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Gynécologie
Cystite aiguë et autres maladies inflammatoires bénignes de la vessie féminine
Cours de Gynécologie Obstétrique
 
 
 

Introduction :

La cystite aiguë de la femme est une infection vésicale bénigne, caractérisée par l’association d’une pollakiurie, de douleurs mictionnelles et d’une pyurie.

Son tableau clinique est suffisamment caractéristique pour que le diagnostic soit évoqué dès l’interrogatoire, souvent par la patiente elle-même.

Le traitement en est aisé, le plus souvent sans examen cytobactériologique urinaire (ECBU), par une antibiothérapie brève active sur Escherichia coli qui reste le germe très largement dominant.

La guérison est obtenue sans séquelle. Un esprit frondeur pourrait donc s’interroger sur l’utilité d’un chapitre consacré à une entité d’apparence aussi simple.

En fait, les raisons de s’y intéresser sont multiples et fondamentales.

L’infection urinaire est essentiellement d’origine ascendante.

Comprendre les mécanismes de l’infection vésicale permet de mieux cerner le stade initial de toute infection du tractus urinaire (ITU).

C’est aussi faire un pas vers la diminution des infections urinaires nosocomiales. L’ITU, et singulièrement la cystite aiguë, est d’une fréquence extrême.

Parler de problème de santé publique n’est pas exagéré lorsque des millions de personnes sont concernées chaque année en France et que le budget consacré au diagnostic et au traitement est de plusieurs centaines de millions de francs.

Enfin, les cystites récidivantes, même si elles n’ont en général pas de signification plus péjorative que la crise unique, peuvent constituer un véritable handicap social et professionnel altérant suffisamment la qualité de vie pour justifier une prévention au long cours.

À côté des cystites bactériennes, nous étudierons dans une deuxième partie les pathologies vésicales bénignes rattachées à la cystite, largement dominées par la pathologie iatrogène.

La cystite tuberculeuse, la cystite bilharzienne, la cystite interstitielle, qui font l’objet de chapitres spécifiques de l’ouvrage, ne seront pas abordées.

Cystite aiguë :

A - ÉPIDÉMIOLOGIE :

Les données sont rares et imprécises, mais témoignent de la grande fréquence.

Aux États-Unis, on a estimé l’incidence annuelle à sept millions d’épisodes, mais certaines études font penser que des millions d’autres sont méconnus.

Au total, 25 à 35 % des femmes entre 20 et 40 ans auraient présenté une ITU.

En France, une femme sur deux présenterait une cystite aiguë dans sa vie, et 2 à 10%feraient des cystites récidivantes.

L’extrapolation des chiffres américains donnerait une incidence annuelle de 1,8 million d’épisodes.

Sur des données purement nationales, à partir d’une incidence annuelle de 53 000 ITU/106 habitants, dont les deux tiers sont considérées comme bénignes et, sachant que les deux tiers des infections urinaires extrahospitalières documentées sont des cystites aiguës, on peut estimer l’incidence annuelle à 1,3 million.

En fait, l’incidence nationale des ITU est probablement sousestimée.

Par ailleurs, une proportion importante des cystites aiguës fait l’objet d’une automédication ou est traitée sans ECBU.

Une incidence annuelle d’environ deux millions d’épisodes semble donc plus proche de la réalité.

B - FACTEURS DE DÉVELOPPEMENT DE L’INFECTION VÉSICALE :

L’urine vésicale est normalement stérile.

L’infection urinaire ne peut naître et se développer qu’en raison d’une interaction favorable entre les facteurs de virulence du pathogène (du latin « virulentia », poison) et des facteurs propres à l’hôte comme sa réceptivité et ses mécanismes de défense. Ainsi sont définies :

– la BA, dénuée par définition de toute symptomatologie ;

– la cystite aiguë où les symptômes vésicaux accompagnent une réaction inflammatoire strictement localisée ;

– enfin, la pyélonéphrite aiguë marquée par une réaction inflammatoire systémique.

L’infection symptomatique étant beaucoup plus fréquente chez la femme en période d’activité génitale, nous traiterons donc essentiellement des ITU sur ce terrain.

1- Facteurs bactériens de virulence :

Les pathogènes responsables d’ITU sont d’origine endogène, colonisant par voie ascendante plutôt qu’hématogène, ou d’origine nosocomiale.

Dans les infections endogènes, E. coli (80 % des cas environ) est d’origine fécale, alors que Staphylococcus saprophyticus (10 à 30 % des infections suivant la saison aux États-Unis, 3 à 7 % en France) est un commensal de la peau et des voies génitales.

D’autres bacilles à Gram négatif, comme Klebsiella sp., Proteus sp., Enterobacter sp. et Pseudomonas sp. sont surtout rencontrés chez les patientes présentant des facteurs favorisants.

Les propriétés bactériennes permettant de déborder les processus de défense de l’hôte sont dénommées « facteurs de virulence ».

Ils ont été particulièrement étudiés chez E. coli.

Les clones virulents dans le tractus urinaire diffèrent des autres par la possession simultanée des propriétés requises pour coloniser l’intestin, se propager et envahir les voies urinaires.

* Adhérence bactérienne. Adhésines :

La possibilité d’adhérer aux cellules vaginales et urothéliales par l’intermédiaire de structures spécifiques, les adhésines, constitue le facteur de virulence essentiel.

Les bactéries fixées par les adhésines sont moins susceptibles d’être éliminées par les flux corporels et peuvent libérer leurs exotoxines dans les tissus de l’hôte.

Quatrevingt-six pour cent des souches responsables de cystite exprimeraient des adhésines, contre 95 % des souches de pyélonéphrite et 9 % des souches de BA.

En général, les souches uropathogènes possèdent simultanément plusieurs systèmes d’adhésines.

Les adhésines des E. coli uropathogènes sont des structures filamenteuses de surface appelées « pili » ou « fimbriae », ou des protéines non filamenteuses de la membrane externe.

+ Fimbriae ou pili :

Ce sont de longs appendices filamenteux de nature protéique situés à la surface de la bactérie.

Ils sont constitués de sous-unités primaires polymérisées en « hélice » : la piline.

Les pili sont le moyen principal d’attachement de la bactérie aux cellules épithéliales. Leur faible diamètre et leur longueur permettent une adhérence forte qui serait autrement impossible en raison des charges globalement négatives de la bactérie et de la cellule.

Les deux groupes majeurs de fimbriae sont distingués par leur aptitude à entraîner l’agglutination de certains érythrocytes en dépit de la présence ou seulement en l’absence de mannose (hémagglutination mannose-résistante [MR] et hémagglutination mannose-sensible [MS]).

