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Chirurgie
Exérèses pancréatiques céphaliques : duodénopancréatectomies céphaliques (DPC)
Cours de Chirurgie
 

 

 

Introduction :

Les pancréatectomies céphaliques regroupent l’ensemble des procédés d’exérèse de la tête du pancréas.

Conséquence de l’intimité de ses rapports avec le cadre duodénal, la DPC est, de loin, la méthode la plus utilisée.

L’étendue de l’exérèse pancréatique, l’importance de la résection gastrique et jéjunale et les différentes modalités de reconstruction pour rétablir la continuité biliaire, pancréatique et digestive sont à l’origine de nombreuses variantes.

Pour réduire les séquelles nutritionnelles et lorsque la lésion sousjacente le permet, le geste d’exérèse peut respecter l’estomac et le pylore, voire plus exceptionnellement le duodénum.

Le lecteur devra garder à l’esprit que la difficulté de la chirurgie d’exérèse de la tête du pancréas tient d’abord :

– au terrain auquel elle s’adresse : malades volontiers dénutris par un cancer ou une pancréatite chronique, ce qui favorise les infections nosocomiales et retarde la cicatrisation ;

– à la nature même du tissu pancréatique : fragile, déchirant sous les fils et capable de « s’enflammer » sous le traumatisme des aiguilles, il menace l’évolution postopératoire de fistules sur les lignes d’anastomoses, de pancréatites aiguës ou d’hémorragies, complications qui engagent le pronostic vital ;

– au possible retentissement de la lésion pancréatique sur les structures vasculaires de voisinage, principalement sur la veine porte (dont l’envahissement ou la thrombose compliquent considérablement l’intervention en imposant des gestes de reconstruction vasculaire délicats), mais aussi sur l’artère mésentérique supérieure dont l’attraction par la tumeur et la modification des rapports anatomiques peuvent exposer aux plaies iatrogènes.

Mise en place générale :

La connaissance des rapports anatomiques de la tête du pancréas est la base d’une chirurgie d’exérèse aux risques limités.

La tête du pancréas est rétropéritonéale, encadrée par le duodénum auquel elle adhère. Sa limite est tracée à gauche par l’isthme de la glande, portion parenchymateuse étroite située en regard de l’axe vasculaire mésentérique supérieur.

Le crochet du pancréas (uncus, ou encore petit pancréas) est appendu à son bord inférieur et passe en arrière des vaisseaux mésentériques avec lesquels il contracte des rapports étroits.

Ce bloc duodénopancréatique est adossé à la face antérieure de la veine cave inférieure dont il est séparé par le fascia de Treitz, plan avasculaire, qu’il est aisé de décoller par la manoeuvre de Kocher.

À son bord supérieur prend pied le pédicule hépatique enveloppé des feuillets antérieur et postérieur du petit épiploon.

Son bord inférieur correspond à l’extrémité supérieure de la racine du mésentère qui contient l’artère mésentérique supérieure (AMS), flanquée à sa droite de la veine mésentérique supérieure (VMS).

Alors que l’axe de l’AMS plonge vers l’aorte, celui de laVMSse poursuit en arrière de l’isthme, reçoit la veine splénique et débouche au bord supérieur de la glande pour former le tronc porte.

La face antérieure de l’axe veineux est séparée de la face postérieure de la glande par un plan avasculaire.

Cette particularité impose l’isthme comme la limite gauche des pancréatectomies céphaliques.

Enfin, le bloc duodénopancréatique est barré en avant et dans son tiers inférieur par le bord droit de la racine du mésocôlon transverse, lequel est recouvert de la partie droite du tablier épiploïque.

La vascularisation de la tête du pancréas et du cadre duodénal est commune, assurée par un système de deux arcades antérieure et postérieure. Les arcades artérielles sont branchées en pont entre l’artère gastroduodénale et l’origine de l’AMS.

Elles constituent une voie de suppléance essentielle à la vascularisation hépatique lorsque le tronc coeliaque est sténosé ou obstrué par l’insertion anormalement basse du ligament arqué.

Inversement, elles peuvent être le seul moyen de suppléance artérielle de l’intestin grêle en cas de thrombose à l’origine de l’AMS (arcade de Rio Branco).

Les arcades veineuses se drainent dans la veine porte en haut et la veine mésentérique inférieure (VMI) en bas.

De petites veinules issues de la tête du pancréas se drainent directement dans le flanc droit de l’axe mésentéricoportal et sont rencontrées lors de la section de la lame fibrolymphatique rétroportale.

Dans environ 11 % des cas, la vascularisation artérielle du foie droit est assurée par une artère hépatique issue de l’origine de l’AMS.

Cette artère hépatique droite chemine en arrière de la tête du pancréas, dans la lame rétroportale.

Lorsqu’elle n’a pas été repérée par une angiographie préopératoire, il est possible de la retrouver par la palpation, au flanc postérieur droit du ligament hépatoduodénal.

Plus rarement, l’artère hépatique naît entièrement de l’aorte ou de l’AMS, chemine à la face antérieure du pédicule et peut être prise, si l’on n’y prend garde, pour la branche gastroduodénale.

Le réseau lymphatique qui draine la tête du pancréas est complexe. Les premiers relais ganglionnaires sont situés au contact de la glande, aux bords supérieur et inférieur, le long des arcades vasculaires antérieures et postérieures, de la tête ainsi qu’autour de l’origine du pédicule mésentérique supérieur.

Des relais plus lointains sont situés au pied du pédicule hépatique et à l’origine du tronc coeliaque.

Plus à distance encore se trouvent des relais interaorticocaves.

Dans les cancers de la tête du pancréas, il est possible qu’un relais interaorticocave soit envahi alors que les ganglions les plus proximaux ne le soient pas.

Cette notion souligne l’importance d’un bilan d’envahissement soigneux avant tout geste de résection, et soulève le problème de savoir jusqu’où il est nécessaire d’étendre le curage ganglionnaire au cours des DPC.

