L’embolie pulmonaire correspond à l’obstruction d’une
ou plusieurs artères pulmonaires par un embole.
Dans
l’immense majorité des cas, il s’agit d’un thrombus fibrinocruorique
en provenance de la circulation veineuse ou
du coeur droit :
c’est l’embolie pulmonaire cruorique qui
constitue le modèle de description ; rarement, l’embole
sera de nature tumorale, septique ou graisseuse.
Il s’agit d’une pathologie fréquente, qui serait responsable
de 10 000 décès annuels en France : un diagnostic
de certitude est donc indispensable.
Étiologie et physiopathologie :
A - Formation du thrombus fibrinocruorique :
Complication d’une thrombose veineuse profonde, l’embolie
pulmonaire en partage les nombreux facteurs favorisants regroupés dans la triade de Virchow :
– stase veineuse (immobilisation, anesthésie) ;
– lésions vasculaires (traumatisme, chirurgie) ;
– hypercoagulabilité acquise (cancer) ou constitutionnelle.
Ce dernier facteur prend une importance croissante avec
la mise en évidence récente d’anomalies génétiques fréquentes.
Un épisode thromboembolique apparaît le plus souvent
comme la résultante de plusieurs circonstances favorisantes,
intriquant facteurs acquis et constitutionnels.
Toutefois, les facteurs de risque chirurgicaux sont les
mieux évalués et demeurent au premier plan.
B - Migration du thrombus
dans les artères pulmonaires
:
L’oblitération du lit artériel pulmonaire se produit à des
niveaux variables et le plus souvent de manière bilatérale.
La lyse spontanée du caillot en 1 à 3 semaines est habituelle
; rarement, le caillot adhère aux parois vasculaires
et s’organise, réalisant alors une thrombose chronique,
conduisant au coeur pulmonaire postembolique si de
nombreux territoires vasculaires ont été atteints.
Le retentissement hémodynamique est patent à partir de
50 % d’obstruction du lit vasculaire chez un patient
indemne d’antécédent cardiorespiratoire.
À ce stade,
toute majoration de l’obstruction par un nouvel embole
peut entraîner une dégradation brutale : l’obstruction est
responsable d’une hypertension artérielle pulmonaire
aiguë avec augmentation de la post-charge du ventricule
droit, puis d’une chute du débit cardiaque.
En revanche, chez un patient porteur d’une pathologie
cardiorespiratoire, un embole de faible importance peut
aisément décompenser un état hémodynamique déjà
précaire.
Le retentissement respiratoire est complexe, se traduisant
fréquemment par une hypoxie sans rétention de gaz
carbonique.
On observe à la fois un effet espace mort
(zones ventilées non perfusées) et une augmentation du
shunt physiologique (zones perfusées non ventilées).
Ce
dernier est notamment expliqué par la persistance d’un
débit sanguin dans les zones embolisées et par l’ouverture
d’anastomoses latentes entre les artères et les veines
pulmonaires, sous l’effet de l’hypertension artérielle
pulmonaire.
Diagnostic
:
A - Étape de la suspicion clinique
:
Les signes cliniques évocateurs d’embolie sont multiples,
inconstants et non spécifiques.
Leur
découverte implique une revue soigneuse des circonstances
favorisantes.
Les signes cliniques de
phlébite sont inconstants : leur absence n’élimine en
rien le diagnostic d’embolie.
Enfin, la notion d’antécédent
thromboembolique est un argument de poids.
Toute suspicion d’embolie pulmonaire impose la
recherche systématique d’éventuels signes de gravité qui vont motiver la prise en charge immédiate
en soins intensifs ; il ne faut pas attendre un état de
choc cardiogénique pour parler d’embolie grave.
L’étape clinique est indissociable de la réalisation
immédiate d’examens complémentaires simples.
Ceux ci
peuvent conforter la suspicion, mais également éliminer
un bon nombre de diagnostics différentiels :
– la gazométrie artérielle objective le plus souvent une hypoxie-hypocapnie ; si dans plus de 25 % des cas la Pa02
est supérieure à 80 mmHg, l’absence d’hypoxémie est en
revanche exceptionnelle dans les embolies massives ;
– l’électrocardiogramme est souvent normal, car une
obstruction importante du débit artériel est nécessaire
pour constater des signes de coeur pulmonaire aigu ;
deux anomalies sont assez spécifiques : l’aspect S1 Q3
T3 et l’onde T négative en V1-V2 ;
– la radiographie thoracique est réalisée en position allongée,
de face. D’interprétation difficile, elle objective
néanmoins des petits signes évocateurs dans plus de 80 %
des cas.
