des proliférations cellulaires et
vasculaires, ainsi que des perturbations de la matrice
extracellulaire.
Il existe des similitudes entre la genèse
des myomes, celle des cicatrices chéloïdes et des
plaques d’athérome.
En outre, les fibromes sont des
tumeurs sensibles à l’environnement hormonal : un état
d’hyperoestrogénie relative favorise leur croissance.
C’est le cas physiologiquement en périménopause, mais
aussi en cas de traitement hormonal (contraceptif ou
substitutif) mal équilibré.
Par contre, en cas de fibromes
asymptomatiques, il n’y a pas de certitude qu’un traitement
hormonal substitutif (THS) de la ménopause bien
équilibré favorise leur croissance ou leur complication.
L’existence de fibromes ne doit pas contre-indiquer le
traitement hormonal substitutif de la ménopause dont
les effets bénéfiques sont bien documentés.
La grossesse
s’accompagne souvent d’une augmentation de volume
des fibromes et de phénomènes de nécrobiose aseptique.
• Régression : c’est le plus souvent le cas après la
ménopause, en l’absence de traitement oestrogénique ou
de dégénérescence sarcomateuse.
• Complications : voir paragraphe suivant.
• Récidive : en cas d’exérèse incomplète mais aussi
après traitement complet. Seule l’hystérectomie prévient
toute récidive.
3- Complications
:
• Hémorragies : elles peuvent être responsables
d’anémie sévère et d’une gêne socioprofessionnelle.
• Douleur : elle peut être le résultat de la torsion d’un
fibrome pédiculé, de la dilatation induite par un myome
faisant protrusion dans la cavité ou dans le défilé cervicoisthmique,
de phénomènes de nécrobiose, de dégénérescence,
ou simplement de la croissance d’un myome.
• Compression d’un organe de voisinage : vessie,
rectum, uretère, vaisseaux pelviens.
• Accidents thromboemboliques : favorisés par une
anémie, une polyglobulie ou une compression veineuse.
• Infertilité : la responsabilité des fibromes en cas
d’infertilité est controversée mais ils sont susceptibles
de retentir sur plusieurs étapes nécessaires à l’obtention
d’une grossesse (l’ovulation, le transport des gamètes et de l’oeuf, la nidation, le maintien de la grossesse).
Les
mécanismes invoqués sont une altération de la qualité de
l’endomètre, des anomalies de la contractilité, de la vascularisation,
de l’anatomie utérine et des perturbations
des rapports tubo-ovariens.
• Complications obstétricales : le risque de voir un
fibrome se compliquer au cours de la grossesse est estimé
entre 10 et 40 %.
On note une augmentation du nombre
de fausses couches précoces et de saignements du
1er trimestre, de douleurs pelviennes (surtout par nécrobiose
aseptique), du risque d’accouchement prématuré,
de retard de croissance et d’hématome rétroplacentaire,
de complications de l’accouchement à type de présentation
anormale, un taux plus élevé de césariennes, d’hémorragies
du post-partum et d’hystérectomies d’hémostase ainsi
que d’accidents thromboemboliques.
• Dégénérescence sarcomateuse : elle est exceptionnelle.
Traitement :
A - Traitements médicaux
:
Bien que les mécanismes qui gouvernent la genèse et la
croissance des fibromes ne soient pas complètement
compris, il est clair que les oestrogènes jouent un rôle
stimulant la croissance des myomes.
Le but des traitements
médicaux utilisés actuellement est de corriger
l’hyperoestrogénie relative favorisant la croissance et
l’activité des fibromes.
Ils permettent de réduire voire de
supprimer la symptomatologie fonctionnelle, d’obtenir
une réduction de volume des fibromes mais jamais de
faire disparaître la tumeur.
1- Progestatifs :
Ils permettent d’équilibrer la sécrétion oestrogénique
s’ils sont administrés après l’ovulation ou de la réduire
s’ils sont donnés avant l’ovulation.
Dans 60 à 80 % des
cas, ils font disparaître les signes fonctionnels (ménométrorragies)
mais ils ont un effet inconstant sur la
réduction de volume des myomes.