A - Préparation des malades :

Temps fort de cette chirurgie, elle comporte :

– une évaluation précise de la fonction hépatique et la correction d’un déficit en vitamine K chez les malades ictériques dont le taux de prothrombine est bas en l’absence d’hépatopathie chronique sous-jacente ;

– la mise en route d’une kinésithérapie respiratoire dont le premier objectif est d’éduquer le malade à ce qu’il devra faire en postopératoire ;

– une préparation colique par lavement la veille de l’intervention ;

– une antibiothérapie prophylactique associant une céphalosporine de deuxième génération au métronidazole, administrée pendant les 24 premières heures.

En présence d’un ictère par rétention, si les voies biliaires sont infectées, l’antibiothérapie devient curative, prolongée, associant un aminoside aux molécules précédentes.

La mise en place d’une nutrition parentérale préopératoire chez les malades cancéreux dénutris peut être utile pour réduire la morbidité postopératoire.

En pratique pourtant, dans les cancers de la tête du pancréas, seule la levée d’obstacles digestifs et biliaires et l’apaisement des douleurs permettent d’espérer une nutrition entérale efficace.

B - Installation et voies d’abord :

Le malade est installé en décubitus dorsal, bras en croix.

Le champ opératoire doit être large, allant de la ligne mamelonnaire au pubis et s’étendant de chaque côté, loin dans les flancs.

La voie d’abord est le plus souvent une incision transversale bi-souscostale allant d’un flanc à l’autre et passant à égale distance de l’ombilic et de la xyphoïde.

L’abord vertical xyphopubien est réservé aux sujets longilignes.

Notre préférence va à l’abord transversal parce qu’il expose largement la totalité de la glande pancréatique, donne un accès idéal au foie et à son pédicule, laisse la possibilité d’un geste d’exérèse associée à l’étage sous-mésocolique et semble mieux toléré que les abords verticaux au plan respiratoire.

Enfin, il donne lieu à moins d’éventrations. L’opérateur est placé à droite, aidé par deux assistants.

Une boîte de laparotomie conventionnelle complétée par des clamps vasculaires (droits et de type Satinsky) de tailles différentes suffit.

Un aspirateur efficace est indispensable.

Le bistouri à ultrasons peut être utile pour disséquer les accolements d’un pancréas fibreux aux structures vasculaires.

L’avènement récent de la chirurgie laparoscopique a amené à en situer les techniques dans la chirurgie du pancréas.

Si son intérêt dans l’évaluation de la résécabilité et la réalisation du geste d’exérèse pancréatique reste à confirmer, nombreux sont les auteurs qui voient dans la laparoscopie, le moyen le plus spécifique et le plus sensible pour mettre en évidence une carcinose péritonéale.

Cette éventualité pourrait faire surseoir à l’intervention chez les malades non cholestatiques et éviter les complications d’une laparotomie simplement exploratrice.

Forme la plus classique : opération de Whipple

Nous prendrons pour type de description le cas le plus démonstratif du cancer limité à la tête du pancréas, comprimant l’extrémité distale d’une voie biliaire largement dilatée en amont chez un sujet en bon état général sans antécédents chirurgicaux.

Nous décrirons ensuite les variantes techniques et les difficultés que peuvent générer les différentes indications de DPC.

L’intervention initialement décrite par Whipple en 1935 était une exérèse en deux temps, mettant en place les voies de dérivation avant l’exérèse du bloc duodénopancréatique.

Ce nom est aujourd’hui consacré à la résection en bloc de la tête du pancréas, et des structures biliodigestives attenantes : antre gastrique, cadre duodénal, première anse jéjunale, vésicule biliaire en continuité avec le canal cystique et la partie distale du cholédoque.

Cette exérèse interrompt la continuité biliaire et digestive et laisse ouverte une tranche pancréatique centrée par l’extrémité distale du canal deWirsung.

Un procédé de reconstruction est alors nécessaire.

Il en existe de très nombreux mais le plus répandu reste le procédé décrit par Child en 1943 qui comporte le drainage successif du pancréas, de la voie biliaire et de l’estomac sur la première anse jéjunale.

A - Exploration et évaluation de la résécabilité :

Ce temps a pour but de juger de la possibilité technique et de l’utilité d’un geste d’exérèse.

L’échographie peropératoire permet de localiser une tumeur de petite taille et de rechercher des métastases hépatiques.

L’échodoppler peropératoire permet de vérifier l’existence et la direction des flux veineux et artériels.

Une inversion du flux dans l’artère gastroduodénale ou l’artère hépatique commune témoignerait par exemple de l’existence d’une sténose à l’origine du tronc coeliaque (par le ligament arqué).

Cette anomalie est essentielle à connaître parce que la section de l’artère gastroduodénale mettrait le foie en ischémie aiguë, menaçant le pronostic vital. L’exploration chirurgicale manuelle reste de mise.

Elle est conduite de manière centripète pour s’approcher progressivement de la lésion qu’il vaut mieux éviter de trop mobiliser.

Elle comporte de multiples prélèvements, notamment ganglionnaires, pour examen histologique extemporané.

Ainsi se succèdent :

– la palpation soigneuse des coupoles diaphragmatiques, du foie, du péritoine, de l’intestin, de ses mésos et du cul-de-sac de Douglas à la recherche d’adénopathies suspectes et de grains de carcinose péritonéale ;

– l’effondrement du ligament gastrohépatique, au niveau de la pars flaccida qui donne accès à la région coeliaque.

Le lobe de Spiegel, récliné vers la droite à l’aide d’une lame souple permet de rechercher des adénopathies dans le sillon interaorticocave et au pied du tronc coeliaque.

Le pédicule hépatique est exploré entre le pouce et l’index de la main gauche introduit dans le hiatus de Winslow.

À l’étage sousmésocolique, le décollement des premiers centimètres du jéjunum permet la préhension du pédicule mésentérique supérieur et la recherche d’adénopathies suspectes ;

– l’exploration plus rapprochée du pancréas et de la lésion qui permet d’évaluer la résécabilité de la tête du pancréas.

Elle nécessite trois temps de libération fondamentaux :

– un décollement coloépiploïque complet, libérant en particulier l’angle colique droit.