Les bactéries peuvent présenter simultanément plus d’un type de fimbriae ou en être dépourvues (souches non fimbriées).

La production de pili est compliquée par les phénomènes de variation de phase, le pathogène évoluant suivant l’environnement (pH, osmolalité...) entre phase « piliée » et phase « non piliée ».

Fimbriae MR.

Sur la base de la spécificité des récepteurs, ces adhésines sont classées en deux groupes :

– celles reconnaissant les antigènes de groupe sanguin P : les fimbriae P ;

– les autres, autrefois appelées fimbriae X, sont dénommées adhésines MR non P.

Avec la découverte de nouveaux récepteurs (S, M, Dr), la proportion de souches incluses dans ce groupe a progressivement diminué.

Les Fimbriae P constitueraient le facteur de virulence majeur des infections à E. coli.

Elles se lient à un récepteur digalactose (globoside) contenu dans les glycolipides de surface des cellules urothéliales, mais aussi dans les glycosphingolipides des substances de groupe sanguin P.

Ces récepteurs sont aussi présents sur les cellules épithéliales du côlon, ce qui explique en partie la capacité de ces souches à y persister, et donc à réinfecter l’appareil urinaire tant qu’elles n’ont pas été éliminées par un traitement antimicrobien approprié.

La proportion de souches exprimant les fimbriae P varie avec la gravité de l’infection : 67 % pour la pyélonéphrite, 25,3 % dans les cystites de la femme adulte, 20 % pour les BA et 10,8 % pour les souches fécales de porteurs sains.

La proportion de souches porteuses de fimbriae P est probablement plus importante sur le site infecté où elles sont adhérentes aux cellules, que dans les urines où les autres souches restent libres.

Les types antigéniques sont variés et déterminés par l’opéron pap (pyelonephritis associated pili) du chromosome bactérien, contenant 11 gènes différents (papA à papK).

Le gène papA code la sousunité fimbriale alors que papE, papG et papF déterminent la spécificité de l’adhésine.

Parmi une multiplicité de fimbriae P, trois classes de protéines d’extrémité se lieraient à des récepteurs digalactose de structures spatiales différentes déterminant le site de l’infection d’E. coli.

La protéine de classe I ne serait pas uropathogène chez l’homme.

Celle de classe III, qui adhère à l’antigène Forssman et aux glycolipides globo A, déclencherait une cystite.

Une protéine terminale de classe II permettrait à E. coli de remonter dans l’uretère et d’entraîner une pyélonéphrite aiguë.

La prédominance des souches porteuses de fimbriae P dans les ITU résulterait d’une capacité à persister plus longtemps dans le côlon des patients prédisposés, mais surtout d’une plus grande virulence intrinsèque.

Les souches sans fimbriae P (pap-négatives), bien que capables d’entraîner une ITU, ne le font plus lorsqu’elles sont concurrencées dans la flore fécale par des souches porteuses de fimbriae P, qui deviennent alors les seules responsables.

Dans l’ensemble, les fimbriae P entraînent une réaction inflammatoire locale plus intense, contribuent à l’infection rénale extensive, et pourraient être impliquées dans l’induction d’une réponse immunitaire de l’hôte.

En revanche, elles ne seraient pas indispensables à la persistance de la bactérie dans le tractus urinaire.

Les adhésines MR non-P n’ont pas d’affinité spécifique pour le récepteur digalactose.

Elles sembleraient associées aux souches responsables d’ITU nosocomiales et pourraient donc jouer un rôle dans l’infection du bas appareil. Fimbriae MS ou fimbriae de type 1.

Ces pili sont exprimés par la plupart des E. coli, pathogènes ou non.

Ils se lient au mannose présent dans les membranes cellulaires de l’hôte mais aussi dans le mucus, la protéine de Tamm-Horsfall, l’IgA sécrétoire et la fibronectine.

Ils favorisent l’adhérence et la phagocytose par les polynucléaires. Bien que plus fréquents sur les souches d’ITU, les pili de type 1 jouent un rôle encore incertain dans le développement de l’ITU .

Ils adhèrent aux cellules vaginales et pourraient jouer un rôle plus important dans la colonisation vésicale que dans l’ITU invasive, notamment chez le patient sondé.

Autres types de fimbriae. Les pili de type 1C sont structurellement très proches du type 1, mais n’entraînent pas d’hémagglutination.

+ Adhésines non fimbriales (AFA : « afimbrial adhesins») :

Chez certaines souches d’E. coli, l’hémagglutination dépend de protéines de la paroi bactérienne se liant aux protéines de l’hôte. Un exemple est l’adhésine Dr, qui se lie à l’antigène de groupe sanguin Dr.

Par rapport aux fimbriae P, les adhésines AFA semblent davantage associées à la cystite banale, notamment grâce à une plus grande affinité pour les cellules épithéliales du bas appareil riches en récepteurs de ce type.

+ Autres mécanismes d’adhérence :

Production de facteur soluble. E. coli pourrait produire un facteur soluble qui romprait la couche de mucus protégeant la muqueuse vésicale.

Son rôle chez l’homme n’est pas établi. Disposition en biofilm.

Les biofilms sont des couches denses de bactéries liées par une matrice à laquelle participent probablement la protéine de Tamm-Horsfall, la fibronectine et le fibrinogène.

La flore normale peut se disposer en biofilm protégeant la surface muqueuse réceptrice.

Les bactéries pourraient aussi se développer en biofilms dans la vessie pour résister aux mécanismes de défense de l’hôte ainsi qu’à l’action des antibiotiques.

+ Bactéries autres que E. Coli :

S. saprophyticus, cause fréquente d’ITU de la femme jeune, devrait sa pathogénicité dans le tractus urinaire à une plus grande adhérence par rapport à S. aureus ou S. epidermidis.

Des fimbriae nombreuses ont été décrites chez Proteus mirabilis.

* Facteurs de virulence en dehors de l’adhérence :

+ Mécanismes d’acquisition du fer :

Le fer est indispensable au développement des bactéries.

Or, la quantité disponible dans le corps humain (non liée à la ferritine ou l’hémoglobine) est très faible.

Certains facteurs de virulence favorisent l’acquisition du fer.

Les sidérophores sont des systèmes de chélation du fer.

L’aérobactine est le système le plus efficace.

Les gènes d’E. coli codant l’aérobactine sont situés sur le chromosome bactérien, mais aussi dans les plasmides dont certains codent également la résistance aux antibactériens.

Il serait envisageable que la pression antibiotique puisse sélectionner des souches plus virulentes par l’association des facteurs plasmidiques de résistance aux antibiotiques et de la production de l’aérobactine.