Toutefois, une radiographie thoracique
normale n’exclut pas le diagnostic et est même très
évocatrice dans un contexte de dyspnée sévère.
À ce stade, 4 modes de présentation clinique sont observés
en pratique d’urgence.
• La douleur pleurale brutale associée ou non à une
hémoptysie représente près de 60 % des cas et correspond
à une obstruction vasculaire légère à modérée.
L’examen
clinique et la radiographie de thorax sont le plus souvent
évocateurs, alors que l’électrocardiogramme est normal et
la gazométrie peu ou pas perturbée.
Chez un patient âgé
de moins de 40 ans consultant pour douleur thoracique
d’allure pleurale, l’embolie pulmonaire est très peu probable
en l’absence d’au moins un des éléments
suivants : circonstance favorisante, signes cliniques de
phlébite, ou radiographie thoracique anormale.
• La dyspnée est isolée dans 25 % des cas.
Ce tableau
peut correspondre à une obstruction vasculaire importante.
Si la radiographie est peu parlante et l’électrocardiogramme
non spécifique, la gazométrie est le plus
souvent perturbée.
• Le tableau clinique d’embolie pulmonaire grave survenant
chez un patient indemne d’antécédent cardiorespiratoire
est plus rare (5 % des cas).
L’obstruction
vasculaire est alors majeure, l’examen objective des
signes de mauvaise tolérance et si la radiographie thoracique
est souvent normale, l’électrocardiogramme tout
comme la gazométrie artérielle sont perturbés.
• Un état de collapsus cardiocirculatoire peut s’observer
lors d’obstructions vasculaires minimes chez un
insuffisant cardiaque ou respiratoire ; l’interprétation
des examens complémentaires simples doit alors tenir
compte de ce terrain préexistant ; c’est parfois le cliché
thoracique qui fournit des éléments évocateurs.
À l’issue de ce rapide bilan, la suspicion diagnostique
appelle des examens complémentaires urgents.
Longtemps
dominée par l’angiographie pulmonaire qui
demeure l’examen de référence, la stratégie diagnostique
s’est diversifiée grâce au développement de techniques
moins invasives.
Le résultat d’un examen donné
est interprété selon 3 cas de figure :
– l’examen est normal et les études de suivi ont démontré
que l’on pouvait s’abstenir d’anticoagulation chez
ces patients. L’embolie pulmonaire est exclue ;
– l’examen est pathologique alors qu’il a démontré dans
des travaux prospectifs une spécificité comparable à
celle de l’angiographie pulmonaire ; le diagnostic est
affirmé ;
– dans tous les autres cas, l’examen est non concluant et
les explorations doivent être poursuivies.
B - Deux examens diagnostiques
bien évalués : l’angiographie pulmonaire
et la scintigraphie de ventilation-perfusion :
1- Angiographie pulmonaire :
La technique privilégie la voie d’abord antébrachiale ;
l’injection de produit de contraste est effectuée de
manière sélective tour à tour dans chaque artère pulmonaire,
plus rarement dans l’oreillette droite en face d’un
tableau d’embolie grave ; la technique numérisée prédomine
actuellement mais nécessite plus de coopération de
la part du patient ; la réalisation d’incidences multiples
(face, oblique et profil) est systématique.
En respectant les précautions habituelles des examens
iodés, les complications sont rares (0,3 %) et ne sont pas
plus fréquentes chez les sujets âgés.
L’angiographie pulmonaire reste l’examen de référence
qui permet la visualisation directe du thrombus sous
forme d’une lacune endoluminale ou d’un arrêt « cupuliforme
» dans une artère de plus de 2 mm de diamètre.
La quantification de l’obstruction fait appel à l’indice de
Miller.
Réalisée dans de bonnes conditions techniques,
une angiographie normale permet d’éliminer le diagnostic
d’embolie pulmonaire.