Ce dernier est abaissé en prenant garde de ne pas déchirer la fragile veine colique supérieure droite qui va se drainer dans la veine mésentérique supérieure là ou cette dernière pénètre derrière l’isthme pancréatique (repère utile de la VMS lorsque les mésos sont épais).

Ce décollement donne accès à l’arrière cavité des épiploons et permet l’exploration du versant supérieur du mésocôlon transverse, des ganglions du pédicule mésentériques de l’isthme et du corps de la glande ;

– une manoeuvre de Kocher, menée jusqu’au flanc droit de l’aorte.

Cette manoeuvre fait aussi partie du temps d’exérèse.

Pour cette raison, l’incision du péritoine pariétal postérieur classiquement limitée au bord droit du deuxième duodénum, doit être étendue vers le haut jusqu’au flanc droit du cholédoque puis vers le bas, bien audelà du genu inferius.

Cette manoeuvre expose la veine cave inférieure sous-hépatique là où s’abouchent les veines rénales, et le sillon interaorticocave, siège d’éventuelles adénopathies métastatiques.

La tête est maintenant mobilisable.

Sa préhension prudente entre les doigts de la main gauche permet d’une part d’évaluer la distance entre la tumeur et l’isthme pour définir la ligne de section pancréatique, et d’autre part de rechercher par la palpation une coulée néoplasique dans la lame rétroportale ou la racine de l’AMS, découverte qui rendrait l’exérèse sinon caduque, tout au moins difficile ;

– le clivage entre la face antérieure de l’axe mésentéricoporte et la face postérieure de l’isthme de la glande.

Cette manoeuvre débute par l’exposition de laVMS qu’il est facile de retrouver dans le mésentère, immédiatement à droite de l’AMS ou en suivant la veine colique supérieure.

Le plan de décollement est amorcé aux ciseaux, en restant au contact de l’adventice.

Il convient ensuite de repérer la veine porte au pied du pédicule hépatique en passant dans l’arrièrecavité des épiploons, au bord supérieur du pancréas.

Le décollement rétro-isthmique est ensuite conduit prudemment, au doigt ou à l’aide d’un dissecteur voire d’une pince de Kelly à pointe très mousse.

L’isthme est mis sur lacs.

En cas de résistance au passage de l’instrument ou si le chenal emprunté paraît étroit, mieux vaut d’abord contrôler laVMS à son entrée derrière le pancréas et la veine porte au pied du pédicule.

La recherche d’un passage rétropancréatique restera prudente en dépit de ces précautions.

Au terme de cette préparation, quatre situations peuvent se présenter :

– la lésion est strictement limitée au pancréas avec parfois un envahissement des ganglions de proximité.

Une exérèse à visée curative est possible.

De très nombreux travaux ont été consacrés aux résultats de cette chirurgie.

Ils sont parfaitement représentés par l’expérience de Trede ;

– il existe un envahissement de contact de la paroi antérieure de la veine porte.

L’exérèse à visée curative est encore réalisable mais nécessitera un geste de reconstruction vasculaire qui peut être hémorragique.

Cette donnée et le contexte clinique général doivent être pris en compte pour juger de l’utilité d’un geste radical.

Ce versant de l’exérèse sera abordé dans le chapitre des exérèses difficiles ;

– l’exploration a détecté une coulée néoplasique dans les lymphatiques qui circonscrivent l’origine de l’AMS : l’exérèse devient inutile et fait courir les risques de complications postopératoires à des malades dont la médiane de survie est de l’ordre de 4 mois ;

– des ganglions sont envahis à distance de la glande : cas identique au précédent.

B - Exérèse :

Quatre temps se succèdent.

L’ordre dans lequel ils sont effectués n’est pas constant.

Si la plupart des auteurs s’accordent à penser qu’il convient de libérer d’abord la tête du pancréas de ses attaches biliaire et artérielle hépatique (ne serait-ce que pour reconnaître une anomalie de distribution vasculaire qui modifierait la tactique opératoire) et qu’il convient de sectionner l’estomac avant le pancréas pour des raisons d’exposition, le moment de la section du jéjunum ne fait pas l’unanimité.

Sa section première peut faciliter la libération de l’angle de Treitz et la manoeuvre de décroisement rétromésentérique.

1- Libération des attaches hépatiques :

Elle consiste en la mobilisation de la voie biliaire accessoire, section du canal hépatique commun et de l’artère gastroduodénale

La vésicule est séparée de son lit de manière antérograde, au bistouri électrique.

Cette manoeuvre conduit à l’artère cystique qu’il convient de lier et sectionner, puis au canal cystique dont la libération conduit au bord droit du canal hépatique commun.

Celui-ci est contourné puis sectionné au bistouri froid après ligature du côté aval.

Côté amont, le canal hépatique peut être simplement repéré à l’aide d’un fil Monobrin 6/0, ou mieux, provisoirement lié pour éviter d’être gêné par l’écoulement de bile dans le champ opératoire.

Cette section première expose le flanc droit de la veine porte et facilite la mobilisation du cholédoque qui est emmené en même temps que le tissu lymphatique et les ganglions rétroportaux.

Seule la présence d’une artère hépatique droite limiterait l’étendue de ce curage.

La veine pancréaticoduodénale postérieure et supérieure exposée au flanc droit de la veine porte est liée et sectionnée.

Le feuillet antérieur du petit épiploon est ouvert transversalement, depuis la ligne de section du canal hépatique jusqu’à la brèche déjà créée dans la pars flaccida.

La dissection d’avant en arrière, et la section entre ligatures de tous les éléments lymphatiques périvasculaires, permet d’exposer l’ensemble de l’arbre artériel destiné au foie.

Il est aisé de reconnaître l’artère gastroduodénale issue de l’artère hépatique commune. Deux gestes sont essentiels à ce temps de l’intervention :

– vérifier qu’il s’agit bien d’une artère gastroduodénale et non pas d’une artère hépatique propre issue de l’aorte ou de l’AMS ;

– s’assurer que l’artère gastroduodénale n’est pas une voie de suppléance de la vascularisation hépatique, à partir de l’AMS.