L’entérobactine est dotée d’une plus grande affinité pour le fer.

Elle est aussi moins stable que l’aérobactine puisque la libération du fer nécessite son hydrolyse alors que l’aérobactine est continuellement recyclée.

Les hémolysines sont des protéines capables de lyser les érythrocytes.

La principale est l’á-hémolysine.

Elle libère le fer mais est aussi cytotoxique, ce qui renforcerait les dommages tissulaires en stimulant la réponse inflammatoire.

La production d’hémolysine s’accompagnerait d’une pathogénicité accrue et presque constamment d’une hémagglutination MR et/ou de la production de fimbriae P.

Pour certaines souches, la production d’hémolysine est supprimée dans un environnement riche en fer et stimulée dans un environnement pauvre.

Les souches responsables de cystite seraient plus fréquemment productrices d’hémolysine que les souches de BA ou les souches fécales, mais moins souvent que celles de pyélonéphrite.

+ Facteurs antigéniques :

Sérotype O. L’antigène O est un constituant de la membrane polysaccharidique externe des bactéries à Gram négatif.

Les sérotypes O responsables de l’ITU sont moins nombreux que ceux retrouvés dans la flore fécale.

Les antigènes O1, O2, O4, O6, O7, O16, O18 et O75 sont exprimés par environ 80 % des souches uropathogènes.

La colonisation vaginale par ces souches exposerait davantage à l’ITU.

Résistance au pouvoir bactéricide du sérum.

Les bactéries sont tuées par l’activité lytique du système du complément contenu dans le sérum humain.

La résistance au pouvoir bactéricide du sérum, commune parmi les souches O6, O7, O18 et O50, est plus fréquente parmi les souches de pyélonéphrite et de cystite que parmi les souches fécales ou surtout de BA.

Polysaccharides capsulaires : l’antigène K et la résistance à la phagocytose.

Certaines bactéries élaborent une enveloppe de polysaccharides acides capsulaires, appelés antigènes K, les protégeant contre la phagocytose et l’attaque du complément.

La quantité d’antigène K déterminerait le degré de virulence d’une souche.

L’antigène capsulaire K1 est le plus commun chez E. coli.

Son rôle serait mineur dans les cystites, plus important dans la pyélonéphrite.

+ Autres facteurs présumés :

Production de cytotoxine et de protéases.

Un facteur cytotoxique nécrosant a été décrit chez certains E. coli.

Les souches productrices d’immunoglobulines A(IgA)-protéases pourraient être plus virulentes dans l’appareil urinaire.

Mobilité bactérienne. E. coli est mobile du fait de flagelles (antigène H).

Le rôle exact de cette mobilité dans la virulence reste débattu. Facteur de paralysie des contractions urétérales.

Le lipide A des fimbriae P d’E. coli aurait un effet paralytique sur le péristaltisme urétéral, favorisant l’ascension vers le rein. Production d’uréase.

L’ammoniaque, produit par hydrolyse de l’urée, augmente in vitro l’adhérence à l’épithélium vésical.

* Facteurs de virulence et tableaux cliniques :

+ Dans la cystite aiguë :

Il n’y a pas de profil bactérien type.

Les souches d’E. coli ne représentent pourtant pas un échantillon aléatoire de la flore fécale, mais possèdent certains facteurs de virulence qui leur permettent d’entraîner ce type d’infection.

Elles diffèrent des souches communément responsables de pyélonéphrite.

L’hémolysine, les fimbriae de type 1 et les fimbriae P de type prsGJ96 seraient plus fréquentes.

On a rapporté une forte corrélation entre l’antigène K1 et la présence de fimbriae P.

Les autres facteurs de virulence sont importants pour la survie du micro-organisme chez l’hôte.

La cystite pourrait être causée par des souches moins virulentes chez les femmes utilisant une contraception par diaphragme.

Il existe cependant des chevauchements de caractéristiques entre les souches de porteurs sains, de cystite et de pyélonéphrite.

+ Dans la BA :

On a pensé que la présence de fimbriae et la production d’aérobactine permettaient à E. coli de pérenniser une infection asymptomatique.

On sait toutefois que certaines souches de BA n’expriment pas les fimbriae ou en réduisent secondairement l’expression.

Enfin, des souches expérimentales dépourvues d’adhésines ont pu s’établir chez l’homme présentant une dysfonction vésicale, entraîner une bactériurie significative et persister plusieurs années.

L’adhérence ne serait donc pas obligatoire pour persister dans le tractus urinaire, alors que la résistance au composant urinaire de la famille des polyamines le serait.

Il est en fait probable que les micro-organismes sont capables d’exprimer un certain nombre de caractères d’adhérence, dont certains sont les fimbriae et d’autres des propriétés de surface, permettant la liaison avec l’urothélium.

En particulier, les interactions électrostatiques et hydrophobiques sont sûrement importantes, mais encore mal connues.

Enfin, pour éviter l’élimination liée à la réaction inflammatoire, il est possible que les organismes adhérents soient dans l’obligation de former un biofilm dans la vessie.

2- Facteurs liés à l’hôte :

L’obstruction, où qu’elle siège sur l’appareil urinaire, est le facteur majeur favorisant l’infection urinaire.

En fait, l’importance des facteurs propres à l’hôte apparaît clairement dans le cadre des infections récidivantes, qui surviennent le plus souvent chez des femmes jeunes dont l’arbre urinaire est anatomiquement normal.

La bactérie doit trouver chez l’hôte les récepteurs nécessaires à l’adhérence pour que l’ITU se développe.

La bactérie fixée doit coloniser le vagin, puis l’urètre, enfin la vessie et, dans certains cas, le haut appareil urinaire.

* Colonisation du vestibule, de la zone périurétrale et de l’urètre distal :

Elle précède l’apparition de la bactériurie.

La capacité pour la bactérie d’adhérer aux cellules urothéliales est liée à la présence de récepteurs spécifiques et à des facteurs favorisants dont certains apparaissent génétiquement déterminés.

+ Flore bactérienne :

Les uropathogènes sont normalement absents du vagin et de l’urètre terminal.

Les lactobacilles, bacilles à Gram positif commensaux habituels du vagin, produisent de l’acide lactique qui maintient un pH acide et inhibe la croissance des uropathogènes, mais aussi un peroxyde d’hydrogène qui pourrait servir de défense.

Certains composants de la paroi des lactobacilles empêcheraient l’adhérence aux cellules uroépithéliales en bloquant les sites d’attachement.

La colonisation du périnée, de l’introitus vaginal et de la muqueuse urétrale par une souche uropathogène d’origine fécale précède l’ITU.

