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Réanimation-Urgences
Conduite à tenir devant un état septique aigu
Cours de réanimation - urgences
 

 

 

Introduction :

L’état septique correspond à la présence d’un agent infectieux invasif, bactérie, virus ou parasite, chez l’hôte humain.

Son évolution naturelle va de l’état septique jusqu’au choc septique et au décès.

Il peut survenir aussi bien en ville (infections communautaires) qu’à l’hôpital (infections nosocomiales).

Sa prévalence est estimée à 2 % des malades admis en hôpitaux universitaires aux États-Unis, avec une mortalité de 34 % à 28 jours.

En France, selon Brun-Buisson et al, 9 % des admissions en réanimation le sont pour des sepsis sévères, avec une mortalité observée de 56 %.

Les états septiques représentent donc une situation fréquente et grave dont l’incidence a augmenté du fait de la fréquence des tares associées et parfois des traitements immunosuppresseurs préalablement administrés chez les patients pris en charge en urgence.

À l’hôpital, les actes diagnostiques et thérapeutiques invasifs sont responsables de la grande majorité des états septiques graves nosocomiaux.

Il importe au médecin confronté aux situations d’urgence de savoir reconnaître précocement un état septique aigu grave afin de permettre la mise en oeuvre rapide d’une stratégie diagnostique, mais aussi thérapeutique.

Celle-ci associe le traitement immédiat des différentes défaillances viscérales au traitement étiologique qui comporte le plus souvent une antibiothérapie probabiliste adaptée.

Après un rappel physiopathologique, la démarche diagnostique et la conduite thérapeutique à tenir en urgence sont abordées.

Généralités :

A - PHYSIOPATHOLOGIE :

Tous les micro-organismes sont susceptibles d’induire un état septique sévère, qu’il s’agisse de bactéries à Gram positif (staphylocoques, streptocoques, Streptococcus pneumoniae...), de bactéries à Gram négatif (Escherichia coli, Pseudomonas aeruginosa, méningocoques...), de levures (Candida albicans...) ou de parasites (paludisme...).

La virulence de l’agent pathogène en cause est déterminante dans le développement et la rapidité d’évolution d’un état septique.

La résistance potentielle au traitement antiinfectieux n’est pas corrélée à la virulence des micro-organismes.

Face à la pénétration et à la multiplication d’un agent pathogène, l’organisme oppose ses systèmes de défense qui entraînent l’activation en cascade de la réponse inflammatoire.

Toute altération de cette cascade va aggraver l’état septique.

Des variations interindividuelles, probablement génétiquement déterminées, expliquent au moins en partie la survenue de réponses inflammatoires parfois inappropriées et pouvant participer à l’évolution vers le syndrome de défaillance multiviscérale en l’absence d’un traitement adapté et rapidement instauré.

1- Systèmes de défense de l’organisme :

Au micro-organisme infectant, l’organisme oppose deux barrières : celle liée à la réaction immunitaire à médiation humorale et celle en rapport avec la réaction de défense à médiation cellulaire.

* Barrière liée à la réaction immunitaire à médiation humorale :

Elle correspond principalement à l’activation du complément par sa voie classique et sa voie alterne.

Elle aboutit à la production d’anaphylatoxines (C3a, C4a et C5a) et d’enzymes protéolytiques.

Les anaphylatoxines sont activatrices des polynucléaires neutrophiles, basophiles et des plaquettes.

Les enzymes protéolytiques sont activatrices de la coagulation.

La barrière de défense humorale active aussi le système de la coagulation-fibrinolyse (production de l’activateur tissulaire du plasminogène et de l’inhibiteur de l’activateur tissulaire du plasminogène), ainsi que celui de la kininekallikréine.

La kinine est un puissant vasodilatateur et provoque une forte augmentation de la perméabilité capillaire.

Elle provoque aussi l’activation de la voie intrinsèque de la coagulation par les facteurs de la phase de contact et de la fibrinolyse, ce qui en fait le point de départ possible d’une coagulation intravasculaire disséminée.

L’inhibiteur de la C1 estérase est un inhibiteur endogène de la cascade d’activation du complément, mais il ne suffit pas à lui seul à freiner son activation.

* Barrière liée à la réaction immunitaire à médiation cellulaire :

La barrière de la réaction de défense à médiation cellulaire comprend les cellules phagocytaires (macrophages, monocytes, polynucléaires neutrophiles), mais aussi les cellules endothéliales.

Activés par les agents infectieux, ils libèrent de nombreux médiateurs comme des cytokines (interleukine [IL]1, IL6 et IL8), des lipides (platelet activating factor [PAF], leucotriènes), des radicaux libres et des enzymes protéolytiques.

Cette diffusion de facteurs de l’inflammation participe à la réponse inflammatoire systémique, mais aussi à la survenue de réactions inflammatoires locales comme celle aboutissant à l’acute lung injury.

Elle correspond à la migration pulmonaire des polynucléaires neutrophiles mais aussi à la survenue de troubles de la perméabilité capillaire et à l’activation locale de la coagulation par les cellules endothéliales.

2- Réponse inflammatoire :

La réponse inflammatoire est le primum movens du sepsis.

Elle est initiée dans sa globalité par l’activation des systèmes de défense, mais aussi par la libération de substances directement par le microorganisme lui-même, comme les endotoxines et le peptidoglycane des bacilles à Gram négatif ou les exotoxines des cocci à Gram positif.

Elle débouche notamment sur la libération de multiples médiateurs.

Les cytokines sont les principaux médiateurs intercellulaires. Leur effet est le résultat de la balance entre des cytokines activatrices (IL1, IL6, IL8, tumor necrosis factor [TNF]a) e t des cytokines inhibitrices de l’inflammation (IL2, IL4, IL10, prostaglandine E2). Parmi les cytokines proinflammatoires, l’IL1 et le TNFa sont les mieux connus.

L’IL1 augmente la perméabilité vasculaire, stimule la coagulation et induit la production de l’inhibiteur de l’activateur du plasminogène.

Beaucoup d’autres médiateurs sont libérés, tels des protéases, des radicaux libres, des médiateurs lipidiques.

Le PAF est un médiateur lipidique libéré principalement par les cellules macrophages.

Il augmente aussi la perméabilité vasculaire et présente donc un effet hypotenseur.

Les interactions entre les systèmes sont nombreuses et réalisent un effet d’autoamplification.

Ainsi, il existe une intrication forte entre la réponse inflammatoire et la coagulation.

Le TNFa et l’IL1 activent la coagulation en stimulant la synthèse du facteur tissulaire par les monocytes et les cellules endothéliales, aboutissant à la production du caillot de thrombine.

La thrombine inactive la fibrinolyse.

La protéine C activée est un inhibiteur naturel de la synthèse de thrombine et de l’inflammation.

La baisse constatée de son activité au cours du sepsis a fait proposer son administration substitutive.

Bernard et al ont ainsi démontré une réduction de la mortalité de 24,7 % dans un groupe de patients septiques recevant de la protéine C versus 30,8 % dans le groupe placebo au sein d’une étude prospective randomisée comportant 1 690 patients. Cette perspective doit être confirmée par des travaux ultérieurs.

À cette première phase de la réponse inflammatoire succède une deuxième phase qui réalise un véritable état d’immunodépression.

Dénommée compensatory anti-inflammatory response syndrome par Bone, elle participerait à la mortalité retardée au cours du choc septique.

Ainsi, l’ensemble de ces activations aboutit, dans certaines situations, à la survenue des différentes défaillances viscérales, notamment hémodynamiques, mais aussi à l’augmentation de la perméabilité capillaire et à l’activation de la coagulation rencontrées au cours du sepsis.

3- État septique aigu :

L’état septique aigu grave résulte d’une altération des défenses de l’organisme.

La virulence de l’agent pathogène responsable de l’infection dépasse alors les capacités de lutte anti-infectieuse de l’hôte.

Cette situation est d’autant plus fréquente que les capacités anti-infectieuses de l’hôte sont altérées par tout déficit du système immunitaire , qu'il s’agisse d’une immunodéficience congénitale, du syndrome d’immunodéficience acquise (sida), d’une splénectomie, d’une neutropénie, d’un diabète ou d’un cancer notamment.