Cette situation n’est pas rare du fait de la fréquence des sténoses de l’origine du tronc coeliaque par un ligament arqué.

La persistance d’un bon pouls dans les branches destinées au foie lors du clampage temporaire de l’artère gastroduodénale confirme la perméabilité du tronc.

L’artère gastroduodénale peut, lorsque ces précautions ont été prises, être sectionnée à son origine, entre deux ligatures appuyées de Prolène 5/0.

L’axe artériel destiné au foie est mis sur lacs dont la traction vers la gauche expose la face antérieure du tronc porte dont il convient d’achever la dissection.

2- Section gastrique :

La DPC selon Whipple emporte le tiers distal de l’estomac.

L’intérêt de ce sacrifice gastrique est double :

– élargir l’étendue de la résection pour respecter un principe de base de la chirurgie carcinologique ; dans cet esprit, la totalité de la portion droite du tablier épiploïque attenante à l’antre et recouvrant la tête du pancréas, doit être réséquée ;

– réduire en partie la sécrétion acide gastrique d’origine gastrinique, et par là, réduire le risque d’ulcère gastrique sur l’anastomose gastrojéjunale.

Une vagotomie complémentaire est inutile, ce d’autant que la bile viendra tamponner l’acidité gastrique.

L’ulcère anastomotique reste une complication exceptionnelle de cette chirurgie.

La zone de section gastrique passe 10 cm en amont du pylore.

Le tablier épiploïque est divisé entre ligatures sur toute sa hauteur.

La section du pédicule gastroépiploïque permet d’arriver au contact de la paroi gastrique.

Le petit épiploon est ensuite disséqué jusqu’au contact de la petite courbure, là où arrive le nerf de Latarjet.

Le choix de la technique de section dépend de la manière dont sera confectionnée l’anastomose gastrojéjunale : soit à la main et la section gastrique est effectuée au bistouri électrique entre deux clamps digestifs, soit à la pince GIA et dans ce cas la section de l’estomac porte en aval d’une rangée d’agrafes (TA90) qui sera, pour des raisons d’hémostase, doublée d’un surjet de fils résorbable Monobrin.

Les extrémités de la tranche de section sont repérées à l’aide d’un fil tracteur permettant de maintenir l’estomac relevé.

L’antre gastrique, maintenu fermé, est récliné vers la droite.

De cette manière, la zone de section pancréatique est parfaitement exposée.

3- Section pancréatique :

Elle est réalisée en regard du bord gauche de l’axe de la veine porte, au bistouri froid.Afin d’appuyer la section sans risquer de blesser la veine, il est utile de glisser dans le tunnel rétropancréatique, une petite lame souple étroite ou une pince de Kelly longue.

La section peut être franche, et finalement la moins traumatisante possible.

Cette section expose deux tranches hémorragiques. Côté céphalique, l’hémostase est rapidement obtenue en suturant la glande à l’aide d’un surjet hémostatique.

Côté corporéocaudal, une hémostase parfaite et durable doit être obtenue en liant sélectivement par un point en X chacun des quatre ou cinq petits vaisseaux qui saignent.

L’orifice du canal de Wirsung, millimétrique en l’absence de dilatation, est repéré pour être épargné lors de ces manoeuvres.

Auparavant, une fine tranche de tissu pancréatique est prélevée pour un examen histologique extemporané, vérifiant que la section est passée en zone saine.

Sa positivité amènerait à étendre l’exérèse vers le corps de la glande ou discuter une pancréatectomie totale.

L’incidence de cet envahissement varie de 18 à 50 % selon les séries.

Lygidakis propose d’effectuer à ce stade une injection de sécrétine, de recueillir le suc pancréatique émis par le pancréas distal, et rechercher par un examen cytologique extemporané la présence de cellules néoplasiques.

La positivité de cet examen indiquerait de « totaliser » la pancréatectomie.

Le corps de la glande relevé sans traction excessive à l’aide de deux fils tracteurs passés aux deux extrémités de la tranche est lentement libéré en sectionnant, entre ligatures, les petites veinules qui se tendent depuis la veine splénique.

Le moignon pancréatique ainsi préparé doit être suffisamment long (3 à 4 cm) pour permettre de réaliser une anastomose pancréatodigestive dans les meilleures conditions.

Sa vascularisation, assurée par des rameaux intraparenchymateux issus de l’artère dorsale principale, est toujours satisfaisante.

4- Section jéjunale :

Ce temps débute à l’étage sous-mésocolique.

Le premier aide soulève le côlon transverse alors que le second, en réclinant vers la droite le paquet des anses grêles, expose l’angle de Treitz et le quatrième duodénum.

L’ouverture du péritoine et le refoulement vers la gauche du pédicule mésentérique inférieur expose le muscle de Treitz au sommet de l’angle du même nom.

Sa section au bistouri électrique, en restant au contact de la paroi digestive, libère l’angle duodénojéjunal.

La zone de section jéjunale est repérée à l’aide d’un lacs, à 10 cm environ de l’angle duodénojéjunal. Le segment jéjunal proximal est libéré par section entre ligatures de ses attaches vasculaires mésentériques en restant au contact de la paroi digestive.

La section est réalisée entre deux clamps digestifs ou mieux en aval d’une rangée d’agrafes (TA55 ou GIA).

L’extrémité distale du jéjunum sectionné est laissée ouverte ou fermée d’emblée en fonction de la technique de reconstruction choisie.

L’extrémité proximale est repérée à l’aide de deux fils forts qui faciliteront les manoeuvres de décroisement rétromésentérique.

Le segment jéjunal libéré est en effet récupéré à l’étage sus-mésocolique en passant à droite et en arrière du pédicule mésentérique supérieur.

Cette manoeuvre amène à l’étage sus-mésocolique la totalité de la pièce d’exérèse encore fixée au pédicule portal par la lame rétroportale.

5- Section de la lame rétroportale :

Le bloc duodénopancréatique est saisi de manière à exposer la lame rétroportale, tissu dense, dans lequel cheminent lymphatiques, veinules issues de la tête pancréatique et arcades artérielles postérieures qui se jettent dans l’AMS.