Les études de génétique bactérienne permettent de valider ce concept.

La colonisation vaginale précédant celle de l’urètre, la flore urétrale peut être explorée par une culture du vestibule. Les souches d’E. coli de la flore fécale servent de réservoir de germes responsables des ITU, notamment de la cystite, en fonction de la dominance d’une souche mais aussi du nombre de facteurs de virulence.

Tous les facteurs de virulence de la flore uropathogène sont présents dans la flore rectale.

Les infections à S. saprophyticus seraient plus fréquentes chez les professionnelles de la viande et les utilisatrices des piscines publiques.

+ Récepteurs uroépithéliaux :

Le récepteur digalactose est présent dans tout l’arbre urinaire, sauf dans le glomérule et dans l’anse de Henle.

Il n’y a pas de différence de densité de récepteurs suivant le sexe.

Son abondance dans l’épithélium du vagin et du trigone rend compte de l’importance des phénomènes d’adhérence bactérienne dans la pathogénie des infections du bas appareil urinaire.

Il est présent en quantité importante dans les canaux collecteurs du rein, ce qui expliquerait la fréquence des fimbriae P dans les pyélonéphrites à E. coli.

Les récepteurs au mannose sont uniformément répartis sur tout l’arbre urinaire.

+ Variations de réceptivité :

Les cellules urothéliales prélevées au milieu du cycle menstruel pourraient avoir une réceptivité accrue, expliquant en partie le pic de fréquence des ITU observé entre le 8e et le 15e jour du cycle.

Des récepteurs aux oestrogènes et à la progestérone ont été mis en évidence dans les cellules trigonales des femmes ménopausées ou non.

La contraception par un produit spermicide imprégnant les préservatifs ou en complément du diaphragme augmente la colonisation vaginale par E. coli, probablement du fait de l’action détergente du nonoxynol 9.

Ce facteur favorisant doit être systématiquement recherché dans les infections récidivantes.

Bien que la plupart des uropathogènes soient d’origine fécale, une infection génitale peut aussi être le réservoir de germes à éradiquer pour éviter les récidives.

En revanche, une toilette inadaptée ou la direction de l’essuyage après défécation ne semblent pas des facteurs de risque prouvés.

Il en est de même pour le type de protection menstruelle, l’utilisation de déodorants, de douches vaginales, de sous-vêtements serrés, et de la fréquence de la toilette périnéale.

Après la ménopause, le pH s’élève, les lactobacilles disparaissent et le vagin est colonisé par des entérobactéries.

Le traitement local par les oestrogènes rétablit alors un pH vaginal acide, permet une recolonisation par le lactobacille et la disparition des entérobactéries, aboutissant à une diminution significative de la fréquence des ITU.

L’antibiothérapie accroît le risque d’ITU dans les semaines qui suivent.

Ceci est particulièrement vrai pour les bêtalactamines, qui altèrent la flore urogénitale endogène et prédisposent à la colonisation vaginale par un uropathogène ; à l’inverse, le cotrimoxazole a peu d’action sur la flore vaginale normale.

+ Facteurs génétiques :

La colonisation chez les patientes sujettes aux récidives est souvent intermittente mais plus importante et durable que chez les témoins.

Chez ces patientes, les infections ont tendance à survenir par crises groupées, ce qui suggère la présence limitée dans le temps de facteurs favorisants.

La virulence des souches de rechute ne diffère pas de celle d’un premier épisode.

Enfin, la virulence des souches de cystite n’est pas différente entre patientes jeunes ou âgées, en bonne santé ou malades.

Les caractéristiques de l’épithélium récepteur sont en fait plus importantes que celles de la bactérie.

En effet, les germes responsables d’épisodes récidivants n’adhèrent pas mieux aux cellules vaginales de sujets témoins, alors que les cellules vaginales des patientes sujettes aux récidives ont une capacité d’adhérence plus grande vis-à-vis des souches standards d’E. coli que les cellules identiques de sujets contrôles.

Cette réceptivité accrue à l’adhérence bactérienne fut la première différence biologique majeure démontrable chez les femmes sujettes aux ITU récidivantes.

Cette capacité d’adhésion est aussi une caractéristique des cellules buccales, ce qui prouve l’intervention majeure d’un facteur génotypique, d’autant plus que l’antigène HLA-A3 (human leukocyte antigen) apparaît plus fréquent chez les femmes sujettes aux récidives.

D’autres éléments plaident en faveur de l’origine génétique de cette réceptivité accrue.

Les antigènes de groupe sanguin constituent une partie importante des récepteurs de la membrane cellulaire.

Or, l’adhérence semble liée au phénotype non sécréteur (n’exprimant pas les antigènes des groupes sanguins dans les sécrétions corporelles).

Les femmes des groupes Lewis Lea-b- et Lea+b-, donc de phénotype non sécréteur, ont une plus grande fréquence d’infections récidivantes que celles de phénotype Lea-b+.

Chez les nonsécréteurs, l’absence de fucosyltransférase empêcherait l’expression de surface des antigènes de groupe sanguin A, B et H, exposant les récepteurs digalactose et favorisant ainsi le stade initial de l’infection qui déclencherait, sur ce terrain, une réaction inflammatoire anormalement élevée.

L’importance du statut sécréteur pourrait toutefois être remis en question au profit de la spécificité de la protéine terminale.

Les patientes présentant une infection vésicale par un E. coli exprimant l’adhésine de classe III sont fréquemment de groupe A et sécrétrices, donc porteuses de l’antigène A et de l’antigène Forssman sur leurs cellules urothéliales.

Ces deux antigènes peuvent jouer le rôle de récepteur pour les adhésines de classe III.

Dans l’ensemble, l’importance des facteurs génétiquement déterminés chez l’hôte est largement acceptée.

* Infection vésicale ascendante :

L’inoculation vésicale est facilitée par la contiguïté des orifices périnéaux, la brièveté de l’urètre féminin, l’absence des sécrétions prostatiques bactéricides.

Le rôle des rapports sexuels qui ouvrent largement l’urètre, notamment s’il persiste des brides hyménéales cicatricielles, est essentiel.

Le début de l’activité sexuelle est souvent marqué par les premières infections, classique « cystite de la jeune mariée ». Une bactériurie transitoire est possible après le rapport.

Les rapports fréquents et rapprochés sont un facteur de risque.

L’effet protecteur de la miction postcoïtale n’a pas été confirmé.

L’activité sexuelle des femmes souffrant d’infections récidivantes ne différant pas des autres, c’est toutefois la colonisation vaginale et non le rapport qui constituerait le facteur prédisposant.