Il résulte aussi de la survenue possible d’une réponse inflammatoire inadaptée traduisant un déséquilibre entre la synthèse des cytokines pro-inflammatoires et leurs inhibiteurs naturels.

Les tentatives de modulation de la réponse inflammatoire par l’administration d’anticorps monoclonaux ayant pour cibles directes ou indirectes les cytokines pro-inflammatoires n’ont cependant pas pu montrer leur efficacité.

De même, une stratégie thérapeutique immunostimulatrice visant à restaurer la réponse monocytaire à la phase secondaire du choc septique n’a pas non plus démontré de bénéfice en termes de mortalité.

4- Variabilité interindividuelle de la réponse au sepsis :

La part d’une variabilité interindividuelle humaine d’origine génétique dans la réponse au sepsis est de plus en plus suggérée.

Qualifiée de « dissonance immunitaire » par Bone, son exploration constitue une voie nouvelle pour la compréhension et la recherche thérapeutique du choc septique.

Ainsi, la cytokine TNFa est considérée à ce jour comme un pivot immunitaire dans la physiopathologie de la réponse inflammatoire systémique.

Parmi les nombreux allèles codant pour le TNFa, Mira et al notent une association entre le portage de l'allèle TNF2 e t une augmentation de mortalité au cours du choc septique.

Ainsi, au sein du groupe des patients décédés, 52 % étaient porteurs de l’allèle TNF2, alors que seulement 14 % des patients survivants possédaient ce même allèle.

De même, Stüber retrouve lui aussi l’association d’une mortalité élevée à la présence de l’homozygotie TNF B2.

Ce polymorphisme génétique est aussi observé pour le toll-like receptor 4 monocytaire reconnaissant le LPS et les bactéries à Gram négatif. Un phénotype de non-réponse au LPS semble être spécifiquement associé à la survenue d’un choc à bactéries à Gram négatif.

B - CONSÉQUENCES VISCÉRALES :

1- Conséquences cardiocirculatoires :

L’altération myocardique touche à la fois le ventricule gauche et le ventricule droit.

Elle est systolodiastolique et résulte de l’effet direct des endotoxines bactériennes libérées, mais aussi de l’effet cardiodépresseur de nombreux médiateurs circulants de l’inflammation : PAF, TNFa, IL2, IL6, ainsi que de la synthèse de monoxyde d’azote (NO) par les cellules endothéliales et les myocytes.

De plus, l’agression sur l’endothélium vasculaire réalisé par les médiateurs de l’inflammation, ainsi que l’activation des systèmes du complément et de la kallicréinekinine, provoquent une augmentation de la perméabilité vasculaire entraînant une véritable fuite plasmatique liquidienne et protidique vers le secteur interstitiel.

Celle-ci aboutit à une hypovolémie relative majorée par la vasodilatation artérielle périphérique, résultat de l’action des cytokines et du NO. Ainsi, le tableau hémodynamique observé au cours du sepsis sévère est complexe et évolutif.

L’intrication, même précoce, des différents tableaux hémodynamiques est fréquente.

Le choc septique, à sa phase initiale, est caractérisé par une vasoplégie associée à une hypovolémie sans dysfonction cardiaque initiale.

Classiquement, celle-ci apparaît plus tardivement.

Elle peut ne se révéler qu’après la restauration d’une volémie efficace, comme en témoigne alors l’absence d’élévation suffisante du débit cardiaque. Elle signe le plus souvent une évolution défavorable.

2- Conséquences pulmonaires :

L’altération du surfactant produit par les pneumocytes de type I, ainsi que la migration et la concentration au niveau pulmonaire de polynucléaires neutrophiles, réalisent une véritable agression alvéolaire dénommée acute lung injury ou lésion pulmonaire aiguë, aboutissant à la défaillance respiratoire aiguë.

3- Conséquences rénales :

La dysfonction rénale correspond principalement à une insuffisance rénale aiguë fonctionnelle liée à un bas débit de perfusion des artères rénales.

Elle s’amende généralement avec la restauration d’une volémie et d’une pression artérielle efficace.

D’un point de vue anatomique, des lésions de néphropathies tubulaires aiguës (nécroses tubulaires aiguës) peuvent être observées et aboutissent le plus souvent à une récupération complète en 3 semaines, par réépithélialisation tubulaire.

La survenue d’une nécrose corticale présente un pronostic fonctionnel plus sombre.

4- Conséquences hépatiques :

Le foie est un organe central de la défense anti-infectieuse.

La survenue d’une infection induit une hyperactivité métabolique de l’hépatocyte aboutissant à une augmentation de la production de glucose circulant.

Il participe à la réaction immunitaire et inflammatoire par la sécrétion de médiateurs immunorégulateurs et par la libération de protéines hépatiques de l’inflammation.

La dysfonction hépatique au cours du sepsis est généralement la conséquence d’une hypoperfusion vasculaire hépatique et réalise une véritable insuffisance hépatique aiguë transitoire qui se corrige avec la correction de l’état de choc.

Lorsqu’elle survient dans le cadre d’un syndrome de dysfonction multiviscérale, son évolution est alors beaucoup plus péjorative, pouvant mettre en jeu le pronostic vital du patient.

5- Conséquences splanchniques :

L’hypoperfusion splanchnique au cours du sepsis, comme l’hypoperfusion cutanée, correspond à un mécanisme précoce de régulation du volume sanguin circulant au décours d’une hypovolémie.

La mise en jeu d’une vasoconstriction régionale permet la redistribution de la volémie et donc le maintien, au moins transitoire, de la perfusion des organes vitaux.

Le « sacrifice » de cette circulation régionale peut aboutir à des altérations ischémiques de la muqueuse intestinale et notamment villositaire qui favorisent la survenue de translocations bactériennes à point de départ digestif.

Ce phénomène de translocation bactérienne participerait à la survenue du syndrome de défaillance multiviscérale qui représente la phase terminale de l’évolution du choc septique.

C - CLASSIFICATION DES ÉTATS INFECTIEUX :

1- Histoire naturelle :

L’histoire naturelle d’une infection chez l’homme comprend trois phases, la phase d’inoculation, la phase d’incubation puis la phase d’état qui réalise la présentation clinique.

Elle associe les stigmates des effets directs de l’agent infectieux et les effets de la réponse systémique de l’hôte.

2- Nomenclature :

La nomenclature actuelle est le résultat d’un consensus au sein de l’American College of Chest Physicians et de la Society of Critical Care Medecine en 1991 qui fait suite aux premières définitions suggérées par Bone et al en 1989.

– Bactériémie, virémie, fongémie, parasitémie.

Hémoculture(s) positive(s) pour une bactérie, un virus, une levure ou un autre parasite.

Le terme imprécis de septicémie n’est plus retenu.

Il doit être abandonné pour celui de bactériémie.

– Syndrome de réponse inflammatoire systémique ou systemic inflammatory response syndrome (SIRS).

Le SIRS est la réponse inflammatoire non spécifique de l’hôte humain à la libération de médiateurs de l’inflammation.

Le patient doit présenter deux ou plus des signes suivants :

– température corporelle supérieure à 38 °C ou inférieure à 36 °C ;

– fréquence ventilatoire supérieure à 20 par minute ou pression artérielle en gaz carbonique (PaCO2) inférieure à 32 mmHg en air ambiant ;

– globules blancs supérieurs à 12 000 106/L ou inférieure à 4 000 106 /L, ou plus de 10 % de cellules immatures ;

– fréquence cardiaque supérieure à 90 battements/min.

– Sepsis.

Le sepsis est un SIRS d’origine infectieuse.

– Syndrome septique.

Ce terme initialement proposé par Bone en 1989 ayant introduit une certaine confusion dans la nomenclature a été abandonné pour celui de sepsis sévère.

– Sepsis sévère.

Il correspond à un sepsis associé à une dysfonction d’organe, une hypoperfusion d’organe ou une hypotension artérielle.

L’hypotension est définie par une pression artérielle systolique (PAS) inférieure à 90 mmHg ou par une baisse de la PAS supérieure à 40 mmHg par rapport aux chiffres habituels en l’absence d’autre cause d’hypotension (médicaments hypotenseurs, choc cardiogénique, maladie sous-jacente).