La lame rétroportale, lorsqu’elle est fine, peut être sectionnée à droite d’une rangée d’agrafes vasculaires, mais cette manoeuvre, certes rapide, limite l’étendue de l’exérèse lymphatique, n’oblitère qu’incomplètement les petits vaisseaux, et surtout expose aux plaies de l’AMS.

L’AMS est en effet facilement attirée vers la droite par la traction exercée sur le bloc duodénopancréatique.

Pour cette raison et pour étendre au maximum le curage ganglionnaire associé à l’exérèse, nous préférons sectionner la lame rétroportale en procédant pas à pas, chargeant de manière sélective sur un angle droit et au ras de la veine porte les veinules qui s’y jettent.

L’AMS, contrôlée à son origine par un lacs vasculaire est soigneusement repérée.

La palpation de cette artère évite de la charger inopinément dans les premiers centimètres de son trajet.

L’exérèse ainsi réalisée expose l’axe veineux mésentéricoporte qui reçoit par la gauche la veine splénique et parfois la veine mésentérique inférieure.

Il est essentiel que l’hémostase soit parfaite, notamment au niveau de la tranche pancréatique, avant de passer au temps suivant.

C - Rétablissement de la continuité pancréatobiliodigestive :

1- Montage selon Child :

C’est la technique la plus classique : le jéjunum proximal draine successivement le pancréas, la voie biliaire puis l’estomac.

Ce circuit est simple et assure le brassage rapide des sécrétions biliaires et pancréatiques.

L’extrémité proximale du jéjunum pourrait être montée à l’étage sus-mésocolique en passant dans la brèche transmésocolique rétropéritonéale qu’a créée la manoeuvre de décroisement.

Il est cependant préférable de refermer cette brèche et de passer l’anse jéjunale en avant du pédicule mésentérique, puis à travers une brèche transmésocolique intrapéritonéale, afin d’éviter toute striction de cette anse en Y.

* Anastomose pancréaticojéjunale :

C’est la plus délicate, non pas qu’elle justifie une grande adresse, mais parce que le pancréas sain est fragile, qu’il se déchire facilement sous la traction des fils et, qu’au niveau des points de passage des aiguilles, une réaction pancréatique aiguë peut démarrer, source de nécrose, de lâchage anastomotique et de fistules postopératoires.

L’anastomose pancréaticojéjunale terminoterminale par intussusception est classique, aisée dans ce contexte où le pancréas restant est fin et qu’il peut être introduit dans la lumière de l’extrémité jéjunale.

L’anastomose est réalisée à l’aide de points séparés de fil résorbable Monobrin (PDS 4/0) ou éventuellement huilés pour glisser dans le tissu pancréatique.

L’anastomose est démarrée par l’adossement des faces postérieures du pancréas à celle de l’anse jéjunale, bord mésentérique en bas, à environ 3 cm de chacune des extrémités.

Puis la berge postérieure de la tranche pancréatique est anastomosée à la berge postérieure de l’extrémité digestive.

Côté pancréas, il convient d’éviter de charger sur le fil le canal de Wirsung parfois très proche.

Côté jéjunum, les points chargent la musculeuse et la muqueuse. Sept à huit points séparés sont nécessaires pour assurer l’étanchéité de la ligne d’anastomose.

Les surjets sont à éviter parce qu’ischémiants et traumatisants pour le pancréas.

Le plan antérieur est alors réalisé en commençant par l’anastomose des berges, puis par l’adossement des faces antérieures, complétant ainsi l’invagination du moignon.

L’intussusception peut être plus simple en intubant le moignon pancréatique dans la lumière digestive à l’aide de points en cadre confectionnés aux quatre points cardinaux, mais la fermeture du bord libre de l’anse, à la face postérieure de la glande, devient difficile.

Lorsque le moignon pancréatique est de diamètre trop important pour être intubé dans le jéjunum, notre préférence va à l’anastomose pancréaticojéjunale terminolatérale.

L’anse jéjunale, en général déjà fermée par une rangée d’agrafes aux temps précédents, est amenée au contact du moignon pancréatique.

L’anastomose réalisée sur le bord antimésentérique, à 2 ou 3 cm de son extrémité proximale orientée vers le bas.

Impossible ici d’invaginer l’anse jéjunale sur le moignon pancréatique.

L’anastomose est réalisée en un plan de points séparés, chargeant largement le pancréas et la totalité de la paroi digestive.

La confection du plan postérieur se fait par l’avant, nécessitant que les fils soient noués à l’intérieur.

Un drainage externe est possible et réalisé à l’aide d’un drain transcystique (type Escat n° 5) extériorisé, soit à la Voelker, 10 cm en aval de l’anastomose (enfouissement selonWitzel).

* Anastomose hépaticojéjunale :

Elle est confectionnée 20 à 30 cmen aval de la précédente.

Cet intervalle relativement long évite qu’une fistule sur l’anastomose pancréatique ne se transforme en fistule complexe pancréatique et biliaire.

Le canal hépatique commun est implanté sur le bord antimésentérique de l’anse.

Lorsque la voie biliaire est très dilatée, il est théoriquement possible d’utiliser un surjet, mais nous préférons rester fidèles aux points séparés.

Dans tous les cas, le fils est résorbable et fin (PDS 5/0).

Les noeuds du plan postérieur peuvent être noués à l’intérieur sans inconvénient.

* Anastomose gastrojéjunale :

Pour obéir à la règle qui consiste à « sous-mésocoliser » les anastomoses gastrojéjunales chaque fois que possible, une seconde brèche, suffisamment large, est confectionnée à la partie gauche du mésocôlon transverse.

Le moignon gastrique y est abaissé et l’anastomose gastrojéjunale réalisée à au moins 40 cm en aval de l’anastomose biliaire pour éviter toute tension.

Lorsque la brèche mésocolique ne peut être réalisée, l’anastomose peut être confectionnée en situation précolique.

Nous avons l’habitude de réaliser cette anastomose à la main, en deux plans, l’un mucomuqueux, l’autre extramuqueux, sur toute la longueur de la section gastrique.