Si l’effet protecteur des mictions fréquentes est admis, le régime turbulent de la miction dans l’urètre féminin a été considéré comme un facteur favorisant l’ascension des bactéries vers la vessie.

En fait, la résistance urétrale des bactériuriques ne serait pas différente de celle des témoins.

Le rôle du sondage est évident : le cathétérisme occasionnel déclenche une infection chez 1 % des patients et l’infection sur sonde à demeure est quasi constante.

* Facteurs de protection contre l’infection vésicale :

Les bactéries pénétrant dans la vessie normale sont habituellement rapidement éliminées grâce aux facteurs protecteurs urinaires et vésicaux.

+ Facteurs urinaires :

Composition de l’urine. Les osmolalités extrêmes, le pH très acide, de fortes concentrations d’urée et d’acides organiques peuvent inhiber la croissance bactérienne.

L’urine contiendrait en outre un facteur antibactérien apparenté à la famille des polyamines, auquel 70 % des souches fécales d’E. coli seraient sensibles.

Les souches insensibles pourraient constituer l’origine potentielle des ITU.

L’urine de la femme en renfermerait de moindres quantités que l’urine de l’homme.

La présence de glucose dans l’urine favorise la multiplication d’E. coli.

L’infection ne serait cependant pas plus fréquente au cours du diabète non compliqué.

Les urines de femmes gravides ont un pH favorable à la croissance à tous les stades de la gestation.

Protéine de Tamm-Horsfall. C’est une glycoprotéine sécrétée dans l’urine par les cellules de la branche ascendante de l’anse de Henle et du tube contourné distal.

Lorsque l’uromucoïde est présent en grande quantité, il agirait comme un mécanisme de défense non spécifique en piégeant les bactéries munies de fimbriae de type 1, permettant leur expulsion par la miction.

À faibles concentrations, la protéine de Tamm-Horsfall favorise au contraire l’adhérence des fimbriae de type 1 aux cellules urothéliales par un mécanisme inconnu.

Les patients âgés, dont on sait la plus grande sensibilité à l’infection urinaire, ont une production de protéine de Tamm- Horsfall diminuée.

Au stade initial de colonisation vésicale, la protéine de Tamm-Horsfall pourrait se lier d’un côté à E. coli et de l’autre aux cellules urothéliales.

Seules les bactéries capables de se lier aussi directement aux cellules urothéliales permettraient le développement de l’infection.

Les autres n’entraîneraient qu’une BA ; enfin celles qui pourraient se lier mais ne posséderaient que peu de facteurs de virulence seraient éliminées par exfoliation. Immunoglobulines urinaires.

Leur rôle n’est pas totalement établi.

Certains sujets présentant des ITU récidivantes ont une production d’IgA sécrétoires abaissée.

Or, les IgA réduisent l’adhérence bactérienne aux cellules vaginales et urothéliales in vitro et facilitent l’emprisonnement des bactéries dans la couche de mucine.

L’élaboration de protéases inactivant les IgA sécrétoires par certaines souches de bacilles à Gram négatif pourrait donc être un important facteur de virulence.

Les patients séropositifs ou sidéens présentent plus de bactériuries, asymptomatiques ou non.

+ Facteurs vésicaux :

Couche de mucopolysaccharides. Une couche de glycosaminoglycanes recouvre les cellules urothéliales et les protégerait de l’adhérence bactérienne.

La dégradation mécanique de cette couche protectrice (sondage, calcul, rapport vigoureux) pourrait constituer un facteur favorisant.

L’adhérence bactérienne aux cellules urothéliales des patients sondés est augmentée.

Activité antibactérienne de l’urothélium. Les cellules épithéliales produiraient des molécules bactéricides pour E. coli, en moins grande quantité chez les sujets prédisposés aux ITU que chez les sujets sains.

Miction et vidange vésicale. Une vidange vésicale fréquente et complète permet l’élimination très rapide des bactéries.

La colonisation par ensemencement volontaire d’E.coli dépourvue de fimbriae s’est avérée impossible chez les patients avec bas appareil normal.

On a rapporté que les femmes qui se retenaient plus de 1 heure après avoir ressenti le besoin pressant d’uriner avaient un risque d’ITU significativement plus élevé.

La dysurie, un résidu postmictionnel par obstacle sous-vésical ou dysfonction neurogène favorisent l’infection vésicale.

Les diverticules vésicaux, le reflux et les uretères borgnes qui ne se vidangent pas sont aussi des facteurs favorisants.

Plus rares sont les fistules vésicovaginales ou colovésicales où l’inoculation vésicale est directe. Vieillissement.

La prévalence de la bactériurie augmente avec l’âge, mais reste toujours plus fréquente chez la femme.

La mauvaise vidange vésicale reste le facteur prédominant.

Les autres facteurs sont multiples : plus grande fréquence des sondages, réponse immunitaire réduite, diminution de la sécrétion de protéine de Tamm-Horsfall.

* Propagation au haut appareil :

Une inoculation silencieuse du haut appareil existerait dans 15 à 50 % des cystites aiguës, avec une fréquence d’autant plus grande que des facteurs de risque seraient présents.

Cette propagation au haut appareil pourrait être une conséquence de l’effet antipéristaltique de l’endotoxine bactérienne, expliquant sa survenue sur un arbre urinaire normal.

Si le reflux contribue à l’établissement de l’ITU et à sa propagation dans le haut appareil, les autres anomalies (obstruction, lithiase, anomalies rénales congénitales et acquises) détermineraient plus la localisation de l’ITU sur le haut appareil que son acquisition.

3- Interaction hôte-bactérie dans la cystite :

* Réaction inflammatoire :

La bactérie adhérant au tractus urinaire déclenche une réaction inflammatoire caractérisée par un afflux rapide de leucocytes et une sécrétion réactionnelle de cytokines par les cellules urothéliales.

Expérimentalement, la réaction inflammatoire favorise l’élimination des bactéries du tractus urinaire.

+ Polynucléaires :

Plus de 90 % des cellules présentes dans l’urine infectée sont des polynucléaires neutrophiles.

Ils permettent de limiter l’invasion tissulaire, mais leur présence dans l’urine elle-même n’a pas de rôle propre.

Pauvres en récepteurs digalactose, ils adhèrent peu aux bactéries porteuses de fimbriae P.

Les cellules urothéliales participeraient à l’afflux de leucocytes en sécrétant de l’interleukine 8(IL8), mais aussi en exprimant certaines molécules d’adhésion impliquées dans cette migration transpariétale (ICAM-1 [integrin cellular adhesion molecule]).

L’IL8 est un facteur chimiotactique pour les polynucléaires neutrophiles. Son taux urinaire est directement corrélé à l’importance de la leucocyturie.