Les progestatifs les
plus utilisés sont les dérivés de la norprogestérone :
promégestone (Surgestone) à la dose de 0,500 mg/j et
acétate de nomégestrol (Lutényl) à la dose de 5 mg/j,
administrés du 14e au 25e jour du cycle.
2- Analogues de la GnRH
(gonadotrophine releasing hormone)
:
Ils sont actuellement le principal traitement médical des
fibromes.
Ils créent une hypo-oestrogénie responsable
d’une réduction du volume des myomes et d’une
diminution des phénomènes hémorragiques.
L’effet de
ces produits est réversible à l’arrêt du traitement. Ils
entraînent une aménorrhée et des effets secondaires en
rapport avec l’hypo-oestrogénie : bouffées de chaleur,
sécheresse vaginale, troubles de la libido et, en cas d’utilisation
prolongée (plus de 6 mois), une possible ostéoporose.
Le coût de ces produits est aussi très élevé.
Le traitement est limité à 3 mois, réservé aux fibromes
responsables d’une anémie et pour préparer une intervention
chirurgicale (résection hystéroscopique, myomectomie,
hystérectomie).
On utilise essentiellement des préparations d’action
retard au rythme d’une injection tous les 28 jours, par
exemple de triptoréline (Décapeptyl LP 3 mg) ou de
leuproréline (Enantone LP 3,75 mg).
Il existe également
des préparations dont l’efficacité est de 3 mois et qui ne
nécessitent qu’une seule injection.
3- Domaine de la recherche :
Les travaux actuels visent à mieux comprendre les
mécanismes qui gouvernent la genèse et la croissance
des myomes afin de trouver des cibles spécifiques au
niveau des facteurs de croissance ou de leurs récepteurs
puis probablement des gènes impliqués.
B - Traitements chirurgicaux :
1- Traitement conservateur :
• Les myomectomies consistent à enlever le(s)
myome(s) en conservant l’utérus.
Elles doivent toujours
être envisagées en 1re intention pour préserver la fertilité
des patientes en âge d’avoir des enfants et dans tous les
cas où l’on peut éviter le traumatisme psychologique
d’une hystérectomie.
On peut, selon les caractéristiques
du fibrome, pratiquer une myomectomie par résection hystéroscopique, par coelioscopie, par voie vaginale ou
par laparotomie. Récemment, la myolyse a été préconisée :
elle consiste à dévasculariser un fibrome (par exemple
en coagulant au laser ses vaisseaux nourriciers) pour le
laisser se nécroser et être résorbé.
De la même façon,
l’embolisation artérielle définitive chez des patientes
refusant une hystérectomie est en cours d’évaluation.
• La résection hystéroscopique concerne les myomes à
développement endocavitaire, essentiellement sousmuqueux,
dont la taille n’excède pas 5 cm et la portion
interstitielle est inférieure à 50 % du volume total.
Une
distance de plus de 5 mm entre le bord externe du
myome et la séreuse utérine constitue une marge de
sécurité à respecter.
Les hystéroscopes opératoires utilisés
actuellement ont un diamètre de 9 mm qui nécessite une
dilatation cervicale.
La cavité utérine est remplie avec
du glycocolle.
On utilise une anse électrique coulissant
le long du système optique qui permet de découper le
myome en copeaux, sous contrôle de la vue et toujours
du fond de l’utérus vers l’isthme.
Les copeaux sont
récupérés pour examen anatomopathologique.
Les
risques de l’hystéroscopie opératoire sont la perforation
utérine (qui impose de réaliser une coelioscopie pour
contrôler les organes pelviens) et le passage intravasculaire
de glycocolle (qui peut donner une hyponatrémie,
un oedème cérébral, des complications neurologiques)
dont la prévention passe par le contrôle de la durée
opératoire, des pressions et des débits d’entrée et de
sortie de liquide.
Les complications infectieuses et les
hémorragies sont très rares.
• La myomectomie par coelioscopie est une technique
difficile qui nécessite des équipes entraînées et un matériel
performant.
Elle est réservée à certaines indications bien
précises : myomes sous-séreux ou sous-séreux et interstitiels
dont le nombre n’excède pas 3 et la taille 8 cm.