Après confection des plans postérieurs, une sonde nasojéjunale de petit calibre est guidée loin dans l’anse efférente pour démarrer précocement une nutrition entérale.

Il est bien sûr possible de fermer préalablement la section gastrique en « raquette » pour réduire la taille de l’anastomose, ou de réaliser cette anastomose en utilisant les pinces mécaniques.

2- Variantes au rétablissement de la continuité :

* Concernant l’anastomose pancréatique :

– L’anastomose pancréatique peut être occultée et la sécrétion pancréatique exocrine neutralisée par l’injection de Néoprènet, ou de colle biologique dans le canal de Wirsung.

Cette technique, préconisée sur des pancréas fibreux, est déconseillée lorsque la glande restante est normale.

Le risque serait la pancréatite aiguë nécrosante ou hémorragique, ou simplement la reperméation précoce du canal et le déversement de la sécrétion exocrine dans la cavité péritonéale.

Pour la fermeture de la tranche pancréatique, il a été proposé un simple agrafage à la pince TA.

– Lorsque le canal deWirsung est dilaté, il est possible de confectionner une anastomose wirsungojéjunale terminolatérale au bord antimésentérique des premiers centimètres de l’anse montée.

Cette anastomose comporte deux niveaux de suture : pancréaticojéjunale pour fixer la tranche de section pancréatique à la séreuse jéjunale puis wirsungojéjunale proprement dite entre la paroi du canal excréteur et la muqueuse jéjunale.

L’accès aux plans postérieurs étant malaisé, il convient de procéder d’arrière en avant en confectionnant d’abord les plans postérieurs.

L’anastomose peut être intubée, soit à l’aide d’un drain perdu fin, soit à l’aide d’un drain qui ressort de l’anse enYselonVoelker, ou encore par le moignon gastrique.

– L’anastomose pancréatique peut être isolée sur une anse indépendante.

Pour ce faire, l’anastomose biliaire porte sur une anse montée en Y longue, isolée à 40 cm de l’anastomose pancréaticojéjunale.

L’anastomose gastrojéjunale est ensuite réalisée en aval du pied de l’anse.

L’intérêt de ce montage est de séparer les anastomoses biliaires et pancréatiques dont le mélange précoce serait à l’origine de l’activation des enzymes de la digestion.

C’est dans cet esprit, mais pour ne pas perdre la simplicité du montage selon Child, que Parc préconise l’anastomose biliodigestive à au moins 40 cm en aval de l’anastomose pancréaticojéjunale.

– Enfin, l’anastomose pancréatique peut porter non pas sur le jéjunum mais sur l’estomac.

L’anastomose pancréaticogastrique connaît aujourd’hui une réelle faveur, même s’il n’est pas démontré qu’elle permette de réduire l’incidence des fistules pancréatiques postopératoires.

Le montage est préparé au temps de la duodénopancréatectomie céphalique par :

– une exérèse économe de l’antre gastrique.

La face postérieure de l’estomac peut dans ces conditions être amenée sans tension jusqu’au moignon pancréatique ;

– une libération plus importante (sur 4 à 5 cm) du moignon pancréatique repéré à l’aide de deux fils tracteurs passés aux deux extrémités de la tranche.

La face postérieure de l’estomac est incisée sur 4 cm, à la base et perpendiculairement à l’axe de la portion verticale.

L’hémostase des vaisseaux sous-muqueux doit être très soigneuse.

Le moignon pancréatique, est intubé dans l’orifice gastrique confectionné.

La pénétration satisfaisante du pancréas dans l’estomac est aidée par une traction douce exercée sur les fils repères et contrôlée par l’intérieur de la cavité gastrique largement accessible par l’extrémité antrale.

Un premier plan de fixation, sur la face antérieure du moignon pancréatique, est réalisé par voie exogastrique en relevant l’estomac.

Ce plan n’intéresse que la musculeuse de la paroi gastrique.

Un second plan antérieur est ensuite réalisé par voie endoluminale, n’intéressant cette fois que la muqueuse gastrique.

Le plan postérieur est également confectionné en deux temps, d’abord muqueux endoluminal puis musculaire exogastrique.

Une attention toute particulière doit être portée à l’hémostase de la tranche pancréatique qui baignera dans un milieu acide.

Associée à l’anastomose pancréaticogastrique, les dérivations biliaire puis gastrique sont effectuées sur le jéjunum proximal en respectant les principes édictés au paragraphe précédent.

Certains auteurs adossent le moignon pancréatique à la face postérieure de l’estomac et réalisent une anastomose élective entre canal deWirsung et muqueuse gastrique.

Ce procédé n’est réalisable qu’en cas deWirsung dilaté.

L’intubation de l’anastomose à l’aide d’un drain est alors souhaitable.

* Concernant l’anastomose gastrojéjunale :

– Le montage de Child peut être réalisé par voie transmésocolique ou maintenu en situation précolique.

– Dans le montage de Child, il a été proposé d’ajouter une anastomose latérolatérale de 4 à 5 cm entre les anses afférente et efférente à l’estomac (anastomose selon Braun). Ce procédé favorise la vidange de l’anse afférente.

– La principale variante est représentée par la conservation du pylore.

Initialement décrite par Traverso et Longmire en 1978 et exclusivement appliquée lorsque la DPC était indiquée dans le cadre d’une pathologie bénigne, ses indications se sont élargies et quelques centres la préconisent en pathologie carcinologique, à condition bien sûr qu’elle ne compromette pas la radicalité de l’exérèse.

La conservation du pylore et de facto celle des nerfs de Latarjet semble en effet un élément essentiel dans le maintien de la fonction de vidange de l’estomac, de la lutte contre le reflux jéjunogastrique, de la prévention du dumping syndrome, tous ces paramètres constituant un moyen efficace pour lutter contre la dénutrition des malades opérés.

Classiquement, la section duodénale porte 3 à 4 cmen aval du pylore et précède la section de l’artère gastroduodénale.

Mais là encore les variantes sont nombreuses, la longueur du segment duodénal conservé variant de 1 à 6 cm.