2- Scintigraphie pulmonaire
de ventilation-perfusion :
L’examen est effectué en 2 temps ; tout d’abord la scintigraphie
de ventilation, par nébulisation de microcolloïdes
marqués au technétium 99m et, dans un second
temps, la scintigraphie de perfusion, avec l’injection par
voie veineuse périphérique de macroagrégats d’albumine
marqués par du technétium 99m .
Six incidences sont
effectuées (face antérieure, face postérieure, 2 profils et
2 obliques).
Cet examen non invasif n’a aucune contre-indication
ni effet secondaire.
La seule limite technique tient
dans une coopération suffisante du patient lors de la
scintigraphie de ventilation.
Chez la femme enceinte,
on réalise habituellement une scintigraphie de perfusion
en premier : normale, elle constitue le seul temps de
l’examen ; pathologique, elle demande à être complétée
par un cliché thoracique et (ou) une scintigraphie de
ventilation.
L’interprétation du résultat, délicate, demande une
confrontation avec la radiographie thoracique.
• Une forte probabilité scintigraphique correspond à
au moins 2 larges (plus de 75 % du segment) défects
segmentaires de perfusion, ou au moins 4 défects
segmentaires de perfusion modérés, sans défect de ventilation
ou anomalie du cliché thoracique dans les territoires
correspondants.
Ainsi, une scintigraphie de forte probabilité permet
de poser le diagnostic d’embolie pulmonaire.
De plus,
la constatation de défects perfusionnels intéressant au
moins 50 % du champ pulmonaire est un facteur de
gravité.
• Une scintigraphie de perfusion normale (6 incidences)
élimine le diagnostic.
• Dans les autres cas (probabilité faible ou intermédiaire)
l’examen est non concluant et la démarche
diagnostique ne peut s’arrêter à ce stade ; classiquement,
on complète par une angiographie pulmonaire.
C - Examens diagnostiques en cours
d’évaluation :
1- Dosage plasmatique du taux de D-dimères :
Produits spécifiques de la dégradation de la fibrine, les
D-dimères plasmatiques ont été évalués dans le contexte
d’une suspicion d’embolie récente (moins de 7 jours)
évoquée à l’examen d’admission aux urgences.
Dans
cette situation, le dosage par méthode ELISA s’est avéré
très sensible (au-dessus de 95 %), mais non spécifique.
Mesuré par cette méthode, un taux de D-dimères
plasmatiques inférieur au seuil diagnostique (en règle
500 ng/mL) permet d’exclure raisonnablement le diagnostic
; environ 20 % des patients vus en urgence pour
suspicion d’embolie pulmonaire sont dans ce cas.
Toutefois, cette rentabilité diagnostique s’abaisse fortement
avec l’âge : moins de 10 % des patients suspects
d’embolie pulmonaire et âgés de plus de 70 ans ont un
taux inférieur au seuil.
À l’inverse, la constatation d’un taux supérieur au seuil,
voire très élevé, n’a pas d’intérêt pratique : il faut continuer
les explorations.
L’utilisation en pratique courante de la méthode ELISA
est limitée car le résultat ne peut être obtenu en urgence.
Des techniques rapides, délivrant un résultat en moins
d’une demi-heure sont maintenant disponibles et paraissent
aussi fiables que la méthode ELISA.
2- Exploration veineuse des membres inférieurs :
L’exploration des membres inférieurs est justifiée par le
concept de maladie veineuse thromboembolique : en
effet, la mise en évidence d’une thrombose veineuse
profonde entraîne la même conduite thérapeutique.
C’est l’écho-doppler veineux des membres inférieurs
qui trouve sa justification ici en tant que méthode non
invasive fiable supplantant la phlébographie. Environ
70 % des cas d’embolie pulmonaire confirmée s’accompagnent
d’une thrombose veineuse profonde, le plus
souvent asymptomatique.
À l’inverse, un écho-doppler
veineux normal n’élimine en aucun cas le diagnostic
d’embolie pulmonaire.
Dans l’état actuel des connaissances,
la mise en évidence par l’écho-doppler d’une
thrombose des veines musculaires ne constitue pas un
argument diagnostique suffisant face à une suspicion
d’embolie pulmonaire.