Le remplissage permet de corriger cette hypotension. L’hypoperfusion d’organe se traduit par une atteinte neurologique (troubles de la conscience), rénale (oligurie : diurèse inférieure à 0,5 mL/kg/h), circulatoire (acidose lactique).

– Choc septique.

Il est défini par la survenue d’un sepsis compliqué d’un collapsus persistant malgré un remplissage vasculaire adapté, nécessitant le recours aux amines vasopressives.

La dépendance du patient aux amines définit la persistance du choc.

– Syndrome de dysfonction multiviscérale ou « multiple organ failure ».

Il s’agit d’un état de dysfonction d’organe(s) ayant une évolution autonome de l’évolution du processus infectieux

Il est de pronostic péjoratif, notamment en l’absence, à ce jour, de possibilité de suppléance hépatique.

3- Indices de gravité :

L’utilisation d’indices de gravité présente un intérêt épidémiologique pour permettre de décrire les populations de patients admis en réanimation.

Ils permettent de définir des groupes homogènes de patients en termes de gravité à l’admission et ont un intérêt pour prédire une mortalité hospitalière.

Ils aboutissent à la possibilité de comparer l’activité de différents services de réanimation pour des groupes de patients relativement homogènes et de les inclure dans des essais cliniques.

Les scores de dysfonctions d’organe permettent en outre de suivre l’évolution de la dysfonction d’un organe en particulier.

Ils ne présentent que peu d’intérêt en urgence puisque leur calcul a été validé après 24 heures d’hospitalisation.

Ils représentent néanmoins un dénominateur commun pour décrire les patients admis en réanimation et doivent être donc connus du médecin confronté à l’urgence.

En effets, les valeurs biologiques et physiologiques les plus péjoratives présentées par le patient sont utilisées pour leur calcul à partir de l’admission à l’hôpital, et donc dès le passage éventuel par le service des urgences.

La présence de défaillances d’organes à l’admission, mesurée par ces indices, participe à la décision d’admission en réanimation.

Plusieurs indices de gravité peuvent être utilisés chez les patients présentant une infection sévère.

* Scores de gravité généraux :

+ Index de gravité simplifié (IGS) ou « simplified acute physiology score » (SAPS)

Il est calculé après 24 heures d’hospitalisation.

Le score obtenu permet de calculer par régression logistique un risque de décès.

Publiée par Le Gall en 1983, la version IGS I a été remplacée en 1993 par l’IGS II.

+ « Acute physiology and chronic health evaluation » (APACHE) Proche de l’IGS, ce score est principalement utilisé aux Étas-Unis.

Il est réalisé lui aussi après 24 heures d’hospitalisation et peut être recalculé chaque jour.

Le score obtenu permet de même de calculer par régression logistique un risque de décès.

La version APACHE I a été établie en 1981 par Knaus.

Elle a été remplacée en 1985 par la version APACHE II.

Il existe une version APACHE III depuis 1991 dont la complexité a limité l’utilisation.

* Scores de dysfonctions ou défaillances viscérales :

+ « Sequential organ failure assesment » (SOFA)

Initialement dénommé sepsis related organ failure assessment score, il a été proposé par la European Intensive Care Society afin d’évaluer les dysfonctions d’organes, mais, n’étant pas spécifique du sepsis, il a été rapidement intitulé SOFA.

Diagnostic :

Poser le diagnostic de l’état septique aigu impose de définir une orientation étiologique et d’évaluer sa gravité dans le but d’instaurer rapidement la thérapeutique la mieux adaptée.

A - DIAGNOSTIC CLINIQUE :

Un interrogatoire minutieux du patient et de sa famille permet de recueillir les antécédents médicaux (notamment la notion d’une immunodéficience, d’un diabète et d'antibiothérapies préalables) et chirurgicaux, les traitements en cours, la notion d’une exposition professionnelle particulière et la notion de voyages récents, notamment en zone tropicale.

L’examen clinique se fait dans un endroit calme, éclairé, patient déshabillé.

Il est complet, puis orienté selon d’éventuels signes d’appel, et recherche d’abord des signes de gravité.

1- Signes généraux de gravité :

Une fièvre élevée ou une hypothermie, des frissons, une sensation de malaise, une attitude de prostration, une confusion, doivent faire évoquer le diagnostic d’état septique grave et faire rechercher des arguments associés en faveur d’une dysfonction d’organe.

2- Signes de défaillance d’organe :

La présence de signes de défaillance d’organe impose la mise en oeuvre rapide d’un traitement adapté et spécifique.

Dans ce contexte, il est nécessaire de rechercher :

– une défaillance neurologique pouvant associer des troubles de la conscience et de la vigilance allant de l’obnubilation au coma, à un syndrome méningé ou à des signes de focalisation ;

– une défaillance respiratoire comprenant dyspnée, polypnée et/ou tachypnée (fréquence respiratoire supérieure à 20 par minute), cyanose des lèvres et des téguments, balancement thoracoabdominal, tirage sus-claviculaire, intercostal, épuisement musculaire respiratoire amenant à des pauses respiratoires et se traduisant par une difficulté ou une impossibilité à parler ;

– une défaillance cardiovasculaire, souvent au premier plan ; la tachycardie (fréquence cardiaque supérieure à 120 battements/min) est très fréquente ; plus rarement, une bradycardie (fréquence cardiaque inférieure à 50 battements/min) est retrouvée et est de mauvais pronostic ; l’hypotension artérielle est définie par une tension artérielle systémique inférieure à 90 mmHg ; l’oligoanurie est le reflet d’une mauvaise perfusion rénale.

Les marbrures traduisent l’hypoperfusion des territoires cutanés ;

– un ictère peut être l’expression d’une défaillance hépatique, mais son origine au cours du sepsis est souvent multifactorielle ;

– les signes cliniques d’une défaillance hématologique centrée sur les troubles de la coagulation (purpura, saignements diffus aux points de ponction et éventuellement épistaxis) ne surviennent que pour des anomalies biologiques majeures.

3- Diagnostic étiologique :

L’examen se poursuit ensuite par la recherche d’arguments étiologiques orientant vers un organe particulier et/ou vers une porte d’entrée du sepsis.

À ce stade, le caractère nosocomial ou communautaire de l'infection est déterminant à connaître pour formuler une hypothèse microbiologique.

En cas d’hospitalisation préalable, la recherche d’une porte d’entrée iatrogène (cathéter veineux périphérique ou central, sonde vésicale, poumon...) doit être particulièrement attentive.

B - EXAMENS COMPLÉMENTAIRES :

Les examens complémentaires viennent confirmer les hypothèses de l’examen clinique, sur les plans tant du diagnostic de gravité que du diagnostic étiologique.

1- Diagnostic de gravité :

– Défaillance respiratoire.

La gazométrie artérielle peut retrouver une hypoxie (pression artérielle en oxygène [PaO2] < 80 mmHg ; PaO2/concentration d’O2 dans l’air inspiré < 200), une normo-, voire une hypercapnie (PaCO2 > 42 mmHg).

En effet, la normocapnie en situation d’hypoxie traduit déjà un début d’épuisement respiratoire et représente donc un signe de gravité.

La radiographie thoracique recherche des opacités alvéolaires dans les différents quadrants pulmonaires.

L’élimination d’un pneumothorax doit être systématique dans ce contexte de défaillance respiratoire aiguë.

– Défaillance cardiocirculatoire.

Une lactatacidémie supérieure à 2 mmol/L traduit une dette tissulaire en oxygène (O2).

– Défaillance hématologique.

Une anémie aiguë, une leucopénie, des signes de coagulation intravasculaire disséminée associant une thrombopénie, la présence de D-dimères et de complexes solubles sont le reflet de la défaillance hématologique.

– Défaillance hépatique.

Elle est reflétée par une cytolyse hépatique, une hyperbilirubinémie conjuguée, une élévation des phosphatases alcalines et des gammaglutamyl transférases, puis à une phase tardive, de mauvais pronostic, une baisse du taux de prothrombine, du facteur V et des hypoglycémies.

– Défaillance rénale.