Dans tous les cas, l’artère pylorique, branche de l’hépatique commune, est repérée et conservée.

Le segment duodénal proximal relevé expose le départ de l’artère gastroépiploïque droite dont la section, réalisée à l’origine, garantit la conservation des rameaux destinée au bord inférieur du pylore.

Le souci de maintenir une bonne vascularisation du segment duodénal conservé est essentiel.

Le rétablissement de la continuité digestive est bien entendu intégré dans un des montages décrits, qu’il s’agisse d’un montage de type Child ou d’une anastomose pancréaticogastrique.

Lorsque le pylore n’est pas conservé, deux autres montages sont proposés afin d’éviter le reflux des sucs pancréatiques et biliaires dans le moignon gastrique : l’anastomose jéjunojéjunale latérolatérale au pied de l’anse montée sur l’estomac (anastomose selon Braun) et l’anastomose gastrojéjunale sur anse montée en Y.

Ces deux montages favorisent la vidange gastrique, et doivent être associés à une vagotomie afin de réduire le risque d’ulcère anastomotique.

Duodénopancréatectomies céphaliques à risques :

Les antécédents de chirurgie à l’étage sus-mésocolique et, en particulier, de gastrectomie ou de chirurgie des voies biliaires compliquent sans doute la dissection.

Mais la réelle difficulté d’une DPC, est représentée par l’existence d’anomalies vasculaires artérielles ou veineuses, au premier rang desquelles se situe l’impossibilité de cliver la veine porte de la face postérieure du pancréas, et de contrôler ce passage avant la section pancréatique.

Cette éventualité se rencontre lorsque la paroi portale est infiltrée par un cancer volumineux ou naissant au contact de la veine.

Elle est aussi fréquente au cours des formes pseudotumorales des pancréatites chroniques où la glande contracte avec la veine des adhérences inflammatoires serrées.

La dissection est alors d’autant plus difficile que la veine porte peut être thrombosée, thrombose compensée par le développement d’un cavernome portal fait de vaisseaux fragiles qui saignent facilement et abondamment dans ce contexte d’hypertension portale.

La DPC devient dans ces situations une chirurgie périlleuse par le risque hémorragique qu’elle fait courir et la nécessité d’avoir recours à des gestes de reconstruction vasculaire.

Prendre ce risque mérite d’avoir pesé le bénéfice de l’exérèse face à celui qu’apporterait une intervention de dérivation.

Ainsi, il nous semble inutile de procéder à une DPC dans cette situation, sachant que la lésion est bénigne ou que le caractère radical de l’exérèse ne peut être assuré.

Il est cependant des cas ou l’envahissement de la paroi portale a échappé aux explorations préopératoires, notamment à l’échoendoscopie ainsi qu’à l’exploration échographique ou digitale peropératoire.

C’est le cas des cancers adossés au flanc droit de la veine porte dont on ne découvre le caractère infiltrant qu’après section de l’isthme.

Force est, dans ces conditions, de trouver des solutions.

A - Risques et difficultés d’origine artérielle :

– Une artère hépatique droite naissant de l’AMS est retrouvée dans 10 à 15 % des cas.

Elle chemine dans la lame rétroportale et doit être ménagée.

Son existence n’est détectée que lorsqu’elle est recherchée au temps exploratoire au flanc postérieur droit du pédicule hépatique, en arrière de la voie biliaire principale.

Il est alors facile de l’éviter mais sa présence limite l’étendue du curage lymphatique en arrière du pancréas et dans le pédicule hépatique.

L’artère hépatique droite est parfois infiltrée, dans la lame rétroportale, par le processus inflammatoire ou néoplasique.

S’il est nécessaire de la réséquer pour assurer la radicalité du geste d’exérèse, il est aussi impératif de la reconstruire.

Deux techniques sont possibles : réimplantation directe dans le moignon de l’artère gastroduodénale ou réimplantation par l’intermédiaire d’un greffon veineux prélevé aux dépens de la saphène interne ou de la veine mésentérique inférieure lorsque son calibre est suffisant.

Les sites de réimplantation possibles sont le moignon de l’artère gastroduodénale, l’artère hépatique commune ou encore l’artère rénale droite largement exposée par la DPC.

– Une artère hépatique unique naît parfois de l’AMS et passe devant ou derrière l’isthme pancréatique.

Cette anomalie est exceptionnelle mais le risque serait alors de sectionner cette artère qui peut être prise pour l’artère gastroduodénale.

L’épreuve de clampage et l’exposition de toutes les artères à destinée hépatique permettent d’éviter ce piège.

L’envahissement de ce vaisseau par un processus tumoral impose une reconstruction utilisant les techniques décrites, en préférant, pour site d’implantation du greffon veineux autologue, l’artère splénique ou l’aorte coeliaque.

– La sténose du tronc coeliaque (TC) par un ligament arqué compromet la vascularisation hépatique lorsque l’artère gastroduodénale est sectionnée (seule voie de suppléance hépatique à partir du territoire mésentérique supérieur).

Avant de lier cette dernière, il est utile de la clamper temporairement pour vérifier la persistance ou la disparition des battements de l’artère hépatique.

La section d’un éventuel ligament arqué comporte successivement l’ouverture du petit épiploon, la dissection de l’artère hépatique commune jusqu’à l’aorte en suivant la face supérieure TC.

Cette dissection est menée à la pointe des ciseaux, en gardant le contact avec l’adventice du vaisseau pour s’insinuer dans le plan lâche situé sous la gaine fibrolymphatique épaisse qui l’entoure.

Au cours de cette « descente » vers l’aorte, il convient de repérer, pour les éviter, l’artère gastrique gauche puis les artères diaphragmatiques qui peuvent naître haut sur le TC.

Le ligament arqué, épais et fibreux étrangle le pied du TC.

Il est chargé sur toute son épaisseur à l’aide d’un dissecteur à pointe mousse puis sectionné au bistouri électrique.

L’effet de cette libération est en principe immédiat, marqué par la réapparition des battements de l’artère hépatique.