Enfin, devant tout signe clinique
évoquant une embolie grave, des examens à
visée pulmonaire sont indispensables pour quantifier
l’obstruction vasculaire.
3- Échographie cardiaque :
Elle prend toute sa place devant un tableau clinique
d’embolie grave et peut être rapidement réalisée au lit
du malade.
Chez les patients indemnes d’antécédent cardiorespiratoire,
l’échographie permet d’éliminer bon
nombre de diagnostics différentiels (péricardite avec
tamponnade en particulier) et d’objectiver des signes de
coeur pulmonaire aigu avec dilatation des cavités droites
et déviation paradoxale du septum.
Toutefois, il paraît
difficile, sur la seule constatation de ces signes indirects,
d’envisager une prise en charge thérapeutique immédiate.
En revanche, l’échographie transoesophagienne, moins
aisée à mettre en oeuvre, offre le grand intérêt de visualiser
directement le thrombus dans les cavités droites ou
les troncs des artères pulmonaires.
4- Scanner thoracique spiralé :
Ces dernières années ont vu l’essor de la tomodensitométrie
à rotation continue avec balayage spiralé volumique
qui permet d’éviter les discontinuités anatomiques
liées à l’acquisition coupe par coupe du scanner
conventionnel.
Des techniques de reconstruction multiplanaires
et tridimensionnelles sont en cours d’évaluation
dans certains centres et permettraient d’augmenter
la rentabilité diagnostique de l’examen.
Actuellement, cette technique s’avère performante dans
la détection des thrombus jusqu’aux artères segmentaires
: elle peut donc affirmer le diagnostic d’embolie
proximale. Les faux positifs, constitués par les images
des adénopathies accolées aux vaisseaux pulmonaires
sont maintenant bien identifiés.
À l’inverse, un scanner
thoracique spiralé normal n’élimine pas le diagnostic
d’embolie pulmonaire.
Les études récentes semblent indiquer la supériorité du
scanner thoracique spiralé sur la scintigraphie pulmonaire.
Cet examen pourrait, à terme, remplacer la scintigraphie.
5- Résonance magnétique nucléaire :
Peu évaluée, cette technique offre deux avantages potentiels
: l’absence d’injection de produits de contraste
iodés et surtout la possibilité d’explorer en un seul
temps les vaisseaux artériels pulmonaires et les réseaux
veineux des membres inférieurs et du pelvis.
D - Stratégie diagnostique
:
La stratégie diagnostique n’est pas univoque, comme
en témoigne la diversité des schémas diagnostiques
proposés dans la littérature.
Faisant appel à des examens
complémentaires validés, ces schémas devraient être
testés lors d’études pragmatiques avant d’être recommandés.
Le choix de l’examen de première intention,
en règle non invasif, est crucial et dépend de 2 facteurs :
– le premier a trait aux caractéristiques du patient
(âge, antécédents cardiorespiratoires, gravité du tableau
clinique) ;
– le second tient dans les ressources diagnostiques de
la structure de prise en charge ( présence des examens
complémentaires sur le site, disponibilité lors des gardes
et jours fériés, niveau d’entraînement et d’expertise des
équipes).
Schématiquement, il est utile de se référer aux 4 grands
tableaux cliniques rencontrés en urgence :
• douleur pleurale brutale associée ou non à une
hémoptysie : la réalisation première d’un écho-doppler
des membres inférieurs est licite, si cet examen est disponible
plus rapidement que la scintigraphie de ventilation-
perfusion ;
• dyspnée isolée : c’est probablement dans cette
situation que le pouvoir d’exclusion du dosage plasmatique
des D-dimères (en cas de taux inférieur au seuil) est
le plus haut, à la seule condition que la dyspnée soit
d’apparition récente ; un taux supérieur au seuil implique
la réalisation d’un écho-doppler des membres inférieurs
et (ou) d’une scintigraphie de ventilation-perfusion ;
• tableau clinique d’embolie pulmonaire grave : intérêt
de l’échographie cardiaque en première intention,
associée à la scintigraphie de ventilation-perfusion ou
au scanner spiralé ;
• collapsus cardiocirculatoire chez un insuffisant cardiaque
ou respiratoire : les D-dimères sont rarement
négatifs du fait de l’âge plus élevé et de la comorbidité ;
la scintigraphie de ventilation-perfusion est d’interprétation
difficile ; le scanner spiralé peut négliger des embolies
sous-segmentaires ; en cas de négativité de l’exploration
des membres inférieurs par écho-doppler de
première intention, le recours à l’angiographie pulmonaire
doit se discuter.