Elle associe une augmentation de l’urée et de la créatinine à une baisse du débit de filtration glomérulaire (clairance de la créatinine inférieure à 50 mL/min).

2- Diagnostic étiologique :

Il est impérativement orienté par les données de l’examen clinique puis par les données des examens biologiques et radiologiques prescrits en fonction des points d’appel soulevés par la clinique.

Il aboutit à un diagnostic microbiologique de présomption.

La démarche diagnostique chez un patient immunodéprimé, quelle qu’en soit la cause (sida, greffe d’organe, immunodéficience congénitale...), nécessite en plus l’étude des populations lymphocytaires (kTCD4, kTCD8) et la connaissance des différents statuts virologiques, bactériens et parasitaires du patient (cytomégalovirus, virus Epstein-Barr, syphilis, tuberculose, toxoplasmose), tant pour un raisonnement étiologique que pour évaluer le risque de l’évolution à court terme de ces infections sous-jacentes.

Traitement :

La mise en oeuvre du traitement d’un état infectieux sévère doit être précoce.

Débuté aux urgences, voire dans certains cas en préhospitalier, il comprend deux volets :

– le traitement symptomatique de toute dysfonction ou défaillance d’organe ;

– le traitement étiologique : anti-infectieux associé ou non à la réalisation du drainage chirurgical ou percutané de toute collection purulente.

La présence de signes cliniques d’une ou de plusieurs défaillances d’organe doit motiver l’appel au médecin réanimateur.

Dans l’attente de son arrivée, les premières mesures de réanimation doivent être entreprises.

A - TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE :

1- Traitement d’une défaillance circulatoire :

L’état de choc septique est l’évolution naturelle du sepsis sévère en l’absence de traitement étiologique précoce.

L’objectif thérapeutique en termes hémodynamiques est de contrôler la défaillance circulatoire afin de préserver au mieux une perfusion viscérale, notamment splanchnique et rénale, satisfaisante.

Une pression artérielle moyenne (PAM) entre 70 et 80 mmHg permet de maintenir un état circulatoire compatible avec un transport artériel en O2 suffisant pour prévenir la survenue d’une dette tissulaire en O2.

Néanmoins, les modalités du remplissage vasculaire nécessaires pour atteindre cet objectif restent largement controversées.

Une stratégie thérapeutique a été proposée lors du consensus de la Société française d’anesthésie-réanimation (SFAR) et de la SRLF.

* Remplissage vasculaire :

Il est effectué à l’aide d’une ou deux voies veineuses périphériques de gros calibre (14 ou 16 Gauges). L’expansion volémique est la première étape, incontournable, de la réanimation circulatoire.

Elle vise à compenser l’hypovolémie vraie induite par la fuite interstitielle et l’hypovolémie relative induite par la vasodilatation.

L’objectif du remplissage vasculaire est de rétablir une précharge satisfaisante permettant un remplissage cardiaque adéquat et donc un débit sanguin adapté aux besoins tissulaires.

Dans ce contexte, chez un patient présentant une dysfonction cardiaque préexistante, la défaillance ventriculaire gauche peut n’être révélée qu’après l’expansion volémique.

À l’inverse, le remplissage ne doit pas être excessif, un « sur-remplissage » risquant d’augmenter l’oedème interstitiel tissulaire, notamment pulmonaire, et de limiter le transport en O2 par aggravation de l’hypoxémie.

Quand la réponse au remplissage ne permet pas le retour à une PAM satisfaisante, il faut savoir recourir rapidement aux catécholamines vasopressives et inotropes.

– Cristalloïdes.

Théoriquement, l’usage des cristalloïdes dans le choc septique n’est pas recommandé en raison des troubles de perméabilité vasculaire, mais leur très bonne tolérance, associée à l’absence de risque anaphylactique, peut représenter un atout.

Les solutés colloïdaux tels les gélatines ou les hydroxyéthylamidons (HEA) présentent l’avantage théorique d’une expansion volémique plus importante et plus prolongée.

Cependant, aucun consensus ne se dégage entre l’usage des solutés de cristalloïdes ou de colloïdes.

En effet, il n’existe pas d’avantages démontrés à l’usage des colloïdes par rapport aux cristalloïdes, ni d’avantages entre tel ou tel soluté colloïdal.

La place des solutés cristalloïdes hypertoniques n’est pas encore définie.

– Colloïdes.

– Dextrans.

Les dextrans sont des polymères glucidiques obtenus par la fermentation bactérienne du saccharose.

Bien qu’intéressants sur le plan volémique car assurant une expansion supérieure au volume perfusé de manière comparable aux HEA, l’incidence des réactions allergiques (0,27 %), les troubles de l’hémostase et le risque d’insuffisance rénale qu’ils induisent imposent un volume quotidien maximal de 15 à 20 mL/kg.

Le risque élevé de réactions allergiques contre-indique leur usage chez la femme enceinte.

Les troubles de l’hémostase correspondent à une diminution du facteur VIIIa, ainsi qu’à une dysfonction plaquettaire.

L’insuffisance rénale est liée à une néphrose osmotique.

– Gélatines.

Les gélatines à pont d’urée (Haemaccelt) sont peu utilisées.

Les gélatines fluides modifiées proviennent de l’hydrolyse du collagène de boeuf.

L’incidence du risque anaphylactoïde est de 0,35 % et est six fois supérieur à celui de l’albumine ou des HEA.

Les troubles de la coagulation observés biologiquement sont essentiellement rapportés à l’hémodilution.

Il n’existe pas d’action spécifique sur les facteurs de la coagulation.

Une gêne dans la détermination du groupe Rhésus peut survenir.

Enfin, le risque de transmission du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob est un risque purement théorique et probablement infime du fait des procédures de stérilisation utilisées lors de leur fabrication.

– HEA.

Les HEA sont des polymères glucidiques végétaux à base d’amylopectine de maïs. Leur risque anaphylactique est faible, six fois moindre qu’avec les gélatines.

L’incidence en est de 0,06 %. Ils sont cependant contre-indiqués chez la femme enceinte.

Les troubles de l’hémostase correspondent à une diminution du facteur VIIIa, ainsi qu’à une dysfonction plaquettaire.

L’Elohèst 6 % est la molécule qui présente le plus d’effets secondaires en raison de son accumulation tissulaire, notamment dans le système réticuloendothélial.

Ces molécules sont contre-indiquées en cas de t roubles de l’hémostase constitutionnels ou acquis, d’hémophilie ou de maladie de Willebrand, et chez les patients insuffisants rénaux chroniques en cours d’hémodialyse et d’insuffisance hépatique sévère pour l’Elohèst.

L’accumulation des HEA peut provoquer au niveau rénal des lésions de néphrose osmotique.

Les solutés concentrés à 10 % présentent un effet d’expansion volémique immédiat plus important que les solutés à 6 %, mais exposent à un risque majoré d’accumulation.

Ces effets indésirables ont amené une récente notification concernant la durée de prescription. La dose maximale d’Elohèst est de 33 mL/kg le premier jour, puis 20 mL/kg à j2 et j3, sans excéder 80 mL/kg de dose totale.

L’Hestérilt peut être administré à 33 mL/kg/j pendant 8 jours.

Au-delà de 80 mL/kg, une surveillance attentive de l’hémostase doit être instituée.

Une gêne dans l’interprétation du groupe sanguin ABO peut survenir en présence des HEA.

– Albumine humaine.

L’albumine humaine ne constitue plus un soluté de remplissage de première intention, hormis chez la femme enceinte du fait de son coût et de son origine humaine.

– Produits sanguins labiles.

La transfusion de produits sanguins n’est pas réalisée lors de cette phase initiale.

Ils ne correspondent pas stricto sensu à des solutés d’expansion volémique.

Leur prescription se fait selon le terrain cardiovasculaire, la présence de signes cliniques d’anémie et les résultats biologiques.

– Solutés glucosés. Les solutés glucosés ne constituent en aucun cas des solutés de remplissage vasculaire du fait de leur volume de diffusion qui correspond à l’eau totale.

* Amines sympathicomimétiques :

Le recours aux amines inotropes ou vasopressives ne se conçoit qu’après l’échec du remplissage vasculaire à rétablir une PAM satisfaisante.