+ Cytokines :

L’IL6 et l’IL8 urinaires sont élevées chez les patients présentant une ITU.

Une première vague sécrétoire d’IL1, IL1â, IL6 et IL8 est produite par les cellules urothéliales en réponse à l’invasion bactérienne.

Les souches porteuses de fimbriae P entraîneraient une réponse locale plus élevée.

Par leurs sécrétions propres et un jeu d’influences réciproques avec les cellules urothéliales, les polynucléaires, macrophages et lymphocytes attirés dans la muqueuse fournissent une seconde vague de cytokines.

+ Monoxyde d’azote (NO) :

L’urothélium présente une activité NO-synthase qui augmente de façon considérable au cours de la cystite bactérienne, interstitielle, radique, ou après BCG.

Les leucocytes des patients présentant une ITU montrent une forte activité NO-synthase.

Le rôle du NO dans la cystite n’est pas clair.

Ses puissantes propriétés cytotoxiques pourraient jouer un rôle dans la destruction des bactéries et contribuer à la réponse inflammatoire.

Il est possible que la production de NO explique la persistance des symptômes irritatifs de la cystite aiguë, alors même que le compte bactérien est considérablement réduit par le traitement antibiotique.

* Réaction immunitaire :

Il existe une réponse anticorps minime de la muqueuse vésicale.

Bien que des lymphocytes T soient présents dans l’infiltrat de la cystite, le rôle de l’immunité cellulaire semble réduit, sinon dans la production de cytokines pro-inflammatoires stimulant la réponse de la muqueuse urothéliale.

C - DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L’INFECTION URINAIRE :

L’ECBU, et notamment l’isolement du germe par la culture, reste la référence incontestable.

Des débats existent encore quant à l’importance de la charge bactérienne nécessaire pour parler d’infection vraie.

Des considérations économiques et d’efficience amènent enfin à discuter, notamment dans le cadre de la cystite aiguë simple, la place à accorder à l’ECBU.

1- Examen cytobactériologique urinaire :

* Qualité du résultat de l’ECBU :

Il dépend de la qualité du recueil.

L’expérience prouve chaque jour que le recueil d’urines non contaminées par la flore périnéale est plus difficile chez la femme que chez l’homme.

L’explication de la technique du recueil, encore insuffisamment faite par les médecins et les laboratoires d’analyses, est pourtant le meilleur gage de qualité de l’examen.

Le prélèvement devrait être effectué au laboratoire, dans un flacon stérile, sur les urines du matin ayant séjourné plusieurs heures dans la vessie.

En fait, une patiente symptomatique doit être prélevée puis traitée le plus rapidement possible.

La toilette préalable des mains, de la vulve et de la région périméatique à l’eau et au savon réduit de 20 % les cultures positives par contamination.

Les antiseptiques ne doivent pas être utilisés, car ils peuvent réduire artificiellement le compte bactérien.

Afin d’éviter la contamination par la flore de l’urètre et du vestibule, l’urine doit être recueillie à mi-jet, la patiente favorisant l’émission directe en écartant les lèvres vulvaires.

La ponction sus-pubienne ou le sondage, méthodes invasives, sont exceptionnellement utilisées lorsque le recueil à mi-jet s’avère impossible.

L’idéal est d’effectuer l’examen dans l’heure qui suit le recueil.

Si cela s’avère impossible, le compte bactérien peut être stabilisé par la réfrigération à 4 °C ou l’addition d’acide borique à 1,8 %.

Ce dernier préserve en outre la morphologie cellulaire, notamment des leucocytes.

L’examen doit, de toute façon, être effectué dans les 24 heures.

* Examen microscopique des urines :

Il recherche la bactériurie et la pyurie.

Alors qu’il ne prend que quelques minutes et devrait être systématique, il est encore trop souvent négligé.

+ Bactériurie :

Un échantillon d’urines fraîches non centrifugées contenant des bactéries visibles est potentiellement infecté.

Une coloration de Gram augmente encore la sensibilité et la spécificité et permet d’orienter l’antibiothérapie probabiliste.

Pour un seuil de bactériurie supérieur ou égal à 105 UFC/mL, la valeur prédictive négative d’une coloration de Gram est supérieure à 99 %.

Les résultats dépendent de l’opérateur, avec une limite inférieure de l’ordre de 3,5 X 105 UFC/mL ce qui, notons-le déjà, ne permettra pas de détecter les bactériuries faibles.

+ Pyurie ou hyperleucocyturie :

La pyurie, définie par un nombre de leucocytes supérieur ou égal à 10/mm3 ou 104/mL, est un élément majeur du diagnostic.

Elle est bien corrélée à la bactériurie et au caractère symptomatique : 96 % des sujets présentant une bactériurie symptomatique ont une pyurie, contre 50 % de ceux avec BA et moins de 1 % de ceux sans bactériurie.

La pyurie sans bactériurie (pyurie aseptique) est le plus souvent due à une antibiothérapie préalable mais peut aussi être liée à une pollakiurie extrême, à une diurèse excessive (surtout si le compte bactérien est peu élevé), à des organismes difficiles à cultiver ou à des agents de maladies sexuellement transmissibles comme Chlamydia trachomatis ou Neisseria gonorrhoeae.

La tuberculose reste une cause classique de pyurie aseptique, mais il faut aussi savoir évoquer la lithiase urinaire et les tumeurs de vessie.

La bactériurie sans pyurie peut être liée à la lyse des leucocytes dans l’urine alcaline ou à une contamination.

Même si elle ne peut totalement l’exclure, l’absence de pyurie rend l’infection peu probable et incite à envisager un autre diagnostic.

+ Hématurie :

Elle est présente sur un mode microscopique chez environ 50 % des patientes présentant une ITU aiguë, et sur un mode quelconque au cours de 40 % des cystites.

C’est un indicateur très spécifique chez les femmes présentant des douleurs mictionnelles car elle est peu fréquente au cours des syndromes génitaux responsables de troubles cliniques voisins.

* Compte de germes :

Le critère statistique proposé par Kass reposait sur la comparaison d’urines de femmes ambulatoires asymptomatiques à celles de patientes hospitalisées pour pyélonéphrite.

Les valeurs de 102 à 104 UFC/mL, majoritaires chez les patientes asymptomatiques, semblaient correspondre aux contaminations, et celles supérieures ou égales à 105 UFC/mL, communes chez les patientes atteintes de pyélonéphrite, à l’infection vraie.

Il proposa d’adopter la valeur seuil de 105 UFC/mL pour définir l’infection urinaire vraie.