Dans tous les cas de figure, on retiendra l’importance de
la certitude diagnostique, confirmation ou exclusion,
obtenue rapidement dans les 24 premières heures.
Traitement :
A - Traitement curatif :
Il répond à 4 objectifs : réduire la morbidité et la mortalité
de l’épisode aigu, prévenir les récidives, éviter l’apparition
d’un coeur pulmonaire chronique postembolique et
réduire l’incidence du syndrome post-phlébitique en cas
de thrombose veineuse profonde associée.
Le bilan préthérapeutique est systématique :
– recherche d’une contre-indication au traitement anticoagulant et (ou) thrombolytique ;
– bilan biologique comprenant : numération globulaire
et plaquettaire ; groupe sanguin ; créatininémie ; taux de
prothrombine, INR (international normalized ratio) ;
temps de céphaline activée.
1- Traitement anticoagulant :
En l’absence de contre-indication, il est débuté dès
l’étape de la suspicion clinique d’embolie pulmonaire.
L’héparine sodique non fractionnée administrée en perfusion
intraveineuse continue à la seringue électrique est
le traitement de référence :
– la réalisation d’un bolus intraveineux de 50 UI/kg est
habituelle ; cette pratique repose sur des arguments
théoriques (inhibition rapide de l’agrégation plaquettaire)
mais n’a pas été validée par des études contrôlées ;
– la dose initiale de 400 à 600 UI/kg/24 h est adaptée au
temps de céphaline activée qui doit être compris entre
2 et 3 fois le témoin, prélevé 4 heures après le début du
traitement, puis 4 heures après chaque changement de
dose et quotidiennement.
L’utilisation de protocoles
d’ajustement des doses est fortement recommandée.
Une résistance au traitement héparinique est parfois
constatée dans un contexte sous-jacent de maladie
inflammatoire ; il faut alors ajuster le traitement sur une
mesure de l’activité anti-Xa.
Le relais par les antivitamines K peut être débuté au soir
des premières 24 heures de traitement par héparine
d’une embolie pulmonaire non grave ; on utilise les antivitamines
K de demi-vie longue, du type warfarine
(Coumadine) ou fluindione (Préviscan).
Le chevauchement
minimal héparine-antivitamines K est de 5 jours.
L’arrêt de l’héparine est effectué quand l’INR est compris
entre 2 et 3 lors de 2 prélèvements distants de 24
heures.
Chez la femme enceinte pour laquelle les antivitamines
K sont contre-indiquées, on maintiendra un traitement
par héparine, en privilégiant la voie sous-cutanée
en 2 injections.
Les héparines de bas poids moléculaire n’ont pas encore
à ce jour l’autorisation de mise sur le marché dans le
traitement curatif de l’embolie pulmonaire.
Leur efficacité
et leur tolérance paraissent toutefois comparables à
celles de l’héparine non fractionnée en cas d’embolie
pulmonaire non grave, avec l’avantage d’une surveillance
biologique réduite.
La surveillance du traitement est clinique et biologique,
basée sur :
– un temps de céphaline activée quotidien sous héparine ;
– un INR toutes les 24 à 48 heures, puis hebdomadaire,
sous antivitamines K ;
– une numération formule sanguine (NFS) et des plaquettes
bihebdomadaires à la phase initiale.
2- Traitement thrombolytique :
Le but d’un traitement thrombolytique (rtPA, streptokinase,
urokinase) est d’accélérer le processus de fibrinolyse
physiologique du thrombus, ce qui permet de baisser
rapidement les résistances vasculaires pulmonaires
au prix d’un risque hémorragique accru.
Les thrombolytiques ont une indication majeure : l’embolie
pulmonaire massive avec état de choc cardiogénique.
Ils sont aussi discutés devant un tableau d’embolie pulmonaire
grave, correspondant en règle à une obstruction
supérieure à 50 %, mais leur impact sur la survie du
patient n’est pas démontré dans ce cas de figure.