En effet, le risque est celui d’un effet de vasoconstriction absolue altérant la perfusion tissulaire, notamment rénale.

En pré-hospitalier ou au service d’accueil des urgences, le praticien, ne disposant pas de monitorage hémodynamique invasif, doit se limiter à la prescription d’agents pharmacologiques possédant un effet-dose certain.

Dans ce cadre, l’utilisation de l’éphédrine en cas d’hypotension brutale puis de l’adrénaline sont des choix satisfaisants.

+ Éphédrine :

C’est un sympathicomimétique non catécholaminergique d’origine végétale.

Elle agit surtout par un effet indirect en libérant les stocks endogènes de noradrénaline.

Elle présente essentiellement un eff e t vasopresseur a1, associé à un effet b1 tachycardisant. La durée d’action est relativement longue, cinq à six fois supérieure à celle de l’adrénaline (soit 10 à 20 minutes).

Elle permet un traitement en urgence des troubles hypotensifs dans l’attente du relais par une perfusion continue d’une autre amine vasopressive.

L’emploi en perfusion continue n’est pas recommandé car son effet disparaît lorsque la réserve endogène de noradrénaline est épuisée.

+ Adrénaline ou épinéphrine :

Hormone naturelle de référence, elle permet d’obtenir une stimulation directe des récepteurs a et b du système sympathique.

Elle est surtout inotrope positive de 0,05 μg/kg/min à 0,5 μg/kg/min.

Au delà de 0,5 μg/kg/min, les effets vasculaires a1 adrénergiques vasoconstricteurs deviennent prédominants.

L’altération de la perfusion splanchnique a pu être compensée par l’adjonction de faibles doses de dobutamine.

Les effets bathmotropes et chronotropes de l’adrénaline semblent limités chez les patients septiques.

Dans un contexte d’urgence, l’éphédrine et l’adrénaline sont les deux vasopresseurs à recommander en première intention après un remplissage vasculaire adapté.

Après la mise en place d’un monitorage invasif de la pression artérielle et la possibilité d’une perfusion veineuse centrale, l’utilisation d’autres cathécholamines peut être discutée.

+ Noradrénaline :

Elle agit sur les récepteurs a1, entraînant une vasoconstriction intense dose-dépendante montrant une efficacité bien plus fréquente que la dopamine pour restaurer la pression artérielle.

Si cette vasoconstriction concerne tous les systèmes artériels, y compris la vascularisation rénale, hépatique et splanchnique, aucun effet délétère sur leur perfusion n’a été mis en évidence dans le choc septique sous réserve d’une correction satisfaisante et précoce de toute hypovolémie.

Elle est ainsi l’amine vasopressive de choix dans le traitement du choc septique pour restaurer une PAM satisfaisante.

Elle possède enfin une action b1 cardiaque, mais son effet est rapidement masqué par l’effet a dominant.

+ Dobutamine :

Par son effet inotrope b1 adrénergique, elle participe à la correction de la dysfonction cardiaque du choc septique.

Son activité b2 vasodilatatrice présente un effet bénéfique sur la perfusion tissulaire en augmentant le transport artériel en O2.

Cependant, elle ne doit pas être utilisée en première intention chez un patient hypovolémique car elle risque d’aggraver l’hypotension artérielle systémique.

+ Dopamine :

Elle agit en provoquant une libération présynaptique de noradrénaline.

Ses effets sont complexes et doses-dépendants sur les récepteurs adrénergiques a1, a2, b1, b2.

Elle agit surtout par son effet cardiaque inotrope b1 adrénergique à partir de 5 μg/kg/min.

De 10 à 20 μg/kg/min, l’effet vasopresseur artériel a1 adrénergique est prédominant.

Néanmoins, même à ces doses élevées, l’effet de la dopamine sur la pression artérielle est plus le fait d’une augmentation du débit cardiaque que d’un effet vasopresseur.

Un effet propre sur les récepteurs dopaminergiques DA1 et DA2, vasodilatateur rénal et splanchnique à faible doses (< 5 μg/kg/min), est actuellement largement rediscuté.

Longtemps considérée comme la catécholamine de référence dans le choc septique, sa place est de plus en plus révisée en raison de son efficacité moindre que celle de la noradrénaline.

De plus, elle induit un effet tachycardisant et vasoconstricteur splanchnique associé à une élévation des pressions droites avec augmentation du shunt intrapulmonaire.

Elle reste cependant fréquemment utilisée dans cette indication, mais doit impérativement être relayée par une catécholamine plus puissante au-delà de 20 μg/kg/min.

Au total, la noradrénaline ou l’association dobutamine-noradrénaline semble supérieure à la dopamine, mais son utilisation ne peut pas se concevoir dans un service d’urgence sans monitorage hémodynamique invasif.

2- Traitement d’une défaillance respiratoire :

Le but est de restaurer une oxygénation sanguine permettant d’obtenir une saturation de l’hémoglobine en O2 dans le sang artériel supérieure à 90 % afin de permettre une oxygénation tissulaire satisfaisante.

* Ventilation spontanée :

Le patient est installé dans la position assurant cliniquement la meilleure ventilation, le plus souvent en position demi assise.

La liberté des voies aériennes est réalisée en retirant tout corps étranger ainsi que les prothèses dentaires.

Elle est éventuellement complétée par une aspiration oropharyngée non traumatique. L’oxygénothérapie est débutée au masque facial à haute concentration et à fort débit ( > 8 L/min).

Les autres matériels d’administration ne sont pas à utiliser car mal tolérés et/ou inadaptés à l’urgence (sondes nasales, masques simples, lunettes).

* Ventilation mécanique :

Il faut recourir à une ventilation mécanique après intubation trachéale en cas de :

– détresse respiratoire aiguë ;

– troubles de la conscience ;

– convulsions hypoxiques ;

– inefficacité cardiocirculatoire aiguë ou bradycardie hypoxique.

L’indication de la ventilation mécanique est essentiellement clinique. Néanmoins, la gazométrie artérielle peut aider à en porter l’indication.

Elle permet de diminuer la consommation en O2 et donc favorise une restauration de l’adéquation entre les besoins tissulaires et les possibilités d’apport en O2.

L’intubation trachéale dans ces circonstances est une intubation à risque, en raison des conditions d’hypoxie et du fait que le patient doit être considéré comme ayant l’estomac plein.

Elle ne doit donc être réalisée qu’en milieu spécialisé, au mieux en présence du médecin anesthésiste-réanimateur.

L’induction anesthésique doit suivre le cadre des recommandations récentes de la SFAR.

L’intubation se fait par voie orotrachéale, préférée pour sa rapidité et son moindre risque traumatique.

En effet, dans ce contexte, l’intubation en séquence rapide, associant une préoxygénation d’au moins 3 minutes suivie de l’injection d’un hypnotique d’action rapide avec un curare d’action ultracourte, associée à la manoeuvre de Sellick, est supérieure à l’intubation nasotrachéale à l’aveugle.

Elle est réalisée sous laryngoscopie avec une sonde de calibre suffisant (diamètre interne : 7,5 mm chez l’homme ; 7 mm chez la femme).

L’hypnotique de préférence est l’étomidate. Il se caractérise par une relative stabilité cardiovasculaire, même en cas d’hémodynamique instable.

Administré seul, il procure de mauvaises conditions d’intubation, ce qui rend indispensable son association à un myorelaxant.

Le suxaméthonium est actuellement le seul curare adapté à l’intubation en séquence rapide.

L’anaphylaxie est un effet secondaire fréquent, avec une incidence d’environ 1/1 600.

De même, l’élévation de la kaliémie qu’il induit (0,5 mmol/L pendant 10 à 15 minutes) expose, en situation d’hyperkaliémie préalable, au risque de troubles du rythme graves et/ou d’arrêt cardiaque.

En cas de contre-indication à l’emploi du suxaméthonium, l’intubation « vigile » sous anesthésie locale doit être privilégiée.

La poursuite de la sédation est assurée après l’intubation et le contrôle de l’état hémodynamique afin de permettre l’adaptation au respirateur. Elle associe un médicament dépresseur respiratoire type morphinique à un hypnotique type benzodiazépine.