En fait, 35 à 45 % des femmes présentant des symptômes du bas appareil ont des comptes bactériens moins élevés.

La présence de 102 UFC/mL dans l’urine de mi-jet chez une femme symptomatique prédit l’infection vésicale avec une sensibilité de 95 %.

La proportion de patientes symptomatiques avec cultures réputées négatives s’en trouve réduite de 46 %.

Lorsque le traitement est différé de 48 heures, 48 % ont alors un compte supérieur ou égal à 105 UFC/mL, alors que 5 % seulement ont une disparition de la bactériurie.

L’abaissement simultané de la spécificité à 85 % rend toutefois plus délicate la distinction entre infection et contamination.

Un seuil de significativité supérieur ou égal à 105 UFC/mL reste donc applicable aux patientes asymptomatiques, alors que les comptes moins élevés, compris entre 102 et 105 UFC/mL sont à prendre en compte chez les patientes symptomatiques et hyperleucocyturiques.

Cet examen, autrefois réalisé en 18 heures, peut maintenant l’être en moins de 5 heures avec des automates assurant une sensibilité de l’ordre de 103-104 UFC/mL.

* Culture et antibiogramme :

Pour les entérobactéries, environ 30 % des souches isolées sont résistantes à l’ampicilline et 20 % au cotrimoxazole.

La présence de plusieurs espèces bactériennes est très suspecte de contamination.

Une bactériurie préexistante semble en effet protéger de l’infection simultanée par une autre souche.

Un mécanisme compétitif pour les éléments nutritifs ou les sites d’adhésion est évoqué.

L’identification et l’antibiogramme, classiquement réalisés en 48 heures, peuvent être effectués en environ 24 heures avec les nouveaux automates.

2- Place des bandelettes réactives :

Leur utilité principale est d’éliminer les urines ayant une faible probabilité d’être réellement infectées, ce que permet déjà l’examen macroscopique des urines fraîches montrant des urines limpides.

Dans les infections aiguës, les bandelettes réactives peuvent conforter la présomption clinique et autoriser un traitement rapide.

Elles restent encore peu utilisées.

* Détection des leucocytes :

Les leucocytes sont porteurs d’une leucocyte-estérase spécifique, détectable même après leur dégénérescence.

Les bandelettes détectent la leucocyturie significative (> 103/mm3) avec une sensibilité variant de 82 à 95 %.

Des taux élevés d’albumine et certains médicaments comme la nitrofurantoïne et la gentamicine peuvent toutefois perturber les résultats.

* Détection de la bactériurie :

De nombreux micro-organismes impliqués dans les ITU peuvent réduire les nitrates de l’urine en nitrites.

Le test à la nitrate-réductase permet leur détection.

Les urines doivent toutefois avoir séjourné plusieurs heures dans la vessie.

Or, la pollakiurie est souvent importante dans la cystite aiguë.

La sensibilité du test aux nitrites est donc faible dans ce cadre, d’autant que certains germes ne réduisent pas les nitrates (entérocoques, S. saprophyticus, Acinetobacter sp., certains Pseudomonas sp.) et que d’autres peuvent donner des résultats faussement négatifs qui peuvent être dus à un défaut d’apport alimentaire, à une diurèse importante ou un séjour trop bref dans la vessie.

* Tests combinés :

La combinaison des résultats du test à la leucocyte-estérase et du test à la nitrate-réductase présente une valeur prédictive négative élevée, 97-99 %, en méconnaissant toutefois les comptes bactériens peu élevés.

Si l’association des deux tests positifs est plus spécifique, la prise en compte d’au moins un test positif sur deux est plus sensible et permet de repérer les sujets dont les urines doivent bénéficier d’examens plus poussés.

C’est cette dernière attitude qui est recommandée.

D - NOSOLOGIE DES INFECTIONS DU TRACTUS URINAIRE :

Sous le terme d’ITU sont regroupées des situations cliniques différentes nécessitant des traitements différents.

La littérature anglosaxonne a popularisé une classification des infections urinaires permettant de moduler le bilan, le type et la durée du traitement en fonction des risques potentiels.

L’infection compliquée est celle qui présente des facteurs de risque majorés pour l’acquisition de l’infection, pour que surviennent des conséquences symptomatiques ou sérieuses ou pour un échec du traitement.

Les autres sont dites non compliquées.

En l’absence de ces facteurs, la cystite aiguë est considérée comme une infection non compliquée.

Cependant, une inoculation silencieuse du haut appareil existerait dans 15 à 50 % des cas.

Cette pyélonéphrite latente ou silencieuse expliquerait en partie l’échec de certains traitements à dose unique.

La pyélonéphrite aiguë, bien qu’intéressant le haut appareil, est aussi une infection non compliquée s’il n’existe aucune anomalie fonctionnelle ou anatomique, en ce sens qu’elle guérira parfaitement sans séquelles par un traitement court.

Les inconvénients de cette classification tiennent à son caractère ambigu, apparenté à la « devinette diagnostique », regroupant de nombreux syndromes ayant peu de rapports entre eux.

En outre, l’appellation est incorrecte : on intitule compliquée une infection qui ne l’est pas, mais présente seulement une probabilité moins grande de réponse rapide et complète au traitement.

Un traitement usuel guérirait probablement 80 à 90 % des patients présentant ces caractéristiques. Enfin, comment désigner la complication vraie ?

C’est pourquoi il nous paraît préférable d’utiliser les termes plus précis d’infection cliniquement haute ou basse, simple ou avec facteurs de risque, en réservant le terme d’infection compliquée à celle qui l’est réellement : persistance de l’infection ou rechute précoce, obstruction, suppuration, septicémie, choc septique.

E - ASPECTS CLINIQUES :

1- Cystite aiguë :

* Démarche clinique :

La diagnostic est rapidement évoqué devant les douleurs mictionnelles.

Une femme jeune en période d’activité génitale, sans passé pathologique, non gravide et non ménopausée qui se plaint de la survenue brutale de douleurs à la miction associées à de la pollakiurie ou des besoins impérieux sans fièvre ni douleurs du flanc présente a priori une cystite aiguë simple.

Des douleurs pelviennes ou sus-pubiennes sont fréquentes.

Cette démarche diagnostique reste probablement vraie chez la femme ménopausée.

En fait, une telle symptomatologie peut aussi correspondre à une urétrite aiguë à C. trachomatis, à N. gonorrhoeae, à une infection génitale à virus herpès simplex, à Candida ou à Trichomonas vaginalis.

Il est le plus souvent possible de différencier ces tableaux par l’interrogatoire, un examen clinique général et pelvien, et quelques tests simples.