Il faut,
dans ce contexte, évaluer le retentissement cardiaque
avant traitement, au moyen d’un cathétérisme droit
(objectivant un index cardiaque inférieur à 2,5
L/min/m2) ou de l’échographie qui montre une dilatation
des cavités droites et (ou) un septum paradoxal.
3- Embolectomie chirurgicale
:
Elle nécessite une équipe entraînée, et réalise une
désobstruction vasculaire sous circulation extracorporelle.
Chirurgie lourde (mortalité estimée à 40 %), l’embolectomie
chirurgicale reste exceptionnelle et pourrait
à l’avenir être remplacée par des techniques moins invasives
d’aspiration-fragmentation du thrombus par cathéter,
en cours d’évaluation.
On discute 3 indications devant une embolie pulmonaire
massive avec état de choc cardiogénique :
– état précaire ne permettant pas d’attendre le délai
d’action des thrombolytiques (1 à 2 heures) ;
– inefficacité des thrombolytiques ;
– contre-indication des thrombolytiques.
4- Interruption de veine cave inférieure :
C’est la mise en place par voie percutanée d’un filtre
dans la veine cave inférieure, en dessous des veines
rénales ; le geste est contemporain d’une cavographie
permettant le repérage.
Les indications sont actuellement rares :
– récidive embolique sous traitement anticoagulant bien
conduit ;
– contre-indication au traitement anticoagulant.
5- Traitement symptomatique :
Il comprend :
– l’oxygénothérapie nasale adaptée à la gazométrie ;
– le remplissage par des macromolécules et la mise sous dobutamine (5 à 20 g/kg/min) en cas de mauvaise tolérance
hémodynamique ;
– le repos au lit sera le plus court possible : le lever est
autorisé après 24 h de traitement anticoagulant efficace ;
– la contention veineuse est systématique en cas de
thrombose veineuse associée.
B - Traitement préventif :
Essentiel, il est bien codifié en milieu chirurgical et
repose actuellement sur les héparines de bas poids moléculaire.
Chez les patients hospitalisés dans les services de médecine
en revanche, l’intérêt d’un traitement préventif est
moins bien cerné.
On le recommande dans 3 situations à
risque : infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral
ischémique et chez les patients hospitalisés en soins
intensifs.
Évolution :
L’évolution de l’épisode aigu est favorable dans la grande
majorité des cas sous traitement bien conduit.
L’évolution vers un coeur pulmonaire chronique postembolique
est rare ; on la recherche en cas d’embolie
grave et (ou) récidivante.
On est parfois dans ce contexte
conduit à vérifier l’évolution des thrombus en renouvelant
l’examen diagnostique (scintigraphie, scanner spiralé
ou angiographie).
L’accent doit être mis sur le suivi du patient, en particulier
sur le maintien d’une anticoagulation efficace avec
un INR compris entre 2 et 3 aux dosages répétés (toutes
les une à 2 semaines).
Cela implique :
– une information correcte du patient et (ou) de son
entourage, qui comprend la remise systématique d’un
document de synthèse sur le suivi du traitement et les
précautions à suivre ;
– la communication rapide au médecin traitant des éléments
de la surveillance ;
– la remise d’un rendez-vous pour une visite systématique
de suivi, en règle à 3 mois.
La durée totale de traitement est en règle d’au moins
3 mois.
Quatre facteurs principaux feront discuter sa
prolongation : la persistance d’une circonstance favorisante
(cancer, alitement prolongé) ; l’absence de circonstance
favorisante dans le cadre d’une maladie veineuse
thromboembolique (MVTE) « idiopathique » ; le
caractère récidivant de cette dernière ; la mise en évidence
d’une anomalie constitutionnelle de l’hémostase.
À l’inverse, une durée de 3 mois de traitement paraît
licite devant un premier épisode d’embolie pulmonaire
non grave, postopératoire et sans anomalie connue de
l’hémostase.
La prise en compte du terrain sous-jacent est fondamentale
dans l’évolution.
C’est redire l’importance du
terrain et des facteurs favorisants (notamment les affections
cancéreuses) qui doivent être pris en charge soigneusement.