L’association midazolamfentanyl constitue la thérapeutique le plus souvent utilisée .

Des associations alternatives sont possibles (sufentanil, morphine).

Le risque d’accumulation est important lors d’une sédation prolongée

* Ventilation assistée non invasive :

La place de la ventilation non invasive n’est pas encore complètement définie.

Le mode le plus fréquemment employé est la ventilation spontanée avec aide inspiratoire et pression expiratoire positive.

Elle pourrait cependant avantageusement se substituer à l’intubation endotrachéale en cas de défaillance respiratoire aiguë isolée.

* Prise en charge de l’acidose :

L’alcalinisation des acidoses respiratoires n’est pas logique au plan physiopathologique.

Elle est inutile, voire dangereuse quand le patient n’est pas en ventilation mécanique, car l’apport massif de bicarbonates sanguins risque de provoquer une hypercapnie alvéolaire asphyxique et une acidose intracellulaire paradoxale.

3- Traitement d’une défaillance neurologique :

Des convulsions généralisées font recourir à l’injection intraveineuse de benzodiazépines anticonvulsivantes en première intention, de type Rivotrilt.

Des troubles de la vigilance avec un score de Glascow inférieur à 8 imposent une intubation trachéale en urgence dans les conditions sus-citées.

La présence de signes cliniques évocateurs d’une hypertension intracrânienne ou de signes de focalisation doit faire demander un avis neurochirurgical en urgence.

La tomodensitométrie cérébrale est l’examen de choix pour préciser l’indication neurochirurgicale éventuelle.

Dans l’attente d’une prise en charge neurochirurgicale, le patient est mis en position proclive à 30°, la trachée est intubée si l’état de vigilance le nécessite.

Le mannitol à 20 % peut être utilisé (0,25 à 1 g/kg en 15 minutes, soit 1,25 à 5 mL/kg).

4- Traitement d’une défaillance rénale :

La défaillance rénale au cours du sepsis sévère est à la phase initiale généralement fonctionnelle par hypoperfusion rénale.

Son traitement en première intention repose donc sur l’expansion volémique permettant de restaurer une bonne perfusion rénale (PAM à 70-80 mmHg) et justifie un remplissage vasculaire adéquat puis l’utilisation éventuelle de vasopresseurs.

Les diurétiques n’ont pas d’indication lors de cette prise en charge initiale, mais sont utilisés secondairement après restauration de la volémie pour permettre d’obtenir une insuffisance rénale aiguë à diurèse conservée.

L’alcalinisation des acidoses métaboliques doit répondre aux recommandations de la conférence de consensus sur ce sujet.

Les indications d’une épuration extrarénale en urgence chez le patient anurique sont les suivantes :

– hyperkaliémie avec signes électriques ;

– hypercalcémie avec signes électriques ;

– surcharge volémique avec oedème pulmonaire ou cérébral ;

– acidose métabolique incontrôlable.

B - TRAITEMENT ÉTIOLOGIQUE DES ÉTATS SEPTIQUES AIGUS :

Celui-ci représente l’essentiel du traitement et justifie la réanimation symptomatique qui permet la survie du patient, le temps que son efficacité puisse survenir.

Il nécessite une enquête diagnostique précise et va reposer, à la phase initiale de la prise en charge, sur une ou des hypothèses microbiologiques.

Il comprend le plus souvent un traitement anti-infectieux, associé ou non à la réalisation d’un geste chirurgical curatif et urgent, justifiant une concertation médicochirurgicale de qualité.

Dans ce contexte, l’antibiothérapie doit être débutée rapidement, avant la chirurgie éventuelle.

Cette antibiothérapie dite « probabiliste » correspond à une prescription réalisée avant que ne soient connues la nature et/ou la sensibilité des micro-organismes responsables de l’infection.

Elle doit alors correspondre au traitement admis pour être régulièrement efficace dans la situation en cause.

Il ne s’agit pas d’une antibiothérapie « à l’aveugle », mais au contraire d’une prescription raisonnée prenant en considération tous les éléments disponibles pour effectuer le meilleur choix possible.

L’hypothèse microbiologique est facilitée par les données épidémiologiques pour les infections survenant « en ville » puis traitées à l’hôpital.

À l’opposé, la grande diversité des pathogènes potentiellement responsables des infections nosocomiales et leur grande variabilité de sensibilité aux antibiotiques imposent une documentation la plus exhaustive possible de l’agent causal avant tout traitement d’une infection survenant à l’hôpital.

Par ailleurs, discuter de l’antibiothérapie probabiliste impose d’identifier les situations où tout retard à l’antibiothérapie peut engager le pronostic vital du patient en raison, soit d’une localisation particulière, soit d’un déficit immunitaire, soit de signes cliniques et/ou biologiques de gravité.

1- Antibiothérapie probabiliste :

Une antibiothérapie probabiliste adaptée influence-t-elle le pronostic vital ?

* Infections intra-abdominales :

Le traitement des péritonites est avant tout chirurgical.

Néanmoins, un certain nombre de travaux publiés dans la littérature médicale viennent conforter l’importance de l’antibiothérapie en association avec la réanimation symptomatique pour le pronostic de ces infections.

Ainsi, dans une étude rétrospective portant sur 229 péritonites communautaires, une antibiothérapie d’emblée adaptée permet une diminution de la fréquence des complications, y compris du nombre de réinterventions (18,9 % versus 51 % dans le groupe « inadaptée »), ainsi qu’une réduction marquée de la durée de séjour (9,6 jours versus 18,5 jours) associée à une tendance à une moindre mortalité (5,6 % versus 12,2 %).

L’impact positif de l’antibiothérapie probabiliste a été également démontré dans le traitement des péritonites postopératoires.

Ainsi, Carlet et al rapportent dans une étude déjà ancienne, portant sur 50 patients, l’importance réciproque de l’antibiothérapie et de la chirurgie pour la prise en charge de cette pathologie.

Dans cette série, la survie était de 94 % lorsque le traitement chirurgical et l’antibiothérapie étaient adaptés, de 38,5 % lorsque le traitement chirurgical était correct et l’antibiothérapie inadaptée, de 10 % lorsque le traitement chirurgical était incorrect et l’antibiothérapie adaptée et de 0 % en cas d’inadéquation associée de la chirurgie et de l’antibiothérapie.

Plus récemment, Montravers et al démontrent , sur 100 péritonites postopératoires, que les patients ayant une antibiothérapie initiale inefficace présentent une mortalité et une morbidité, appréciée par la durée de séjour et le nombre de réinterventions, plus élevées.

L’analyse multivariée retrouve quatre paramètres indépendants prédictifs de la mortalité.

Il s’agissait du choc (odds ratio [OR] = 3,6), d’un score Apache II supérieur ou égal à 21 (OR = 2,3), de l’âge supérieur ou égal à 62 ans (OR = 1,9) et d’une antibiothérapie probabiliste inadéquate (OR = 1,6).

Le rôle primordial d’une antibiothérapie initiale adaptée paraît donc bien documenté pour les infections intra-abdominales.

* Infections purement médicales :

Le bon sens et l’expérience médicale plaident pour un rôle essentiel du caractère adapté de l’antibiothérapie initiale dans le pronostic d’infections bactériennes graves au cours desquelles le traitement chirurgical a peu ou pas de place.

+ Pneumopathies :

Alvarez-Lerma et al démontrent, dans une étude multicentrique portant sur 530 patients hospitalisés dans 30 services de réanimation médicale ou chirurgicale et présentant une pneumopathie nosocomiale, que la mortalité attribuable à la pneumopathie était de 16,2 % si l’antibiothérapie initiale était adaptée.

+ Septicémies :

En 1997, Leibovici et al retrouvent, dans une étude portant sur un collectif important de 2 124 patients souffrant d’une septicémie à bacilles à Gram négatif, une mortalité de 18 % versus 34 % (p = 0,0001) selon le caractère adapté ou non de l’antibiothérapie probabiliste. L’impact sur le pronostic vital de l’antibiothérapie initiale impose donc de connaître les circonstances justifiant d’une antibiothérapie probabiliste en urgence.

Ces situations peuvent être classées en fonction de la localisation de l’infection, du terrain sur lequel elle survient et des conséquences en termes de défaillance viscérale qu’elle provoque.