Une hématurie macroscopique, habituellement terminale mais parfois totale, peut accompagner la symptomatologie.

La sensibilité sus-pubienne à la palpation n’est présente que chez 10 % des patientes, mais serait très spécifique de la cystite.

L’examen pelvien doit éliminer une vaginite et/ou une cervicite, un écoulement urétral, des ulcérations herpétiques.

Les urines fraîches sont troubles, parfois malodorantes.

La présence de leucocytes à la bandelette apporte l’élément sémiologique indispensable pour affirmer le diagnostic.

* Examens complémentaires dans la cystite aiguë :

Seul l’ECBU mérite d’être discuté, tous les autres examens sont inutiles.

La culture bactérienne avec compte de germes reste l’examen de référence, indispensable au cours de toute infection urinaire avec facteurs de risque.

Dans la cystite aiguë simple, au contraire, les résultats sont le plus souvent de faible utilité, notamment avec le traitement à dose unique, et entachés de 10 % d’erreurs si le nombre classique de 105 UFC/mL est retenu comme critère de bactériurie significative.

Or, la cystite aiguë simple de la femme est une infection bénigne, sans gravité immédiate et sans conséquence démontrée à terme sur la fonction rénale.

Les germes responsables sont peu nombreux et leur profil de sensibilité hautement prévisible.

Le taux de modification du traitement après résultat n’est que de 8 %.

Enfin, moins de 5 % des femmes présentant une cystite aiguë ont une pathologie significative du haut appareil.

Il est donc raisonnable de traiter sans ECBU.

La justification économique vient ensuite. L’ECBU systématique avant traitement des infections basses augmente les coûts de 40 %, mais ne diminue la durée totale des symptômes que de 10 %.

Le développement d’un arbre décisionnel sans ECBU a permis de diminuer les coûts de 35 %, sans augmentation des hospitalisations, des visites d’urgence, ou des traitements antibiotiques de seconde intention.

En France, où le coût des examens de laboratoire est prépondérant, l’utilisation de bandelettes réactives pour décider du traitement et contrôler son efficacité permettrait une économie de plusieurs centaines de millions de francs par an.

De la même manière, l’ECBU après traitement d’une infection basse n’est pas justifié si la symptomatologie s’est totalement amendée et que les urines sont redevenues limpides et négatives à la bandelette.

La fréquence des infections symptomatiques ultérieures n’est pas réduite par sa réalisation systématique et le coût de la BA détectée s’avère très élevé, alors même que l’utilité de son traitement n’a jamais été démontrée chez la femme non gravide.

L’ECBU après traitement n’est donc utile qu’en cas d’échec clinique : persistance des symptômes ou rechute précoce.

* Rechutes et récidives :

Les récidives qui surviennent peu de temps après le traitement nécessitent un ECBU et un traitement classique.

Les récidives plus tardives peuvent être traitées comme les infections sporadiques.

Les femmes âgées rechutent plus volontiers que celles en période d’activité génitale.

2- Cystites aiguës récidivantes :

Leur symptomatologie n’est pas différente.

Leur répétition, susceptible d’altérer la qualité de vie, impose la recherche d’une étiologie, rarement découverte il est vrai, et une attitude thérapeutique différente.

* Histoire naturelle :

La cystite récidivante est définie par la survenue d’au moins quatre épisodes par an.

Ces infections sont fréquentes chez des femmes jeunes en bonne santé avec un appareil urinaire physiologiquement et anatomiquement normal.

À partir du quatrième épisode annuel, le recours à l’ECBU initial est toutefois recommandé pour détecter des problèmes microbiologiques spécifiques comme un bacille à Gram négatif inhabituellement résistant, un cocci à Gram positif ou des Chlamydiae.

Les épisodes tendraient à se grouper dans le temps, avec un risque de récidive majoré dans la période suivant immédiatement l’épisode initial, mais moindre en hiver.

En l’absence d’anomalie anatomique ou fonctionnelle du tractus urinaire, on n’a pas démontré d’évolution vers l’hypertension artérielle ou la pyélonéphrite chronique.

* Rechute ou réinfection ?

On a pensé que la très grande majorité des récidives étaient des réinfections, à partir de nouvelles souches de la flore fécale.

En fait, des études prospectives à long terme utilisant non seulement les sérotypes, mais aussi l’étude des facteurs de virulence et les empreintes génétiques, ont démontré que les souches d’E. coli responsables d’ITU pouvaient, malgré un traitement adéquat éliminant le germe sur plusieurs cultures successives, entraîner une nouvelle ITU 1 à 3 ans plus tard. Un à deux tiers des récidives seraient en fait des rechutes.

Il semble donc que le concept classique de la réinfection doive être révisé et que la plupart des récidives de cystite soient des rechutes, la souche infectante initiale pouvant persister dans la flore fécale après élimination du tractus urinaire, pour recoloniser l’introitus et la vessie.

* Quel bilan chez les femmes présentant des infections récidivantes ?

L’activité sexuelle et l’utilisation d’une contraception par diaphragme et spermicide sont les facteurs de risque les plus clairement mis en évidence pour les ITU sporadiques.

Il est donc important de rechercher ce type de contraception.

La plupart des femmes avec cystite récidivante sans facteurs de risque n’ont en revanche aucune anomalie anatomique ou fonctionnelle du tractus urinaire.

Il semble donc raisonnable de limiter les investigations.

Il est classique de recommander un examen urologique, à la recherche de brides hyménéales, de modifications du méat et du canal de l’urètre, d’une atrophie vulvaire.

La recherche de bacilles de Koch (BK) dans l’urine est nécessaire. Pour certains, il faut discuter la réalisation d’une échographie pelvienne et du haut appareil, d’une radiographie de l’arbre urinaire, voire, dans certains cas, d’une urographie intraveineuse (UIV) et même d’une cystographie rétrograde et d’une cystoscopie.

La découverte d’anomalies significatives influençant le traitement est cependant très rare.

Au total, une femme sans antécédents dans l’enfance, présentant des crises sporadiques rapidement guéries par un traitement court oral, sans hématurie microscopique ni bactériurie résiduelles, ne nécessite aucune investigation complémentaire.

À l’opposé, une hématurie persistante après la guérison de l’infection, même sur le mode microscopique, justifie un bilan urologique complet comprenant UIV et cystoscopie.

3- Bactériurie asymptomatique :

La BA est définie comme la présence d’une bactériurie supérieure ou égale à 105 UFC/mL d’un ou plusieurs micro-organismes à deux examens d’urine consécutifs en l’absence de symptômes attribuables à cette infection.

Nous verrons ces différents aspects au chapitre traitant des formes particulières.

Suite

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