La suture de l’utérus est difficile, posant le problème de
la solidité de la cicatrice utérine en cas de grossesse ultérieure.
La durée opératoire est augmentée mais les suites
sont plus simples : la douleur, la durée d’hospitalisation
et de convalescence sont diminuées.
• La myomectomie par laparotomie concerne les limites
des techniques endoscopiques : myomes nombreux,
volumineux ou profonds.
Le risque de cette chirurgie est
essentiellement hémorragique.
On doit donc veiller à
avoir corrigé une anémie avant l’intervention, au besoin
sous le couvert d’un traitement de 2 ou 3 mois d’analogue
de la GnRH, qui permet souvent de passer un cap,
d’arrêter une hémorragie et d’administrer une supplémentation
martiale.
Si le taux d’hémoglobine de la
patiente est normal, on peut prévoir une autotransfusion.
Il est possible aussi de réduire le saignement opératoire
par une embolisation vasculaire préopératoire des
myomes (des particules résorbables sont lâchées dans
les pédicules nourriciers des myomes après cathétérisme
sélectif).
Cela est réalisé seulement par certaines
équipes de radiologie interventionnelle.
• La myomectomie vaginale est réservée à certains cas
où les fibromes sont peu nombreux et facilement
accessibles par cette voie.
La myomectomie est une intervention très adhésiogène.
Des adhérences postopératoires intéressant les annexes
(notamment après exérèse de fibromes postérieurs)
peuvent retentir sur la fertilité.
Les adhérences postopératoires
pourraient être moins fréquentes après
coelioscopie qu’après laparotomie.
La myomectomie
laisse en place un « utérus cicatriciel », fragilisé par
l’intervention.
En cas de grossesse ultérieure, il existe
un risque faible de rupture au niveau de la cicatrice.
2- Traitement radical :
Il s’agit de l’hystérectomie qui peut être totale (emportant
le col utérin) ou subtotale (laissant le col utérin en
place), associée ou non à une annexectomie (ablation
des trompes et des ovaires).
L’hystérectomie peut être
réalisée selon les cas par laparotomie, par voie vaginale
(elle est de cette façon toujours totale), assistée éventuellement
par coelioscopie, ou par coelioscopie seule.
Les ovaires sont retirés chez les femmes ménopausées
en prévention du cancer ovarien ou lorsqu’il existe
une anomalie macroscopique constatée en peropératoire.
Ils sont conservés dans les autres cas pour préserver
la fonction endocrine des gonades.
La patiente est
toujours prévenue avant l’opération de toutes les
éventualités.
Les avantages de la voie vaginale sur la laparotomie sont
une réduction des douleurs postopératoires, de la durée
d’hospitalisation et de convalescence ainsi que l’absence
de cicatrice abdominale.
Elle nécessite une bonne
accessibilité vaginale (meilleure chez la multipare), que l’utérus ne soit pas trop volumineux et qu’il descende
bien à la traction sur le col lors de l’examen sous anesthésie
générale. Une variante est l’hystérectomie coelioassistée
où les gestes sur les annexes et divers temps de
dissection et d’hémostase vasculaire sont réalisés par
coelioscopie.
L’ablation de l’utérus est réalisée par voie
vaginale.
Dans l’hystérectomie coelioscopique tous les
temps opératoires jusqu’à l’ouverture du vagin sont réalisés
par coelioscopie.
L’utérus est extrait par le vagin,
éventuellement après morcellement.
La coeliochirurgie
peut être proposée lorsque l’utérus est peu mobile à la
traction sous anesthésie générale ou s’il existe une
disproportion entre la filière génitale et le volume utérin.
La laparotomie est indiquée en cas de volumineux
utérus dont l’abord par voie vaginale ou coelioscopique
est contre-indiqué.
C - Indications thérapeutiques
:
1- Arguments décisionnels :
Les éléments à prendre en compte pour décider du
traitement sont :
– la symptomatologie et sa gravité ;
– les caractéristiques anatomiques des myomes :
nombre, taille, type, localisation ;
– l’évolutivité des myomes ;
– l’âge, le statut hormonal ;
– la parité, le désir d’enfant ;
– l’existence d’une stérilité ;
– l’existence d’une pathologie associée gynécologique ;
– le terrain : antécédents chirurgicaux, contre-indication
à l’anesthésie ou à certaines voies d’abord chirurgicales.