En fonction de la localisation.

– Infections neuroméningées :

– méningites purulentes communautaires et opératoires ;

– abcès du cerveau (pyogènes aéroanaérobies, Toxoplasma gondii chez le patient porteur du virus de l’immunodéficience humaine [VIH]) ;

– méningite tuberculeuse ;

– méningoencéphalite aiguë virale ;

– paludisme pernicieux.

– Cellulites extensives, gangrène gazeuse.

– Endocardites aiguës septicémiques.

– Pneumopathies hypoxémiantes :

– communautaires : S. pneumoniae, Mycobacterium tuberculosis ;

– Pneumocystis carinii chez le patient porteur du VIH ;

– nosocomiales : bacilles à Gram négatif, SAMR.

En fonction du terrain.

– Infection chez l’asplénique.

– Neutropéniques fébriles (moins de 1 000 globules blancs/mm3).

– Aspergillose ou candidose invasives chez le neutropénique.

– Patient infecté et porteur d’une prothèse vasculaire.

– Polytraumatisé présentant des fractures ouvertes (justifiant la présence dans la pharmacopée des services médicaux d’urgence régionaux [SMUR) d’une bêtalactamine à activité antianaérobie et antistaphylococcique de type amoxicillineacide clavulanique).

En fonction des conséquences potentielles engageant le pronostic vital.

– Choc septique d’origine chirurgicale :

– angiocholite ;

– péritonite ;

– pyélonéphrite sur obstacle.

– Septicémies et purpura fulminans (justifiant la présence dans la pharmacopée des SMUR d’une céphalosporine de troisième génération).

– Défaillance(s) viscérale(s) dans un contexte de choc septique.

2- Règles de prescription d’une antibiothérapie probabiliste :

La prescription réfléchie d’une antibiothérapie probabiliste nécessite de répondre à plusieurs questions.

* Quel est le degré d’urgence à la mise en route d’une antibiothérapie ?

Celui-ci doit être apprécié en fonction de la certitude plus ou moins grande qu’il s’agit d’une pathologie infectieuse, de la présence ou non de signes cliniques et biologiques de sepsis sévère, voire de choc septique, du site suspecté de l’infection et de facteurs de risques propres au patient.

Il nécessite de connaître les situations rappelées précédemment.

Trois points méritent d’être soulignés.

– Toute fièvre rapportée à une infection bactérienne ne justifie pas en urgence et obligatoirement une antibiothérapie probabiliste.

– Toute fièvre ne traduit pas forcément une infection bactérienne.

Il est possible de discuter selon le contexte : – une origine infectieuse mais non bactérienne ; les infections virales ou parasitaires sont fréquemment en cause chez les malades immunodéprimés (VIH, transplantés, patients de chirurgie viscérale lourde en réanimation...) ;

– les complications non infectieuses liées à la maladie sous-jacente de type maladie de « système » ou néoplasie, ainsi que celles liées à leur traitement, qui ne sont pas toujours facilement discernables de la présence d’un véritable syndrome infectieux ;

– les réactions médicamenteuses allergiques, notamment aux antibiotiques, qui miment parfois parfaitement un état infectieux grave ; l’amélioration des symptômes dans les 2 à 3 jours après l’arrêt du traitement (mais parfois plus...) et les signes d’accompagnement comme une éruption cutanée, une hyperéosinophilie, une élévation des transaminases, une leucopénie ou une thrombopénie et une protéinurie, bien qu’inconstamment présents, sont des arguments en faveur de cette étiologie.

– Il est toujours possible en milieu hospitalier de réaliser très rapidement un minimum d’examens microbiologiques à visée diagnostique, quel que soit le degré d’urgence de la pathologie motivant l’antibiothérapie :

– hémocultures (au moins une, lors de la pose de la perfusion) ;

– ponction percutanée d’une cellulite ou d’une médiastinite ;

– examen cytobactériologique des urines et bandelette urinaire (leucocyturie et nitrites) ;

– prélèvement bronchique distal protégé ;

– mise en culture d’un cathéter.

Certains de ces prélèvements permettent la réalisation d’un examen direct en bactériologie et peuvent donc guider le choix de l’antibiothérapie initiale.

Ils sont de plus très utiles pour affirmer le diagnostic et réévaluer secondairement l’antibiothérapie choisie.

* Comment choisir l’antibiothérapie probabiliste ?

Ce choix nécessite d’effectuer plusieurs hypothèses raisonnées.

+ Pari microbiologique en fonction du caractère nosocomial ou communautaire de l’infection suspectée :

L’épidémiologie des infections communautaire est assez précise et permet de formuler une hypothèse fiable sur le germe responsable de l’infection suspectée en fonction du site cliniquement retrouvé et du terrain.

Ainsi, le méningocoque doit être suspecté et pris en compte devant une méningite purulente.

De même, le pneumocoque doit être traité devant une pneumonie franche lobaire aiguë. De nombreux exemples pourraient être cités.

À l’opposé, les micro-organismes responsables des infections nosocomiales peuvent être très divers.

Il en va de même de leur sensibilité au traitement qu’il est souvent impossible à prévoir.

Dans ce contexte, la réalisation de prélèvements bactériologiques à visée diagnostique est essentielle.

La connaissance de l’épidémiologie des bactéries responsables d’infection dans l’unité où l’on travaille, mais aussi de la flore colonisante des patients, permet de guider le choix de l’antibiothérapie initiale.

En effet, une colonisation avec une bactérie hospitalière, parfois multirésistante, est souvent un préalable à l’infection nosocomiale.

De même, la notion d’une épidémie à une bactérie multirésistante dans une unité doit être prise en compte dans le choix thérapeutique.

+ Pari microbiologique en fonction du terrain :

Les antécédents, la notion d’alcoolisme, de myélome, de sérologie VIH positive, de voyage récent hors de métropole ou d’hémoglobinopathie doivent être pris en compte.

Il en est de même pour les facteurs de risque comme le diabète, la toxicomanie ou une splénectomie ancienne.

Ces différents antécédents peuvent orienter vers des étiologies bactériennes particulières ou vers des hypothèses diagnostiques.

Une hospitalisation récente dans les 3 derniers mois et/ou une antibiothérapie récente doivent être connues du fait de la modification potentielle de la flore saprophyte du patient et de l’augmentation du risque de résistance qu’elles entraînent.

+ Pari microbiologique en fonction de la porte d’entrée suspectée :

La présence d’un matériel étranger et sa nature sont essentielles à connaître.

Ainsi, la grande majorité des infections sur cathéters centraux sont à rapporter aux staphylocoques dorés ou à coagulase négative, sensibles ou résistants à l’oxacilline.

De même, la notion d’une manipulation instrumentale récente des voies urinaires ou biliaires ou d’une intubation trachéale oriente vers une hypothèse diagnostique et microbiologique.

3- Place des examens microbiologiques :

Le résultat de l’examen direct du ou des prélèvements du site supposé infecté permet souvent d’orienter l’antibiothérapie initiale en permettant de prendre en compte une grande catégorie de germes.

C’est particulièrement le cas pour l’examen direct du liquide céphalorachidien pratiqué devant une suspicion de méningite purulente.

Néanmoins, sa sensibilité et sa spécificité sont très variables en fonction du type de prélèvement.

Ainsi, pour les pneumopathies nosocomiales, seul l’examen direct du lavage bronchoalvéolaire et du prélèvement bronchique distal protégé ont une valeur prédictive positive suffisante pour guider le traitement.

L’examen direct de la brosse télescopique protégée semble peu pertinent ; en revanche, une aspiration bronchique négative à l’examen direct est un bon argument pour écarter en première intention le diagnostic de pneumopathie.

Le respect des procédures de prélèvement en fonction des sites et l’acheminement rapide au laboratoire sont impératifs.

Dans les cas difficiles, la qualité du dialogue entre le clinicien et le microbiologiste permet d’optimiser l’interprétation du résultat.

De plus, l’interprétation du résultat de la culture des prélèvements bactériologiques doit prendre en compte la présence d’une antibiothérapie en cours débutée dans les 48 dernières heures ou de façon plus ancienne.