– L’envahissement de l’artère hépatique commune ou de l’artère hépatique propre par le processus néoplasique impose une résection artérielle si l’on souhaite poursuivre l’exérèse comme le suggère l’école japonaise.

Le rétablissement de la continuité artérielle fait appel aux mêmes principes décrits plus haut, utilisant un greffon veineux autologue implanté sur l’artère splénique ou l’artère rénale droite.

B - Difficultés d’origine veineuse :

Elles sont plus fréquentes que les précédentes, liées avant tout à l’infiltration tumorale de l’axe veineux mésentéricoporte rétroisthmique.

La difficulté de l’exérèse pancréatique dépend du siège de l’envahissement tumoral et de son étendue.

– Lorsque l’infiltration pariétale est antérieure, le clivage rétropancréatique n’est pas possible sans risque de perforation veineuse.

La section de l’isthme pancréatique est, dans ces conditions, effectuée prudemment, d’avant en arrière, au bistouri froid en assurant pas à pas l’hémostase des tranches jusqu’à parvenir à la paroi antérieure de l’axe mésentéricoporte.

Quatre fils repères noués, placés deux à deux aux bords supérieur et inférieur de l’isthme, facilitent sa section en permettant de le soulever.

Une fois l’isthme ouvert, une dissection prudente vers la gauche permet de repérer et de contrôler la veine splénique.

– Un envahissement limité de la paroi latérale droite de la veine porte pose peu de problèmes de reconstruction. Après section de l’isthme, la VMS, la VP et la terminaison de la veine splénique sont mises sur lacs vasculaires pour être facilement contrôlables.

Un clamp coudé type Satinsky exclut, par un clampage latéral, la zone d’adhérence tumorale.

Une pastille veineuse est emportée avec la tumeur et la paroi vasculaire refermée à l’aide d’un surjet de Prolène 5/0.

Lorsque l’importance de la zone réséquée n’est pas compatible avec une fermeture latérale non sténosante, la fermeture est effectuée dans un plan horizontal.

Cette suture impose l’exclusion vasculaire momentanée de la zone d’anastomose par clampage simultané de la veine porte et de ses affluents splénomésaraïques.

Une anastomose directe terminoterminale est possible lorsque l’exérèse a emporté un court segment de veine mésentérique.

La confection d’un growth factor est utile pour éviter les sténoses anastomotiques

Lorsque la perte de substance veineuse est trop étendue, la suture directe des deux extrémités est impossible, la conduite à tenir dépend du siège de la résection veineuse :

– si la perte de substance siège sous l’abouchement de la veine splénique, le moignon distal de la veine mésentérique supérieure peut être lié sans interrompre le flux porte.

Le moignon proximal est réimplanté dans la veine cave inférieure réalisant une dérivation mésentéricoporte segmentaire.

Il est cependant préférable de rétablir un flux mésentéricoportal hépatopète physiologique ;

– si la perte de substance intéresse la confluence splénique, le rétablissement de la continuité mésentéricoporte est nécessaire pour maintenir un flux veineux hépatopète.

Il est possible d’utiliser un greffon prothétique en polytétrafluoroéthylène (PTFE) annelé (Gore-Tex®) mais ce matériau est assez rigide et se prête mal à la réimplantation d’une veine splénique.

Un greffon autologue nous paraît plus adapté et peut être prélevé aux dépens d’une des deux veines jugulaires ou de la veine iliaque primitive droite.

La prise d’un greffon iliaque expose aux phlébites du membre inférieur.

La prise d’une veine jugulaire impose, si la reconstruction n’avait pas été prévue, de réinstaller le champ opératoire, ce qui peut amener à des fautes d’asepsie.

Ces reconstructions sont difficiles, et le clampage veineux prolongé qu’elles imposent est à l’origine d’une hypertension et d’une stase veineuse dans le territoire splanchnique, phénomène qui rend incoercibles les saignements dans les espaces de décollement.

Pour contourner cette difficulté, il est possible d’avoir recours au clampage de l’AMS ou, comme le suggère Nakao, mettre en place un shunt veinoveineux entre la VMS (canulée par une branche jéjunale) et le territoire cave inférieur (canulé par une veine saphène interne).

Pancréatectomie céphalique avec conservation du duodénum :

L’idée de cette conservation est née des effets indésirables de l’amputation digestive associée à la DPC.

La conservation du pylore constituait un premier pas vers la recherche de moyens capables de réduire les séquelles des exérèses.

Dans le traitement de lésions bénignes, l’amputation duodénale, même réduite, paraissait encore trop mutilante.

Ces interventions d’exérèse céphalique avec conservation duodénale sont décrites ultérieurement (Pancréatectomies avec conservation duodénale).

Pancréatectomie céphalique épargnant le petit pancréas :

Cette technique proposée par Guillemin s’applique à l’exérèse des formes pseudotumorales des pancréatites chroniques ou des lésions kystiques bénignes de la tête du pancréas.

Son intérêt est de diminuer le temps de dissection en évitant le décroisement rétromésentérique et la dissection du petit pancréas.

Les premiers temps de l’intervention sont les mêmes que ceux qui ont été décrits au paragraphe des DPC.

Ainsi se succèdent la manoeuvre de Kocher, le décollement coloépiploïque, l’abaissement de l’angle colique droit, la section de l’artère gastroduodénale et le contrôle de la section isthmique.

Inutile, dans ce type d’exérèse, de passer à l’étage sous-mésocolique pour sectionner le jéjunum. En effet, la section digestive distale passe à la jonction tiers inférieur-tiers moyen du deuxième duodénum.

Elle se prolonge par la section du parenchyme en visant le bord inférieur du pancréas, là où va démarrer la section isthmique.

Le petit pancréas reste en place, adhérant au troisième duodénum et passant derrière la VMS.

Le rétablissement de la continuité pancréatobiliaire se fait sur une anse montée en Y alors que la vidange gastrique est assurée par une anastomose gastrojéjunale sur la première à la manière de Polya.

Il est cependant possible d’adapter à ce type d’exérèse les multiples variantes de reconstruction décrites plus haut, et notamment la technique de dérivation pancréatogastrique.

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