Finalement, l’interrogatoire, la clinique, l’échographie,
l’hystéroscopie et le taux d’hémoglobine sont les
éléments clés de la décision.
2- Traitement médical exclusif :
Le but du traitement médical est d’améliorer les
signes fonctionnels et d’éviter les complications.
Il ne
permet pas de faire disparaître les fibromes.
En l’état
actuel des connaissances, les analogues de la GnRH ne
constituent donc pas un traitement définitif.
Ils seraient
plutôt un moyen de passer un cap difficile, de différer
une intervention ou d’en modifier les conditions par une
réduction de volume des myomes pratiquement
constante.
3- Traitement médical préopératoire :
Son intérêt est discuté mais l’administration de 2 ou
3 mois d’analogues de la GnRH avant chirurgie peut
être proposée pour traiter une anémie avant l’intervention,
pour limiter le saignement peropératoire
et lorsque la réduction du volume des myomes simplifie
le geste opératoire ou permet d’utiliser une technique
endoscopique.
L’arrêt des hémorragies permet de
réaliser un bilan endoscopique fiable et de planifier
l’intervention.
4- Traitement chirurgical :
Les indications opératoires, réservées aux fibromes
symptomatiques, doivent être posées avec discernement.
Il faut éviter d’opérer à tort des fibromes qui ne sont pas
responsables des symptômes dont se plaignent les
patientes.
Une intervention non justifiée peut être préjudiciable
notamment par son retentissement sur la fertilité.
Le chirurgien doit maîtriser toute la panoplie des
techniques disponibles afin d’offrir à sa patiente celle
qui est la mieux adaptée à son cas.
Il doit penser comme
un chirurgien mais aussi comme un accoucheur, préserver
voire améliorer la fertilité des femmes en âge d’avoir
des enfants.
Il doit respecter au maximum l’intégrité de
l’appareil génital dont l’amputation provoque toujours
un traumatisme psychologique et tenir compte des
préoccupations esthétiques des patientes pour ce qui est
des cicatrices.
• Certaines indications sont faciles à poser : torsion
d’un fibrome pédiculé ou volumineux fibrome sousséreux
pédiculé à risque de torsion ; compression d’un
organe de voisinage par un myome volumineux ; gros
utérus polymyomateux avec pesanteur pelvienne chez
la femme de plus de 40 ans.
• En cas de ménométrorragies, il est facile d’incriminer
un fibrome sous-muqueux et d’évaluer s’il est accessible
à une résection hystéroscopique.
L’indication est plus délicate pour un myome interstitiel
qui ne vient pas au contact de l’endomètre.
L’adénomyose est une cause fréquente de saignements
après 40 ans, son diagnostic est difficile et elle peut être
associée à des myomes interstitiels.
C’est une indication
d’hystérectomie soit d’emblée soit après échec d’un
traitement progestatif.
En dehors d’une torsion, d’un épisode de nécrobiose ou
d’une compression d’un organe de voisinage, un fibrome
est rarement douloureux.
Il faut éliminer une autre
étiologie avant de pratiquer l’exérèse d’un fibrome ou de
l’utérus pour douleurs pelviennes.
En cas de stérilité, la responsabilité des fibromes est
controversée.
Il faut faire un bilan complet avant de
décider d’opérer et tenir compte du fait que la myomectomie
(surtout en cas de localisation postérieure)
entraîne très souvent des adhérences postopératoires au
niveau des annexes qui peuvent altérer la fertilité.
Si le bilan ne retrouve aucun autre facteur associé, la
myomectomie est envisageable, surtout en cas de
myome sous-muqueux, volumineux, déformant la cavité
utérine. Dans ces circonstances, on obtient 60 % de
grossesses à 1 an.
En cas de fibrome rapidement évolutif en préménopause
ou de fibrome évolutif sous traitement hormonal
substitutif de la ménopause, une intervention le plus
souvent radicale est proposée pour permettre d’instaurer
ou de poursuivre le traitement substitutif.