Enfin, en cas d’infection nosocomiale, les prélèvements cutanés, digestifs ou urinaires de dépistage de la colonisation, effectués par exemple de façon hebdomadaire, permettent de connaître l’écologie bactérienne du patient et/ou de l’unité de réanimation.

Une fois la décision de traitement prise en fonction de la gravité éventuelle et du type d’infection suspectée, il est nécessaire d’effectuer une synthèse des différents éléments constitués par le pari microbiologique en fonction du site infecté, du terrain et du caractère nosocomial ou communautaire, par la connaissance de l’écologie bactérienne de l’unité où l’on travaille et par les données fournies par l’examen direct des prélèvements bactériologiques.

Cette synthèse va aboutir à un diagnostic microbiologique clinique et à une prescription raisonnée de l’antibiothérapie probabiliste.

4- Modalité de prescription de l’antibiothérapie probabiliste :

Les règles habituelles qui régissent la prescription des antibiotiques s’appliquent aussi à la prescription probabiliste.

Il s’agit de la recherche d’une bactéricidie, d’une synergie en cas de bithérapie, du respect des règles de pharmacocinétique propres à chaque antibiotique, de la prévention d’une éventuelle toxicité et du choix de posologies permettant l’obtention de concentrations tissulaires efficaces au site infecté, notamment dans ceux difficiles à atteindre comme la méninge, l’os ou l’endocarde.

* Indications d’une association :

Cette question reste très controversée.

L’épidémiologie permet de donner des éléments de réponse.

+ Au cours des infections communautaires :

L’absence de résistance importante des bactéries en cause ne justifie pas d’augmenter l’efficacité mais plutôt d’élargir le spectre initial du traitement, surtout lors d’infections potentiellement multimicrobiennes afin de ne pas risquer une impasse microbiologique.

Le rôle pathogène des bactéries anaérobies est majeur dans certaines infections comme les péritonites ou les cellulites gangreneuses.

Le traitement initial doit les prendre en compte, soit par la prescription d’une bêtalactamine associée à un inhibiteur des bêtalactamases, soit par l’association d’une molécule peu active sur les anaérobies (céphalosporine de troisième génération) avec le métronidazole.

Lorsqu’il est nécessaire de prendre en compte les entérobactéries et notamment E. coli, la grande fréquence des souches fortement sécrétrices de bêtalactamases, et donc intermédiaires ou résistantes aux uréidopénicillines, aux carboxipénicillines et à l'association amoxicilline-acide clavulanique, impose la prescription d’un aminoside en association avec ces antibiotiques.

+ Au cours d’une infection nosocomiale :

Les arguments pour une association reposent sur l’élargissement du spectre de l’antibiothérapie, la recherche d’une synergie et la prévention de la sélection de mutants résistants au traitement.

– Élargissement du spectre.

Des infections nosocomiales polymicrobiennes sont fréquemment rapportées.

C’est le cas de la grande majorité des péritonites postopératoires.

De même, Fagon et al rapportent jusqu’à 40 % de pneumopathies nosocomiales multimicrobiennes.

Enfin, le caractère souvent multirésistant de ces bactéries (P. aeruginosa et Staphylococcus aureus par exemple) impose souvent l’utilisation initiale d’une association d’antibiotiques.

– Synergie.

La synergie entre les bêtalactamines et les aminosides est documentée in vitro et in vivo dans de nombreux modèles d’infection expérimentale. – Prévention de la sélection de mutants résistants.

Le risque de sélection de mutants résistants varie en fonction des bactéries en cause et des antibiotiques.

Il est important avec P. aeruginosa et dans une moindre mesure avec Enterobacter et Serratia.

Il est d’autant plus élevé que l’inoculum bactérien est important et que le foyer infectieux est collecté, voire enkysté.

Il impose le drainage le plus complet possible de toute collection et l’optimisation des modalités d’utilisation des antibiotiques, notamment en termes de posologie initiale et de connaissance de la pharmacodynamique des agents antiinfectieux.

Ainsi, par exemple, les aminosides ont une bactéricidie concentration-dépendante, alors que les bêtalactamines présentent une efficacité dépendant du temps pendant lequel leur concentration dans le foyer infectieux est supérieure à la concentration minimale inhibitrice du germe.

La prescription d’une association ne prévient pas toujours la sélection de ces mutants.

En fait, bien qu’il s’agisse d’une prescription reposant sur des arguments théoriques in vitro et expérimentaux, nombreux et cohérents, aucune étude clinique n’a pu démontrer la supériorité d’une association d’antibiotiques versus une monothérapie dans la mesure où le spectre antibactérien est identique dans les deux schémas thérapeutiques.

* Quelle posologie initiale ?

Il est essentiel d’obtenir dès les premières administrations des concentrations d’antibiotiques efficaces.

En effet, Moore et al ont montré, chez 89 patients de réanimation présentant une bactériémie à bacilles à Gram négatif, la relation entre l’évolution clinique et l’obtention ou non de taux thérapeutiques lors de la première administration d’aminosides.

Ainsi, la mortalité chez les patients dont les concentrations d’antibiotique au pic étaient infrathérapeutiques s’élevait à 20,9 % contre 2,4 % lorsque la concentration se situait dans la zone thérapeutique.

De plus, la sensibilité des bactéries est déterminée au laboratoire avec un inoculum calibré aux environs de 105 à 106 unités formant colonie (UFC) par millilitre, alors que in vivo, l’inoculum bactérien responsable de l’infection peut être beaucoup plus élevé.

Une pneumopathie, par exemple, peut comporter au moment du diagnostic de 108 à 1010 UFC/g de poumon.

Pour faire face à un tel inoculum bactérien pouvant notamment être responsable d’une forte production d’enzymes inhibant les bêtalactamines, il est souhaitable de débuter le traitement à fortes posologies, quitte à l’adapter ultérieurement en fonction de l’atteinte rénale éventuelle.

* Réévaluation de l’antibiothérapie initiale probabiliste :

Les objectifs sont de limiter l’utilisation des antibiotiques aux seules situations qui la justifient et de faire un choix raisonné de l’antibiothérapie de façon à obtenir un impact sur l’écologie hospitalière et sur la flore barrière des patients la plus faible possible.

Ainsi, la nécessaire discussion du bien-fondé d’une association et le retour, lorsqu’il est possible, à une molécule plus ancienne et/ou de spectre plus étroit s’intègrent dans les recommandations pour le bon usage des antibiotiques à l’hôpital.

Il est sûrement plus délétère de laisser de façon prolongée une antibiothérapie empirique que de débuter de façon raisonnée et documentée une antibiothérapie probabiliste, même à spectre large, et de la simplifier secondairement après l’avoir réévaluée.

Cette réévaluation doit intervenir entre le deuxième et le troisième jour, date à laquelle on dispose le plus souvent de l’identification bactérienne des germes responsables et de leur profil de sensibilité, à condition que les prélèvements adéquats aient été initialement effectués.

Il faut parfois savoir décider d’un arrêt de l’antibiothérapie probabiliste quand l’ensemble des données microbiologiques sont négatives et orienter alors la recherche diagnostique vers une étiologie non infectieuse.

Une deuxième réévaluation doit être effectuée vers le dixième jour pour apprécier l’efficacité du traitement entrepris et pour juger de la nécessité éventuelle de le poursuivre.

Dans cette alternative, une réévaluation régulière est justifiée.

De plus, le coût du traitement, même s’il ne représente pas un critère prépondérant, doit être intégré dans la discussion, de façon à orienter le choix vers un moindre coût à efficacité équivalente.

Elles sont en partie extraites du travail de Brown et al.

Conclusion :

La qualité de l’ensemble de la démarche aboutissant à un traitement symptomatique bien conduit des différentes défaillances viscérales, notamment hémodynamiques et respiratoires, conditionne le pronostic vital et permet la mise en route du traitement étiologique reposant souvent sur la chirurgie et toujours sur une antibiothérapie probabiliste adaptée.

La démarche raisonnée aboutissant à la prescription de cette antibiothérapie probabiliste participe au contrôle des états septiques graves en termes de guérison immédiate de l’infection, mais aussi en termes de risque infectieux nosocomial ultérieur à des germes multirésistants.

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